LOIS CONSTITUTIONNELLES, LEGISLATION, SUFFRAGE UNIVERSEL, REGLEMENT ET ADMINISTRATION GENERALE

Table des matières


- Présidence de M. Jacques Larché, président.

Nomination de rapporteurs

La commission a tout d'abord procédé à la nomination de rapporteurs sur les textes suivants :

- M. Jacques Larché pour le projet de loi constitutionnelle portant modification de l'article 6 de la Constitution (sous réserve de son dépôt par le Gouvernement) ;

- M. Paul Girod pour la proposition de loi constitutionnelle n° 329 (1999-2000) adoptée par l'Assemblée nationale visant à accorder ledroit devote et d'éligibilité aux élections municipales aux étrangers non ressortissants de l'Union européenne résidant en France ;

- M. Jean-Jacques Hyest pour la proposition de loi n° 2374(A.N. XIème législature) relative à la prolongation du mandat et à la date de renouvellement des conseils d'administration des services d'incendie et de secours.

Mission d'information à l'étranger - Communication

La commission a ensuite retenu le principe d'une mission d'information afin d'étudier le système politique, judiciaire et administratif du Maroc. Sous réserve de l'autorisation du Sénat, la délégation comprendrait, outre le président Jacques Larché, un représentant de chaque groupe politique.

Justice - Définition des délits non intentionnels - Examen du rapport en deuxième lecture

Puis, la commission a procédé à l'examen du rapport, en deuxième lecture, de M. Pierre Fauchon sur la proposition de loi n° 308 (1999-2000) modifiée par l'Assemblée nationale, tendant à préciser la définition des délits non intentionnels.

M. Pierre Fauchon, rapporteur, a tout d'abord rappelé que le Sénat avait adopté la proposition de loi dès le 27 janvier dans le cadre de son ordre du jour réservé. Il a précisé que le Gouvernement avait inscrit la proposition de loi à l'ordre du jour prioritaire de l'Assemblée nationale, qui lui avait apporté des modifications. Il a souligné que le Gouvernement avait ensuite inscrit la deuxième lecture à l'ordre du jour prioritaire du Sénat avant de retirer le texte en évoquant les inquiétudes de certaines associations de victimes, ainsi que le comportement d'une partie de l'opposition à l'Assemblée nationale. Il a indiqué que, dans ces conditions, la conférence des Présidents du Sénat avait pris l'initiative d'inscrire la proposition de loi dans le cadre de la séance mensuelle réservée.

Le rapporteur a souligné que sa proposition de loi avait pour objectif fondamental de mettre fin à la confusion entre la faute civile et la faute pénale d'imprudence, en donnant une définition spécifique de cette dernière. Il a fait valoir que le texte tendait, dans sa rédaction issue des travaux du Sénat en première lecture, à ne permettre la mise en jeu de la responsabilité pénale des personnes physiques pour des délits non intentionnels qu'en cas de violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de sécurité ou de prudence.

M. Pierre Fauchon, rapporteur, a toutefois souligné que le Sénat avait pris soin de préciser que cette exigence d'une faute caractérisée ne s'appliquerait qu'en cas de lien indirect entre la faute et le dommage afin d'éviter tout affaiblissement de la répression dans le domaine de la circulation routière. Il a observé que l'Assemblée nationale avait accepté le dispositif proposé par le Sénat tout en souhaitant préciser sa rédaction. Il a indiqué que l'Assemblée nationale avait souhaité donner une définition plus précise du lien indirect et qu'elle avait donc précisé que les auteurs indirects d'une infraction non intentionnelle étaient ceux " qui n'ont pas commis directement le dommage, mais qui ont créé la situation qui en est à l'origine ou n'ont pas pris les mesures permettant de l'éviter ".

Le rapporteur a ensuite souligné que l'Assemblée nationale avait souhaité également préciser la nature de la faute susceptible d'engager la responsabilité pénale en cas de lien indirect entre la faute et le dommage. Il a indiqué qu'elle avait prévu que la responsabilité pénale des personnes physiques continuerait à être engagée s'il était établi qu'elles ont " soit violé d'une façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, soit commis une faute d'une exceptionnelle gravité exposant autrui à un danger qu'elles ne pouvaient ignorer ".

Le rapporteur a estimé que cette formulation ne dénaturait en rien le texte adopté par le Sénat en première lecture et qu'il faudrait, pour que la responsabilité pénale soit engagée, à la fois une faute d'une exceptionnelle gravité et l'exposition d'autrui à un danger qu'on ne pouvait ignorer.

M. Pierre Fauchon, rapporteur, a ensuite indiqué que l'Assemblée nationale n'avait pas souhaité, contrairement au Sénat, étendre la responsabilité pénale des collectivités territoriales en tant que personnes morales. Il a souligné que cette question donnait lieu à des débats très vifs et que certains craignaient qu'une telle extension conduise, à terme, à la mise en cause de la responsabilité pénale de l'Etat. Tout en soulignant que le refus de toute extension de la responsabilité pénale des collectivités territoriales lui semblait ne pas correspondre à une vision moderne de l'Etat de droit, il a estimé que cette question méritait d'être approfondie et qu'il était préférable de ne pas revenir sur la décision de l'Assemblée nationale.

Le rapporteur a enfin souligné que l'Assemblée nationale avait accepté les propositions formulées au Sénat par M. Alain Vasselle afin que les collectivités territoriales accordent une protection aux élus pénalement poursuivis pour des faits relevant de l'exercice de leurs fonctions. Il a noté que l'Etat devrait accorder sa protection aux maires lorsqu'ils agissent en tant qu'agents de l'Etat.

Concluant son propos, M. Pierre Fauchon, rapporteur, a indiqué que le texte issu des travaux de l'Assemblée nationale, dès lors qu'il ne faisait que préciser le dispositif prévu par le Sénat, méritait d'être approuvé. Il a indiqué que la proposition de loi assurait un équilibre entre la protection des victimes et la nécessité d'éviter des poursuites pénales injustifiées.

