Table des matières




- Présidence de M. René Garrec, président.

Projet de loi de finances pour 2002 - Audition de Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux, ministre de la justice

La commission a tout d'abord procédé à l'audition de Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux, ministre de la justice, a fait valoir qu'elle présentait un très bon projet de budget en 2002, qui témoignait, cette année plus encore que les précédentes, de la priorité donnée à la justice. Elle a illustré ses propos en mentionnant :

- le rythme rapide de la progression des crédits du budget de la justice s'élevant à 5,7 % des crédits, soit un rythme plus rapide que la progression moyenne des dépenses de l'Etat (2 %) ;

- le montant des crédits encore jamais atteint, dépassant le seuil symbolique des 30 milliards de francs (4,7 milliards d'euros) ;

- la création de 2.800 emplois, contre 1.550 en 2001.

Elle a insisté sur la cohérence de ce budget qui affectait les moyens aux priorités affichées par le Gouvernement.

Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux, ministre de la justice, a ensuite décrit la répartition des créations de postes.

En premier lieu, elle a relevé que l'administration pénitentiaire se situait au premier rang des créations d'emplois qui s'élevaient à 1525, un niveau trois fois plus élevé qu'en 2001. Elle a expliqué que les nouveaux recrutements concerneraient en majorité les surveillants (à hauteur de 1.200 environ). Elle a ajouté que les effectifs des personnels d'insertion et des personnels administratifs, en nombre insuffisant, bénéficieraient également d'un effort particulier.

Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux, ministre de la justice, a relevé que ces recrutements en grand nombre étaient destinés à mettre en oeuvre la politique pénitentiaire du Gouvernement visant à améliorer la prise en charge des détenus et à renforcer la sécurité dans les établissements.

La garde des sceaux a également ajouté que ces créations d'emplois permettraient d'accompagner la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail au 1er janvier 2002, ajoutant toutefois que des recrutements supplémentaires interviendraient ultérieurement.

En deuxième lieu, s'agissant des juridictions judiciaires, elle a annoncé la création de 845 postes, dont 320 postes de magistrats et 525 postes de fonctionnaires (greffiers, greffiers en chef et contractuels) affectés à l'achèvement de la mise en oeuvre des réformes récentes, et notamment de la loi du 15 juin 2000 sur la présomption d'innocence et les droits des victimes, ayant déjà conduit à créer 875 emplois sur quatre ans.

En troisième lieu, s'agissant de la protection judiciaire de la jeunesse, Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux, ministre de la justice, a fait état de 300 créations d'emplois prévues dans le projet de budget du ministère de la justice pour 2002, dans le cadre du plan de lutte contre la délinquance des mineurs. Elle a expliqué que ces nouveaux recrutements concerneraient des éducateurs, mais également des psychologues, des enseignants, ainsi que des personnels administratifs appelés à renforcer les structures de la protection judiciaire de la jeunesse.

Enfin, elle a relevé la création de 32 emplois à l'administration centrale, 4 à la commission nationale de l'informatique et des libertés et 86 dans les juridictions administratives.

Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux, ministre de la justice, a complété ce panorama en insistant sur l'effort de transparence prévu dans le budget pour 2002 pour réduire le nombre de « mises à disposition internes », expliquant qu'il s'agissait d'une pratique courante selon laquelle des magistrats et des fonctionnaires étaient « affectés pour ordre » dans des juridictions ou des services déconcentrés, et en réalité mis à disposition de l'administration centrale ou d'organismes extérieurs. En réponse aux observations émises par la Cour des comptes visant à dénoncer cette situation, la garde des sceaux a manifesté son souhait de mettre progressivement un terme à une situation juridiquement critiquable, contraire au principe de bonne gestion et mal acceptée par les juridictions.

Elle a signalé qu'une enveloppe de 450 millions de francs serait consacrée à l'ensemble des personnels du ministère de la justice afin de mieux prendre en compte les compétences, le niveau de responsabilité et la difficulté de certains métiers, ajoutant que dans le cadre de la réduction du temps de travail, ces crédits permettraient le financement des astreintes et des heures supplémentaires.

Elle a souhaité évoquer la très forte progression des crédits consacrés à l'aide juridictionnelle (18 %), ayant résulté de la hausse de la rétribution des avocats décidée en décembre 2000. Elle a indiqué que, contrairement à l'année précédente, un relèvement du plafond permettant l'accès à l'aide juridictionnelle n'était pas envisagé pour 2002.

Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux, ministre de la justice, a souligné son intention de proposer une réforme globale de l'aide juridictionnelle et de l'accès au droit, à travers un projet de loi qui pourrait être présenté très prochainement, plutôt que de prévoir des mesures partielles. Elle n'a pas caché que la mise en oeuvre de cette réforme nécessiterait l'engagement de moyens budgétaires substantiels s'étalant au-delà de l'année 2002.

Elle a ensuite fait le point sur les crédits d'équipement, indiquant que le projet de loi de finances pour 2002 prévoyait des autorisations de programme d'un montant de 550 millions de francs pour les services judiciaires, destinées aux opérations en cours et à venir. A cet égard, elle a énuméré les opérations les plus importantes comme celles des palais de justice de Chartres, de Rouen, de Fort-de-France, de Laon ou encore l'extension de l'école nationale des greffes à Dijon. Elle a ajouté qu'une enveloppe de 750 millions de francs d'autorisations de programme était également prévue en loi de finances rectificative pour 2001, destinée au programme de construction d'un nouveau tribunal de grande instance à Paris et plus particulièrement pour l'acquisition du terrain.

Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux, ministre de la justice, a insisté sur l'effort consenti en matière d'équipement en faveur des services pénitentiaires, 1,7 milliard de francs de crédits d'investissements étant prévus par le projet de loi de finances pour 2002, parmi lesquels figurent :

- une enveloppe de 250 millions de francs consacrée aux travaux de rénovation et de sécurité, ainsi qu'aux mesures d'urgence destinées à lutter contre les évasions héliportées, préconisées par un rapport remis par le directeur régional des services pénitentiaires d'Ile-de-France ;

- une enveloppe de 1,45 milliards de francs s'inscrivant dans le cadre du programme d'action de 10 milliards de francs visant à financer la rénovation et la construction de 35 établissements pénitentiaires, annoncé par le Premier ministre en novembre 2000.

Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux, ministre de la justice, a précisé qu'une douzaine d'opérations étaient en cours actuellement, dont la plupart seraient achevées en 2002. Elle a rappelé avoir présenté, fin octobre, les grandes lignes de la nouvelle carte pénitentiaire, prévoyant la construction de 35 établissements neufs. Elle a fait valoir que l'objectif de ce programme, loin d'accroître le nombre de places de détention, permettrait l'application de la norme d'encellulement individuel et la fermeture de plus de 25 établissements vétustes.

Elle a souligné la nécessité d'échelonner dans le temps la réalisation de ce programme très ambitieux, relevant à cet égard le rôle moteur de la nouvelle agence de maîtrise d'ouvrage des travaux du ministère de la justice, opérationnelle au 1er janvier 2002. La garde des sceaux a signalé que la phase de concertation locale pour le choix des sites interviendrait prochainement.

Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux, ministre de la justice, a souhaité faire le point sur les trois articles insérés dans le projet de loi de finances pour 2002 et rattachés au budget de la justice.

Elle a expliqué que l'article 74 étendait l'aide juridictionnelle aux procédures disciplinaires concernant les détenus, tout en relevant la modicité de l'impact budgétaire de cette mesure (14 millions de francs).

Elle a indiqué que l'article 75 modifiant l'article L. 627-3 du code de commerce assurerait une meilleure maîtrise des frais de justice supportés par l'Etat dans le cadre des procédures collectives, et partant, permettrait une économie budgétaire non négligeable.

Enfin, elle a précisé que l'article 76 visait à consolider le système de financement de la formation professionnelle des avocats en affirmant explicitement le caractère obligatoire des contributions des barreaux.

Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux, ministre de la justice, a conclu cette présentation du budget pour 2002 en soulignant que l'amélioration notable de la situation budgétaire de son ministère n'avait aucun caractère conjoncturel ou accidentel, mais résultait d'une véritable action, inscrite dans la durée, pour renforcer les moyens d'une justice qui en avait besoin.

Mme Dinah Derycke, rapporteur pour avis du budget des services généraux de la justice, a interrogé la ministre sur les modalités de mise en oeuvre de la réduction du temps de travail dans les juridictions et au sein de l'administration centrale. Elle a demandé si les moyens humains et matériels destinés à l'application de la loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes s'avéraient suffisants et s'il ne fallait pas craindre une accentuation des difficultés dans les juridictions. Elle a souhaité savoir si la mise en oeuvre de cette loi ne s'était pas traduite par des reports d'audiences civiles au profit de l'activité pénale des juridictions.

Mme Dinah Derycke a ensuite souligné l'urgence de la construction d'un nouveau tribunal de grande instance à Paris et a souhaité connaître les moyens envisagés par le Gouvernement pour accélérer la réalisation de ce projet, relevant la récurrence de cette question. Elle a également souhaité obtenir des précisions sur les intentions du Gouvernement concernant la réforme de l'aide juridictionnelle, invitant la garde des sceaux à présenter les orientations qui pourraient être retenues à la suite de la présentation du rapport Bouchet.

Mme Dinah Derycke a souhaité savoir si le plan pluriannuel de recrutement de magistrats, annoncé en mars 2001, prenait en compte avec exactitude l'ensemble des départs en retraite prévus au cours des prochaines années. Elle s'est demandé si les magistrats étaient prêts à voir leur nombre augmenter massivement en peu de temps. Elle a enfin souhaité connaître la position de la ministre sur les projets de loi relatifs aux tribunaux de commerce issus des travaux de l'Assemblée nationale.

Mme Marylise Lebranchu a tout d'abord évoqué l'aménagement et la réduction du temps de travail pour souligner qu'un premier accord avait été signé avec deux organisations professionnelles le 12 novembre s'agissant des personnels de l'administration centrale et qu'un deuxième accord avec deux organisations syndicales majoritaires était intervenu le 20 novembre s'agissant des personnels des services judiciaires. Elle a ajouté qu'un document consensuel sur le temps de travail avait été arrêté avec les organisations professionnelles de magistrats. Elle a en revanche noté que des difficultés subsistaient pour la protection judiciaire de la jeunesse, les personnels administratifs souhaitant se voir appliquées les mêmes règles que celles prévues pour les éducateurs. Elle a enfin indiqué qu'il n'existait pas d'accord sur les modalités de la réduction du temps de travail au sein de l'administration pénitentiaire. Elle a précisé qu'en tout état de cause, toutes les propositions faites portaient sur un nombre annuel d'heures de travail inférieur à 1.600.

A propos de la loi sur la présomption d'innocence, la ministre a reconnu que des reports d'audiences civiles avaient pu survenir dans certaines juridictions. Elle a fait valoir que l'année 2001 avait été une année de transition, et que l'arrivée dans les juridictions de nouvelles promotions de greffiers et de magistrats respectivement en mai et en septembre, avait permis un renforcement des moyens. Soulignant l'absence de « bogue judiciaire » à la suite de l'entrée en vigueur de la loi, elle a indiqué que 50 % des nouvelles créations de postes avaient été localisées au parquet, la proportion habituelle étant d'un tiers.

