Table des matières




Mercredi 15 octobre 2003

- Présidence de M. Nicolas About, président -

Responsabilités locales - Audition de M. Jean-Marie Spaeth, président du conseil d'administration de la CNAMTS

Au cours d'une première réunion tenue dans la matinée, sous la présidence de M. Nicolas About, président, la commission a procédé à l'audition de M. Jean-Marie Spaeth, président du conseil d'administration de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) sur le projet de loi n° 4 (2003-2004) relatif aux responsabilités locales.

A titre liminaire, M. Jean-Marie Spaeth a précisé qu'il ne pourrait pas exposer la position exprimée par le conseil d'administration de la CNAMTS sur ce projet gouvernemental, pour la bonne raison qu'il n'en avait pas été saisi alors même qu'il est censé l'être de tout projet de loi ayant des conséquences financières sur l'assurance maladie ou entrant simplement dans le champ de compétences de l'assurance maladie. Il a indiqué qu'il ne voyait là qu'un oubli, et non l'intention manifeste, de laisser le conseil d'administration de la CNAMTS à l'écart du débat.

Il a toutefois estimé que cet oubli révélait, à tout le moins, un dysfonctionnement de plus en plus apparent, et auquel les parlementaires doivent être particulièrement sensibles, tenant à la multiplication de projets de textes législatifs, qui traitent tous, peu ou prou, de santé et d'assurance maladie, sans recherche de cohérence entre eux. Il s'agit notamment de la loi sur la santé publique et de la loi sur le financement de la sécurité sociale, mais aussi du projet de loi de finances et de la promulgation des ordonnances que le Gouvernement a été autorisé à prendre et qui, sous couvert de simplifications administratives, ont des conséquences directes et non négligeables sur le système de santé.

Il résulte de ces « petites touches », opérées sans vision d'ensemble, des équilibres de pouvoir modifiés, des organisations déstabilisées, sans que soit garantie la reconstruction d'un système plus stable et plus performant. La chose est d'ailleurs logique puisque le Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, à qui il revient de définir justement ces voies d'avenir, vient à peine d'engager ses travaux.

M. Jean-Marie Spaeth a expliqué que sa lecture du projet de loi sur les responsabilités locales se faisait à l'aune de ce souci de recherche de cohérence, sans obérer le sens des réformes nécessaires attendues pour l'automne 2004. Or, a-t-il estimé, les articles du projet de loi qui traitent de l'action sociale et de la santé ne résistent pas à cette grille de lecture et introduisent de la complexité dans un système qui aspire, tout au contraire, à une clarification des rôles.

Il a souligné que, selon lui, un consensus est désormais largement établi : celui qui reconnaît à l'Etat et donc au pouvoir politique - ou à l'exécutif qui en est issu - une complète légitimité à fixer les orientations politiques et les priorités en matière de santé, ainsi que le cadre macro-économique, et donc les grands équilibres économiques qui correspondent. Il y voit d'ailleurs l'un des mérites de la réforme de 1996, qui a restauré le rôle du politique en matière de santé et de sécurité sociale et a permis la reconnaissance, par tous, de cette fonction régalienne.

La question qui se pose aujourd'hui à tous ceux qui réfléchissent à l'avenir de l'assurance maladie porte donc plutôt sur le choix de l'opérateur, c'est-à-dire sur le point de savoir qui est chargé de la mise en oeuvre de ces orientations politiques. A son sens, cet opérateur ne doit pas être l'Etat. L'expérience dans différents domaines montre que, lorsque les fonctions de stratège et celles d'opérateur sont réunies entre les mêmes mains, ce sont le plus souvent les premières qui en pâtissent, tandis que si l'opérateur est distinct de celui qui arrête les grandes orientations, chacun y gagne en force et donc en capacité d'action.

