Table des matières




- Présidence de M. René Garrec, président.

Collectivités locales - Modernisation du statut des sociétés d'économie mixte - Désignation de candidats pour faire partie de la commission mixte paritaire

La commission a tout d'abord désigné MM. René Garrec, Paul Girod, Jean-Pierre Schosteck, Patrice Gélard, Jean-Jacques Hyest, Simon Sutour et Robert Bret, candidats titulaires, et MM. Christian Cointat, Pierre Jarlier, Roger Karoutchi, Jacques Mahéas, Georges Othily, Jean-Claude Peyronnet, Bernard Sauget, candidats suppléants, pour faire partie de l'éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion sur la proposition de loi tendant à moderniser le statut des sociétés d'économie mixte locales.

Publicité foncière - Réforme de la loi du 1er juin 1924 mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle - Examen du rapport

La commission a procédé à l'examen du rapport de M. Daniel Hoeffel sur la proposition de loi n° 421 (2000-2001) de MM. Hubert Haenel et plusieurs de ses collègues, portant réforme de la loi du 1er juin 1924 mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, dans ses dispositions relatives à la publicité foncière.

Après avoir précisé que le champ d'application de la proposition de loi était circonscrit aux trois départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, M. Daniel Hoeffel, rapporteur, a souligné que ce texte était le fruit d'une démarche concertée et le reflet d'un consensus, résultat d'une mission confiée au Groupement pour l'informatisation du Livre foncier d'Alsace et de Moselle (GILFAM) par le garde des sceaux en juillet 1999 en vue de rénover la loi du 1er juin 1924 définissant le régime local de la publicité foncière.

M. Daniel Hoeffel, rapporteur, a indiqué que le régime de la publicité foncière d'Alsace-Moselle constituait un exemple de survivance du droit local puisant ses racines dans les vicissitudes de l'histoire et que, ayant été élaboré par strates successives, il avait été maintenu en vigueur grâce à sa supériorité technique par rapport au droit général. Il a rappelé que le Livre foncier, instrument de la publicité foncière en Alsace-Moselle, était tenu par des services dédiés des tribunaux d'instance et des bureaux fonciers sous la responsabilité de 36 juges du Livre foncier en exercice et avec le concours de quelque 150 greffiers et agents. Il a précisé que le Livre foncier répertoriait 4.500.000 parcelles et 2.000.000 de propriétaires, que le nombre annuel de requêtes aux fins d'inscription s'élevait à 200.000 et que, d'un point de vue matériel, le Livre foncier comprenait 40.000 volumes, soit plus de 10 kilomètres linéaires d'archives.

Après avoir rappelé que le Livre foncier et la conservation des hypothèques avaient comme objet commun d'assurer la publicité des droits réels immobiliers, M. Daniel Hoeffel, rapporteur, a souligné qu'à la différence de celle-ci le Livre foncier était placé sous l'autorité du ministère de la justice, que l'inscription d'un droit était soumise à la décision d'un magistrat, ce qui permettait à ce droit de bénéficier d'une présomption d'exactitude et que l'accès au Livre foncier était largement ouvert.

M. Daniel Hoeffel, rapporteur, a estimé que, victime de son succès, le Livre foncier devait aujourd'hui relever le défi de sa modernisation et que, le principe de son informatisation ayant été posé par le législateur au printemps 1994, la présente proposition de loi avait pour objet principal d'organiser le cadre légal de cette informatisation, l'autre objectif étant le toilettage de la loi du 1er juin 1924 et l'harmonisation de certaines règles locales avec le droit général.

Après avoir souligné l'urgence liée au calendrier de réalisation du projet d'informatisation, les procédures de marché étant d'ores et déjà engagées, il a estimé que les nouvelles possibilités d'accès à distance nécessitaient une adaptation du cadre légal afin de concilier l'objectif d'information du public et la garantie du respect de la vie privée. Il a précisé que les nouvelles règles d'accès proposées introduisaient ainsi une double distinction en fonction de la nature des informations concernées et de la qualité des consultants.

Ayant rappelé les principaux points sur lesquels la proposition de loi opérait un toilettage de la loi du 1er juin 1924, M. Daniel Hoeffel, rapporteur, a indiqué que la rédaction soumise à la commission ne modifiait en rien les orientations du texte initial, mais proposait un certain nombre d'améliorations tendant à l'extraction des dispositions de nature transitoire, à la suppression de mentions devenues inutiles, à l'uniformisation des formulations juridiques avec celles utilisées par des lois en vigueur afin d'éviter les divergences d'interprétation, à une meilleure délimitation du cadre légal de la consultation du Livre foncier ou encore à la refonte du dispositif d'entrée en vigueur.

