M. Jacques GENEST, rapporteur spécial

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

Les recettes du compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale » sont évaluées à 377 millions d'euros en 2015 . Les problèmes de paiement rencontrés en 2012 ne se sont pas reproduits depuis, mais la vigilance doit rester de mise en la matière.

Si les actions de renforcement et de sécurisation doivent bien demeurer des axes prioritaires pour les missions du FACÉ, il convient de réviser progressivement à la hausse la part des travaux d 'extension et d' enfouissement.

Le mécanisme de répartition des charges et des produits entre les communes rurales et les communes urbaines doit rester identique.

Enfin, alors que le taux d'aide est aujourd'hui uniforme, une réflexion est à engager sur la variation des taux d'aide selon les collectivités et la nature des travaux.

En application de l'article 49 de la LOLF, pour le retour des réponses du Gouvernement aux questionnaires budgétaires concernant le présent projet de loi de finances, la date limite était fixée au 10 octobre 2014 .

À cette date, votre rapporteur spécial avait reçu l'ensemble des réponses pour le compte d'affectation spéciale (CAS) « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale » (FACÉ).

L'article 7 de la loi n° 2011-1978 de finances rectificative pour 2011 du 28 décembre 2011, a en effet créé le compte d'affectation spéciale (CAS), en reprenant l'acronyme de « FACÉ », mais en changeant la signification - « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale » au lieu de « Fonds d'amortissement des charges d'électrification », structure créée dès 1936.

Notre collègue Frédérique Espagnac, précédente rapporteure spéciale, a conduit en 2012, au nom de la commission des finances, un contrôle budgétaire sur l'utilisation des aides aux collectivités pour l'électrification rurale , en application de l'article 57 de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) 1 ( * ) . Elle a eu l'occasion, dans ce cadre, d'approfondir l' histoire du dispositif, de sa réforme et du fonctionnement de ce nouveau compte d'affectation spéciale .

I. UNE MISSION AU SERVICE DES TRAVAUX D'ÉLECTRIFICATION EN ZONE RURALE

A. DES AIDES DÉPARTEMENTALISÉES DESTINÉES AUX AUTORITÉS ORGANISATRICES DE LA DISTRIBUTION PUBLIQUE D'ÉLECTRICITÉ

Les aides financières consenties par le FACÉ sont réparties par département sous forme de dotations affectées à l'électrification rurale 2 ( * ) . Cette répartition s'effectue, selon des critères précisés par voie d'arrêté, par le ministre chargé de l'énergie, après avis du conseil du FACÉ . Puis, sur la base des propositions présentées par les collectivités, la répartition de ces dotations est effectuée sur un plan départemental entre les collectivités territoriales ou leurs groupements et les maîtres d'ouvrage des travaux d'électrification rurale pouvant bénéficier des participations du fonds.

Il est à noter que lorsqu'il existe, dans un département, un établissement public de coopération constitué dans le domaine de l'électricité et réunissant tous les maîtres d'ouvrage pouvant bénéficier des participations du CAS-FACÉ, la répartition des dotations de ce fonds est alors réglée par cet établissement public .

Le regroupement des « autorités organisatrices de la distribution publique d'électricité » ou AODE (qui peuvent être des communes ou des établissements publics de coopération intercommunale, en particulier des syndicats d'électrification), et donc de la maîtrise d'ouvrage, au niveau départemental, a été mis en place par le législateur (article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales). Il a nettement progressé au cours des dernières années 3 ( * ) . Trois cas doivent être distingués :

- le regroupement des AODE, y compris de la maîtrise d'ouvrage, est réalisé au niveau départemental : il y a un seul bénéficiaire des aides du FACÉ par département ;

- le regroupement des AODE est effectif au niveau départemental, mais pas le regroupement de la maîtrise d'ouvrage : il y a alors plusieurs bénéficiaires par département ;

- l'absence de regroupement des AODE et de la maîtrise d'ouvrage est constatée : il y a dans ce cas également plusieurs bénéficiaires par département.

