Journée du 19 mars

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, relative à la reconnaissance du 19 mars comme journée nationale du souvenir et de recueillement à la mémoire des victimes civiles et militaires de la guerre d'Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc.

Discussion générale

M. Kader Arif, ministre délégué auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants .  - Le travail de mémoire est une nécessité, une exigence, une responsabilité. Les drames d'Afrique du Nord, par leur proximité, sont encore l'objet de réminiscences douloureuses qu'il nous appartient collectivement de cicatriser.

M. Yvon Collin.  - Très bien !

M. Kader Arif, ministre délégué.  - Les moments de commémorations ritualisent le passé commun. L'Assemblée nationale a pris l'initiative de ce débat. De quelle façon nous souvenir ? La question impose à chacun de faire un pas, non de côté mais en avant. Souvenons-nous des appelés du contingent, qui ont accueilli avec soulagement la fin des hostilités ; des harkis, qui ont combattu aux côtés de la France et qui ont payé un lourd tribut ; des civils, victimes des périodes sombres des fins de conflits. Il convient de penser à tous ceux-là, pour tourner la page des querelles stériles et amener notre pays à regarder son passé en face, dans le respect de toutes les victimes, ce qui est indispensable pour construire un avenir commun.

Votre honorable chambre est par essence celle de la réflexion, de la mesure et de la sagesse. Il vous incombe de mener à son terme le processus législatif, sans ingérence du pouvoir exécutif qui s'en remet à votre sagesse. (Applaudissements à gauche et sur quelques bancs UMP)

M. Alain Néri, rapporteur de la commission des affaires sociales .  - (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Nous débattons de la reconnaissance officielle de la guerre d'Algérie par la Nation. Une proposition de loi a été adoptée le 22 janvier 2002...

M. Jean-Claude Carle.  - Il y a dix ans !

M. Alain Néri, rapporteur.  - La guerre d'Algérie ne s'est pas terminée le 19 mars, date du cessez-le-feu, loin de là.

M. Jacky Le Menn, vice-président de la commission des affaires sociales.  - C'est vrai.

M. Alain Néri, rapporteur.  - Il est temps de rendre hommage à la troisième génération du feu qui a répondu avec abnégation et courage à l'appel de la Nation, sans toujours comprendre ou partager ses objectifs. Beaucoup ne connurent leur père qu'à 5 ans, de retour de captivité, d'autres ne le connurent pas, ni leurs mères, déportées. Songez aux femmes ayant vu partir leurs époux en 1939, qui voyaient partir leurs fils vers l'Algérie, où la guerre n'était pas nommée. On parlait d'événements, de pacification, de maintien de l'ordre. On a abusé les Français : 30 000 morts, les trois armes, de terre, air, mer, engagées, avec 500 000 militaires sur le terrain, 2 millions de Français ayant participé à cette guerre. Il fallut attendre trente-sept ans, en 1991, pour qu'une proposition de loi socialiste, dont je fus le rapporteur, reconnaisse enfin qu'en Algérie, c'était la guerre. Avant, on reconnaissait la qualité de combattant, les morts, mais pas la guerre.

Cette guerre, qui fut trop longtemps sans nom, ne doit pas rester plus longtemps sans date de reconnaissance et de souvenir.

M. François Marc.  - Très bien !

M. Alain Néri, rapporteur.  - Le 19 mars, ce ne fut pas la fin des souffrances.

M. Jacky Le Menn, vice-président de la commission des affaires sociales.  - Loin de là.

M. Alain Néri, rapporteur.  - Les pieds-noirs durent quitter leur terre natale. Les harkis, qui avaient cru en la parole de la France, furent désavoués et abandonnés sur ordre du gouvernement. Ceux qui furent accueillis en France le durent à des officiers qui désobéirent et emmenèrent leur harka. Ils furent parqués dans des camps où ils demeurèrent confinés pendant de longues années.

J'ai visité, dans les années soixante-dix, le camp de Mas-Thibert où fut accueilli dans de déplorables conditions la harka du Bachaga Boualem. Nous n'avons pas de raison d'être fiers des conditions d'accueil des harkis en général. Les souffrances des uns et des autres doivent être reconnues à égalité par la France. La guerre d'Algérie appartient à notre histoire, et la troisième génération de la guerre doit disposer d'une date historique et symbolique, comme les deux précédentes.

L'armistice de 14-18 n'est pas la fin de la Première Guerre mondiale, qui se poursuit en Orient. Le 8 mai, n'est pas la fin de la Seconde Guerre mondiale, mais la date de la capitulation nazie.

