Travaux de la commission des lois



- Présidence de M. Jean-Jacques Hyest, président.

Nomination d'un rapporteur

La commission a tout d'abord nommé M. Christian Cambon comme rapporteur sur la proposition de résolution n° 160 (2004-2005) présentée, en application de l'article 73 bis du règlement, par M. Yannick Bodin, au nom de la délégation pour l'Union européenne, sur les propositions de décision du Conseil relatives à la conclusion de l'accord entre l'Union européenne, la Communauté européenne et la Confédération suisse sur l'association de cette dernière à la mise en oeuvre, à l'application et au développement de l'acquis de Schengen (E 2700).

Constitution - Révision constitutionnelle modifiant le titre XV de la Constitution - Examen des amendements

Puis la commission a procédé à l'examen des amendements au projet de loi constitutionnelle n° 167 (2004-2005), adopté par l'Assemblée nationale en première lecture, modifiant le titre XV de la Constitution.

Elle a donné un avis défavorable à l'amendement n° 39, présenté par Mme Alima Boumediene-Thiery et plusieurs de ses collègues, tendant à insérer un article additionnel avant l'article premier afin de prévoir dans la Constitution que les langues régionales et minoritaires sont reconnues et doivent être promues.

M. Simon Sutour a indiqué qu'il avait présenté, avec plusieurs de ses collègues, un amendement ayant pour objet explicite de permettre la ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires du Conseil de l'Europe.

La commission a donné un avis défavorable à l'amendement n° 40 des mêmes auteurs, tendant à insérer un article additionnel avant l'article premier afin de confier au Gouvernement la responsabilité des engagements de la France dans l'Union européenne.

Elle a donné un avis défavorable à l'amendement n° 25, présenté par M. David Assouline et plusieurs de ses collègues, tendant à insérer un article additionnel avant l'article premier afin de transférer du Président de la République au Premier ministre la responsabilité de la négociation et de la signature des traités relatifs à la participation de la France à l'Union européenne et de la représentation de la France au Conseil de l'Union européenne.

Elle a donné un avis défavorable à l'amendement n° 42, présenté par Mme Alima Boumediene-Thiery et plusieurs de ses collègues, tendant à insérer un article additionnel avant l'article premier afin de consacrer à l'article 34 de la Constitution l'existence de lois de transposition permettant l'adaptation du droit français aux directives européennes.

La commission a donné un avis défavorable à l'amendement n° 24 rectifié, présenté par M. David Assouline et plusieurs de ses collègues, et à l'amendement n° 43, présenté par Mme Alima Boumediene-Thiery et plusieurs de ses collègues, tendant à insérer un article additionnel avant l'article premier afin d'interdire le recours aux ordonnances pour assurer la transposition en droit interne d'actes de l'Union européenne.

La commission a donné un avis défavorable aux amendements identiques n° 26, présenté par M. David Assouline et plusieurs de ses collègues, et n° 41, présenté par Mme Alima Boumediene-Thiery et plusieurs de ses collègues, tendant à insérer un article additionnel avant l'article premier aux fins de coordination.

A l'article premier (autorisation de ratifier le traité établissant une Constitution pour l'Europe), la commission a donné un avis défavorable à l'amendement de suppression n° 47, présenté par Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Elle a donné un avis défavorable à l'amendement n° 3, présenté par M. Michel Charasse, tendant à consacrer les réserves d'interprétation exprimées par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 19 novembre 2004 sur le traité établissant une Constitution pour l'Europe et à prévoir que tout acte européen méconnaissant cette décision est nul et de nul effet à l'égard de la France.

La commission a donné un avis défavorable à l'amendement n° 6 rectifié, présenté par M. Bruno Retailleau et plusieurs de ses collègues, tendant à spécifier que le traité établissant une Constitution pour l'Europe n'affecte pas la primauté de la Constitution française sur le droit européen.

A l'article 2  (soumission au référendum de tout projet de loi autorisant la ratification d'un traité d'adhésion d'un Etat aux Communautés européennes et à l'Union européenne), la commission a donné un avis défavorable aux amendements de suppression n° 13, présenté par M. Bernard Frimat et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, n° 36 rectifié, présenté par M. Denis Badré et plusieurs de ses collègues, et n° 48, présenté par Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

M. Patrice Gélard, rapporteur, a indiqué que la décision de rendre obligatoire l'adoption par la voie référendaire de tout projet de loi autorisant la ratification d'un traité relatif à l'adhésion d'un Etat à l'Union européenne résultait d'un choix politique du Président de la République et du Gouvernement auquel la majorité sénatoriale avait décidé de se rallier.

