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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Organisme extraparlementaire (Appel à candidature)

Dépôt de document

Questions prioritaires de constitutionnalité

Risque de submersion marine

Discussion générale

Hommage aux victimes de l'attentat de Marrakech

Questions cribles thématiques (La France et l'évolution de la situation politique dans le monde arabe)

Risque de submersion marine (Suite)

Discussion générale (Suite)

Discussion des articles

Article premier

Article additionnel

Article 3

Article additionnel

Article 5

Articles additionnels

Article 6

Article 6 bis

Article additionnel

Article 7

Article 8

Article 10

Article additionnel

Article 11 bis (Supprimé)

Article 12

Article 13

Article 14

Article 15

Article 17

Article 19

Articles additionnels

Article 21

Vote sur l'ensemble

Installations radiographiques et hydrodynamiques (Procédure accélérée)

Discussion générale

Vote sur l'ensemble

Compensation outre-mer des accords commerciaux européens (Proposition de résolution européenne)

Discussion générale

Discussion du texte de la proposition de résolution

Vote sur l'ensemble




SÉANCE

du mardi 3 mai 2011

97e séance de la session ordinaire 2010-2011

présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaire : M. Bernard Saugey.

La séance est ouverte à 14 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Organisme extraparlementaire (Appel à candidature)

M. le président.  - M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation du sénateur appelé à siéger au sein du Comité de suivi du niveau et de l'évolution des taux d'intérêts des prêts aux particuliers, créé en application de l'article L. 313-3 du code de la consommation.

Conformément à l'article 9 du Règlement, j'invite la commission des finances à présenter une candidature.

Dépôt de document

M. le président.  - M. le Premier ministre a transmis au Sénat, en application de l'article 8 de la loi n°2010-237 du 9 mars 2010 de finances rectificative pour 2010, l'avenant à la convention passée avec l'Agence nationale de la recherche et relative à l'action « Laboratoires d'excellence », qui a été publiée au Journal officiel du 5 août 2010.

Acte est donné du dépôt de ce document, transmis à la commission des finances, à la commission de l'économie ainsi qu'à la commission de la culture.

Questions prioritaires de constitutionnalité

M. le président.  - M. le président du Conseil constitutionnel a communiqué au Sénat, par courriers en date du 29 avril 2011, quatre décisions du Conseil sur des questions prioritaires de constitutionnalité.

M. le président du Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le vendredi 29 avril 2011, qu'en application de l'article 61-1 de la constitution, le Conseil d'État a adressé au Conseil constitutionnel une décision de renvoi d'une question prioritaire de constitutionnalité.

Risque de submersion marine

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi tendant à assurer une gestion effective du risque de submersion marine.

Discussion générale

M. Bruno Retailleau, auteur de la proposition de loi n°172.  - Je m'exprimerai à la fois comme auteur et rapporteur du texte : cela fera gagner du temps au Sénat.

M. le président.  - Bien volontiers.

M. Bruno Retailleau, auteur de la proposition de loi n°172, rapporteur de la commission de l'économie.  - Malgré son nom féminin, Xynthia a été violente, brutale et meurtrière, puisqu'elle a tué une cinquantaine de personnes le 28 février 2010. Ces événements nous ont marqués à jamais ; la vie de bien des familles a basculé cette nuit-là.

La reconstruction est en bonne voie, grâce à la bonne volonté de l'État, des hommes et des collectivités territoriales. Mais si les dégâts matériels sont réparables, rien ne peut remplacer la perte d'un être cher dans sa singularité irréductible.

La France était très mal préparée, faute d'une culture du risque. Nous vivons avec la fausse idée d'un risque zéro. Depuis des décennies, nos sociétés se sont construites sur la volonté prométhéenne de domestiquer la nature. Hélas ! Elle reprend ses droits.

Je rends hommage aux centaines de sapeurs-pompiers qui ont sauvé des vies en risquant la leur : 765 victimes potentielles ont été épargnées grâce à eux. Ces femmes et ces hommes ont rappelé le sens profond du plus beau mot de notre devise républicaine : fraternité.

Quand on est législateur, on doit prendre ses responsabilités en adoptant les dispositions excluant la répétition d'un tel drame. C'est ce qu'a fait le Sénat, sous l'impulsion de son président qui a voulu une mission commune d'information. Dès juillet, cette mission a rendu son rapport : cette proposition de loi reprend ses conclusions. C'est pourquoi je remercie les membres de la mission, notamment son rapporteur, M. Anziani. Il est rassurant que, sur un tel sujet, nous sachions transcender les clivages. (Marques d'approbation sur de nombreux bancs)

Ce texte se fixe deux objectifs. Le premier consiste à ne pas ajouter de règles aux règles. Nous voulons améliorer la cohérence de la prévention et de la protection en passant par la prévision. Le second tend à développer la culture du risque grâce à des mesures concrètes.

Le texte que la Commission a adopté s'articule autour de quatre axes.

D'abord, mieux prendre en compte les risques d'inondation spécifiques au littoral. Afin d'éviter la multiplication des documents de planification et d'encourager une gestion globale du risque, le texte adopté par la commission intègre la prise en compte des risques littoraux au sein des documents existants : schéma directeur de prévision des crues, plan de gestion des risques d'inondation et PPR.

Deuxième axe : affirmer clairement la suprématie de la prévention des risques sur le droit de l'urbanisme. La commission a consacré pour la première fois le principe de la protection des vies humaines face aux risques comme un objectif du droit de l'urbanisme et prévu que la carte du risque et la carte de l'occupation des sols devaient coïncider.

M. Roland Courteau.  - Très bien !

M. Bruno Retailleau, rapporteur.  - Les maires auront un an pour mettre en conformité PLU et PPRI. Il sera interdit de délivrer des permis tacites dans les zones délimitées par les plans de prévention des risques soumises à des risques particulièrement graves. Le préfet aura pouvoir d'opposition et de substitution si la mise en conformité n'est pas assurée ; la pression financière et immobilière croissante sur le littoral nécessite des outils ad hoc.

Troisième axe : améliorer l'efficacité de la gestion des ouvrages de protection.

Le texte clarifie le régime de propriété afin d'envisager, en cas de carence, le transfert en propriété publique.

Nous renforçons les moyens de contrôle en rendant obligatoire, comme aux Pays-Bas, un rapport d'évaluation des ouvrages et en créant un mécanisme de financement pérenne grâce à la nouvelle taxe d'aménagement.

Quatrième axe : il faut sensibiliser la population à la culture du risque en diffusant cette culture du sommet à la base. Nos concitoyens doivent adopter les réflexes qui sauvent. (M. Roland Courteau approuve)

Dès lors qu'il aura été publié, le plan communal de sauvegarde sera obligatoire, avec les exercices de simulation qui s'imposent, comme les exercices d'évacuation.

Nous instaurons une journée nationale de prévention. Cette journée existe au Japon depuis le grand séisme de 1923. Elle a porté ses fruits auprès de la population.

Telle est l'économie générale de ce texte, fruit d'un travail d'équipe.

Depuis Xynthia, le Var a subi des inondations en juillet 2010. Le 11 mars 2011, après bien des cyclones aux États-Unis, a vu la catastrophe de Fukushima.

Nous devons rester humbles face aux transformations que nous imposons à la nature. Inévitablement, d'autres phénomènes paroxystiques auront lieu : le centre de recherche de l'université de Louvain l'a montré. Avec l'augmentation du niveau de la mer, les catastrophes centennales deviendront décennales. Nous ne devons plus répéter ce qu'avait déclaré M. Obama après l'inondation de la Nouvelle-Orléans : « c'était une catastrophe naturelle mais l'homme en était le complice ». (Applaudissements)

M. Alain Anziani, auteur de la proposition de loi n°173.  - Le premier mérite de ce texte est de lutter contre l'oubli. Nous sommes toujours menacés mais avons tendance à sous-estimer les risques, face aux contraintes financières et humaines, en nous disant, « nous avons le temps ». Or, le temps presse. Nos sociétés, Xynthia l'a montré, restent d'une grande fragilité : la France a subi 670 catastrophes naturelles en dix ans, soit 67 par an, incluant la célèbre canicule mais aussi les avalanches, les tempêtes et les inondations.

Le coût en vies humaines est considérable, avec 15 000 morts. Il est aussi financier et économique : 30 milliards depuis 2001. Et ces catastrophes s'accélèrent ; le niveau moyen de la mer pourrait augmenter de 88 cm d'ici à 2100.

Les scientifiques néerlandais en concluent que les catastrophes météorologiques en seront accélérées, les dommages aggravés, puisque le littoral attire : près de 40 % de la population mondiale vit à moins de 50 km des côtes.

En France, le risque d'inondation concerne une commune sur trois, dont mille sur le littoral. Xynthia a provoqué une émotion considérable dans notre pays ; je m'associe à l'hommage rendu par M. Retailleau à tous ceux qui ont secouru une population en détresse. Je salue également l'initiative de notre président et le travail effectué par notre mission d'information et son président, M. Retailleau.

Cette mission a dénoncé les insuffisances du système d'alerte, des prévisions météorologiques, de la prévention, des POS et de l'entretien des digues. Sans pouvoir limiter les catastrophes naturelles, nous avons la responsabilité politique de limiter les dommages provoqués par ces fléaux.

M. Roland Courteau.  - Très bien !

M. Alain Anziani, auteur de la proposition de loi n°173.  - Nous avons constaté, ce qui nous a laissé pantois, que le risque de submersion était ignoré par notre droit. Pourtant, 864 communes sont entre zéro et 2 mètres au-dessous du niveau de la mer. Or, seuls existaient 46 plans de prévention des risques naturels. Quant aux plans communaux de sauvegarde, ils étaient quasi inexistants.

Le risque de submersion sera enfin intégré dans les PPRI et les plans communaux de sauvegarde.

Nous avons également constaté quelque complaisance dans l'attribution des permis de construire, à La Faute-sur-Mer et ailleurs ; 150 maisons étaient illégalement construites à l'Aiguillon-sur-Mer. Les plans locaux d'urbanisme et les cartes communales devront désormais être mis en conformité avec les plans de prévention, de rang supérieur dans la hiérarchie des normes. L'État devra se donner les moyens d'assurer un contrôle de légalité qui ne soit plus une passoire.

J'en viens aux digues. Elles n'assureront pas une protection absolue...

M. Roland Courteau.  - C'est bien de le rappeler.

M. Alain Anziani, auteur de la proposition de loi n°173.  - ...ni un moyen d'échapper à la délimitation de zones non constructibles. Elles apportent une protection nécessaire mais non suffisante.

Il faut savoir qui préside, qui gère, qui entretient. Ce qui pose la question du financement. Nous proposons d'accroître les ressources du fonds Barnier, ce à quoi le Gouvernement nous oppose que ces ressources sont suffisantes : espérons que l'on n'en viendra pas à solliciter encore les collectivités locales.

Aux Pays-Bas, les ressources -donc les prélèvements- sont modulées en fonction des risques.

M. Bruno Retailleau, rapporteur.  - Absolument.

M. Alain Anziani, auteur de la proposition de loi n°173.  - C'est pourquoi nous proposons de donner aux communes la faculté de moduler.

Si ce texte trouve une issue rapide devant l'Assemblée nationale, nous aurons fait oeuvre utile ; mais sans volonté forte de l'État, ses dispositions resteront sans effet.

Un mot sur l'article 40 opposé par la commission des finances à notre amendement tendant à élargir la procédure d'expropriation pour risque naturel majeur aux érosions marines. Nous sommes là pourtant en présence d'un risque considérable qu'il vaudrait mieux prévenir plutôt que de subir... J'en appelle au Gouvernement : qu'il accepte de lever le gage !

Il est rare de pouvoir faire oeuvre utile, concrète : je crois que nous en avons aujourd'hui l'occasion. (Applaudissements)

M. Dominique de Legge, rapporteur pour avis de la commission des lois.  - Nous avons tous à l'esprit et au coeur les événements tragiques qui ont suivi la tempête Xynthia. La commission des lois a souhaité se saisir pour avis des dispositions qui relèvent de sa compétence.

L'empilement des documents d'urbanisme n'est pas gage d'efficacité. La commission des lois n'a pas souhaité en ajouter, après les clarifications apportées par la loi Grenelle II.

Dès lors que le CGCT impose aux schémas départementaux la couverture de tous les risques, l'article 11 ne lui est pas apparu nécessaire.

En revanche, il est bon de rapprocher le code de l'environnement et le code de l'urbanisme, lequel doit intégrer les prescriptions environnementales. Je vous proposerai donc un amendement rappelant que le PLU peut restreindre l'occupation du sol en vertu de l'existence de risques naturels.

Nous aurions préféré une « mise en compatibilité » du PLU avec le PPR. Dans un souci de consensus, je vous proposerai un amendement afin que l'autorité gestionnaire ait la main.

Les outils de la loi Littoral doivent venir en appui des documents d'urbanisme.

Je regrette la suppression de l'article 20, si utile à la bonne articulation des deux codes.

Les drames sont souvent moins le fait d'une mauvaise gestion que d'un défaut de cohérence dans les dispositions.

Le développement d'une culture du risque, nous en sommes d'accord, est essentiel.

À l'article 12, nous prévoyons de rappeler l'importance des programmes communaux de sécurité.

Sur la clarification du régime de propriété des digues, la commission des lois souhaite l'accord, dans tous les cas, du propriétaire public.

Un mot sur les digues orphelines : le code général de la propriété des personnes publiques, via la procédure des « biens sans maîtrise », permet déjà de désigner clairement un propriétaire.

Je souhaite que cette mobilisation unanime du Sénat permette de prévenir les risques de submersion marine et d'assurer la sécurité des populations. Les témoignages émouvants que nous avons recueillis en Vendée ont renforcé notre détermination. C'est par la collaboration de tous les acteurs que nous réussirons. (Applaudissements)

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement.  - Je salue le travail remarquable de votre mission d'information, qui contribuera à nous permettre de tirer tous les enseignements de Xynthia. Des familles entières ont été détruites : cela ne doit pas se reproduire. Notre priorité a été de restaurer les digues.

Puis, en avril 2010, nous avons défini les zones où les habitations devraient être rachetées par l'État : 1 574 habitations étaient concernées ; 1 129 biens ont fait l'objet d'un accord. Ensuite, un périmètre des zones à risques a été défini.

Grâce aux dispositions exceptionnelles de la loi de finances, la trésorerie du fonds Barbier a permis de faire face. J'ajoute que ses ressources annuelles -soit 165 millions- suffisent à financer nos programmes, notamment les 80 millions consacrés au plan de submersion marine.

En matière de prévention des risques, Xynthia nous a beaucoup appris : les PPR doivent être actualisés.

Votre mission d'information a montré que bien des digues sont sans responsable actif ou même identifié. Le plan de submersion rapide, qui intègre nos recommandations, est une première réponse, doté de 500 millions sur la période 2011-2016. Son premier objectif vise à réduire la vulnérabilité des zones : 242 communes ont ainsi été identifiées et devront élaborer et approuver un PPR dans un délai de trois ans et 68 communes verront leur PPR révisé.

Il convient également d'élaborer des projets d'aménagement intégrant prévention des risques et objectifs de développement, par exemple via des Scot expérimentaux sur le littoral.

L'équilibre qui prévaut aux Pays-Bas doit nous être un exemple. En France, à l'horizon 2040, la progression démographique dans les zones littorales sera de 20 %, contre 10 % ailleurs. Il est de notre devoir de trouver un équilibre entre réduction de la vulnérabilité et maintien du développement.

Deuxième objectif : améliorer la chaîne vigilance-prévention-alerte. Météo France mettra en place à partir de fin 2011 une vigilance vagues.

Troisième objectif : recenser les ouvrages de protection, pour donner un propriétaire responsable aux digues orphelines.

En matière de maîtrise d'ouvrage, faut-il maintenir la diversité existante ou un schéma unique via les EPCI ? Il faudra y réfléchir. Nous avons entendu votre souhait, monsieur Retailleau. Vous souhaitez que l'on accorde à titre transitoire le taux de 40 % d'aide, tant que le PPR prescrit n'est pas approuvé, contre un taux de 25 % actuellement ; le Gouvernement proposera un amendement en ce sens pour ne pas prendre du retard.

M. Bruno Retailleau, rapporteur.  - Merci.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - La culture du risque est structurante, ce que démontre l'exemple japonais, encore dernièrement. Mais une culture du risque à la française reste à créer : nous tendons spontanément à rechercher le risque zéro, alors qu'il faut vivre dans la conscience que la menace existe.

Désormais, grâce à votre proposition, les plans communaux de sauvegarde, qui servent à organiser l'alerte et l'évacuation des populations, devront être élaborés par les communes dès qu'un PPR sera prescrit, et plus seulement lorsque le PPR est approuvé.

La culture du risque est structurante, ce que démontre l'exemple japonais, encore dernièrement. Mais une culture du risque à la française reste à créer : nous tendons spontanément à rechercher le risque zéro, alors qu'il faut vivre dans la conscience que la menace existe.

J'en viens à la gouvernance : une nouvelle instance pilotera l'ensemble des actions de prévention des inondations.

Un an après Xynthia, l'État reste mobilisé. Nous avons progressé dans la connaissance des dangers. Cette double proposition de loi marque une étape essentielle : je remercie ses auteurs. (Applaudissements au centre et à droite)

M. François Fortassin.  - Une fois de plus, le Sénat tire les enseignements du drame qui a durement frappé la France en février 2010, jusque dans des départements éloignés du littoral.

Le bilan humain de la tempête fut dramatique ; les dégâts provoqués sont estimés à 2 milliards d'euros.

Sans stigmatiser quiconque, il apparaît que notre droit ne protégeait pas assez contre le risque de submersion marine. En revanche, la chaîne spontanée de solidarité fut exemplaire.