Le système du CAS-FACÉ intervient donc en faveur des AODE qui, ayant conservé en zone rurale la maîtrise d'ouvrage, entreprennent elles-mêmes des travaux sur les réseaux de distribution d'électricité .

Aux termes de l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales, le FACÉ participe au financement :

- de travaux d'électrification rurale dont la maîtrise d'ouvrage est assurée par les collectivités territoriales et leurs établissements publics de coopération en matière de distribution publique d'électricité et de gaz ;

- d'opérations de maîtrise de la demande d'électricité ou de production d'énergie par les énergies renouvelables dont la maîtrise d'ouvrage est assurée dans les mêmes conditions, si ces opérations permettent d'éviter des extensions ou des renforcements de réseaux ;

- d'installations de production de proximité à la double condition que ces installations évitent l'extension ou le renforcement des réseaux et qu'elles se situent dans des zones non interconnectées au réseau métropolitain.

Ces aides sont principalement utilisées pour financer des dépenses de renforcement et de sécurisation de réseaux , ainsi que des dépenses liées à l'environnement, avec l'enfouissement des lignes en particulier .

B. UN FINANCEMENT QUI REPOSE IN FINE SUR LE CONSOMMATEUR

Le financement du CAS-FACÉ repose sur une contribution due par les gestionnaires de réseaux de distribution , mais ce coût est, in fine , imputé sur le consommateur d'électricité . Certes, d'un point de vue formel, conformément à l'article L. 222-31 du code général des collectivités territoriales, les contributeurs sont les gestionnaires de réseaux de distribution, essentiellement Électricité Réseau Distribution France (ERDF). Les taux de leur contribution sont calculés de manière à couvrir exactement les AE et CP prévus pour l'année N , soit une contribution attendue à hauteur de 377 millions d'euros en 2015 .

Les taux, fixés par un arrêté du ministre chargé de l'énergie en date du 30 juillet 2014, sont ainsi les suivants (en centimes d'euros par kWh distribué) :

- 0,035119 en zone rurale ;

- et 0,175593 en zone urbaine .

Outre-mer, une règle spécifique s'applique : le taux est celui des zones rurales, à l'exception des douze plus grosses communes de ces territoires qui, elles, sont soumises au taux des zones urbaines 4 ( * ) .

En moyenne, ce régime conduit à un niveau de 32 millions d'euros de recettes mensuelles . Mais le rythme de perception peut conduire à un profil d'exécution variable selon les mois de l'année .

Ces taux pourraient être revus en 2015 en fonction de la couverture nécessaire en AE et en CP.

C. BILAN DE L'EXÉCUTION EN 2013 ET 2014

Votre rapporteur spécial retient du contrôle précité conduit par notre collègue Frédérique Espagnac, précédente rapporteure spéciale, que la réforme du FACÉ en 2012 a nécessité la reprise, par les services de l'Etat, de la gestion des aides à l'électrification rurale, auparavant exercée au sein d'EDF par ses personnels 5 ( * ) . Surtout, notre collègue avait indiqué que « l'année 2012 n'a pas été le moment d'une transition tranquille : d'importantes difficultés sont en effet apparues en matière de paiement des aides. Les factures à payer au titre du CAS-FACÉ se sont alors accumulées, le plus souvent en raison de facteurs techniques et de procédures complexes. Face à ces difficultés, l'administration aurait utilement tiré profit d'une meilleure anticipation de la réforme » . Ainsi, sur la totalité des crédits prévus en 2012, soit 377 millions d'euros, et avec un niveau de recettes réellement perçues proche sur 2012 (près de 370 millions d'euros) , seuls 39 millions d'euros de CP ont été effectivement payés au titre d'AE 2012 . Pour mémoire, 202 millions d'euros de CP ont également été décaissés sur cet exercice, mais au titre d'engagements pris avant 2012. Au total, il convient de relever que la consommation des CP s'est élevée à 241 millions d'euros en 2012.