M. Jean-Pierre Sueur a déploré que les arguments exposés par M. Robert Badinter lors de la discussion générale du projet de loi constitutionnelle, démontrant que les dispositions proposées auraient pour conséquences d'affaiblir le Président de la République, le Parlement et le référendum, n'aient pas été entendus.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat a évoqué les difficultés soulevées par cette nouvelle catégorie de référendum.

M. Christian Cointat a rappelé son opposition aux dispositions des articles 2 et 4 du projet de loi constitutionnelle.

La commission a ensuite examiné l'amendement n° 28 rectifié, présenté par M. Yves Détraigne et plusieurs de ses collègues, tendant à prévoir une déclaration du Gouvernement suivie d'un débat dans chaque assemblée avant le référendum devant être organisé sur tout projet de loi autorisant la ratification d'un traité relatif à l'adhésion d'un Etat à l'Union européenne.

M. Robert Badinter a rappelé que la commission des lois, sous l'impulsion de son président d'alors M. Jacques Larché, ainsi que le Sénat avaient beaucoup oeuvré, lors de l'examen de la révision constitutionnelle de 1995, en faveur de l'insertion, à l'article 11 de la Constitution, de dispositions rendant obligatoire une déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat dans chaque assemblée, avant la tenue d'un référendum décidé par le Président de la République sur proposition du Gouvernement. Il a souligné qu'il était d'ores et déjà possible, sur le fondement de cet article, d'organiser un référendum sur un projet de loi autorisant la ratification d'un traité qui, sans être contraire à la Constitution, aurait des incidences sur le fonctionnement des institutions.

M. Patrice Gélard, rapporteur, a estimé que les traités visés par le projet de loi constitutionnelle étaient exclus du champ des traités visés à l'article 11 de la Constitution, dans la mesure où les nouvelles adhésions à l'Union européenne étaient sans incidence sur le fonctionnement des institutions françaises.

M. Jean-Jacques Hyest, président, a observé que l'obligation prévue par l'article 11 de la Constitution d'organiser un débat parlementaire préalable à la tenue d'un référendum était justifiée par l'alternative offerte au Président de la République entre la voie référendaire et la voie parlementaire pour l'adoption d'un projet de loi.

Il a déclaré que les dispositions de l'article 2 du projet de loi constitutionnelle, sans être parfaites, permettaient de dissocier la question de la ratification du traité établissant une Constitution pour l'Europe et celle de l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne.

M. Nicolas Alfonsi s'est étonné que l'obligation d'organiser un référendum ne concerne pas l'adhésion à l'Union européenne de la Croatie, de la Roumanie et de la Bulgarie.

M. Robert Badinter a rappelé que l'amendement n° 28 rectifié avait pour objet, dès lors que deviendrait obligatoire l'adoption par la voie référendaire de tout projet de loi autorisant la ratification d'un traité relatif à l'adhésion d'un Etat à l'Union européenne, de prévoir un débat parlementaire préalable à la tenue du scrutin.

M. Jean-Jacques Hyest, président, n'a pas jugé nécessaire de rendre obligatoire l'organisation d'un tel débat et a formé le voeu que les parlementaires n'attendent pas l'achèvement des négociations d'adhésion pour s'exprimer sur la question de l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne.

Tout en étant favorable à l'organisation d'un débat parlementaire avant la tenue d'un référendum sur un projet de loi autorisant la ratification d'un traité relatif à l'adhésion d'un Etat à l'Union européenne,M. Hugues Portelli a estimé que l'amendement proposé ne permettait pas de régler l'ensemble des insuffisances des procédures référendaires prévues par la Constitution. Il a ainsi déploré que, seul, le Président de la République puisse organiser un référendum, soulignant que de nombreux Etats avaient institué un droit d'initiative populaire. Par ailleurs, il a jugé nécessaire de définir dans la Constitution les modalités de retrait de la France de l'Union européenne, conformément à l'article I-60 du traité établissant une Constitution pour l'Europe.