Mme Marylise Lebranchu a ensuite rappelé qu'un terrain devrait être identifié avant la fin du mois de janvier 2002 pour la construction d'un nouveau palais de justice à Paris. Elle a indiqué qu'une solution avait été trouvée pour faire face aux besoins immobiliers de la Cour de cassation. Evoquant l'aide juridictionnelle, elle a énuméré les orientations qui pourraient être retenues dans le projet de loi actuellement en cours d'élaboration : l'augmentation du nombre des bénéficiaires de l'aide juridictionnelle, le développement de modes d'accès au droit complémentaire, la recherche d'une meilleure qualité des prestations fournies au titre de l'aide juridictionnelle. Tout en relevant l'impossibilité de faire adopter définitivement cette réforme avant la fin de la mandature, elle s'est toutefois engagée à diffuser un avant-projet de loi avant le 30 novembre 2002.

A propos du plan pluriannuel de recrutement, la ministre a souligné que tous les départs en retraite avaient effectivement été pris en compte, ce qui permettrait à 8.089 magistrats d'être présents sur le terrain le 1er septembre 2005. Evoquant la réforme des tribunaux de commerce, elle a indiqué que les projets de loi seraient certainement soumis au Sénat à la fin du mois de janvier 2002. Elle a estimé que le texte était devenu consensuel à l'issue de son examen par l'Assemblée nationale et a rappelé que les artisans et commerçants souhaitaient cette réforme, précisant également que 110 postes de magistrats avaient d'ores et déjà été créés.

M. René Garrec, président, s'est demandé si la ministre ne se montrait pas optimiste en faisant état d'un consensus sur cette réforme. Il a souligné que les juges consulaires admettaient difficilement la présidence systématique de la formation de jugement des tribunaux de commerce par un magistrat professionnel.

Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux, ministre de la justice, a alors noté que la présidence des formations de jugement par des magistrats professionnels était la seule modalité envisageable pour faire entrer ces derniers dans les tribunaux de commerce, ajoutant qu'en retour, les magistrats consulaires pourraient exercer des fonctions à titre temporaire au sein de certaines formations de jugement de cours d'appel. Elle a confirmé, à l'instar de Mme Dinah Derycke, l'existence d'un certain malaise et de difficultés relationnelles entre les fonctionnaires et les magistrats dans les juridictions, notant que cette question avait d'ailleurs été abordée au cours des entretiens de Vendôme. Elle a ensuite évoqué le climat dans le monde de la justice pour souligner que les entretiens de Vendôme avaient permis des échanges approfondis entre les différents acteurs de la justice. Elle a noté en particulier que les avocats souhaitaient poursuivre cette expérience.

M. Patrice Gélard, rapporteur pour avis du budget protection judiciaire de la jeunesse, rappelant que les moyens de la protection judiciaire de la jeunesse avaient substantiellement augmenté au cours des années précédentes, s'est étonné de la très faible progression prévue de ces crédits dans le projet de loi de finances pour 2002. Il a noté qu'une progression des crédits de 0,99 % était tout à fait insuffisante pour répondre à la montée de la délinquance juvénile. Il a en outre rappelé que cent centres éducatifs renforcés auraient dû être ouverts à la fin de l'année 2001 et que quarante-six seulement étaient opérationnels.

M. Patrice Gélard a ensuite jugé indispensable de revaloriser le statut des éducateurs de la protection judiciaire de la jeunesse en les faisant accéder à la catégorie A de la fonction publique. Il s'est enfin demandé si les magistrats et fonctionnaires des juridictions pour mineurs avaient les moyens, la formation et la culture nécessaires au renforcement du principe du contradictoire dans la procédure d'assistance éducative.

Mme Marylise Lebranchu a indiqué que les crédits du secteur public progressaient de 4,8 %, mais que les crédits du secteur habilité diminuaient, l'ensemble des crédits de l'année 2000 n'ayant pas été consommés. Observant qu'il existait 49 centres éducatifs renforcés sur le territoire, elle a précisé que trente-huit projets étaient en cours de validation, mais qu'il était parfois difficile de trouver un terrain ou un local adéquat. Elle a en outre rappelé que quarante centres de placement immédiat étaient opérationnels et que dix autres seraient ouverts au début de l'année 2002.

La ministre a ensuite fait valoir qu'elle accordait une priorité aux dispositifs d'accueil des jeunes en difficulté ou délinquants, soulignant l'utilité des internats et des séjours de rupture. Elle a insisté sur l'importance des mesures de réparation, indiquant que des réunions de concertation avec les élus étaient organisées pour que ces mesures soient mises en oeuvre dans les meilleures conditions. Elle a également indiqué qu'elle souhaitait qu'il y ait davantage de juridictions pour mineurs, la notion de justice de proximité étant particulièrement importante en cette matière.

Evoquant le statut des éducateurs, elle s'est demandé si le passage dans la catégorie A de la fonction publique ne risquait pas de conduire à un recrutement exclusivement universitaire. Elle a rappelé qu'une des difficultés actuelles était la prise en charge des jeunes les plus difficiles par des éducateurs peu expérimentés, parfois à peine plus âgés que les mineurs dont ils ont la charge. Elle a enfin précisé que le décret relatif au renforcement du principe du contradictoire dans les procédures d'assistance éducative était en cours d'examen par le Conseil d'Etat.

M. Jean-Jacques Hyest, en remplacement de M. Georges Othily, rapporteur pour avis des crédits de l'administration pénitentiaire, évoquant le projet de loi pénitentiaire en préparation, a souhaité connaître le calendrier d'examen du texte. Il a regretté que certaines propositions de la commission d'enquête du Sénat sur les conditions de détention dans les établissements pénitentiaires n'aient pas été rapidement mises en oeuvre, alors même qu'elles ne relevaient pas du domaine législatif. Il a en particulier souligné l'urgence de l'interdiction du maintien en maisons d'arrêt de condamnés à de longues peines. Il a rappelé que la commission d'enquête du Sénat avait souhaité la suppression du Centre national d'observation, dont le mode de fonctionnement retarde l'affectation des détenus en établissements pour peines.

M. Jean-Jacques Hyest a souhaité connaître l'état des négociations relatives à la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail dans l'administration pénitentiaire. A propos du parc immobilier, il a constaté que les programmes de construction annoncés prenaient du retard et que les crédits de paiement n'étaient que faiblement consommés. Il a noté que la ministre avait annoncé la fermeture de vingt-sept établissements pénitentiaires et a souhaité que ces fermetures soient effectuées en tenant compte de l'intérêt de disposer d'établissements à proximité des centres-villes et de la nécessité de faire en sorte que les maisons d'arrêt soient peu éloignées des juridictions. Il s'est ainsi demandé si la fermeture de la maison d'arrêt de Melun était opportune, la future maison d'arrêt de Chauconin-Neufmontiers étant située à 80 km du tribunal de Fontainebleau. Il a rappelé que les extractions judiciaires de détenus étaient coûteuses, notamment en moyens humains, pour la police et la gendarmerie.

Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux, ministre de la justice, a indiqué que le conseil d'orientation stratégique, chargé d'élaborer le projet de loi pénitentiaire, avait achevé ses travaux et qu'un avant-projet comprenant l'ensemble des dispositions législatives et réglementaires envisagées avait récemment été présenté. Elle a indiqué qu'après l'examen du texte par le Conseil d'Etat et le Conseil des ministres, elle envisageait son dépôt au Sénat, afin qu'il puisse être sereinement débattu malgré l'approche d'échéances électorales. Elle a observé que les personnels se montraient désormais intéressés par la démarche entreprise, même s'ils contestaient encore certains aspects de l'avant-projet de loi. Elle a souligné l'importance d'une valorisation du travail des personnels pénitentiaires, qui ont souvent le sentiment d'être tenus à l'écart des évolutions. Elle a relevé que la loi du 12 avril 2000 ayant permis l'assistance des détenus par un avocat au cours de la procédure disciplinaire était très bien acceptée par le personnel.

La ministre a indiqué qu'elle n'envisageait de fermer que des établissements insusceptibles d'être réhabilités. Elle a souligné sa volonté de redessiner la carte pénitentiaire, en tenant compte notamment de la nécessité de prévoir des quartiers pour mineurs et des quartiers pour femmes. Elle a ainsi relevé que les femmes pouvaient rarement bénéficier de la semi-liberté, faute d'établissements adaptés. Elle a indiqué que le projet de loi pénitentiaire prévoyait un nouveau système de classement des établissements pénitentiaires.

Evoquant la réduction du temps de travail, Mme Marylise Lebranchu, a précisé qu'il n'y aurait pas un personnel suffisant pour faire face à cette réforme dès le 1er janvier 2002 et qu'il faudrait en conséquence recourir aux heures supplémentaires. Elle a indiqué que, pour les personnels assurant des fonctions en détention, l'objectif était d'atteindre en 2004 un temps de travail hebdomadaire de trente-trois heures sur un cycle de treize semaines. Elle a estimé normal qu'une application différenciée de la réduction du temps de travail soit prévue en fonction de la plus ou moins grande dureté du travail.

Après avoir rappelé que le financement des centres régionaux de formation professionnelle des avocats (CRFPA) était assuré par une participation de l'Etat, par une contribution provenant des produits financiers des caisses des règlements pécuniaires des avocats, et par une contribution des avocats, M. Michel Dreyfus-Schmidt a souhaité savoir quel était l'objet de la validation proposée par l'article 76 du projet de loi de finances pour 2002. Après avoir marqué son attachement à la gratuité de la formation professionnelle des élèves avocats, il a souhaité obtenir des précisions sur les pratiques actuelles des CRFPA consistant à percevoir des droits d'inscription mis à la charge des élèves avocats destinés à assurer leur financement.

Il a attiré l'attention du garde des sceaux sur la nécessité de remplacer dès son départ un magistrat faisant l'objet d'une mutation afin d'éviter des vacances de postes préjudiciables au fonctionnement des juridictions. Il a également demandé si la création d'une cour d'assises dans le territoire de Belfort était enfin envisagée, rappelant que ce département était le seul en France à ne pas bénéficier d'une telle juridiction. Il a estimé qu'elle était d'autant plus justifiée après l'instauration d'un appel en matière criminelle.

Evoquant la question de la formation professionnelle des avocats,Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux, ministre de la justice, a indiqué que la validation prévue par l'article 76 du projet de loi de finances pour 2002 portait sur les contributions des barreaux au financement des CRFPA versées antérieurement.

A propos des vacances de postes de magistrats, elle a relevé que la procédure des « transparences » permettait difficilement de faire figurer concomitamment sur un même projet de nomination le magistrat faisant l'objet d'une mutation et le magistrat appelé à le remplacer. Elle a rappelé que le ministère s'efforçait d'organiser des grandes « transparences » deux fois par an afin de regrouper les mouvements de magistrats. Elle a enfin indiqué que la création d'une cour d'assises pouvait être étudiée dans le cadre de la réforme de la carte judiciaire.

Mme Nicole Borvo s'est déclarée préoccupée par le climat politique observé dans notre pays à propos des questions de sécurité et de justice. Elle a interrogé la ministre sur sa conception de l'évaluation de la loi sur la présomption d'innocence après sa remise en cause au cours des dernières semaines. Elle s'est inquiétée de la stagnation des crédits consacrés à la protection judiciaire de la jeunesse et a souhaité savoir quand serait examinée la réforme de l'aide juridictionnelle.

Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux, ministre de la justice, a qualifié de détestable le climat prévalant à propos de la loi relative à la présomption d'innocence. Elle a noté que les dispositions contestées avaient été introduites dans le projet de loi par amendements parlementaires et a indiqué que le fond de la loi ne devait pas être revu, sauf peut-être pour reconsidérer l'interdiction faite au ministère public d'interjeter appel d'un arrêt d'acquittement. Elle a considéré que les autres dispositions, notamment celles relatives à la garde à vue, ne devaient pas être remises en cause. Elle a noté que la garde à vue de simples témoins donnait une image peu acceptable de la loi dans notre pays. Elle a en revanche estimé nécessaire de faciliter le travail de la police, notamment dans l'accomplissement des formalités accompagnant le placement en garde à vue. Elle a enfin observé que la France disposait d'un arsenal répressif très lourd, notamment à l'égard des mineurs, et qu'il convenait d'appliquer les textes plutôt que de les modifier. A propos de l'aide juridictionnelle, elle a indiqué qu'un projet de loi serait rapidement prêt, mais qu'il ne pourrait être discuté avant la fin de la législature.

Après avoir salué l'effort substantiel du Gouvernement en faveur des créations d'emplois de magistrats, M. Robert Badinter a jugé nécessaire que les concours d'accès à l'école nationale de la magistrature demeure la voie principale de recrutement. A cet égard, il a souhaité connaître les modalités de recrutement prévues pour les années futures.

Mme Marylise Lebranchu a alors indiqué que, parmi les nouveaux magistrats nommés en 2001, 195  étaient issus de l'école nationale de la magistrature, 33 ayant été recrutés par la voie de l'intégration directe. Elle a précisé qu'en 2002, 208 seraient issus de l'école, 125  des concours supplémentaires, 33  recrutés par intégration directe, ajoutant que ces chiffres seraient respectivement en 2004 de 280, 90 et 65.

M. Jean-Jacques Hyest a indiqué qu'il avait pris connaissance du rapport du Conseil supérieur de la magistrature pour 2000 et qu'il avait pu constater que six sanctions disciplinaires seulement avaient été prononcées, la plus sévère étant la mise en retraite d'office. Il s'est interrogé sur les raisons d'un si faible nombre de sanctions.

Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux, ministre de la justice, a constaté que la question relevait du pouvoir du Conseil supérieur de la magistrature.

PJLF pour 2002 - Audition de M. Michel Sapin, ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat

La commission a ensuite procédé à l'audition de M. Michel Sapin, ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, sur les crédits de son ministère pour 2002.

M. Michel Sapin, ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, a indiqué que malgré le montant très modique du budget de son ministère, deux fois moindre que celui de la région Centre, l'effet de ses décisions concernait la moitié des dépenses du budget de l'Etat.

Après avoir souligné la stabilité des crédits inscrits, il a fait part de l'augmentation des crédits d'action sociale interministérielle consacrés à l'accès à la fonction publique des personnes handicapées, afin de mettre en oeuvre le protocole d'accord signé avec cinq organisations syndicales, tendant à réaliser effectivement l'objectif d'emploi de 6 % de travailleurs handicapés et à aménager les postes. Il a noté qu'un dispositif de sanction et d'incitation serait mis en oeuvre, par le gel des emplois non pourvus par des personnes handicapées l'année précédente et la contribution financière au fonds pour l'emploi des personnes handicapées.

Il a relevé que les crédits destinés aux organismes de formation étaient en augmentation en raison de la hausse du nombre d'élèves, notamment dans les instituts régionaux d'administration.

Quant au fonds pour la réforme de l'Etat, il a souligné que malgré une baisse apparente des crédits, ceux-ci étaient en hausse en raison tant du report intégral des crédits non consommés que des mesures prises en loi de finances rectificative, et seraient employés à la mise en oeuvre de la deuxième étape de l'administration électronique, consistant à permettre aux usagers de remplir la plupart des formulaires administratifs en ligne.

M. Michel Sapin, ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, a ensuite fait part de trois grands sujets de réflexion concernant la fonction publique. Premièrement, concernant l'application de la loi du 3 janvier 2001, il a indiqué que l'ensemble des décrets nécessaires à la résorption de l'emploi précaire dans la fonction publique étaient soit publiés, soit en cours de parution. Après avoir expliqué la priorité donnée à l'éducation nationale par la nécessité de préparer en amont la rentrée scolaire, il a noté les mesures tendant à empêcher la reconstitution de la précarité, notamment le recrutement sans concours à l'échelle 2 de la catégorie C ou encore la déconcentration de l'organisation des concours et la création de la troisième voie, couplée à la reconnaissance des acquis professionnels, permettant de recruter des personnes d'âges différents et d'expériences professionnelles variées.

Dans un deuxième temps, il a mis en évidence que l'échec des négociations salariales dans la fonction publique ne remettait pas en cause la politique du Gouvernement tendant au maintien du pouvoir d'achat de l'ensemble des fonctionnaires sur les cinq années de la législature et à la revalorisation des plus bas salaires. Il a souligné que si l'inflation constatée pour l'année 2001 était supérieure à la prévision, l'augmentation du point envisagée pour 2002 serait elle aussi réévaluée. Il a rappelé ensuite que le comité interministériel à la réforme de l'Etat avait décidé la transparence complète des rémunérations accessoires dans la fonction publique, en particulier par l'obligation de publier au Journal Officiel tous les régimes de primes, afin de favoriser une plus grande mobilité des fonctionnaires.

Enfin, troisième enjeu, il a rappelé que les trois fonctions publiques devaient « passer aux 35 heures » dès le 1er janvier 2002, la moitié des agents de la fonction publique territoriale étant déjà couverts par un accord. Faisant part de son souci d'éviter de trop grandes disparités entre les collectivités locales, il a souligné le rôle du contrôle exercé par le préfet en la matière. Puis il a rappelé que, dans les fonctions publiques de l'Etat et hospitalière, menant des négociations centrales, deux tiers des agents susceptibles de bénéficier des 35 heures étaient déjà couverts par un accord signé. Il a constaté l'existence d'accords informels, qu'il a qualifiés de « non accords non conflictuels », par exemple au ministère de l'agriculture ou dans les préfectures.

M. Michel Sapin, ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, a reconnu que trois négociations n'évoluaient pas positivement : la police nationale, l'administration pénitentiaire et la protection judiciaire de la jeunesse. Il a remarqué que la réduction du temps de travail devait se réaliser sans augmentation proportionnelle des effectifs dans la fonction publique de l'Etat, d'une part en tenant compte du fait que la durée effective moyenne de travail était jusqu'alors de 37, et non de 39 heures, et d'autre part par équivalence avec le secteur privé auquel il avait été demandé un effort de productivité équivalant à deux heures hebdomadaires.

M. Gérard Longuet a déploré que le décret du 12 juillet 2001, pris pour l'application de l'article 21 de la loi du 3 janvier 2001 prévoyant le passage aux 35 heures dans la fonction publique territoriale, aboutisse à limiter considérablement la marge de manoeuvre des collectivités locales, alors que l'acceptation de la diversité aurait permis de mettre en valeur les systèmes les plus judicieux. Puis il a souhaité connaître le nombre d'agents de l'Etat, hors éducation nationale, qui travailleraient moins de 1.600 heures annuelles.

Il a ensuite rapproché les termes de la décision du Conseil constitutionnel du 19 juin 2001 relative à la loi organique sur le statut des magistrats, censurant l'établissement de quotas entre hommes et femmes, de ceux de la loi du 9 mars 2001 prévoyant des mesures spécifiques en faveur des femmes pour l'accès aux jurys de concours et aux instances paritaires dans les trois fonctions publiques.

Il a demandé quelles suites le Gouvernement entendait apporter aux propositions émises par le conseil d'orientation des retraites.

S'agissant du fonds pour la réforme de l'Etat, M. Gérard Longuet a souhaité savoir quel pouvait être le projet fédérateur, évitant l'éparpillement entre les 2.500 projets financés sur les cinq dernières années.

A défaut d'indicateurs de résultats, il a demandé quels pouvaient être les indicateurs de moyens permettant la comparaison entre les grands pays européens concernant les moyens consacrés au service public.

M. Jacques Mahéas s'est déclaré satisfait de l'augmentation des crédits destinés à l'emploi des travailleurs handicapés et de la transparence des primes des fonctionnaires. Il a souhaité savoir quelles mesures étaient envisagées pour pallier les départs en retraite et a évoqué à cet égard le pré-recrutement et la promotion des fonctionnaires non énarques.

Il a ensuite souhaité la généralisation des réseaux « intranet » permettant aux collectivités locales d'échanger des documents avec les autorités chargées de les contrôler.

Puis il s'est déclaré inquiet de la mise en place des 35 heures, l'autonomie des collectivités locales ne devant pas conduire à créer des inégalités entre fonctionnaires territoriaux et à bloquer la mobilité géographique. Citant l'exemple du recrutement des infirmières, il a insisté sur la nécessité de l'uniformisation des conditions de travail entre leurs différents employeurs.

M. Jean-Jacques Hyest a estimé que le passage aux 35 heures pour les pompiers, en raison des nécessaires permanences, ne pourrait se faire sans création d'emplois.

Il a souhaité savoir comment les « conventions éducation prioritaire » de l'institut d'études politiques de Paris respectaient les exigences fixées par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 11 juillet 2001.

Constatant qu'actuellement, les travailleurs handicapés sensoriels et physiques avaient beaucoup de mal à être acceptés dans l'éducation nationale, Mme Michèle André a souhaité obtenir des précisions sur les conditions d'application du protocole d'accord pour l'emploi des travailleurs handicapés.

Elle a ensuite interrogé le ministre sur les charges financières liées au nouveau régime de travail des sapeurs pompiers.

M. Jean-Claude Peyronnet a tout d'abord fait part de la situation d'une imprimerie de son département, spécialisée dans l'impression des formulaires administratifs. Puis il s'est déclaré favorable au recrutement direct dans la catégorie C, mais a dénoncé certaines dérives possibles tendant au recrutement de collaborateurs en fonction de leur appartenance politique.

S'agissant du passage aux 35 heures, il a souhaité savoir si le contrôle de légalité exercé par les préfets permettrait une véritable égalité entre les collectivités territoriales.

M. Patrice Gélard a regretté que l'élaboration du code général de la fonction publique soit retardée par le manque de diligence du ministère de l'intérieur.

Puis il a demandé quel serait l'avenir de l'Institut international d'administration publique.

Il a également souhaité savoir quelles mesures étaient envisagées en prévision de la fin du dispositif « emplois-jeunes ».

M. Patrice Gélard a estimé que le passage aux 35 heures entraînerait un effort budgétaire de 10 à 15 % dans beaucoup de collectivités locales, ou se traduirait par une réduction du service rendu à la population. Jugeant que les cadres de la fonction publique territoriale étaient les oubliés de la réforme, il s'est prononcé en faveur d'une plus grande mobilité des fonctionnaires territoriaux en direction de la haute fonction publique de l'Etat.

