Travaux de la commission des lois



- Présidence de M. Jean-Jacques Hyest, président.

PJLF pour 2005 - Audition de M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la Justice et de Mme Nicole Guedj, secrétaire d'Etat aux droits des victimes

La commission a procédé à l'audition de M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la Justice, et de Mme Nicole Guedj, secrétaire d'Etat aux droits des victimes, sur les crédits de leur ministère pour 2005.

M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la Justice, a en premier lieu indiqué que le budget de la Justice progresserait globalement de 4 % en 2005, soit de 210 millions d'euros à périmètre constant, et a souligné que 1.100 emplois budgétaires seraient créés, soit plus du tiers du total des créations d'emplois de l'Etat, les crédits de fonctionnement progressant pour leur part de 8 %. Il a ajouté que l'effort d'investissement se maintiendrait au niveau élevé de 320 millions d'euros de crédits de paiement (notamment en faveur des juridictions judiciaires et de l'administration pénitentiaire).

M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la Justice, a souligné que cet effort ne serait pas remis en cause par la régulation budgétaire, contrairement à ce qui avait pu être avancé. Il a ainsi rappelé qu'après l'annulation de 72 millions d'euros en 2004 (soit 1 % du budget), la Justice avait bénéficié d'ouvertures de crédits, et que le solde net ne serait donc déficitaire que de 23 millions d'euros contre 84 en 2003.

S'agissant des 1.100 créations d'emplois, il a estimé qu'elles permettraient de respecter le rythme prévu par la loi d'orientation et de programmation pour la Justice, à l'exception des services judiciaires. Il a cependant considéré que, dans ce domaine, les besoins concernaient particulièrement les greffes, et non les magistrats. Il a indiqué à ce propos que la capacité d'accueil de l'école nationale des greffes de Dijon serait augmentée et qu'un rattrapage devrait être effectué pour les greffes dans la suite de l'exécution de la loi de programmation.

M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la Justice, a en outre souligné les innovations en matière de méthodes et de procédures, prévues par le décret paru l'été dernier, et souhaité lancer une concertation sur les propositions du rapport Magendie sur la célérité et la qualité de la Justice dès 2005, en particulier sur ses aspects réglementaires.

S'agissant des crédits de fonctionnement de l'administration pénitentiaire, il a indiqué qu'ils progressaient de 10 % en 2005, et que les 2.000 emplois de surveillants supplémentaires permettraient de prendre en charge l'augmentation relative de la population carcérale, tout en soulignant que la restauration de l'autorité de l'Etat et la sécurité des établissements pénitentiaires restaient une priorité du gouvernement.

En outre, M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la Justice, a rappelé que le programme des unités hospitalières sécurisées interrégionales (UHSI) se développerait en 2005, après l'essai réussi de Nancy, et que l'UHSI de Lille serait inaugurée en décembre.

Par ailleurs, le ministre a souligné les efforts d'éducation en prison, puisque 120 emplois d'assistants de formation seraient financés sur vacations en 2005 pour seconder les enseignants dans la lutte contre l'illettrisme.

Il a également ajouté que la préparation à la sortie serait renforcée par la création de 200 emplois de conseillers d'insertion et de probation en 2005 (succédant aux 160 créations d'emplois de 2004).

S'agissant de l'immobilier, M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la Justice, a indiqué qu'en 2005 serait livrée la deuxième tranche des palais de Justice de Pontoise, de Besançon et de Narbonne, tandis que commenceraient les travaux de l'Ecole nationale des greffes, des palais de Justice de Toulouse, Thonon, Nanterre, Avesne sur Helpe, Ajaccio, Bordeaux et Niort.

Il a rappelé que la capacité d'accueil pénitentiaire avait été augmentée de près de 1.700 places en deux ans et que l'effort se poursuivrait en 2005 avec notamment la mise en oeuvre du dernier établissement du programme 400 à Séquedin en décembre, le démarrage des travaux des établissements pour mineurs (la livraison étant prévue fin 2006), de la maison d'arrêt de La Réunion et de trois centres de semi-liberté (Aix-en-Provence, Bordeaux et Lille), la poursuite de la rénovation de Fleury-Mérogis et des Baumettes, ainsi que la livraison de l'extension de l'Ecole nationale de l'administration pénitentiaire.

Par ailleurs, M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la Justice, a souligné qu'il venait pour la première fois de rendre public le baromètre trimestriel des juridictions récapitulant leur activité sous forme de statistiques synthétiques (nombre d'affaires traitées, délais moyens de traitement, durée de résorption du stock). Il a ajouté que ces résultats trimestriels seraient publiés dès le mois suivant et permettraient de développer l'évaluation et de remédier rapidement à d'éventuels dérapages.

S'agissant de l'entrée en vigueur prochaine de la loi organique relative aux lois de finances, M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la Justice, a souligné qu'il avait été un des seuls ministres à publier son projet annuel de performance dès le jour de la présentation du projet de budget en conseil des ministres, afin de soumettre au Parlement au plus tôt les soixante-dix indicateurs retraçant l'ensemble des activités de son ministère. Il a estimé qu'ils permettraient une meilleure lecture du projet de budget.

Par ailleurs, M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la Justice, a qualifié d'encourageants les premiers résultats de la loi d'orientation et de programmation pour la Justice. Il a notamment souligné la baisse de la délinquance des mineurs, ainsi que la diminution de 30 % du nombre de mineurs incarcérés, en rappelant que lors de l'examen de ce projet de loi, il avait été accusé de vouloir incarcérer systématiquement les mineurs. Il a en outre estimé que les solutions alternatives comme les centres éducatifs fermés présentaient un premier bilan positif dans l'attente des établissements pénitentiaires pour mineurs. Il a toutefois regretté les difficultés rencontrées avec les élus locaux pour trouver des lieux d'implantation de ces centres.

Enfin, M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la Justice, s'est félicité de la réduction des délais de traitement des affaires civiles pour les cours d'appel et, plus récemment, pour les tribunaux de grande instance, ainsi que de l'augmentation du taux de réponse pénale et de la baisse corrélative des classements sans suite, ainsi que de la faiblesse du taux d'évasion dans les prisons.

La commission a ensuite entendu Mme Nicole Guedj, secrétaire d'Etat aux droits des victimes.

Mme Nicole Guedj, secrétaire d'Etat aux droits des victimes, a d'abord rappelé que l'accès des citoyens au droit et à la Justice constituait l'un des axes majeurs de la loi d'orientation et de programmation pour la Justice adoptée en 2002. La priorité accordée à la prise en charge des victimes, a-t-elle noté, s'était traduite par la création en 2004 du secrétariat d'Etat aux droits des victimes et l'adoption, le 29 septembre dernier, d'un plan d'action fondé, d'abord, sur la généralisation des dispositifs de prise en charge des victimes, ensuite, sur l'amélioration des conditions d'indemnisation et, enfin, sur le développement d'actions de soutien et de réinsertion.

La secrétaire d'Etat a indiqué que le budget dont elle avait la charge progresserait de 13 % en 2005. Cet effort budgétaire permettrait, en premier lieu, a-t-elle poursuivi, d'améliorer la prise en charge des victimes par le réseau associatif, notamment dans les situations d'urgence. Elle a rappelé, à cet égard, qu'au niveau local, les 168 associations et services d'aides aux victimes, conventionnées par les cours d'appel, avaient accueilli en 2003 près de 240.000 personnes dont les deux tiers étaient victimes d'infractions pénales. L'année 2005 devrait être marquée, selon Mme Nicole Guedj, par la mise en place d'un numéro unique d'appel pour toutes les victimes et l'élargissement des horaires de permanence ainsi que par le recrutement de psychologues à temps partiel. Elle a également mentionné plusieurs projets à l'échelle nationale, tels que le soutien à des réseaux associatifs nationaux.