Personne ne pourra nous faire avaler un Memorial Day. (Applaudissements à gauche)

Pour la troisième génération, c'est le 19 mars, date du cessez-le-feu, pas de la fin des combats. Cette date mérite notre respect car le contingent qui s'est battu en Algérie à l'appel de la Nation a aussi fait obstacle au putsch des généraux. (Applaudissements à gauche)

M. Jean-Claude Frécon.  - Très bien !

M. Alain Néri, rapporteur.  - La France a l'occasion de se réconcilier avec son histoire. Nous devons graver dans le marbre de la loi toutes ces souffrances inscrites dans la mémoire et la chair des hommes. Ce sera l'honneur du Sénat de voter cette loi. (Applaudissements à gauche)

M. Guy Fischer .  - Enfin ! Enfin en cette année symbolique du cinquantième anniversaire du cessez-le-feu en Algérie, nous voyons aboutir l'exigence de la troisième génération du feu : le 19 mars reconnu comme date commémorative de la guerre d'Algérie. Ce texte est issu des travaux de l'Assemblée nationale de 2002. Au Sénat, j'avais à de nombreuses reprises déposé des propositions de loi en ce sens. J'ai l'impression de vivre un moment historique exceptionnel que nous avons tant attendu.

Il a fallu longtemps pour que la guerre d'Algérie soit reconnue par la loi de 1999. (Applaudissements à gauche)

M. Roland Courteau.  - Il fallait le dire !

M. Guy Fischer.  - Ce fut un premier pas que nous prolongeons aujourd'hui. Une date de commémoration doit avoir un sens historique et symbolique. Pourquoi tant de temps perdu ? La France et l'Algérie entretiennent des relations complexes, faites d'ombre et de lumière. Nous disposons des travaux d'historiens comme Benjamin Stora, ou des livres d'écrivains comme Mathieu Belezi qui évoque « le chant funèbre d'une terre meurtrie ».

J'ai organisé au Sénat en 2010 un colloque intitulé « 1940-1962 : les troubles de la mémoire française ». Avec des historiens, nous avons réfléchi aux difficultés de cette mémoire confrontée à l'histoire.

Cette proposition de loi n'est pas un prêt-à-penser. L'offense à l'Histoire, c'était le 5 décembre. (« Eh oui ! » à gauche) La date doit avoir un sens, celui du cessez-le-feu, au lendemain des accords d'Évian. Certes, des hommes et des femmes sont tombés après cette date. Le drame des rapatriés doit rester dans la mémoire collective et l'abandon des harkis ne doit pas être oublié. À Vénissieux, nous avons construit des logements pour accueillir les uns et les autres. (Applaudissements à gauche)

Le 19 mars est une date clé, un point d'appui pour la mémoire et l'histoire. J'espère que nous allons enfin mettre un terme à de tristes polémiques. Qui remettrait en question le 11 novembre ou le 8 mai ?

M. Charles Revet.  - Cela n'a rien à voir !

M. Guy Fischer.  - Si ! Ce sont l'oubli et le déni qui cristallisent le ressentiment et la haine. La vérité apaise, comme l'a dit mardi M. Assouline, lorsque nous débattions du massacre d'octobre 1961.

Je veux relever la contradiction du Gouvernement : reconnaître les exactions commises, et mettre à l'honneur le tristement célèbre général Bigeard ! Le ministre des relations avec le Parlement ne m'a pas répondu, mardi dernier. J'y reviendrai donc sans cesse, jusqu'à ce que j'obtienne une réponse. Ne demeurons pas un pied dans le déni et un pied dans la reconnaissance des faits.

Quelle politique de la mémoire entend mener le Gouvernement ? Il faut lever toute ambiguïté sur l'instauration d'une date unique de commémoration. La loi de février 2012, faisant du 11 novembre la date anniversaire de tous les conflits, est le dernier mauvais coup de l'ancienne majorité. Allez-vous l'abroger ? Les programmes d'enseignement ne doivent-ils pas faire une place plus grande à tous les conflits ? Optimiste de nature, j'espère que notre Nation prendra toute sa place dans des lendemains qu'il nous faut construire ensemble, afin que les générations futures vivent mieux ensemble !

M. Hervé Marseille .  - Notre déficit public est abyssal, le chômage explose. (Exclamations à gauche) Le commerce extérieur se détériore...

M. Jacky Le Menn.  - La faute à qui ?

M. François Marc et M. François Rebsamen.  - C'est l'héritage !

M. Hervé Marseille.  - Or, depuis cinq mois, votre majorité déconstruit ce qui allait dans le bon sens. Certes, vous avez fait voter le traité européen signé par l'ancien président de la République. Vous n'avez fait voter que deux lois : celle sur le logement, censurée par le Conseil constitutionnel, et l'autre sur les emplois d'avenir...