M. Jacques Larché, président, a rappelé que dans un premier temps, le Premier ministre s'était opposé à juste titre à l'éventualité, évoquée par certains, d'un dispositif spécifique concernant la responsabilité pénale des élus. Il a souligné que la proposition de loi avait le mérite de s'appliquer de manière indifférenciée à l'ensemble des citoyens, et qu'il n'existait aucune raison de ne pas inscrire à l'ordre du jour du Sénat le texte adopté par l'Assemblée nationale.

M. Robert Bret a indiqué que la proposition de loi avait fait l'objet d'améliorations très sensibles à l'Assemblée nationale, de sorte qu'elle n'apparaissait pas comme un texte catégoriel et de circonstance. Il s'est toutefois interrogé sur les conséquences de ce texte, observant qu'il était difficile de rassurer les associations de victimes en l'absence de toute évaluation de l'impact de la modification proposée. Il a indiqué que l'Etat venait d'être condamné par un tribunal administratif pour faute inexcusable à propos de maladies causées par l'amiante, et s'est demandé si une telle condamnation serait toujours possible en appliquant le texte de la proposition de loi. Il a souhaité que des précisions soient apportées avant l'adoption définitive du texte.

M. Guy Allouche a tout d'abord fait valoir que ce texte était attendu et qu'il devait permettre de garantir que certains responsables, et notamment les élus, ne soient pas poursuivis injustement. Il s'est réjoui de la proposition formulée par le rapporteur d'adopter sans modification la proposition de loi issue des travaux de l'Assemblée nationale. Il a souligné que la proposition n'était pas un acte d'autoprotection de la part des élus mais qu'elle devait permettre l'exercice de leur action dans un cadre juridique plus clair.

M. Daniel Hoeffel a estimé que les inquiétudes des associations de victimes étaient compréhensibles, mais que le texte était équilibré et que l'attente d'une loi définitive sur ce sujet était très forte. Il a rappelé que nombre d'élus municipaux ne souhaitaient pas se représenter précisément en raison du risque de poursuite pénale dès que survient un accident.

M. José Balarello a rappelé que, pendant bien longtemps, les fautes commises par les élus dans le cadre de leurs fonctions donnaient lieu à saisine des juridictions administratives appelées à statuer sur l'octroi de dommages-intérêts. Il a regretté la pénalisation croissante de la société, et a noté que le législateur avait sa part de responsabilité dans cette évolution. Il a souhaité que la proposition de loi permette d'empêcher des poursuites pénales abusives contre les élus.

M. Maurice Ulrich a estimé que l'Assemblée nationale n'avait guère amélioré le texte. Il a indiqué que, s'il se ralliait à un vote conforme, il le faisait davantage par résignation que par conviction.

La commission a alors adopté sans modification la proposition de loi.

Elections - Elections des sénateurs - Examen du rapport en nouvelle lecture

La commission a ensuite examiné, en nouvelle lecture, sur le rapport de M. Paul Girod, le projet de loi n° 364 (1999-2000) adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, relatif à l'élection des sénateurs.

M. Paul Girod, rapporteur, a tout d'abord exposé que la commission mixte paritaire avait échoué en raison d'une divergence essentielle entre les deux assemblées, l'Assemblée nationale préconisant une représentation du Sénat sur des bases exclusivement démographiques, alors que le Sénat considérait qu'il devait représenter les collectivités territoriales elles-mêmes, sans exclure une modulation du barème de représentation des communes en fonction de la population.

Il a indiqué que l'Assemblée nationale avait, en nouvelle lecture, renoncé à plafonner les dépenses de campagnes électorales pour les élections sénatoriales, prenant en compte les objections du Sénat sur le caractère incomplet du dispositif proposé, en particulier l'absence d'aide publique aux candidats, et le défaut de sanction du dépassement du plafond, ainsi que sur les difficultés prévisibles qui résulteraient de l'adoption d'un plafond uniforme quels que soient la superficie ou le nombre de grands électeurs du département.

M. Paul Girod, rapporteur, a précisé que l'Assemblée nationale avait introduit, pour la première fois en nouvelle lecture, l'interdiction du financement des campagnes sénatoriales par les personnes morales.

Il a ajouté que, pour le reste, l'Assemblée nationale avait, pour l'essentiel, repris en nouvelle lecture les dispositions qu'elle avait adoptées lors des lectures précédentes.

Il a toutefois précisé que le texte adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture prévoyait, en ce qui concerne Paris, que sa représentation au sein du collège électoral serait limitée à dix fois l'effectif du Conseil de Paris, soit 1.630 délégués au lieu de 7.077 délégués, si le barème d'un délégué pour 300 habitants, prévu par l'Assemblée nationale pour toutes les autres communes, avait été maintenu à Paris.

M. Paul Girod, rapporteur, a considéré que cette réduction du nombre de délégués de Paris illustrait a contrario le risque d'écrasement du corps électoral rural dans les départements dominés par les grandes agglomérations, citant les exemples des Bouches-du-Rhône, de la Gironde, du Nord et du Rhône.

Il a proposé à la commission de rétablir le texte voté par le Sénat en deuxième lecture, qui pourrait ensuite constituer une base pour une réforme ultérieure du régime électoral du Sénat, et de confirmer l'interdiction du financement des campagnes sénatoriales par les personnes morales, introduite pour la première fois par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture.

M. Jacques Larché, président, a rappelé que le Sénat avait pris l'initiative de propositions équilibrées de réforme de son régime électoral, citant en particulier l'abaissement à quatre sièges du seuil d'application du mode de scrutin proportionnel permettant l'élection d'un nombre sensiblement égal de sénateurs selon l'un ou l'autre modes de scrutin.

Faisant valoir que la position du Sénat tenait compte des évolutions démographiques, il a considéré préférable l'adoption du texte déjà voté par le Sénat en deuxième lecture, qui pourrait constituer une référence pour l'avenir. Il a approuvé la disposition concernant l'interdiction du financement des campagnes sénatoriales par des personnes morales.

Convenant de ce que les divergences entre les deux assemblées étaient irréductibles, M. Guy Allouche a craint que la position du Sénat soit mal comprise par l'opinion publique.

Approuvant l'interdiction du financement des campagnes sénatoriales par des personnes morales, il a considéré que le plafonnement des campagnes sénatoriales, auquel l'Assemblée nationale a renoncé en nouvelle lecture, aurait soulevé des problèmes pratiques, prenant pour exemple le département du Nord pour lequel le plafond prévu n'aurait pas permis l'envoi d'un seul document de propagande à tous les grands électeurs.

