Mme Michèle ANDRÉ, rapporteure spéciale

II. LES ASSEMBLÉES PARLEMENTAIRES

Les dotations versées à l'Assemblée nationale et au Sénat sont de nouveau « gelées » dans le cadre du projet de loi de finances pour 2015. Ainsi, les crédits dédiés aux assemblées s'élèveraient à 841 474 600 euros , comme en 2014. La stabilisation en euros courants de leurs dotations décidée par les deux Chambres est associée à la réalisation d'efforts en dépenses, notamment afin d'absorber la hausse tendancielle de leurs charges.

À cet égard, il convient de rappeler que, conformément à l'article 7 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires 5 ( * ) , « chaque assemblée parlementaire jouit de l'autonomie financière » ; en conséquence, les « crédits nécessaires au fonctionnement des assemblées parlementaires font l'objet de propositions préparées par les questeurs de chaque assemblée et arrêtées par une commission commune composée des questeurs des deux assemblées ». Cette commission délibère sous la présidence d'un président de chambre de la Cour des comptes.

A. L'ASSEMBLÉE NATIONALE

1. Stabilité de la dotation de l'État et recul des dépenses

Si la dotation de l'État à l'Assemblée nationale demeure à son niveau de 2014, soit 517 890 000 euros, les dépenses de la première chambre reculeraient de 0,16 % , passant de 537 824 766 euros à 536 951 980 euros. Cette évolution résulterait d'une nette diminution des dépenses d'investissement, de 1 407 000 euros (- 7,06 %), partiellement contrebalancée par une hausse des dépenses de fonctionnement de 534 214 euros (+ 0,10 %), liée au transfert à l'Assemblée nationale de la gestion financière de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST). Il faut relever que les charges de fonctionnement intègrent une provision pour dépenses imprévues de 2 293 000 euros destinée à couvrir le coût potentiel d'une activité parlementaire plus soutenue que prévu.

Tableau n° 4 : Évolution des charges et ressources de l'Assemblée nationale

(en euros)

Source : annexe « Pouvoirs publics » au projet de loi de finances pour 2015

En tout état de cause, bien qu'un accroissement des charges de personnel de 0,78 % soit prévu en 2015, les charges de rémunération devraient, elles, reculer de 0,03 %. En effet, les rémunérations de base
- traitement et indemnité de législature - des personnels statutaires reculeraient de 1,12 %, pour s'établir à 75 790 000 euros
. Sous l'hypothèse d'un nouveau gel du point d'indice de la fonction publique en 2015, cette évolution traduirait essentiellement la poursuite de la réduction des effectifs, permise par un remplacement partiel des départs en retraite : les effectifs ont été réduits de 5,83 % entre janvier 2011 et janvier 2014 . Toutefois, les indemnités de travaux supplémentaires, corrélées au volume de l'activité parlementaire, sont prévues en hausse de 6,58 %, atteignant 23 794 000 euros. En outre, les crédits destinés aux personnels contractuels de l'Assemblée, d'un montant de 8 815 600 euros, sont en hausse de 3,40 % et les charges de sécurité et de prévoyance progresseraient de 3,17 %, pour s'établir à 48 536 000 euros.

Les crédits d'achats de biens et fournitures diminuent de 4,75 %, s'élevant à 7 648 000 euros, du fait des mesures prises pour réduire la consommation d'énergie des bâtiments. Les crédits au titre des services extérieurs sont, quant à eux, évalués à 34 068 310 euros, progressant de 1,97 % ; ceux-ci tiennent compte de l'effet des clauses d'indexation inscrites dans les contrats de nettoyage passés avec les sociétés prestataires.

Enfin, s'agissant toujours de la section de fonctionnement, les charges parlementaires, qui comprennent les indemnités parlementaires ou encore les frais de secrétariat, sont en diminution de 1 094 708 euros
(- 0,37 %)
, pour s'établir à 294 211 577 euros. Cette évolution traduit :

- la stabilité des indemnités parlementaires (+ 0,02 %) ;

- le recul des charges sociales , qui correspondent à la couverture sociale et au financement des pensions versées aux anciens députés, de 2 755 755 euros (- 4,34 %), qui résulte de la diminution du nombre de pensionnés, traditionnellement observée entre chaque renouvellement ;

- l'augmentation des frais de secrétariat parlementaire de 1 313 469 euros (+ 0,81 %). Ces crédits incluent les charges d'indemnité représentative de frais de mandat (IRFM), dont le montant a été réduit depuis 2013 au profit d'une augmentation du plafond individuel du « crédit collaborateur ». L'annexe « Pouvoirs publics » précise que les « dépenses de rémunération des collaborateurs, et les charges sociales associées, devraient continuer à augmenter en 2015 (+ 1,27 %), sous l'effet notamment de la prime d'ancienneté, pour atteindre 112,01 millions d'euros » ;

- le léger recul des autres charges (- 0,21 %), découlant de la diminution des crédits pour frais de voyage (- 0,74 %), qui s'établiraient à 8 354 000 euros, et des charges de représentation de l'Assemblée (- 0,82 %), d'un montant de 5 331 472 euros.

