Mme Michèle ANDRÉ, rapporteure spéciale

II. LES ASSEMBLÉES PARLEMENTAIRES

Les dotations consacrées à l'Assemblée nationale et au Sénat sont de nouveau « gelées » dans le cadre du projet de loi de finances pour 2017. Ainsi, les crédits dédiés aux assemblées s'élèveraient à 841 474 600 euros , comme en 2016, et ce malgré un accroissement des charges résultant, notamment, du renouvellement total ou partiel des deux chambres en 2017. Cette stabilisation en euros courants des dotations n'a été permise, compte tenu de la hausse « mécanique » des charges et de leur sursaut ponctuel en année électorale, que grâce aux efforts en dépenses significatifs engagés au cours de la période passée.

À titre de rappel, comme cela a été indiqué en préambule du présent rapport, conformément à l'article 7 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, « chaque assemblée parlementaire jouit de l'autonomie financière » ; par conséquent, les « crédits nécessaires au fonctionnement des assemblées parlementaires font l'objet de propositions préparées par les questeurs de chaque assemblée et arrêtées par une commission commune composée des questeurs des deux assemblées ». Cette commission délibère sous la présidence d'un président de chambre de la Cour des comptes.

A. L'ASSEMBLÉE NATIONALE

1. Une stabilité de la dotation en dépit d'une hausse des charges

Au titre de l'année 2017, l'Assemblée nationale s'astreint à maintenir inchangé le niveau de la dotation demandée, soit 517 890 000 euros, en dépit d' une hausse de 8,95 % des charges assumées par la première chambre . En effet, ces dernières représenteraient 584 762 398 euros, en augmentation de 48 043 480 euros, et ce pour deux raisons principales :

- le renouvellement général de l'Assemblée nationale , qui entraîne des dépenses supplémentaires sur plusieurs postes : les indemnités versées aux collaborateurs de députés non réélus, les charges de pensions, les charges inhérentes aux équipements mobiliers informatiques, etc. Le surcoût total est estimé à 37 793 502 euros, « sur la base d'un taux de renouvellement des députés fixé de manière conventionnelle à 50 % ». En particulier, parmi les charges parlementaires , les frais de secrétariat parlementaire croîtraient de 26 805 413 euros (+ 16,20 %) du fait des coûts inhérents à la rupture des contrats de députés en fin de mandat : « indemnité de licenciement, indemnité de précarité, indemnité de préavis, salaires versés pendant la procédure de licenciement [...] et indemnité compensatrice de congés payés » ;

- la mise en oeuvre d'un programme important de travaux durant la suspension des travaux parlementaires qui doit intervenir au cours de la campagne des élections législatives. Ainsi le budget d'investissement est-il doublé par rapport à 2016, atteignant 35 114 300 euros. Dans ce cadre, trois opérations d'ampleur seraient engagées, pour 12 785 000 euros ; seraient concernés « la réfection de l'étanchéité de la Cour d'Honneur, le confortement de l'emmarchement situé sous la colonnade du Palais-Bourbon et la rénovation des locaux de la Vice-Présidence ». Il s'agit, en effet, de travaux qui pourraient difficilement être réalisés en dehors des périodes de suspension des travaux parlementaires sans constituer une gêne pour le bon fonctionnement de l'institution. Quoi qu'il en soit, hors dépenses exceptionnelles, les dépenses d'investissement représenteraient 19 879 800 euros en 2017, soit un niveau proche de celui inscrit dans le budget 2016, qui était de 19 289 239 euros.

Tableau n° 4 : Évolution des charges et ressources de l'Assemblée nationale

(en euros)

Source : annexe « Pouvoirs publics » au projet de loi de finances pour 2017

Après avoir reculé de 0,76 % en 2016, les charges de personnel devraient progresser de 2,21 % en 2017, soit de 3 862 650 euros . En particulier, les rémunérations des personnels statutaires augmenteraient de 2 334 200 euros (+ 2,06 %), dans un contexte marqué par la hausse du point d'indice de la fonction publique et l'accroissement des indemnités versées au titre des travaux supplémentaires - les années d'élections présidentielle et législatives se caractérisant, généralement, par un surcroît significatif d'activité des assemblées parlementaires. En outre, les rémunérations versées aux contractuels marqueraient une progression de 1 385 450 euros (+ 13,8 %) par rapport à 2016 du fait, d'une part, des revalorisations salariales et des recrutements intervenus en 2015 et, d'autre part, du coût prévisible « lié à la rupture des contrats des personnels contractuels, en particulier ceux affectés à la Présidence et auprès des personnalités ».

Les crédits d'achats de biens et fournitures augmentent de 0,9 %, s'élevant à 7 738 300 euros, du fait notamment « de l'acquisition en 2017 de nouveaux postes téléphoniques dans la perspective du déploiement de la technologie IP à l'Assemblée ». Les crédits au titre des services extérieurs sont, quant à eux, évalués à 32 009 500 euros, en baisse de 3,41 % ; ceux-ci tiennent compte des baisses prévues parmi « les charges de location, les dépenses de subventions et assimilées, les personnels extérieurs, les honoraires, les crédits de production audiovisuelle, les frais de mission et de transport du personnel, et les frais postaux et de télécommunication ».