M. Guy Allouche a jugé opportun que, dans les départements dominés par les grandes villes, celles-ci soient représentées en fonction de leur poids démographique, et s'est interrogé sur la constitutionnalité de la pluralité de modes de scrutin pour l'élection des membres d'une même assemblée.

M. Patrice Gélard, estimant que les Français étaient peu sensibles aux questions proprement institutionnelles, a estimé qu'il n'y avait pas lieu de redouter une incompréhension de l'opinion publique.

Il a fait valoir que le rapprochement des principes d'élection des deux assemblées pourrait déboucher, soit sur l'attribution de pouvoirs égaux pour les deux assemblées, soit sur une remise en cause du bicamérisme.

M. Patrice Gélard a enfin considéré que le régime électoral des assemblées ne devrait pas relever d'un projet de loi ordinaire sur lequel l'Assemblée nationale pouvait avoir le dernier mot sans condition de majorité qualifiée.

M. Robert Bret a estimé qu'il convenait de tenir compte de la réflexion en cours sur nos institutions, y compris sur la place et le rôle du Sénat, et qu'une réforme du régime électoral sénatorial dont la portée serait insuffisante pourrait susciter des interrogations de l'opinion.

Concernant le risque invoqué par certains d'un écrasement de la représentation rurale qui résulterait de l'adoption du texte adopté par l'Assemblée nationale, il a observé que, conseiller municipal de Marseille, il ne représentait pas uniquement cette ville, mais la totalité du département des Bouches-du-Rhône en tant que sénateur.

Mme Nicole Borvo a considéré qu'il convenait de ne pas sous-estimer l'intérêt des Français pour les questions institutionnelles, rappelant que les sondages d'opinion témoignaient d'une adhésion de la majorité de la population à la parité et à la limitation du cumul des mandats.

Évoquant le cas particulier de Paris, elle a rappelé que la population de la plupart de ses arrondissements était plus importante que celle de bon nombre de grandes villes de France, et que la question de la citoyenneté se posait dans la capitale comme dans le reste du pays.

Mme Nicole Borvo s'est prononcée en faveur de la fixation à six ans de la durée du mandat du sénateur.

M. Luc Dejoie a fait valoir que l'échec, depuis plus de trente ans, des tentatives des gouvernements successifs pour réduire sensiblement le nombre des communes, montrait que l'urbanisation du pays n'avait pas affecté l'attachement des Français à leur territoire.

Il a estimé qu'il convenait de faire preuve de la plus grande prudence sur les analyses d'opinion, observant que les électeurs souhaitaient majoritairement que leurs propres élus exercent simultanément plusieurs mandats.

M. Jean-Jacques Hyest, approuvant les propositions du rapporteur, a contesté que le texte de l'Assemblée nationale permette une égalité de représentation de la population, rappelant que dans une commune de plus de 3.500 habitants, une liste de candidats arrivée en tête au tour décisif avec 36 % des voix obtenait, grâce à la prime majoritaire, près de 75 % des sièges. Il a évoqué, par référence aux exemples étrangers de bicamérisme les plus aboutis, l'hypothèse selon laquelle le Sénat serait à terme composé d'élus locaux ès qualité.

M. Paul Girod, rapporteur, a considéré que le Sénat n'avait pas une position immobiliste sur son régime électoral, rappelant que des sénateurs avaient eux-mêmes pris l'initiative du dépôt de propositions de loi sur cette question.

Il a fait valoir que la déformation de la représentation de la population qui résulterait du projet de loi serait moins sensible dans les communes de moins de 3.500 habitants dont les conseillers municipaux étaient élus au scrutin majoritaire.

Sur la question de la constitutionnalité de plusieurs modes de scrutin pour l'élection des membres d'une même assemblée, M. Paul Girod, rapporteur, a rappelé les diverses propositions faites pour l'établissement du mode de scrutin proportionnel pour l'élection d'une partie des membres de l'Assemblée nationale.

M. Patrice Gélard a rappelé que les délégués supplémentaires dans les communes d'au moins 30.000 habitants avaient été prévus, alors que le régime électoral municipal ne comportait pas l'attribution d'une prime majoritaire, et a estimé que le régime des délégués supplémentaires aurait dû être révisé lors de la dernière réforme du régime électoral municipal, en 1982.

M. Simon Sutour a fait valoir que le mode de scrutin proportionnel dans les grandes villes constituait un élément de pondération, et que la représentation des communes à raison d'un délégué pour 300 habitants entraînerait une augmentation du nombre des délégués pour les plus petites communes.

Sur proposition de M. Paul Girod, rapporteur, la commission a ensuite adopté des amendements tendant à rétablir le texte adopté par le Sénat en première lecture.

Elle a en conséquence supprimé les dispositions de l'article premier concernant la représentation des communes à raison d'un délégué pour 300 habitants et rétabli l'article 1er bis pour prévoir l'élection de délégués supplémentaires dans les communes d'au moins 9.000 habitants à raison d'un délégué par tranche entière de 700 habitants au-dessus de 9.000 habitants.

La commission a maintenu à 9.000 habitants le seuil de partage entre les modes de scrutin applicables à l'élection des délégués des communes (articles 2 et 3) et prévu l'élection des sénateurs selon le mode de scrutin proportionnel dans les départements comptant au moins quatre sièges à pourvoir (articles 5 et 6).

La commission a confirmé l'élection au sein des conseils municipaux des délégués et suppléants des communes de moins de 9.000 habitants (article 2).

Elle a supprimé les dispositions concernant la diminution du nombre des suppléants des délégués (article 1er bis A) et modifiant le régime de remplacement des délégués de droit au titre de deux mandats (article 1er bis B).

Elle a adopté une rédaction plus précise de l'article 4 bis concernant la représentation des communes associées.

Enfin, la commission a adapté à ses positions aux articles précédents les articles 14, 15 et 16 concernant l'application de la loi dans les collectivités d'outre-mer ainsi que l'article 18 (abrogation).

La commission a adopté le projet de loi ainsi modifié.