Enfin, il a attiré l'attention sur la nécessaire prévision des emplois à dix ans et sur la réflexion à mener sur les nouveaux emplois de la fonction publique.

Mme Josiane Mathon a demandé dans quelle mesure les titulaires d'emplois-jeunes pourraient se présenter aux concours de la fonction publique.

M. Michel Sapin, ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, a indiqué que beaucoup des réponses aux questions soulevées figuraient dans le rapport de l'Observatoire de l'emploi public. Après avoir souligné l'effort d'analyse réalisé pour passer des effectifs budgétaires aux effectifs réellement employés par l'Etat, il a salué la qualité du travail effectué par le ministère de la recherche, qui avait établi un plan sur dix ans de gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des compétences, tenant compte des départs à la retraite, des nouveaux métiers, de la formation et des nécessaires réaffectations. Il a souligné que les autres ministères et les deux autres fonctions publiques devraient entamer la même démarche en 2002.

Concernant le passage aux 35 heures dans la fonction publique territoriale, il a rappelé que le principe choisi en 1984, tendant à aligner les rémunérations des fonctionnaires territoriaux sur celle des corps équivalents de l'Etat, devait être maintenu pour les mêmes raisons d'unité de la fonction publique et de mobilité, sans pour autant exclure une gestion différenciée dans les collectivités locales. Il a cité l'exemple de l'Espagne, mettant aujourd'hui à l'étude un statut de la fonction publique territoriale, afin de remédier aux importantes disparités existantes. Il a précisé que la référence aux 1.600 heures annuelles correspondait à des emplois ne comportant pas de sujétions particulières. Puis il a admis que quelques centaines d'agents de l'Etat travaillaient moins de 1.600 heures par an pour des raisons historiques, sans justification liée à la pénibilité particulière ou aux sujétions.

Afin de diversifier les modes de recrutement des fonctionnaires, il a présenté le système de bourse et de tutorat dit « pré-recrutement » permettant d'accompagner, dès la classe de première, les élèves intéressés par le service public.

Concernant les emplois jeunes, M. Michel Sapin, ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, a souligné le choix de séparer la pérennisation des emplois du devenir des jeunes concernés. Il a noté que la création de la troisième voie d'accès à la fonction publique et la validation des acquis professionnels étaient principalement destinées aux titulaires d'emplois-jeunes. Dans la fonction publique territoriale, il a mis en évidence que les postes d'emplois-jeunes correspondant à de nouveaux métiers avaient donné lieu à la création de cadres d'emplois correspondants.

Il a ensuite approuvé le choix effectué par le conseil d'orientation des retraites de ne pas séparer la question de l'avenir des retraites dans le privé de celle du secteur public.

Quant au fonds pour la réforme de l'Etat, il a estimé que sa souplesse et la diversité des initiatives locales qu'il finançait constituaient sa force, le projet fédérateur étant la mise en place de l'administration électronique.

Puis il a fait part de travaux actuellement engagés pour la mise en oeuvre d'indicateurs de résultats qui soient homogènes entre les différents Etats européens, cette réflexion étant indispensable dans le cadre de la nouvelle loi organique relative aux lois de finances.

S'agissant de l'emploi des travailleurs handicapés, M. Michel Sapin, ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, a fait savoir que le protocole d'accord ne s'appliquerait ni à la fonction publique territoriale ni à la fonction publique hospitalière, qui respectent d'ores et déjà le taux de 6 %. Pour l'Etat, il a indiqué que 6 % des embauches de l'année devraient concerner des personnes handicapées, cette obligation étant sanctionnée par un gel du poste en l'absence de recrutement d'une personne handicapée.

Il a indiqué que l'IIAP fusionnerait avec l'Ecole nationale d'administration au 1er janvier 2002, le même établissement étant conduit à l'avenir à assurer trois missions, la formation, la coopération administrative avec les Etats étrangers, les publications et recherches.

S'agissant de la « loi Génisson », il a noté qu'elle ne créait pas de quotas mais une incitation forte à la désignation de femmes comme représentantes de l'administration.

Il a estimé que la procédure de présélection dans les lycées situés en zone d'éducation prioritaire et l'entretien avec le jury à Sciences Po garantissaient la constitutionnalité du dispositif des « conventions éducation prioritaire » de l'IEP de Paris.

Enfin il a promis la publication rapide du code général de la fonction publique.

Interrogé par M. René Garrec, président, sur la suppression de la prime d'éloignement versée aux fonctionnaires travaillant outre-mer, M. Michel Sapin, ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, a indiqué que le décret était en cours de validation par Matignon.

Mercredi 28 novembre 2001

- Présidence de M. René Garrec, président.

PJLF pour 2002 - Crédits consacrés à la police et à la sécurité - Examen du rapport pour avis

La commission a tout d'abord procédé, sur le rapport de M. Jean-Patrick Courtois, à l'examen pour avis des crédits de l'intérieur pour 2002, affectés à la police et à la sécurité.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis, a souligné le contexte particulier dans lequel s'ouvrait la discussion du budget de la police pour 2002 marqué, outre par la mise en oeuvre du plan vigipirate renforcé après les attentats du 11 septembre et par la surveillance des convoyages de fonds liés au passage à l'euro, par l'expression, à travers le pays, d'un malaise touchant tous les corps de policiers. Il a rendu hommage aux sept policiers tués en opération de police depuis le début de l'année.

Observant que le budget s'établissait à 5,044 milliards d'euros, il a considéré que l'augmentation de 3,4% des crédits par rapport à 2001 ne suffirait pas pour répondre à l'insécurité que connaissait le pays et à assurer la généralisation de la police de proximité dans de bonnes conditions. Il a en effet souligné que le recrutement de 3000 agents supplémentaires serait absorbé par la réduction du temps de travail.

Analysant la délinquance, il a fait ressortir qu'elle avait augmenté en valeur absolue de 5,72% en 2000, qu'elle devenait de plus en plus violente, les coups et blessures volontaires et les vols avec violence ayant plus que doublé depuis 1988, et qu'elle impliquait un nombre croissant de mineurs, la part de ces derniers dans le total des mis en cause s'élevant à 21%. Il a fait ressortir la faiblesse des taux d'élucidation, en baisse constante ces dernières années, et a déploré le nombre important de classements sans suite touchant les affaires élucidées. Il a observé que les statistiques officielles étaient en décalage avec la réalité, laissant place à un « chiffre noir » de la criminalité.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis, a considéré que face à cet accroissement de la criminalité, la généralisation de la police de proximité prévue d'ici juin 2002 serait gravement hypothéquée par le manque de moyens en personnels.

Il a rappelé que 528 contrats locaux de sécurité avaient été signés, mais que leurs résultats étaient souvent décevants, une majorité de maires estimant n'être pas suffisamment associés à leur mise en oeuvre.

Rappelant le manque de policiers sur le terrain, dû notamment aux vacances de postes résultant des départs massifs à la retraite, il a évoqué les moyens mis en oeuvre, sans réel succès, pour redéployer les personnels sur le terrain, notamment la fidélisation des forces mobiles ou la suppression des « charges indues ». Il a noté que le recours à des personnels administratifs était insuffisant et que la police française était sous-administrée par comparaison avec les pays voisins. Il a regretté que faute d'un nombre suffisant de policiers, la police de proximité repose sur des adjoints de sécurité peu expérimentés qui, en l'absence d'un encadrement suffisant, étaient souvent livrés à eux-mêmes ou confiés à de jeunes stagiaires. Il a insisté pour que soit assurée la qualité de la formation et de l'encadrement de ces adjoints de sécurité, dont le recrutement se révélait d'ailleurs difficile.

S'agissant de la loi sur les polices municipales, il a considéré que son application sur le terrain se révélait satisfaisante, notant que 1.442 conventions de coordination avaient été signées, que le nombre de policiers municipaux s'élevait à 14.442 et que leur avaient été délivrées 4.534 autorisations de ports d'armes de la quatrième catégorie et 8.749 autorisations de ports d'armes de la sixième catégorie.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis, a ensuite évoqué le malaise des policiers, soulignant qu'il avait été surpris de constater, lors de l'entretien qu'il avait eu la veille avec les principaux syndicats de policiers actifs, que tous les corps, y compris celui des commissaires, exprimaient le même découragement.

Il a rapporté à la commission que la plupart des représentants des policiers souhaitaient une véritable programmation pluriannuelle des moyens de l'ensemble des acteurs de la sécurité, certains évoquant un « plan Marshall » de la sécurité, d'autres un « Grenelle » de la sécurité. Il a indiqué que tous mettaient en cause la lourdeur des procédures induites par la loi sur la présomption d'innocence qui décourageait, selon eux, les policiers et favorisait la libération des prévenus par la justice développant un sentiment d'impunité chez les « voyous ». Il a enfin signalé que les policiers réclamaient plus de considération et une meilleure reconnaissance financière de leur action et qu'ils avaient été choqués de voir que, dans le cadre des négociations relatives à la réduction du temps de travail, il leur était proposé une rémunération insuffisante des heures supplémentaires à 57 F de l'heure.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis, a estimé que ce malaise des policiers devait être pris en compte par le gouvernement, dans un premier temps à travers un effort budgétaire significatif. Il a considéré qu'il conviendrait par la suite d'apporter à la loi sur la présomption d'innocence les modifications qui se révèleraient éventuellement nécessaires et de se donner les moyens d'une véritable politique de sécurité cohérente sur le long terme.

S'agissant du projet de budget, il a souligné que l'augmentation de 4,64 % des dépenses de personnel permettait, outre la mise en oeuvre au sein de la police des mesures indiciaires intervenues au bénéfice de la fonction publique, le recrutement de 3.000 agents supplémentaires, à savoir de 2.700 agents du corps de maîtrise et d'application, dont 1.000 avaient été recrutés par anticipation en 2001, et de celui de 300 agents administratifs et techniques.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis, a considéré que ces recrutements supplémentaires ne permettraient pas à la police nationale d'assurer une présence effective sur le terrain en raison des départs à la retraite massifs, de la récupération des heures supplémentaires, des difficultés de recrutement des adjoints de sécurité dont le nombre n'avait jamais dépassé 16 000 pour un effectif budgétaire autorisé de 20 000, et, principalement, des conséquences prévisibles de la réduction du temps de travail.

Il a indiqué qu'une enveloppe de 361 millions de francs était consacrée à des mesures catégorielles et indemnitaires ne répondant pas aux aspirations des personnels, citant notamment une provision pour la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail et une enveloppe devant alimenter le nouveau régime indemnitaire des agents du corps de maîtrise et d'application.

S'agissant des crédits de fonctionnement et d'équipement, ila considéré qu'ils seraient insuffisants pour rattraper les retards accumulés ces dernières années s'agissant notamment du parc de véhicules lourds et légers, du parc immobilier, du développement du réseau ACROPOL et du logement des policiers et qu'il serait difficile de satisfaire des besoins de formation en considérable accroissement.

S'agissant des applications informatiques, M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis, a précisé que des incertitudes pesaient sur la gestion du système d'information Schengen (SIS) dont la communautarisation était envisagée, que le fichier de traitement des infractions constatées (STIC) avait enfin fait l'objet d'une autorisation réglementaire, et que le fichier national des empreintes génétiques (FNAEG) devrait trouver un début de mise en oeuvre opérationnelle à la fin 2001.