Or, a-t-il fait observer, le projet de loi relatif aux responsabilités locales propose une confusion des rôles, sous couvert d'implication accrue des instances politiques régionales. M. Jean-Marie Spaeth n'a pas réfuté la nécessité d'impliquer davantage le niveau régional sur les questions de santé, qui constitue un niveau pertinent, comme le montre l'organisation interne de l'assurance maladie et les relations conventionnelles de la CNAMTS avec les professionnels de santé. Mais il a critiqué notamment l'article 54 du texte, qui prévoit, moyennant un investissement sanitaire - dont la nature n'est d'ailleurs pas précisée - que le conseil régional acquière un tiers des voix au sein de la commission exécutive des agences régionales de l'hospitalisation (ARH). Or, cette commission a clairement une fonction d'opérateur, de gestionnaire, au travers notamment des contrats qu'elle conclut avec les établissements hospitaliers et ce n'est pas, à son avis, le rôle du pouvoir politique que d'agir en son sein.

M. Jean-Marie Spaeth a ajouté que l'assurance maladie, qui assure l'essentiel du financement de l'hôpital, comprendrait mal de se voir reléguée à ne plus y détenir qu'un tiers des voix, c'est-à-dire autant que les conseils régionaux auxquels il suffit, pour acquérir ce droit, de faire un investissement sanitaire de quelque niveau qu'il soit. L'adage bien connu selon lequel « celui qui paie, commande » s'en trouverait pour le moins contredit.

Il a souhaité vivement que la région, dans le cadre des priorités nationales de santé publique, puisse veiller à la prise en compte des spécificités régionales dans la mise en oeuvre de ces priorités ou dans l'expression de problèmes particuliers de santé publique. Mais ce travail régional doit rester cohérent avec la politique nationale, ce que ne garantit pas, lui semble-t-il, l'article 55 du projet qui autoriserait les conseils régionaux à définir des objectifs régionaux de santé publique. En revanche, les contrats de plan avec l'Etat lui paraissent être un support pertinent pour porter ces volets santé.

M. Jean-Marie Spaeth a ensuite abordé la question de la formation des personnels paramédicaux, financée, pour une large part, par l'assurance maladie au travers de la dotation globale versée aux hôpitaux, comme l'est la formation des médecins au travers de la dotation globale des centres hospitaliers universitaires (CHU). Il a rappelé que l'assurance maladie prône depuis plusieurs années une clarification de ces financements, afin d'isoler ce qui relève de la formation ou de la recherche, par exemple, et justifie des financements globalisés, de ce qui relève de l'activité de soins et qui justifie un financement à l'activité. Cette proposition, qui figurait dans le plan stratégique de la CNAMTS en 1999, va trouver prochainement son application. Mais, pour l'instant, et c'est inhérent à la nature même de la dotation globale, il n'est pas possible d'isoler les sommes finançant la seule formation.

En revanche, il a signalé que le fonds de modernisation des établissements de santé avait prévu, en 2002, un montant de 15,2 millions d'euros pour les opérations d'investissement et de fonctionnement des instituts de formation en soins infirmiers. Ce fonds est alimenté par une dotation de l'assurance maladie, dont le montant est fixé par un décret et un arrêté, et la caisse des dépôts et consignations en assure la gestion et verse les sommes aux établissements.

M. Jean-Marie Spaeth a souligné que le transfert organisé à l'article 58 du projet de loi n'avait pas été discuté avec l'assurance maladie et qu'il était difficile, dans ces conditions, d'élaborer en amont les conditions de son éventuelle application. Il a rappelé que la mise en oeuvre progressive de la tarification à l'activité dans les établissements, prévue par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004, envisage que les établissements de santé percevront, en plus du tarif à l'activité, une dotation destinée à couvrir les activités qui ne sont pas à proprement parler des soins, parmi lesquelles figure l'enseignement. A la lecture de ces deux projets, on mesure combien la clarification des rôles et des financements est, là encore, loin d'être achevée.

Enfin M. Jean-Marie Spaeth a attiré l'attention de la commission sur l'article 40 qui traite du secteur médico-social et transfère au département la responsabilité de l'élaboration du schéma départemental fondant les autorisations pour les établissements de personnes âgées et handicapées. Il a rappelé que ces établissements sont, pour une large part, financés par l'assurance maladie dans le cadre de l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (ONDAM). La CNAMTS ayant décidé de rendre compte, chaque année, de l'exécution de cet ONDAM, elle ne voudrait pas que la tâche de l'assurance maladie se limite à enregistrer les dépenses médico-sociales autorisées par d'autres sans avoir, à aucun moment, les moyens de peser sur un certain nombre de choix, et d'apporter son expertise dans ce domaine.