L'exemple récent du Japon confirme l'ampleur de telles catastrophes.

Nos ancêtres savaient d'expérience quelles zones pouvaient être construites et sur lesquelles il valait mieux s'abstenir.

M. Bruno Retailleau, rapporteur.  - Ils avaient la culture du risque.

M. François Fortassin.  - Aujourd'hui, après une catastrophe, l'urgence est de rétablir l'eau, tous les réseaux de communication et l'électricité. Méfions-nous : le mieux est parfois l'ennemi du bien. Enfouir les lignes électriques n'est pas toujours la solution : le rétablissement du courant peut s'en trouver compliqué.

Bravo à MM. Retailleau et Anziani pour leur conduite admirable de la mission sénatoriale, qui a mené une réflexion approfondie.

À ce jour, la France est mal préparée au risque. Les PPR datent de la loi Barnier de 1995 mais la culture du risque reste embryonnaire.

Cette double proposition de loi est très importante. Mais je souhaite la compléter par une réflexion de bon sens. Trop de dégâts sont provoqués par des chutes d'arbres : ne serait-il pas bon d'éviter la proximité entre lignes électriques et plantations arborées ? (Applaudissements à gauche)

Mme Marie-France Beaufils.  - Nous avons été marqués par les conséquences humaines de Xynthia, mais également impressionnés par les secours.

Le titre de la proposition de loi exprime bien le souhait des membres de la mission.

Nous devrions peut-être définir le risque acceptable, sans oublier l'ampleur des effets dominos. Il est bon d'évoquer les « risques littoraux ».

J'insiste sur l'étude de danger assurée par les services de l'État, avec la participation de tous les acteurs de terrain. (M. Benoist Apparu, secrétaire d'État, exprime son approbation)

Il est ensuite important d'adapter le droit du sol. La responsabilité des collectivités est manifeste, mais cela ne justifie pas le transfert de prérogatives sans financement.

La RGPP a fait fondre les DDE ; les conseils généraux ne peuvent s'y substituer. Les communes se retrouveront donc seules.

Il ne suffit pas de transférer la propriété des digues : sans financement pérenne, rien n'y fera. De même que l'interdiction de construire ne suffit pas à éviter les occupations sans titre.

Je m'interroge sur la majoration de la taxe d'aménagement, jusqu'à 20 %, dans les communes disposant d'un PPR approuvé.

Pour vérifier l'attribution de permis de construire, il faudra revenir sur la RGPP, appliquée de façon aveugle.

J'en viens au régime Catnat. L'article 18 ayant été supprimé par la commission, il faudra préciser la cotisation additionnelle sur les assurances. Jusqu'où pourra-t-on l'augmenter sans alourdir la cotisation des assurés ?

Le régime Catnat doit rester solidaire, mais ne faut-il pas moduler la cotisation perçue en fonction des caractéristiques du bâti ? Cela inciterait les propriétaires à intégrer la culture du risque dès la construction.

Alors que la loi Littoral a déjà subi bien des assauts, la culture du risque est insuffisante partout en France. Une journée nationale ? Pourquoi pas ? Nous proposerons sa coordination au plan international. J'ajoute que trop peu d'élus locaux disposent d'une formation adéquate.

Je regrette, enfin, que les collectivités territoriales soient abusivement sollicitées. Le nouveau fardeau qui leur est imposé pourrait neutraliser trop de disposions utiles du texte, sur lequel nous nous abstiendrons. (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. Jean-Claude Merceron.  - La conjonction de vents violents et de fortes marées a tué 53 résidents dans mon département, quelques semaines avant les 25 décès causés par les inondations dans le Var. Nous pensons aux victimes et à leur familles et nous remercions tous ceux qui leur ont porté secours et ont témoigné de leur solidarité.

Si le risque inhérent à la submersion marine ne peut être conjuré, il nous appartient de travailler à en limiter les effets. Certains ont cherché à fuir leur responsabilité mais il est évident que la responsabilité est partagée.

Certaines mesures d'urgence ont déjà été prises, comme le classement d'habitations en zone noir ou jaune, dite de solidarité. Le texte d'aujourd'hui doit aider à éviter que ne se reproduise pareil désastre.

Je salue la décision du président du Sénat de constituer une mission d'information dès le 10 mars et je remercie son président et son rapporteur d'avoir rédigé en trois mois un rapport qui a inspiré cette double proposition de loi que le groupe de l'Union centriste votera. Bravo pour le plan gouvernemental « submersion rapide » ! L'application de plans de gestion du risque d'inondation permettra un réel progrès par rapport aux PPR.

J'en viens aux digues, dont l'entretien doit être organisé, comme il l'est aux Pays-Bas. La Faute-sur-mer était censément protégée par la digue de l'Aiguillon. Je déplore le morcellement de la propriété des digues entre communes alors qu'elle devrait revenir à l'État. Il faut certes maintenir la gestion de proximité mais il faut éviter que certaines collectivités ne soient tentées de rejeter les opérations coûteuses sur d'autres.

Nous nous félicitons de la mobilisation du fonds Barnier, qui accélèrera les opérations de rénovation, ainsi que de la primauté donnée à la prévention des risques sur le droit de l'urbanisme. Nous savons quelles difficultés auraient rencontrées les préfets pour assurer le respect des prescriptions de précautions dans les zones concernées par le PPR. Les nouveaux pouvoirs qui leur seront attribués sont donc bienvenus.

Il reste que le développement des zones littorales doit être favorisé, dans le cadre des Scot, pour autant que leur mise en valeur se fasse, en cohérence avec le PPR.

Vous l'avez compris : le groupe Union centriste souhaitait la proposition de loi et félicite son rapporteur. Grâce à son texte, rien ne sera comme avant Xynthia. (Applaudissements au centre et à droite)

présidence de Mme Monique Papon,vice-présidente

M. Roland Courteau.  - Les choses doivent bouger ! Voilà un texte d'extrême importance, qui relève un immense défi.

Je rends hommage aux victimes et à leurs familles. Les catastrophes naturelles sont inévitables, mais pas tous les drames qu'elles provoquent. Notre mission d'information a travaillé à les éviter pour l'avenir : je félicite son président et son rapporteur.

Le groupe socialiste soutient les deux propositions de loi, auxquelles il proposera quelques amendements.

Espérons qu'il y aura un avant et un après Xynthia. Notre pays est toujours plus souvent soumis à des inondations, marines ou non.

C'est pourquoi le conseil général de l'Aude, sous l'impulsion de Marcel Raynaud, a engagé une action énergique contre le risque de crues.

Alors que la densité humaine s'accroît sur le littoral, n'oublions pas que le niveau de la mer pourrait s'élever d'un mètre à l'horizon 2100. Ne faudrait-il au moins interdire toute construction nouvelle dans la bande de 100 mètres ?

Nous approuvons l'amendement de M. de Legge, rejeté en commission.

Nul pays n'est à l'abri du risque de tsunami, dont le mécanisme -séisme sous marin, instabilité gravitaire- est très différent des submersions marines que notre pays a connues.

La décennie 2001-2010 a été marquée par le nombre record d'événements climatiques survenus dans le monde et en France. Qu'en sera-t-il de la décennie à venir ?

Pour parer à l'oubli naturel du malheur, il nous revient de rétablir une culture du risque. (M. Bruno Retailleau, rapporteur, approuve)

L'institution d'une journée nationale devrait y contribuer, notamment pour faire connaître les plans communaux de sauvegarde.

Un aléa naturel peut se transformer en désastre, lorsque les plans de prévention sont inexistants ou ignorés.

Nous nous félicitons d'un texte conciliant protection et développement du littoral.

Je m'associe à la demande formulée par les deux auteurs du texte, visant à porter à 40 % la subvention destinée à la consolidation des digues. Combien de temps faudra-t-il pour les conforter, quand parfois le propriétaire en est ignoré, sur 3 000 kilomètres ?

Évitons cependant de créer l'illusion que les digues apporteraient une sécurité absolue : il faut déclarer inondables les zones qui seraient submergées en cas de rupture de digues.

À l'article L. 121-1 du code de l'urbanisme, je propose d'ajouter l'objectif de protéger la vie humaine face aux risques naturels.

Je salue la proposition imposant aux PLU, cartes communales et Scot de respecter les PPR.

Bien sûr, nous approuvons la compensation des pertes de bases subies par certaines communes.

En commission, je m'étais inquiété de la taxe d'équipement, dont le taux pourrait être porté à 20 % dans certains secteurs, pour financer des travaux de voirie ou de réseaux. En effet, la logique de cette taxe exclut les équipements visés par un PPR. Nous proposerons un amendement de suppression.

J'en viens au risque de tsunami. L'impréparation de la France est certaine, avais-je écrit dans mon rapport de décembre 2007, dont certaines préconisations ont été reprises, notamment la création d'un centre de surveillance sur la façade atlantique et en Méditerranée. Reste le cas de l'outre-mer.

En un siècle, seuls 4 % des tsunamis ont eu lieu dans l'océan pacifique. Depuis, 250 000 personnes y ont été tuées en décembre 2004 !

Ne nions pas l'universalité du risque de tsunami ! Comme l'a écrit Thierry Gentet, l'homme ne dominant pas la nature, nous devons rester humbles face aux risques naturels et utiliser toutes nos connaissances pour nous en protéger ! En raison des vies humaines exposées, je ne saurais mieux dire ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Gisèle Gautier.  - Nous ne pouvons évoquer Xynthia sans une pensée émue pour ses victimes. Aujourd'hui, je rends hommage à l'engagement sans faille dont ont fait preuve le président et le rapporteur de la mission d'information.

Déposant votre rapport, vous avez promis de suivre jusqu'au bout l'oeuvre législative prolongeant vos auditions. Puisse votre exemple être suivi !

Je salue l'intervention des services de sécurité, coordonnée par le préfet, qui a été exemplaire; elle a sauvé des vies humaines par centaines.

Les 14 et 15 avril, nous avons constaté sur place un accablement bien compréhensible, mais aussi la colère soulevée par la prétendue évaluation de la dangerosité réalisée unilatéralement par de pseudo-experts venus de Paris.

Les préfets ont dû gérer tout cela... Je ne conteste pas la nécessité d'agir dans l'urgence mais, de grâce, évitons, dans ces situations, d'ajouter le mécontentement à la douleur en peignant de grandes croix noires sur les maisons.

En matière de prévision, il est indispensable d'intégrer la prévention de la submersion marine dans le code de l'environnement. Idem pour l'institution de systèmes d'alerte. Il serait bon d'instituer une gradation de l'alerte. Je sais que c'est difficile, on l'a vu en 2003 avec la canicule. Mais il faut éviter toute confusion des messages dans des situations qui exigent le plus grand sang-froid. Et n'oublions pas l'équipement : un responsable de sapeurs-pompiers nous a dit ne pas avoir disposé d'un système de communication satellitaire au moment crucial. C'est invraisemblable ! Il faut que les moyens soient là !

La prévention touche aussi à l'urbanisation. Tout le monde est concerné, des maires à tous ceux qui influencent les décisions municipales. Aux yeux des riverains, les digues auraient dû servir de remparts naturels. Or nous constatons que bien des interrogations persistent depuis leur statut jusqu'à leur financement. Pourquoi la proposition de loi est-elle muette sur ce sujet ?

M. Bruno Retailleau, rapporteur.  - Le Gouvernement a lancé un plan « Submersion rapide », doté de 500 millions.

Mme Gisèle Gautier.  - L'essentiel est de voter un texte efficace, qui prépare l'avenir, car d'autres catastrophes se produiront ailleurs. Sachons nous doter de tous les moyens pour éviter le pire. Dans cette chaîne des moyens, la culture du risque est sans nul doute le premier maillon. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Éric Doligé.  - Je veux dire toute ma sympathie aux victimes des drames que nous avons connus. Leur prévention insuffisante -il est ici davantage question d'urbanisme que d'inondation- justifie la directive européenne qui tend à éviter des pertes de vie humaine et des déplacements de populations, sans compromettre le développement économique.

Nous ne pouvons plus faire comme si nous ne savions pas. Il faut profiter de toutes les opérations d'aménagement pour améliorer la sécurité des générations à venir. La mise en oeuvre de la directive doit être l'occasion de changer notre regard.

La proposition de loi de M. Retailleau, exercice d'autant plus difficile que Xynthia a conduit, une fois encore, à mener en parallèle trois missions et non pas une seule, aborde des sujets encore en pleine réflexion. Je citerai la réglementation sur les digues ou la doctrine de l'État en matière de PPR. Le Cepri, que j'ai créé pour faire entendre la voix des collectivités territoriales, a été auditionné par les trois missions ; pour lui, c'est l'aménagement du territoire qui joue le rôle majeur. Une inondation, ce n'est pas tant un débordement qu'un territoire qui est atteint dans sa population et son outil économique. Xynthia et la Dracénie montrent qu'anticiper est vital et s'adapter, capital. L'élu est au premier plan. Je salue le travail de M. de Legge, qui a su affiner les dispositifs proposés. Il n'était pas juste de donner aux maires une responsabilité qui revient à l'État ; il fallait aussi revoir la notion de « zone littorale homogène ». Voilà qui montre que la richesse de nos débats a su faire évoluer le texte.

Les digues et ouvrages de protection -8 600 kilomètres au total- sont un sujet de préoccupation majeur, sur lequel nous travaillons depuis cinq ans. Trop de kilomètres de digues dépendent d'un trop grand nombre de gestionnaires, ou de gestionnaires mal identifiés. Une telle situation appelle un « plan Marshall » -300 à 400 millions par an sur quinze à vingt cinq ans- qui nécessite un état des lieux précis et une programmation. Quelles sont les intentions du Gouvernement ? Où en est-on pour cette année ?

Plusieurs millions de nos concitoyens et un potentiel économique majeur sont à l'abri derrière ces ouvrages. Un mauvais entretien peut être fatal. Le débat reste ouvert sur la propriété et la responsabilité des ouvrages -un EPA rassemblant les propriétaires pourrait être une solution-, sur la définition juridique de ceux-ci, sur le savoir-faire à reconstituer -il faut organiser des filières professionnelles-, sur le financement. S'agissant de ce dernier point, l'augmentation du taux de la taxe d'aménagement m'apparaît prématurée.

Bien des dispositions de la proposition de loi sont bienvenues. Le schéma départemental a été à juste titre supprimé ; la prise en compte des risques technologiques est en effet essentielle ; il est heureux que les contraintes pesant sur les conseils généraux aient été allégées. Je m'interroge encore sur la compensation des pertes de bases.

Sur les projets d'urbanisme pilote, je pourrais, monsieur le ministre, vous rappeler d'utiles exemples dans mon département... Et je note que onze des treize éco-cités vont être développées en zone inondable...

Je vous incite également à engager un débat sur deux conclusions essentielles de notre groupe de travail : l'impératif de définition juridique des digues et celui de leur financement durable, par la solidarité locale comme nationale. (Applaudissements à droite)

La séance est suspendue à 16 h 45.

*

* *

présidence de M. Gérard Larcher

La séance reprend à 17 heures.

Hommage aux victimes de l'attentat de Marrakech

M. le président.  - M. le président de la République se rendra à 18 heures au Pavillon d'honneur de l'aéroport d'Orly afin de rendre hommage aux victimes françaises décédées lors de l'attentat de Marrakech, le 28 avril.

Il sera accompagné de M. Alain Juppé, ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes, qui devra donc quitter notre assemblée au cours de la séance de questions cribles thématiques et sera remplacé par M. Henri de Raincourt, ministre chargé de la coopération.

M. Roger Romani, vice-président, représentera le Sénat à cette cérémonie.

Au nom du Sénat tout entier, je tiens à condamner ce lâche attentat et à témoigner de notre sympathie et de notre compassion aux familles des victimes.

Questions cribles thématiques (La France et l'évolution de la situation politique dans le monde arabe)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions cribles thématiques sur « la France et l'évolution de la situation politique dans le monde arabe ».

Mme Nathalie Goulet.  - Notre politique arabe dépend pour beaucoup de la qualité de notre personnel en poste. À l'aune des événements du printemps arabe, me disait une proche collaboratrice de Mme Clinton, il faut revoir nos modalités de recrutement. En matière culturelle et de coopération, nous avons bien des progrès à faire ; dans certain pays du Golfe, notre attaché de presse ne parle ni l'arabe ni l'anglais... Comment entendez-vous mettre fin à ces erreurs de casting ?

M. Alain Juppé, ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes.  - Je ne suis pas sûr que les capacités linguistiques de nos collègues américains soient aussi parfaites... sauf pour l'anglais. Nous nous efforçons d'adapter les profils aux postes en tenant compte de critères linguistiques. Je souhaite vous rendre attentif au fait qu'un tiers des agents titulaires du ministère change chaque année d'affectation. En majorité, les titulaires dans le Golfe sont arabisants ; c'est notamment le cas des principaux responsables de nos ambassades en Arabie saoudite, au Koweït ou au Qatar.

Nous travaillons à développer la formation linguistique des diplomates. En outre, la RGPP, qui réduit considérablement nos moyens, nous incite à nous tourner vers les recrutés locaux, souvent bilingues.

Mme Nathalie Goulet.  - La collaboratrice de Mme Clinton reconnaissait que les États-Unis avaient eux aussi des efforts à faire...

M. Aymeri de Montesquiou.  - Bien des certitudes ont été balayées par le printemps arabe. Nous percevons mal l'hétérogénéité des situations sous l'unité religieuse. Certains aspirent à un État laïc, mais la religion reste le socle de ces sociétés. Ne cédons cependant pas à l'arrogance, et ne considérons pas que ces pays ne sont pas mûrs pour la démocratie. Si les fondamentalistes remportent les élections, les reconnaîtrons-nous ?