Il a observé qu'il conviendrait de prévoir le financement des plans vigipirate et du plan de surveillance des convoyages de fonds liés au passage à l'euro, estimant que faute de chiffrage précis, il n'était pas certain que soient suffisants pour financer ces opérations les 450 millions de francs inscrits à la loi de finances rectificative pour 2001, que le ministre avait indiqué par ailleurs vouloir consacrer en partie à l'acquisition d'un gilet pare-balle pour chaque policier.

En conclusion, M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis, a proposé à la commission de donner un avis de rejet des crédits de la police nationale.

M. Michel Dreyfus-Schmidt a considéré que le rapporteur pour avis avait exploité à des fins électoralistes des statistiques de la délinquance dont on ne pouvait ignorer le caractère trompeur. Il a souligné que la majorité sénatoriale faisait preuve de contradictions en souhaitant une diminution d'ensemble des dépenses budgétaires tout en préconisant des augmentations de crédits lors de l'examen du budget de chaque département ministériel. Il a observé que le rapporteur pour avis n'avait pas indiqué à quand remontait le retard qu'il avait évoqué en matière d'équipement de la police.

M. Roger Karoutchi a considéré, au contraire, que la description de la délinquance opérée par le rapporteur pour avis était plutôt optimiste. Soulignant que depuis 1996, les coups et blessures volontaires avaient augmenté de 43% alors que, dans le même temps, l'effectif des policiers actifs n'avait crû que de 1,5%, il a considéré que le gouvernement actuel, s'il ne pouvait pas être rendu responsable de l'insécurité en elle-même, n'avait pas pris à temps la mesure du phénomène et de son caractère insupportable pour les citoyens.

M. René Garrec, président, a souligné que la France connaissait actuellement la situation qui prévalait à New York trente ans auparavant.

M. José Balarello a considéré que l'explosion de la délinquance trouvait en grande partie sa source dans le regroupement de familles de même origine dans des grands ensembles construits dans les années 60 à 70.

M. Robert Bret a fait valoir que les chiffres pouvaient se retourner contre ceux qui les utilisaient à des fins électorales. Il a considéré que le budget 2002 était le budget le plus ambitieux depuis le plan Joxe en 1985. Il a observé que les réponses à la délinquance ne pouvaient avoir un aspect uniquement répressif. S'agissant de la loi sur la présomption d'innocence, il a rappelé que le Parlement était conscient au moment de son vote que sa mise en oeuvre nécessiterait d'importants moyens. Il a estimé qu'il ne convenait pas de discréditer le rôle du législateur en reprenant les discours des syndicats de policiers, qui s'étaient d'ailleurs opposés dès l'origine au vote d'une loi étrangère à leur culture.

M. Alex Türk a regretté que dans la formation délivrée aux futurs commissaires par l'école nationale de police, l'aspect relationnel et diplomatique de la fonction de policier prenne le pas sur l'apprentissage des techniques policières.

En réponse aux orateurs, M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis, a considéré que l'augmentation des crédits n'était pas suffisante pour faire face aux charges nouvelles induites par la mise en oeuvre des 35 heures, par le plan vigipirate renforcé et par la surveillance du passage à l'euro.

En réponse à M. José Balarello qui souhaitait que la police municipale décharge la police nationale du contrôle de la circulation et du stationnement dans les villes, il a indiqué que cette question pouvait être traitée dans le cadre des conventions de coordination.

En réponse à M. Michel Dreyfus-Schmidt, M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis, a apporté plusieurs précisions statistiques. Il a confirmé que les taux d'élucidation étaient en baisse continuelle ces dernières années, citant les taux de 36,8% en 1991, 30,20% en 1996, 28,63% en 1998 et 27,63 en 1999. Il a indiqué que le ratio de membres de forces de l'ordre qui était de un pour 250 habitants en France s'établissait à un pour 380 en Grande-Bretagne, un pour 340 aux Pays-Bas et un pour 300 en Allemagne, mais qu'il était inférieur en Italie et en Espagne. Il a enfin précisé que le nombre de policiers morts en opération de police était d'1 en 2000, de 4 en 1999, de 7 en 1998 et de 3 en 1997.

La commission a décidé de donner un avis défavorable sur l'adoption des crédits relatifs à la police et à la sécurité.

PJLF pour 2002 - Crédits consacrés à la sécurité civile - Examen du rapport pour avis

Puis la commission a procédé, sur le rapport de M. Jean-Pierre Schosteck, à l'examen pour avis des crédits de l'intérieur pour 2002, affectés à la sécurité civile.

M. Jean-Pierre Schosteck
, rapporteur pour avis, a rapproché les 462 millions d'euros consacrés par les différents ministères à la sécurité civile pour 2002, dont 249 millions au titre du ministère de l'intérieur, des 2,5 milliards d'euros supportés par les collectivités territoriales à ce titre.

Convenant, comme M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur, devant la commission le 21 novembre dernier, de ce que la sécurité civile figurait parmi les compétences traditionnelles des collectivités territoriales, il a cependant jugé que l'Etat devrait prendre une part plus large des moyens indispensables pour affronter les catastrophes de grande ampleur et mieux mettre en oeuvre son obligation de solidarité nationale à l'égard des collectivités et des populations les plus lourdement touchées.

M. Jean-Pierre Schosteck, rapporteur pour avis, constatant que le budget de la sécurité civile pour 2002 ne marquait aucune évolution à cet égard, a craint que les réformes législatives en cours d'examen et annoncées ne suffisent pas à une indispensable clarification en la matière.

Il a précisé que les crédits du ministère de l'intérieur seraient stables en 2002 et a rappelé que selon les indications de M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur, le dispositif de vigilance mis en place à la suite des attentats du 11 septembre 2001 conduirait le Gouvernement à proposer un crédit supplémentaire de 32,32 millions d'euros dans le prochain projet de loi de finances rectificative.

M. Jean-Pierre Schosteck a exposé que le plan Biotox était mis en oeuvre par le ministère de la santé, que la prise en charge par l'Etat de certains frais de transport assurés à ce titre par les services départementaux d'incendie et de secours était mise à l'étude et que le financement de ce plan, prévu par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002, serait pour l'essentiel assuré sous forme d'avance par la caisse nationale d'assurance maladie à hauteur de 200 millions d'euros.

Il a rappelé que la progression sensible des crédits de personnel sur les trois derniers exercices budgétaires résultait de la professionnalisation des armées et que les crédits prévus pour 2002 permettraient notamment l'achèvement du programme triennal de revalorisation du régime indemnitaire des pilotes d'hélicoptères.

M. Jean-Pierre Schosteck, rapporteur pour avis, a indiqué que les crédits de fonctionnement permettraient en particulier la poursuite de la modernisation des matériels d'intervention pour le déminage et des matériels de soutien pour les missions opérationnelles des unités militaires de sécurité civile.

Il a souligné que les crédits d'investissement subiraient une baisse de 3,6 %, ajoutant que les dotations consacrées aux opérations immobilières seraient affectées notamment à la deuxième tranche des travaux de mise en sécurisation du site de déminage de Vimy et à la poursuite des opérations d'aménagement des soutes à munitions des trois centres de déminage de Brest, Caen et Châlons-en-Champagne.

M. Jean-Pierre Schosteck a précisé qu'après l'achèvement du marché d'acquisition des Canadair CL 415 en 1997, le démarrage du programme de renouvellement de la flotte d'hélicoptères avait cette année déjà enregistré un retard de plus de 18 mois, ajoutant que, sauf nouveau retard, ce programme devrait être achevé en 2005.

Evoquant les incendies de forêt, il a indiqué que les chiffres provisoires de l'année 2001 à la date du 20 septembre laissaient apparaître que 16.000 hectares avaient été détruits sur l'ensemble du territoire, au lieu de 12.000 en moyenne à la même époque de l'année. Il a ajouté que, pour la région méditerranéenne, 13.000 hectares avaient été dévastés alors que la moyenne à cette période de l'année n'est que de 9.500 hectares.

Convenant de ce que les facteurs climatiques pouvaient être invoqués comme l'une des causes de l'aggravation de la situation, M. Jean-Pierre Schosteck, rapporteur pour avis, a cependant souligné que le taux d'élucidation des incendies de forêt était évalué par le ministère de l'intérieur à 50 % et que parmi les cas élucidés 40 % étaient imputables à une imprudence et 45 % à un acte de malveillance. Il a exprimé le souhait d'une plus grande vigilance contre les actes de nature criminelle et leur poursuite sévère dans tous les cas.

Après avoir évoqué la loi d'orientation sur la forêt du 9 juillet 2001, adoptée dans les mêmes termes par les deux assemblées, précisant que celle-ci comportait des dispositions préventives contre les incendies de forêt, il a rappelé que la commission sénatoriale d'enquête sur les inondations dans la Somme avait formulé 33 propositions afin de favoriser leur meilleure prévention et une amélioration de la gestion des crises.

M. Jean-Pierre Schosteck, rapporteur pour avis, a exposé que l'unité de déminage était chargée de rechercher, neutraliser et détruire les engins de guerre laissés sur le sol français au cours des derniers conflits et les objets suspects placés à des fins terroristes et de sécuriser les voyages officiels. Il a rappelé qu'un quart du milliard d'obus tirés pendant la Première guerre mondiale et un dixième des obus tirés durant la Seconde guerre mondiale n'ont pas explosé au cours de ces conflits.

Il a évoqué l'étude de dangers et d'impacts à laquelle il a été procédé sur les sites de déminage et les opérations exceptionnelles de Vimy et de Châtelet-sur Retourne ainsi que le programme SECOIA pour l'élimination des armes chimiques anciennes, rappelant que celui-ci relevait de la compétence du ministère de la défense.

Le rapporteur a rappelé que 2001 avait été la dernière année de mise en oeuvre de la loi dite de départementalisation des services d'incendie et de secours du 3 mai 1996 et a exposé les principales évolutions statutaires intervenues ces derniers mois et, en particulier, la réforme de la filière des sapeurs-pompiers professionnels qui avait fait l'objet de six décrets du 30 juillet 2001.

Il a ajouté que pour donner suite à une observation de la Cour des comptes, la loi du 17 juillet 2001 portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel avait conféré une base juridique à la mise à disposition de l'Etat des sapeurs-pompiers professionnels pour y assurer une mission de service public.

M. Jean-Pierre Schosteck, rapporteur pour avis, après avoir rappelé que le projet de loi relatif à la démocratie de proximité, en instance au Sénat, comportait des dispositions relatives au fonctionnement et au financement des services départementaux d'incendie et de secours, a indiqué que le projet de loi de modernisation de la sécurité civile, dont le dépôt par le Gouvernement était annoncé pour la fin de l'année, devrait prévoir en particulier un renforcement de l'échelon zonal pour favoriser la mutualisation des moyens. Il a estimé que la pertinence d'un tel dispositif serait liée aux moyens effectivement déployés par l'Etat pour financer ces structures zonales.

Après que la commission des lois, sur la proposition de M. Jean-Pierre Schosteck, rapporteur, eut émis un avis défavorable sur les crédits de la sécurité civile pour 2002, M. René Garrec, président, a évoqué l'organisation éventuelle d'auditions de la commission sur la question des incendies de forêt.