Mme Annick Bocandé, rapporteur pour avis, a remercié M. Jean-Marie Spaeth d'avoir éclairé son jugement sur la participation des conseils régionaux à la commission exécutive des ARH et sur les conditions dans lesquelles la compensation financière doit accompagner le transfert de la formation des auxiliaires médicaux de l'Etat vers les régions. Elle a souhaité connaître son opinion sur une éventuelle nouvelle répartition des compétences en matière de gestion des enveloppes « dépendance », « hébergement » et « soins », destinées aux établissements sociaux, notamment dans l'hypothèse d'un transfert des compétences, actuellement gérées par l'Etat, vers les conseils généraux.

M. Jean-Marie Spaeth a plaidé pour une solution intermédiaire, qui s'organiserait autour d'une convention réunissant l'assurance maladie et les conseils généraux, convention susceptible d'éviter d'éventuelles disparités de traitements et qui permettrait de maintenir une distinction claire entre les dépenses relevant de l'hébergement et celles relevant des soins.

M. Nicolas About, président, a souligné que, dans certaines situations, notamment pour les personnes âgées ou handicapées qui souhaitaient demeurer à leur domicile, les caisses primaires d'assurance maladie (CPAM) n'étaient parfois pas suffisamment à l'écoute des assurés sociaux, quand elles ne multipliaient pas des tracasseries administratives particulièrement incompréhensibles par des personnes fragiles.

M. Jean-Marie Spaeth a reconnu que les CPAM n'étaient pas exemptes de reproches, mais il a indiqué que des efforts étaient entrepris pour améliorer la prise en charge des assurés sociaux. Il a précisé qu'un mouvement important de réaffectation des ressources était en cours, visant à réorienter progressivement les tâches liées à la liquidation des dossiers vers des activités de proximité, au service des assurés.

M. Guy Fischer a souligné l'ampleur du projet de loi présenté et a estimé que la modification de son intitulé, « responsabilités locales » plutôt que « décentralisation », était le signe de sa complexité. Il a interrogé M. Jean-Marie Spaeth sur le rôle que l'assurance maladie serait amenée à tenir au regard des dispositions qu'il présente.

M. Jean-Marie Spaeth a rappelé que le plan stratégique élaboré en 1999 par la CNAMTS posait des questions du même ordre, en insistant sur la dimension territoriale de la santé et sur le fait que la politique sanitaire allait au-delà du rôle qu'elle assume.

M. Jean-Pierre Godefroy a fait part de ses interrogations sur les dispositions insérées dans les articles 53, 54, 55 et 58 du projet de loi qui lui semblent incomplètes. Il a particulièrement mis en exergue l'imprécision de l'article 54 au regard des dispositions contenues dans la loi n° 2003-704 du 1er août 2003 relative à l'expérimentation par les collectivités territoriales.

M. André Lardeux s'est déclaré favorable au principe d'une convention entre les conseils généraux et les CPAM. Il a souligné qu'une réorganisation institutionnelle de l'assurance maladie, notamment la création d'une seule caisse par département, constituerait un élément de simplification appréciable dans les relations entre les départements et la CNAMTS.

Il a, par ailleurs, indiqué qu'il soutenait les mesures de recentralisation des politiques sanitaires, aujourd'hui confiées au département, prévues par l'article 56 du projet de loi.

M. Jean-Marie Spaeth a précisé que la décision de fusion des CPAM ne relevait pas de la CNAMTS mais d'un arrêté ministériel. Il a d'ailleurs estimé que la restructuration des CPAM devait permettre aux agences locales de proximité de jouer un rôle de guichet unique pour les assurés et les professionnels. Il a également indiqué que l'assurance maladie souhaitait mettre en place des procédures transversales afin de favoriser la collaboration entre les départements et les régions, notamment sur les affaires contentieuses.