L'UPM est plus un espoir qu'une réalité. Que comptons-nous entreprendre ? Selon quel calendrier ? La Ligue arabe peut-elle devenir dans ce cadre un partenaire privilégié ?

Si Israël n'est pas accepté par les peuples arabes, c'est en raison de l'extrême violence exercée contre les Palestiniens depuis sa création. Son existence est un fait, sa sécurité doit être garantie ; mais la communauté internationale ne peut admettre de ce pays ce qu'elle interdit à d'autres. Les résolutions des Nations Unies doivent être appliquées. La France est-elle prête à tout faire à l'ONU pour qu'un État palestinien soit reconnu dans ses frontières de 1967 ? Et si Israël ne cède pas, peut-on imaginer des sanctions ?

M. Alain Juppé, ministre d'État.  - Le printemps arabe est une chance. Il ne faut pas craindre de voir les peuples se lever pour la démocratie, les droits de l'homme et ceux de la femme. Nous devons nous engager à leur côté sans hésitation.

Il faut être cohérent et ne pas faire deux poids et deux mesures. On nous reproche une attitude « indulgente » envers la Syrie. Notre condamnation des violences contre les populations est pourtant très claire. Ce qui est clair aussi, c'est qu'il n'y a pas consensus au sein du Conseil de sécurité.

Il faut être ouvert au dialogue avec les islamistes qui récusent la violence et s'engagent dans un processus démocratique. Pour que la transition démocratique réussisse en Tunisie ou en Égypte, il faut une aide économique massive. Nous y travaillons, y compris en relançant l'UPM.

Il nous faut exercer, enfin, tout notre talent pour rétablir le dialogue entre Israël et les Palestiniens. Le statu quo n'est pas possible.

M. Aymeri de Montesquiou.  - Je partage votre optimisme : il faut faire confiance au printemps arabe, tout en demandant à Israël de respecter le droit international.

M. André Trillard.  - De Tunis au Caire, de Misrata à Sanaa, les peuples écrivent une nouvelle page de leur histoire.

En tant que président du groupe France-Libye, je me suis dès les premiers morts exprimé. La résolution 1973 donne depuis tous les moyens pour protéger les populations civiles. Je salue l'action du président de la République qui a su appeler chacun à ses responsabilités.

Combien de morts si nous n'étions intervenus ? Certains craignent l'enlisement, un autre Afghanistan. Le chemin sera long, la liberté a besoin de temps pour l'emporter. Quelle sera la politique de la France vis-à-vis du Conseil national de transition et du peuple libyen pour l'accompagner vers la démocratie, aspiration profonde symboliquement illustrée par l'appel historique, ce dimanche, des 61 tribus à l'unité ?

M. Alain Juppé, ministre d'État.  - Voilà quelques semaines, Kadhafi annonçait son intention de s'emparer de Benghazi et de s'y venger sur la population civile. Nous avons fait notre devoir pour empêcher un massacre. Aujourd'hui, Kadhafi est discrédité, l'Union européenne, les États-Unis, la Ligue arable, une grande partie des pays de l'Union africaine en conviennent.

Pour aider le pays à s'acheminer vers la démocratie, nous agissons d'abord sur le plan militaire -le seul langage que comprend Kadhafi-, d'où l'intensification des frappes dans le respect de la résolution 1973 ; ensuite, en accentuant les sanctions. Mais seul le dialogue politique parviendra à mener le pays à la paix ; nous travaillons à un vrai cessez-le-feu. Le groupe de contact de jeudi, à Rome, réfléchira à un mécanisme d'aide financière au Conseil de transition et aux moyens d'ouvrir la voie d'un dialogue national.

M. André Trillard.  - Il est d'autres voies que l'alternative entre tyrannie laïque et islamisme. À nous de comprendre les formes diverses que prendra la marche vers la démocratie.

M. Jean-Louis Carrère.  - La disparition d'Oussama ben Laden marque un tournant. Le Sénat doit maintenant traiter de la question de la participation de notre pays à la guerre en Afghanistan.

Les peuples arables marchent vers la démocratie ; le Maroc et l'Algérie ne resteront pas en marge. Nous avons soutenu l'intervention juste et légitime en Libye, mais nous craignons une escalade, sinon l'enlisement. La révolte des populations arabes a de profondes racines sociales. Comment croiront-elles à notre générosité si on leur claque la porte au nez ? Solidaires à Benghazi, pas à Paris... A l'inacceptable posture du ministre de l'intérieur je préfère vos propos, monsieur le ministre d'État. Sachons jouer notre rôle, soyons fidèles à nos valeurs de liberté, de générosité, de respect des droits de l'homme. D'où ma question : quelle est notre politique ?

M. Alain Juppé, ministre d'État.  - La disparition de ben Laden porte bien des conséquences positives. Mais je ne crois pas le moment venu d'un retrait d'Afghanistan, les réseaux terroristes n'y ont pas disparu.

Oui, notre politique doit s'adapter aux circonstances. Au Yémen, les choses évoluent ; au Maroc, je fais confiance aux initiatives du roi. Quant au problème des migrants... Nous avons établi un pont aérien et maritime pour aider les Égyptiens de Lybie à revenir dans leur pays. Nos partenaires tunisiens comprennent que les flux d'immigration irrégulière sont un fléau pour eux, pour nous, pour les intéressés eux-mêmes. Ils ont accepté, avec le concours de l'Union européenne, de mieux contrôler leur frontière et de réadmettre sur leur sol des personnes qui ne sont pas victimes de persécutions. Il y a 50 000 demandeurs d'asile en France, cinq fois plus qu'en Italie ; nous l'avons fait valoir auprès des Italiens.

Vous trouvez les propos de M. Guéant choquants, je ne suis pas de cet avis ; nous avons d'ailleurs été entendus par Bruxelles. Nous savons tous que la vraie solution est dans la réduction des inégalités, pour permettre aux jeunes de rester au pays dans la liberté et le progrès. (Applaudissements à droite)

M. Jean-Louis Carrère.  - Je n'avais pas la naïveté de vous entendre dire votre opposition à M. Guéant. Mais je vous demande de rester sur votre ligne, plus prometteuse pour l'image de la France.

M. Robert Hue.  - L'événement que constitue la mort de ben Laden mériterait un débat parlementaire, que mon groupe sollicite. Elle doit conduire à retirer d'Afghanistan nos troupes et celles de l'Otan.

Lors de votre déplacement à Tunis, vous avez annoncé 350 millions d'aide bilatérale. Mais la situation socio-économique catastrophique associée au poids de la dette extérieure et à la prédation du clan ben Ali compromettent la relance économique : à quand un moratoire sur sa dette envers l'Europe ?

Quid de la réactivation de l'accord de 2008 pour apporter une solution à l'afflux des migrants ?

M. Alain Juppé, ministre d'État.  - En Tunisie, j'ai reçu un accueil de qualité, de la part des autorités mais aussi dans la rue. La France n'y est pas conspuée, pas plus qu'elle ne l'est par les blogueurs.

Le processus politique est en route, la commission électorale à l'oeuvre ; les élections à la constituante auront lieu le 24 juillet. Mais le défi économique est considérable, tandis que les attentes sociales sont très fortes. Notre aide est bilatérale mais aussi européenne, et nous attendons beaucoup du G8 pour mettre en place un plan d'actions en direction de la Tunisie et de l'Égypte.

Pour les migrants, M. Guéant continue de travailler avec les autorités tunisiennes. Nous nous orientons vers un renforcement des contrôles aux frontières sur place et travaillons à un accord de réadmission.

M. Robert Hue.  - En Tunisie, ce n'est pas le drapeau qui a été mis en cause, mais les relations détestables du clan Ben Ali avec certain personnel politique hexagonal...

Je souhaite, sur les migrants, que l'on progresse vers un accord, indispensable à la démocratie.

M. Bernard Fournier.  - 2011 restera une année historique pour le Maghreb ; une évolution au prix du sang, mais porteuse d'espoir.

La population n'accepte aucune concession envers les anciens responsables du régime abattu. Que fera la France pour assister la Tunisie qui peine à stabiliser son gouvernement ? Le pays ne doit plus dépendre uniquement du tourisme de masse. Les jeunes Tunisiens sont diplômés, mais au chômage.

Un prêt bilatéral de 350 millions d'euros a été annoncé. M. Juppé s'est entretenu avec plusieurs ministres tunisiens ; une vision globale est en effet nécessaire pour relancer l'économie du pays.

Quel est le calendrier arrêté pour l'utilisation des crédits ?

M. Henri de Raincourt, ministre auprès du ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes, chargé de la coopération.  - L'instabilité gouvernementale de la Tunisie est une réalité. Le ministre d'État s'est rendu dans ce pays, où il a rencontré le président de la République, le Premier ministre et plusieurs membres du Gouvernement.

Tous les ministres que j'ai rencontrés sont d'anciens responsables économiques qui se sont mis au service de leur pays en cette période difficile. La France n'hésite pas à aider substantiellement nos amis tunisiens à repartir du bon pied. Dans cet esprit, nous travaillons sur les plans diplomatique, économique et financier.

L'avenir de la Tunisie incite à l'optimisme car il appartient aux Tunisiens.

M. Bernard Fournier.  - Merci de ces précisions.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga.  - Le président Sarkozy a commis l'erreur de donner une respectabilité internationale aux pires dictateurs arabes. Dois-je rappeler les innombrables missions de M. Guéant à Damas ? Les accords secrets pris avec la Syrie influencent-ils notre politique arabe ?

Aujourd'hui, apparemment, la politique française a changé du tout au tout. Nous approuvons totalement la vote de la résolution de l'ONU sur la répression en Syrie ; mais face à une répression qui s'apparente à des actes de guerre, la France doit aller au-delà : le Gouvernement entend-il prendre des sanctions contre le président Assad, son entourage et les responsables de la répression ? Quelles sanctions défendrez-vous lors de la prochaine réunion du Conseil de sécurité de l'ONU?

M. Henri de Raincourt, ministre.  - La situation a changé, ce qui justifie que la position du Gouvernement soit différente. Quand on s'efforce, modestement, de créer un environnement favorable à la paix dans le Proche-Orient, je vois mal comment on peut éviter de discuter avec la Syrie...

L'action diplomatique que vous dénoncez était indispensable. (M. Robert del Picchia approuve)

Aujourd'hui, la France condamne solennellement les violences et les exactions commises en Syrie. Nous avons convoqué l'ambassadeur de Syrie à Paris ; nous combattons la candidature de la Syrie au Comité des droits de l'homme de l'ONU.

Sur le plan communautaire, des sanctions sont à l'étude. Le Gouvernement français exprime, à propos de la Syrie, l'appui au printemps des peuples pour la liberté ! (Applaudissements à droite)

Mme Monique Cerisier-ben Guiga.  - Il faut passer aux actes, en gelant les biens des responsables de la répression, en mettant fin à la diplomatie de connivence et en demandant la comparution de Bachar el-Assad devant la CPI. (Applaudissements à gauche)

M. Jean-Louis Carrère.  - Très bien !

La séance est suspendue à 17 h 40.

*

*          *

présidence de Mme Monique Papon

La séance reprend à 18 heures.

Risque de submersion marine (Suite)

Mme la présidente.  - Nous reprenons la discussion de la proposition de loi tendant à assurer une gestion effective du risque de submersion marine.

Discussion générale (Suite)

Mme Nicole Bonnefoy.  - Un an après la tempête Xynthia, les plaies ne sont pas encore cicatrisées.

L'accélération des catastrophes naturelles impose de revoir notre politique en ce domaine. Leur coût total avoisinerait les 30 milliards d'euros depuis 2001.

Selon l'adage, c'est de nos échecs que nous apprenons le plus. Nous devons donc faire preuve d'humilité : même armés des technologies les plus avancées, nous ne dominons pas la nature.

Les textes d'aujourd'hui prolongent la réflexion engagée par la commission sénatoriale. Sur place, nous avons constaté l'ampleur des dégâts, avant de découvrir avec stupéfaction combien l'urbanisme faisait fi des risques encourus. Au moins, la tempête Xynthia aura mis au jour les défaillances.

Outre une modification législative, nous devons réussir une révolution dans la prise en compte de risques naturels.

M. Bruno Retailleau, rapporteur.  - Absolument.

Mme Nicole Bonnefoy.  - La responsabilité est collective ; je regrette que certains aient rejeté la faute sur les élus locaux, occultant la responsabilité de l'État et de l'administration. Si faute exclusive il devait y avoir, ce serait celle du diktat de l'argent et de la pression foncière, conduisant à des décisions précipitées suivies, après la catastrophe, d'improvisations tout aussi regrettables, comme celle qui a conduit, dans un premier temps, à la définition de « zones noires ».

Comme législateurs, nous devons mettre en place une politique d'anticipation.

Grâce à la proposition de loi, aménagement du territoire et gestion du risque ne seront plus disjoints. Sur 900 communes du littoral, seules 5 % disposaient d'un PPR ! Désormais, leurs prescriptions s'imposeront aux PLU. Je me félicite de l'appui apporté aux maires par l'administration d'État.

Le deuxième objectif du texte consiste à sensibiliser le public, grâce notamment à une journée nationale. D'autre part, les préfets communiquent tous les trois ans aux maires la liste des dangers menaçant les communes.

Pour avancer dans la bonne voie, nous avons besoin d'une conscience du risque.

Sans mettre en cause l'esprit du texte, les amendements de notre groupe tendent à l'améliorer, pour aboutir à un vote unanime. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

La discussion générale est close.

Discussion des articles

Article premier

Mme la présidente.  - Amendement n°11, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste.

Alinéa 4

Compléter cet alinéa par les mots :

ainsi que leurs effets cumulés

M. Roland Courteau.  - Cet article propose que les PPRI des communes littorales traitent simultanément mais de façon spécifique les risques de crues et les risques littoraux, dont les submersions marines.

Les auteurs de cet amendement estiment qu'il est nécessaire que ces plans traitent aussi les effets cumulés de ces risques d'inondation dans les communes littorales.

En effet, la conjonction d'une crue fluviale et d'un niveau de la mer exceptionnellement élevé en raison de forts coefficients de marée ou de tempête peut provoquer une inondation bien plus importante que prévu.

Il importe de croiser les données pour les communes d'estuaire, car les eaux de crue pourraient être repoussées loin dans les terres.

L'amendement n°11, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°12 rectifié, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste.

Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

M. Roland Courteau.  - La commission propose de renvoyer l'entretien des digues « à un décret », sans autre précision. Les derniers alinéas de l'article L. 562 du code de l'environnement sur les PPRNM prévoient que des décrets en Conseil d'État devront définir en tant que de besoin les modalités de qualification des aléas et des risques, les règles générales d'interdiction, de limitation et d'encadrement des constructions, de prescriptions de travaux de réduction de la vulnérabilité ainsi que d'information des populations, dans les zones exposées aux risques définies par les PPRNM. Un autre décret serait donc nécessaire.

Les auteurs de cet amendement estiment que la prise en compte de ces ouvrages risque de conforter l'illusion de sécurité créée par les digues et limiter la culture du risque.

Nous proposons d'entériner le principe dit de « transparence des digues » conduisant à considérer comme inondables les surfaces qui seraient atteintes par les eaux si les digues venaient à être rompues ou submergées.

M. Bruno Retailleau, rapporteur.  - La première rédaction n'était guère compatible avec la directive européenne. La version rectifiée que vous présentez aujourd'hui est pertinente.

L'amendement n°12 rectifié, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article premier modifié est adopté.

L'article 2 est adopté.

Article additionnel

Mme la présidente.  - Amendement n°26, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste.

Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le chapitre VI du titre VI du livre V du code de l'environnement, il est inséré une division ainsi rédigée :

« Chapitre VII

« Alerte aux tsunamis

« Art. L. 567-1.  -  L'organisation de la surveillance, de l'alerte et de la transmission de l'information sur les tsunamis est assurée par l'État et fait l'objet de règlements arrêtés par le préfet.

« Art L. 567-2.  -  Un décret en Conseil d'État précise les modalités de mise en oeuvre du présent chapitre. »

M. Roland Courteau.  - La France a pris conscience du risque de tsunami après celui qui a frappé Sumatra en décembre 2004.

Ce risque est universel sur le globe : au XXe siècle, 76 % des tsunamis ont eu lieu dans le Pacifique, 10 % en Méditerranée, 10 % en Atlantique et 4 % dans l'océan Indien. Pour la Méditerranée, 10 %, cela représente 80 tsunamis, dont celui de Messine, en 1908, qui fit 35 000 victimes !

On a longtemps cru que l'océan Indien était quasiment sûr. On sait ce qu'il en est ! En Méditerranée, c'est bien un tsunami qui a détruit, jadis, Alexandrie.

Bien des drames ont, de par le monde, cette cause identique.

L'article 44 de la loi du 3 août 2004 a créé un centre d'alerte au tsunami couvrant la zone allant des Açores à la Sicile.

J'insiste sur la différence entre la cause des tsunamis et celle des submersions marines. Le déroulement du phénomène lui-même est radicalement distinct. Surtout, les tsunamis ne sont pas prévisibles.

M. Bruno Retailleau, rapporteur.  - Comment s'opposer à ce tsunami d'arguments? (Sourires)

L'amendement est cohérent avec votre rapport rédigé pour l'Office parlementaire des choix scientifiques : avis favorable.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - Même avis ; nous en sommes à 100 % d'amendements adoptés ! (Rires et exclamations)

L'amendement n°26 est adopté et devient un article additionnel.

Article 3

Mme la présidente.  - Amendement n°24, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste.