En réponse à M. Maurice Ulrich qui s'interrogeait sur le point de savoir si le texte de la proposition de loi avait été examiné par les assemblées délibérantes des départements concernés, M. Daniel Hoeffel, rapporteur, a indiqué que les élus avaient été associés à son élaboration par l'intermédiaire d'organismes tels que l'Institut du droit local (IDL) ou le GILFAM, au sein desquels ils étaient représentés, et a rappelé que la décision de procéder à l'informatisation du Livre foncier résultait de la loi du 29 avril 1994. Il a souligné que la rédaction proposée à la commission avait été mise au point en étroite concertation avec les représentants de ces organismes et la chancellerie afin de permettre à l'Assemblée nationale de se saisir prochainement du texte et de l'adopter définitivement.

M. Maurice Ulrich a estimé que cette méthode tendant à associer les élus en amont constituait un précédent intéressant avantageusement transposable à d'autres dossiers.

Associant à son propos M. Michel Dreyfus-Schmidt, Mme Michèle André s'est interrogée sur l'intérêt d'étendre à l'ensemble du territoire le régime juridique alsacien-mosellan de la publicité foncière. Après avoir souligné la pertinence de la question, M. Daniel Hoeffel, rapporteur, a estimé que la modernisation du Livre foncier pourrait ultérieurement inspirer la rénovation de la conservation des hypothèques.

En réponse à M. Laurent Béteille, M. Daniel Hoeffel, rapporteur, a indiqué que l'exigence d'inscription au Livre foncier, à peine d'extinction, des servitudes foncières antérieures à 1900, ne concernait qu'un nombre marginal de situations et que le délai de cinq ans paraissait raisonnable.

La commission a adopté dans la rédaction proposée par le rapporteur la proposition de loi portant réforme de la loi du 1er juin 1924 mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, dans ses dispositions relatives à la publicité foncière.

Projet de loi de finances pour 2002 - Justice : crédits consacrés aux services généraux - Examen du rapport pour avis

Présidence de M. Pierre Fauchon, vice-président.

Puis la commission a examiné le rapport pour avis de Mme Dinah Derycke sur les crédits des services généraux du ministère de la justice pour 2002 (administration centrale - juridictions judiciaires - juridictions administratives), présenté par M. René Garrec, président, en remplacement du rapporteur pour avis, empêché.

M. René Garrec a tout d'abord relevé la nette progression du budget de la justice pour 2002 (+ 5,68 %), trois fois supérieure à celle de la moyenne des autres budgets civils. Après avoir indiqué que pour la première fois, les crédits de paiement franchissaient le seuil des 4.687,41 millions d'euros (plus de 30.000 millions de francs), il a noté la hausse des trois agrégats des services généraux : l'administration générale enregistrant l'augmentation la plus marquée avec 6,18 %, les crédits consacrés aux services judiciaires (+ 4,23 %) et ceux destinés aux juridictions administratives (+ 4,74 %) progressant moins que le budget du ministère.

Il a toutefois mis l'accent sur la part encore trop restreinte du budget de la justice dans le budget de l'Etat, passant de 1,42 % en 1991 à 1,74 % en 2002.

M. René Garrec a ensuite indiqué que le budget était marqué par des efforts substantiels en faveur des personnels, de l'équipement, des dépenses de gestion ainsi que du justiciable.

S'agissant du renforcement des moyens humains, il a reconnu que le budget 2002 traduisait à la fois un effort de recrutement soutenu et sans précédent touchant toutes les catégories de personnels (845 créations d'emplois pour les juridictions judiciaires et 86 pour les juridictions administratives), et une volonté d'améliorer leur situation matérielle. Il est revenu sur la création de 320 emplois de magistrats, prolongeant le mouvement d'augmentation des effectifs observés depuis quatre ans, parmi lesquels 80 étaient destinés à la mise en oeuvre de la loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et 46 pour la réforme des tribunaux de commerce. Il a précisé que les concours d'entrée à l'Ecole nationale de la magistrature demeureraient la principale voie de recrutement.

S'agissant des fonctionnaires (greffiers en chef, greffiers, fonctionnaires de catégorie C), M. René Garrec a également mentionné les créations de postes, les transformations d'emplois, les revalorisations indemnitaires prévues par le budget 2002 en application du protocole d'accord signé le 1er décembre 2000 entre la Chancellerie et quatre organisations syndicales.

Il s'est félicité des améliorations apportées par le budget pour 2002 s'agissant de la gestion des personnels, notant l'effort de rationalisation des moyens humains entrepris par la Chancellerie à travers la mise en place des pôles économiques et financiers. A cet égard, il a fait remarquer l'impact positif de leur intervention sur la qualité et le traitement des affaires économiques et financières, ce qui avait abouti à une baisse significative des procédures en stock. M. René Garrec a précisé que cette expérience réussie devrait être prolongée en 2003 par la création prochaine de deux nouveaux pôles économiques et financiers (à Lille et à Fort-de-France), de 21 postes de magistrats et par la mise en place d'un pôle de santé publique et d'environnement.

M. René Garrec a également souligné l'effort de transparence accompli par la Chancellerie à travers la diminution des effectifs affectés pour ordre dans des juridictions et en réalité mis à disposition d'autres administrations ou d'autres structures publiques.