M. Jean-Pierre Sueur a estimé que les dispositions de l'article 2 du projet de loi constitutionnelle, loin de dissocier la question de la ratification du traité établissant une Constitution pour l'Europe de celle de l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne, auraient pour effet de les lier.

Au terme de ce débat, la commission a donné un avis défavorable à l'amendement n° 28 rectifié.

Elle a également donné un avis défavorable à l'amendement n° 7 rectifié, présenté par M. Bruno Retailleau et plusieurs de ses collègues, tendant à prévoir que l'obligation de soumettre au référendum tout projet de loi autorisant la ratification d'un traité relatif à l'adhésion d'un Etat à l'Union européenne ne peut être remise en cause que par référendum.

Aucune majorité ne s'est dégagée pour adopter un avis sur l'amendement n° 14, présenté par M. Robert Badinter et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, tendant à prévoir l'organisation d'un débat dans chaque assemblée, pouvant donner lieu à l'adoption d'une résolution, avant l'examen par le Conseil européen d'une demande d'adhésion d'un Etat à l'Union européenne.

La commission a donné un avis défavorable à l'amendement n° 15 des mêmes auteurs, tendant à rendre obligatoire une déclaration du Gouvernement suivie d'un débat dans chaque assemblée avant le référendum devant être organisé sur tout projet de loi autorisant la ratification d'un traité relatif à l'adhésion d'un Etat à l'Union européenne.

Elle a ensuite examiné l'amendement n° 20, présenté par les mêmes auteurs, et l'amendement n° 32 rectifié, identique, présenté par M. Pierre Fauchon et plusieurs de ses collègues, tendant à insérer un article additionnel après l'article 2 afin de prévoir dans la Constitution la création d'une commission spéciale pour l'Union européenne, composée de membres des six commissions permanentes et chargée, dans chaque assemblée, du suivi, de l'évaluation et du contrôle des affaires européennes.

M. Jean-Jacques Hyest, président, a rappelé que la future réforme du règlement du Sénat devrait tenir compte de la portée juridique des actes adoptés : simple avis pour les résolutions adoptées sur le fondement de l'article 88-4, avis motivé pouvant contraindre les institutions de l'Union européenne à réexaminer un projet d'acte législatif pour la première catégorie de résolutions instituées par l'article 88-5, recours devant la Cour de justice de l'Union européenne pour la seconde catégorie des résolutions prévues par cet article, veto à la mise en oeuvre de la procédure de révision simplifiée du traité pour les motions adoptées en termes identiques par les deux assemblées en application de l'article 88-6. Il a estimé que les motions prévues par l'article 88-6 devraient être adoptées en séance plénière, tandis que les procédures d'adoption des résolutions prévues par l'article 88-5 pourraient s'inspirer de celle régissant les résolutions prévues par l'article 88-4. Mettant en exergue la brièveté des délais accordés à chaque assemblée pour adopter un avis motivé contre un projet d'acte législatif européen (six semaines) ou former un recours contre un acte législatif européen devant la Cour de justice (huit semaines), il a indiqué que ces résolutions devraient pouvoir être adoptées sans examen en séance plénière non seulement hors session, mais également en période de session. Les délégations pour l'Union européenne lui ont semblé devoir jouer un rôle majeur dans le contrôle du respect du principe de subsidiarité. Il a néanmoins observé que, dans la mesure où ce contrôle impliquait d'examiner le contenu des mesures envisagées, les commissions permanentes ne pouvaient s'en désintéresser.

M. Patrice Gélard, rapporteur, a déclaré qu'il était possible de confier un rôle important aux délégations pour l'Union européenne dans le contrôle par les assemblées du respect du principe de subsidiarité et de la mise en oeuvre de la procédure de révision simplifiée du traité établissant une Constitution pour l'Europe dans le cadre des dispositions actuelles de la Constitution. Il a estimé qu'en prévoyant la création d'une commission spéciale spécifiquement chargée du suivi, de l'évaluation et du contrôle des affaires européennes, l'amendement proposé risquait de conduire à un dessaisissement complet des commissions permanentes. Il a souligné qu'il appartiendrait au règlement de chaque assemblée de déterminer les modalités d'examen de ces résolutions et motions, ainsi que la répartition des tâches entre la délégation pour l'Union européenne, les commissions permanentes et la séance plénière. Enfin, il a exprimé la crainte que les autres délégations parlementaires ne demandent, elles aussi, à être consacrées dans la Constitution.