Après l'alinéa 6

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...) Au début du dixième alinéa, il est inséré une phrase ainsi rédigée :

« Il retrace l'organisation de la chaîne d'alerte et d'intervention en cas d'occurrence d'un risque d'inondation ou d'un risque de tsunami, grâce, dans ce dernier cas au centre d'alerte aux tsunamis. » ;

M. Roland Courteau.  - Le dixième alinéa de l'article L. 566-7 du code de l'environnement sur les plans de gestion des risques d'inondation dispose que les plans Orsec soient intégrés dans les PGRI. Il convient toutefois que les PGRI retracent l'organisation de la chaîne d'alerte et d'intervention en cas d'occurrence d'un risque d'inondation ou d'un risque tsunami. Dans le cas d'un tsunami, le centre national d'alerte, qui devrait être mis en place en juillet 2012, devra être sollicité.

M. Bruno Retailleau, rapporteur.  - L'amendement me semble satisfait, puisque les plans Orsec s'appliquent à toute inondation. Retrait ou rejet.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - L'amendement est effectivement satisfait. Retrait, pour en rester à 100 %... (Sourires)

M. Roland Courteau.  - Le tsunami est un phénomène très particulier, qui ne peut se confondre avec une inondation : il se caractérise par un retrait de la mer, suivi d'une vague dévastatrice, puis d'une forte aspiration vers le large.

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Il a raison, c'est évident.

L'amendement n°24 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°13, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste.

Alinéa 8, première phrase

1° Remplacer le mot :

trois

par le mot :

deux

2° Après le mot :

fonctionnement

insérer les mots :

et de l'état

M. Roland Courteau.  - L'évaluation globale des ouvrages de défense contre les inondations et les submersions devrait avoir lieu tous les deux et non tous les trois ans.

L'érosion est permanente ; des événements fortuits peuvent l'accélérer, sans parler des dégâts des animaux : ne minimisons pas les risques. Il faut également prendre en compte la vétusté de l'ouvrage.

M. Bruno Retailleau, rapporteur.  - Favorable.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - Le Gouvernement est défavorable à la première partie de l'amendement : trois ans est un délai raisonnable. D'autant qu'il existe déjà un contrôle annuel des ouvrages les plus importants. Je suis, en revanche, favorable à la deuxième partie de l'amendement. Acceptez-vous de le rectifier ?

M. Roland Courteau.  - Je maintiens l'amendement, accepté en l'état par la commission.

Mme la présidente.  - Nous procéderons à un vote par division.

Le 1° de l'amendement est adopté, ainsi que le 2° ; l'amendement n°13 est adopté.

L'article 3, modifié, est adopté.

Article additionnel

Mme la présidente.  - Amendement n°27, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste.

Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Au quatrième alinéa (2°) de l'article L. 122-3 du code de l'environnement, après les mots : « effets du projet sur l'environnement », sont insérés les mots : « , sur la gestion des risques naturels majeurs ».

II. - Au cinquième alinéa (3°) de l'article L. 566-7 du code de l'environnement, après les mots : « cohérence du territoire », sont insérés les mots : « et des projets d'infrastructures de transport ».

M. Roland Courteau.  - Ce texte répond à l'objectif de mise en cohérence des choix d'urbanisation avec la gestion des risques d'inondation, notamment de submersion marine. Toutefois, cette mise en cohérence devrait également viser les projets d'infrastructures de transport car des ouvrages et remblais pour des lignes à grande vitesse réalisés dans des zones inondables peuvent, par exemple, empêcher le libre écoulement des eaux.

L'étude d'impact environnemental doit porter sur l'environnement ou la santé humaine, mais aussi sur la gestion des risques naturels majeurs.

De même, dans le cadre des PGRI, les dispositions permettant de réduire la vulnérabilité des territoires face aux risques d'inondation doivent comprendre des mesures assurant la cohérence des projets d'infrastructures avec la gestion du risque d'inondation.

M. Bruno Retailleau, rapporteur.  - Sagesse. Sur de grandes infrastructures, il est logique de prendre en compte les effets des obstacles que constituent les routes ou les foies ferrées. Mais peut-être les dispositions de la loi sur l'eau y pourvoient ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - L'impact environnemental est déjà pris en compte. En revanche, le Gouvernement est favorable au II.

Mme la présidente.  - Je vais procéder à un vote par division.

Le I de l'amendement est adopté, ainsi que son II ; l'amendement n°27 est adopté et devient un article additionnel.

L'article 4 est adopté

Article 5

Mme la présidente.  - Amendement n°29, présenté par M. de Legge, au nom de la commission des lois.

I. - Alinéa 8

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 123-1-10-1. - Dans un délai de six mois à compter de l'approbation du plan de prévention des risques naturels prévisibles visé à l'article L. 562-1 du code de l'environnement ou du plan de prévention des risques technologiques visé à l'article L. 515-15 du même code, l'établissement public de coopération intercommunale ou la commune fait connaître au préfet si il ou elle entend réviser ou modifier son plan local d'urbanisme afin de supprimer les dispositions contraires aux prescriptions des plans susvisés.

« À défaut de réponse dans ce délai ou en cas de désaccord entre le préfet et l'établissement public de coopération intercommunale ou la commune, le préfet peut engager et approuver, après avis de l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale ou du conseil municipal, la révision ou la modification du plan local d'urbanisme. Il en est de même si l'intention exprimée par l'établissement public de coopération intercommunale ou la commune de procéder à la suppression des dispositions contraires aux prescriptions d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles ou d'un plan de prévention des risques technologiques n'est pas suivie, dans un délai d'un an à compter de l'approbation des plans précités, de la modification ou de la révision du plan local d'urbanisme. » ;

II. - Alinéa 15

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 124-2-1. - Dans un délai de six mois à compter de l'approbation du plan de prévention des risques naturels prévisibles visé à l'article L. 562-1 du code de l'environnement ou du plan de prévention des risques technologiques visé à l'article L. 515-15 du même code, la commune fait connaître au préfet si elle entend modifier sa carte communale afin de supprimer les dispositions contraires aux prescriptions des plans susvisés.

« À défaut de réponse dans ce délai ou en cas de désaccord entre le préfet et la commune, le préfet peut engager et approuver, après avis du conseil municipal, la modification de la carte communale. Il en est de même si l'intention exprimée par la commune de procéder à la suppression des dispositions contraires aux prescriptions d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles ou d'un plan de prévention des risques technologiques n'est pas suivie, dans un délai d'un an à compter de l'approbation des plans précités, de la modification de la carte communale. »

III. - Alinéa 16

Après les mots :

présente loi,

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

les délais mentionnés aux paragraphes I et II courent à compter de cette entrée en vigueur.

M. Dominique de Legge, rapporteur pour avis.  - Nous voulons tous que le PPR et le PLU soient cohérents. Nous nous sommes ralliés à la position de la commission de l'économie, mais le texte prévoit un délai d'un an avant l'intervention du préfet. Pour replacer le gestionnaire au coeur du dispositif, il est souhaitable que l'autorité en charge de la gestion des sols prenne position afin de permettre au préfet de se déterminer plus tôt.

Mme la présidente.  - Amendement n°14, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste.

Alinéa 16

Après les mots :

paragraphes I et II

insérer les mots :

est réduit à six mois et

Mme Nicole Bonnefoy.  - L'expertise est au coeur de ce texte. La culture du risque fait défaut en France. L'inondation n'est envisagée que sous l'angle des crues. Même quand les PPRI existent, ils restent peu efficaces, puisqu'ils ne conduisent pas à réviser les documents d'urbanisme : il faut mettre fin à la dualité entre droit de l'urbanisme et droit de l'environnement.

Le délai de mise en conformité ici prévu dans une procédure simplifiée doit être réduit de un an à six mois.

M. Bruno Retailleau, rapporteur.  - Avis de sagesse sur l'amendement de la commission des lois ; défavorable à l'amendement n°14 : évitons, par souci de simplification, d'introduire des délais multiples.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - Un PPRI est déjà opposable au PLU.

Le délai de mise en conformité du PLU peut être de six mois, uniquement si l'on est en modification simplifiée.

M. Bruno Retailleau, rapporteur.  - C'est ce que nous proposons.

Certes, le PPRI est opposable, mais l'expérience montre qu'il ne suffit pas de l'annexer au PLU : il faut faire coïncider les cartes.

L'amendement n°29 est adopté.

Par conséquent, l'amendement n°14 n'a plus d'objet.

L'article 5, modifié, est adopté.

Articles additionnels

Mme la présidente.  - Amendement n°15 rectifié, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste.

Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de l'urbanisme est ainsi modifié :

1° Après le premier alinéa de l'article L. 146-2, il est inséré un alinéa ainsi rédigé : 

« - de la prévention des risques naturels ; »

2° L'article L. 146-4 est ainsi modifié : 

a) La seconde phrase du deuxième alinéa du I est complétée par les mots : « ou à aggraver l'exposition des populations aux risques naturels » ; 

b) Au dernière alinéa du III, après les mots : « lorsque des motifs liés », sont insérés les mots : « à la prévention des risques naturels, ».

M. Roland Courteau.  - Il s'agit ici de permettre l'utilisation des outils prévus par la loi Littoral dans une optique de prévention des risques naturels.

Ainsi, les capacités d'accueil des espaces urbanisés ou à urbaniser seront définies non seulement en fonction des objectifs actuellement fixés par le code -comme la garantie du libre accès au rivage pour le public ou la préservation des espaces naturels et fragiles- mais aussi en fonction de l'intensité et des caractéristiques des risques naturels. L'extension de l'urbanisation pourra être prohibée dans les zones à risque ; la « bande de 100 mètres » pourra être étendue par le PLU pour limiter l'exposition des populations aux risques naturels.

M. de Legge avait porté cette position, sans succès, devant la commission de l'économie. Je reviens à la charge.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°30, présenté par M. de Legge, au nom de la commission des lois.

M. Dominique de Legge, rapporteur pour avis.  - Nous voulons assurer la concordance aussi parfaite que possible. À cet égard, la loi Littoral pourrait participer à l'oeuvre de protection des personnes, bien qu'elle porte sur d'autres problématiques.

J'attends du rapporteur qu'il me convainque du contraire.

M. Bruno Retailleau, rapporteur.  - La loi Littoral est source d'une grande insécurité juridique, eu égard à la variété territoriale des jurisprudences s'agissant des notions d'« espace remarquable » ou d'« espace proche du rivage ».

Dans son rapport sur la loi Littoral, M. Gélard...

M. Dominique de Legge, rapporteur pour avis.  - Qui a voté l'amendement !

M. Bruno Retailleau, rapporteur.  - ...soulignait combien cette loi était source de contentieux. Évitons d'ouvrir la boîte de Pandore, sans améliorer la sécurité des personnes.

Les dispositions que nous avons prises dotent les maires de tous les outils nécessaires.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - L'avis du Gouvernement est très défavorable.

La loi Littoral est complexe, tantôt décriée, tantôt adulée, et donne lieu à des débats homériques entre les partisans de son renforcement et ses détracteurs.

Le Gouvernement ne souhaite pas que l'on y touche. La possibilité d'étendre la bande des 100 mètres ouvrirait un champ considérable aux PLU, au risque de susciter un lourd contentieux.

M. Dominique de Legge, rapporteur pour avis.  - Le débat devait avoir lieu. Si les arguments ne m'ont pas totalement convaincu, il semble que faire référence à la loi Littoral dans un texte consensuel ne serait pas de bonne politique.

L'amendement n°30 est retiré.

M. Roland Courteau.  - On préserverait les espaces naturels fragiles sans prendre en compte les zones à risque du littoral ?

L'amendement n°15 rectifié n'est pas adopté.

M. Roland Courteau.  - Tant pis pour la sécurité !

L'article 5 bis est adopté.

Article 6

Mme la présidente.  - Amendement n°16, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste.

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Cette communication est réalisée sans délai dans les cas de modifications significatives de ces risques naturels.

M. Roland Courteau.  - Le rapport de la mission interministérielle a rappelé qu'en l'absence de PPR tout dépend de la façon dont les risques sont portés à la connaissance des élus. Si prévoir une transmission annuelle était excessif, il nous semble bon d'inscrire que les documents pertinents doivent être transmis sans délai. C'est le rôle naturel du préfet ? ça ira mieux en l'écrivant.

M. Bruno Retailleau, rapporteur.  - Précision utile.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - Avis défavorable. Il est de la compétence naturelle du préfet de signaler les risques aux élus. Dans le souci d'alléger la loi, je vous demande de retirer l'amendement.

M. Alain Anziani.  - On a connu bien des exemples de défaut d'information, ou d'information lacunaire.

Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement... dans la loi. Ceci afin de s'assurer de l'unité, dans les départements, de la parole de l'État.

M. Éric Doligé.  - Les préfets ont obligation de porter à connaissance tout fait nouveau. Évitons d'alourdir le texte, déjà que l'article me paraît superfétatoire...

M. Roland Courteau.  - Cela irait donc sans l'écrire ? Forts de notre expérience, nous considérons le contraire.

L'amendement n°16 est adopté.

L'article 6, modifié, est adopté.

Article 6 bis

Mme la présidente.  - Amendement n°7, présenté par Mme Beaufils et les membres du groupe CRC-SPG.

I. - Alinéa 2

Remplacer les mots :

du 5°

par les mots :

du 1° et du 2°

II. - Alinéas 3 et 4

Supprimer ces alinéas.

M. Gérard Le Cam.  - L'amendement vise à rendre plus lisible la disposition introduite par notre rapporteur. Le texte qui nous est soumis implique de créer un nouveau type de zone où les permis tacites seraient interdits, alors que les plans de prévention des risques naturels prévisibles délimitent déjà deux zones de risques. Mieux vaut utiliser le zonage existant plutôt que d'en superposer un nouveau.

Dans les communes non dotées d'un PPRN, la procédure se déroulera, comme prévu, dans la concertation.

Mme la présidente.  - Amendement n°17, présenté par M. Anziani et les membres du groupe socialiste.

Alinéa 2 et alinéa 4, première phrase

Après le mot :

permis

insérer les mots :

ou déclaration de travaux

M. Alain Anziani.  - Il faut aller plus loin en incluant les déclarations de travaux.

A l'Aiguillon, 150 maisons avaient été construites sans permis. On commence par une cabane, puis on la modernise... Nous voulons protéger les habitants, sans guère alourdir la procédure.

M. Bruno Retailleau, rapporteur.  - Sans doute, mais à trop élargir le principe de précaution, on le dilue. La moitié des déclarations de travaux concernent des Velux... Je suis désolé d'avoir à donner un avis défavorable.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - Le Gouvernement est défavorable aux deux amendements. La réforme du permis de construire tendait à simplifier la vie des gens. Cet amendement supprime le permis tacite sur la moitié du territoire. C'est excessif !

L'amendement n°7 n'est pas adopté.

M. Daniel Raoul.  - On sait tous comment l'abri de jardin se transforme en résidence secondaire, avec de simples déclarations de travaux que nul ne vérifie. Monsieur le ministre, vous voulez étendre la surface échappant même à la déclaration de travaux : au lieu de 20 m², vous pourrez monter à 100 m². Imaginez le résultat dans les zones à risques !

L'amendement n°17 n'est pas adopté.

L'article 6 bis est adopté.

Article additionnel

Mme la présidente.  - Amendement n°18, présenté par M. Anziani et les membres du groupe socialiste.

Après l'article 6 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 2131-2 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 2131-2-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 2131-2-1. - Dans les zones couvertes par un plan de prévention des risques naturels prévisibles, visé à l'article L. 562-1 du code de l'environnement, les actes visés au 6° de l'article L. 2131-2 font l'objet d'un contrôle de légalité systématique par les services de l'État dans le département. »

M. Alain Anziani.  - Cet amendement va dans le même sens. La réforme du permis de construire vise à simplifier la vie des gens, ce texte veut la sauver : il faut concilier l'un et l'autre... C'est pourquoi nous proposons que l'État assume ses responsabilités en exerçant un contrôle systématique de légalité. C'est dans la ligne de notre rapport, même si contradictoire avec la RGPP.

M. Bruno Retailleau, rapporteur.  - L'article 2131 du CGCT prévoit que le préfet défère au tribunal administratif les actes qu'il estime contraires à la légalité. Nous avons constaté que seul 0,024 % des autorisations d'urbanisme faisaient l'objet d'un contrôle ; c'est pourquoi nous préconisons son renforcement.

Mais la loi n'est sans doute pas le bon véhicule.

Le ministre peut-il s'engager à envoyer aux préfets une circulaire prescrivant le contrôle systématique de légalité dans les zones de danger ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - Avis défavorable à l'amendement. Je comprends la nécessité d'un contrôle de légalité plus fort dans les zones à risque, mais l'appliquer à 100 % est impossible.

Attirer l'attention des préfets par circulaire est souhaitable, monsieur le rapporteur : je m'y engage.

M. Alain Anziani.  - Une circulaire n'a pas de portée normative.

Pourquoi ne contrôle-t-on pas assez ? Parce que l'on n'en a pas les moyens, à cause de la RGPP, aveugle et brutale. Que les caisses soient vides n'est pas un argument de droit !

L'amendement n°18 n'est pas adopté.

Article 7

Mme Évelyne Didier.  - La propriété des ouvrages de protection pose problème.

Plus du cinquième d'entre eux est sans gestionnaire. D'où bien des carences.

Pour améliorer le régime, on pourrait imaginer une prise en charge de l'État, ou une cogestion avec les collectivités, comme pour certaines levées en bord de Loire. En revanche, prévoir un transfert, sachant que les collectivités seront plus ou moins contraintes de le demander, n'est pas la solution. On conforte le désengagement de l'État, alors que la gestion du risque est de son ressort.

Nous voterons contre l'article 7.

Mme la présidente.  - Amendement n°1, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 4, première phrase

Remplacer les mots :

Les transferts de propriété des ouvrages de défense contre la mer

par les mots :

Sauf lorsque les ouvrages de défense contre la mer sont établis en totalité ou en partie sur le domaine public maritime, les transferts de propriété de ces ouvrages

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - Le Gouvernement est favorable à l'article à ceci près que les ouvrages établis sur le domaine public maritime ne peuvent être transférés.