Votre rapporteur spécial se félicite que la situation se soit normalisée en 2013 avec à la fin de l'exercice, une consommation des crédits qui s'élève à 403,90 millions d'euros en AE dont 68,20 millions d'euros au titre des reports de 2012 et en CP 347,74 millions d'euros dont la plupart correspondent à des programmes des années antérieures (seuls 43,87 millions d'euros de CP résultent d'engagements 2013 effectivement engagés).

Les recettes du CAS-FACÉ se sont élevées à 374,3 millions d'euros à la fin de l'année 2013 et ont engendré un même montant d'autorisations d'engagement. Ce montant de recettes doit être rapproché du montant des reports de 2012 sur 2013, qui se sont élevés à 66,5 millions d'euros en AE et 126,1 millions d'euros en CP. Au total, et en dépit de ce haut niveau de reports sur 2013, la sous-consommation totale des crédits a été nettement plus faible en 2013 (70 %) qu'elle ne l'a été en 2012 (64 %).

Sur les huit premiers mois de l'exercice 2014 , environ 40 % des AE et des CP du compte ont été consommés , ce qui se traduit dans les tableaux suivants, avec un niveau de 160 millions d'euros de crédits consommés en AE comme en CP.

Consommation des AE au 31 août 2014

(en millions d'euros)

Prog. 793

Prog. 794

Total

AE avant 2014

32,11

-0

32,11

AE 2014

126,58

*

-0

126,58

Fonctionnement

0,06

-0

0,06

Total

158,75

-

158,75

Consommation des CP au 31 août 2014

(en euros)

Prog. 793

Prog. 794

Total

AE avant 2014

152,24

0,91

153,15

AE 2014

7,54

*

-

7,54

Fonctionnement

0,94

-

0,94

Total

160,72

0,91

161,63

Source : ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie

Dans ces conditions, votre rapporteur spécial invite le Gouvernement à veiller au bon déroulement de l'exécution 2014 ainsi qu'à procéder aux paiements en retard dans les délais les plus brefs .

Il invite également les AODE à déposer leurs demande de subvention dans les délais prévus , accompagnées des justificatifs idoines.


* 1 Article 57 de la LOLF : « Les commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat chargées des finances suivent et contrôlent l'exécution des lois de finances et procèdent à l'évaluation de toute question relative aux finances publiques. Cette mission est confiée à leur président, à leur rapporteur général ainsi que, dans leurs domaines d'attributions, à leurs rapporteurs spéciaux et chaque année, pour un objet et une durée déterminés, à un ou plusieurs membres d'une de ces commissions obligatoirement désignés par elle à cet effet » .

* 2 Conformément à l'article L. 3232-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT).

* 3 En 2014, la départementalisation est quasiment achevée. Seuls six départements (la Corrèze, la Côte d'or, l'Isère, la Manche, le Nord et l'Oise) n'ont pas pu faire aboutir ce regroupement pour des raisons liées à des circonstances locales.

* 4 Les Abymes, Basse-Terre, Pointe-à-Pitre et Saint-Claude dans le département de la Guadeloupe ; Cayenne dans le département de la Guyane ; Fort-de-France, Schoelcher et Trinité dans le département de la Martinique ; Le Port, Saint-Denis et Saint-Pierre dans le département de La Réunion ; Mamoudzou dans le département de Mayotte.

* 5 Les services chargés du financement de l'électrification rurale relèvent ainsi, depuis 2012, du ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et sont placés sous l'autorité du directeur général de l'énergie et du climat (DGEC). Ces équipes sont composées d'anciens agents du FACÉ, mis à disposition du ministère dans le cadre d'une convention avec EDF. Les locaux précédemment occupés, situés au 12 rue de Berri à Paris, ont également été conservés.