Mme Nicole Guedj, secrétaire d'Etat aux droits des victimes, a rappelé par ailleurs que le secrétariat d'Etat aux droits des victimes, conformément au décret fixant sa compétence d'attribution, avait pris des initiatives dans d'autres domaines que ceux dévolus au ministère de la Justice comme l'inscription dans le projet de loi de finances pour 2005 d'une disposition prévoyant la défiscalisation des indemnités versées aux victimes de pathologies liées à une exposition à l'amiante.

La secrétaire d'Etat a évoqué ensuite les actions visant à prévenir la désinsertion sociale et professionnelle des publics fragilisés et en particulier des victimes de violences intrafamiliales ou de discriminations à travers le soutien à des actions spécifiques d'information, de conseil et de formation dans les démarches d'accès au droit. Elle a enfin précisé qu'en raison du solde des crédits disponibles, le choix avait été fait cette année de ne pas demander la consolidation du fonds de réserve prévu en cas d'accidents collectifs ou de catastrophes. Elle a précisé à cet égard que les actions en cours de ce fonds concernaient le crash de Sharm-el-Sheikh et le procès du tunnel du Mont-Blanc.

Après avoir relevé la faiblesse du taux de réalisation de la loi d'orientation et de programmation pour la Justice du 9 septembre 2002 (LOPJ) en termes de créations d'emplois de fonctionnaires des greffes prévu par le projet de budget pour 2005 (7 %), M. Yves Détraigne, rapporteur pour avis des services généraux de la Justice, a demandé au ministre de la Justice s'il comptait opérer un rattrapage au cours des prochaines années pour respecter ses engagements. Il a jugé le renforcement des effectifs particulièrement nécessaire du fait de l'entrée en vigueur de réformes nouvelles ayant alourdi considérablement la charge de travail des greffes, telle la loi d'orientation et de programmation pour la ville du 1er août 2003 (dite loi Borloo) instituant une procédure de redressement personnel. Il a mis en avant l'intérêt d'assortir les projets de loi d'une étude d'impact, afin de prévenir des difficultés de fonctionnement sur le terrain. Il a souhaité savoir si une accélération du rythme des créations d'emplois de magistrats administratifs interviendrait l'année prochaine pour compenser le ralentissement observé cette année (21 emplois créés). Il a jugé ce rééquilibrage indispensable compte tenu de la très forte croissance des affaires nouvelles enregistrées par les tribunaux administratifs.

Il a interrogé le ministre sur l'opportunité d'une « pause législative », estimant préférable d'appliquer les réformes déjà adoptées avant de les modifier, puis il s'est enquis des moyens mis en oeuvre pour maîtriser la croissance exponentielle des frais de Justice, dépenses dont le caractère évaluatif serait supprimé à compter de l'entrée en vigueur de la loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001 (LOLF). Enfin, il a souhaité connaître les perspectives de réforme de l'aide juridictionnelle.

S'agissant des effectifs des services judiciaires, M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la Justice, a répondu qu'il considérait prioritaire de pourvoir les emplois vacants, convenant par ailleurs de la nécessité de l'augmentation des créations d'emplois. Il s'est réjoui de la déconcentration des recrutements des fonctionnaires de catégorie C, seul moyen de gérer les affectations de ces personnels, peu enclins à la mobilité. Il a noté que le renforcement des moyens alloués à l'Ecole nationale des greffes appelée à accueillir un nombre croissant de fonctionnaires était indispensable, tout comme l'augmentation des promotions de greffiers.

Reconnaissant l'insuffisance du taux d'exécution de la programmation quinquennale en termes de créations d'emplois à l'issue des trois premiers exercices budgétaires (inférieur à 40 %), il a expliqué que les problèmes posés par la surpopulation carcérale et l'alourdissement des charges de travail en résultant pour les surveillants l'avait amené à opérer des arbitrages au profit de l'administration pénitentiaire et, de ce fait, à accélérer les recrutements à son bénéfice. Il a formé le voeu que les prochains exercices budgétaires offrent des marges de manoeuvre suffisantes pour assurer un rééquilibrage au profit des services judiciaires.

Le garde des sceaux a expliqué que la situation des juridictions administratives était plus satisfaisante que celle des services judiciaires, après avoir observé que le taux de réalisation de la LOPJ cumulé sur les trois premiers exercices budgétaires s'élevait à près de 50 %. Evoquant les caractéristiques des contentieux administratifs souvent répétitifs et massifs comme en matière de fonction publique, il a jugé préférable d'améliorer les procédures de règlement amiable et d'accélérer les modes de jugement - qui pourraient être pris par ordonnance simplifiée - plutôt que d'augmenter constamment les effectifs.

Après avoir estimé que la responsabilité d'une pause législative incombait à la fois au Parlement et au gouvernement, il a mentionné les principaux projets de réforme en cours d'élaboration, citant la modernisation du régime de protection des majeurs vulnérables, l'ordonnance sur la filiation prise en application de la loi habilitant le gouvernement à simplifier le droit adoptée définitivement le 26 octobre dernier et la nécessaire adaptation du droit des successions aujourd'hui en décalage avec l'évolution de la famille et le contexte économique. Il a ajouté que des propositions formulées par le groupe de travail chargé de tirer les enseignements du traitement judiciaire de l'affaire dite « d'Outreau » pourraient, le cas échéant, avoir un prolongement législatif. A cet égard, il a cité une piste mentionnée dans le rapport d'étape de ce groupe de travail relative à l'instauration d'une audience publique systématique d'examen sur l'état d'avancement et la poursuite de l'instruction par la chambre de l'instruction pour toute procédure donnant lieu à une mesure de détention provisoire d'une durée supérieure à six mois. Il a annoncé qu'une réflexion était menée pour prévenir la délinquance, laquelle serait appréhendée dans sa dimension éducative et sociale, plutôt que répressive, après avoir mentionné le dépôt prochain d'une proposition de loi visant à renforcer le traitement de la récidive à l'Assemblée nationale.

Il a confirmé que l'entrée en vigueur de la loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001 allait bouleverser le mode de gestion des dépenses au titre des frais de Justice, dont le caractère évaluatif serait supprimé. Il a considéré que son ministère allait être confronté à un véritable défi compte tenu de la progression exponentielle de cette enveloppe depuis deux ans. Il a expliqué que cette évolution était imputable à deux postes : les dépenses d'expertises et les écoutes dans le domaine de la téléphonie mobile. Sur ce dernier point, il a constaté que l'imprécision des demandes de certains magistrats prescripteurs conduisait les opérateurs de téléphonie mobile à proposer des prestations souvent supérieures aux besoins et, de ce fait, très coûteuses.

M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la Justice, a jugé indispensable de sensibiliser les magistrats prescripteurs dans le respect toutefois de leur indépendance. Expliquant que certaines dépenses au titre des frais de Justice résultaient de décisions prises par les officiers de police judiciaire, il a indiqué qu'après avoir envisagé de transférer le coût de ces charges aux ministères de l'intérieur et de la défense, il avait, dans le souci de préserver l'autorité des magistrats du parquet sur les officiers de police judiciaire, estimé préférable la mise en place d'une gestion déconcentrée au niveau des cours d'appel, ajoutant qu'une mise en réserve des crédits en cas d'aléas (dépenses exceptionnelles dans le cadre d'une enquête criminelle, épuisement des crédits avant la fin de l'année) pourrait se révéler nécessaire.