Répondant à une question de M. Nicolas About, président, concernant les disparités locales dans les capacités de dépistage du cancer du sein, M. Jean-Marie Spaeth a rappelé qu'en 2001, l'assurance maladie s'était très logiquement déclarée volontaire pour prendre en charge les dépenses afférentes et que cette solution n'avait pas été retenue par les pouvoirs publics.

Prenant l'exemple des transports sanitaires et de la situation des infirmières dans les zones transfrontalières, M. Louis Souvet s'est interrogé sur la manière dont les accords conventionnels nationaux, ou les dispositions du projet de loi, étaient susceptibles d'être adaptés afin de tenir compte des spécificités locales.

M. Jean-Marie Spaeth a précisé que les accords nationaux avaient vocation à fixer des dispositions-cadres susceptibles d'être aménagées en fonction des spécificités locales.

Il s'est déclaré favorable à la mise en place de dispositifs susceptibles de lier les infirmières à la région où elles ont reçu leur formation, mais a attiré l'attention des parlementaires sur la nécessité de respecter le caractère libéral que pouvait également prendre la profession.

M. Bernard Cazeau a estimé que les articles 39 et 46 du projet de loi consacraient la fin du copilotage en matière d'action sociale et a attiré l'attention de M. Jean-Marie Spaeth sur l'importance croissante des lits médicalisés au sein des maisons de retraite.

Il a également souligné les difficultés qui pouvaient naître, dans la gestion des soins infirmiers à domicile (SIAD), pour les directions départementales de l'action sanitaire et sociale (DDASS).

M. Jean-Marie Spaeth s'est déclaré conscient des difficultés rencontrées par les établissements médicalisés. Il a estimé qu'une solution partielle pouvait résider dans le basculement d'un système fondé sur le paiement à l'acte vers un système de forfait. Il a indiqué que des discussions étaient en cours avec les médecins et les infirmières pour les soins de fin de vie, et avec les masseurs kinésithérapeutes sur la rééducation. Il a précisé, toutefois, que cette rémunération fixe ne devait en aucun cas être considérée comme une remise en cause du paiement à l'acte.

M. Jean Chérioux a rappelé que la maîtrise des dépenses de santé passait impérativement par une maîtrise de l'investissement et a indiqué que le législateur devait prendre garde au développement d'éventuelles inégalités territoriales. Il a rappelé le rôle déterminant joué par les départements dans la prise en charge des personnes dépendantes.

M. Paul Blanc a rappelé l'attachement qu'il porte à la distinction à opérer entre le handicap et la dépendance.

Il a souligné, d'une part, la nécessité de responsabiliser les assurés sociaux, et a exprimé, d'autre part, des réserves sur l'opportunité d'une tarification au forfait au sein des établissements médicalisés, compte tenu du coût très variable des médicaments, notamment en raison de leur degré d'innovation.

En réponse à cette dernière intervention et pour lever toute ambiguïté, M. Jean-Marie Spaeth a précisé qu'il avait bien soutenu l'idée d'un forfait lié à la pathologie, et non pas celle d'un forfait unique calculé par personne.

PJLF pour 2004 - Audition de M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine

Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, sous la présidence de M. Nicolas About, président, la commission a procédé à l'audition de M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine, sur le projet de budget de son ministère pour 2004.

A titre liminaire, M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine, a indiqué que les crédits consacrés à la politique de la ville provenaient de trois sources distinctes, correspondant aux différents aspects du développement des quartiers difficiles.

Il a ainsi expliqué qu'au budget propre au ministère de la ville prévu pour 2004 de 344 millions d'euros, s'ajouteraient les crédits de l'agence nationale de rénovation urbaine (ANRU), soit 1,2 milliard d'euros par an financé par l'Etat, les partenaires sociaux, les organismes d'habitations à loyer modéré (HLM) et la caisse des dépôts et consignations, ainsi que les aides fiscales et sociales aux entreprises installées dans les zones franches urbaines (ZFU).

Il a rappelé que le ministère de la ville allouait à l'ANRU une partie non négligeable de son budget, afin que l'agence soit véritablement le moteur de ces actions et que l'ensemble des crédits alloués à la rénovation urbaine soient protégés des mécanismes de régulation budgétaire. Il a déclaré à cet égard que l'ANRU disposait, pour cinq ans, d'un budget autonome bénéficiant d'un paiement annuel en crédit de paiement en faveur de cent soixante-trois quartiers à rénover entièrement et d'environ cinq cents autres nécessitant une aide ponctuelle.