M. Hugues Portelli a estimé que la délégation pour l'Union européenne ne devait pas avoir une compétence exclusive pour veiller au respect du principe de subsidiarité, ce dernier ne pouvant être entendu de la même manière selon les domaines concernés par la législation européenne.

M. Robert Badinter a déclaré que les amendements proposés n'avaient pas pour objet de donner à la délégation pour l'Union européenne le monopole du suivi des affaires européennes, mais simplement de prévenir tout risque de censure par le Conseil constitutionnel d'une réforme du règlement des assemblées consistant à renforcer ses prérogatives.

M. Jean-Jacques Hyest, président, a estimé que la rédaction de ces amendements risquait cependant d'induire un tel effet. Il a souligné la nécessité d'une implication plus grande du Parlement tout entier, plutôt que de tel ou tel de ses organes, dans le suivi des affaires européennes.

La commission a décidé de demander le retrait des amendements n°s 20 et 32 rectifié, ainsi que celui de l'amendement n° 29 rectifié bis, présenté par M. Denis Badré et plusieurs de ses collègues, tendant à insérer un article additionnel après l'article 2 afin d'inscrire dans la Constitution l'existence des délégations parlementaires pour l'Union européenne, composées de membres des six commissions permanentes, et de prévoir qu'elles assurent dans chaque assemblée le suivi, l'évaluation et le contrôle des affaires européennes.

A l'article 3 (modifications des dispositions relatives à l'Union européenne), la commission a donné un avis défavorable à l'amendement de suppression n° 49, présenté par Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Elle a donné un avis défavorable à l'amendement de coordination n° 4, présenté par M. Michel Charasse, ainsi qu'à l'amendement de coordination n° 8 rectifié, présenté par M. Bruno Retailleau et plusieurs de ses collègues.

Elle a donné un avis défavorable à l'amendement n° 45, présenté par Mme Alima Boumediene-Thiery et plusieurs de ses collègues, tendant à permettre l'octroi du droit de vote et d'éligibilité aux élections municipales, cantonales et régionales aux étrangers résidant en France.

La commission a demandé le retrait de l'amendement n° 35 rectifié, présenté par M. Pierre Fauchon et plusieurs de ses collègues, tendant à prévoir que le Gouvernement est obligé de soumettre aux assemblées tout texte européen si la demande lui en est faite par le président de l'Assemblée nationale ou du Sénat sur proposition de la Conférence des Présidents de leur assemblée.

Elle a demandé le retrait des amendements de coordination, identiques, n° 21, présenté par M. Robert Badinter et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, et n° 33 rectifié, présenté par M. Pierre Fauchon et plusieurs de ses collègues.

La commission a donné un avis défavorable à l'amendement n° 9 rectifié, présenté par M. Bruno Retailleau et plusieurs de ses collègues, tendant à prévoir la saisine du Conseil constitutionnel sur tout projet de modification des règles d'adoption d'actes de l'Union européenne en application de la procédure de révision simplifiée instituée par l'article IV-444 du traité établissant une Constitution pour l'Europe.

Elle a donné un avis défavorable aux amendements, identiques, de coordination n°s 16 et 37 rectifié, respectivement présentés par M. Bernard Frimat et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, et par M. Denis Badré et plusieurs de ses collègues.

La commission a donné un avis défavorable à l'amendement n° 34 rectifié, présenté par M. Yves Détraigne et plusieurs de ses collègues, tendant à spécifier que tout projet de loi autorisant la ratification d'un traité relatif à l'adhésion de plusieurs Etats à l'Union européenne doit être adopté par la voie référendaire.

La commission a donné un avis défavorable à l'amendement de coordination n° 31 rectifié, présenté par M. Yves Détraigne et plusieurs de ses collègues, ainsi qu'à l'amendement de coordination n° 10 rectifié, présenté par M. Bruno Retailleau et plusieurs de ses collègues.

La commission a constaté que l'amendement n° 17, présenté par M. Robert Badinter et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, était un amendement de conséquence de l'amendement n° 14.

La commission a donné un avis défavorable à l'amendement de coordination n° 18 des mêmes auteurs, à l'amendement n° 11 rectifié, présenté par M. Bruno Retailleau et plusieurs de ses collègues, tendant à prévoir que les révisions du traité établissant une Constitution pour l'Europe doivent faire l'objet d'un référendum, ainsi qu'à l'amendement n° 30 rectifié, présenté par M. Jean-Marie Vanlerenberghe et plusieurs de ses collègues, tendant à prévoir, avant chaque Conseil européen, une déclaration du Gouvernement suivie d'un débat dans chaque assemblée.