Après avoir constaté une baisse des crédits en matière d'équipement tant en ce qui concerne les autorisations de programme (- 27,9 %) que les crédits de paiement (- 37,8 %), il a expliqué que cette situation, sans conséquence sur la poursuite du programme pluriannuel d'équipement, reflétait un autre effort non négligeable de transparence eu égard à la préoccupante sous-consommation des crédits du ministère de la justice. Il a toutefois relevé qu'en dépit d'une sensible amélioration pour 2001, 37 % des crédits d'équipement n'avaient toujours pas été consommés à ce jour. Il a regretté la trop grande déconnexion entre l'évaluation des provisions demandées chaque année et l'état d'avancement des programmes de construction et des études de faisabilité, conduisant ainsi à une surestimation des crédits par rapport à la réalité des besoins d'une année sur l'autre et partant, à une atteinte à la lisibilité de l'autorisation budgétaire parlementaire.

M. René Garrec a ajouté qu'en dépit de la politique de suivi des dépenses mise en place par la Chancellerie depuis 1996, le budget de la justice pour 2002 prévoyait une augmentation des frais de justice, principalement liée à des revalorisations tarifaires ainsi qu'à l'entrée en vigueur de réformes récentes, citant à titre d'illustration la loi du 17 juin 1998 relative à la répression des infractions sexuelles, la loi du 23 juin 1999 renforçant l'efficacité de la procédure pénale, ainsi que la loi du 15 juin 2000 relative à la présomption d'innocence.

M. René Garrec a fait valoir les efforts entrepris pour améliorer la qualité du service rendu au justiciable, mentionnant le développement de nouvelles structures judiciaires de proximité à travers les maisons de justice et du droit et la généralisation des conseils départementaux d'accès au droit, ainsi que l'expérimentation réussie d'un guichet unique des greffes.

En dépit des améliorations apportées au fonctionnement de l'institution judiciaire, M. René Garrec a toutefois jugé insuffisant le budget pour 2002 au regard des difficultés persistantes.

En premier lieu, après avoir noté que le constat d'une justice « asphyxiée, débordée, paralysée » dressé cinq ans auparavant par la mission d'information de la commission chargée d'évaluer les moyens de la justice (1996) demeurait largement d'actualité, il a évoqué la situation préoccupante des juridictions. M. René Garrec s'est inquiété :

- de l'absence d'amélioration significative de la durée moyenne de traitement des affaires en 2000 ;

- de la trop lente diminution des stocks pesant ainsi sur la productivité des magistrats ;

- des trop nombreux classements sans suite qui restaient le principal mode de régulation des affaires pénales, et de l'absence d'amélioration du taux de classement « sec » pour inopportunité des poursuites ;

- d'un encombrement persistant devant les juridictions administratives et plus particulièrement de la situation des cours administratives d'appel, leur stock global d'affaires en cours ayant été multiplié par cinq entre 1992 et 1999.

En second lieu, il a relevé la difficile adéquation des moyens aux besoins croissants, craignant une aggravation des difficultés.

D'une part, M. René Garrec a fait valoir le manque d'efficience dans la gestion des effectifs. Il a expliqué que les nouveaux recrutements annoncés ne pourraient se traduire immédiatement sur le terrain par des effectifs supplémentaires en raison des délais de recrutement et de formation. Il a également dénoncé le nombre trop élevé de vacances de postes (+ 4,69 % des magistrats dans les juridictions).

D'autre part, il a regretté l'absorption des moyens nouveaux par la mise en oeuvre des réformes récentes. Il a illustré ses propos en notant que 427 créations d'emplois de magistrats, soit 40 % du total des créations d'emplois, avaient été affectées à la seule loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence. Il a mis en lumière le manque d'anticipation du Gouvernement quant à l'ampleur de cette réforme et aux besoins humains qu'elle induisait.

M. René Garrec s'est inquiété des conséquences de la mise en oeuvre de cette réforme, notant le risque d'une fragilisation de la capacité de réponse des juridictions, faute d'une adaptation des moyens et de l'organisation. A cet égard, il a évoqué le poids de l'instauration d'un appel en matière criminelle n'ayant pas encore produit son plein effet sur le fonctionnement de l'institution judiciaire ainsi que les contraintes nouvelles liées à la juridictionnalisation de l'application des peines ayant conduit magistrats et greffiers à réduire leur participation au service des audiences dans leur tribunal.

M. René Garrec a relevé le paradoxe selon lequel malgré les interrogations de la commission dès son rapport de première lecture et contrairement aux assurances données par la garde des sceaux au fur et à mesure de l'intégration des amendements parlementaires sur la prise en compte des moyens nécessaires, le Gouvernement avait sous-estimé la nécessaire coordination de la mise en oeuvre des moyens et des délais d'entrée en application des divers volets de la loi.

Il s'est interrogé sur la mise en place de l'aménagement et de la réduction du temps de travail, constatant l'insuffisance de l'enveloppe d'un montant de 2,732 millions d'euros destinée à la seule prise en charge des astreintes et des heures supplémentaires effectuées dans les juridictions.