Concernant le développement économique des quartiers, il a ajouté que le fonds de revitalisation économique (FRE) avait été un échec, notamment parce qu'il n'avait pas atteint une masse critique suffisante pour les actions qu'il avait l'ambition de mener.

Il a indiqué que le Gouvernement avait choisi de supprimer le FRE et de mettre l'accent sur les zones franches urbaines, dont le dispositif était reconduit en 2004 pour les quarante-quatre ZFU existantes et étendues à quarante et une nouvelles zones, soulignant que la réussite de cette mesure reposait toutefois en grande partie sur la motivation des différents partenaires locaux.

Il a ensuite précisé que le fonds d'investissement pour la ville (FIV) conservait, en 2004, l'intégralité de ses crédits, à la différence de la délégation interministérielle à la ville (DIV) qui devait à l'avenir se consacrer à une mission d'analyse de la politique de la ville et de suivi des indicateurs dans les quartiers, notamment par le biais de l'observatoire des zones urbaines sensibles (ZUS).

M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine, a ensuite confirmé que l'ANRU serait bien mise en place le 17 novembre, que cinq projets de rénovation urbaine avaient déjà été homologués et que quatre-vingts autres seraient validés pour le premier trimestre 2004.

Il a mis l'accent sur le fait que l'agence n'était pas l'instructeur des projets proposés par les collectivités locales mais simplement une garantie financière de soutien à l'investissement, c'est pourquoi elle ne disposait que d'une équipe allégée regroupant différents acteurs aujourd'hui dispersés sur l'ensemble du territoire.

Abordant les moyens consacrés aux contrats de ville et au soutien des associations, il a considéré que, à terme, il faudrait aider les collectivités locales à financer elles-mêmes les actions menées sur leur territoire et a invité le Sénat à ouvrir le débat sur le financement des villes difficiles, en consacrant par exemple 20 % de la dotation de solidarité urbaine (DSU) aux cent cinquante villes qui en ont le plus besoin, les 80 % restants étant répartis entre l'ensemble des agglomérations bénéficiaires de cette dotation.

Mme Nelly Olin, rapporteur pour avis, a remercié M. Jean-Louis Borloo pour la clarté de son propos sur un sujet aussi complexe que le financement de la politique de la ville.

Elle a ensuite rappelé que l'effort budgétaire de l'Etat en faveur de cette politique ne se mesurait pas uniquement à l'aune du budget du ministère de la ville et que, en particulier, le rôle des services publics dans les quartiers tenait une place fondamentale. Elle a observé, à cet égard, que les crédits alloués à la politique de la ville diminuaient en 2004 et que ceux consacrés aux services publics de quartier enregistraient une baisse de près de 40 %.

Elle a donc demandé au ministre quelles mesures il envisageait de mettre en place pour favoriser le renforcement de la présence des services publics et pour mobiliser, dans les quartiers, les crédits inscrits au titre de la politique de la ville dans les budgets des autres ministères.

M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine, a estimé qu'il était inefficace de financer à tout prix ces services si les agents des services publics eux-mêmes ne souhaitaient pas travailler dans les quartiers et en a conclu que la priorité devait être donnée à la rénovation de ces quartiers par l'ANRU, en prévoyant le renforcement des services publics dans les programmes de rénovation.

Il a toutefois rappelé que l'action de l'ANRU s'adressait plus particulièrement aux villes qui n'avaient pas les moyens de financer les services publics sur leur territoire et que, dans les cas les plus difficiles, l'agence prendrait en charge certains coûts de fonctionnement de ces services.

Abordant la question de la sécurité dans les quartiers, Mme Nelly Olin, rapporteur pour avis, a interrogé le ministre sur les actions prévues en 2004 dans le cadre des opérations « ville-vie-vacances » à destination des jeunes. Elle a en outre insisté sur les problèmes posés par l'absence des travailleurs sociaux dans les quartiers en fin de journée et les nuits.