Or vous nous proposez de voter un texte adopté par l'Assemblée nationale il y a dix ans ! Quelle urgence y avait-il à demander au Parlement de voter ce texte ?

M. Jean-Jacques Mirassou.  - C'est méprisable !

M. Hervé Marseille.  - L'article 4 de la loi de février 2005 disposait que la colonisation avait un rôle positif.

M. Guy Fischer.  - Article scandaleux !

M. Hervé Marseille.  - Le Conseil constitutionnel avait jugé ce dispositif de nature réglementaire. Restons dans le cadre de notre fonction de législateur et soyons cohérents ! M. Sueur nous expliquait ici même que le texte sur les génocides n'était pas de notre ressort. M. Badinter rappelait que le Parlement n'était pas un tribunal et qu'il ne lui appartenait pas d'écrire l'Histoire. En 2004, M Ayrault a demandé la création d'une commission d'enquête sur les massacres commis après le cessez-le-feu, pour identifier les responsables de la fusillade de la rue d'Isly ou du massacre d'Oran. Vous semblez maintenant les passer sous silence ! (Exclamations)

M. Alain Néri, rapporteur.  - Pas du tout !

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Tout ce qui est excessif est insignifiant !

M. Hervé Marseille.  - Les harkis sont protégés contre les injures et les diffamations, grâce à la loi que nous avons fait voter. Ce texte lui fait injure, puisqu'il nie les drames qui ont suivi.

Après les accords d'Évian, les exactions ont perduré ; commémorer cette date, c'est le nier. En 1962, la France a abandonné les harkis.

Il est parfois difficile de regarder le passé en face. L'injustice a été entièrement réparée depuis 1994 avec la loi de 2005. Ne faisons pas machine arrière en oubliant les tragédies qui se sont déroulées après le 19 mars 1962 !

La commémoration doit rassembler, non diviser. Reprenons les propositions du rapport Kaspi qui retenait le 8 mai, le 14 juillet et le 11 novembre, pour commémorer tous les conflits qu'a connus la France. À l'inverse, la date du 19 mars ne rassemble pas, elle divise ! (Protestations sur les bancs socialistes)

M. Charles Revet.  - Eh oui !

M. Hervé Marseille.  - Elle ravive les plaies que le 5 décembre avait pansées. Avec mon groupe je ne voterai pas ce texte. (Applaudissements à droite)

M. Robert Tropeano .  - Longtemps guerre sans nom, la guerre d'Algérie ne doit pas être une guerre sans fin. Ce conflit extrêmement violent s'est déroulé entre 1954 et 1962, même si d'autres crimes ont été commis ensuite. Il faut créer les conditions du rassemblement serein pour les 2 millions de jeunes soldats envoyés de l'autre côté de la Méditerranée et toutes les victimes civiles assassinées avant et après le 19 mars. Il ne s'agit pas de refaire l'histoire, mais de la regarder en face. (Approbations à gauche)

Les tergiversations ne servent à rien. J'ai toujours soutenu la vérité historique et je souhaite que l'on rende hommage à toutes les victimes. La date du 19 mars n'occulte en rien les événements tragiques qui suivirent.

Pourquoi tant de lenteur quand il s'agit de la guerre d'Algérie ? La loi du 18 octobre 1999 a remplacé un nom qui était un déni par celui de guerre d'Algérie.

M. Roland Courteau.  - C'était un gouvernement de gauche !

M. Robert Tropeano.  - La loi de 1974 a accordé la qualité de combattants à ceux qui y participèrent mais son rapporteur au Sénat, membre de la Gauche démocratique, rappela à quelles vicissitudes fut soumis ce projet de loi. Il nous est enfin permis d'examiner un texte voté par l'Assemblée nationale il y a dix ans, resté ensuite dans les limbes parlementaires. Les plaies de cette tragédie sont encore très vives. Cette guerre est passionnelle à cause de la cécité politique sur la politique coloniale et la nécessaire décolonisation ; elle est faite de culpabilité, à cause de la torture, de honte à cause de l'abandon des harkis, et de douleur à cause de l'exode de dizaines de milliers de rapatriés pour qui l'Algérie était la terre natale.

Comme le dit Benjamin Stora, la mémoire des uns n'est pas celle des autres : l'histoire n'est pas la même, selon que l'on ait été soldat, harki ou civil !