Collectivités territoriales - Conseillers d'arrondissement/ communauté urbaine - Examen du rapport

Puis la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Christian Bonnet sur la proposition de loi n° 277 (1999-2000) de M. Jean-Claude Gaudin et plusieurs de ses collègues tendant à permettre aux conseillers d'arrondissement de siéger au conseil d'une communauté urbaine.

M. Christian Bonnet, rapporteur, a tout d'abord rappelé que la loi du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale avait retenu deux idées forces pour la désignation des délégués des communes au sein des organes délibérants des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre. Il a relevé qu'il était apparu prématuré, à ce stade de développement de l'intercommunalité, de prévoir une désignation directe des délégués intercommunaux au suffrage universel. Il a souligné qu'il avait néanmoins semblé indispensable d'imposer que ces mêmes délégués soient choisis au sein du conseil municipal afin qu'ils aient une légitimité, fut-elle au second degré, tirée du suffrage universel.

M. Christian Bonnet, rapporteur, a indiqué que la proposition de loi, sans déroger à ces deux idées forces, prévoyaient une adaptation des règles applicables afin de prendre en compte la situation spécifique des communes de Paris, Marseille et Lyon soumises au régime issu de la loi du 31 décembre 1982, qui avait prévu la création dans ces communes de conseils d'arrondissement.

Le rapporteur a fait valoir que les conseillers d'arrondissement étaient élus dans les mêmes conditions que les conseillers municipaux. Il a indiqué que leur nombre était le double de celui des conseillers municipaux, sans toutefois être inférieur à dix ni supérieur à quarante.

Rappelant les compétences exercées par les conseils d'arrondissement, il a noté que ceux-ci exerçaient un rôle consultatif sur certaines affaires, notamment en ce qui concerne le plan d'occupation des sols, mais qu'en outre ils délibéraient sur l'implantation et le programme d'aménagement de nombreux équipements intéressant l'arrondissement. Il a également fait observer que les conseils d'arrondissement pouvaient recevoir délégation du conseil municipal pour la gestion de tout équipement ou service de la commune, et qu'ils désignaient en leur sein des représentants de la commune dans les organismes dont le champ d'application s'étendait à l'arrondissement.

M. Christian Bonnet, rapporteur, a estimé que, dans ces conditions, les conseils d'arrondissement jouaient un rôle significatif, et que les conseillers d'arrondissement exerçaient une mission de gestion et de développement des territoires.

Après avoir fait valoir que la proposition de loi ne remettait en cause ni les principes fixés par la loi du 12 juillet 1999 ni les règles fixant la composition et la répartition des sièges entre les communes, M. Christian Bonnet, rapporteur, a considéré qu'elle pouvait être utile dans la mesure où les effectifs d'un conseil municipal pourraient s'avérer insuffisants pour pourvoir les sièges attribués à la commune au sein du conseil de la communauté urbaine. Il a en outre souligné que la proposition de loi aurait des effets bénéfiques en permettant aux conseillers d'arrondissement d'apporter leur expérience propre dans le fonctionnement de la communauté urbaine.

Tout en considérant que l'objet de la proposition de loi pouvait être intéressant, M. Robert Bret a néanmoins estimé qu'elle était motivée par des raisons de circonstances, puisqu'elle permettait de remédier à certains effets de la loi relative à la parité entre les hommes et les femmes sur les conseillers municipaux sortants.

Il a rappelé qu'une proposition de loi présentée par son groupe retenait une approche plus globale de cette question, en renforçant notamment la démocratie de proximité.

Tout en soulignant que les conseillers d'arrondissement n'étaient pas, à ses yeux, des élus de " seconde catégorie ", M. Robert Bret a fait observer qu'ils n'avaient pas une vision globale des compétences communales, qui étaient transférées en grande partie à la communauté urbaine.

Regrettant que la proposition de loi ne prenne pas en compte l'ensemble des questions posées, il a néanmoins indiqué qu'il n'y était pas hostile dans son principe.

Après avoir indiqué, qu'à titre personnel, la proposition de loi lui paraissait présenter un intérêt réel, M. Guy Allouche s'est interrogé sur la possibilité d'associer aux délibérations d'une communauté urbaine des conseillers d'arrondissement qui ne participaient pas, par ailleurs, aux travaux du conseil municipal qui les aurait désignés.

Ne partageant pas cette réserve, M. Daniel Hoeffel a écarté l'argument tendant à considérer qu'un élu ne serait pas apte à participer à des délibérations d'un organe de niveau supérieur.

Il a estimé qu'il était souhaitable de rompre avec l'anonymat d'une gestion locale mise en oeuvre sur un espace plus vaste que le territoire communal, et fait valoir qu'il fallait donner aux conseils d'arrondissement toute leur place dans le fonctionnement des institutions locales.

M. Christian Bonnet, rapporteur, a de nouveau souligné qu'il était opportun que des élus ayant une culture propre soient représentés au sein de la communauté urbaine afin de faire prendre en compte par celle-ci la diversité des situations territoriales.

A l'issue de ce débat, la commission a adopté la proposition de loi dans le texte proposé par le rapporteur.

Outre-mer - Loi d'orientation pour l'outre-mer - Examen du rapport

Enfin, la commission a procédé, sur le rapport de M. José Balarello, à l'examen du projet de loi n° 342 (1999-2000) adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, d'orientation pour l'outre-mer.

M. Jacques Larché, président, a tout d'abord rappelé qu'à son retour de la mission de la commission en Guyane, Martinique et Guadeloupe, il avait demandé au Gouvernement de déclarer l'urgence sur le projet de loi d'orientation relatif aux départements d'outre-mer, alors que d'ordinaire, il n'était guère favorable à cette procédure.

Puis, après avoir rappelé qu'il avait présenté la semaine précédente le compte rendu des deux missions effectuées par la commission, la première conduite par le président Jacques Larché dans les départements français d'Amérique en septembre 1999 et la seconde présidée par lui-même à la Réunion en janvier 2000, M. José Balarello, rapporteur, a indiqué que le présent projet de loi d'orientation pour l'outre-mer, adopté par l'Assemblée nationale le 11 mai dernier, avait été préparé à partir de plusieurs rapports établis à la demande du Gouvernement par différentes personnalités, dont en particulier MM. Claude Lise, sénateur de la Martinique, et Michel Tamaya, député de la Réunion, chargés par le Premier ministre d'une mission sur l'approfondissement de la décentralisation dans les départements d'outre-mer dans le cadre de l'article 73 de la Constitution.

Il a précisé que, selon la présentation qui en avait été faite par M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer, le projet de loi d'orientation répondait à un double objectif : d'une part, répondre aux handicaps structurels qui freinaient le développement économique des départements d'outre-mer par des mesures destinées à favoriser la création d'emplois et, d'autre part, approfondir la décentralisation, en permettant notamment le développement de la coopération décentralisée pour une meilleure insertion dans l'environnement régional, et ouvrir la perspective d'évolutions institutionnelles en prévoyant la création d'un deuxième département à la Réunion et la mise en place d'un congrès dans les régions d'outre-mer monodépartementales.

Le rapporteur a expliqué que la variété des dispositions de ce projet de loi d'orientation avait conduit les commissions des affaires culturelles, des affaires économiques et des affaires sociales à se saisir pour avis et qu'il proposait que la commission s'en remette à l'appréciation des commissions saisies pour avis dans les domaines qui relevaient plus particulièrement de leur compétence.

Puis, M. José Balarello, rapporteur, a brièvement rappelé les principaux traits de la situation et du statut actuels des départements d'outre-mer.

Après avoir souligné la très grande diversité des situations locales en raison de réalités géographiques et d'héritages historiques différents, il a évoqué la situation économique et sociale préoccupante des départements d'outre-mer, marquée par un accroissement démographique quatre fois plus rapide qu'en métropole, un chômage très élevé atteignant environ 30 % de la population active, un nombre important d'allocataires du revenu minimum d'insertion (RMI), un niveau de vie très supérieur à celui des pays environnants mais largement imputable au volume considérable des transferts sociaux provenant de la métropole, et une compétitivité insuffisante par rapport à ces pays où le coût du travail est en général bien inférieur.

Il a ensuite rappelé le cadre juridique constitué par l'article 73 de la Constitution définissant le statut constitutionnel des départements d'outre-mer, issu de la loi de départementalisation de 1946. A ce sujet, il a précisé que l'interprétation restrictive par le Conseil constitutionnel des mesures d'adaptation prévues par cet article, avait conduit à la mise en place de régions monodépartementales dans ces départements, l'assemblée unique envisagée en 1982 ayant été déclarée non conforme à la Constitution.

Après avoir précisé que les départements français d'outre-mer constituaient, au regard du droit communautaire, des régions ultrapériphériques européennes, au sens de l'article 299-2 du traité d'Amsterdam, ce qui leur permettait de bénéficier de crédits considérables au titre des fonds structurels européens, soit une enveloppe de 23 milliards de francs pour la période 2000/2006, le rapporteur a jugé intéressant de comparer le statut de ces départements à celui des autres régions ultrapériphériques mentionnées à l'article 299-2 du traité d'Amsterdam, c'est-à-dire les territoires espagnols et portugais des îles Canaries, des Açores et de Madère. Il a à cet égard constaté que les régions autonomes portugaises des Açores et de Madère et la communauté autonome espagnole des îles Canaries, qui bénéficiaient de compétences législatives dans de nombreux domaines ainsi que de compétences en matière de relations internationales, se caractérisaient par un statut beaucoup plus autonome que celui des départements d'outre-mer, de même d'ailleurs que les régions italiennes à statut spécial comme la Sardaigne, le Trentin-Haut Adige ou le Val d'Aoste.

M. José Balarello, rapporteur, a ensuite brièvement présenté le contenu des différents rapports préparatoires dont s'étaient inspirés les rédacteurs du projet de loi. Après avoir évoqué les rapports élaborés par Mme Eliane Mossé et M. Bertrand Fragonard, chargés par le Gouvernement de réfléchir aux mesures susceptibles de favoriser le développement économique et l'amélioration de la situation de l'emploi dans les départements d'outre-mer, il a précisé que le rapport établi par MM. Claude Lise et Michel Tamaya, à défaut de pouvoir proposer la mise en place d'une assemblée unique compte tenu du cadre de l'article 73 de la Constitution, suggérait la création d'un congrès, réunion non permanente du conseil général et du conseil régional qui aurait eu pour missions de gérer les compétences partagées par les deux assemblées et d'initier un éventuel processus d'évolution statutaire.

Après avoir mentionné les rapports de M. François Seners sur les îles du nord de la Guadeloupe (Saint-Barthélémy et Saint-Martin) et de M. Rémi Thuau sur Saint-Pierre-et-Miquelon, M. José Balarello, rapporteur, a énuméré les principales dispositions du projet de loi d'orientation.

Il a tout d'abord présenté les mesures destinées à favoriser le développement économique et l'emploi, mentionnant notamment les exonérations de cotisations sociales permettant d'abaisser le coût du travail, dans le prolongement de la " loi Perben " qui avait, dans l'ensemble, donné satisfaction, ainsi que le principe d'un alignement en trois ans du niveau du RMI dans les départements d'outre-mer sur celui de la métropole.

Après avoir évoqué l'article additionnel introduit par l'Assemblée nationale en vue de la suppression de la prime d'éloignement bénéficiant aux fonctionnaires nommés dans les départements d'outre-mer et les dispositions tendant à une meilleure reconnaissance de l'identité culturelle de ces départements, le rapporteur a approuvé les importantes dispositions du projet de loi conférant de nouvelles compétences aux départements et aux régions d'outre-mer en matière de relations internationales afin de favoriser le développement de la coopération régionale décentralisée. Il a en effet constaté que ces dispositions répondaient à une demande unanime exprimée par les élus locaux rencontrés au cours des deux missions. Il a en outre relevé les dispositions prévoyant le transfert aux collectivités territoriales d'outre-mer de compétences actuellement exercées par l'Etat, ainsi que celles tendant à permettre à ces collectivités de bénéficier de ressources nouvelles.

M. José Balarello, rapporteur, a ensuite abordé l'examen des dispositions du projet de loi d'orientation ouvrant des perspectives d'évolutions institutionnelles.