Concernant les opérations « ville-vie-vacances »,M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine, a indiqué que cette mesure, parfois critiquée, fonctionnait de manière satisfaisante, reconnaissant toutefois que les budgets alloués à ces actions étaient constants depuis de nombreuses années. Il a souhaité que soient développés parallèlement les dispositifs « école ouverte » accueillant les jeunes dans les établissements hors des périodes scolaires, actuellement mis en veille du fait du débat sur l'école. Elargissant son propos aux métiers de la ville, il a indiqué qu'ils avaient été regroupés sur sept sites pilotes et que le bilan de cette expérience serait disponible cette année. Il a ajouté que ces professionnels connaissaient de réels problèmes de niveau de leur qualification et de déroulement de leur carrière, alors même qu'il s'agissait de métiers difficiles et essentiels dans les quartiers. Il a souhaité, à cet égard, la mise en place d'une école nationale des métiers de l'humain qui formerait des cadres du secteur social et que cette question soit au centre des prochaines actions du ministère.

Mme Nelly Olin, rapporteur pour avis, a indiqué que la loi d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine prévoyait la création d'un observatoire national des ZUS et a demandé au ministre dans quelles conditions cette nouvelle structure allait être mise en place au sein de la DIV, alors même que cette dernière voyait ses crédits de fonctionnement diminués de 700.000 euros dans le projet de loi de finances pour 2004.

M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine, a rappelé qu'il ne s'agissait pas d'un nouvel organisme mais d'une structure d'étude chargée d'informer les différents partenaires de la politique de la ville de l'évolution des indicateurs dans les quartiers et du résultat des actions menées. Il a expliqué que, pour cela, une partie des effectifs de la DIV serait reliée à l'agence, les autres étant chargés d'une mission de réflexion, de comparaison internationale de la politique de la ville et d'information annuelle du Parlement.

Interrogeant le ministre au nom de Mme Annick Bocandé, rapporteur pour avis du projet de loi relatif aux responsabilités locales, M. Nicolas About, président, a demandé de quelle manière l'action décentralisée des collectivités territoriales en matière de logement allait être coordonnée avec celle de l'ANRU.

M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine, a rappelé, qu'à la différence de la décentralisation, l'ANRU n'avait pas vocation à devenir le droit commun en matière de politique du logement puisqu'il s'agissait uniquement d'un programme d'action quinquennal s'appliquant par le biais de conventions directes avec les villes ayant proposé un projet. Il a souhaité que l'agence n'entre en aucun cas dans le dispositif de décentralisation car certains de ses financements, notamment ceux en provenance des partenaires sociaux, ne pouvaient être décentralisés.

Répondant ensuite à une question de Mme Nelly Olin, rapporteur pour avis, sur l'avenir du conseil national des villes (CNV), il s'est prononcé contre la dispersion actuelle des organismes chargés de la politique de la ville et a appelé de ses voeux la mise en place au sein de l'ANRU d'un organe unique consultatif composé d'élus.

Il a également souhaité la mise en place d'un comité permanent d'évaluation et de suivi de la politique de la ville composé d'une quinzaine de personnalités qualifiées et disposant d'un budget autonome.

M. Yves Krattinger a déploré que les moyens du ministère de la ville ne correspondent pas mieux aux ambitions affichées par le ministre en matière de rénovation urbaine, rappelant que 8.000 logements étaient détruits annuellement alors que le programme national de rénovation urbaine (PNRU) prévoyait 40.000 destructions annuelles.

M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine, a rappelé que les crédits de paiement ne correspondaient jamais aux autorisations de programme annoncées : concernant la politique de la ville, seuls 68 millions d'euros, sur 1,15 milliard d'euros prévus, avaient effectivement été versés au cours des cinq dernières années.

Il a indiqué que le budget alloué à l'ANRU serait composé pour l'essentiel de ces crédits non consommés ainsi que de 650 millions d'euros en provenance du 1 % logement, somme habituellement versée au budget général par la loi de finances.

M. Guy Fischer s'est interrogé sur la manière dont l'ambitieux programme national de rénovation urbaine (PNRU) voté cet été allait pouvoir être mis en place, notamment en matière de démolition.

