M. Jean-François Husson, rapporteur spécial

II. ANALYSE PAR PROGRAMME

Le programme 791 retrace la dépense résultant de l'application du bonus alors que le programme 792 porte celle relative au super-bonus.

A. LE PROGRAMME 791 « CONTRIBUTION AU FINANCEMENT DE L'ATTRIBUTION D'AIDES À L'ACQUISITION DE VÉHICULES PROPRES »

214,5 millions d'euros d'AE et de CP sont prévus pour 2015. Cette dotation est ainsi en baisse de 20 % par rapport à 2014.

Comme indiqué précédemment, diverses modifications sont ainsi proposées à partir du 1 er janvier 2015, à savoir :

- la suppression des bonus pour les moteurs thermiques ;

- le maintien du bonus maximal en faveur des véhicules électriques (diffusant des émissions inférieures à 20g de CO 2 par km) et des véhicules hybrides rechargeables (diffusant des émissions comprises entre 21g/km et 60g/km) aux niveaux de 2004, soit respectivement 6 300 euros et 4 000 euros ;

- la diminution du bonus moyen versé en faveur des véhicules hybrides à 1 500 euros.

Les prévisions de dépenses reposent sur des hypothèses de vente de 49 000 véhicules hybrides, 1 904 véhicules hybrides rechargeables et 18 900 véhicules électriques.

La maquette de performance du programme change également cette année. En effet, un indicateur unique relatif à l'évolution des émissions moyennes de CO 2 des véhicules neufs remplace celui, jusqu'alors en vigueur, qui retraçait les parts des véhicules soumis au malus ou bénéficiaires du bonus.

B. LE PROGRAMME 792 « CONTRIBUTION AU FINANCEMENT DE L'ATTRIBUTION D'AIDES AU RETRAIT DE VÉHICULES POLLUANTS »

La dotation du programme 792 connaît une augmentation exponentielle en 2015 pour s'établir à 28 millions d'euros , soit 16,5 fois la dotation de l'année passée (1,6 million d'euros).

Une telle hausse traduit la récente annonce de la modification de la fonction assignée au super bonus, conformément aux dispositions du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte en cours d'examen par le Parlement 48 ( * ) et aux annonces du ministre de l'économie.

L'indicateur de performance du programme demeure, quant à lui, inchangé par rapport à celui de l'an passé et repose sur le nombre de véhicules bénéficiaires d'aides au retrait de véhicules polluants.

III. UNE EFFICACITÉ DISCUTABLE

A. UNE DIMINUTION DES ÉMISSIONS DE CO2 CONSTATÉE

Le projet annuel de performances du compte d'affectation spéciale (CAS) rappelle que le dispositif bonus/malus écologique contribue aux objectifs fixés par le Grenelle de l'environnement en matière de réduction des émissions de CO 2 .

En effet, la baisse de ces émissions de 20 %, afin de les ramener à leur niveau de 1990, constitue un principe de la politique durable des transports dont les bases ont été jetées à cette occasion.

Force est ainsi de constater que ce dispositif écologique a motivé les constructeurs automobiles à proposer de nouvelles gammes aux consommateurs qui soient davantage respectueuses de l'environnement. En effet, les émissions moyennes des véhicules neufs sont passées de 149 grammes de CO 2 par kilomètre en 2007 à 114 grammes en 2014, soit une baisse en sept ans de près de 23,4 %.

L'adaptation de l'offre des constructeurs s'inscrit également en conformité avec le Règlement européen n° 443/2009 49 ( * ) et les normes Euro 6 en vigueur depuis septembre 2014. Le dispositif français semble avoir contribué à l'accélération des mutations nécessaires des constructeurs.

Un tel constat ne vaut pas pour autant satisfecit. En effet, d'autres pollutions d'origine automobile, parmi lesquelles les particules fines et l'émission de dérivés oxydés de l'azote (NO X ), ne sont que faiblement impactées par le dispositif de bonus/malus. Cette carence appelle une réflexion sur l'élaboration d'outils adéquats pour réduire ces sources de pollutions particulièrement nocives pour la santé.

B. DES EFFETS ÉCONOMIQUES CONTROVERSÉS

Le bonus/malus n'a pas été conçu comme un outil de soutien à la filière automobile . Il apparaît néanmoins légitime d'observer ses conséquences sur les ventes de véhicules et le comportement des consommateurs puisque dispositif repose pour partie sur des projections de ventes d'automobiles.

Or, cette observation demeure complexe, en raison des nombreux paramètres qui expliquent la diffusion de CO 2 /km parcouru.

En effet, comme le souligne l'INSEE dans une étude de 2012, « pour pouvoir apprécier l'impact de la mesure, il est important d'évaluer ses différents effets. Ainsi, à court terme, dans le cas où l'effet sur les ventes totales est positif, l'accroissement induit de la production de véhicules augmentera les émissions de CO 2 . En effet, la construction de voitures est fortement émettrice de CO 2 . D'après les estimations de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME), la production de véhicules occasionne l'émission de 5,5 tonnes de CO 2 par tonne de véhicules. Si par ailleurs le parc automobile augmente, le surcroît de véhicules en circulation entraîne mécaniquement davantage d'émissions » 50 ( * ) .

A court terme, le barème de 2008 semble avoir contribué à l'accroissement des émissions de CO 2 , en stimulant la production et la vente de véhicules neufs . Cependant, l'évaluation de son effet, à plus long terme, demeure dépendante des hypothèses de consommation et d'élasticité-prix retenues, et ce, dans un contexte technologique et règlementaire fluctuant .


* 48 Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la transition énergétique pour la croissance verte, enregistré à la Présidence du Sénat le 14 octobre 2014.

* 49 Règlement européen n°443/2009 du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 établissant des normes de performance d'émissions pour les voitures particulières neuves dans le cadre de l'approche intégrée de la Communauté visant à réduire les émissions de CO 2 des véhicules légers. A cet égard, ce règlement fixe qu'à partir de 2020, le niveau d'émission de CO 2 par automobile neuve doit être réduit à 95g de CO 2 /km.

* 50 Pauline Givord et Xavier d'Haultfeuille, Le bonus/malus écologique : éléments d'évaluation, division Marchés et stratégies d'entreprise, Insee, 2012