Evoquant les récentes réformes de l'aide juridictionnelle, il en a rappelé les deux axes :

- le premier relatif à l'élargissement des conditions d'admission au bénéfice de ce dispositif par l'exclusion du montant des ressources de l'aide personnalisée au logement et de l'allocation de logement social d'une part et la modulation des correctifs familiaux d'autre part ;

- le second consacré à la revalorisation de la rétribution des avocats par l'augmentation substantielle de l'unité de valeur et des barèmes de quinze procédures contentieuses. Il a relevé que l'effort substantiel consenti en faveur des avocats s'était d'ailleurs traduit par un abondement significatif de la dotation versée aux caisses des règlements pécuniaires des avocats (CARPA) en hausse de 19 % en 2002 et de 9 % en 2003.

M. Christian Cointat s'est inquiété des conséquences de la LOLF sur l'utilisation des crédits affectés aux frais de Justice. Après avoir noté que l'évolution des techniques d'enquête avait fait progresser le système pénal de la culture de l'aveu vers la preuve, il s'est demandé si les investigations engagées en fin d'exercice budgétaire ne risquaient pas d'être entravées par l'insuffisance de l'enveloppe allouée aux frais de Justice. Il a également souhaité obtenir du garde des sceaux l'assurance qu'une péréquation serait mise en place au niveau national estimant que la gestion déconcentrée des crédits de frais de Justice pouvait soulever des difficultés.

En réponse, M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la Justice, a indiqué que la technique des décrets d'avance permettrait de faire face aux fins d'exercice budgétaire difficiles et, donc, de financer les dépenses au titre des frais de Justice, ajoutant qu'il paraissait souhaitable de constituer une double réserve de crédits - nationale et régionale - en vue de faire face aux dépenses exceptionnelles.

Mme Nicole Borvo s'est d'abord inquiétée du développement considérable de la judiciarisation de notre société qu'illustrait notamment la mise en place de la juridiction de proximité. Elle a également interrogé le garde des sceaux sur le bilan des centres éducatifs fermés ainsi que sur le choix de la localisation du tribunal de grande instance de Paris.

M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la Justice, a d'abord estimé que la judiciarisation représentait une tendance profonde de notre société. Il a précisé que les juges de proximité étaient appelés à traiter d'affaires qui relevaient auparavant des juridictions professionnelles. Le garde des sceaux a indiqué en outre qu'il existait actuellement treize centres éducatifs fermés. Il a enfin relevé que deux localisations alternatives étaient envisagées pour l'installation du tribunal de grande instance de Paris -l'Hôtel-Dieu et Saint-Vincent de Paul, d'une part, la zone d'aménagement concerté (ZAC) de Tolbiac, d'autre part. Il a ajouté que si les acteurs de l'institution judiciaire avaient dans leur majorité manifesté une préférence pour la première option, les discussions devaient encore se poursuivre avec la ville de Paris. Il a observé que cette question constituait un enjeu important pour son ministère compte tenu des lourdes charges financières induites par la location de locaux supplémentaires.

M. Jean-Jacques Hyest, président, a interrogé le garde des sceaux sur l'impact de la loi du 1er août 2003 sur l'activité des juridictions d'instance. Celui-ci a précisé que le suivi de ce dossier avait été confié à M. Guy Canivet, premier président de la Cour de cassation, et que l'on pouvait depuis lors constater une augmentation de 20 % des procédures contentieuses portées devant les tribunaux.

M. Philippe Goujon, rapporteur pour avis des crédits de l'administration pénitentiaire, s'est d'abord félicité de l'évolution positive de ces crédits, conforme aux objectifs fixés par la loi d'orientation et de programmation pour la Justice de 2002 et a estimé que les actions mises en oeuvre par le Gouvernement avaient permis de répondre à certaines recommandations de la commission d'enquête sénatoriale sur les prisons, présidée par M. Jean-Jacques Hyest. Il a ensuite souligné les trois points forts du projet de budget pour l'administration pénitentiaire en évoquant la création de 533 emplois, l'augmentation de l'enveloppe consacrée au fonctionnement des établissements pénitentiaire et enfin la réalisation du programme de construction de huit nouveaux établissements pénitentiaires. Il a toutefois relevé deux sujets de préoccupation liés, d'une part, au taux de suroccupation des établissements pénitentiaires et en particulier des maisons d'arrêt et, d'autre part, aux moyens nécessaires à la mise en oeuvre des mesures alternatives à l'incarcération. Il a interrogé, à cet égard, le garde des sceaux sur les évolutions statutaires concernant les agents des services d'insertion et de probation.

M. Philippe Goujon, rapporteur pour avis, a souhaité également connaître les avantages respectifs des établissements pénitentiaires en gestion mixte et de ceux en gestion publique. Il a demandé en outre des précisions sur les perspectives d'évolution en matière de prise en charge par l'administration pénitentiaire des missions d'escorte et de garde des détenus. Il a enfin souhaité des éclaircissements sur les programmes de rénovation des grands établissements d'Ile-de-France et en particulier l'engagement financier consacré à la maison d'arrêt de Fleury Mérogis ainsi que les conditions de déroulement des travaux à la maison d'arrêt de La Santé.

M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la Justice, a indiqué que la réforme statutaire de la filière d'insertion et de probation visait à créer un vrai corps d'encadrement, à améliorer le statut d'emploi des chefs de service d'insertion et de probation et enfin à permettre une revalorisation indiciaire. Il a observé que la charge de travail des services d'insertion et de probation serait accrue par la mise en oeuvre de la loi « Perben 2 », les personnels de ces services étant appelés en effet à assurer le suivi de quelque 17.000 sorties de détention par an.

Le garde des sceaux a relevé que le recours à des prestataires privés dans le cadre de la gestion mixte des établissements pénitentiaires donnait toute satisfaction et que le renouvellement des contrats ne soulevait aucune difficulté particulière. Il a toutefois ajouté que de nombreux postes restaient vacants dans les services techniques de l'administration pénitentiaire, faute d'un nombre suffisant de candidats au recrutement dans cette filière.

M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la Justice, a par ailleurs indiqué qu'il avait donné son accord de principe à la prise en charge par l'administration pénitentiaire des escortes et de la garde des détenus dans le cadre des hospitalisations, actuellement assumées par la police et la gendarmerie. Une telle évolution, a-t-il noté, avait d'ailleurs été accueillie favorablement par les organisations syndicales qui y voyaient une possibilité de diversifier les tâches confiées aux personnels de surveillance. Il a estimé néanmoins que ce transfert de charges restait subordonné à la mise à disposition de moyens qui ne paraissaient pas aujourd'hui réunis. Il a rappelé en outre que cette nouvelle mission ne pourrait être généralisée sans une expérimentation préalable et qu'elle supposait, en tout état de cause, la formation des personnels à l'utilisation éventuelle, sur la voie publique, des armes dont ils seraient dotés.

M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la Justice, a relevé en outre que le programme de rénovation de Fleury-Mérogis devrait être étalé sur huit ans, pour maintenir l'activité pendant les travaux, en raison des difficultés de trouver des capacités d'hébergement dans d'autres établissements de la région Ile-de-France. Il a estimé par ailleurs que s'il était indispensable de maintenir un établissement pénitentiaire au coeur de Paris, même si la rénovation de la maison d'arrêt de la Santé se déroulerait dans des conditions sans doute difficiles.

M. Jean-Jacques Hyest, président, a insisté sur la nécessaire formation à l'usage des armes des personnels de l'administration pénitentiaire dans l'hypothèse où serait étendue leur mission en matière d'escortes et transfèrements. Il a estimé que le système français, malgré ses limites, apparaissait préférable au dispositif mis en oeuvre au Royaume-Uni où ces transfèrements sont confiés à une société privée.