Il a d'abord indiqué qu'il proposerait un amendement de suppression de l'article 38 du projet de loi relatif à la création d'un deuxième département à la Réunion, constatant que le conseil général comme le conseil régional avaient émis un avis défavorable sur ce projet qui rencontrait, d'après plusieurs sondages, l'hostilité d'une majorité de la population réunionnaise.

Au sujet de l'article 39 relatif à la création du congrès, après avoir précisé que celui-ci n'était pas prévu à la Réunion où il n'était pas souhaité, il a considéré que dans les autres départements d'outre-mer, la possibilité offerte au conseil général et au conseil régional de se réunir en vue de faire des propositions au Gouvernement, pourrait constituer un moyen de créer un lieu de concertation et d'ouvrir la perspective d'une nécessaire évolution institutionnelle.

Il a enfin indiqué que le projet de loi comportait un titre consacré à Saint-Pierre-et-Miquelon, précisant que la seule modification du statut particulier de cette collectivité territoriale retenue à l'issue du débat à l'Assemblée nationale consistait à prévoir la désignation du bureau du conseil général à la proportionnelle.

M. José Balarello, rapporteur, a conclu en estimant que la priorité devait être donnée aux mesures susceptibles de favoriser l'emploi dans les départements d'outre-mer, notamment grâce au développement d'activités à haute valeur ajoutée utilisant les technologies nouvelles, d'éventuelles modifications institutionnelles ne pouvant en tout état de cause suffire à elles seules à régler les problèmes posés par le niveau actuel du chômage. Il a néanmoins considéré que chacun de ces départements devrait à terme évoluer vers un statut " cousu main " adapté à ses spécificités, citant les déclarations faites en ce sens par le Président de la République au cours de son récent voyage aux Antilles.

A l'issue de cet exposé, M. Jacques Larché, président, après avoir indiqué que le Président de la République puis le Premier ministre l'avaient reçu à la suite de la mission de la commission des lois du Sénat dans les départements français d'Amérique, s'est réjoui de la convergence des propos tenus par le Président de la République avec les préoccupations relevées par la mission.

Il a rappelé les acquis très positifs de la départementalisation, comme le montre notamment l'exemple de la Réunion où le statut départemental fait l'objet d'un consensus, mais a néanmoins estimé que la départementalisation manquait aujourd'hui de souffle et que des évolutions devraient à terme être envisagées. A cet égard, tout en soulignant la nécessité de ne pas remettre en cause le bénéfice de l'intégration européenne reconnu aux départements d'outre-mer français par l'article 299-2 du traité d'Amsterdam, il a évoqué la possibilité d'utiliser le cadre de l'article 72 de la Constitution pour permettre une évolution de leur statut.

Après avoir évoqué un sondage réalisé au mois d'avril 2000 en Martinique, selon lequel une écrasante majorité de la population martiniquaise souhaitait rester française, il a souhaité que les chances actuellement offertes de permettre une évolution institutionnelle adaptée aux départements d'outre-mer ne soient pas manquées, regrettant que la France n'ait pas su saisir des chances comparables dans d'autres circonstances historiques.

M. Daniel Hoeffel a appelé de ses voeux une réflexion globale sur une nécessaire évolution institutionnelle des départements d'outre-mer.

Il a estimé que la situation de la Réunion, caractérisée par un nombre très limité de communes regroupées en six communautés de communes (soit au total 24 communes seulement), ne justifiait pas la création d'un deuxième département ; il a donc approuvé la proposition du rapporteur tendant à supprimer la disposition du projet de loi prévoyant cette création.

A propos des dispositions tendant à favoriser le développement de la coopération régionale décentralisée, il a jugé indispensable de permettre aux représentants des grandes collectivités territoriales d'outre-mer d'avoir des contacts réguliers avec leur environnement géographique mais a souligné la nécessité de veiller à une bonne coordination entre les initiatives prises par les responsables de ces collectivités et celles prises par les représentants de l'Etat, de même en ce qui concerne la coopération transfrontalière en métropole.

Enfin, il a fait observer que la forte augmentation des fonds structurels européens bénéficiant aux régions ultra-périphériques ne s'était pas faite au détriment des régions de la métropole.

M. Claude Lise a souligné la gravité de la situation actuelle des départements d'outre-mer, considérant que des mesures d'ordre économique et social ne pourraient suffire à régler leurs problèmes.

Tout en relevant le caractère positif du volet économique et social du projet de loi d'orientation, il a en effet constaté que les précédentes " loi Perben " et " loi Pons " avaient été utiles mais n'avaient pas permis de faire évoluer radicalement la situation. Il a donc estimé nécessaire d'apporter une réponse au souhait légitime d'une meilleure affirmation de l'identité culturelle des départements d'outre-mer.

Après avoir rappelé qu'il avait hésité à accepter la mission de réflexion qui lui avait été confiée par le Gouvernement en raison de sa difficulté, il a indiqué que le Président de la République comme le Premier ministre lui avaient fait part de leur accord sur la méthode d'évolution institutionnelle qu'il avait proposée à travers le projet de création du congrès. Il a déclaré que celui-ci répondait au souci de mettre en place un lieu de concertation afin d'éviter que les problèmes ne se règlent dans la rue. Il a précisé la procédure qu'il proposait de retenir, à savoir la réunion ponctuelle du conseil général et du conseil régional afin de proposer un projet d'évolution institutionnelle qui serait ensuite soumis à la consultation de la population locale. Sur ce dernier point, il a fait part des craintes de certains constitutionnalistes d'une censure par le Conseil constitutionnel si le projet de loi lui était déféré.

M. Claude Lise a en outre précisé qu'il n'était pas opposé à étudier l'hypothèse d'une évolution vers un statut de région autonome comme celui des Açores ou de Madère mais que la mission qui lui avait été confiée était de proposer une méthode d'évolution institutionnelle dans le cadre de l'article 73 de la Constitution et non d'élaborer un nouveau statut.

Soulignant qu'il souhaitait la mise en place d'un système transparent, légal et démocratique pour faire des propositions opposables au Gouvernement, il a exprimé ses craintes qu'à défaut de retenir une telle méthode, les évolutions ne se fassent à la suite de mouvements de rue ou d'initiatives individuelles de certaines personnalités croyant pouvoir proposer des changements institutionnels au nom des populations.

A propos de la coopération régionale, il a jugé que son développement permettrait aux départements d'outre-mer français de constituer une interface entre l'Europe et l'Amérique en jouant un rôle de " facilitateur " d'échanges et de transferts de technologie. Il a estimé qu'une telle évolution permettrait de répondre à une attente considérable de développement des relations avec la France dans cette zone géographique et qu'elle correspondait à l'intérêt de la France comme à celui de l'Europe.

Constatant que ceux qui, en 1982, avaient été à l'initiative de la saisine du Conseil constitutionnel ayant conduit à empêcher la mise en place d'une assemblée unique dans les départements d'outre-mer, déploraient aujourd'hui les inconvénients de la coexistence de deux assemblées, M. Claude Lise a conclu en soulignant le risque que ceux qui s'apprêtaient à saisir le Conseil constitutionnel du projet de création du congrès n'en viennent à le regretter dans quelques années.

M. Robert Bret a estimé que la départementalisation avait permis des avancées considérables mais qu'elle arrivait aujourd'hui à bout de souffle. Constatant les très fortes attentes d'évolution exprimées par les élus locaux comme par les socioprofessionnels et évoquant les diverses expressions de ces attentes et notamment les expressions indépendantistes, il s'est demandé si le projet de loi d'orientation, présenté par le secrétaire d'Etat à l'outre-mer comme une étape, serait suffisant pour répondre à ces attentes.

M. Robert Bret a approuvé les avancées réalisées par le projet de loi d'orientation en matière économique et sociale ainsi qu'en matière de coopération décentralisée, considérant que les départements d'outre-mer constituaient un atout pour la France. Il a néanmoins relevé l'existence de très nombreuses critiques adressées au projet de loi d'orientation, notamment quant à son volet institutionnel, et a estimé que celui-ci manquait d'ambition. Il a craint que des difficultés n'apparaissent si l'on ne parvenait pas à dépasser les préoccupations électorales locales pour répondre à la très forte attente de statuts " cousus main ". Regrettant que le projet de loi d'orientation reste " au milieu du gué ", il s'est demandé si l'on ne pourrait pas envisager d'aller plus loin et notamment de modifier la rédaction du traité d'Amsterdam.

Il a par ailleurs évoqué l'exemple de l'île de Saint-Martin rattachée au département de la Guadeloupe, considérant qu'il fallait donner à la partie française de l'île les moyens de se développer face à la concurrence de la partie hollandaise. Il a en outre déploré que les prises de position pour ou contre la création d'un deuxième département à la Réunion se fassent à partir de considérations locales. Enfin, il s'est interrogé sur d'éventuelles interférences entre les évolutions envisagées pour le statut de la Corse et celles envisagées pour les départements d'outre-mer.

M. Jacques Larché, président, a considéré qu'il n'existait pas de solution générale aux problèmes des départements d'outre-mer et qu'il convenait à cet égard de se défaire de tout esprit de système.

Tout en constatant que le volet économique et social du projet de loi d'orientation répondait à une situation d'urgence, M. Lucien Lanier a regretté l'insuffisance de son volet institutionnel.

Après s'être déclaré opposé au projet de bidépartementalisation de la Réunion, il a fait part de ses réticences à l'égard du projet de création du congrès. Il a exprimé ses doutes quant à la constitutionnalité de ce projet et sa crainte qu'il n'aboutisse en fait à la création d'une troisième assemblée dont le rôle serait ambigu. Regrettant en outre le choix peu heureux du terme " congrès " et la lourdeur de la procédure envisagée, il a souligné que ce projet avait fait l'objet d'un avis défavorable de six des huit assemblées locales concernées.

Il a conclu en estimant que la création d'un congrès risquait d'hypothéquer la nécessaire réflexion sur une évolution des institutions pour mieux prendre en compte la diversité des départements d'outre-mer.

M. José Balarello, rapporteur, a pour sa part considéré qu'il était urgent d'agir pour permettre une évolution et éviter une explosion. Il a de nouveau regretté l'insuffisance du projet de loi d'orientation du point de vue institutionnel, tout en considérant que celui-ci comportait des propositions intéressantes du point de vue économique et social, dans le droit fil de la " loi Perben ".

M. Edmond Lauret a également approuvé l'avancée réalisée par le volet économique et social du projet de loi, tout en exprimant une réserve liée à l'incertitude sur l'avenir du dispositif de défiscalisation des investissements.

Il s'est déclaré opposé au projet de bidépartementalisation de la Réunion, faisant valoir que celui-ci mettait en cause l'unité de la Réunion constituée depuis l'abolition de l'esclavage et suscitait un traumatisme dans la population réunionnaise. Il a à cet égard regretté qu'il n'ait pas été tenu compte de l'avis de la population exprimé à travers deux sondages, le premier faisant apparaître que 57 % des habitants étaient défavorables à la création du deuxième département, et le second que seulement 32 % étaient favorables à cette création.

Après avoir relevé que le conseil régional et le conseil général avaient émis un avis défavorable à ce projet, M. Edmond Lauret a estimé que la bidépartementalisation ne permettrait pas de créer des emplois alors même qu'elle aurait un coût important en termes de dépenses de fonctionnement et qu'elle risquait d'entraîner des retards dans la consommation des fonds structurels européens. Il a en outre réfuté la nécessité d'un rééquilibrage entre la partie sud et la partie nord du département, rappelant qu'il existait des infrastructures importantes et des équipements publics très nombreux dans le sud de l'île.

Enfin, il a considéré qu'il fallait rester prudent quant aux nouvelles compétences conférées aux collectivités territoriales en matière de négociations internationales.

A l'issue de cette discussion générale, M. Jacques Larché, président, a énuméré les principales questions sur lesquelles la commission était appelée à se prononcer, mentionnant successivement la bidépartementalisation de la Réunion, le projet de création du congrès, la prise en compte des spécificités des petites îles de Saint-Martin et de Saint-Barthélémy et les dispositions relatives à la coopération régionale décentralisée.

Suivant la proposition du rapporteur, la commission a examiné en priorité les articles 38 (création de deux départements à la Réunion) et 39 (création d'un congrès dans les régions monodépartementales d'outre-mer) du projet de loi.