Il a regretté l'absence de créations d'emplois destinées à accompagner la mise en place des 35 heures, expliquant qu'une partie non négligeable des nouveaux emplois créés cette année, loin de contribuer au renforcement des juridictions, serait en réalité dédiée à la diminution du temps de travail. En outre, il a jugé très floues les conditions de mise en oeuvre des 35 heures pour les magistrats, aucun accord avec les organisations professionnelles n'étant intervenu, aucune évaluation sérieuse sur leur temps de travail n'ayant été menée.

En troisième lieu, M. René Garrec a rappelé l'urgence de la refonte du dispositif d'aide juridictionnelle ajoutant que cette réforme se faisait attendre. Il s'est inquiété de l'insuffisance de la dotation budgétaire consacrée à l'aide juridictionnelle (+ 18 %), limitée au seul financement des mesures d'urgence prévues par le protocole d'accord signé le 18 décembre 2000 entre la Chancellerie et les représentants des avocats (revalorisation du barème des procédures concernant sept domaines contentieux particulièrement importants), sans toutefois anticiper de futures provisions en vue d'une réforme globale.

Compte tenu de l'insuffisante rétribution des avocats au titre de l'aide juridictionnelle, M. René Garrec a rappelé les promesses non tenues de la garde des sceaux, qui s'était engagée à déposer un avant-projet de loi avant l'automne.

Après avoir indiqué que Mme Dinah Derycke souhaitait proposer un avis favorable aux crédits de la justice, il s'est prononcé pour un avis défavorable à l'adoption des crédits relatifs à la justice (services généraux).

Tout en reconnaissant les efforts accomplis par le Gouvernement depuis plusieurs années, M. Jean-Jacques Hyest a déploré le manque de moyens affectés à la justice, particulièrement accru par l'entrée en vigueur de réformes nouvelles, ainsi que l'insuffisante coordination entre les services de police, de gendarmerie et les services judiciaires. Il s'est inquiété de la mise en oeuvre des 35 heures en l'absence de tout renforcement des moyens équivalent, tout en ajoutant que la réforme des tribunaux de commerce ne ferait qu'amplifier les difficultés de fonctionnement de la justice. Il a conclu qu'au final la priorité affichée restait très relative et s'est prononcé pour le rejet des crédits relatifs à la justice.

Après avoir regretté l'absence de Mme Dinah Derycke, M. Robert Badinter a fait valoir les indéniables efforts budgétaires de cette année en faveur de la justice. Il a également reconnu que l'augmentation constante des moyens, amorcée par la loi de programme de 1995 (plan Méhaignerie) et prolongée par l'action du Gouvernement depuis 1997, n'avait pas suffi à enrayer les besoins croissants des services judiciaires. Il a regretté qu'aucun Gouvernement jusqu'à présent n'ait manifesté la volonté politique forte d'attribuer des moyens proportionnés aux défis de la justice. Il a qualifié de « névrotiques » les rapports entretenus par le pouvoir politique et la justice en France relevant le décalage entre l'ampleur des missions dévolues à la justice et les faibles moyens effectivement dégagés.

Après avoir rappelé le climat de consensus ayant présidé à l'adoption de la loi du 15 juin 2000 relative à la protection de la présomption d'innocence, souhaitée unanimement par la commission Truche (1993), le Président de la République, l'Assemblée nationale, le Sénat et en particulier sa commission des lois, il s'est félicité des avancées relatives aux droits des justiciables issues de la réforme, ainsi que des nombreux amendements parlementaires ayant enrichi le texte. M. Robert Badinter a admis que, sans pour autant remettre en cause le bien-fondé de la loi, les bouleversements et les modifications imprévisibles engendrés par la mise en oeuvre de cette réforme pesaient lourdement sur l'organisation de l'institution judiciaire. Il a d'ailleurs ajouté qu'à l'instar des grandes réformes, comme celle de 1966 sur les sociétés ayant nécessité près de 15 révisions ou celle de 1985 sur les procédures collectives, le législateur serait sans doute conduit à apporter des modifications à la loi du 15 juin 2000 relative à la présomption d'innocence, afin de tenir compte des difficultés observées sur le terrain.

M. Pierre Fauchon, président, a souligné que la question des moyens plus que celle de l'indépendance des magistrats, au demeurant acquise, constituait la principale source de difficultés pour la justice, comme le montrait d'ailleurs le nombre de magistrats (soit 6.850 actuellement) pratiquement inchangé depuis le milieu du XIXe siècle. Il a dénoncé les orientations du budget pour 2002 privilégiant le financement des 35 heures sur celui des services judiciaires. Il a par ailleurs imputé au manque de moyens les déficiences actuelles du système judiciaire observées à travers les classements sans suite trop nombreux ou encore les manquements professionnels commis par certains magistrats.

MM. Pierre Fauchon, président, et Robert Badinter ont conjointement constaté la progression en dents de scie du budget de la justice d'une année sur l'autre, estimant qu'une telle évolution n'était que le reflet des difficultés persistantes de la Chancellerie à évaluer précisément les moyens financiers indispensables au bon fonctionnement de la justice.