M. Christian Cointat a souhaité savoir si le site nécessaire à l'extension de l'établissement pénitentiaire de Nouméa avait été choisi, indiquant que la rénovation des bâtiments actuels, situés sur un terrain présentant un grand intérêt touristique, risquerait de se révéler plus coûteuse que la construction d'un nouvel édifice, sur un terrain qui serait moins prisé. Il a par ailleurs interrogé le ministre sur l'avancement des études relatives à l'augmentation de la capacité d'accueil du centre pénitentiaire de Faa'a Nuntiania, en Polynésie française et sur les travaux d'extension de la maison d'arrêt de Majicavo, à Mayotte.

En réponse, M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la Justice, a souligné la nécessité de rallier les responsables locaux calédoniens à l'extension du centre pénitentiaire existant, la construction d'un nouveau bâtiment sur un autre site risquant de retarder encore davantage les travaux susceptibles de remédier à la surpopulation carcérale.

S'agissant du centre pénitentiaire de Faa'a Nuntiania, il a annoncé l'engagement des travaux d'extension dès que seraient levées les dernières incertitudes relatives à la mise à disposition du terrain.

M. Marcel-Pierre Cléach s'est interrogé sur l'état de réalisation du « programme 13.200 places ». Le ministre de la Justice a rappelé qu'avait d'ores et déjà été lancés les appels d'offres pour sept établissements pour mineurs (dont la livraison devrait intervenir en 2006), quatre établissements en partenariat public privé et quatre établissements en maîtrise d'ouvrages publics. La réalisation de la moitié des établissements prévus dans le cadre du « programme 13.200 » était ainsi engagée, l'autre partie devant être mise en oeuvre en 2005. Il a ajouté que le partenariat public privé permettrait en principe de préserver des vicissitudes budgétaires la mise en oeuvre des établissements. Le recours à la maîtrise d'ouvrage public demeurait privilégié pour les établissements de petite taille ou ceux présentant certaines spécificités.

M. Richard Yung s'est inquiété de la présence de condamnés à de longues peines aux côtés de prévenus dans les maisons d'arrêt et a demandé si cette situation préoccupante n'était pas liée au numerus clausus qui paraissait s'appliquer aux maisons centrales.

M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la Justice, a d'abord précisé que les maisons centrales n'accueillaient que les détenus pour très longues peines. Il a ajouté que le programme de construction pénitentiaire devrait permettre de réduire le taux de suroccupation pour l'ensemble des établissements, tout en relevant que le nombre actuel de détenus dans les prisons françaises apparaissait tout à fait comparable à celui des autres pays européens de même culture juridique.

M. Jean-Jacques Hyest, président, a estimé que le centre national d'orientation de Fresnes ne jouait pas réellement son rôle et que l'affectation des personnes condamnées dans les centres de détention connaissait un retard excessif. Il a rappelé que la commission sénatoriale d'enquête sur les prisons avait appelé de ses voeux une réforme de ce dispositif.

M. Robert Badinter a attiré l'attention sur le profond changement de la population pénitentiaire constituée désormais par une forte proportion de délinquants sexuels dont beaucoup présentaient une pathologie psychiatrique. Dans ces conditions, il s'est demandé s'il ne convenait pas de mettre en place des établissements à caractère mixte assurant à la fois l'incarcération et le traitement des détenus.

M. Dominique Perben a d'abord rappelé que conformément à la loi d'orientation et de programmation pour la Justice, des unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA) seraient mises en oeuvre afin d'assurer dans un cadre hospitalier sécurisé la prise en charge des détenus souffrant de troubles psychiatriques. Il a observé que la part croissante de délinquants sexuels dans les établissements pénitentiaires conduirait à s'interroger sur l'opportunité de séparer les différentes catégories de délinquants, ce qui se révélait aujourd'hui impossible compte tenu de la suroccupation des établissements pénitentiaires. Il a enfin relevé qu'une commission santé-Justice présidée par M. Jean-François Burgelin avait été chargée de réfléchir notamment sur les conditions de libération des délinquants considérés comme dangereux.

M. Nicolas Alfonsi, rapporteur pour avis des crédits de la protection judiciaire de la jeunesse, a tout d'abord souhaité saluer le dévouement et l'abnégation des éducateurs de la protection judiciaire de la jeunesse, estimant qu'ils n'étaient pas assez reconnus. Il a ensuite souligné l'importance de la réussite du difficile passage de l'adolescence à l'âge adulte, qui conditionne l'avenir de l'individu et lui permet ou non d'échapper à l'engrenage carcéral.

M. Nicolas Alfonsi, rapporteur pour avis des crédits de la protection judiciaire de la jeunesse, a ensuite interrogé le garde des sceaux sur le bilan de l'intervention continue des éducateurs de la protection judiciaire de la jeunesse dans les quartiers de mineurs des maisons d'arrêt, ainsi que sur les résultats de l'évaluation des premiers centres éducatifs fermés, les principales difficultés rencontrées, ainsi que le devenir des jeunes accueillis dans ces centres.

Par ailleurs, il a évoqué le récent rapport de la défenseure des enfants, Mme Claire Brisset, très critique quant aux conséquences de la décentralisation sur les politiques de protection de l'enfance, puis a souhaité connaître les réponses apportées aux remarques de la Cour des comptes sur l'insuffisance du contrôle des associations habilitées.

M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la Justice, a jugé que le premier bilan de l'intervention continue des éducateurs en prison était positif et que les relations entre les équipes de l'administration pénitentiaire et de la protection judiciaire de la jeunesse étaient bonnes. Il s'est félicité du maintien du lien avec les éducateurs chargés du suivi avant l'incarcération, l'objectif étant de poursuivre ce suivi après la sortie de prison. S'il a admis une certaine résistance de principe des personnels de la protection judiciaire de la jeunesse, il a estimé qu'elle s'estompait avec la pratique.

S'agissant des centres éducatifs fermés (CEF), M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la Justice, a indiqué que 183 jeunes de 13 à 18 ans avaient déjà été accueillis (dont 27 jeunes filles) et que onze CEF fonctionnaient actuellement, dont huit réservés aux 13/16 ans. S'agissant de leur devenir après leur sortie des CEF, il a indiqué que 50% étaient accueillis en hébergement classique ou dans une famille d'accueil avec un suivi de la protection judiciaire de la jeunesse, tandis que 32 % avaient retrouvé leur famille et demeuraient suivis. Il a toutefois ajouté que 16 % avaient été incarcérés (mais demeuraient suivis par des éducateurs), tandis que 2 % avaient été admis en hôpital psychiatrique et 2 % dépendaient dorénavant du programme des jeunes majeurs. M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la Justice, a également indiqué que 32 % avaient retrouvé une scolarité normale et que 32 % se trouvaient en pré-apprentissage.

Par ailleurs, il a rappelé que les jeunes accueillis en CEF connaissaient souvent des problèmes psychiatriques et arrivaient le plus souvent dans un état sanitaire déplorable, révélant notamment de graves carences alimentaires. Soulignant l'extrême difficulté de la tâche des équipes éducatives confrontées à la violence, parfois seul moyen d'expression de ces jeunes à leur arrivée, il a cependant jugé indispensable de continuer cette expérience, soulignant que l'arrêter reviendrait à recourir plus massivement à l'incarcération des mineurs, alors même que les premiers établissements pénitentiaires pour mineurs n'étaient pas prêts. Il a enfin regretté les difficultés rencontrées avec les élus pour trouver des lieux d'implantation de ces centres.