L'amendement n°1, accepté par la commission, est adopté.

L'article 7, modifié, est adopté.

Article 8

Mme la présidente.  - Amendement n°8, présenté par Mme Beaufils et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 1

Remplacer les mots :

Après le quatrième alinéa de l'article 1er

par les mots :

À la fin de l'article 44

M. Gérard Le Cam.  - La disposition créant une obligation pour le Gouvernement d'élaborer un plan d'action relatif aux ouvrages de protection contre les crues et les submersions marines n'a pas vocation à se trouver à l'article premier de la loi Grenelle I, qui énonce de grandes orientations. Il serait plus pertinent d'introduire cette disposition à son article 44, qui traite de la prévention des risques majeurs.

L'amendement n°8, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°19, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste.

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Un rapport d'étape portant sur les investissements réalisés sur les ouvrages de protection contre les crues et les submersions marines dans le cadre de ce plan d'action est présenté à mi-parcours par le Gouvernement au Parlement.

M. Jean-Jacques Mirassou.  - En l'attente des plans dédiés à la submersion marine, et vu la nature des investissements à réaliser sur les ouvrages de protection contre les crues et les inondations, qui requiert des temps longs de programmation des investissements, un rapport d'étape devrait être présenté au bout de trois ans par le Gouvernement au Parlement afin que celui-ci exerce un contrôle sur les investissements réalisés et la gestion des priorités qui a pu être faite.

M. Bruno Retailleau, rapporteur.  - La commission n'est pas favorable. Un questionnaire en loi de finances permettrait de retracer l'effort budgétaire de l'État. Sans oublier les rapports sur les digues.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - Un rapport sur le fonds Barnier tous les ans, tous les deux ans sur les digues, plus celui-ci : c'est beaucoup. Avis défavorable.

M. Jean-Jacques Mirassou.  - 8 600 kilomètres de digues sont gérés par plus de 1 000 gestionnaires, cela suppose des investissements bien complexes. Un rapport d'étape aiderait à clarifier les choses.

M. Roland Courteau.  - Initialement, les propositions de loi prévoyaient d'associer le Parlement. Nous ne demandons rien d'autre qu'une information à mi-parcours. On n'informe jamais trop le Parlement, on ne contrôle jamais trop le Gouvernement !

L'amendement n°19 n'est pas adopté.

L'article 8, modifié, est adopté.

L'article 9 est adopté.

Article 10

Mme la présidente.  - Amendement n°20, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste.

Supprimer cet article.

M. Roland Courteau.  - L'article 10 ouvre la possibilité d'utiliser la majoration de taxe d'aménagement pour les constructions et aménagements réalisés dans les zones couvertes par un PPRN afin de financer la création ou la réhabilitation des ouvrages de défense contre les inondations. C'est une préconisation de la mission.

Mais les habitants s'installant ou déjà installés dans des zones couvertes par un PPRI mais ouvert à l'urbanisation ne doivent pas être pénalisés, d'autant qu'ils auront souvent à réaliser sur leurs habitations les aménagements supplémentaires prescrits dans le PPRN. Soit on considère que ces zones sont ouvertes à l'urbanisation sous certaines conditions, soit on remet en cause leur urbanisation...

M. Bruno Retailleau, rapporteur.  - Avis défavorable. Nous parlons d'une faculté, non d'une obligation. Pourquoi empêcher un maire d'utiliser le produit de la taxe d'aménagement pour consolider une digue ? S'ajoute l'abattement de 100 m².

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - La fiscalité de l'urbanisme a été réformée après une très large concertation ; nous passerons de 17 taxes à 5, avec la taxe d'aménagement comme outil principal -dont le taux pourra varier de 1 % à 5 % et de 5 % à 20 % si la collectivité locale décide d'y ajouter des participations.

Cela étant, je rappelle que l'objet des taxes d'urbanisme est de faire participer les constructions nouvelles aux dépenses d'investissement réalisées par les collectivités locales et liées à ces constructions. Étendre leur utilisation au confortement des digues reviendrait à créer un impôt local nouveau et ne serait pas conforme à l'esprit de la réforme qui vient d'être adoptée.

Le Gouvernement est favorable à l'amendement.

M. Alain Anziani.  - Nous nous sommes inspirés, dans la rédaction de ce texte, des Pays-Bas où l'on estime que les personnes s'installant dans des zones à risques doivent contribuer aux aménagements qui vont les protéger ; il y va de plusieurs centaines d'euros...

En France, certains privilégient le principe de solidarité ; d'autres estiment que les intéressés savent ce qu'ils font et ne doivent pas mettre leurs décisions à la charge de la collectivité.

M. Roland Courteau.  - Le fonds Barnier met en oeuvre la solidarité au plan national ; elle me semble absente au niveau local. Les terrains à risques seront peu prisés : leur prix pourrait attirer des personnes dont les moyens sont contraints et pour lesquels la hausse de la taxe d'aménagement serait difficile à supporter. Ne leur infligeons pas une double peine !

M. Bruno Retailleau, rapporteur.  - La faculté de quadrupler la taxe a déjà été votée ! En définitive, le coût d'entretien des digues reposera sur les finances locales.

M. Roland Courteau.  - Donc la solidarité !

M. Bruno Retailleau, rapporteur.  - La pression financière immobilière est énorme sur le littoral. Responsabiliser les riverains qui choisissent de construire dans des zones qui nécessitent des dépenses de protection, c'est faire progresser la culture du risque.

L'amendement n°20 n'est pas adopté.

L'article 10 est adopté.

Article additionnel

Mme la présidente.  - Amendement n°3 rectifié, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 128 de la loi n° 2003-1311 du 30 décembre 2003 de finances pour 2004 est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Ce financement est soumis aux conditions suivantes : » ;

2° Au début du second alinéa, il est inséré la référence : « I » ;

3° Il est ajouté un paragraphe ainsi rédigé :

« ... - Par dérogation au I du présent article, et jusqu'au 31 décembre 2013, le taux maximal d'intervention est fixé à 40 % pour les travaux, ouvrages ou équipements de protection contre les risques littoraux pour les communes où un plan de prévention des risques naturels littoraux prévisibles est prescrit. Le montant supplémentaire correspondant à cette dérogation pourra être versé à la commune à la condition que le plan communal de sauvegarde mentionné à l'article 13 de la loi n° 2004-811 ait été arrêté par le maire, et au plus tard avant le 31 décembre 2013. »

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - Cet amendement permettra une intéressante utilisation du fonds Barnier.

M. Bruno Retailleau, rapporteur.  - M. le ministre mérite une statue.

L'amendement n°3 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

Article 11 bis (Supprimé)

Mme la présidente.  - Amendement n°21, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Après le troisième alinéa de l'article L. 1424-7 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le schéma consacré à la prévention des risques d'inondation intègre un volet spécifiquement consacré au risque de submersion marine et au risque tsunami. »

M. Roland Courteau.  - Cet amendement vise à rétablir l'article 11, qui créait une prise en compte spécifique du risque de submersion marine dans les schémas départementaux d'analyse et de couverture du risque. On a vu, dans le cas de Xynthia par exemple, que des casernes de sapeurs-pompiers implantées dans des zones à risques n'étaient plus opérantes en cas de catastrophe. Cet amendement propose aussi de prévoir un volet spécifique au risque tsunami dans les Sdarc.

L'amendement n°21, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.

L'article 11 demeure supprimé.

Article 12

Mme la présidente.  - Amendement n°25, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste.

I. - Après l'alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

... ° Le deuxième alinéa est complété par les mots : « ainsi que dans toutes les communes littorales » ;

II. - Alinéa 5

Remplacer cet alinéa par cinq alinéas ainsi rédigés :

« Il prévoit, tous les trois ans, un exercice de simulation d'une catastrophe naturelle :

« - dans les communes dotées d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles approuvés ou prescrits ;

« - dans les communes comprises dans le champ d'application d'un plan particulier d'intervention ;

« - dans les communes exposées au risque tsunami et visées par le volet tsunami du schéma départemental d'analyse et de couverture du risque défini dans l'article L. 1424-7 du code général des collectivités territoriales.

« Sur la base de cette expérience, la commune, en collaboration avec les services compétents de l'État, adapte son contenu. » ;

M. Yannick Botrel.  - Nous souhaitons que le PCS soit obligatoire dans toutes les communes littorales, par nature exposées au risque tsunami. Nous proposons aussi de prévoir un exercice de simulation d'une catastrophe naturelle dans toutes les communes couvertes par le volet tsunami du Sdarc.

Mme la présidente.  - Amendement n°2, présenté par le Gouvernement.

I. - Alinéa 5

Supprimer les mots :

, en collaboration avec le représentant de l'État dans le département,

II. - Alinéa 6

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

3° Le troisième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Un appui technique peut être apporté par le conseil général ou par toute autre collectivité territoriale ou groupement de collectivités territoriales avec leur accord. » ;

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - La notion « d'appui technique de l'État » n'est pas claire.

M. Bruno Retailleau, rapporteur.  - Défavorable à l'amendement n°25, inutile. Même avis à l'amendement n°2 : l'État doit jouer son rôle d'accompagnement, surtout au profit des petites communes ; c'est une de ses missions régaliennes.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - Avis défavorable à l'amendement n°25.

M. Yannick Botrel.  - La notion d'appui technique de l'État n'est pas claire, monsieur le ministre ? C'est que cet appui, qu'assuraient les DDE en faveur des collectivités locales, est en train de disparaître sous les coups de la RGPP...

M. Roland Courteau.  - Et si l'on supprimait le I de l'article 12 ?

M. Bruno Retailleau, rapporteur.  - L'avis de la commission resterait défavorable.

L'amendement n°25 n'est pas adopté.

L'amendement n°2 est retiré.

L'article 12 est adopté.

Article 13

Mme la présidente.  - Amendement n°9, présenté par Mme Beaufils et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 2

Après le mot :

risques

rédiger ainsi la fin de l'alinéa :

de catastrophes naturelles dont les modalités de mise en oeuvre sont déterminées par décret. Elle a lieu le même jour que la journée internationale de la prévention des catastrophes naturelles.

Mme Évelyne Didier.  - Nous voulons recentrer la journée nationale sur la prévention des risques de catastrophes naturelles, comme le proposait la mission d'information sur Xynthia. Ce n'est pas la même chose de traiter de l'homme face aux aléas naturels ou face aux aléas de sa propre technique. Par souci de pédagogie et de cohérence, il ne faut pas consacrer cette journée à tous les risques.

À juste titre, M. de Legge a rappelé -ce que j'ignorais, sans doute comme beaucoup- que l'ONU a institué une journée internationale consacrée à la prévention des risques naturels, fixée au 13 octobre. Cela ferait sens de faire coïncider les dates.

M. Bruno Retailleau, rapporteur.  - La situation japonaise montre que le risque naturel n'est pas nécessairement séparable du risque technologique. Avis défavorable. Quant à la date, nous nous en remettons au décret.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - Même avis.

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Il est illusoire de vouloir faire de la pédagogie autour de tous les risques...

L'amendement n°9 n'est pas adopté.

L'article 13 est adopté.

présidence de M. Roger Romani,vice-président

Article 14

M. le président.  - Amendement n°32, présenté par M. Retailleau, au nom de la commission de l'économie.

I.- Alinéa 2

Remplacer les mots :

et prioritaire

par les mots :

et, dans la limite des technologies disponibles, permament et prioritaire

 

II. Alinéa 3

Remplacer les mots :

permanent, dans la limite des technologies disponibles, gratuit et prioritaire

par les mots :

gratuit et, dans la limite des technologies disponibles, permanent et prioritaire

M. Bruno Retailleau, rapporteur.  - Amendement de cohérence tendant à intégrer la différence technique existant actuellement entre le numéro d'urgence européen 112, dont les caractéristiques permettent une priorisation de l'appel et une localisation de l'appelant, et les numéros d'urgence nationaux -15, 17, 18- qui ne le permettent pas.

L'amendement n°32, accepté par le Gouvernement, est adopté, de même que l'amendement n°14, modifié.

Article 15

M. le président.  - Amendement n°4, présenté par le Gouvernement.

Supprimer cet article.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - L'État n'est pas favorable à la compensation partielle et temporaire de recettes fiscales des communes et EPCI liées à des délocalisations consécutives à des catastrophes naturelles. Je suggère que l'article 15 soit supprimé aujourd'hui, la navette étant mise à profit pour conduire une étude sur l'impact financier de la mesure. Au demeurant, le fonds Barnier indemnise déjà les habitants et aide les communes à compenser les dommages non assurables...

M. Bruno Retailleau, rapporteur.  - L'article 15 est copié sur l'ancien dispositif de taxe professionnelle en cas de liquidation judiciaire... Lorsqu'il a été présenté à M. Hortefeux, alors ministre de l'intérieur, celui-ci l'avait accepté.

La commune de La Faute-sur-Mer va perdre plus de 50 % de taxe d'habitation... Je sais ce que permet de financer le fonds Barnier, mais il n'y a rien pour compenser la destruction d'assiette fiscale. On ne nous a rien proposé depuis un an. Peut-on laisser les petites communes sans solution ?

Je suis tenté par une sagesse peu favorable...

M. Roland Courteau.  - Il n'existe aujourd'hui aucun dispositif de compensation des pertes de recettes fiscales. Lorsque M. Hortefeux a été entendu par la mission, il a soutenu le dispositif. Les communes touchées par la tempête Xynthia perdront au total 1,8 million, ce n'est pas rien... Il faut les aider à se relever. En l'absence de compensation, une hausse des impôts locaux serait inévitable.

M. Gérard Le Cam.  - Nous regrettons l'amendement de suppression car les contribuables qui ont déjà subi la catastrophe seront contraints de payer davantage d'impôts locaux.

L'amendement n°4 n'est pas adopté.

L'article 15 est adopté.

L'article 16 est adopté.

Article 17

M. le président.  - Amendement n°5, présenté par le Gouvernement.

Supprimer cet article.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - Après cette démonstration, qui pourrait mettre encore en doute les pouvoirs supplémentaires attribués au Parlement par la réforme constitutionnelle ? (Rires)

Les ressources actuelles du Fonds de prévention des risques naturels majeurs sont suffisantes, y compris pour financer le rachat des habitations. La hausse proposée serait reportée sur les contrats d'assurance, ce qui pèsera sur le pouvoir d'achat de nos compatriotes.

M. Bruno Retailleau, rapporteur.  - L'article 17 était d'appel. Dès lors que le Gouvernement nous assure que le fonds Barnier prendra en charge à la fois les dépenses courantes, le plan Digues et l'acquisition des habitations... Avis favorable.

M. Roland Courteau.  - Comment peut-on soutenir qu'il y a assez d'argent ? Ne faudrait-il pas aussi acquérir les maisons construites dans les zones de grand danger avant qu'un sinistre ne survienne ?

L'amendement n°5 est adopté et l'article 17 est supprimé.

L'article 18 demeure supprimé.

Article 19

M. le président.  - Amendement n°6, présenté par M. Merceron.

Rédiger ainsi cet article :

I. - La loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l'État est ainsi modifiée :

1° L'intitulé du chapitre IV de la section II du titre II est complété par les mots : « et du littoral » ;

2° L'article 57 est ainsi modifié :

a) La première phrase du premier alinéa est complétée par les mots : « et du littoral » :

b) La seconde phrase du deuxième alinéa est complétée par les mots : « et de prévention des risques littoraux » ;

c) La seconde phrase du troisième alinéa est complétée par les mots : « et à la prévention des risques littoraux » ;

d) Au quatrième alinéa, après le mot : « mer » sont insérés les mots : « et du littoral » ;

e) À la première phrase du sixième alinéa, après le mot : « mer » sont insérés les mots : « et du littoral ».

II. - À l'article L. 122-1-11, au dernier alinéa du IV de l'article L. 122-3, à l'article L. 122-8-1, aux deuxième et dernier alinéas de l'article L. 122-11, à la première phrase du deuxième alinéa de l'article L. 123-1-9, au d) de l'article L. 123-12, au quatrième alinéa de l'article L. 123-14, à la première phrase du quatrième alinéa de l'article L. 124-2, au deuxième alinéa du II de l'article L. 146-4, au quatrième alinéa de l'article L. 156-2 et au premier alinéa du I de l'article L. 156-4 du code de l'urbanisme, après les mots : « schéma de mise en valeur de la mer », sont insérés les mots : « et du littoral ».

M. Jean-Claude Merceron.  - La continuité mer-terre est une zone cruciale pour l'aménagement du littoral. Plutôt que créer un nouvel outil, mieux vaut élargir les SMVM à celui-ci.

L'amendement n°6, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté et devient l'article 19.

Articles additionnels

M. le président.  - Amendement n°31, présenté par M. de Legge, au nom de la commission des lois.

Après l'article 19, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 123-1-5 du code de l'urbanisme est complété par trois alinéas ainsi rédigés :

17° Délimiter, dans les zones délimitées en application du I de l'article L. 515-16 du code de l'environnement ou en application des 1° et 2° du II de l'article L. 562-1 du même code, les zones exposées à un risque naturel ou technologique grave et où, en raison caractéristiques et de la gravité dudit risque, aucune construction ni aucun ouvrage ne peut être implanté ;

18° Délimiter, dans les zones délimitées en application du I de l'article L. 515-16 du code de l'environnement ou en application des 1° et 2° du II de l'article L. 562-1 du même code, les zones exposées à un risque naturel ou technologique sérieux, et où aucune habitation ne peut être réalisée ;

19° Délimiter, dans les zones délimitées en application du I de l'article L. 515-16 du code de l'environnement ou en application des 1° et 2° du II l'article L. 562-1 du même code, les zones exposées à un risque naturel ou technologique modéré ; le règlement détermine alors les conditions dans lesquelles des habitations peuvent y être implantées ou occupées.