Tout en convenant de l'insuffisance chronique de moyens affectant la justice actuellement, M. Jacques Larché a, d'une part, dénoncé la prise de position de certains magistrats, membres du syndicat de la magistrature, consistant à écarter l'application des dispositions antiterroristes de la loi relative à la sécurité quotidienne et, d'autre part, s'est inquiété des suites qui pourraient résulter des conclusions rendues par la cour de cassation à l'occasion de l'arrêt Perruche concernant le préjudice d'être né et l'indemnisation des enfants handicapés, et des graves problèmes déontologiques en matière médicale ainsi qu'en matière d'assurance soulevés par cette jurisprudence.

M. Pierre Fauchon, président, a précisé qu'il avait été désigné comme rapporteur pour avis sur le projet de loi relatif aux droits des malades, appelé à être examiné par le Sénat au début du mois de janvier. Il a annoncé qu'une réflexion sur les suites de l'affaire Perruche serait menée dans le cadre de cet avis, et notamment à l'occasion d'auditions publiques de la commission des lois prévues pour le 18 décembre prochain.

Soulignant l'urgence de faire aboutir la réflexion sur cette question très importante pour l'évolution générale de la société, M. Jacques Larché a rappelé que le Sénat avait déjà examiné en avril dernier une proposition de loi de M. Claude Huriet relative à l'aléa thérapeutique.

Puis la commission a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits du ministère de la justice consacrés aux services généraux.

PJLF pour 2002 - Crédits consacrés à la protection judiciaire de la jeunesse - Examen du rapport pour avis

Puis la commission a ensuite procédé, sur le rapport de M. Patrice Gélard, à l'examen pour avis des crédits de la justice pour 2002, affectés à la protection judiciaire de la jeunesse.

M. Patrice Gélard, rapporteur pour avis, a souligné l'importance du rôle de la protection judiciaire de la jeunesse dans la lutte contre la délinquance juvénile et l'insertion des jeunes en difficulté. Il a mis en évidence que les efforts budgétaires significatifs des années précédentes (+ 6,4 % en 1999, + 14,7 % en 2000 et + 7,3 % en 2001) prenaient fin aujourd'hui avec une augmentation limitée à 0,99 %, inférieure à l'inflation, portant ces crédits à 3,54 milliards de francs, soit 540 millions d'euros. Il a fait part de la baisse de 44 % des crédits de paiement en investissement par rapport à la précédente loi de finances initiale. Constatant que les crédits du secteur public augmentaient de 4,8 %, tandis que ceux du secteur associatif habilité enregistraient une baisse de 3,5 %, il a souhaité que ce secteur ne soit pas remis en cause, mais davantage contrôlé.

S'agissant des moyens en personnel, il a estimé que les 300 créations d'emplois prévues seraient absorbées par des mesures attendues depuis longtemps : la généralisation du troisième poste d'agent technique d'éducation, afin d'assurer la permanence 24 heures sur 24 dans les hébergements classiques, ainsi que le développement du dispositif d'éducateurs remplaçants.

Après avoir fait part des nouveaux modes de recrutement, à savoir les concours exceptionnels et la troisième voie d'accès, il s'est inquiété du taux de 6,4 % des vacances de postes, ainsi que du besoin de recrutement supplémentaire né de la mise en place des 35 heures, même si les personnels de la protection judiciaire de la jeunesse disposaient d'une dérogation à la règle des 1600 heures annuelles. Enfin, il a salué les efforts de formation accomplis ces dernières années, tout en indiquant que les conséquences, en termes d'organisation des services, devaient être prises en compte.

Face à ces moyens en stagnation, M. Patrice Gélard, rapporteur pour avis, a insisté sur les besoins grandissants en matière de prise en charge des mineurs.

Il a tout d'abord constaté l'augmentation de 2,9 % en 2000 de la délinquance juvénile et, plus généralement, du nombre de jeunes en difficulté. Il a relevé que seulement 352 magistrats spécialisés pour les affaires de mineurs devaient rendre 200 000 décisions par an, ce qui en disait long sur les conditions dans lesquelles ces magistrats pouvaient exercer leurs missions. Après avoir fait valoir que de plus en plus de jeunes étaient placés sous protection judiciaire, il a noté que le secteur public tendait à se spécialiser dans la prise en charge des mineurs délinquants, tandis que le secteur associatif habilité se concentrait sur les missions d'assistance éducative.

Il a souligné le retard dans la création des centres éducatifs renforcés (CER) et des centres de placement immédiat (CPI), par rapport à l'objectif fixé à 50 CPI et 100 CER pour la fin 2001, puisque, seuls, 37 CPI et 47 CER étaient réalisés. Regrettant que certaines communes s'opposent à l'implantation des ces centres sur leur territoire, il a pourtant établi que ces centres, accueillant un petit nombre de jeunes, ne devaient généralement pas se situer à la campagne, mais dans les endroits les plus aptes à favoriser leur réinsertion. Après avoir constaté que deux années de discussions préalables étaient souvent nécessaires avant la réalisation d'une opération, il a estimé que le retard ne pouvait que s'accentuer, dans la mesure où seulement 20 millions de francs étaient prévus en investissement, alors que chaque centre représentait une dépense de 10 millions de francs environ.