M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine, a indiqué que le ministère de la ville ne pouvait prendre en charge l'ensemble des opérations mais qu'il ferait en sorte, par le biais des garanties financières apportées par l'ANRU, que les collectivités locales aient les moyens de mettre en oeuvre leurs projets.

Il a considéré que l'une des missions essentielles de l'agence était de redonner confiance aux élus sur l'obtention effective des crédits demandés, qui faisaient jusqu'à présent l'objet d'une instabilité chronique.

M. Roland Muzeau s'est inquiété des relations parfois difficiles entre les élus et les délégations départementales de l'équipement (DDE) qui avaient tendance à multiplier les procédures tatillonnes, ce qui allongeait considérablement les délais de mise en oeuvre des projets, alors même que le ministre revendiquait un assouplissement de la mise en oeuvre des opérations de la rénovation urbaine.

Il a ensuite interrogé le ministre quant au sort réservé à l'établissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (EPARECA) et s'est inquiété de l'insuffisante présence des services publics dans les quartiers difficiles.

M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine, a indiqué que les réserves émises par les DDE tenaient, en grande partie, à la prudence dont elles devaient faire preuve dans l'instruction des dossiers, en raison de leurs capacités limitées en termes de crédits de paiement disponibles chaque année, cette capacité représentant le plus souvent à peine le quart des crédits annoncés en autorisations de programme.

Il a assuré, à cet égard, que le rôle de l'agence était de leur redonner confiance en garantissant un paiement effectif de chaque projet validé par les DDE, ce qui signifiait un réel changement de mentalités de ces services.

M. Jean-Pierre Fourcade a demandé à M. Jean-Louis Borloo comment s'articulaient les actions respectives des sous-préfets à la ville, de la DIV et de l'ANRU.

Il a, par ailleurs, déploré que les subventions en faveur de l'alphabétisation et du soutien scolaire transitent parfois par les comités locaux de lutte contre la délinquance, ce qui lui semblait une assimilation regrettable.

Il a également souhaité la mise en oeuvre d'une réflexion plus ambitieuse sur la réforme de la dotation globale de fonctionnement (DGF) en vue d'un financement pérennisé des villes difficiles.

M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine, a indiqué que les sous-préfets à la ville, véritable lien entre le préfet et la DDE, devaient devenir le maillon essentiel des programmes de rénovation urbaine, regrettant, à cet égard, qu'ils ne soient pas encore très bien positionnés dans l'administration préfectorale.

Il a ensuite estimé qu'il était rare que les crédits relatifs à l'alphabétisation soient financés via les dispositifs de lutte contre la délinquance. Concernant la réforme de la DGF, il a reconnu ne pas disposer actuellement des experts susceptibles de faire des propositions dans ce domaine.

M. André Vantomme a interrogé M. Jean-Louis Borloo sur le nombre d'emplois créés dans les ZFU sur les dix-huit derniers mois et le coût de ces créations.

Rappelant l'annonce faite par le ministre de la mise en place d'un « fabuleux programme de rénovation urbaine de 30 milliards d'euros », il a demandé des précisions sur sa mise en oeuvre. Il a enfin questionné le ministre quant au nombre de contrats éducatifs locaux prévus pour 2004 et le montant correspondant.

M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine, a indiqué qu'il était difficile d'apprécier le coût d'un emploi créé en ZFU et a précisé que le PNRU était financé à hauteur de 6 milliards d'euros par l'ANRU, les 24 milliards restants représentant des financements extérieurs, notamment ceux des organismes HLM mobilisés par l'effet de levier.

Concernant les contrats éducatifs locaux, il a déclaré ne pas en connaître le nombre exact car beaucoup sont signés directement par les collectivités locales.

M. Dominique Leclerc a évoqué le problème des gens du voyage dont il a estimé que la situation était méconnue et disparate, regrettant qu'ils n'aient pas fait l'objet d'un recensement récent. Il a estimé à cet égard qu'il s'agissait d'un foyer de déstabilisation sociale plus considérable que les populations immigrées.