La commission a donné un avis défavorable à l'amendement n° 22, présenté par M. David Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, tendant à insérer un article additionnel après l'article 3 afin de prévoir l'inscription à l'ordre du jour prioritaire des assemblées de la discussion d'une résolution prévue à l'article 88-5 ou d'une motion prévue à l'article 88-6 de la Constitution.

Elle a demandé le retrait de l'amendement n° 23, présenté par M. Jacques Pelletier et les membres du groupe du Rassemblement démocratique et social européen, tendant à insérer un article additionnel après l'article 3 afin d'instituer dans chaque assemblée une séance mensuelle réservée à la transposition des directives communautaires et à l'autorisation de ratification des conventions internationales.

A l'article 4 (entrée en vigueur des dispositions prévoyant la soumission au référendum de tout projet de loi autorisant la ratification d'un traité d'adhésion d'un Etat à l'Union européenne), aucune majorité ne s'est dégagée pour adopter un avis sur les amendements de suppression n° 19, présenté par M. Bernard Frimat et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, n° 38 rectifié, présenté par M. Denis Badré et plusieurs de ses collègues, n° 46, présenté par Mme Alima Boumediene-Thiery et plusieurs de ses collègues, et n° 50, présenté par Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

La commission a donné un avis défavorable à l'amendement n° 27 rectifié bis, présenté par Mme Odette Herviaux et plusieurs de ses collègues, tendant à insérer un article additionnel après l'article 4 afin d'autoriser la ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires du Conseil de l'Europe.

Elle a donné un avis défavorable à l'amendement n° 5, présenté par M. Michel Charasse, tendant à insérer un article additionnel après l'article 4 afin de permettre au Conseil constitutionnel d'arrêter les mesures nécessaires pour assurer le respect de ses décisions.

Enfin, la commission a donné un avis défavorable à l'amendement n° 12 rectifié bis, présenté par Mme Bariza Khiari et plusieurs de ses collègues, tendant à insérer un article additionnel après l'article 4 afin de permettre l'octroi du droit de vote et d'éligibilité aux élections municipales aux étrangers non ressortissants de l'Union européenne résidant en France depuis au moins cinq ans.

Résolutions européennes - Rétention de données traitées et stockées en rapport avec la fourniture de services de communications électroniques accessibles au public ou de données transmises via des réseaux de communication publics, aux fins de la prévention, la recherche, la détection, la poursuite des délits d'infractions pénales, y compris du terrorisme (E-2616) - Examen du rapport

Puis la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Hugues Portelli sur la proposition de résolution n° 128 (2004-2005), présentée, en application de l'article 73 bis du Règlement, par M. Alex Türk, au nom de la délégation pour l'Union européenne, sur le projet de décision-cadre sur la rétention de données traitées et stockées en rapport avec la fourniture de services de communications électroniques accessibles au public ou de données transmises via des réseaux de communication publics, aux fins de la prévention, la recherche, la détection, la poursuite des délits d'infractions pénales, y compris du terrorisme (E-2616).

M. Hugues Portelli, rapporteur, a d'abord indiqué qu'après les attentats de Madrid du 11 mars 2004, le Conseil européen, lors de sa réunion du 25 mars 2004, avait accordé une priorité à l'adoption d'un instrument concernant la conservation, par les fournisseurs de services, des données relatives au trafic des communications. Il a précisé que le projet de décision-cadre était issu d'une proposition de la France, de l'Irlande, de la Suède et du Royaume-Uni, les Etats membres disposant du droit d'initiative dans le cadre du troisième pilier relatif à la coopération policière et judiciaire en matière pénale. Il a relevé que la Commission européenne contestait toutefois le fondement juridique de cette initiative, au motif qu'elle relèverait du marché intérieur, soit du premier pilier, et devrait suivre une procédure d'adoption différente. Il a souligné que le rapporteur du projet pour le Parlement européen, M. Alexander Nano Alvaro, se prononçait pour une scission des dispositions du texte en fonction des domaines concernés et l'application des processus d'adoption correspondant à chaque pilier.