Il a ensuite jugé que les moyens alloués à la protection judiciaire de la jeunesse ne lui permettaient pas de mener les partenariats indispensables à l'exercice de ses missions.

Il a en effet estimé que l'éducation nationale était trop timidement engagée dans les dispositifs relais, 60 % de ces classes-relais ne bénéficiant pas de la présence d'un éducateur, et seulement trois internats-relais étant créés à ce jour. Il a de plus regretté, d'une part, que les formations dispensées dans les instituts de formation des maîtres, d'autre part, que les cours d'instruction civique en direction des jeunes eux-mêmes, ne fassent pas suffisamment connaître les missions de la protection judiciaire de la jeunesse.

En matière de santé, il a regretté le manque de pédopsychiatres et de psychologues. Enfin, il souhaité que les organismes d'insertion professionnelle travaillant avec la protection judiciaire de la jeunesse permettent une meilleure intégration dans l'emploi des jeunes placés sous protection judiciaire.

Jugeant le budget de la protection judiciaire de la jeunesse notoirement insuffisant face aux besoins, il a proposé de donner un avis défavorable à l'adoption des crédits inscrits dans la loi de finances initiale pour 2002.

S'appuyant sur son expérience dans le département du Puy-de-Dôme, Mme Michèle André a estimé que le tableau ainsi dressé était excessivement pessimiste, et que les partenariats noués avec la protection judiciaire de la jeunesse fonctionnaient beaucoup mieux que le rapporteur pour avis ne le laissait entendre. Elle a estimé que les psychologues n'étaient pas difficiles à recruter. Enfin, après avoir jugé que la longueur des démarches nécessaires à l'implantation d'un nouveau centre était habituelle en matière de travaux publics, elle a souhaité obtenir la liste des communes ayant refusé l'implantation sur leur territoire d'un CPI ou d'un CER.

M. Patrice Gélard, rapporteur pour avis, a déploré la faiblesse des rémunérations versées aux psychologues dans le système de la vacation. Il a confirmé que l'éducation nationale ignorait trop souvent les services de la protection judiciaire de la jeunesse, les professeurs des collèges étant parfois réticents à enseigner dans les classes relais. De façon générale, il a fait valoir que sa vision correspondait à celle des départements les plus peuplés, voire criminogènes. Il a souligné, à cet égard, que ces difficultés n'étaient pas liées à la seule délinquance des mineurs, mais touchaient aux multiples aspects de l'enfance en danger. Il a mis en évidence notamment le cas des mineurs isolés, livrés à des réseaux d'immigration clandestine et de prostitution.

M. Jacques Larché a fait valoir que les départements, très sollicités, étaient très actifs en matière de protection de l'enfance. Il a estimé que la politique des centres éducatifs renforcés était aujourd'hui dépassée, dans la mesure où, même si l'objectif des 100 centres était atteint, leur effectif de six jeunes par centre ne permettrait absolument pas de répondre aux formes les plus avérées de la délinquance juvénile. Il a dénoncé l'attitude de l'Etat subordonnant la création d'un centre à la participation financière du département ou de la commune, s'agissant d'une mission de l'Etat. Les frais de fonctionnement des centres éducatifs renforcés étant considérables, il s'est interrogé sur l'opportunité du maintien de ce programme de création de centres.

M. Patrice Gélard, rapporteur pour avis, a indiqué que ces questions pourraient faire l'objet de visites de centres, internats relais, foyers et quartiers pour mineurs lors de la suspension des travaux parlementaires.

M. Robert Bret a souligné l'incohérence entre le discours donnant la priorité à la lutte contre la délinquance des mineurs et les réponses apportées dans le projet de loi de finances. Il a ajouté que le Parlement devait adresser un message fort aux élus locaux. Constatant la stagnation des moyens, il a déclaré s'abstenir sur ce budget.

M. Patrice Gélard, rapporteur pour avis, a indiqué que les 1 041 jeunes accueillis en centres de placement immédiat et les 750 jeunes accueillis en centres éducatifs renforcés depuis la création de ces centres devaient être mis en parallèle avec les 4 000 jeunes incarcérés chaque année.

M. Jacques Larché a estimé que les centres éducatifs renforcés, accueillant les jeunes pour une durée de trois mois, ne pouvaient répondre utilement à leurs problèmes personnels, de santé et psychologiques.

M. Lucien Lanier a dénoncé l'inadéquation complète des crédits fournis et de l'organisation actuelle du système de protection des mineurs. Il a fait part des difficultés actuelles pour trouver des responsables bénévoles d'associations qui ne soient pas des retraités. Enfin il a dénoncé l'état de délabrement du quartier des mineurs de Fresnes.

