M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial

II. UN MODÈLE ÉCONOMIQUE EN DIFFICULTÉ

A. UN BESOIN D'INVESTISSEMENTS DANS LES ANNÉES À VENIR

Lors de son audition par votre rapporteur spécial, le président de Météo-France a mis en avant sa volonté de « rehausser la courbe de l'investissement à partir de 2017 ». En effet, l'activité de prévision devient de plus en plus intensive en capital et repose sur des technologies de calcul de plus en plus puissantes . Ainsi, le Royaume-Uni s'est récemment doté d'un supercalculateur, quinze fois plus puissant que celui actuellement en service à Météo-France, pour un montant de 120 millions d'euros.

Or, dans les années à venir, les recherches sur le climat vont nécessiter de disposer de modèles informatiques permettant à la fois d'établir des prévisions sur le long terme (vingt ans) et sur des zones géographiques précises.

Si Météo-France veut maintenir son rang, il sera donc contraint d'investir, compliquant un peu plus son équation budgétaire. En effet, les efforts sur les dépenses de fonctionnement apparaissent déjà importants.

La fermeture de nouveaux centres régionaux pourra être étudiée à partir de 2018 mais il est peu probable que cette nouvelle réorganisation, si elle devait être décidée, conduirait à des économies aussi importantes que celle en cours. En revanche, compte tenu de son poids au sein du budget, la réduction de la dépense de personnel doit être poursuivie.

B. LA NÉCESSITÉ DE CONSOLIDER LES RECETTES PROPRES DE L'ÉTABLISSEMENT

Face à la diminution de la dotation de l'État, il est apparaît urgent que Météo-France puisse consolider ses ressources propres , à savoir la redevance en tant que prestataire à la navigation aérienne et ses ressources commerciales.

S'agissant du service rendu à la navigation aérienne, les réponses au questionnaire budgétaire soulignent que « le contexte est également marqué par la proposition réglementaire "CUE2+" initiée par la Commission Européenne, qui crée une menace pour Météo-France du fait d'une volonté de mise en concurrence des prestataires météorologiques pour la navigation aérienne, et qui doit donner lieu à une réponse concertée pour démontrer des progrès sans nécessité de mise en concurrence ».

D'après les dernières informations transmises à votre rapporteur spécial, il semblerait que les négociations en cours avec les principaux États-membres conduisent à ne pas retenir cette proposition de la Commission européenne. Entendu par votre rapporteur, le président de Météo-France a estimé que l'établissement doit veiller à faire des efforts de productivité en direction des compagnies aériennes . Il a toutefois jugé que l'ouverture à la concurrence ne constituait pas la bonne méthode compte tenu des enjeux de sécurité liés à la navigation aérienne.

En tout état de cause, cette ressource apparaît essentielle au budget de Météo-France, mais n'apparaît pas dynamique en termes de produit .

S'agissant des recettes commerciales, Météo-France est confronté à une concurrence importante . S'il est producteur de données brutes, les règles applicables aux données publiques l'obligent à les mettre à disposition gratuitement. Ainsi, de nombreux concurrents utilisent ces données brutes, qui sont retraitées puis revendues.

Les réponses aux questionnaires budgétaires rappellent que, « en 2013, les recettes commerciales de Météo-France ont atteint 35,9 millions d'euros, selon une trajectoire en ligne avec l'objectif, mais en baisse de 7 % par rapport à 2012, dans un contexte de concurrence croissante et de banalisation de l'information météorologique. Cette décroissance résulte de la baisse structurelle des recettes du kiosque téléphonique (baisse de 19 % des appelants en un an), bien que moins sévère que prévue. Les ventes directes sont en léger repli, tandis que les recettes publicitaires sont en légère augmentation, et que les ventes en ligne progressent de plus de 7 %. Pour soutenir son activité commerciale et répondre au mieux aux attentes des clients, Météo-France a opéré des évolutions dans la gestion commerciale, et a profondément renouvelé en 2013 son site internet et son application mobile, avec des actions pour favoriser le développement de l'offre commerciale en ligne. Enfin, de nouvelles offres commerciales ont été lancées ».

Au total, Météo-France présente le paradoxe de disposer d'une expertise reconnue au niveau international et, par conséquent, pour la production de données en amont, mais se retrouve dépassé par ses concurrents pour l'exploitation et la diffusion de celles-ci en aval . Il est vrai qu'il s'agit de deux métiers différents et que l'opérateur reste avant tout un établissement public administratif et non pas à caractère industriel et commercial.

Or le marché apparaît vaste puisque, d'après Météo-France, 40 % des entreprises seraient « météo-sensibles ». Le contrat d'objectifs et de performance qui sera négocié courant 2015 pour une application à partir de 2016 devra mettre l'accent sur l'augmentation des ressources commerciales de Météo-France .