M. Hugues Portelli, rapporteur, a ensuite rappelé que l'Union européenne avait pris, depuis les attentats du 11 septembre 2001, un ensemble de mesures pour améliorer la coopération policière et judiciaire, telles que le mandat d'arrêt européen, la création de l'unité de coopération Eurojust, entrée en activité le 29 avril 2003, et la nomination, le 25 mars 2004, d'un coordinateur de la lutte contre le terrorisme.

Le rapporteur a souligné que les directives 95/46/CE relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données et 2002/58/CE concernant le traitement des données à caractère personnel, et la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques, permettaient l'adoption par les Etats membres de mesures législatives prévoyant la conservation de données pendant une durée limitée lorsque cela est justifié notamment par la nécessité de prévenir, rechercher ou poursuivre des infractions pénales.

Relevant que les Etats membres appliquaient des règles très disparates en matière de conservation des données relatives au trafic des communications, il a déclaré que certains Etats n'obligeaient pas les opérateurs à conserver ces données pour les besoins des enquêtes judiciaires, alors que l'Irlande et l'Italie avaient respectivement fixé le délai de conservation à trois ans minimum et deux ans renouvelables une fois. Il a estimé que l'harmonisation de ces règles était indispensable à l'efficacité des enquêtes relatives au terrorisme et à la criminalité transnationale.

Le rapporteur a souligné que la France avait quant à elle fixé à un an maximum la durée de conservation de ces données (art. L. 34-1 du code des postes et des communications électroniques), renvoyant à un décret en cours d'élaboration la détermination exacte du délai de rétention. Il a indiqué qu'aux termes du projet de décret, les opérateurs devraient conserver pendant un an les données de trafic pour les besoins de la recherche, de la constatation et de la poursuite des infractions pénales, ce stockage constituant une dérogation au principe de finalité du traitement des données à caractère personnel. Il a précisé que le projet de décret devait prévoir la compensation des surcoûts identifiables et spécifiques supportés par les opérateurs pour chacune des réquisitions portant sur une ou plusieurs des catégories de données conservées.

M. Hugues Portelli, rapporteur, a ensuite indiqué que le projet de décision-cadre portait sur les données relatives au trafic, les données de localisation, celles relatives à l'utilisateur et celles relatives à l'abonné, qu'elles soient générées par des services de téléphonie fixe ou mobile, des services de messages courts (SMS), de médias électroniques (EMS), de messages multimédias (MMS) ou par des protocoles Internet. Il a souligné que l'article 4 du projet prévoyait une conservation de ces données pendant au moins douze mois, la référence à une durée maximale, initialement fixée à trente-six mois, ayant été supprimée lors des négociations au Conseil à la demande de l'Irlande et de l'Italie. Il a par ailleurs indiqué que le texte soumis au Sénat prévoyait que les Etats membres respectent les principes de la protection des données, assurant en particulier leur confidentialité et leur intégrité.

Le rapporteur a rappelé que la proposition de résolution adoptée le 15 décembre 2004 par la délégation pour l'Union européenne, à l'initiative de M. Alex Türk, visait à approuver le principe d'une harmonisation européenne en matière de conservation des données relatives au trafic des communications, tout en considérant que le projet de décision-cadre ne permettait pas, dans sa version actuelle, de répondre à cet objectif et de concilier le besoin d'efficacité des enquêtes et la protection des droits individuels. Il a indiqué que la proposition de résolution tendait par conséquent à demander au Gouvernement d'oeuvrer au sein du Conseil pour le rétablissement d'une durée maximale de conservation des données et d'inviter la Commission à réaliser une évaluation du surcoût de cette conservation pour les fournisseurs de services.

Estimant que le principal enjeu de la proposition de résolution était de concilier la nécessité de lutter contre le terrorisme et le respect des droits fondamentaux, M. Hugues Portelli, rapporteur, a souligné que l'ingérence commise dans la vie privée des personnes par la conservation de données devait être strictement encadrée, selon les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH).

Rappelant que cet article soumettait toute ingérence des autorités publiques dans la vie privée des personnes au respect de trois critères -base légale, conformité de la mesure à l'un des buts légitimes énoncés dans la Convention et nécessité de la mesure dans une société démocratique- il a indiqué que la Cour de justice de Strasbourg avait en outre jugé dans l'arrêt Klass du 6 septembre 1978 que les Etats ne disposaient pas « d'une latitude illimitée pour assujettir à des mesures de surveillance secrète les personnes soumises à leur juridiction ».