PJLF pour 2002 - Crédits consacrés à la décentralisation - Examen du rapport pour avis

Puis la commission a procédé, sur le rapport de M. Daniel Hoeffel, à l'examen pour avis des crédits de l'intérieur pour 2002, relatifs à l'administration territoriale et à la décentralisation.

M. Daniel Hoeffel, rapporteur pour avis, a indiqué que son analyse porterait successivement sur les crédits de l'administration territoriale, les concours financiers de l'Etat aux collectivités territoriales et les perspectives de la décentralisation.

S'agissant de l'administration territoriale, M. Daniel Hoeffel, rapporteur pour avis, a mis en exergue l'effort de modernisation des préfectures engagé depuis plusieurs années.

Après avoir indiqué que les effectifs budgétaires de l'administration territoriale s'élèveraient à 30 084 en 2002, il a relevé que le nombre des préfets était de 229 en 2001, pour un effectif budgétaire de 129, et celui des sous-préfets, de 558, pour un effectif budgétaire de 453. Il a rappelé que les Assises nationales des préfectures, organisées le 23 novembre 2000 à Lyon, avaient permis d'élaborer un nouveau plan pluriannuel d'action, ayant pour objet principal l'amélioration de l'accueil du public et le développement des nouvelles technologies de l'information. Il a précisé que l'expérience de globalisation des crédits de fonctionnement des préfectures serait étendue à quatre nouveaux départements en 2002. Enfin, il a appelé de ses voeux un approfondissement du partenariat avec les collectivités locales, beaucoup d'élus locaux souhaitant légitimement, face à la complexité croissante de la règle de droit, que les préfectures leur apportent une plus grande expertise juridique.

Regrettant que la mise en oeuvre de la déconcentration administrative soit plus laborieuse et que le pouvoir des préfets sur les administrations de l'Etat s'exerce encore sur un périmètre trop limité, M. Daniel Hoeffel, rapporteur pour avis, a rappelé la proposition de la mission d'information du Sénat sur la décentralisation de faire de ces derniers les véritables représentants interministériels de l'ensemble des services de l'Etat.

M. Daniel Hoeffel, rapporteur pour avis, a ensuite présenté les concours de l'Etat aux collectivités territoriales en 2002. Il a estimé que leur augmentation devait être soulignée, mais qu'elle ne devait pas faire oublier les déceptions et les inquiétudes suscitées par le projet de loi de finances.

Après avoir précisé que les concours de l'Etat aux collectivités locales s'élèveraient, globalement, à 56 milliards d'euros, c'est-à-dire 368 milliards de francs, il a indiqué que l'article 21 du projet de loi de finances reconduisait, pour un an, les conditions de mise en oeuvre du « contrat de croissance et de solidarité » en 2001. Il a précisé qu'en conséquence, le périmètre de l'enveloppe « normée » en 2002 serait identique à celui de 2001, de même que le mode de calcul de son indexation, c'est-à-dire un indice comprenant l'évolution des prix pour l'année à venir et 33 % du taux de croissance du produit intérieur brut en volume pour l'année en cours.

Il a observé qu'au sein de cette enveloppe, la dotation globale de fonctionnement progresserait de 4,07 %, pour atteindre 18 milliards d'euros (118,6 milliards de francs) en 2002. Il a souligné qu'elle ferait en outre l'objet de trois abondements exceptionnels :

- une majoration globale d'un peu plus de 309 millions d'euros (2 milliards de francs) de la dotation d'aménagement, afin d'intégrer dans cette dotation et de pérenniser le financement des communautés d'agglomération ;

- une majoration de 122 millions d'euros (800 millions de francs) de la dotation de solidarité urbaine ;

- une majoration de 24,36 millions d'euros (160 millions de francs) de la dotation de solidarité rurale.

M. Daniel Hoeffel, rapporteur pour avis, a ensuite relevé cinq motifs de préoccupation.

Il a tout d'abord indiqué que les règles d'indexation de l'enveloppe « normée » ne permettaient pas d'associer pleinement les collectivités locales aux fruits de la croissance, à laquelle elles apportent pourtant une contribution majeure. Observant que, depuis 1999, l'indexation avait toujours pris en compte une part croissante du produit intérieur brut, il a regretté que cette part ne soit pas portée à 50 % en 2002.

Il a ensuite déploré que le contrat de croissance et de solidarité n'établisse aucun lien entre l'évolution des concours de l'Etat et celle des charges des collectivités locales. Il a souligné que ces charges étaient elles-mêmes fortement évolutives, en particulier sous l'effet de décisions prises par l'Etat seul, par exemple pour la rémunération des fonctionnaires ou en matière de normes.

M. Daniel Hoeffel, rapporteur pour avis, a constaté que l'ajustement de l'enveloppe normée par le biais de la dotation de compensation de la taxe professionnelle aboutissait, année après année, à une amputation très forte de cette dotation, pourtant destinée à compenser des pertes de recettes fiscales, et qu'il en résultait un manque à gagner très lourd pour les collectivités concernées.

Il a également exprimé la crainte que le montant de deux milliards de francs, prélevé pour partie sur la dotation de compensation de la taxe professionnelle et intégré dans la dotation globale de fonctionnement des groupements, ne s'avère insuffisant pour financer les communautés d'agglomération, ce qui pourrait entraîner une ponction sur la dotation de solidarité rurale et la dotation de solidarité urbaine.

Enfin, il a considéré que la multiplication des abondements dits exceptionnels, « hors enveloppe normée », et le poids croissant des compensations d'exonération de fiscalité locale traduisaient l'impasse dans laquelle était engagé le système de financement local. Reprenant l'expression du président du Sénat, M. Christian Poncelet, devant le 84e Congrès de l'Association des maires et des présidents de communautés de France, il a estimé que ce système était « à bout de souffle ».

M. Daniel Hoeffel, rapporteur pour avis, a souhaité aborder trois thèmes dans la perspective d'une nouvelle étape de la décentralisation : les conditions d'exercice des mandats locaux, l'approfondissement de la coopération intercommunale, l'avenir du système de financement local.

Il a relevé qu'au cours des dernières années, souvent à l'initiative du Sénat, des progrès avaient été accomplis pour renforcer la sécurité juridique de l'exercice des mandats locaux, qu'il s'agisse de la « loi Fauchon », de l'entrée en vigueur du nouveau code des marchés publics ou de la réforme des chambres régionales des comptes.

Considérant que ces progrès devaient être amplifiés, il a appelé de ses voeux l'élaboration d'un véritable « statut » de l'élu, respectueux de la tradition française d'une non-professionnalisation de l'exercice des mandats. Il a estimé que la proposition de loi relative à la démocratie locale, adoptée par le Sénat le 18 janvier 2001, pourrait servir de base pour l'examen du projet de loi relatif à la démocratie de proximité, qui devrait être en discussion au Sénat au mois de janvier 2002.

En deuxième lieu, M. Daniel Hoeffel, rapporteur pour avis, a déclaré que le mouvement en cours de renforcement de la coopération intercommunale devait être poursuivi, sur le fondement de la libre volonté des communes, dans un cadre juridique simplifié et souple.

Il a observé qu'au 1er janvier 2001, près de 2.000 établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre avaient été créés, regroupant 23.500 communes et 42 millions d'habitants, soit environ les deux tiers des communes et de la population française. Il a indiqué que, dans ce total, figuraient 511 établissements publics de coopération intercommunale à taxe professionnelle unique, regroupant 5.700 communes et 21 millions d'habitants.

Il a souligné que ce développement de la coopération intercommunale ne devait pas se faire au détriment de l'identité communale, rappelant qu'en tant que niveau d'administration de proximité, les communes devaient jouer un rôle essentiel dans la prise en charge d'un certain nombre de besoins relevant de la vie quotidienne des Français. Il a indiqué que cette dimension devrait être prise en compte dans les réflexions sur la désignation au suffrage universel direct des délégués intercommunaux, perspective ouverte, tant par la mission sénatoriale d'information sur la décentralisation que par la commission pour l'avenir de la décentralisation, et introduite par l'Assemblée nationale dans le projet de loi relatif à la démocratie de proximité.

Enfin, M. Daniel Hoeffel, rapporteur pour avis, a observé que l'avenir du système de financement local suscitait de légitimes inquiétudes.

Citant le rapport présenté par M. Joël Bourdin au nom de l'Observatoire des finances locales, il a souligné l'effort de maîtrise de leurs budgets par les collectivités territoriales. Il a ainsi fait remarquer qu'en dépit d'une augmentation sensible des dépenses de personnel, les dépenses de gestion étaient contenues, la charge de la dette diminuait et les impôts et taxes restaient stables. Il a également mis en exergue la forte croissance des investissements des collectivités territoriales en 2000, année précédant des élections municipales.

M. Daniel Hoeffel, rapporteur pour avis, a observé que les recettes fiscales représentaient désormais moins de la moitié des ressources globales des collectivités locales, qu'il en résultait un brouillage entre fiscalité et compensations et la menace d'une dépendance financière des collectivités locales à l'égard de l'Etat.

Il a rappelé que le Sénat avait souhaité donner un coup d'arrêt à cette dérive en adoptant, sur le rapport de M. Patrice Gélard, une proposition de loi constitutionnelle présentée par le président du Sénat, M. Christian Poncelet. Il a noté que la commission pour l'avenir de la décentralisation, présidée par M. Pierre Mauroy, s'était elle-même prononcée en faveur de la préservation de l'autonomie fiscale des collectivités locales. Enfin, il a observé que le Premier ministre avait annoncé une « grande réforme » des finances locales avec la présentation, à la fin de l'année 2001, d'un rapport sur les voies et moyens d'une réforme des ressources des collectivités locales. Après avoir précisé qu'une note d'étape avait été communiquée au Comité des finances locales et aux commissions parlementaires, le 12 juillet 2001, il a jugé utile, à ce stade, de souligner que la réforme du système de financement local devrait reposer sur deux piliers : l'autonomie fiscale des collectivités territoriales et la péréquation.

Après avoir ainsi mis en exergue les aspects positifs et négatifs du projet de budget et indiqué qu'il envisageait de s'en remettre à la sagesse du Sénat, M. Daniel Hoeffel, rapporteur pour avis, a souhaité recueillir le sentiment de la commission.

M. Jean-Pierre Schosteck s'est élevé contre le mépris dans lequel étaient tenus les responsables locaux. Il a cité, à titre d'exemple, la délimitation autoritaire par certains préfets du périmètre des établissements publics de coopération intercommunale. Il a également évoqué les augmentations des rémunérations des fonctionnaires, décidées par l'Etat sans concertation avec les collectivités territoriales, et les transferts de charges non compensés. Aussi a-t-il indiqué que le groupe du Rassemblement pour la République voterait contre l'adoption des crédits relatifs à l'administration territoriale et à la décentralisation.