Pour finir, concernant la section d'investissement, en recul de 7,06 % en 2015 - pour atteindre 18 525 193 euros -, la dotation pour dépenses imprévues de 3 544 393 euros est reconduite, dans la perspective de travaux de rénovation et d'étanchéité de la Cour d'Honneur, qui ne pourront être engagés que si la coupure parlementaire de l'été est suffisamment longue. Par ailleurs, l'annexe « Pouvoirs publics » indique que les « dépenses d'immobilisations corporelles, soit 12 261 000 €, diminuent de 10,39 %. Parmi celles-ci, les dépenses de construction sont prévues en recul de 13,74 % à 9 178 000 €. Elles concerneront la réfection de la toiture des Pas-Perdus, la poursuite de la restauration des murs d'enceinte de l'Hémicycle, mais aussi la réfection des installations audiovisuelles et la poursuite des travaux de mise en conformité et d'accessibilité des locaux » ; de même, les « dépenses d'immobilisations incorporelles, soit 1 842 800 €, diminuent de 6,46 % et suivent le rythme de mise en oeuvre du schéma directeur informatique 2013-2015 ».

2. La diminution des ressources de l'Assemblée nationale

Les ressources diverses de l'Assemblée nationale sont évaluées à 4 237 000 euros, en recul de 167 800 (- 3,81 %) par rapport aux prévisions de 2014, et ce « alors même qu'elles intègrent pour 2015 le versement de la quote-part du Sénat aux dépenses de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques pour 200 000 € ». La principale recette courante correspond au produit des redevances qui sont mises à la charge des deux fonds de sécurité sociale depuis 2009, pour 1 960 000 euros (+ 2,62 %). Il est également indiqué que la « baisse globale des recettes prévue en 2015 résulte en bonne partie du recul attendu des reversements d'IRFM à la fin du mandat, le budget 2014 ayant intégré l'effet des élections sénatoriales sur les départs de députés ».

Enfin, compte tenu de la stabilité du montant de la dotation de l'État à l'Assemblée nationale (517 890 000 euros), du niveau prévisionnel des produits courants (4 237 000 euros) et des anticipations de dépenses, pour 536 951 980 euros, l'équilibre du budget de l'exercice 2015 est permis par un prélèvement sur les disponibilités financières de la première chambre d'un montant de 14 824 908 euros , proche de celui prévu au titre du budget 2014.

B. LE SÉNAT

Le montant de la dotation de l'État au Sénat au titre de l'exercice 2015 demeure également à son niveau de 2014 , soit à 323 584 600 euros. Ainsi que le rappelle l'annexe « Pouvoirs publics », cette stabilisation de la dotation « correspond à une diminution en volume de 1,5 % en retenant l'hypothèse d'inflation estimée pour l'exercice prochain ». Aussi le Sénat poursuit-il les efforts engagés à compter de 2008 , la dotation de l'État ayant été stable en euros courants entre 2008 et 2011, réduite de 1,25 % en 2012, pour atteindre un niveau resté inchangé depuis lors.

Au total, si la dotation de l'État sera stable entre 2014 et 2015, le budget du Sénat diminuerait de 3,46 % en 2015 .

1. Une baisse substantielle des dépenses du Sénat en 2015

En effet, les dépenses du Sénat s'élèveraient à 340 212 540 euros en 2015, en recul de 3,46 % par rapport à 2014 . Les dépenses de fonctionnement diminueraient de 1,13 %, pour s'établir à 329 586 540 euros, et celles d'investissement reculeraient de 44,21 %, atteignant 10 626 000 euros.

Tableau n° 5 : Évolution des charges et ressources du Sénat

(en euros)

Source : annexe « Pouvoirs publics » au projet de loi de finances pour 2015

a) Action 01 « Sénat »

Cette baisse est plus prononcée encore si l'on considère isolément les dépenses inhérentes à la mission institutionnelle du Sénat . Ces dépenses marqueraient un recul de 3,81 %, soit de 12 950 580 euros, du fait de la diminution tant des charges de fonctionnement (- 1,24 %) que de celles d'investissement (- 48,29 %). La baisse des dépenses de fonctionnement résulte essentiellement du « retour à la normale » qui sera constaté au lendemain des élections sénatoriales de 2014. Celles-ci sont, en effet, à l'origine de dépenses supplémentaires engendrées par le renouvellement sénatorial, en raison du versement de diverses indemnités de fin de contrat et de licenciement aux collaborateurs des sénateurs non réélus. De même, les importantes opérations d'investissement engagées en 2012, portant sur la transformation en bureaux et en salles de réunion de l'immeuble du 77, rue Bonaparte ainsi que sur la restructuration et la mise aux normes d'accessibilité du 64, boulevard Saint-Michel, doivent s'achever en 2015, expliquant que les dépenses d'investissement passent de 18 532 500 euros en 2014 à 9 583 500 euros en 2015.