Il a estimé que, si le groupe de travail sur la protection des personnes à l'égard du traitement des données à caractère personnel jugeait la dérogation autorisée par le projet de décision-cadre sans précédent, celui-ci remplissait les critères de la CEDH en définissant le champ des données concernées et en visant les objectifs de sécurité nationale et de prévention des infractions pénales. Il a toutefois considéré que le projet de décision-cadre ne pourrait satisfaire aux exigences du principe de proportionnalité qu'en fixant une durée maximale de conservation des données.

M. Hugues Portelli a par ailleurs déclaré qu'il serait nécessaire de demander à la Commission européenne de procéder à une évaluation du surcoût de la conservation des données et à une étude sur les possibilités d'indemnisation des opérateurs, afin d'éviter les distorsions de concurrence.

Il a donc proposé à la commission d'adopter la proposition de résolution présentée par la délégation pour l'Union européenne, sous réserve d'une modification rédactionnelle.

M. Alex Türk a déclaré que si la conservation des données par les opérateurs était très coûteuse, l'efficacité du recours à de telles informations par les services de police était avérée. Il a affirmé que l'utilité de telles données avait par ailleurs été démontrée lors des recherches conduites par le ministère des affaires étrangères pour retrouver des personnes ayant séjourné en Asie lors du raz de marée de décembre 2004.

M. François Zocchetto a souligné que le développement de la délinquance internationale appelait une coopération étroite des Etats. Il a estimé que le projet de décision-cadre améliorerait l'efficacité de cette coopération, en facilitant la recherche de preuves d'une grande fiabilité. Souhaitant que le texte prévoie une durée minimale de conservation suffisante pour remplir cet objectif, il a déclaré que le coût de la conservation des données ne devait pas constituer un obstacle. Il a considéré que cette charge pourrait, le cas échéant, être assumée directement par les opérateurs de services, l'Etat supportant déjà des frais de justice très élevés.

M. Jean-Jacques Hyest, président, a estimé que le coût de la conservation des données risquait également d'être répercuté par les opérateurs sur leurs clients, quitte à entraîner des distorsions de concurrence.

Mme Alima Boumediene-Thiery a jugé que le projet de décision-cadre devait respecter un équilibre difficile entre les impératifs de la sécurité nationale et le respect de la vie privée, les personnes devant être en mesure d'accéder aux données les concernant et de rectifier les données erronées. Elle s'est interrogée sur les garanties relatives à la transmission de telles données à des pays tiers.

M. Hugues Portelli, rapporteur, rappelant que la majorité des Etats membres ne disposaient pas d'une législation obligeant les opérateurs à conserver les données, a estimé que le Conseil ne pourrait aboutir à un accord que sur une durée minimale relativement courte. Il a indiqué que le projet de décision-cadre prévoyait le respect par les Etats membres des voies de recours prévues par la directive 95/46/CE et de l'obligation de rectifier les données à caractère personnel qui seraient inexactes.

M. Alex Türk, considérant qu'une durée minimale d'un an paraissait raisonnable, a rappelé que la CNIL, examinant le projet de décret français, s'était prononcée pour une durée de trois mois. Il a indiqué que l'Allemagne souhaitait, pour limiter les coûts du stockage, que les opérateurs ne conservent que les données de nature commerciale, utilisées pour les besoins de la facturation, mais que les services de police estimaient ces données insuffisantes pour mener à bien leurs enquêtes.

M. Alex Türk a déclaré que le transfert de données d'un Etat à l'autre était libre au sein de l'Union européenne, tous les Etats membres étant soumis aux mêmes règles en matière de protection des données. Il a indiqué que le transfert à des pays tiers n'était en revanche permis que dans la mesure où l'Etat destinataire des données assurait un niveau de protection équivalent, l'Union européenne établissant une liste des pays remplissant cette condition. Il a précisé que les Etats-Unis, qui ne disposent pas de législation en la matière, ne reconnaissaient pas la validité du concept de niveau adéquat de protection des données.

Aucun amendement n'ayant été déposé, la commission a adopté la proposition de résolution dans le texte proposé par le rapporteur, reprenant celui de la proposition initiale sous réserve d'une précision rédactionnelle.