M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la Justice, a ajouté que l'une des principales difficultés résidait dans la jeunesse et l'inexpérience des équipes éducatives, qui pouvait entamer leur autorité auprès de mineurs difficiles. Il a donc souhaité une diversification du recrutement des éducateurs, afin de privilégier l'expérience de la vie, grâce à la diversification des concours d'accès au corps des éducateurs mais aussi au recrutement de contractuels expérimentés.

S'agissant des critiques de la défenseure des enfants, il a estimé qu'elles avaient été très amplifiées par les médias, mais que la conciliation des normes nationales et d'une mise en oeuvre décentralisée posait de réelles difficultés, qui devraient être évoquées avec l'association des départements de France. Il a en outre considéré que la mise en place de schémas départementaux était indispensable.

M. Jean-Jacques Hyest, président, a enfin indiqué que la Commission procèderait prochainement à l'audition de Mme Claire Brisset, défenseure des enfants.

Mercredi 1er décembre 2004

- Présidence de M. Jean-Jacques Hyest, président.

PJLF pour 2005 - Crédits consacrés aux départements et régions d'outre-mer - Examen du rapport pour avis

La commission a tout d'abord procédé à l'examen du rapport pour avis de M. José Balarello sur les crédits consacrés aux départements et régions d'outre-mer inscrits dans le projet de loi de finances pour 2005.

Rappelant que, tirant les conséquences de la réforme constitutionnelle opérée par la loi n° 2003-276 du 28 mars 2003 relative à l'organisation décentralisée de la République, l'avis présenté n'abordait plus les crédits consacrés à Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon, devenus des collectivités d'outre-mer soumises au principe de spécialité législative en vertu de l'article 74 de la Constitution, M. José Balarello, rapporteur pour avis, a souligné que le projet de budget du ministère de l'outre-mer pour 2005 atteignait 1,71 milliard d'euros. Il a souligné que l'importante progression constatée par rapport aux dotations budgétaires de l'exercice 2004 résultait de transferts de crédits jusqu'alors affectés à d'autres ministères, relevant que, comme l'avait reconnu le ministre lors de son audition par la commission le 17 novembre 2004, le budget de l'outre-mer accusait, à périmètre constant, une baisse de 2,4 %. Il a cependant insisté sur le fait que cette légère diminution n'avait pas d'incidence sur la situation budgétaire globale des départements et régions d'outre-mer qui bénéficiaient des crédits d'autres ministères, lesquels augmentaient leurs dotations en faveur de l'outre-mer. Il a relevé qu'on pouvait au contraire constater une progression de 1,70 % des crédits de paiement inscrits aux budgets de l'ensemble des ministères en faveur des départements et régions d'outre-mer.

Après avoir indiqué que La Réunion bénéficiait de 42 % des crédits totaux en faveur des départements et régions d'outre-mer compte tenu de son poids démographique, le rapporteur pour avis a souligné que les mesures prévues pour ces collectivités dans le budget du ministère de l'outre-mer permettraient de poursuivre l'action engagée en matière d'emploi, de logement social et de soutien aux collectivités territoriales, tout en assurant la mise en oeuvre des dispositifs prévus par la loi n° 2003-660 du 21 juillet 2003 de programme pour l'outre-mer. Il s'est félicité des progrès intervenus dans la lutte contre le chômage, indiquant que le nombre de demandeurs d'emploi avait baissé de 5,6 %, bien qu'il représentât encore 23 % de la population active. Il a précisé que le projet de budget permettrait de renforcer les mesures d'accession en logement social ainsi que les dispositifs destinés à faciliter la mobilité des jeunes ultramarins et à assurer la continuité territoriale avec la métropole. Il a souligné que les dispositifs de défiscalisation prévus notamment par la loi de programme pour l'outre-mer continueraient à s'appliquer et concernaient la réhabilitation des équipements hôteliers existants, ce qui était de nature à renforcer les infrastructures touristiques dans les départements et régions d'outre-mer.

M. José Balarello, rapporteur pour avis, a constaté que les crédits du ministère de l'intérieur en faveur des départements et régions d'outre-mer progressaient, à périmètre constant, de 2,4 %, tandis que les crédits du ministère de la justice restaient stables mais permettraient de financer la modernisation des équipements des juridictions ainsi que la revalorisation des dotations relatives à l'aide juridictionnelle.

Abordant la question de l'évolution institutionnelle et statutaire des départements et régions d'outre-mer, M. José Balarello, rapporteur pour avis, a souligné que La Réunion et la Guyane étaient restées en marge de ce processus, la première de ces collectivités souhaitant préserver son statut actuel tandis que, dans la seconde, les élus n'avaient pu parvenir à un consensus sur un projet d'évolution institutionnelle. Revenant sur les résultats des consultations des électeurs, intervenues le 7 décembre 2003, il a indiqué qu'une majorité s'était dégagée en Martinique et en Guadeloupe pour refuser la transformation des actuels départements et régions de Guadeloupe et de Martinique en deux collectivités uniques, estimant que ces résultats pouvaient s'expliquer par la crainte de certains habitants de voir ces territoires perdre leurs liens avec la métropole. Il a souligné, en revanche, qu'une large majorité des électeurs de Saint-Martin et Saint-Barthélémy s'était prononcée en faveur de la transformation des communes de la Guadeloupe en collectivités d'outre-mer, régies par l'article 74 de la Constitution.

Evoquant le contenu des futurs statuts applicables à ces collectivités, qui devraient faire l'objet d'une loi organique complétée par une loi ordinaire, le rapporteur pour avis a estimé que ces réformes devraient être l'occasion de créer des dispositifs spécifiques en matière d'immigration à Saint-Martin, précisant par ailleurs que les règles relatives au droit bancaire, au droit pénal, ainsi qu'au droit commercial et financier continueraient de relever de la compétence de l'Etat. Il a insisté pour que la dévolution d'un pouvoir législatif à Saint-Martin ne conduise pas à des dérives, évoquant la situation de la partie néerlandaise de cette île, où des circuits de blanchiment d'argent avaient été mis au jour.

M. José Balarello, rapporteur pour avis, a ensuite relevé une baisse sensible de la délinquance dans les départements et régions d'outre-mer, de l'ordre de 2,23 %, ainsi que du taux de criminalité qui demeure inférieur à l'indice constaté en métropole, puis a souligné les efforts faits dans le cadre de la lutte contre l'immigration clandestine. Il a ensuite mis en relief l'augmentation des effectifs budgétaires de magistrats de l'ordre judiciaire, regrettant qu'aucune donnée n'ait été communiquée concernant la situation des juridictions administratives dans les départements d'outre-mer.

Le rapporteur pour avis a ensuite souligné l'aggravation du taux d'occupation carcérale, passé de 136,1 % en 2003 à 143,2 % en 2004. Il a insisté sur le délabrement de la maison d'arrêt de Saint-Denis de La Réunion, rappelant que le ministre avait annoncé la mise en service au plus tard en 2008 d'un nouvel établissement pénitentiaire de 600 places. Puis il a souligné que les documents budgétaires présentaient un panorama plus clair des divers avantages consentis aux fonctionnaires exerçant ou ayant exercé leurs fonctions dans les départements ou régions d'outre-mer, estimant que les dispositifs existants, institués pour la plupart dans les années 1950, devraient faire l'objet d'un réexamen compte tenu des évolutions intervenues depuis lors.

Se félicitant des actions menées au cours de l'année 2004 en matière de coopération régionale et soulignant notamment la conclusion, le 30 novembre 2004, d'un accord de réadmission entre la France et le Surinam, M. José Balarello, rapporteur pour avis, a ensuite rappelé que le régime de l'octroi de mer avait été prorogé jusqu'en 2014, ce qui permettrait de maintenir un dispositif essentiel pour l'économie des départements et régions d'outre-mer, et a constaté une amélioration de la consommation des fonds structurels européens, malgré l'absence de mise en place des comités régionaux de suivi prévus par la loi du 13 décembre 2000 d'orientation pour l'outre-mer.

Abordant la réforme des politiques structurelles proposée par la Commission européenne, le rapporteur pour avis a souligné que, selon les informations qui lui avaient été communiquées, les départements et régions d'outre-mer seraient éligibles aux crédits relevant de l'objectif de « convergence », destiné à remplacer l'actuel « objectif 1 » et ce, malgré l'arrivée de nouveaux Etats membres dans l'Union européenne. Il a insisté sur le fait que l'apport financier communautaire qui contribuait fortement au développement économique et social de ces territoires devrait ainsi être préservé.

M. Jean-Jacques Hyest, président, s'étant interrogé sur les effets de l'évolution statutaire de Saint-Martin et Saint-Barthélémy quant à leur qualité de régions ultrapériphériques de l'Union européenne, M. José Balarello, rapporteur pour avis, a répondu qu'il s'agissait d'une question qui soulevait certaines divergences d'interprétation, mais a souligné que le traité instituant une Constitution pour l'Europe, signé le 29 octobre 2004 à Rome, prévoyait une possibilité pour les pays et territoires d'outre-mer, au sens communautaire du terme, de bénéficier du statut de région ultrapériphérique sur décision du Conseil européen, prise à l'unanimité, sur l'initiative de l'Etat membre concerné et après avis de la Commission. Il a précisé que la même disposition permettait une évolution inverse.

M. Simon Sutour a précisé que le maintien des financements communautaires au titre des fonds structurels pour les départements et régions d'outre-mer résultait, à ce stade, des seules propositions de la Commission européenne. Il a souligné que les financements communautaires envisagés ne seraient définitivement acquis qu'après l'achèvement des négociations des Etats membres sur le budget de l'Union européenne ainsi que sur les perspectives financières pour les années 2007-2013. Il a cependant mis en doute le fait que le cadre envisagé puisse s'appliquer si les dotations des Etats membres au profit du budget communautaire étaient maintenues à 1 % du revenu national brut, comme le souhaitait notamment le gouvernement français.

M. José Balarello, rapporteur pour avis, ayant reconnu que le maintien des fonds structurels n'était effectivement pas absolument certain à ce stade des négociations, M. Simon Sutour a ajouté qu'en tout état de cause, la situation serait particulièrement critique pour les régions métropolitaines qui bénéficiaient actuellement des concours communautaires et qui, selon toute vraisemblance, seraient exclues des nouveaux dispositifs.

Mme Michèle André s'étant enquise de la situation réelle de l'avancement de l'installation du nouvel établissement pénitentiaire de La Réunion, M. José Balarello, rapporteur pour avis, a rappelé les propos tenus par le ministre de l'outre-mer lors de son audition par la commission, le 17 novembre 2004, qui avait annoncé le début des travaux de construction sur le site de Doemenjod au premier trimestre 2006.

Puis la commission a donné un avis favorable à l'adoption des crédits relatifs aux départements et régions d'outre-mer inscrits au budget du ministère de l'outre-mer dans le projet de loi de finances pour 2005.

PJLF pour 2005 - Crédits consacrés aux collectivités d'outre-mer à statut particulier et à la Nouvelle-Calédonie - Examen du rapport pour avis

La commission a ensuite procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Christian Cointat sur les crédits consacrés aux collectivités d'outre-mer à statut particulier et à la Nouvelle-Calédonie inscrits dans le projet de loi de finances pour 2005.

M. Christian Cointat, rapporteur pour avis, a d'abord rendu hommage à son prédécesseur, M. Jean-Jacques Hyest. Il a souligné qu'il était particulièrement difficile de déterminer exactement l'affectation des crédits provenant d'autres ministères aux différentes collectivités d'outre-mer, indiquant que cette difficulté avait été accentuée au cours des dernières années par les changements de périmètre du budget du ministère de l'outre-mer et par les modifications rendues nécessaires par la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances. A cet égard, relevant que l'augmentation de 52 % du budget du ministère de l'outre-mer était liée au transfert des crédits visant à compenser les exonérations de cotisations sociales, il a exprimé le voeu que le gouvernement maintienne une transparence budgétaire permettant d'apprécier la répartition des crédits destinés aux collectivités d'outre-mer.

M. Christian Cointat, rapporteur pour avis, a indiqué que l'effort de l'Etat en faveur des collectivités d'outre-mer pour l'année 2005 s'élevait à 2,474 milliards d'euros, contre 2,387 milliards d'euros pour l'année 2004, dont seulement 14,3 %, soit 355 millions d'euros, provenaient du budget de l'outre-mer. Il a ensuite rappelé que les ministères de l'éducation nationale, de la défense, de l'intérieur et de la justice étaient ceux dont les budgets contribuaient le plus largement aux crédits consacrés aux collectivités d'outre-mer. Il a précisé que plus de la moitié de la part du budget du ministère de l'outre-mer allouée aux collectivités d'outre-mer serait affectée à la Nouvelle-Calédonie.

Il a estimé que le budget alloué à la Polynésie française, à Wallis-et-Futuna, à Mayotte, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à la Nouvelle-Calédonie et aux terres australes et antarctiques françaises (TAAF) se caractérisait par un effort important en faveur de l'emploi, utilisant des instruments différents selon le statut de chaque collectivité : défiscalisation, exonération de charges sociales ou encore primes à la création d'emploi. Il a également souligné l'effort consenti en matière de formation professionnelle, empruntant en particulier la voie du service militaire adapté, qui assure une formation citoyenne, militaire et professionnelle à 700 volontaires en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Mayotte, et à près de 3.000 volontaires au total dans les départements et collectivités d'outre-mer.

Il a ensuite indiqué que le budget de l'année 2005 s'efforçait d'encourager les investissements et le logement par des mesures fiscales et par le prêt à taux zéro, et maintenait le dispositif concernant la continuité territoriale avec la prise en charge totale ou partielle du coût des transports entre les collectivités et la métropole, le passeport mobilité pour les personnes désirant poursuivre des études en métropole et des aides fiscales au transport aérien. Il a en outre déclaré que ce budget tendait à consolider l'accès aux soins des plus démunis et prévoyait des aides traditionnelles aux collectivités territoriales, telles que les dotations de fonctionnement, le fonds intercommunal de péréquation en Polynésie française, la dotation de compensation en Nouvelle-Calédonie et la dotation de rattrapage pour Mayotte.

M. Christian Cointat, rapporteur pour avis, a estimé que les lignes directrices des crédits destinés aux collectivités d'outre-mer pour 2005 s'inscrivaient dans les orientations fixées par la loi de programme pour l'outre-mer.

S'agissant de la Nouvelle-Calédonie, il a relevé que 167,158 millions d'euros lui étaient consacrés par le budget de l'outre-mer, l'effort total de l'Etat en faveur de cette collectivité s'élevant à 910,112 millions d'euros, soit une progression de 1,23 % par rapport à l'année précédente.

Il a estimé que le statut de la Nouvelle-Calédonie, reprenant les dispositions adoptées dans l'accord de Nouméa du 5 mai 1998, confirmait son bon fonctionnement après des changements politiques importants et en dépit d'un récent regain de tensions portant sur la question de la citoyenneté calédonienne. Il a rappelé que la formation « L'avenir ensemble », constituée en parti politique en septembre 2004, assurait désormais la présidence du congrès, du gouvernement et de la province Sud, le PALIKA (parti de libération kanak) conservant la présidence de la province nord et l'union calédonienne la présidence dans la province des îles, tandis que le RPCR gardait les trois mandats parlementaires calédoniens et la mairie de Nouméa.

M. Christian Cointat, rapporteur pour avis, a indiqué que la Cour européenne des droits de l'homme devait se prononcer au cours du premier trimestre de l'année 2005 sur un recours concernant la question du corps électoral et rappelé que M. Jacques Lafleur, député, avait annoncé le dépôt d'une proposition de loi visant à attribuer la citoyenneté calédonienne à toute personne résidant depuis au moins trois ans sur le territoire de la Nouvelle-Calédonie. Il a relevé que le dernier recensement s'était déroulé sans comporter d'indications relatives à l'appartenance ethnique et avait rencontré très peu de refus de répondre.

Rappelant que la Nouvelle-Calédonie restait le troisième producteur mondial de nickel avec 112.000 tonnes de métal produites par an et une demande croissante, notamment en provenance de la Chine, il a indiqué que la société Le Nickel (SLN) était parvenue à augmenter sa production annuelle de 60.000 à 75.000 tonnes de métal, grâce à l'exploitation du massif de Tiebaghi dans la province Nord.

Il a ensuite déclaré que les travaux de construction d'une usine hydrométallurgique dans la province sud à Goro pour le traitement des latérites afin de produire du nickel et du cobalt, devraient commencer début 2005. Il a précisé que ce projet conduit par le groupe canadien INCO devrait à terme entraîner la création de 800 emplois directs et 2.000 emplois indirects. Il a ensuite indiqué que l'exploitation du massif de Koniambo par la société Falconbridge et par la SMSP (société minière du Sud Pacifique) faisait l'objet d'une étude de faisabilité en voie d'achèvement, cette usine devant avoir non seulement un impact équivalent en termes d'emplois à celui de l'usine de la province Sud, mais aussi un effet déterminant sur le rééquilibrage économique de la Nouvelle-Calédonie.

S'agissant de la justice en Nouvelle-Calédonie, M. Christian Cointat, rapporteur pour avis, a souligné le reflux de la délinquance générale, le taux de criminalité revenant en 2003 à 53,45 %o contre 57,35 %o en 2002 et 66,6 %o en métropole. Il a par ailleurs indiqué que la Nouvelle-Calédonie était confrontée à une immigration clandestine en provenance du Vanuatu et que la surpopulation du centre pénitentiaire de Nouméa s'était encore aggravée au cours des derniers mois, rendant urgente l'extension de cet établissement, qui accueillait 342 détenus pour 192 places en juillet 2004.

M. Christian Cointat, rapporteur pour avis, a relevé que 45,535 millions d'euros étaient consacrés au sein du budget de l'outre-mer à la Polynésie française, l'effort global de l'Etat en faveur de cette collectivité s'élevant à 1.073,497 millions d'euros, soit une augmentation de 2,84 % par rapport à l'année précédente. Il a par ailleurs rappelé que la loi organique du 27 février 2004 dotait cette collectivité d'une large autonomie.

Il a indiqué que la Polynésie française avait connu au cours de l'année 2003 des difficultés économiques, avec une diminution de 31 % des exportations de perle noire et une baisse de 43 % des exportations de produits de la pêche, mettant toutefois en exergue la reprise du tourisme et la part essentielle des transferts de l'Etat, d'importants investissements ayant été réalisés grâce au Fonds de reconversion de l'économie de la Polynésie française (FREPF) puis grâce à la dotation globale de développement économique (DGDE). Il a ensuite relevé les résultats favorables des dispositifs de défiscalisation sur la réalisation d'investissements touristiques.

M. Christian Cointat, rapporteur pour avis, a évoqué le reflux de la délinquance générale, essentiellement lié à la diminution de la délinquance sur la voie publique, et des affaires de stupéfiants, la délinquance économique et financière connaissant en revanche une progression importante. Soulignant la relative stabilité des affaires judiciaires, il a indiqué que le taux de surpopulation des établissements pénitentiaires atteignait 206,6 %, la situation la plus critique étant celle de la prison de Faa'a Nuntania, dont la nécessaire extension était néanmoins annoncée.

Il a ensuite déclaré que 12,353 millions d'euros devraient être consacrés en 2005 à la collectivité de Wallis-et-Futuna dans le budget de l'outre-mer, l'effort global de l'Etat en faveur de ces îles s'élevant à 79,761 millions d'euros, soit une progression de 0,93 %. Rappelant que la loi du 29 juillet 1961 relative au statut de Wallis-et-Futuna prévoyait l'existence de trois royaumes sur ce territoire ainsi que le respect de la coutume, il a estimé que les services de l'Etat assuraient l'essentiel de son activité. Il a relevé que si l'économie de Wallis-et-Futuna était marquée par une dualité entre les traditions coutumières et le monde moderne, le contrat de développement conclu avec l'Etat pour les années 2000-2004, et prolongé jusqu'en 2005 pour compenser l'absence de crédits engagés au cours de la première année, avait permis la réalisation d'infrastructures et des actions de formation. Il a ensuite rappelé que la convention de développement pour 2003-2007 apportait 25 millions d'euros pour compléter les objectifs du contrat de développement.

M. Christian Cointat, rapporteur pour avis, a indiqué qu'un accord particulier avait été conclu le 1er décembre 2003 entre l'Etat, la Nouvelle-Calédonie et Wallis-et-Futuna, prenant en compte l'installation de près de 20.000 personnes originaires de Wallis-et-Futuna en Nouvelle-Calédonie. Soulignant la nécessité d'assurer le désenclavement de Futuna, il a déclaré qu'une dotation supplémentaire de 500.000 euros était inscrite au budget de l'année 2005 afin d'augmenter la rotation du Twin Otter entre les deux îles et qu'une étude sérieuse était en cours afin de permettre l'utilisation de la piste d'atterrissage située à proximité d'une faille sismique, pour accueillir des avions d'une plus grande capacité. Il a enfin indiqué qu'un tribunal administratif, fonctionnant avec des magistrats en résidence à Nouméa, avait été créé à Mata Utu.

M. Christian Cointat, rapporteur pour avis, a rappelé que les TAAF constituaient une collectivité sans habitant permanent, rassemblant dans les Terres Australes les îles Crozet, Kerguelen, Saint-Paul et Amsterdam et en Antarctique la Terre Adélie, soulignant l'importance et la variété des recherches scientifiques qui y sont conduites dans les domaines de la biologie, de la géographique, de la chimie, de la physique de l'atmosphère et de la glaciologie. Il a déclaré que la base scientifique permanente Concordia située près de Dôme C en Antarctique, issue d'une initiative franco-italienne, devrait être inaugurée en février 2005. Relevant que la zone économique exclusive des Terres australes s'étendait sur 1.750.000 km2, il a souligné la nécessité d'en protéger les ressources halieutiques, en particulier les ressources en légines, par une lutte efficace contre la pêche illicite grâce au système de surveillance par satellite Radarsat et aux accords de coopération conclus avec l'Australie. Il a enfin rappelé que l'immatriculation des navires pouvait être réalisée aux îles Kerguelen, à la condition que le capitaine et son second ainsi qu'une proportion d'au moins 35 % des marins embarqués soient de nationalité française.

M. Christian Cointat, rapporteur pour avis, a indiqué que 67,144 millions d'euros étaient consacrés au sein du budget de l'outre-mer à Mayotte, l'effort global de l'Etat en faveur de cette collectivité départementale s'élevant à 258,964 millions d'euros, soit une progression de 8,6 %.

Il a rappelé que la loi du 11 juillet 2001 prévoyait un bilan du statut de cette collectivité en 2010, l'année 2004 ayant été marquée par le transfert de la fonction exécutive du représentant de l'Etat au président du conseil général. Estimant que l'évolution du statut personnel devait le rendre compatible avec les principes de la République, il a relevé que les personnes atteignant l'âge de 18 ans au 1er janvier 2005 ne pourraient plus recourir à la polygamie ni à la répudiation, suivant les dispositions de la loi de programme pour l'outre-mer.

Il a indiqué que l'économie de Mayotte était en transition, le secteur traditionnel y demeurant important mais le secteur du bâtiment et les activités de services connaissant un développement sensible sous l'effet de la croissance démographique. Il a rappelé que le contrat de plan pour la période 2004-2007, d'un montant de 274,41 millions d'euros, devait favoriser la production et la transformation des produits locaux, développer la formation initiale et professionnelle et promouvoir des programmes d'équipements. Relevant que la collectivité départementale comptait près de 30 % d'étrangers en situation irrégulière, provenant pour l'essentiel de l'île d'Anjouan, il a déclaré que les relations de Mayotte avec les Comores avaient cependant connu une amélioration au cours des derniers mois.

M. Christian Cointat, rapporteur pour avis, a salué la mise en place des plans Lagon et Radar de lutte contre l'immigration clandestine et l'augmentation conséquente du nombre de retours volontaires constatés en 2003. Il a enfin estimé que le potentiel de développement de Mayotte en matière de tourisme devrait susciter des efforts plus importants pour éradiquer le paludisme qui sévit sur l'île.

Il a indiqué que la délinquance était en diminution à Mayotte, le taux de criminalité revenant à 26 %o en 2003. Relevant l'augmentation sensible du nombre d'affaires enregistrées par les juridictions, il a rappelé le rôle de la justice cadiale pour la résolution des petits contentieux. Il a enfin souligné que le centre pénitentiaire de Majicavo accueillait un nombre record de 184 détenus pour 65 places et qu'une étude de faisabilité était en cours pour la réalisation de travaux destinés à doter cet établissement de 25 places supplémentaires.

M. Christian Cointat, rapporteur pour avis, a indiqué que 4,703 millions d'euros étaient consacrés au sein du budget de l'outre-mer à Saint-Pierre-et-Miquelon, l'effort global de l'Etat en faveur de cette collectivité départementale s'élevant à 52,106 millions d'euros, soit une diminution de 19,92 %.

Il a souligné les difficultés économiques rencontrées par Saint-Pierre-et-Miquelon depuis le tarissement des activités dans le secteur de la pêche, conduisant à l'expatriation des jeunes résidents. Il a indiqué que la reconversion et la diversification économiques de l'archipel avaient entraîné le développement de l'agriculture, avec un triplement de la production de poulets, le développement du bâtiment et des travaux publics, des efforts en matière touristique ainsi que des programmes de recherche pétrolière. Il a enfin salué le très faible taux de délinquance de cette collectivité, précisant que son centre pénitentiaire n'accueillait que 4 détenus pour 8 places.

M. Patrice Gélard s'est interrogé sur l'évolution des possibilités de pêche à Saint-Pierre-et-Miquelon depuis la sentence rendue en 1992 par le tribunal arbitral de New-York. M. José Balarello a souhaité savoir à qui appartenaient les usines exploitant le nickel en Nouvelle-Calédonie. Il s'est par ailleurs interrogé sur les raisons de la diminution de l'exportation des produits de la pêche et de perle noire en Polynésie française, ainsi que sur le nombre de navires français immatriculés aux Kerguelen. Il s'est ensuite enquis de la possibilité de prévoir que les enfants nés à Mayotte à partir de 2010 soient automatiquement soumis au statut civil de droit commun.

En réponse, M. Christian Cointat, rapporteur pour avis, a indiqué que :

- le Canada réfléchissait actuellement au classement de la morue parmi les espèces protégées ;

- le nickel était exploité en Nouvelle-Calédonie par les sociétés canadiennes Falconbridge et INCO, la SMSP, détenue par la province Nord, participant à hauteur de 51 % au projet d'usine dans cette province ;

- six armements installés à la Réunion étaient autorisés à conduire des activités de pêche dans les Terres australes ; il demanderait au gouvernement de préciser combien de navires français étaient immatriculés aux Kerguelen.

M. Patrice Gélard a formé le voeu que les enfants naissant à Mayotte ne relèvent plus du statut personnel de droit civil local, appelant à une disposition législative pour assurer cette évolution.

M. Simon Sutour a estimé qu'il convenait d'être particulièrement prudent sur la question du statut personnel à Mayotte, rappelant qu'une mission avait été confiée à une magistrate sur l'état civil. Il a par ailleurs considéré que l'immigration clandestine constituait le problème majeur de Mayotte et que la justice cadiale, si elle pouvait paraître obsolète, était néanmoins utile pour le règlement des petits litiges dans la langue locale.

M. José Balarello a estimé que la justice cadiale aurait pu constituer une forme de justice de proximité.

M. Jean-Jacques Hyest, président, a regretté l'accroissement du nombre des cadis.

M. Simon Sutour a rappelé que les décisions en dernier ressort des tribunaux de cadis et du grand cadi relevaient en appel de la chambre d'annulation musulmane du tribunal supérieur d'appel de Mayotte.

M. Christian Cointat, rapporteur pour avis, a indiqué que la suppression du statut personnel de droit civil local n'était pas prévue par le Gouvernement, qui souhaitait, en revanche, l'aménager progressivement pour qu'il soit conforme aux principes de la République. Il a par ailleurs rappelé que le futur projet de loi organique relatif à la mise à jour des statuts des collectivités d'outre-mer offrirait, le cas échéant, la possibilité de déposer des amendement sur ce sujet. Il s'est inquiété du développement de l'immigration clandestine, considérant que de nombreux Comoriens pouvaient être tentés de chercher à obtenir la nationalité française.

M. Patrice Gélard a estimé que le statut personnel de droit civil local était incompatible avec les principes de la République et qu'une modification législative en la matière serait nécessaire si Mayotte voulait poursuivre son évolution vers un statut départemental.

Mme Michèle André, rappelant que les jeunes filles mahoraises devaient subir des relations sexuelles et des grossesses imposées dans le cadre des « petits mariages » célébrés par les cadis, a jugé qu'une mesure législative devrait être prise pour mettre un terme à une situation inacceptable au regard des droits fondamentaux. Elle a indiqué avoir eu connaissance, lors de déplacements à Mayotte, de l'état de détresse des jeunes femmes auxquelles aucun recours n'était offert, estimant par ailleurs que les femmes mahoraises avaient exprimé une véritable attente en ce domaine, notamment en montrant leur volonté d'émancipation lors des actions conduites par le « mouvement des chatouilleuses », dans les années 1970.

M. Jean-Jacques Hyest, président, a estimé qu'une modification des textes ne serait pas suffisante pour faire évoluer les mentalités dans un domaine où devraient également intervenir l'éducation sexuelle et le planning familial.

M. Christian Cointat, rapporteur pour avis, a indiqué qu'il ferait part au Gouvernement du souhait de la commission de voir évoluer rapidement le statut personnel à Mayotte afin d'agir sur les mentalités et d'assurer le respect des principes républicains.

La commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits consacrés aux collectivités d'outre-mer à statut particulier et à la Nouvelle-Calédonie.