Elle a d'abord adopté, à l'initiative du rapporteur, un amendement de suppression de l'article 38 prévoyant la bidépartementalisation de la Réunion.

Puis, elle a rejeté un amendement présenté par le rapporteur qui aurait conduit à accepter le principe du congrès. La commission a, en conséquence, adopté un amendement de suppression de l'article 39 du projet de loi.

Puis la commission a adopté les autres amendements présentés par le rapporteur.

A l'article 7 quinquies (rapport du Gouvernement sur le rapprochement des taux bancaires dans les départements d'outre-mer et en métropole), elle a tout d'abord adopté un amendement rédactionnel.

A l'article 16 (fonds régional d'aménagement foncier et urbain, FRAFU), elle a adopté un amendement tendant à préciser que les représentants des maîtres d'ouvrage sociaux seraient consultés sur la programmation des logements sociaux réalisés grâce au FRAFU, ainsi qu'un amendement rédactionnel.

A l'article 22 (action internationale des départements d'outre-mer), la commission a adopté deux amendements :

- le premier tendant à permettre aux conseils généraux des départements d'outre-mer de formuler des propositions au Gouvernement en vue de la conclusion d'engagements internationaux, non seulement avec les Etats voisins, mais également avec des organisations internationales régionales ;

- et le second ayant pour objet de préciser que les conseils généraux des départements d'outre-mer pourront recourir aux sociétés d'économie mixte en matière de coopération régionale.

A l'article 23 (action internationale des régions d'outre-mer), elle a adopté, outre un amendement rédactionnel, deux amendements tendant, de même qu'à l'article précédent pour les conseils généraux, à permettre aux conseils régionaux, d'une part, de formuler des propositions au Gouvernement en vue de la conclusion d'engagements internationaux avec des organisations internationales régionales et, d'autre part, de recourir aux sociétés d'économie mixte en matière de coopération régionale.

A l'article 24 (consultation des assemblées locales des départements d'outre-mer), elle a adopté un amendement tendant à préciser que le Premier ministre devrait accuser réception des propositions formulées par les conseils généraux des départements d'outre-mer et fixer le délai dans lequel il leur apporterait une réponse, de même que le code général des collectivités territoriales le prévoit déjà s'agissant des propositions formulées par les conseils régionaux d'outre-mer.

A l'article 24 bis (consultation des conseils régionaux sur les projets d'attribution de concessions portuaires et aéroportuaires), elle a adopté un amendement tendant à codifier cet article dans le code général des collectivités territoriales.

Elle a adopté un amendement de suppression de l'article 24 ter prévoyant un rapport bisannuel du Gouvernement sur les échanges aériens, maritimes et des télécommunications pour les départements d'outre-mer.

A l'article 26 (transfert aux régions d'outre-mer de compétences en matière de gestion et de conservation des ressources biologiques de la mer), la commission a adopté un amendement tendant à préciser les conditions de mise à disposition des services techniques de l'Etat et un amendement tendant à ajouter à la liste des actes de la région soumis au contrôle de la légalité, les décisions qui seront prises par les régions en matière de pêche.

A l'article 28 (schéma d'aménagement régional), elle a adopté un amendement ayant pour objet de faire figurer la consultation du conseil général sur le schéma d'aménagement régional au sein de l'article du code général des collectivités territoriales prévoyant la procédure d'élaboration de ce schéma.

A l'article 31 (programmation des aides de l'Etat au logement), elle a adopté un amendement tendant à prévoir que le conseil régional serait consulté chaque année, comme le conseil général, sur la programmation des aides de l'Etat au logement.

A l'article 32 (dispositions particulières applicables aux communes de Saint-Martin et de Saint-Barthélémy), elle a adopté un amendement tendant à ajouter les routes départementales à la liste des compétences dont les conseils municipaux de Saint-Martin et de Saint-Barthélémy pourront demander le transfert par convention.

A l'article 33 (majoration de la dotation forfaitaire des communes des départements d'outre-mer), la commission a adopté un amendement tendant à supprimer le prélèvement de 40 millions de francs sur la dotation d'aménagement prévue par le projet de loi pour financer la majoration de la dotation forfaitaire des communes, ainsi qu'un amendement tendant à prendre en compte la situation particulière des communes enclavées de l'intérieur de la Guyane dans la répartition de cette majoration.

Elle a adopté un amendement de suppression de l'article 35 bis tendant à instituer une redevance communale sur l'eau extraite des gîtes géothermiques.

A l'article 36 (ressources fiscales de la commune de Saint-Barthélémy), la commission a adopté un amendement tendant à permettre, au profit des communes de Saint-Barthélémy et de Saint-Martin, la création d'une taxe sur les carburants affectée à des travaux d'entretien et d'amélioration du réseau routier et, au profit de la commune de Saint-Barthélémy, la création d'une taxe sur les débarquements de passagers par voie maritime destinée à financer l'amélioration des installations portuaires.

Elle a adopté un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 36 afin de prévoir que le contrat de plan conclu entre l'Etat et la région de la Guadeloupe devra comprendre une enveloppe spécifique à Saint-Barthélémy et une enveloppe spécifique à Saint-Martin.

Elle a adopté un amendement tendant à insérer un autre article additionnel après l'article 37 bis afin de consacrer dans la loi l'existence dans chacun des départements d'outre-mer d'une commission de suivi de l'utilisation des fonds structurels européens, instance de concertation réunissant l'ensemble des partenaires intéressés.

A l'article 40 (application du projet de loi à Saint-Pierre-et-Miquelon), elle a adopté un amendement de précision.

Elle a adopté un amendement de suppression de l'article 41 quater prévoyant la mise en place d'un observatoire de la fonction publique à Saint-Pierre-et-Miquelon.

A l'article 42 (commission des comptes économiques et sociaux et de suivi de la loi d'orientation), elle a adopté un amendement de précision concernant la composition de cette commission.

Enfin, elle a adopté un amendement de suppression de l'article 43 prévoyant la création d'un observatoire des prix et des revenus à la Réunion.

La commission a adopté l'ensemble du projet de loi d'orientation ainsi modifié.