M. Dominique de Legge, rapporteur pour avis.  - Le PLU est le document de synthèse de la gestion quotidienne des sols. Nous poursuivons ici la logique de mise en cohérence avec le PPRN.

M. Bruno Retailleau, rapporteur.  - Avis défavorable, l'amendement me paraît satisfait.

Les groupes de travail mis en place par M. Apparu ont mis en exergue les inconvénients d'une trop forte complexité des PLU. N'aggravons pas la situation.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - Évitons d'ajouter des zonages aux zonages. Le Gouvernement, que vous avez habilité pour cela à légiférer par ordonnance, présentera dans quelques semaines sa réforme de l'urbanisme, qui est une simplification. Le PLU est déjà une des sources importantes de contentieux.

M. Dominique de Legge, rapporteur pour avis.  - Je n'ai pas été convaincu. Depuis le début de la discussion, nous déplorons tous l'incohérence des documents d'urbanisme. Comment tenir ici le langage inverse ?

L'amendement de la commission des lois est justifié, mais je peux le retirer si le Gouvernement confirme que le PLU, et non le Scot, est bien le document opérationnel en matière d'urbanisme.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - Jusqu'au Grenelle II, toute autorisation de construire devait être conforme à une série de documents d'urbanisme. Depuis, un document d'urbanisme doit être conforme au document de niveau supérieur : le permis de construire au PLU, lui-même au Scot et ainsi de suite...

L'amendement n°31 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°22, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste.

Après l'article 19, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement présente au Parlement dans un délai d'un an à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi, un rapport sur les modalités de prise en charge financière des constructions situées sur des zones de danger grave et construits avant l'approbation du Plan de Prévention des Risques Naturels Majeurs et sur la possibilité d'instituer un droit de délaissement au bénéfice des propriétaires de ces constructions.

M. Roland Courteau.  - L'article 20 instaurait un droit de délaissement dans les secteurs présentant un danger grave pour la vie humaine en raison de risques importants de catastrophe naturelle ; mais le dispositif faisait supporter aux seules communes le coût d'acquisition des constructions.

Je propose que le Gouvernement mène une réflexion sur les modalités de prise en charge financière de l'acquisition des biens exposés, ainsi que sur la possibilité pour leur propriétaire de bénéficier d'un droit de délaissement.

M. Bruno Retailleau, rapporteur.  - Avis favorable.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - Un rapport de plus... Avis défavorable.

L'amendement n°22 est adopté et devient un article additionnel.

L'article 20 demeure supprimé.

Article 21

M. le président.  - Amendement n°23, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste.

Alinéa 3

Remplacer les mots :

des champs naturels d'expansion  des crues ou des submersions marines

par les mots :

de préserver ou de créer des champs naturels d'expansion des crues ou des submersions marines ou des espaces de mobilité des cours d'eau

Mme Nicole Bonnefoy.  - La proposition de loi intégrait initialement la « création » de champs naturels d'expansion des crues ou de submersion marine dans l'article L. 142-1 du code de l'urbanisme. Nous proposons de la rétablir en faisant également référence aux « espaces de mobilité des cours d'eau », utiles pour les cours d'eau à dynamique active, qui peuvent aussi être des zones tampons. Il faut préserver celles qui subsistent et en créer quand elles ont disparu.

M. Bruno Retailleau, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - Même avis.

M. Roland Courteau.  - La maîtrise du foncier est primordiale. Dans l'Aude, la situation s'est améliorée grâce à l'extension des zones d'expansion des crues ; on n'a pas eu à déplorer de morts lors des inondations du mois de mars. À méditer...

L'amendement n°23 n'est pas adopté.

L'article 21 est adopté.

L'article 22 est adopté.

Vote sur l'ensemble

M. Roland Courteau.  - Nous voterons ce texte, dont nous félicitons les deux auteurs initiaux. Il y aura désormais un avant et un après Xynthia ; que l'Assemblée nationale nous suive.

Le risque de submersion marine sera désormais pris en compte, comme le risque de tsunami. Légiférer était nécessaire, d'autant que la culture du risque manque en France. Je me félicite de la journée nationale de sensibilisation, du caractère obligatoire des plans communaux de sauvegarde, de l'accès prioritaire aux numéros d'urgence, de la compensation des pertes de bases d'imposition, ou encore de la nécessité de faire coïncider carte des risques et carte d'occupation des sols, de la suppression des dispositions des PLU contraires aux PPR. Je salue aussi le nouvel objectif de protection de la vie humaine assigné au Scot et au PLU.

La proposition de loi est une avancée, plus réaliste que la poursuite de l'illusoire risque zéro. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Gérard Le Cam.  - Nous nous abstiendrons, en raison du manque d'engagement de l'État en faveur des collectivités locales. Nous sommes de tout coeur avec les victimes de Xynthia. On sait que les risques vont prendre des formes de plus en plus diverses.

L'ensemble de la proposition de loi, modifié, est adopté.

La séance est suspendue à 20 h 25.

*

*          *

présidence de M. Jean-Pierre Raffarin,vice-président

Secrétaires : M. Jean-Noël Guérini, M. Bernard Saugey.

La séance reprend à 22 h 30.

Installations radiographiques et hydrodynamiques (Procédure accélérée)

Discussion générale

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi autorisant la ratification du traité entre la République française et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et l'Irlande du nord relatif à des installations radiographiques et hydrodynamiques communes.

M. Laurent Wauquiez, ministre auprès du ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes, chargé des affaires européennes.  - Derrière son utilité technique, ce texte traduit les évolutions majeures de notre politique extérieure. Le Royaume-Uni est notre premier partenaire, engagé comme nous dans la dissuasion nucléaire.

Ce traité de défense et de sécurité doit approfondir notre coopération bilatérale. Le texte qui nous est soumis aujourd'hui illustre concrètement le degré de confiance atteint puisque nos pays vont conjointement construire et exploiter un centre d'étude et de simulation dénommé Epure, situé à Valduc, en Côte-d'Or, destiné à garantir l'efficacité et la pérennité de la dissuasion, sans essais réels, conformément à nos engagements internationaux. Des économies en seront ainsi le bénéfice. Chaque pays conservera la propriété et la responsabilité des résultats et produits ; les coûts seront équitablement partagés. Ce traité illustre notre capacité à produire des synergies : c'est un message d'espoir pour l'Europe. (Applaudissements à droite et au banc des commissions)

M. Xavier Pintat, rapporteur de la commission des affaires étrangères.  - Le traité qui nous occupe figure parmi les avancées majeures de l'année 2010. La dimension scientifique et les économies qu'il permettra de réaliser sont remarquables, comme l'est sa dimension stratégique, sachant la relation quasiment exclusive que le Royaume-Uni entretenait jusqu'alors avec les États-Unis.

La France et le Royaume-Uni poursuivent un objectif commun : préserver les capacités militaires et une base technologique de premier plan dans un contexte difficile. Je rappelle que le Royaume-Uni a prévu de réduire son budget militaire de 8 % d'ici 2010 ; sa décision de renforcer la coopération avec la France tient donc aussi à la nécessité, ce qui n'empêche pas les décisions de Londres de soutenir une ambition majeure.

Cette relance de la coopération supposait une ambition à maintenir dans la durée : d'où l'importance d'une structure de pilotage au plus haut niveau.

Pour soutenir cette dynamique de coopération, notre président, Josselin de Rohan, s'est fortement investi pour mettre en place un suivi parlementaire franco-britannique. La première réunion associant les commissions de défense des deux chambres britanniques et françaises a eu lieu au Sénat quelques jours après le sommet de Londres, et la prochaine se tiendra au mois de juillet.

Notre démarche a pu, d'abord, froisser quelques susceptibilité mais j'ai la conviction qu'elle aura un effet stimulant : attestant que des partages de capacité sont envisageables, elle peut avoir un effet d'entraînement. Elle n'est pas exclusive d'autres formes de coopération : nous collaborons avec d'autres pays sur les satellites d'observation, comme avec le Royaume-Uni sur les satellites de communication.

Nos deux pays sont appelés à jouer un rôle de premier plan en matière de défense. Préserver nos capacités, c'est défendre nos intérêts nationaux mais aussi travailler à préserver et dynamiser la PESC. Cette coopération est utile à l'Europe.

Le traité qui nous est soumis touche à la dissuasion, précisément sur les techniques de simulation garantissant la fiabilité des armes nucléaires, via des installations communes préservant la souveraineté de chacun. Nos deux pays ont déposé le même jour les instruments de ratification du traité de non-prolifération. Cela suppose des outils de validation des instruments et installations. La direction des applications nucléaires et son homologue britannique, l'Atomic Weapons Establishment, sont arrivés à la conclusion que des installations communes étaient nécessaires. Restait à définir les modalités pratiques. Ce texte en est la traduction, qui institue le programme Epure, en définit le calendrier, pose les principes de partage des coûts. La France et le Royaume-Uni s'engagent réciproquement pour cinquante ans à autoriser l'accès aux installations communes situées dans leur pays.

Ce traité est l'une des réussites marquantes du traité de Londres. Il permettra d'économiser au total 400 à 450 millions d'euros. Il sera propice aux échanges et entretiendra la motivation de nos scientifiques, tout cela dans le respect de notre souveraineté, tout en témoignant d'un haut degré de confiance. Il marque la volonté commune de maintenir leurs doctrines de dissuasion, très proches l'une de l'autre. Le préambule rappelle que nos deux pays mettent leur force nucléaire par la dissuasion au service de l'Europe, dans un monde où le risque de prolifération subsiste.

Ce projet, d'un intérêt financier évident, donne un nouvel intérêt stratégique à notre politique de défense : au nom de la commission des affaires étrangères, je vous demande de l'adopter.

Mme Michelle Demessine.  - Cette discussion est l'occasion d'évoquer notre politique de défense européenne : derrière un titre anodin, il s'agit d'un texte relatif au nucléaire militaire. La question aurait mérité un débat devant le Parlement car ce traité sonne le glas de la défense européenne.

Lors du sommet de l'Otan, à Lisbonne, le président de la République avait modifié la donne : le débat parlementaire n'avait pu que sanctionner les décisions prises. Idem pour le traité bilatéral avec le Royaume-Uni, pris sans consultation préalable, ni du Parlement, ni de notre partenaire privilégié, l'Allemagne.

Ses motivations sont largement financières. À la différence des accords de Saint-Malo, qui pouvaient avoir un effet d'entraînement, ceux de Londres resteront étroitement bilatéraux. Au-delà d'une simple mutualisation, il s'agit d'envisager le rapprochement de nos industries de défense et de ses moyens de recherche. Surtout, le rapprochement en matière d'ogives nucléaires, sachant la dépendance du Royaume-Uni aux États-Unis, peut faire craindre pour l'autonomie de notre défense, et le principe de « dissuasion suffisante », au fondement de notre stratégie de défense, déjà mise à mal par notre réintégration dans l'Otan. Mais le président de la République n'en est pas à une contradiction près ! Car où est la cohérence ? On l'a vu avec sa gestion de la crise en Libye, c'est la fin de toute autonomie des capacités de défense européenne. L'union européenne restera cantonnée à l'humanitaire, se bornera à être « une grosse ONG » ayant l'Otan pour bras armé. Vous comprendrez que nous votions contre ce texte.

M. Jean-Louis Carrère.  - Ce texte de ratification est l'occasion de nous pencher sur la coopération franco-britannique. Le sommet de Londres de novembre 2010 devait approfondir notre coopération bilatérale. Ce texte en fait partie, mais en le votant, on ne peut laisser croire que l'on approuve tout de l'association militaire entre nos deux pays.

Quels sont, monsieur le ministre, les différents aspects de cette coopération ? Car il y a loin de l'accord de Saint-Malo à celui-ci. Le premier devait consolider la défense européenne. Au plan industriel, il a fait avancer les choses, bien que les espoirs politiques n'aient pas tous été concrétisés. Mais ici, tout reste bilatéral. Au point que l'on s'en inquiète outre-Rhin.

Monsieur le ministre, envisagez-vous d'ouvrir cette coopération aux pays européens qui manifesteraient leur intérêt ? Où est la vision commune ? Il est vrai que le maintien du principe de dissuasion au sein de l'Otan, alors que l'Allemagne s'y oppose, justifie la coopération franco-britannique. Reste que la politique de défense de la France doit s'inscrire dans une coopération avec tous ses partenaires.

Le programme Epure, en Bourgogne, devait être suivi d'autres coopérations. Mais craignons que ces ambitions ne suivent le même chemin que bien d'autres... Votre Gouvernement, et les précédents, depuis 2002, ne nous ont pas habitués à la sincérité budgétaire. Des économies qui reviendront à la défense, dites-vous ? Je me méfie.

Écarté cet argument, reste celui du maintien de notre dissuasion au niveau de « stricte suffisance ». Or, ce que nous faisions seuls hier, vous admettez que nous ne pouvons plus le faire demain. Et quid des Britanniques ? Nous attendons vos réponses, monsieur le ministre.

Cette réorientation, associée à la réintégration dans l'Otan, n'aura-t-elle pas des conséquences sur notre autonomie ? Allons-nous vers un partenariat élargi ?

Nous voterons le texte car ce projet Epure est indispensable à notre dissuasion, après la ratification du traité d'interdiction des essais. Cela doit aujourd'hui l'emporter mais nous ne pouvons vous donner quitus sur les enjeux d'une coopération bilatérale qui ne sont pas parfaitement clairs.

Le débat doit se poursuivre ; à vrai dire, il ne fait que commencer !

M. Jean Milhau.  - A l'université de Zurich, en 1946, Winston Churchill a proclamé : « En avant l'Europe ! ». Je crois, pour moi, en une Europe ambitieuse, cohérente, respectueuse des libertés et innovante.

Cette ambition ne peut se passer d'une défense plus sûre et plus fiable. A cet égard, la coopération britannique en vu de la consolidation de la paix est incontournable. Cette entente cordiale, aux dires de Gordon Brown, est devenue une « entente formidable » à l'origine d'un véritable élan pour l'Europe.

Ce traité doit renouveler notre confiance mutuelle, grâce au partage des équipements et à la coopération industrielle et technologique. Les techniques de simulation destinées à garantir la fiabilité des armes nucléaires seront perfectionnées grâce à une installation commune, Epure, à achever en 2022, dont les coûts seront équitablement partagés. Les règles en matière de santé, de gestion de déchets, de mise en oeuvre de la responsabilité sont précisément définies. Le tsunami qui a frappé le Japon a inquiété, à juste titre, nos concitoyens. En cette matière qui touche au nucléaire militaire, aucun dégagement d'énergie nucléaire ne sera produit, il faut le dire. Cette coopération, source d'émulation et d'économies, témoigne de la volonté de nos deux pays de défendre leurs doctrines, très proches, de dissuasion.

L'objectif de désarmement doit s'accompagner d'un progrès tangible vers un environnement international plus sûr. Le chemin, hélas, est encore long. C'est pourquoi les membres du RDSE approuveront ce traité. (Applaudissements sur les bancs du RDSE)

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Mes félicitations à M. Pintat pour son rapport, ainsi qu'à M. de Rohan pour son engagement personnel lors du 31e traité franco-britannique qui a abouti, notamment, au traité dont nous débattons aujourd'hui. Je ne m'étendrai pas sur son volet technologique pour observer que douze ans après le sommet de Saint-Malo, qui a montré que l'Europe de la défense avançait, le contexte économique a conduit nombre de nos partenaires à des réductions drastiques de crédits. Pour une fois, nous pouvons nous réjouir : ce traité montre que la contrainte peut aussi nous faire rebondir. A l'heure où la France est engagée, avec le Royaume-Uni, dans nombre de processus de résolutions de crise, la constance en matière de programmation militaire est essentielle. Les parlementaires, en cette matière, ont été largement associés : je m'en réjouis.

Le retour de la France au sein du commandement intégré de l'Otan assoit deux puissances européennes, animées par une même doctrine, et en fait un porte-voix de l'Europe.

M. Jean-Louis Carrère.  - Tout faux.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Nous savons que les enjeux ne sont pas les mêmes en Allemagne mais l'Europe doit respecter les choix de chacun.

Dans ce traité, le collectif est primordial. La coopération franco-britannique permettra un partage des savoirs et une mutualisation des moyens, gage d'une extension future. Et en ces temps difficiles, ne négligeons pas l'économie de 500 millions d'euros pour la France qui résultera de la répartition des coûts !

Pour toutes ces raisons, le groupe UMP votera en faveur de la ratification de ce texte qui apporte un nouveau souffle à la PESD, qui se construit chaque jour. Enfin, en tant parlementaire, je me réjouis du groupe de travail mis en place afin de suivre les évolutions, notamment financières, de ce projet. (Applaudissements à droite)

M. Josselin de Rohan, président de la commission des affaires étrangères.  - A ceux qui voient dans ce traité la fin de la politique européenne de sécurité et de défense, je réplique, avec Mme Garriaud-Maylam, que la France et la Grande-Bretagne représentent la plus grande part de la dépense européenne au sein de l'Otan. Si l'Allemagne avait la même volonté financière, notre base européenne s'en trouverait renforcée. Pour l'heure, sans mutualisation franco-britannique, ce serait les États-Unis qui donneraient le ton. Nous dépendrions ainsi totalement des États-Unis.

L'Europe sera-t-elle toujours pour eux prioritaire ? On peut en douter, au vu de leurs engagements actuels, tournés vers l'Asie.

Que nous partagions avec la Grande-Bretagne la même vision a permis de maintenir la dissuasion dans le concept stratégique de l'Otan.