Constatant que les crédits destinés au secteur associatif habilité diminuaient de 3,5 %, M. Robert Badinter a souhaité savoir pourquoi les crédits accordés en 2000 à ce secteur n'avaient pas été consommés, et si les juges pour enfants avaient des réticences à placer les mineurs dans les établissements de ce secteur.

M. Patrice Gélard, rapporteur pour avis, a répondu que les mineurs les plus difficiles étaient envoyés dans le secteur public. Il a regretté que certaines associations aient été mal gérées et que le personnel ne soit pas toujours suffisamment formé. Il a ajouté qu'il avait déjà fait mention, dans son précédent avis budgétaire, des coûts de fonctionnement des centres éducatifs renforcés, à savoir de 1800 à 1900 francs par jour et par jeune. Il a regretté que les juges pour enfants n'aient pas à leur disposition une palette suffisamment large d'établissements susceptibles d'accueillir les mineurs les plus difficiles.

M. Jacques Larché a dénoncé un problème général d'allocation des ressources, les moyens affectés depuis cinq ans aux CER manquant aujourd'hui dans les autres structures.

M. Robert Badinter a souligné que l'ensemble des forces politiques avait été favorable à la création de ces centres, dont l'initiative revenait à M. Toubon. Il a jugé normal que le fait d'éviter la prison à des jeunes à l'extrême limite de la délinquance coûte cher.

La commission a émis un vote défavorable à l'adoption des crédits du ministère de la justice consacrés à la protection judiciaire de la jeunesse pour 2002.

PJLF pour 2002 - Crédits consacrés à l'administration pénitentiaire - Examen du rapport pour avis

Au cours d'une seconde séance, qui s'est tenue dans l'après-midi, la commission a ensuite procédé, sur le rapport de M. Georges Othily, à l'examen pour avis des crédits de la justice pour 2002, affectés à l'administration pénitentiaire.

M. Georges Othily, rapporteur pour avis, a tout d'abord souligné que le projet de loi de finances pour 2002 soumis au Sénat fixait à 4,68 milliards d'euros (soit 30,7 milliards de francs) le budget du ministère de la justice et qu'au sein de ces crédits, 1,4 milliard d'euros, soit 9,1 milliards de francs seraient consacrés à l'administration pénitentiaire, les crédits de cette administration progressant de 9,7 % par rapport à la loi de finances pour 2001.

Il a indiqué que le projet prévoyait notamment la création de 1.525 emplois, précisant que 276 postes étaient destinés à préparer l'ouverture de nouveaux établissements et que 700 postes de personnels de surveillance avaient vocation à faire face à l'aménagement et à la réduction du temps de travail. Il a observé que 102,8 millions d'euros de crédits de paiement et 259,2 millions d'euros d'autorisations de programme étaient inscrits dans le projet de loi de finances afin de construire de nouveaux établissements pénitentiaires.

Evoquant la situation de l'administration pénitentiaire, le rapporteur pour avis a constaté que le nombre de détenus avait continué à diminuer, revenant de 51.441 en janvier 2000 à 47.837 en janvier 2001. Il a noté que le nombre des prévenus avait, lui aussi, diminué sensiblement pendant la même période, alors même que la loi sur la présomption d'innocence n'était pas encore entrée en vigueur, revenant de 18.100 en janvier 2000 à 16.107 en janvier 2001. Il a fait valoir que le taux d'occupation des établissements pénitentiaires était revenu de 107 % à 103 %.

M. Georges Othily, rapporteur pour avis, a ensuite souligné que l'année 2001 avait été marquée par la mise en oeuvre de réformes importantes. Il a indiqué que le placement sous surveillance électronique avait été expérimenté à partir de novembre 2000 dans quatre établissements pénitentiaires et qu'au 1er juillet dernier, 51 bracelets avaient été posés. Il a estimé que l'expérimentation demeurait trop timide et qu'il serait difficile de tirer des conclusions de cette phase expérimentale si elle ne portait pas sur un nombre suffisant de cas. Il a regretté que le décret d'application de la loi n'ait pas été pris.

Le rapporteur pour avis a constaté que la réforme permettant aux détenus d'être assistés par un avocat au cours de la procédure disciplinaire était désormais bien acceptée après avoir suscité les inquiétudes des personnels. Il a observé que l'année 2001 avait vu l'entrée en vigueur de la réforme de l'application des peines inscrite dans la loi sur la présomption d'innocence, mais qu'il était trop tôt pour faire un bilan de cette réforme, le législateur, à la demande du Gouvernement, ayant dû reporter au 16 juin 2001 l'entrée en vigueur de certaines mesures.

M. Georges Othily, rapporteur pour avis, a ensuite rappelé que la commission d'enquête du Sénat sur les conditions de détention dans les établissements pénitentiaires avait proposé 30 mesures d'urgence pour les prisons et que beaucoup d'entre elles auraient pu être mises en oeuvre très rapidement, sans qu'il soit besoin de recourir à la loi. Il a ajouté que le Sénat avait adopté, en avril dernier, une proposition de loi qui devait permettre d'adopter rapidement des mesures importantes, comme la création d'un contrôleur des prisons ou la mise en place d'une suspension de peine pour les détenus en fin de vie.