M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine, est convenu qu'il s'agissait d'un sujet complexe que le ministère de la ville n'avait pas encore approfondi, mais a rappelé que la loi d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine avaient prévu que les villes en difficulté seraient exonérées du plan d'accueil pour les gens du voyage. Il a également indiqué que l'ANRU serait chargée de financer des opérations ciblées de sédentarisation de certaines de ces populations, notamment en Ile-de-France et que trois programmes étaient actuellement en cours.

Mme Nelly Olin, rapporteur pour avis, a enfin abordé la question de l'établissement public d'aménagement de la Plaine de France, constatant que cette structure n'avait, en fait, jamais bénéficié des financements promis.

M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine, a indiqué que la Seine-Saint-Denis constituait un dossier à part en termes de rénovation urbaine, qui nécessitait une attention toute particulière de l'agence. A cet égard, il a annoncé qu'un diagnostic était en cours pour recenser l'état des opérateurs et des porteurs de projets, les besoins des quartiers et les opérateurs potentiels.

Jeudi 16 octobre 2003

- Présidence de M. Nicolas About, président -

Enfance - Accueil et protection de l'enfance - Examen des amendements

La commission a procédé à l'examen des amendements sur le projet de loi n° 434 (2002-2003) relatif à l'accueil et à la protection de l'enfance.

Avant l'article premier, la commission a émis un avis favorable à l'amendement n° 13 de M. Michel Mercier et des membres du groupe de l'union centriste, dégageant les enfants victimes de maltraitance de l'obligation alimentaire envers leurs parents, sauf décision contraire du juge des affaires familiales.

A l'article premier (Modification de l'agrément des assistantes maternelles), elle a émis un avis défavorable à l'amendement de suppression n° 14 présenté par Mme Michelle Demessine, MM. Guy Fischer, Roland Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen. Elle a souhaité recueillir l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 24 rectifié de Mme Annick Bocandé et des membres du groupe de l'union centriste, qui proposait de réévaluer le plafond d'accueil autorisé pour faciliter la garde périscolaire des fratries.

A l'article 2 (Dispositions transitoires relatives à la réforme de l'agrément des assistantes maternelles non permanentes), elle a considéré que les amendements n°s 23 de Mme Annick Bocandé et des membres du groupe de l'union centriste et 21 présenté par M. Alain Vasselle pouvaient être retirés par leurs auteurs après discussion en séance, car ils trouveraient mieux leur place au sein du futur projet de réforme du statut des assistantes maternelles.

A l'article 7 (Création d'un observatoire de l'enfance maltraitée), la commission a émis un avis défavorable à l'amendement n° 16 de Mme Michelle Demessine, MM. Guy Fischer, Roland Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen modifiant les missions de l'observatoire, et a souhaité que l'amendement n° 17 des mêmes auteurs, tendant à prévoir la publication d'un rapport annuel, soit soumis à l'avis du Gouvernement.

Après l'article 8, elle a estimé que l'amendement n° 18 de Mmes Marie-Claude Beaudeau et Michelle Demessine, MM. Guy Fischer, Roland Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, relatif au secret professionnel des médecins, pouvait être retiré après une discussion en séance publique et elle a émis un avis défavorable à l'amendement de conséquence n° 19 des mêmes auteurs.

A l'article 10 (Constitution de partie civile par des associations dans les cas de violence exercée contre des victimes majeures), la commission a émis un avis défavorable à l'amendement n° 20 présenté par Mme Michelle Demessine, MM. Guy Fischer, Roland Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, en ce qu'il limitait la liste des infractions visées.

Elle a, en revanche, donné un avis favorable à l'amendement n° 14 rectifié de Mme Nelly Olin et MM. Jacques Legendre et Alain Vasselle, qui simplifiait les conditions dans lesquelles une association pouvait se constituer partie civile, sous réserve de l'adoption du sous-amendement de précision n° 25 présenté par M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur.

Enfin, à l'article 12 (Expérimentation de dotations globales de financement dans les services tutélaires), elle a souhaité recueillir l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 22 présenté par M. Alain Vasselle, proposant que l'expérimentation proposée soit élargie aux tuteurs « personnes physiques ».