Ces différents éléments ne doivent, toutefois, pas conduire à occulter les efforts de gestion réalisés par le Sénat qui permettent, notamment :

- la stabilité des crédits relatifs aux indemnités versées aux sénateurs (+ 0,08 %), qui s'établissent à 31 155 100 euros ;

- une diminution des dépenses de traitement du personnel titulaire, stagiaire, contractuel et temporaire de 0,27 %, pour s'établir à 102 313 700 euros, résultant en particulier de la réduction des effectifs dédiés aux missions institutionnelles du Sénat - de 1 026 emplois budgétaires en 2014 à 1 016 en 2015 - ainsi que de la mise en extinction de certaines primes ;

- la stabilité des autres aides à l'exercice du mandat de parlementaire (dotation de fonctionnement et de bureautique, indemnité représentative de frais de mandat, remboursement des frais d'hébergement à Paris de certains sénateurs).

En outre, le renouvellement sénatorial de septembre 2014, devrait aboutir à une hausse des charges de sécurité sociale, de prévoyance et de pension et accessoires de pension des sénateurs (+ 6,48 %), s'établissant à 14 027 300 euros, en raison de l'augmentation prévisible du nombre de sénateurs pensionnés. De même, l'accroissement du nombre de bénéficiaires devrait conduire à un relèvement des charges de sécurité sociale, de prévoyance et de pension et accessoires de pension des personnels (+ 3,94 %), s'élevant à 22 272 360 euros.

b) Action 02 « Jardin du Luxembourg »

Les dépenses liées au Jardin du Luxembourg, quant à elles, augmentent de 745 200 euros (+ 6,14 %). Cette évolution est essentiellement portée par deux opérations d'investissement dans le Jardin : la rénovation du chauffage des serres, pour 1 116 000 euros (dont 530 000 euros en 2015), et la restauration de la fontaine Médicis, pour 1 392 000 euros (dont 100 000 euros en 2015).

c) Action 03 « Musée du Luxembourg »

Les dépenses prévisionnelles du Musée du Luxembourg s'élèvent à 153 000 euros en 2015, contre 150 000 euros en 2014 . Pour autant, ce poste demeure profitable pour le Sénat, dès lors qu'il serait associé à des produits d'un montant de 249 000 euros - correspondant, pour 235 000 euros, à la redevance d'exploitation versée par la Réunion des musées nationaux (RMN) et, pour 14 000 euros, au remboursement par la RMN de la TVA décaissée par le Sénat à l'occasion des travaux conduits en 2015. D'ailleurs, le Musée du Luxembourg ne bénéficie aucunement de la dotation versée par l'État.

2. La diminution des ressources du Sénat

Les produits du Sénat s'élèveraient à 5 027 600 euros en 2015, en recul de 365 500 euros (- 6,78 %) par rapport à 2014 . Ceci s'explique principalement, d'une part, par le fait que l'exercice 2014 a intégré, de manière exceptionnelle, un produit de 425 000 euros lié au changement du mode de gestion des groupes interparlementaires d'amitié et, d'autre part, par le transfert à l'Assemblée nationale de la gestion financière de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST), cette dernière ne versant donc plus de contribution à ce titre. Les produits du Jardin du Luxembourg et du Musée du Luxembourg devraient, additionnés, augmenter de près de 61 000 euros.

Par suite, compte tenu de la stabilité du montant de la dotation de l'État au Sénat (323 584 600 euros), du niveau prévisionnel des ressources propres (5 027 600 euros) et des anticipations de dépenses, pour 340 212 540 euros, l'équilibre du budget de l'exercice 2015 est permis par un prélèvement sur les disponibilités financières de la Haute assemblée d'un montant de 11 600 340 euros , inférieur de près moitié à celui prévu en 2014 en raison, notamment, de la baisse des charges du Sénat.

C. LA CHAÎNE PARLEMENTAIRE

1. La Chaîne parlementaire-Assemblée nationale

Le projet de budget pour 2015 de LCP-AN prévoit une dotation de 16 641 162 euros, identique à celle de 2014 . Cette dotation couvrirait 98,69 % du budget, le reste des dépenses, qui s'élèveraient au total à 16 862 600 euros, en baisse de 0,45 %, seraient financées par les reversements de Public-Sénat (80 000 euros) et les produits financiers (55 000 euros) ou divers (18 000 euros), ainsi que par une reprise sur provision d'exercices antérieurs (40 000 euros).

2. Public-Sénat

La dotation demandée par Public-Sénat au titre de l'exercice 2015 s'élève à 18 848 000 euros, en hausse de 1,5 % par rapport à 2014 . Cette augmentation résulte de la mise en oeuvre du contrat d'objectif et de moyen (COM) pour 2013-2015, signé en décembre 2012, qui prévoit une stabilisation de la dotation en euros constants, avec une inflation estimée à 1,5 % en 2015.

La dotation serait complétée des produits d'exploitation (240 000 euros) et des produits financiers (20 000 euros).


* 5 Ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires.