M. Jacques GENEST, rapporteur spécial

TROISIÈME PARTIE
LE FINANCEMENT DE LA VIE POLITIQUE ET LES MOYENS GÉNÉRAUX DU MINISTÈRE DE L'INTÉRIEUR

I. LE FINANCEMENT DE LA VIE POLITIQUE

A. LE BUDGET D'UNE ANNÉE SANS RENDEZ-VOUS ÉLECTORAL SIGNIFICATIF SUR LE PLAN FINANCIER

1. Un retour à des bases budgétaires de temps électoral calme

Les crédits du programme 232 baissent de 344,2 millions d'euros, cette baisse touchant particulièrement l'action du programme consacrée aux élections (- 344,6 millions d'euros). Une partie du budget de 2018 supportera un reliquat du coût des scrutins de 2017, dont la totalité des besoins n'avait pas été budgétée dans la loi de finances pour 2017.

Évolution des crédits du programme 232
(2017-2018)

Ouverts en LFI pour 2017

Demandés pour 2018

Évolution 2018-2017

Action 01 - Financement des partis

68,7

68,7

0

Action 02 - Organisation des élections

391,2

46,6

- 344,60

Action 03 - Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques

7,0

7,6

0,60

Action 04 - Cultes

3,0

2,8

- 0,20

Action 05 - Vie associative

0,10

0,089

- 0,04

Total programme 232

470,0

125,8

- 344,20

Source : projet annuel de performances 2018

La programmation pour 2018 est marquée par l'hypothèse d'une économie de 0,7 million d'euros correspondant à dématérialisation de l'envoi de la propagande électorale dans le cadre des scrutins organisés en 2018. De la même manière, la programmation à long terme de la mission se fonde sur une économie de 414,3 millions d'euros de même origine pour la période de 2018 à 2022. Or, le Parlement a systématiquement rejeté ces mesures, considérant qu'elles portraient atteinte à la sincérité des scrutins.

Sur ce point les informations fournies à votre rapporteur spécial comportent quelques éléments de contradiction. D'un côté, elles insistent sur les inconvénients de la propagande sous forme papier. Il est indiqué que le coût prévisionnel de l'élection du Président de la République est de 218,1 millions d'euros et celui des élections législatives est de 199,4 millions d'euros. Pour ces élections, les dépenses liées à la propagande électorale (mise sous pli, acheminement au domicile de l'électeur, remboursement aux candidats) représentent respectivement 61 % et 55 % du coût total de l'élection.

Concernant l'externalisation de la mise sous pli, le Gouvernement observe que peu de sociétés ont une capacité logistique suffisante pour traiter les documents de propagande dans des délais très contraints, particulièrement lorsqu'il n'y a qu'une semaine entre les deux tours de scrutin. Pour les élections organisées en 2017, seule une dizaine de prestataires différents ont été retenus sur l'ensemble du territoire métropolitain et la même société a été retenue par 50 % des préfectures ayant recours à une externalisation.

Ces prestataires n'investissent plus sur le segment de la propagande électorale. Le parc machine est vieillissant (impression, mise sous pli, etc.) et n'est plus rentabilisé par d'autres travaux, en raison de la dématérialisation globale du circuit papier. Les clients de ces entreprises (journaux, vente par correspondance, etc.) ont, en effet, dématérialisé leurs envois. La rentabilité des opérations électorales - certes importante mais ponctuelle - ne justifie plus des investissements dans les outils.

Pour autant, pour les élections présidentielles et législatives de 2017, plus de 70 % des préfectures ont opté pour une externalisation de la mise sous pli de la propagande électorale à un prestataire privé sans que, pour l'élection présidentielle, les plis de propagande adressés aux électeurs aient subi des difficultés notables. Le ministère observe toutefois que pour les élections législatives, le traitement de la propagande des candidats a connu une avarie sur le site d'un prestataire où étaient confectionnés les plis de propagande de certains départements des régions Auvergne-Rhône-Alpes et d'Occitanie. Certains électeurs n'ont pas reçu leur pli de propagande à temps.

Votre rapporteur spécial n'en tire pas le sentiment que la propagande soit appelée à disparaître, préférant mettre l'accent sur la perspective d'une amélioration du suivi des électeurs, qu'il conviendra cependant de vérifier au cours des prochaines années. À la suite d'un rapport de l'inspection générale de l'administration de 2014 qui estimait que 500 000 électeurs (1,1 % des inscrits) étaient concernés par de mauvaises inscriptions, trois lois ont été adoptées le 1 er août 2016 en vue de rénover les modalités d'inscription sur les listes électorales grâce à la création d'un répertoire électoral unique. Ce dispositif, opérationnel avant le 31 décembre 2019, sera financé à hauteur de 0,6 million d'euros sur le programme 232, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2018.

2. Le financement des partis politiques entre inertie et volatilité

Le régime applicable à l'aide publique aux partis et groupements politiques est défini par les articles 8 à 10 de la loi du 11 mars 1988.

Le montant global des crédits inscrits à cet effet dans la loi de finances de l'année est divisé en deux fractions égales :

- une première fraction répartie entre des partis et groupements politiques en fonction de leurs résultats lors du dernier renouvellement général de l'Assemblée nationale ;

- une seconde fraction spécifiquement répartie entre les partis et groupements politiques représentés à l'Assemblée nationale et au Sénat.

Pour l'année 2018, un montant de 68,67 millions d'euros est inscrit. Cette enveloppe est stable en valeur depuis plusieurs années.

Évolution de la dotation prévue au titre du subventionnement
des partis politiques (2008-2018)

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat

Conformément à l'article 9 de la loi du 11 mars 1988, modifié par la loi n° 2014-873 du 4 août 2014, la première fraction de l'aide publique est attribuée :

- soit aux partis et groupements politiques qui ont présenté lors du plus récent renouvellement de l'Assemblée nationale des candidats ayant obtenu chacun au moins 1 % des suffrages exprimés dans au moins cinquante circonscriptions ;

- soit aux partis et groupements politiques qui n'ont présenté des candidats lors du plus récent renouvellement de l'Assemblée nationale que dans un ou plusieurs départements d'outre-mer, ou à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française ou dans les îles Wallis et Futuna et dont les candidats ont obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés dans l'ensemble des circonscriptions dans lesquelles ils se sont présentés.

La répartition de cette première fraction de l'aide publique s'effectue proportionnellement au nombre des suffrages obtenus lors du dernier renouvellement de l'Assemblée nationale par les candidats se réclamant de ces partis.

Concrètement, le mécanisme repose sur un principe déclaratif organisé comme suit.

En vue d'effectuer la répartition de cette première fraction, les candidats à l'élection législative ont indiqué, s'il y avait lieu, dans leur déclaration de candidature, le parti ou groupement politique auquel ils se rattachaient.

Le troisième jeudi précédant le premier tour au plus tard, les partis ou groupements politiques ont déposé au ministère de l'intérieur, en vue de bénéficier de la première fraction des aides prévues à l'article 8 de la loi du 11 mars 1988 susvisée relative à la transparence financière de la vie politique, la liste complète des candidats qu'ils présentaient aux élections législatives

L'attribution de la totalité de la première fraction de l'aide publique est conditionnée au respect du principe de parité (art. 9-1 de la loi du 11 mars 1988).

Ainsi, lorsque, pour un parti ou un groupement politique, l'écart entre le nombre de candidats de chaque sexe rattaché au parti dépasse 2 % du nombre total de ces candidats, le montant de la première fraction qui lui est attribué est diminué d'un pourcentage égal à 150 % de cet écart rapporté au nombre total de ces candidats.

Par ailleurs, pour bénéficier de l'aide publique, les partis doivent avoir respecté les obligations comptables prévues à l'article 11-7 de la loi du 11 mars 1988 précitée.

La seconde fraction de l'aide publique est attribuée aux partis et groupements politiques bénéficiaires de la première fraction, proportionnellement au nombre de députés et de sénateurs qui ont déclaré au bureau de leur assemblée, au cours du mois de novembre de chaque année, y être inscrits ou s'y rattacher.

Chaque parlementaire ne peut indiquer être inscrit ou rattaché à ce titre qu'à un seul parti ou groupement.

En réponse au questionnaire du rapporteur spécial de la commission des finances, le ministère de l'intérieur a fait la réponse, décevante, suivante :

« À ce stade, il manque trop d'informations pour présenter une répartition de l'aide publique de 2018. Le décret est attendu pour la fin de mois de mai 2018 . À cette date, le ministère disposera des éléments nécessaires pour finaliser le calcul, c'est-à-dire :

- le respect des obligations comptables par les partis politiques ;

- les suffrages décomptés en application de l'article L.O. 128 du code électoral ;

- le renouvellement du Sénat et le rattachement des parlementaires pour la seconde fraction de l'aide publique au mois de novembre 2017 » .

Votre rapporteur spécial rappelle les éléments de répartition observés ces dernières années (voir l'annexe n° 1 au présent rapport). Il en ressort que les partis politiques se sont vus attribuer une fraction globalement stables des subventions financées par le programme. Par contraste, les résultats des élections législatives du mois de juin 2017 devraient entraîner de profondes modifications.

La sensibilité du financement de partis politiques qui, pour nombre d'entre eux, sont inscrits dans l'histoire politique et parlementaire longue du pays, à des évènements politiques dont la pérennité n'a par définition pas été démontrée peut être considérée comme excessive au regard de la réalité de structures politiques auxquelles l'histoire a conféré une forme de consécration.

Compte tenu d'une certaine volatilité de l'opinion publique, il pourrait être envisagé de lisser des évolutions ponctuelles en introduisant une troisième fraction dans l'enveloppe de financement des formations politiques.

Par ailleurs, votre rapporteur spécial observe que la consommation des crédits est fréquemment en-deçà des dotations ouvertes en lois de finances du fait de l'application des sanctions pour défaut de respect des règles concernant la parité. Ainsi, pour l'année 2016, dernière année d'exécution complète d'une loi de finances, celles-ci ont entraîné une sous consommation des crédits ouverts de 5,651 millions d'euros, soit plus de 8 % des ouvertures de crédits de la loi de finances pour 2016.

B. LES MOYENS DE LA COMMISSION NATIONALE DES COMPTES DE CAMPAGNE ET DES FINANCEMENTS POLITIQUES

Les dispositifs adoptés en 2017 au titre de la confiance dans la vie politique comportent des charges supplémentaires pour la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) dont les effets restent encore limités à ce jour mais pourraient devenir plus conséquents à mesure que les dispositions de la loi seront appropriées par la commission. Ainsi, si actuellement, la mise en oeuvre de la loi pour la confiance dans la vie politique ne conduit qu'à envisager le recrutement de 4 ETPT, cette prévision pourrait devoir être dépassée .

Les principales dispositions susceptibles d'exercer des effets
sur la charge de travail de la CNCCFP

Contrôle du financement des partis politiques

L'article 25-I-12° de la loi pour la confiance dans la vie politique a sensiblement modifié l'obligation de publicité des comptes des partis politiques. Ainsi, à compter de l'exercice 2018 (comptes déposés au 1 er semestre 2019), la publication des comptes annuels des partis politiques devra comporter «le montant consolidé des emprunts souscrits, répartis par catégorie de prêteur et types de prêts, ainsi que l'identité des prêteurs personnes morales et les flux financiers nets avec les candidats ». En outre, la mention du caractère sommaire de cette publication a été supprimée de l'article 11-7 de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988.

Cette publication nécessitera la collecte et l'analyse d'un nombre beaucoup plus important d'informations par les agents de la commission.

Les articles 25-I-6° et 25-I-13° de la loi pour la confiance dans la vie politique dispose que, désormais, seul le mandataire (personne physique ou association de financement) peut percevoir des ressources pour le parti, et non seulement les dons de personnes physiques.

Par suite, la problématique des standards minimaux de présentation et de format des justificatifs de recettes va se renforcer dès lors que l'ensemble des ressources devra transiter sur le compte bancaire du mandataire.

Il faudra notamment pouvoir distinguer sans difficulté les dons et les cotisations ouvrant droit à réduction d'impôt des autres recettes. Sans la mise en place d'une présentation standardisée minimale des pièces justificatives, le contrôle par la commission du respect des règles de perception des dons et cotisations serait très difficile.

Selon la réponse transmise à votre rapporteur spécial, « la charge de travail va être considérablement accrue sans impact sensible sur l'efficacité réelle du contrôle ».

En application des dispositions de l'article 25-I-12° de la loi précitée, modifiant l'article 11-7 de la loi 88-227 du 11 mars 1988, le périmètre des comptes d'ensemble des partis devra désormais inclure obligatoirement les comptes de leurs organisations territoriales dans des conditions ultérieurement définies par décret.

Au regard du décret et de la définition du périmètre comptable retenue, le contrôle du respect des obligations comptables ainsi que la publication des comptes par la commission induiront une charge de travail supplémentaire importante.

La révision des articles 11-3-1 et 11-4 de la loi du 11 mars 1988 issus par la loi pour la confiance dans la vie politique prévoit un strict encadrement des prêts consentis aux partis politique par des personnes physiques ou morales.

Les nouvelles dispositions de la loi pour la confiance dans la vie politique concernant les prêts induiront un travail d'instruction très conséquent. En effet le pôle parti politique devra s'assurer que les termes de la loi et du contrat de prêt sont bien respectés. L'état de remboursement des prêts devra en outre être suivi par les services de la commission pendant 5 années maximum.

Contrôle des comptes de campagne

- L'article 4 de la loi n° 2017-286 6 mars 2017 ainsi que le 5° de l'article 26 de la loi pour la confiance dans la vie politique ont sensiblement modifié l'obligation de publicité des comptes de campagne.

Ainsi, l'article L. 52-12 modifié du code électoral, aux termes duquel la commission doit assurer la publication des comptes de campagne prévoit que pour les élections qui se dérouleront postérieurement au 31 décembre 2017, cette publication, d'une part, devra comporter les « montants consolidés des emprunts souscrits par le candidat ou le candidat tête de liste [...] , répartis par catégorie de prêteur et types de prêts, et pays d'établissement ou de résidence des prêteurs, ainsi que l'identité des prêteurs personnes morales » et, d'autre part, ne sera plus effectuée dans une forme simplifiée. La commission devra également assurer cette publication dans un standard ouvert, aisément réutilisable et exploitable par un système de traitement automatisé.

Ces dispositions nécessiteront une modification de l'application informatique sur laquelle les rapporteurs auprès de la commission saisissent les informations déclarées par le candidat dans le compte et ses annexes et induiront un lourd travail de mise en forme, par le service des systèmes d'informations et de la sécurité lors de la publication.

- L'article 26 I-1° de la loi pour la confiance dans la vie politique prévoit un strict encadrement des prêts consentis à des candidats par des personnes physiques pour le financement de leur campagne. Cet article prévoit qu'un décret en Conseil d'État précise « les conditions d'encadrement du prêt pour garantir que ce prêt ne constitue pas un don déguisé ».

Par suite, dans le cas où ledit décret prévoirait un contrôle, en aval de la décision de la commission, de l'exécution du remboursement de ces prêts, ce contrôle induirait une charge de travail supplémentaire importante. En effet les services de la commission devront s'assurer que les termes de la loi et du contrat de prêt sont bien respectés. L'état de remboursement des prêts devra en outre être suivi par les services de la commission pendant 5 années maximum, la loi imposant aux candidats de communiquer l'état du remboursement des prêts chaque année.

Source : commission des finances du Sénat d'après la réponse au questionnaire du rapporteur spécial

Il faut en effet ajouter que d'ores et déjà, les moyens réservés à la commission ne lui permettent pas de s'assurer de la légalité d'un certain nombre d'opérations de financement.

Ainsi, par exemple, pas plus que le mandataire, la commission n'a réellement la possibilité de vérifier si les conditions de résidence indiquées par un donateur ou un cotisant sont fidèles à la réalité.

Certes, la commission n'est pas une juridiction, ce que le Conseil constitutionnel ne manque jamais de rappeler. Pour autant, ses missions deviennent à l'évidence quasi-juridictionnelles, du moins au regard des investigations qu'elles nécessitent. Cet aspect de la commission se renforce d'ailleurs.

Ainsi, depuis la loi n° 2016-508 du 25 avril 2016 de modernisation de diverses règles applicables aux élections, l'article L. 52-14 du code électoral dispose que la CNCCFP peut « recourir à des experts à même d'évaluer les coûts des services et des prestations retracés dans les comptes de campagne et de l'assister dans l'exercice de sa mission de contrôle mentionnée à l'article 11-7 de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique ». Cette possibilité est actuellement mise en oeuvre à titre expérimental à l'occasion de l'examen des comptes des candidats à l'élection présidentielle de 2017.

De la même manière, s'agissant des partis politiques, la commission, qui n'a pas accès aux comptes détaillés des partis politiques, peut en revanche se livrer à des contrôles de cohérence et dispose d'un droit de communication. Et elle a estimé (rapport d'activité 1993-1994) qu'elle pouvait saisir des officiers de police judicaires en cas d'anomalie ou d'infraction en matière de financement, ou encore d'origine douteuse des fonds. Dans ce cadre, une saisine a eu lieu en 2017 concernant les comptes de trois partis politiques, l'instruction étant actuellement en cours.

En toute hypothèse, les conséquences budgétaires du renforcement du rôle de la commission par les dispositifs législatifs nouveaux ne ressortent pas de l'examen du projet de budget du programme 232 pour 2018.

II. UNE MAÎTRISE OPÉRATIONNELLE INSUFFISANTEDES CRÉDITS DU PROGRAMME 216

Les crédits du programme 216 s'inscrivent en légère baisse (- 0,5 %). Des évolutions importantes résultent de la baisse des dotations prévues au titre du fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD) tandis que, du fait de l'instauration de la commission du contentieux du stationnement payant (voir ci-dessus), les crédits d'État-major et de services centraux sont portés par un élan certain (+ 4,8 %). Votre rapporteur spécial a indiqué quelques incertitudes quant à la dynamique des crédits de personnel, qui totalisent plus de la moitié des dotations du fait des incertitudes sur quelques éléments de la politique salariale du Gouvernement.

Évolution des crédits du programme 216
(2017-2018)

Source : projet annuel de performances 2018

Par ailleurs, il renvoie aux observations détaillées du rapport sur les crédits de la mission présenté l'an dernier sur l'ampleur des moyens absorbés par le parc immobilier du ministère. Cette année encore, les crédits prévus à ce titre approchent les 150 millions d'euros, soit 16 % des dotations. Cette particularité de l'architecture des crédits du programme, combinée avec la place importante des dépenses des systèmes d'information contribuent à une certaine rigidité de la programmation budgétaire. Elle est tributaire d'un reste à payer très conséquent sur des opérations engagées les années antérieures. Il reste 1 137 millions d'euros de paiements à effectuer sur des autorisations d'engagement consommées dans le passé. Beaucoup de ces charges proviennent d'opérations de financement immobilier comportant des clauses de crédit-bail ou non.

Votre rapporteur spécial souligne le poids élevé des effectifs d'administration centrale. Avec 4 721 ETPT, leur nombre excède de beaucoup celui des effectifs déployés dans le réseau des sous-préfectures, et bien plus encore, celui qu'occupent les seules sous-préfectures de province.

Enfin, pour conclure ce préambule, force est de s'étonner de la considérable réduction des crédits du FIPD alors que l'année 2018 a été présentée comme devant marquer le début d'une nouvelle stratégie ambitieuse de prévention de la radicalisation et de la délinquance. Semblent se trouver actée la révision à la baisse du programme d'installation de centres de réinsertion et de déradicalisation, sans que le relais ne soit réellement organisé.

Votre rapporter spécial suivra avec beaucoup d'attention les suites réservées à ce qui, en l'état, apparaît comme une réduction des ambitions.

Il ne faudrait pas que la dérive une fois encore redoutée des dépenses de contentieux du ministère de l'intérieur exerce un effet d'éviction sur une action très sensible à tous points de vue, en particulier, par ses prolongements en termes de sécurité et d'équilibres sociaux. Ce serait d'autant moins justifié qu'il semble que le ministère de l'intérieur ne suive pas les meilleures pratiques dans la conduite des actions sociales destinées à ses propres agents.

A. UNE ACTION SOCIALE EN BUTTE À DE SÉVÈRES CRITIQUES

La Cour des comptes a consacré un chapitre de son rapport public de 2017 à l'action sociale du ministère de l'intérieur. Si celle-ci est financée par d'autres missions que la mission AGTE, les 40,2 millions d'euros du programme 216, auxquels l'on peut ajouter, au moins pour partie, les 8,7 millions d'euros inscrits au programme 307 relèvent des observations très critiques alors formulées.

Votre rapporteur spécial en rappelle quelques éléments. La Cour des comptes souligne d'abord que l'organisation de l'action sociale au sein du ministère de l'intérieur souffre de son émiettement et de son hétérogénéité (avec une pluralité de services centraux, des services locaux hétéroclites et une carte des organismes partenaires imprécise). Elle estime que la tutelle a été longtemps défaillante, consentant des mises à disposition gratuites injustifiées de locaux, de matériels et de personnels avec pour effet une gestion des organismes partenaires source de risques financiers et d'irrégularités. Elle met en cause avec une particulière sévérité la gestion de l'association nationale d'action sociale des personnels de la police nationale et du ministère de l'intérieur (l'ANAS), évoquant un « dérive particulièrement grave ».

Enfin, elle relève une efficacité contestable du fait notamment d'inégalités dans la délivrance des prestations.

Votre rapporteur spécial souligne en particulier la mention d'inégalités géographiques pour des résultats décevants par lesquelles en 2014, l'Île-de-France absorbait 67 % des crédits d'action sociale du ministère.

Les recommandations de la Cour des comptes sont les suivantes :

- revoir l'organisation de l'action sociale du ministère de l'intérieur ;

- redéfinir plus précisément les finalités de l'action sociale en s'appuyant sur une évaluation des besoins et des carences constatées et en veillant à prévenir les disparités entre agents se trouvant dans des situations comparables ;

- revoir les délégations de missions consenties aux organismes partenaires et assurer les conditions d'un véritable contrôle, à travers un dialogue de gestion structuré autour de conventions pluriannuelles d'objectifs et de moyens ;

- ajuster les concours financiers aux besoins réels des organismes partenaires ;

- mettre un terme aux mises à disposition de personnels et de moyens non justifiés.

Prenant bonne note des observations produites par le ministère de l'intérieur, votre rapporteur spécial s'attachera à suivre les prolongements donnés aux critiques très fortes de la Cour des comptes afin de pleinement mesurer leur signification pour les crédits d'action sociale inscrits dans les dotations de la mission.

B. DES DÉPENSES DE CONTENTIEUX À NOUVEAU SOUS-BUDGÉTÉES ?

1. Une programmation budgétaire fragile

Jusqu'en 2013, l'action 6 du programme 216 qui finance les frais de contentieux et les dépenses de protection des fonctionnaires était dotée en loi de finances initiale d'un budget annuel de près de 80 millions d'euros, montant qui a sensiblement diminué à partir de 2014. En particulier, les crédits avaient baissé de manière significative en 2016, de 23,7 % par rapport à 2015 pour être budgétés à hauteur de 49 millions d'euros.

Le rapporteur spécial de la commission des finances, notre collègue Hervé Marseille, avait jugé cette baisse inquiétante, rappelant que ces dépenses font l'objet d'une sous-budgétisation chronique . De fait, les dépenses de l'exercice ont atteint 84,1 millions d'euros.

Malgré une programmation initiale plus élevée, l'année 2017 devrait à nouveau voir les crédits initiaux (55 millions d'euros) largement insuffisants pour couvrir des dépenses estimées aujourd'hui à 144,6 millions d'euros (dont 30,2 millions de reports de l'année 2016 et 33,6 millions de contentieux exceptionnels).

C'est ainsi dans le contexte d'une sous-budgétisation chronique des dépenses de contentieux qu'il convient d'apprécier la hausse de la dotation demandée pour 2018 au titre de cette action .

Atteignant 45,4 %, l'augmentation des dotations prévues pour 2018 porterait ses moyens à 80 millions d'euros . Elle est ainsi calée sur l'hypothèse d'une absence de reports de charges de 2017 sur 2018, qui supposera que des moyens supplémentaires soient rendus disponibles d'ici la fin de l'année pour couvrir les impasses financières de 2017, et sur l'absence de nouveaux contentieux « exceptionnels » .

L'évaluation du besoin en matière de frais de contentieuxest, sans doute, délicate, compte tenu de la nature aléatoire de ces dépenses du fait du rythme d'examen des dossiers par les juridictions, d'évolutions de la jurisprudence et du caractère impondérable et contraint de certaines demandes (dommages liés aux attroupements et rassemblements ou aux dépenses en matière d'accidents de la circulation).

Le niveau de la dépense a subi depuis 2010 d'importantes fluctuations ainsi que le montre le graphique ci-après.

Évolution des dépenses contentieuses

Source : ministère de l'intérieur

En toute hypothèse , le montant des crédits inscrits pour 2018 reste inférieur au tendanciel (88 millions d'euros) établi sur la base de la moyenne des dépenses enregistrées ces trois dernières années, hors dossiers particuliers, et semble d'ores et déjà trop limité pour couvrir les besoins (voir infra ).

2. Les principales catégories de dépenses contentieuses illustrent la diversité des risques juridiques pesant sur le ministère de l'intérieur

Les principaux déterminants des dépenses contentieuses sont figurés dans le graphique ci-après.

Source : réponse au questionnaire budgétaire de votre rapporteur spécial

Les principaux postes recouvrent :

- des dépenses d'indemnisations liées aux refus de concours de la force publique, qui reste le premier poste de dépense contentieuse même si leur montant tend à baisser (25,84 millions d'euros en 2016 ; 22,60 millions d'euros exécutés au 31 août 2017 pour une prévision de 47,15 millions d'euros pour 2017 compte tenu d'un report de charges important de 2016 sur 2017) ;

- des dépenses en matière de protection fonctionnelle des fonctionnaires, composées d'honoraires d'avocats et des indemnisations versées aux fonctionnaires victimes en réparation des préjudices subis (12,41 millions d'euros en 2016 ; 9,87 millions d'euros au 31 août 2017 pour une prévision de 19,01 millions d'euros. Cette dépense reste soumise à des tensions assez fortes liées notamment à l'augmentation des demandes de protection fonctionnelle même si le coût par dossier est maîtrisé par la mise en place de bonnes pratiques (passation de conventions d'honoraires avec les avocats, expérimentation depuis 2015 de la protection fonctionnelle sans avocat dans deux secrétariats généraux du ministère de l'intérieur - SGAMI) ;

- des dépenses en matière de contentieux des étrangers, constituées principalement d'honoraires d'avocats représentant l'État devant les juridictions judiciaires et administratives et de frais irrépétibles (12,23 millions d'euros en 2016 ; 10,29 millions d'euros au 31 août 2017 pour une prévision de 18,6 millions d'euros). Selon les informations du ministère de l'intérieur, cette dépense peut être appelée à augmenter dans le contexte d'évolution des lois et règlements ;

- des dépenses en matière d'accident de la circulation (9,99 millions d'euros en 2016 ; 4,61 millions d'euros au 31 août 2017 pour une prévision de 9,4 millions d'euros). Cette dépense est globalement stabilisée malgré des contentieux à fort enjeu financier et une accidentalité importante des flottes opérationnelles du ministère de l'intérieur ;

- des dépenses relatives à la mise en cause de l'État dans le cadre d'attroupements (3,40 millions d'euros en 2016 ; 0,63 million d'euros au 31 août 2017 pour une prévision de 2,6 millions d'euros) : cette dépense est stabilisée mais les mouvements sociaux du printemps 2016 et ceux de la Guyane en 2017 laissent présager des dépenses plus importantes pour 2017 qui devraient exercer une forte pression sur les dotations prévues pour 2018 ;

- des dépenses pour les « autres mises en causes de l'État », ce poste pouvant, certaines années et sur un nombre restreint d'affaires, générer des dépenses importantes (20,22 millions d'euros en 2016 ; 3,32 millions d'euros au 31 août 2017 pour une prévision de 54,1 millions d'euros). Il convient de signaler l'impact important, en 2016, du contentieux d'un montant de 12,9 millions d'euros ayant opposé l'État à la métropole de Lyon au titre de la compensation de la suppression de la part « salaires » de la taxe professionnelle.

3. Une sous-budgétisation aux effets très condamnables

La sous-budgétisation des dépenses de contentieux n'est pas sans effets très condamnables.

L'exécution budgétaire, et jusqu'à la sincérité budgétaire même, s'en trouvent très altérées.

L'insuffisance des crédits contentieux votés en loi de finances initiale conduit, de manière récurrente, à une impasse budgétaire nécessitant des ouvertures de crédits en cours de gestion (mobilisation de la réserve de précaution, décret d'avance, loi de finances rectificative), opérations multiples aux fins de compléter la dotation initiale peu satisfaisante et ne permettant pas au demeurant à la démarche de performance mise en place par la DLPAJ de produire tous ses effets. Elle entraîne par ailleurs des difficultés importantes en termes de pilotage :

- elle engendre de la part de certaines unités opérationnelles (UO tels que les préfectures et SGAMI) un manque de sincérité dans la prévision budgétaire, les UO surestimant très largement leurs besoins sachant que la DLPAJ ne pourra leur déléguer qu'une fraction restreinte de l'enveloppe demandée ;

- elle oblige à des reports de charges importants d'un exercice budgétaire sur l'autre qui nuisent à la sincérité budgétaire de l'action (le report de charges est passé de 19,2 millions d'euros en 2016 à 30,2 millions d'euros en 2017), ainsi qu'en juge très ouvertement le ministère de l'intérieur dans sa réponse au questionnaire de votre rapporteur spécial.

Prolongeant son analyse, le ministère de l'intérieur abonde dans le sens des observations régulières de la commission des finances du Sénat en faisant valoir les dommages nombreux liés à la sous-budgétisation des dépenses de contentieux pour l'environnement du ministère de l'intérieur.

C'est ainsi que celui-ci mentionne les conséquences :

- sur l'exécution des décisions de justice puisqu'il faut parfois attendre plusieurs mois pour qu'un contentieux fasse l'objet d'un règlement, situation qui nuit à l'autorité de la chose jugée et, finalement, à la confiance des usagers du service public judiciaire ;

- sur la soutenabilité du programme lui-même puisque le défaut de disponibilité des crédits conduit au paiement d'intérêts moratoires ou de pénalités (liées par exemple aux astreintes décidées par le juge) et pénalise la conclusion de transactions amiables (en refus de concours de la force publique notamment) qui permettent à l'État d'éviter les frais et la durée des procédures juridictionnelles ;

- sur l'équilibre financier des créanciers du ministère de l'intérieur (cas de cabinets d'avocats notamment en protection fonctionnelle, fonctionnaires ou tiers blessés dans le cadre d'accidents de la circulation) ;

- sur la crédibilité des engagements pris par l'État , mais, plus largement, sur son autorité même.

4. Un ensemble de mesures correctrices aux suites encore aléatoires et qui ne doivent pas sacrifier certains principes
a) Une maquette de performances du projet annuel de performances qui ne renseigne qu'en partie sur les problèmes et les résultats

Un objectif d'optimisation de la fonction juridique du ministère figure au projet annuel de performances du programme 216. Il comprend un indicateur relatif au taux de réussite des services déconcentrés (préfectures et SGAMI) devant les juridictions administratives et judiciaires.

Votre rapporteur spécial s'interroge sur la significativité d'un indicateur qui compte au nombre des décisions gagnées aussi bien les rejets des demandes des administrés que leurs désistements et les annulations seulement partielles des positions de l'administration. Il relève par ailleurs le défaut d'information sur les suites des refus de concours de la force publique, qui sont évidemment souvent un élément important du problème.

Cet indicateur global se décline en deux sous-indicateurs :

- le taux de réussite pour le contentieux des étrangers devant les juridictions administratives et judiciaires, dont la cible pour 2018 a été fixée à 81 % sur la base des résultats de l'année 2016 et du premier trimestre 2017 ;

- le taux de réussite pour les autres contentieux, à l'exception des contentieux relatifs aux refus de concours de la force publique, devant les juridictions administratives et judiciaires, fixé à 79 % sur la base également des résultats de l'année 2016 et du premier trimestre 2017.

Les données recueillies pour 2016 montrent une forte hétérogénéité des performances contentieuses de l'administration selon la nature des dossiers mais aussi entre préfectures.

Taux de réussite de l'administration par grandes catégories de contentieux - année 2016

Source : ministère de l'intérieur

Le contentieux des étrangers est un contentieux de masse pour les préfectures : il représente chaque année plus de 90 % du contentieux traité par les préfectures et c'est dans ce domaine que l'administration obtient les meilleurs résultats.

S'agissant du contentieux dit « général » , pour lequel le taux de réussite de l'administration est moins bon, il recouvre :

- pour les préfectures, principalement les contentieux de la police administrative, de la sécurité routière et des élections ;

- pour les secrétariats généraux du ministère de l'intérieur (SGAMI), les contentieux des agents de la police nationale en première instance.

Enfin, le contentieux des attroupements est circonstanciel et peut être, en fonction des années, inférieur à 70 % de réussite pour l'ensemble du territoire.

En 2016, pour le seul contentieux général, 8 % des préfectures (enregistrant le plus souvent un contentieux très limité) ont un taux de réussite inférieur à 50 %, 72 % ont un taux de réussite compris entre 51 % et 75 %, et 20 % ont un taux de réussite supérieur à 75 %.Pour 2018, la cible a été fixée à 79 %.

b) Un plan de maîtrise et l'organisation de pôles régionaux d'appui qui n'ont pas encore donné de résultats probants

Afin d'assurer une meilleure maîtrise des dépenses contentieuses, un plan d'action a été lancé en 2014 par le ministère de l'intérieur. L'objectif principal consiste à renforcer le pilotage de stratégie contentieuse ainsi que l'expertise juridique dans les territoires n'a pas été atteint.

De nouvelles initiatives ont été annoncées pour 2017. Dans le cadre du plan préfectures nouvelle génération, la nécessité de renforcer l'expertise juridique des préfectures a été reconnue au titre des conclusions du groupe de travail ad hoc .

Une nouvelle organisation de la fonction juridique territoriale a été décidée. La constitution de huit pôles d'appui juridique , pilotés et animés par l'administration centrale du ministère a été annoncée. Jusqu'à présent, quatre d'entre eux ont été mis en place en matière de police administrative (2 pôles), de contentieux statutaire (1 pôle) et de concours de la force publique et responsabilité de l'État (1 pôle).

Deux pôles supplémentaires compétents en matière de police administrative (1 pôle situé à Lille) et concours de la force publique et responsabilité de l'État (1 pôle situé à Strasbourg) ont démarré au cours du mois de septembre.

Des besoins plus importants et immédiats ayant été identifiés en matière de police administrative et de sécurité routière, deux pôles d'appui dédiés étaient réputés devoir être mis en place au 1 er décembre 2016 à Dijon et à Orléans. Ils ne sont pas mentionnés dans le bilan réalisé par le ministère de l'intérieur du processus de renforcement de l'ingénierie juridique du ministère.

Votre rapporteur spécial remarque que ces initiatives, très juridiques, n'auront de réel impact sur les dépenses contentieuses que dans la mesure où, dès le stade conceptuel, auront été réunies les conditions d'une prévention des cas de responsabilité de l'action administrative .

En outre, force est de constater que les dispositions prises ont été principalement axées sur les échelons départementaux, en particulier sur ceux les moins pourvus en moyens qui, pour être les premiers opérationnels dans les territoires, ne recouvrent peut-être pas les problèmes les plus aigus.

Il faut rappeler que, de prime abord, il n'existe pas de relation mécanique entre le volume du contentieux traité par les préfectures et les succès obtenus au terme de laquelle une professionnalisation du contentieux devrait conduire à de meilleurs résultats dans les structures étoffées. C'est du moins le cas pour le contentieux des étrangers, la strate la plus fournie en affaires étant également celle qui obtient les moins bons taux de succès.

Taux de réussite en contentieux des étrangers
par strate de préfectures en 2016

Source : ministère de l'intérieur

De surcroît, si la contribution des structures d'appui peut être utile, leur dimensionnement d'emblée très modeste risque d'en limiter sérieusement l'efficacité. Ils sont décrits dans une circulaire du ministre de l'intérieur de décembre 2016 comme des « structures à la fois légères (5 agents dont un chef de pôle) et très spécialisées » appelées à proposer « une offre de services étendue » tout en n'étant accessible que selon des droits de tirage suivant une logique territoriale étroite et de rationnement.

La complexification des dossiers, les tensions sociales, certaines orientations délibérées peuvent en multiplier les occasions.

5. Des pratiques de gestion des nids à contentieux qui doivent prévenir toute entorse au principe d'égalité

Enfin votre rapporteur spécial ne peut manquer de s'interroger sur certains choix mis en oeuvre par le ministère de l'intérieur pour limiter les indemnisations dues au titre des refus de concours de la force publique .

Le ministère évoque le rôle du développement de « bonnes pratiques » dans la gestion des dossiers par les préfectures.

Votre rapporteur spécial peut facilement approuver certaines d'entre elles comme l'octroi du concours de la force publique plus systématique, le traitement à flux tendu des demandes de concours de la force publique, la réduction du délai de traitement des demandes amiables d'indemnisation.

Néanmoins, d'autres « bonnes pratiques » sont nettement plus contestables .

Ainsi en va-t-il de la mise en place auprès des bailleurs d'une procédure visant à obtenir des sursis de leur part sur les demandes de réquisition de la force publique pour interrompre la période d'indemnisation et du traitement en priorité des dossiers à fort enjeu financier qui établit une sorte de sélectivité par l'argent des interventions du ministère de l'intérieur sans doute justifiable financièrement mais très contraire au principe républicain d'égalité.