2. L'augmentation des ressources de l'Assemblée nationale

Les ressources diverses de l'Assemblée nationale sont évaluées à 4 087 250 euros, en augmentation de 216 250 euros (+ 5,59 %) par rapport aux prévisions de 2016 :

- les ventes de marchandises et autres produits devraient s'élever à 172 000 euros, diminuant de 26 000 euros par rapport à 2016 ;

- la vente de documents et de publications représenterait 28 000 euros, contre 31 000 euros en 2016 ;

- les autres produits de gestion courant sont évalués à 3 717 250 euros et marqueraient, ainsi, une augmentation de 260 250 euros (+ 7,5 %) par rapport à 2016.

Enfin, compte tenu de la stabilité du montant de la dotation de l'État à l'Assemblée nationale (517 890 000 euros), du niveau prévisionnel des produits courants (4 087 250 euros) et des anticipations de dépenses, pour 584 762 398 euros, l'équilibre du budget de l'exercice 2017 est permis par un prélèvement sur les disponibilités financières de la première chambre d'un montant de 62 785 148 euros , en très nette augmentation par rapport au budget 2016, où il s'élevait à 14 957 918 euros.

B. LE SÉNAT

Le montant de la dotation de l'État au Sénat au titre de l'exercice 2017 demeure également à son niveau de 2016 , soit à 323 584 600 euros, alors que l'exercice à venir serait marqué par un renouvellement partiel de la haute assemblée, généralement associé à un surcroît de dépenses. Aussi le Sénat poursuit-il les efforts engagés à compter de 2008 , la dotation de l'État ayant été stable en euros courants entre 2008 et 2011, réduite de 1,25 % en 2012, pour atteindre un niveau resté inchangé depuis lors.

Si la dotation de l'État sera stable entre 2016 et 2017, les dépenses inscrites au budget du Sénat augmenteraient de 9,23 % en 2017 .

1. Une hausse exceptionnelle des dépenses en 2017

En effet, après avoir enregistré un net recul en 2016, les dépenses du Sénat s'élèveraient à 363 204 664 euros en 2017, en augmentation de 30 679 754 euros par rapport à 2016 . Cette évolution serait portée par les coûts inhérents au renouvellement partiel du Sénat , estimés à 5,3 millions d'euros, et à l'engagement d'importants travaux au cours de l'année à venir , expliquant la hausse de 25 431 800 euros du budget d'investissement.

Tableau n° 5 : Évolution des charges et ressources du Sénat

(en euros)

Source : annexe « Pouvoirs publics » au projet de loi de finances pour 2017

a) Action 01 « Sénat »

Les dépenses inhérentes au fonctionnement institutionnel du Sénat s'élèveraient, en 2017, à 350 904 164 euros , en augmentation de 31 300 854 euros (+ 9,79 %). Comme cela a été indiqué, cette évolution résulterait, tout d'abord, du surcoût inhérent au renouvellement partiel de la haute assemblée, estimé à 5,3 millions d'euros . Ce surcoût concernerait, principalement, les dépenses liées au mandat parlementaire, qui s'élèveraient à 150 094 000 euros en 2017, soit 3,4 % de plus qu'en 2016. Celles-ci comprennent :

- les indemnités des sénateurs (31 417 400 euros), qui croîtraient de 1,5 % « du fait de l'augmentation du point d'indice et de la hausse prévue des allocations de retour à l'emploi au profit de sénateurs non reconduits en 2017 » ;

- les charges de sécurité sociale et de prévoyance pour les sénateurs (11 751 400 euros), qui connaîtraient une légère progression en 2017, également de 1,5 %, « sous l'effet à la fois de la hausse du point d'indice et de l'augmentation prévisible du nombre de sénateurs pensionnés au dernier trimestre, à l'issue du renouvellement partiel de 2017 » ;

- les aides à l'exercice du mandat parlementaire (106 925 200 euros), qui constitue le poste qui augmente le plus sensiblement, soit de 4,2 %, notamment en raison de l'accroissement de la dotation versée à l'Association pour la gestion des assistants de sénateurs (AGAS), lié à « l'augmentation du point d'indice et surtout [au] renouvellement qui entraîne le versement d'indemnités de fin de contrat et de licenciement aux collaborateurs de sénateurs non réélus ».

La hausse du budget consacré aux missions institutionnelles du Sénat découlerait, par ailleurs, de « l'engagement de plusieurs opérations lourdes durant cet exercice : notamment la relocalisation de la direction de l'architecture, du patrimoine et des jardins (DAPJ) accompagnée de la création d'un restaurant libre-service (10,8 M€ sur l'exercice), réhabilitation des bureaux des 26 et 36, rue de Vaugirard (8 M€ sur l'exercice), transformation de l'ancienne chapelle en salle de réunion multimédia (2,5 M€) ». Au total, les charges d'investissement s'élèveraient, en 2017, à 33 984 000 euros , en hausse de 25 881 800 euros par rapport à 2016.

En outre, les dépenses de rémunération des personnels reculeraient de 0,51 % en 2017 , pour s'établir à 99 195 200 euros. Cette évolution s'expliquerait essentiellement par le recul des crédits de rémunération des personnels titulaires (- 0,92 %), « les effets de la hausse du point d'indice étant contrebalancés par ceux de la suppression de 7 postes et par les ajustements liés à l'existence de postes temporairement non pourvus »

b) Action 02 « Jardin du Luxembourg »

Les dépenses liées au Jardin du Luxembourg, quant à elles, reculent de 589 700 euros (- 4,61 %) , pour atteindre 12 211 900 euros en 2017. Cette baisse résulte « d'une stabilisation (- 0,6 %) des dépenses de fonctionnement grâce à une baisse de la masse indiciaire et d'une forte réduction (- 43,15 %) des investissements », conséquente à l'achèvement, en 2016, de la rénovation du chauffage des serres. Par ailleurs, il est précisé qu'« à l'instar de la pratique désormais consacrée au sein de l'action institutionnelle, une réserve de 150 000 € sera constituée pour la première fois en 2017 en vue de couvrir d'éventuelles dépenses urgentes (sécurité) ».

c) Action 03 « Musée du Luxembourg »

Les dépenses prévisionnelles du Musée du Luxembourg s'élèvent à 88 600 euros en 2017, contre 120 000 euros en 2016 . Il convient de relever que ce poste demeure profitable pour le Sénat, dès lors qu'il serait associé à des produits d'un montant de 250 000 euros - comprenant, notamment, la redevance d'exploitation de 235 000 euros versée par la Réunion des musées nationaux (RMN). D'ailleurs, le Musée du Luxembourg ne bénéficie aucunement de la dotation versée par l'État.

2. Une forte augmentation des recettes du Sénat

Les produits du Sénat s'élèveraient à 10 320 600 euros en 2017, en hausse de 5 275 400 euros (+ 104,56 %) par rapport à 2016 . Cette augmentation prévisionnelle des produits est justifiée, notamment, par l'attente d'une recette exceptionnelle provenant de la vente de deux appartements situés rue Garancière, évaluée, « sur la base de l'estimation de France Domaine, à 5 250 000 € ».

Par suite, compte tenu de la stabilité du montant de la dotation de l'État au Sénat (323 584 600 euros), du niveau prévisionnel des ressources propres (10 320 600 euros) et des anticipations de dépenses, pour 363 204 664 euros, l'équilibre du budget de l'exercice 2017 est permis par un prélèvement sur les disponibilités financières de la haute assemblée d'un montant de 29 299 464 euros , supérieur de 652,21 % à celui prévu en 2016.

C. LA CHAÎNE PARLEMENTAIRE

1. La Chaîne parlementaire-Assemblée nationale

Le projet de budget pour 2017 de LCP-AN prévoit une dotation de 16 641 162 euros, identique à celle de 2016 , conformément au contrat d'objectifs et de moyens pour la période 2016-2018. Cette dotation couvrirait l'intégralité des dépenses de la chaîne, qui s'élèveraient à 16 085 506 euros , en baisse de 4,9 % par rapport à 2016 ; le budget est, par ailleurs, complété par des ressources propres, d'un montant de 380 000 euros en 2017, contre une prévision de 270 000 euros en 2016.

2. Public-Sénat

La dotation demandée par Public-Sénat au titre de l'exercice 2017 afficherait, pour la première fois, une diminution de 3,19 % par rapport à 2016 , pour s'établir à 18 246 000 euros. Cette baisse intervient en application du contrat d'objectifs et de moyens signé le 10 décembre 2015 pour la période 2016-2018 ; par ailleurs, il est prévu une nouvelle réduction de la dotation, à 18 046 000 euros, en 2018 (- 1,10 %).

La réduction de la dotation serait permise par une diminution des dépenses de diffusion ; en effet, il est précisé qu'« en lien avec LCP-AN, qui partage le même canal de diffusion, les contrats de diffusion ont été renégociés au premier semestre 2016 : aux termes du contrat signé en avril 2016 avec le nouveau multiplex SMR6, le coût de diffusion devrait décroître sensiblement, de 4 550 000 € en 2015 à 3 725 000 € en 2017 ». En revanche, le coût de grille - soit celui des droits de diffusion utilisés - et les frais généraux seraient stabilisés, alors que les dépenses de communication continueraient à progresser de 2,8 % en 2017.

Enfin, les prévisions budgétaires intègrent une augmentation des produits d'exploitation, « qui devraient passer de 240 000 € en 2015 à 647 000 € en 2016 et se maintenir au même niveau en 2017 (652 000 €) ».