M. Jean-Pierre Sueur a fait remarquer que la commission avait, par le passé, adopté des crédits en augmentation plus faible qu'aujourd'hui, mais présentés par un Gouvernement d'une autre tendance. Il a souligné que le « contrat de croissance et de solidarité » avait permis aux collectivités territoriales de bénéficier, de 1999 à 2001, d'une indexation des concours de l'Etat plus favorable que le pacte de stabilité, appliqué de 1996 à 1998 et aux termes duquel les dotations évoluaient comme les prix à la consommation hors tabac. Il a déclaré que la dotation de compensation de la taxe professionnelle avait toujours joué le rôle de variable d'ajustement de l'enveloppe « normée ». Il a toutefois souhaité que les dotations de l'Etat aux collectivités territoriales soient moins importantes, mais contribuent davantage à la péréquation. Après avoir souligné la révolution que constituait le développement de l'intercommunalité, il s'est prononcé pour un avis favorable à l'adoption des crédits relatifs à l'administration territoriale et à la décentralisation.

En réponse à M. Jean-Pierre Schosteck, M. Jean-Claude Frécon a lui aussi tenu à souligner, d'une part, que le contrat de croissance et de solidarité était plus favorable aux collectivités territoriales que le pacte de stabilité, d'autre part, que les compensations d'exonérations fiscales décidées par l'actuel Gouvernement faisaient l'objet d'une indexation, ce qui n'avait pas été le cas en d'autres temps. Il a lui aussi regretté que les élus locaux ne soient pas associés aux négociations salariales dans la fonction publique. Enfin, il a indiqué qu'en matière d'intercommunalité, les préfets assumaient une tâche difficile d'arbitre entre des intérêts souvent contradictoires mais qu'ils pouvaient s'appuyer sur les avis des commissions départementales de la coopération intercommunale. Il a donc invité la commission à adopter les crédits relatifs à l'administration territoriale et à la décentralisation.

Après avoir souligné que le contrat de croissance et de solidarité constituait un progrès significatif par rapport au pacte de stabilité, M. Robert Bret a appelé de ses voeux une réforme du système de financement local tendant à renforcer l'autonomie fiscale des collectivités territoriales et la péréquation. Il a rappelé que le groupe communiste républicain et citoyen s'était opposé, lors des débats relatifs à la loi « Chevènement » du 12 juillet 1999, à tout pouvoir de décision autoritaire du préfet pour délimiter le périmètre des établissements publics de coopération intercommunale. Il a indiqué que le projet de loi relatif à la démocratie de proximité contenait des dispositions importantes relatives au statut de l'élu, à l'élection des délégués intercommunaux au suffrage universel direct et au transfert de nouvelles compétences aux régions. En conclusion, il a appelé la commission à relever les mesures positives contenues dans le projet de loi, plutôt que les menaces pesant sur l'avenir du système de financement local et à adopter les crédits relatifs à l'administration territoriale et à la décentralisation.

M. Jean-Jacques Hyest a souligné que, contrairement au contrat de croissance et de solidarité, le pacte de stabilité avait été adopté dans un contexte de crise économique profonde. Tout en comprenant les motifs ayant présidé à la réforme de la fiscalité locale, il a observé que le remplacement d'impôts par des dotations de l'Etat réduisait l'autonomie des collectivités territoriales. Aussi a-t-il regretté que la réforme des finances locales soit sans cesse remise sur le métier, alors que des mesures telles que la révision des bases des impôts seraient d'ores et déjà possibles. Il a également exprimé la crainte que le développement de l'intercommunalité ne pèse sur la dotation de solidarité urbaine et la dotation de solidarité rurale dont bénéficient les communes défavorisées. Enfin, il a dénoncé les charges supplémentaires imposées aux départements, qu'il s'agisse de la création de l'allocation personnalisée d'autonomie, de la réforme des services départementaux d'incendie et de secours ou encore de la mise en oeuvre de l'aménagement et de la réduction du temps de travail. Pour cette raison, il a indiqué qu'il voterait contre les crédits relatifs à l'administration territoriale et à la décentralisation.

M. José Balarello a également critiqué le comportement de certains préfets dans la définition du périmètre des structures intercommunales.

M. Michel Dreyfus-Schmidt a estimé que le coût de la création de l'allocation personnalisée d'autonomie serait équitablement mis à la charge de l'Etat et des départements. Il a rappelé que la loi du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale avait fait l'objet d'un accord entre le Sénat et l'Assemblée nationale. Il s'est déclaré favorable à l'adoption des crédits relatifs à l'administration territoriale et à la décentralisation.

M. Daniel Hoeffel, rapporteur pour avis, a souligné que l'augmentation globale des crédits ne devait pas faire oublier les nombreux motifs d'inquiétude rappelés dans son exposé liminaire, en particulier quant au financement de la dotation de solidarité urbaine, de la dotation de solidarité rurale et de la dotation de compensation de la taxe professionnelle. Il a fait remarquer qu'il avait été plus difficile d'instaurer un pacte de stabilité en période de récession que de proposer un contrat de croissance et de solidarité en période de développement économique.

La commission a décidé de donner un avis défavorable à l'adoption des crédits relatifs à l'administration territoriale et à la décentralisation.

PJLF pour 2002 - Crédits consacrés aux départements d'outre-mer - Examen du rapport pour avis

Puis la commission a procédé à l'examen du rapport pour avis de M. José Balarello consacré aux crédits alloués par le projet de loi de finances pour 2002 aux départements d'outre-mer ainsi qu'aux collectivités d'outre-mer à statut particulier de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Mayotte.

M. José Balarello, rapporteur pour avis, a tout d'abord indiqué que les crédits du secrétariat à l'outre-mer représentaient moins de 11 % du total des moyens budgétaires consacrés à l'outre-mer pour 2002, qui s'élèvent à 8,44 milliards d'euros pour les dépenses ordinaires et crédits de paiement (soit une progression de 7,13 %) et 892 millions d'euros en autorisations de programme (soit une augmentation de 5,11 %).

M. José Balarello, rapporteur pour avis, a estimé que ce budget était insuffisant compte tenu des importants besoins des collectivités d'outre-mer au regard notamment des juridictions, des établissements pénitentiaires, de la sécurité et du contrôle de l'immigration. Il a en particulier souligné la préoccupante aggravation de la délinquance de voie publique, qui progresse de 19,5 % sur 5 ans dans l'ensemble des DOM.

S'agissant du trafic de drogue dans les Caraïbes, M. José Balarello, rapporteur pour avis, a rappelé que la Guyane était particulièrement concernée par le trafic de cocaïne, la Martinique étant plus particulièrement menacée par le crack. Il a également déploré l'intensification du trafic à partir de la zone néerlandaise de l'île de Saint-Martin, du fait de ses neuf casinos contrôlés par la mafia.

S'agissant de l'activité des juridictions tant judiciaires qu'administratives, M. José Balarello, rapporteur pour avis, a estimé qu'elles fonctionnaient de manière satisfaisante, tout en déplorant l'état de leurs locaux. Il a souhaité à cet égard que les travaux connaissent une réalisation plus rapide.

En outre, M. José Balarello, rapporteur pour avis, a regretté la persistance d'une surpopulation carcérale aggravée par la vétusté des établissements, malgré la mise en service ces dernières années de nouveaux établissements. Il a rappelé que le taux d'occupation des établissements pénitentiaires d'outre-mer était de 121,46 %, le taux national s'établissant pour sa part à 118 %. Il a en outre rappelé qu'en réponse à une de ses questions, M. Christian Paul, secrétaire d'Etat à l'outre-mer, avait indiqué que les travaux de la nouvelle maison d'arrêt de Saint-Denis de la Réunion devaient prochainement commencer, et le nouvel établissement ouvrir ses portes en 2006 sur la commune de Sainte-Marie.

S'agissant de l'immigration clandestine, M. José Balarello, rapporteur pour avis, a considéré qu'il s'agissait d'un problème récurrent qui allait encore en s'aggravant, et s'expliquait par l'attraction suscitée par des niveaux de vie et de protection sociale considérablement plus élevés que dans les Etats environnants. Il a ainsi indiqué que la Martinique avait un PIB par habitant de 14.352 dollars par habitant, tandis qu'il n'était que de 737 dollars à Cuba et de 422 dollars à Haïti. Concernant la Guyane, il a indiqué qu'il était de 13.465 dollars pour seulement 1.133 dollars pour le Surinam. S'agissant de la Réunion, il a indiqué qu'il était de 11.421 dollars contre 3.686 dollars à l'Ile Maurice, pourtant souvent citée en modèle, et de seulement 40 dollars aux Comores.

M. José Balarello, rapporteur pour avis, a en outre constaté que la Guyane était le département le plus concerné par cette forte immigration clandestine, compte tenu de sa façade maritime et des importants fleuves frontaliers, par nature difficiles à contrôler.

M. José Balarello, rapporteur pour avis, a appelé à un développement drastique de la coopération régionale, estimant anormale la faiblesse des échanges commerciaux des départements d'outre-mer avec leur environnement régional. Il a ainsi regretté que la part des échanges commerciaux de la Guyane avec les Etats de la zone caraïbe et des Etats d'Amérique du Sud ne s'élève qu'à 4,4 %. Il a souhaité que les outils créés par la loi d'orientation du 13 décembre 2000 soient mieux exploités.

Par ailleurs, M. José Balarello, rapporteur pour avis, a une fois de plus regretté que la question de la surrémunération des fonctionnaires, dont la suppression est demandée par tous les élus d'outre-mer, ne soit toujours pas réglée, et a en particulier déploré que le décret permettant la suppression de la prime d'éloignement prévue par la loi d'orientation ne soit toujours pas paru.

M. José Balarello, rapporteur pour avis, a ensuite souligné les apports, pour les départements d'outre-mer, de l'intégration à l'Union européenne, notamment dans le cadre du nouvel article 299-2 du Traité d'Amsterdam qui s'applique désormais aux régions ultrapériphériques comprenant les départements d'outre-mer français, les Açores, Madère et les Canaries. Il s'est félicité des nouveaux règlements communautaires augmentant les taux plafonds d'intervention des fonds structurels.

Rappelant que le montant global des fonds structurels pour les départements d'outre-mer s'élevait pour la période 2000-2006 à plus de 3,35 milliards d'euros, il s'est félicité de la création par la loi d'orientation de commissions de suivi de l'engagement des fonds structurels européens, en regrettant une sous-consommation encore importante des crédits communautaires.

M. José Balarello, rapporteur pour avis, a rappelé que Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon ne bénéficiaient pas des fonds structurels, n'ayant pas le statut de région ultrapériphérique, mais celui de pays et territoire d'outre-mer, qui ne leur ouvre que les crédits du fonds européen de développement, dont le montant est bien inférieur. Il s'est félicité de la décision de l'Union européenne d'augmenter les dotations européennes de 20,4 %.

Enfin, M. José Balarello, rapporteur pour avis, a présenté les perspectives d'évolution institutionnelle des départements d'outre-mer et collectivités de Saint-Pierre-et-Miquelon et Mayotte.

Soulignant qu'il était favorable à la définition d'un statut « cousu main » pour les départements français d'Amérique, il a également souligné le désir de ces départements de sortir du cadre de département d'outre-mer, considéré comme trop rigide.

Rappelant que la loi d'orientation pour l'outre-mer du 13 décembre 2000 avait créé dans chaque département un congrès chargé de proposer des perspectives d'évolution institutionnelle, M. José Balarello, rapporteur pour avis, a indiqué qu'en Guyane, le congrès était parvenu le 29 juin dernier à un avant-projet d'accord préconisant l'instauration d'une collectivité locale unique et d'un pouvoir législatif et réglementaire autonome. Il a également rappelé que le Gouvernement avait transmis aux élus guyanais ses propositions le 16 novembre dernier, et que la prochaine étape consisterait en la finalisation d'un accord politique avec le Gouvernement, puis le dépôt d'un projet de loi organisant la consultation de la population guyanaise avant une révision institutionnelle.