Le rapporteur pour avis a constaté que le Gouvernement avait choisi de se lancer dans l'élaboration d'une « grande loi pénitentiaire » ayant notamment vocation à redéfinir le sens de la peine, ainsi que les missions de l'administration pénitentiaire. Il a observé que le Gouvernement annonçait qu'il souhaitait déposer un projet sur le Bureau du Sénat et faire une première lecture avant la fin de la législature. Il a souligné que le projet de loi ne pourrait, dans ces conditions, être adopté avant bien longtemps.

Evoquant la situation des personnels de l'administration pénitentiaire, le rapporteur pour avis a observé que l'exaspération était très forte. Il a noté que la mise en oeuvre des 35 heures risquait d'aggraver sensiblement l'insuffisance du nombre de personnels et a indiqué que tous les personnels dénonçaient l'absence d'anticipation de cette réforme, qui risquait d'avoir des conséquences néfastes sur le fonctionnement des établissements au cours de l'année 2002. Il a fait valoir que, dès le 1er janvier prochain, l'administration pénitentiaire serait responsable de toutes les escortes médicales de détenus, qui étaient jusqu'à présent assurées par la police et que 96 emplois avaient été créés à cette fin, alors que les besoins étaient évalués à 400.

A propos du programme immobilier, M. Georges Othily, rapporteur pour avis, a fait valoir que les annonces de construction et de rénovation se succédaient, mais que le rythme des réalisations laissait à désirer. Il a observé que le Gouvernement inscrivait des milliards de francs d'autorisations de programme dans les projets de budget mais que les crédits de paiement ne suivaient pas et que le taux de consommation de ces crédits de paiement n'avait été que de 35,6 % en 2000.

Le rapporteur pour avis a ensuite souligné qu'il avait visité en 2001 les maisons d'arrêt de Luynes et de Villepinte, établissements construits dans le cadre du programme « 13.000 places » et fonctionnant en gestion déléguée. Il a indiqué que ces visites lui avaient permis de constater que les établissements du programme 13.000 pouvaient connaître des évolutions très différenciées. Il a ainsi indiqué que la maison de Luynes présentait de graves défauts de conception, qu'elle était déjà assez délabrée après dix ans de fonctionnement et que les relations sociales y étaient très dégradées. Il a relevé que la maison d'arrêt de Villepinte était bien entretenue et qu'il y existait une véritable tentative d'individualisation de la prise en charge, notamment en direction des détenus mineurs.

Concluant, le rapporteur pour avis a constaté qu'au cours de la législature en voie d'achèvement, des crédits importants avaient été accordés à l'administration pénitentiaire, mais que les retards pris, l'attribution de nouvelles missions et la réduction du temps de travail n'avaient pas permis d'utiliser les créations d'emplois pour améliorer le fonctionnement des établissements. Il a relevé que de multiples programmes immobiliers avaient été annoncés, mais que les réalisations étaient encore embryonnaires, sinon inexistantes.

Il a également souligné que les dernières années avaient été marquées par l'espoir d'un changement profond des conditions de détention à la suite du livre du Docteur Vasseur puis des commissions d'enquête du Sénat et de l'Assemblée nationale. Il a regretté que ces travaux tardent à être suivis d'effet et que, malgré les efforts du Sénat pour proposer des mesures concrètes susceptibles d'être mises en oeuvre rapidement, le Gouvernement ait concentré son action sur l'élaboration d'une grande loi, qui ne pourra être adoptée avant bien longtemps.

M. Georges Othily, rapporteur pour avis, sans méconnaître l'importance des efforts budgétaires consentis, a exprimé la crainte qu'une opportunité rare de faire évoluer une administration marquée par de fortes pesanteurs n'ait pas été saisie.

M. Robert Badinter a partagé la crainte du rapporteur pour avis qu'une occasion unique de faire évoluer en profondeur les conditions de détention ne soit en train d'être manquée. Il a en revanche souligné que les crédits consacrés à l'administration pénitentiaire dans le projet de loi de finances pour 2002 étaient très substantiels et méritaient en conséquence un avis favorable de la commission.

M. Robert Bret a observé que les crédits consacrés à l'administration pénitentiaire ne seraient sans doute pas suffisants pour combler les retards et mettre en oeuvre dans de bonnes conditions la réduction du temps de travail, mais qu'ils étaient néanmoins très substantiels, le nombre de créations d'emplois étant particulièrement important. Il a regretté que le projet de loi sur l'administration pénitentiaire ne puisse être discuté avant la fin de la législature et s'est demandé si la proposition de loi adoptée par le Sénat en avril 2001 ne pourrait pas être inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale, afin que certaines mesures puissent entrer en vigueur rapidement. Il s'est déclaré favorable à l'adoption des crédits de l'administration pénitentiaire.

Conformément à la proposition du rapporteur pour avis, la commission a donné un avis défavorable à l'adoption des crédits du ministère de la justice consacrés à l'administration pénitentiaire.