Pour conserver notre crédibilité et notre autonomie au sein de l'Otan, nous devons nous appuyer sur le Royaume-Uni.

Ce traité n'empêche pas l'émergence d'une politique de défense commune... à condition que nos partenaires la souhaitent. La porte est ouverte à qui veut entrer ; encore faut-il vouloir se défendre.

M. Laurent Wauquiez, ministre.  - Merci, monsieur le rapporteur, pour avoir souligné la réorientation stratégique des Britanniques, permise par notre retour dans les structures intégrées de l'Otan.

Madame Demessine, ce traité préserve notre indépendance.

Monsieur Carrère, je vous ai écouté attentivement. Oui, ce texte est pragmatique ; il créera une logique d'entraînement permettant de basculer vers une approche européenne. D'ailleurs, nous travaillons également, dans le cadre du Triangle de Weimar, à une approche coordonnée entre l'Allemagne, la Pologne et la France. Enfin, cet accord n'est pas un constat de faiblesse mais la volonté de préserver notre ambition, dans un souci d'économies.

Monsieur Milhau, je vous remercie pour la dimension historique que vous avez donnée à votre propos, tout en rappelant que M. Churchill envisageait alors une Europe de la défense sans le Royaume-Uni. Nous avons un peu progressé depuis lors. Le partage équilibré des coûts est bien la clef de la coopération.

Madame Garriaud-Maylam, le président de la République veut que les parlementaires soient plus associés à la politique étrangère. Je m'associe à l'hommage que vous avez rendu au rapporteur et au président de Rohan qui, par son action, mériterait d'être reçu à la Chambre des Lords ! (Sourires)

La discussion générale est close.

Vote sur l'ensemble

M. Jean-Louis Carrère.  - Monsieur le ministre, vous allez vite en besogne en parlant d'un basculement des Britanniques de l'Alliance atlantique vers l'Europe.

Bien sûr, je serais heureux que d'autres pays européens rejoignent la France et le Royaume-Uni.

Sur le plan des économies budgétaires, je ne partage pas l'optimisme de Mme Garriaud-Maylam. On a vu ce qu'il en était de celles promises avec les bases de défense et l'externalisation.

M. Alain Houpert.  - En tant que sénateur de Côte-d'Or, je suis préoccupé par l'impact économique du CEA de Valduc. Le nucléaire étant contesté, parfois de façon excessive, on doit prendre aujourd'hui toutes les précautions pour poursuivre ses activités.

Il faut en outre que le CEA s'acquitte loyalement de ses obligations fiscales : 90 % des employés du CEA en Côte-d'Or habitent dans un rayon de 30 km de son établissement. En 1999, le CEA a été condamné pour non-paiement de la taxe foncière, condamnation confirmée en appel et par le Conseil d'État. Qu'il adopte un comportement plus civique pour ne pas obérer son avenir et celui du territoire !

M. Laurent Wauquiez, ministre.  - L'élu local que je suis entend bien votre plaidoyer. Le centre du CEA ne doit pas être « hors-sol ». Au contraire, il doit représenter un atout pour la collectivité locale qui l'abrite. Le Quai d'Orsay y veillera.

L'article unique du projet de loi est adopté.

Compensation outre-mer des accords commerciaux européens (Proposition de résolution européenne)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion d'une proposition de résolution européenne tendant à obtenir compensation des effets, sur l'agriculture des départements d'outre-mer, des accords commerciaux conclus par l'Union européenne, présentée en application de l'article 73 quinquies du Règlement.

Discussion générale

M. Serge Larcher, co-auteur de la proposition de résolution.  - Le 24 septembre 2010, la Commission européenne a proposé de refondre le programme mis en place il y a des années pour soutenir l'agriculture ultramarine. Ce régime Poséi a fait la preuve de son efficacité.

La proposition de Règlement élaborée par la Commission modifie indirectement l'économie locale de la banane puisqu'elle feint d'ignorer les conséquences désastreuses des accords conclus par l'Union européenne, notamment avec la Colombie.

C'est pourquoi nous avons déposé, le 10 janvier, cette proposition de résolution.

Bien que les accords négociés par l'Union européenne n'aient pas été communiqués au Parlement, nous savons qu'une ouverture plus large aux produits industriels européens a pour contrepartie un nouvel abaissement des droits de douane prélevés sur l'importation de la banane provenant des pays andins. La Colombie et le Pérou exporteront en outre plus facilement le sucre et le rhum vers l'Union européenne.

Ainsi, la France, avec ses départements d'outre-mer, supportera le déséquilibre entre concessions faites et avantages obtenus. Le commerce extérieur de la Guadeloupe par exemple est très dépendant de la banane, du rhum et du sucre ! Que deviendront nos agriculteurs ?

Faut-il rappeler la différence entre nos conditions sociales et celles qui prévalent en Amérique latine ? J'ajoute que la banane française est, eu égard à ses modes de production, la plus propre au monde : moins de dix traitements par an contre 60 en Colombie.

Ne pourrait-on protéger le marché en limitant dans le temps la hausse annuelle des importations de bananes et de sucre ? Sans parler des compensations financières. Le Parlement européen en est d'accord.

L'Union européenne consacrera plus de 200 millions d'euros pour accompagner l'évolution des pays ACP dans la culture de la banane. Or, seulement 4 millions seraient en même temps versés à la filière française, quand elle aurait besoin de 40 !

Je vous invite à voter cette proposition de résolution, dont l'objet n'a rien de marginal : elle montre que la France ne veut renoncer ni à son agriculture ni à son modèle social ! (Applaudissements)

M. Éric Doligé, co-auteur de la proposition de résolution.  - L'heure tardive du débat permet peut-être, grâce au décalage horaire, qu'il soit suivi en direct les départements d'outre mer...

Les accords signés par l'Union européenne avec les pays andins et l'Amérique centrale sont potentiellement dévastateurs pour notre agriculture ultramarine, ce que la Commission européenne reconnaît.

Face à ce danger, la présente proposition de résolution demande une compensation au profit des régions ultrapériphériques, ainsi que M. Serge Larcher vient de l'évoquer.

Je m'attarderai donc sur la prise en compte par l'Union européenne de la situation spécifique des régions ultrapériphériques.

Les propositions n°62 et n°35 de la mission commune d'information insistaient sur ce point, auquel la Commission européenne est largement indifférente.

Le programme Poséi institue un régime spécifique, à préserver. La proposition de résolution demande que la particularité des DOM soit prise en compte par la Commission européenne lorsqu'elle négocie des accords, sur le fondement de l'article 349 du Traité.

Concrètement, des études d'impact devraient systématiquement être conduites.

Le 14 juin 2010, le Conseil européen a demandé la réalisation de ces études d'impact, qui pouvaient justifier des mesures de compensation.

L'incidence des accords doit être appréciée a priori, mais aussi en cours d'application.

Je souhaite l'adoption unanime de cette résolution pour montrer une fois de plus l'attachement du Sénat à nos outre-mer. (Applaudissements)

M. Daniel Marsin, rapporteur de la commission de l'économie.  - Il est rare d'examiner une proposition de résolution européenne en séance publique. Le dernier exemple remonte à 2009.

Cette proposition de résolution a été déposée le 18 janvier 2011, dans la droite ligne de la mission d'information dont MM. Serge Larcher et Doligé ont été président et rapporteur.

Cette proposition a été adoptée à l'unanimité par la commission de l'économie.

Monsieur le ministre, vous avez souligné à juste titre qu'il était inutile de défendre la PAC si l'on négligeait les négociations internationales et qu'il fallait refuser tout marché de dupes aux dépens de notre agriculture. Or une étude d'impact réalisée par la Commission européenne sur l'accord avec le Mercosur établit qu'il pourrait aboutir à une baisse du revenu agricole de 3 % en France.

Les productions agricoles ultramarines sont essentielles pour les DOM, dont elles représentent plus de la moitié des exportations.

La filière banane est le premier employeur privé dans nos DOM, la filière canne-sucre-rhum occupe le tiers de la surface agricole utile.

Le droit européen permet des mesures d'aides à la production dans les DOM. Mais plusieurs accords compromettent l'agriculture ultramarine. Je pense notamment à la baisse de 35 % en six ans des droits prélevés par l'Union européenne sur les importations de banane.

Je regrette qu'il m'ait été impossible d'obtenir la version française de l'accord négocié avec l'Amérique centrale, il y a un an.

M. Jean-Paul Virapoullé.  - C'est scandaleux !

M. Daniel Marsin, rapporteur.  - En effet. Je précise que de nouvelles baisses des droits de douane sont programmées pour la banane, qui s'ajoutent au contingent exonéré de droits pour l'importation de sucre.

La proposition de résolution demande au gouvernement français d'intervenir auprès de la Commission européenne pour obtenir des compensations ; elle invite cette même Commission à prendre en compte la spécificité des outre-mer lorsqu'elle négocie des accords commerciaux.

Aujourd'hui, la politique commerciale européenne contredit son soutien à l'essor des régions ultrapériphériques. J'ajoute que le plan d'agriculture durable lancé en 2007 a déjà réduit de 70 % l'usage de produits phytosanitaires. La commission de l'économie a donc ajouté à la résolution l'exigence de cohérence de la politique commerciale avec les autres politiques communautaires.

Enfin, la commission de l'économie a demandé l'application de mécanismes de sauvegarde. Cette proposition de résolution est-elle trop franco-française ? Non, puisque le Parlement européen a déjà voté une résolution semblable, demandant que la Commission européenne cesse de faire prévaloir les intérêts de l'industrie et des services sur ceux de l'agriculture.

La commission de l'économie souhaite l'adoption unanime de la résolution, qui aidera le Gouvernement, en manifestant l'attachement du Sénat aux intérêts de nos outre mers. (Applaudissements)

M. Bruno Le Maire, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire.  - Tous les orateurs ont rappelé que l'agriculture était stratégique outre-mer. Le président de la République l'avait déclaré lors de son voyage aux Antilles, où j'avais pu mesurer personnellement les premiers résultats de notre politique de développement de l'agriculture.

Il reste pourtant un chemin considérable à parcourir, face à une forte pression foncière, à un marché local saturé, à des coûts de production élevés, à un éloignement qui renchérit les coûts de transport.

Votre proposition de résolution arrive à point nommé. Après avoir signé en décembre 2009 des accords réduisant les droits de douane sur la banane, l'Union européenne a conclu des accords qui ont un impact sur la banane, le sucre et le rhum. Elle s'apprête, enfin, à signer des accords commerciaux avec le Mercosur qui auront des conséquences dramatiques pour l'agriculture de l'Europe et de ses régions ultrapériphériques.

La cohérence interdit d'édicter des normes environnementales et sociales très exigeantes, tout en négociant l'ouverture du marché à des productions ne subissant aucune contrainte en matière de traitements phytosanitaires. Songeons que quand une banane martiniquaise subit deux à dix traitements, une banane andine en reçoit soixante !

Nous voulons que l'agriculture respecte des normes uniques au monde, imposant par exemple d'investir 350 millions d'euros dans nos élevages porcins pour assurer le bien-être animal. Dans la pêche aussi, la France applique des mesures strictes préservant la ressource halieutique.

En septembre 2010, le président de la République avait obtenu que le principe de réciprocité s'applique réellement.

Je rentre du Brésil, avant de me rendre en Argentine. Les Brésiliens s'inquiètent des conséquences sur leur industrie et sur leurs services que pourraient avoir l'accord Mercosur-Union européenne. Et c'est le moment choisi par la Commission européenne pour annoncer de nouvelles concessions, au détriment de nos éleveurs bovins par exemple qui pourraient perdre le quart de leurs revenus ! Des milliers d'exploitations risquent de disparaître.

J'ai demandé à la Commission européenne qu'elle réalise une étude d'impact portant sur l'agriculture d'outre-mer. Le président de la République est déterminé à ne pas sacrifier notre agriculture à quelque accord commercial que ce soit.

Au-delà du Mercosur, je reste vigilant sur l'ensemble des accords commerciaux, en faisant pression, avec un groupe de douze États membres, sur la Commission. Lors du cycle de Doha, l'Union européenne est allée au maximum des concessions. Il convient de le dire et de le répéter. Pour l'accord sur la banane, la cohérence fait défaut. Quant à la compensation, la commission en refusait le principe jusqu'à une date récente ; grâce aux efforts du président de la République, les choses évoluent. C'est un progrès.

Il est indispensable de continuer à soutenir l'agriculture outre-mer. En Guadeloupe, la production ne couvre que 60 % des besoins alimentaires. Il ne peut y avoir de développement des départements d'outre-mer sans développement de l'agriculture. Je crois aux capacités de nos territoires, qui ont tous les atouts pour réussir leur développement endogène : sur la base solide d'une agriculture traditionnelle, la diversification pourra se poursuivre. Les départements d'outre-mer ont besoin d'une agriculture de proximité ; 40 millions d'euros ont été débloqués à cette fin. La diversification est une chance pour l'emploi, pour les entreprises, pour le tourisme, pour l'environnement et la biodiversité.

Une circulaire du Premier ministre est en cours de signature pour favoriser l'approvisionnement en produits locaux de la restauration collective et du bois dans la commande publique.

Vous pouvez compter sur ma détermination pour soutenir le développement durable dans nos territoires ultramarins, pour défendre leurs intérêts dans les négociations commerciales, pour obtenir que la politique de cohésion continue de prendre en compte leurs spécificités, pour que le Poséi reste un instrument efficace. Le Gouvernement soutiendra sans réserve votre proposition de résolution. (Applaudissements)

M. Soibahadine Ibrahim Ramadani.  - Cette proposition de résolution a pour origine la signature, par l'Union européenne, d'accords commerciaux ayant un impact direct sur l'agriculture outre-mer. La spécificité des RUP leur vaut un programme, le Poséi, qui allie un régime spécifique d'approvisionnement pour alléger les coûts et des mesures d'aide à la production, à la transformation et à la commercialisation locales. Créé au début des années 1990, le programme Poséi a été modifié en 2001 et en 2006, date à laquelle la France a élaboré un programme spécifique pour promouvoir une agriculture durable dans les départements d'outre-mer. Ceux--ci ont ainsi perçu, en 2009, 273 millions de crédits Poséi, sur une enveloppe globale de 628 millions.

Les accords conclus par l'Union européenne représentent pour nos agricultures un énorme danger car les prix de production dans les pays latino-américains sont très inférieurs à ceux des DOM. Pour faire face, cette proposition de résolution s'appuie sur une proposition de règlement du Parlement et du Conseil du 24 septembre 2010, qui visait à refondre le régime du Poséi en réaffirmant la nécessité d'un soutien communautaire à l'agriculture des RUP.

Notre proposition demande la négociation de compensations et la conduite systématique d'études d'impact des accords commerciaux négociés par l'Union européenne.

Mayotte est doublement concernée : comme PTOM aujourd'hui et comme RUP demain. L'agriculture mahoraise compte 15 500 ménages pratiquant une agriculture de subsistance essentiellement vivrière ; la pêche fait appel à une flotte de 1 000 pirogues à balancier et 300 barques motorisées ; l'aquaculture se développe, qui bénéficie des mesures d'aide à l'investissement instituées par la Lodeom et du soutien de l'Ifremer.

L'agriculture doit faire face à un défi alimentaire, mais aussi environnemental, économique et social méritant un accompagnement soutenu de l'État comme de l'Union. En l'absence de compensation, les accords commerciaux européens, au premier rang desquels ceux conclus avec les pays ACP, risquent de déstabiliser l'économie de Mayotte. Si ces accords visent à renforcer l'intégration régionale sud-sud, ils présentent des risques pour les économies insulaires des PTOM et des RUP, en raison de coûts de production plus élevés dans celles-ci. Les accords avec les pays ACP doivent faire l'objet d'études d'impact systématiques. De surcroît, la transformation de Mayotte en RUP exposera les entreprises mahoraises à une forte concurrence.

Sous le bénéfice de ces observations, je soutiendrai la proposition de résolution. (Applaudissements à droite)

M. Georges Patient.  - La proposition de résolution se polarise sur les dangers des accords de Genève et des autres accords commerciaux signés par l'Union européenne, sur d'éventuelles mesures de compensation et sur la systématisation d'études d'impact.

Le programme Poséi a fait ses preuves : il doit être maintenu. Cette proposition de résolution est l'occasion de dénoncer les effets néfastes de la politique commerciale européenne. Mais la Commission a fait le choix, sous couvert de libéralisation et de disette budgétaire, de gommer les différences de traitement. Les récents accords sur la banane le prouvent.

L'article 349 du traité doit rester le socle juridique principal sur lequel s'appuient les dispositions en faveur des RUP. Des études d'impact doivent être systématiquement conduites avant tout accord. La réduction des droits de douane doit être conditionnée au respect de certaines normes sociales ou environnementales. Les mesures de compensation financière, enfin, doivent être à la hauteur du préjudice. Le Gouvernement doit être vigilant sur ce point.

Je partage donc les objectifs de cette résolution. Il appartient aux gouvernements français, espagnol et portugais de trouver de nouveaux appuis en Europe.

Si la banane, le rhum et le sucre assurent l'essentiel de nos productions outre-mer, si les filières traditionnelles doivent continuer à être soutenues, les financements du Poséi doivent aider à une diversification des productions. Le partage de l'enveloppe française, enfin, mériterait d'être revu : la Guyane, qui n'en reçoit que 2 %, a pourtant vu le nombre de ses exploitations augmenter de 20 %. C'est dans le développement endogène qu'est l'avenir. (Applaudissements sur les bancs socialistes et CRC)

Mme Gélita Hoarau.  - Au nom de sa stratégie de cohésion, l'Union européenne s'est employée à débloquer des moyens financiers en faveur des régions les plus en retard, les départements d'outre-mer et plus tard les îles espagnoles et portugaises. Le Poséi poursuit un triple objectif : soutien aux filières traditionnelles, diversification de l'agriculture, régime spécifique d'approvisionnement. Cependant, la diversification ne doit pas pénaliser les cultures traditionnelles. Les OCM destinées à protéger celles-ci sont contraires aux règles de l'OMC, qui exige sous peine de sanctions l'ouverture des marchés de l'Union aux productions mondiales. Sous la pression, l'Union a signé en décembre 2009 un accord multilatéral avec des pays d'Amérique latine, prévoyant, pour la banane, une réduction des droits de douane de 176 euros la tonne métrique à 114 euros d'ici 2017.