M. José Balarello, rapporteur pour avis, a cependant précisé que, comme l'avait fait auparavant le Président de la République, le Premier ministre avait posé comme conditions à l'évolution des statuts des départements français d'Amérique l'unité de la République, le maintien des liens avec l'Europe, l'égalité des droits de tous les citoyens, et la consultation préalable des populations.

S'agissant des Antilles, M. José Balarello, rapporteur pour avis, a indiqué que le congrès s'était réuni en Guadeloupe le 18 juin dernier, et qu'une commission de synthèse rédigeait actuellement un avant-projet. Il a également indiqué que le congrès s'était réuni le 12 juin dernier en Martinique, une commission ad hoc étant elle aussi chargée de rédiger un avant-projet.

M. José Balarello, rapporteur pour avis, a cependant indiqué ne pouvoir préjuger de l'opinion des populations lors des prochaines consultations.

S'agissant de la Réunion, M. José Balarello, rapporteur pour avis, a rappelé qu'elle avait clairement marqué son refus de la bi-départementalisation et d'une modification statutaire, et que le congrès ne s'y appliquait pas.

S'agissant de Mayotte, M. José Balarello, rapporteur pour avis, a rappelé qu'il avait été le rapporteur de la loi relative à Mayotte du 11 juillet 2001, qui avait pris en compte l'objectif de Mayotte de se rapprocher du statut de département français. Il a souligné la nécessité d'une évolution du droit applicable en matière d'état des personnes, indiquant que coexistaient actuellement à Mayotte le droit civil et un statut de droit personnel d'inspiration coranique. Il s'est félicité de la réforme de la justice cadiale qui rend compétent le tribunal de droit commun en matière de statut personnel, deux cadis y siégeant en tant qu'assesseurs. Il a également rappelé avoir rencontré des délégations de droits des femmes.

En conclusion, M. José Balarello, rapporteur pour avis, a proposé à la commission d'émettre un avis défavorable à l'adoption de ces crédits, indiquant que la commission des finances et la commission des affaires sociales s'étaient également prononcées en ce sens. Il a également souligné que le projet de budget pour 2002 ne permettait pas de régler la question de l'immigration clandestine, du trafic de stupéfiants, de l'insécurité et de la situation économique préoccupante de l'outre-mer.

En réponse à cet exposé, Mme Michèle André a souhaité souligner l'urgence d'une réforme du statut personnel à Mayotte, déplorant la persistance de la polygamie sur le territoire français. M. José Balarello, rapporteur pour avis, en a convenu, rappelant qu'il était initialement partisan d'une solution radicale consistant à prévoir que tous les enfants nés à partir d'une certaine date à Mayotte relèveraient automatiquement du statut de droit civil, mais que les consultations qu'il avait menées sur place ayant fait apparaître une très forte opposition, il y avait renoncé. Il a cependant précisé que la réforme de l'état civil, ainsi que des efforts d'éducation en faveur des jeunes filles, devraient permettre une évolution de la situation.

M. Robert Bret a pour sa part indiqué que ce budget se situait dans la même perspective que la loi d'orientation pour l'outre-mer, qu'il avait saluée, notamment s'agissant de ses dispositions économiques et fiscales. Il a indiqué que ses préoccupations concernaient plus la maîtrise des dépenses et l'affectation des crédits que leur montant, qu'il a jugé très positif. S'agissant des évolutions institutionnelles, il a indiqué qu'il était nécessaire de prendre le temps de la réflexion, même si l'avant-projet relatif à la Guyane semblait rassembler un large consensus, contrairement à des réformes statutaires telles que celles envisagées pour la Corse ou la Réunion.

S'agissant de la maîtrise de l'immigration, M. Robert Bret a considéré que la situation de la Guyane, certes très difficile, s'expliquait principalement par sa superficie et des conditions géographiques particulières, qui ne relevaient pas spécifiquement du débat budgétaire.

Par ailleurs, il a renouvelé son regret que le Président de la République ait refusé l'adhésion des départements français d'Amérique en tant que membres associés à l'Association des Etats des Caraïbes.

A ce sujet, M. René Garrec, président, a souligné que cette position s'expliquait par le fait que dans ce cas, un département d'outre-mer ne pourrait plus parler au nom de la France, mais simplement en son nom propre, ce qui constituerait un amoindrissement de son pouvoir d'influence.

Enfin, sur proposition du rapporteur pour avis, la commission a donné un avis défavorable sur les crédits du budget du secrétariat d'état à l'outre-mer attribués aux départements d'outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte.

PJL pour 2002 - Crédits consacrés aux territoires d'outre-mer et à la Nouvelle-Calédonie - Examen du rapport pour avis

Puis la commission a procédé, sur le rapport de M. Jean-Jacques Hyest, à l'examen pour avis des crédits de l'outre-mer pour 2002, affectés aux territoires d'outre-mer et à la Nouvelle-Calédonie.

Après avoir rappelé que les territoires d'outre-mer constituaient une catégorie juridique en sursis depuis que la Nouvelle-Calédonie en était sortie avec, dans son sillage, la Polynésie française, catégorie caractérisée par son hétérogénéité, ce qui justifiait une présentation distincte pour chaque collectivité dans le rapport pour avis, M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis, a indiqué que les crédits consentis aux territoires d'outre-mer et à la Nouvelle-Calédonie, dans l'ensemble du budget de l'Etat pour 2002, s'élevaient à environ 1,85 milliard d'euros (plus de 12 milliards de francs), les crédits inscrits au budget du secrétariat d'Etat à l'outre-mer ne représentant que 11,6 % de cet effort global, les trois autres principaux ministères contributeurs étant ceux de l'éducation nationale, de la défense et de l'intérieur.

Il a précisé que les crédits consacrés à ces collectivités dans le budget du secrétariat d'Etat à l'outre-mer ne progressaient que de 1,7 %, contre 3,76 % pour l'ensemble de ce budget, et ne représentaient que le cinquième, à peine, dudit budget, lequel dépassait pour 2002 le milliard d'euros (près de 7 milliards de francs).

Après s'être félicité de l'aboutissement du processus de révision du statut d'association des pays et territoires d'outre-mer (PTOM) à l'Union européenne, M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis, a indiqué que la part revenant aux PTOM français au titre de l'aide programmable du neuvième fonds européen de développement (FED) s'élevait à 52,3 %, contre 47,9 % précédemment, l'augmentation bénéficiant en premier lieu à Wallis-et-Futuna, Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon. Puis il a évoqué plusieurs sujets de préoccupation :

- concernant la Nouvelle-Calédonie, il a constaté que les divisions qui s'exacerbaient au sein du mouvement indépendantiste avaient pour effet de déstabiliser le fonctionnement de l'exécutif calédonien, la notion de collégialité étant remise en cause. Il a regretté le retard enregistré dans le versement des dotations de compensation des nouvelles charges liées aux transferts de compétences, a observé que la commission d'évaluation de ces charges ne s'était réunie pour la première fois que le 6 février 2001 et que les 3,8 millions d'euros (près de 25 millions de francs) correspondant au cumul des dotations de compensation pour 2000 et 2001 demeuraient à ce jour une simple écriture ;

- sur le fonctionnement des juridictions judiciaires, M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis, a fait part de son inquiétude quant à la mise en oeuvre de la loi du 15 juin 2000 sur la présomption d'innocence, en soulignant que celle-ci serait difficile avec des effectifs de magistrats très restreints outre-mer et qu'elle se ferait au détriment du contentieux civil. Il a par ailleurs vivement regretté que les informations délivrées dans les réponses aux questionnaires budgétaires sur les juridictions polynésiennes et calédoniennes ne contiennent que des éléments quantitatifs, eux-mêmes d'ailleurs très parcellaires, et s'est félicité d'avoir pu recueillir des informations complémentaires grâce aux relations nouées directement avec les chefs de juridictions ;

- le rapporteur pour avis a souligné le caractère tardif de la mise en place d'une chambre territoriale des comptes en Polynésie française. Il a rappelé que, créée en mars 1999 sur une initiative sénatoriale, son installation ne s'était achevée qu'à la fin de l'année 2000 ;

- concernant l'avenir des relations entre la Nouvelle-Calédonie et le territoire des îles Wallis-et-Futuna, il a indiqué qu'un accord-cadre avait été conclu le 1er juin 2001, bien après la date-butoir fixée au 31 mars 2000 et aux termes de négociations longues et difficiles, mais que cet accord n'était pas encore signé et qu'aucun calendrier n'était défini pour l'adoption des conventions nécessaires à sa mise en oeuvre concrète ;

- enfin, sur la question de l'actualisation du droit applicable outre-mer, il a observé que les derniers trains d'ordonnances prises par le Gouvernement sur habilitation n'avaient pas fait l'objet d'une ratification expresse, ce qui risquait d'accroître la complexité d'un ordonnancement juridique déjà confus, contrairement à l'objectif affiché de modernisation du droit applicable.

Après avoir rappelé que Wallis-et-Futuna, tout en formant une seule et même entité territoriale, étaient deux îles éloignées de quelque six cents kilomètres, ce qui rendait difficile pour une partie de la population l'accès aux soins hospitaliers, Mme Michèle André a constaté que la suppression du service national avait renforcé l'isolement de ces populations, les jeunes n'ayant plus cette occasion de s'ouvrir sur le monde. Elle a estimé qu'une attention d'autant plus grande devait être prêtée à l'organisation des relations avec la Nouvelle-Calédonie.

Enfin, sur proposition du rapporteur pour avis, la commission a donné un avis défavorable sur les crédits du budget du secrétariat d'état à l'outre-mer attribués aux territoires d'outre-mer et à la Nouvelle-Calédonie.

Organisme extraparlementaire - Conseil national de l'aménagement et du développement du territoire - Désignation d'un candidat

Puis la commission a décidé de proposer au Sénat la candidature de M. Bernard Saugey pour siéger au sein du conseil national de l'aménagement et dudéveloppement du territoire.

Mission d'information sur l'évolution des missions de la justice - Echange de vues

La commission a ensuite procédé à un échange de vues relatif à la création d'une mission d'information sur l'évolution des métiers de la justice.

M. René Garrec, président, a souligné l'intérêt d'une telle démarche, eu égard au contexte législatif récent marqué par l'apparition de nouveaux métiers de la justice, notamment les conciliateurs, les médiateurs, les assistants de justice, les délégués du procureur, les juges de la liberté et de la détention. Il a fait valoir l'utilité d'un travail de suivi et de réflexion sur les évolutions susceptibles d'intervenir dans le fonctionnement de la justice et les tâches des magistrats et fonctionnaires de la justice.

Après que M. Michel Dreyfus-Schmidt eut approuvé que le champ d'activité de cette mission ne se limite pas aux seuls nouveaux métiers mais à tous les métiers de la justice, la commission s'est prononcée pour la création d'une mission d'information sur l'évolution des métiers de la justice, composée de 15 membres représentant tous les groupes sénatoriaux ainsi que les non-inscrits dont la désignation aura lieu lors d'une réunion ultérieure.