Cet accord a été signé sans concertation aucune avec les producteurs, qui réclament compensation. En mars 2010, de nouveaux accords avec la Colombie et le Pérou ont encore abaissé les droits à 75 euros la tonne. Les conditions de production n'étaient pas les mêmes, la compensation devient une nécessité.

L'Union européenne doit assumer ses responsabilités, en accordant des compensations en sus des crédits du Poséi. Il n'est pas question d'entamer ces derniers, au risque d'affaiblir les actions du programme. D'autant que la signature d'un nouvel accord avec le Mercosur entraînerait de nouvelles baisses de prix et des volumes de production. La Commission met en avant les gains à obtenir pour l'industrie européenne : c'est dire que notre agriculture est sacrifiée.

Je félicite mes collègues pour leur initiative, occasion de dire avec force à l'Union européenne ce que sont, chez nous, les conséquences des accords signés et d'exiger, pour l'avenir, des études d'impact. J'espère que cette proposition de résolution recueillera l'unanimité du Sénat. (Applaudissements)

M. Denis Detcheverry.  - Au cours des deux dernières années, plusieurs accords commerciaux aux effets potentiellement dévastateurs pour les économies ultramarines ont été signés par l'Union européenne. Les élus d'outre-mer n'ont cessé de tirer la sonnette d'alarme pour réclamer une compensation, en vain. Bruxelles en a accepté le principe mais ses premières propositions ne sont pas acceptables. D'autant qu'est en vue un nouvel accord global avec le Canada, qui pourrait être fatal à Saint-Pierre-et-Miquelon. Les produits canadiens de la pêche transformés sur notre territoire sont aujourd'hui exportés sans droits de douane vers l'Union européenne ; avec cet accord, le Canada n'aurait plus aucun intérêt à faire transiter ses produits par Saint-Pierre-et-Miquelon. Pire encore est le projet d'accord avec le Mercosur.

Où est la cohérence de la politique commerciale de l'Union européenne ? Certes, le Parlement a vu ses prérogatives renforcées en matière de négociation commerciales par le traité de Lisbonne mais la Commission est encore réticente à lui transmettre les informations pertinentes ; et aucune étude d'impact n'est réalisée. Où est la cohérence de cette politique avec les politiques de l'Union en matière sociale, environnementale ou sanitaire ? Ne sacrifions pas l'intérêt de nos agricultures sur l'autel de l'industrie européenne. Plutôt que le libre-échange, le juste échange, selon le mot d'Emmanuel Todd.

Dans la perspective du renouvellement de l'accord d'association de 2014, j'appelle à une réflexion sur l'articulation des futurs accords avec la double logique des PTOM et de RUP.

M. Jean-Paul Virapoullé.  - Je partage les analyses de tous les orateurs qui m'ont précédé. Mais je souhaite, monsieur le ministre, que nous nous mettions d'accord sur la méthode.

L'histoire montre que les « confettis de l'empire » sont les mal-aimés des partenaires de la France. Souvenons-nous que la politique de la chaise vide du général de Gaulle s'explique par le refus de l'Allemagne d'accepter un traitement privilégié pour les bananes de nos départements d'outre-mer. Selon le traité de Rome -l'Algérie était encore un DOM-, la France avait dix ans pour proposer des mesures d'adaptation ; elle ne l'a pas fait. En conséquence, la Cour de justice a, sur saisine privée, jugé, en 1978, que tous les mécanismes européens devaient s'appliquer intégralement à l'outre-mer. Ce n'est qu'ensuite que le Poséi a vu le jour puis qu'à la demande des élus ultramarins, le président François Mitterrand a obtenu qu'une déclaration fût annexée au traité de Maastricht prévoyant des adaptations spécifiques aux économies des départements d'outre-mer.

Le traité d'Amsterdam, devenu aujourd'hui celui de Lisbonne, a été adopté sous la présidence de M. Chirac. L'intégration des départements d'outre-mer est ainsi le fruit de la volonté des élus conjuguée à une décision de justice et à la volonté des plus hautes autorités de l'État...

Mais voilà que trois ouragans nous menacent, trois accords commerciaux qui mettent en péril la pêche et l'agriculture ultramarines. Sans riposte, c'est la mort ! Vous me direz qu'avec 2 millions d'habitants dans un marché de 300 à 400 millions d'habitants, nous sommes des nains que la libéralisation du commerce s'empressera d'écraser. Aujourd'hui, le marché européen devient une passoire et la France se vide de son sang industriel, comme le dit le président de la République. Pourquoi ? Parce qu'il n'y a pas réciprocité. Les Chinois trouveront toujours un défaut à nos produits ; mais les leurs, fabriqués sans normes environnementales ni sociales, nous inondent. Si l'on ne fait rien, on va tuer l'identité culturelle de notre pays, faite de notre agriculture, nos paysages, de notre gastronomie.

Je soutiens cette résolution mais en ayant conscience que, condition nécessaire, elle est largement insuffisante. La barrière, c'est vous, c'est le président de la République, qui l'opposera en disant à ces technocrates surpayés et irresponsables devant le peuple : assez !

Nous sommes là pour sauver notre agriculture. « A quoi sers-tu ? » me demanderont mes électeurs. Que répondre, quand tous les efforts consentis par l'Union européenne vont être anéantis ? Je vous demande, comme en 1957 le général de Gaulle, comme lors de Maastricht puis d'Amsterdam, de mettre en oeuvre cette résolution. Je proposerai par amendement qu'une clause de sauvegarde puisse être mise en oeuvre dans les six mois.

Nous savons, monsieur le ministre, que vous combattez le libre-échangisme irresponsable. Car si nous sommes pour la liberté, ce n'est pas celle qui asservit les populations. Mon vote sera un acte de foi et d'espérance. Mais je reste vigilant : démocrates, nous avons été élus pour bâtir, non pour détruire, pour servir, non pour laisser asservir. (Applaudissements)

M. Jacques Gillot.  - Nos produits agricoles se caractérisent par leur qualité, et leur authenticité -voilà nos atouts. Un tiers de la surface de la Guadeloupe est consacré à la banane, premier secteur d'exportation et premier employeur agricole. Viennent ensuite la canne et le sucre. C'est dire le poids économique d'un secteur déterminant pour notre société.

L'ouverture du marché de la banane à la suite des accords de 2010 font peser de rudes menaces sur ce fragile équilibre. Les pays d'Amérique latine bénéficient de coûts de production très inférieurs aux nôtres. Et de nouveaux accords sont en vue. Tout se passe comme si l'Union européenne nous sacrifiait en faisant miroiter des succès industriels. Et ceci, en faisant entrer sur son marché des produits qui ne répondent pas aux normes sanitaires et environnementales qu'elle s'impose. Je m'interroge sur la cohérence des différentes politiques européennes, dont les objectifs semblent contradictoires... L'Union a inventé le Poséi, mais multiplie les accords potentiellement dangereux pour les RUP...

Je souscris donc pleinement à la demande de compensation, propre à renforcer les filières agricoles et à les préparer à faire face à l'afflux de produits étrangers.

La Commission devrait être plus souple dans les négociations sur l'octroi de mer. Elle doit intégrer que l'agriculture n'est pas un secteur comme les autres, car sa richesse est faite d'hommes.

Les régions d'outre-mer sont un atout à valoriser, non une monnaie d'échange dans les négociations commerciales ! (Applaudissements)

M. Jean-Étienne Antoinette.  - L'intérêt de cette résolution est démontré, car les conséquences des accords commerciaux doivent être évaluées. S'ajoute la prise en compte des spécificités parmi les RUP.

La Guyane est relativement indifférente aux accords commerciaux car son économie ne repose guère sur l'exportation de bananes ou de sucre : son agriculture privilégie la production vivrière de légumes, de tubercules et de fruits. Au demeurant, la contribution de l'agriculture guyanaise au PIB départemental est proche de ce que l'on constate en Guadeloupe, en Martinique et à la Réunion.

Malgré ses mérites, le programme Poséi n'échappe pas à certaines faiblesses car il soutient principalement de grands secteurs, comme la production de bananes. Seules les quantités produites sont prises en compte.

Pour le sucre, les mesures visent à compenser la baisse des prix sur le marché international. Or les aides européennes ne suffisent pas, malgré les quelque 80 millions d'euros consacrés dans les fonds de l'Union, pour garantir le prix de vente d'une production sujette aux aléas extérieurs. Les aides nationales sont toujours nécessaires pour maintenir cette activité.

La Cour des comptes européenne a constaté qu'il fallait évaluer le régime spécifique d'approvisionnement (RSA).

Nous pourrions atteindre l'autosuffisance mais la Guyane subit la concurrence de produits surgelés issus du Brésil mais en provenance de l'Union européenne.

La France, surtout, doit tenir compte de la spécificité du secteur guyanais en assurant la conception et la gestion des Poséi. La détermination des éligibilités aux aides en est l'illustration, d'autant que la situation qui exclut nombre d'agriculteurs guyanais des aides des Poséi est largement du fait du Gouvernement.

Aujourd'hui, 50 % à 70 % des agriculteurs guyanais exercent sans titre de propriété. Il n'est guère étonnant, dans ces conditions, que le secteur des fruits et légumes soit si peu organisé.

Dans un contexte international de volatilité des prix des denrées alimentaires, les objectifs du Ciom visant à un développement endogène et durable des territoires ultramarins sont toujours d'une inquiétante actualité. La proposition de résolution qui rappelle à l'Union européenne sa responsabilité ne doit pas masquer celle de la France qui doit autant soutenir la compétitivité des grandes industries agro-alimentaires ultrapériphériques que le secteur agricole traditionnel et durable de proximité.

La discussion générale est close.

Discussion du texte de la proposition de résolution

M. le président.  - Amendement n°3, présenté par MM. Detcheverry et Collin.

Alinéa 3

Après la référence :

43

insérer la référence :

, 198

M. Denis Detcheverry.  - Cet amendement vise à étendre le champ de la proposition de résolution aux pays et territoires d'outre-mer (PTOM), dont fait partie notamment Saint-Pierre-et-Miquelon. Contrairement aux régions ultrapériphériques (RUP), ces pays et territoires ne font pas partie de la Communauté, bien qu'ils soient constitutionnellement rattachés à des États membres de l'Union européenne. Malgré la diversité qui les caractérise, les PTOM ont de nombreux points communs : ils sont vulnérables aux chocs venant de l'extérieur et dépendent en général d'une base économique étroite. Ils dépendent fortement des importations de biens et d'énergie. À ce titre, compte tenu du lien particulier qui les unit à l'Union européenne, ils bénéficient d'un traitement privilégié dans le cadre de la coopération économique et commerciale. Alors que la décision d'association de 2001 doit faire l'objet d'une révision, cet amendement rappelle l'indispensable solidarité de l'Union européenne à l'égard des habitants des PTOM -qui sont en principe citoyens européens. Les PTOM font partie de la « famille européenne ». C'est pourquoi leurs intérêts doivent être pris en compte dans la définition de la politique commerciale de l'Union européenne, notamment lors de la négociation d'accords commerciaux.

Cette explication s'applique à l'ensemble des amendements que j'ai déposés.

M. Daniel Marsin, rapporteur.  - L'Union européenne distingue les RUP et les PTOM, ces derniers ne faisant pas partie du territoire de l'Union.

Je comprends les préoccupations de M. Detcheverry, que M. le ministre pourrait peut-être rassurer.

J'ajoute que les députés ont déjà adopté, en 2010, une résolution européenne insistant sur la prise en compte des PTOM par l'Union européenne dans ses négociations commerciales.

Pour toutes ces raisons, la commission ne souhaite pas inclure les PTOM dans le champ de la résolution, axée sur les RUP, le Poséi, la banane, le sucre et le rhum.

J'espère que les propos rassurants du ministre permettront à M. Detcheverry de retirer ses amendements.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - En effet, il convient de maintenir la cohérence de la résolution.

Au demeurant, le Gouvernement veille à l'accord commercial négocié avec le Canada pour préserver le développement de Saint-Pierre-et-Miquelon.

M. Denis Detcheverry.  - Les accords négociés dans la Caraïbe sont source de difficultés analogues à celles qui se poseront bientôt à Saint-Pierre-et-Miquelon. Mieux vaut prévenir que guérir. Je retire les amendements à contrecoeur.

Les amendements nos3 à 9 sont retirés.

M. le président.  - Amendement n°10, présenté par Mme Hoarau et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 11

Rédiger ainsi cet alinéa :

Considérant que l'accord conclu en décembre 2009 à Genève par l'Union européenne avec les pays d'Amérique latine, puis les accords de libre échange conclus en mars 2010 par l'Union européenne avec la Colombie et le Pérou, font courir un risque important à l'agriculture des régions ultrapériphériques françaises,

Mme Gélita Hoarau.  - En décembre 2009, l'accord multilatéral de libre-échange entre l'Union européenne et les pays d'Amérique latine a organisé une réduction de 35 % des droits de douane sur la banane latine entrant sur le marché européen. Cette baisse progressive fera passer ce droit de douane de 176 euros en décembre 2009 à 114 euros par tonne au 1er janvier 2017.

La Commission a prévu un fonds de 200 millions d'euros pour soutenir les pays ACP, mais rien pour les régions ultrapériphériques.

Quant aux accords bilatéraux de mars 2010 signés avec la Colombie et le Pérou, ils visent à réduire davantage les droits de douane, sur la banane notamment. Les préjudices sur l'agriculture des RUP seront considérables.

M. Daniel Marsin, rapporteur.  - Cet amendement apporte une précision utile.

L'amendement n°10 rectifié, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°2, présenté par Mme Hoarau et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 16

Compléter cet alinéa par les mots :

, en abondant en conséquence, par le budget de l'Union européenne, l'enveloppe du programme d'options spécifiques à l'éloignement et l'insularité (POSEI).

Mme Gélita Hoarau.  - La proposition de règlement de la Commission européenne portant mesures spécifiques dans le domaine de l'agriculture en faveur des RUP fixe une dotation financière qui s'élève annuellement à 771,74 millions d'euros.

Cette somme est affectée à des opérations déjà arrêtées. Toute compensation rendue nécessaire à la suite d'accords commerciaux conclus entre l'Union européenne et des pays tiers et portant atteinte aux productions des RUP ne peut être prise sur l'enveloppe initiale du Poséi, sauf à l'abonder en conséquence à partir du budget de l'Union européenne.

M. Daniel Marsin, rapporteur.  - Cet amendement pertinent est cohérent avec la position du Gouvernement. Avis favorable.

L'amendement n°2, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°1 rectifié, présenté par M. Virapoullé.

Compléter la proposition de résolution par un alinéa ainsi rédigé :

Souhaite que soit précisé par un règlement procédural spécifique, le dispositif de sauvegarde à mettre en oeuvre lors de tout accord économique entre l'Union Européenne et un pays tiers, emportant des conséquences sur les économies des régions ultrapériphériques.

M. Jean-Paul Virapoullé.  - En décembre 2009, la Commission a adopté des clauses de sauvegarde, sans les organiser. C'est comme un médecin qui prescrirait un médicament sans donner sa posologie ! Il serait donc hautement souhaitable de préciser ces modalités dans un règlement procédural spécifique. Ce dispositif pourrait également être appliqué pour tout accord commercial impliquant les régions ultrapériphériques.

M. Daniel Marsin, rapporteur.  - Nous abordons un sujet important, mais délicat, qui avait été abordé en mars 2011 à l'occasion des questions cribles thématiques : le ministre s'en était expliqué.

Cet amendement de bon sens va plus loin que la proposition de résolution. J'y suis favorable.

L'amendement n°1 rectifié, accepté par le Gouvernement, est adopté.

Vote sur l'ensemble

L'ensemble de la proposition de résolution est adopté.

(Applaudissements)

M. le président.  - Cette résolution sera transmise à l'Assemblée nationale et au Gouvernement.

Je me félicite que l'outre-mer donne un bel exemple d'unanimité nationale !

Prochaine séance aujourd'hui, mercredi 4 mai 2011, à 14 h 30.

La séance est levée à 1 h 55.

René-André Fabre,

Directeur

Direction des comptes rendus analytiques

ORDRE DU JOUR

du mercredi 4 mai 2011

Séance publique

DE 14 HEURES 30 A 16 HEURES 30

1. Proposition de loi tendant à réprimer la contestation de l'existence du génocide arménien (n°607, 2009-2010).

Rapport de M. Jean-Jacques Hyest, fait au nom de la commission des lois (n°429, 2010-2011).

DE 16 HEURES 30 A 18 HEURES 30

2. Proposition de loi relative aux expulsions locatives et à la garantie d'un droit au logement effectif (n°300, 201062011).

Rapport de Mme Isabelle Pasquet, fait au nom de la commission des affaires sociales (n°463, 201062011).

A 18 HEURES 30 ET LE SOIR

3. Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, portant dispositions particulières relatives aux quartiers d'habitat informel et à la lutte contre l'habitat indigne dans les départements et régions d'outre-mer (n°267, 2010-2011).

Rapport de M. Georges Patient, fait au nom de la commission de l'économie (n°424, 2010-2011).

Texte de la commission (n°425, 2010-2011).

Avis de M. Serge Larcher, fait au nom de la commission de l'économie (n°464, 2010-2011).