Pour la majorité du groupe RDSE le choix du 19 mars est celui de la date symbolique la plus significative. Ni défaite, ni victoire, le cessez-le-feu est la promesse d'une paix retrouvée des deux côtés de la Méditerranée. J'espère que le Sénat votera ce texte, comme il l'a fait il y a deux jours au sujet de la manifestation d'octobre 1961. (Applaudissements au centre et sur les bancs socialistes)

M. Jean-Vincent Placé .  - Il y a cinquante ans que la guerre d'Algérie a officiellement pris fin. La mémoire s'efface avec les années. Ne pas oublier, c'est l'enjeu de ce débat.

Le groupe écologiste ne voulait pas travailler dans l'urgence et je rends hommage au travail de M. Néri.

Chacun a eu le temps de s'interroger et de nourrir sa propre réflexion. Le sujet est délicat, car il concerne le souvenir qui appartient à chacun, selon son parcours personnel. La mémoire est hétérogène et plurielle mais il est un fait objectif : le 19 mars 1962 le gouvernement français et le GPRA ont conclu un cessez-le-feu. Le 8 avril 1962, 90,7 % des Français ont ratifié les accords d'Évian, qui ne marquent pas la fin des souffrances.

Cette date, qui fait sens, réunit un consensus assez large.

Nous devons notre vote aux victimes : avant le cessez-le-feu, 24 267 militaires avaient été tués ainsi que 2 788 civils, sans oublier 875 disparus. De 30 à 150 000 harkis tués, 141 000 soldats de l'armée de libération algérienne et de 300 à 400 000 Algériens décédés. La France a fini par qualifier cette tragédie de guerre.

Avec ce texte nous ne faisons que parachever cette reconnaissance officielle. Mais gardons-nous de jouer un rôle qui n'est pas le nôtre : nous ne sommes pas historiens ni juges. À chacun de se recueillir, aux historiens de travailler sur les événements historiques, au législateur de fixer une journée du souvenir, à des fins pédagogiques, car la connaissance du passé permet de construire un avenir meilleur.

Il n'y a pas de vérité absolue, pas de date parfaite, mais il faut pouvoir se recueillir tous ensemble. C'est pourquoi, je voterai, comme la presque unanimité du groupe écologiste, cette proposition de loi qui avait été cosignée par Noël Mamère avec Bernard Charles des radicaux de gauche. (Applaudissements sur les bancs écologistes et à gauche)

M. Marcel-Pierre Cléach .  - (Applaudissements à droite) Nous sommes appelés à nous prononcer sur un texte voté il y a dix ans à l'Assemblée nationale. Le procédé est étrange. Est-il pertinent ? La date du 19 mars ravive un vieux débat qui divise le monde des anciens combattants.

M. Charles Revet.  - Eh oui !

M. Marcel-Pierre Cléach.  - M. le rapporteur estime que le 19 mars permettra de se rappeler des morts avant et après cette date. Vous voulez rassembler, mais le monde combattant est divisé sur la question.

Le mouvement d'indignation que soulève votre initiative montre que votre choix n'est pas opportun, alors que l'apaisement était revenu. Je regrette que les auteurs de la proposition de loi n'aient pas eu la sagesse de l'un d'entre eux, qui fut secrétaire d'État et déclara ici même que cette question touchait au plus profond de notre histoire, que sur ce sujet, on ne pouvait décider par une simple majorité politique d'une date de commémoration. M. Le Floch, constatant l'absence de consensus, ne persista pas dans son intention première de présenter un texte. De nombreuses associations d'anciens combattants s'opposaient à cette date. François Mitterrand déclarait, en septembre 1981, que le recueillement ne devait pas être fixé le 19 mars...

M. Charles Revet.  - Souvenez-vous !

M. François Rebsamen.  - Respect pour lui !

M. Marcel-Pierre Cléach.  - ...car il y aurait confusion dans l'esprit de nos concitoyens. La guerre a continué après cette date. Voilà de sages paroles, hélas oubliées.

Tous les présidents de la République se sont opposés à cette commémoration le 19 mars. Je suis très opposé à ce texte pour des questions de fond, de forme et d'opportunité.

Ce texte ravive les plaies de toutes celles et tous ceux qui ont perdu un mari, ou un fils. Les hostilités ne se sont pas arrêtées le 19 mars. Ensuite, près de 150 000 harkis furent exécutés dans des conditions atroces, et même s'ils ne furent que 60 000, ce furent 60 000 de trop. L'armée française enregistra encore 152 morts et 422 blessés, 2 000 civils disparurent, le massacre d'Oran fit 450 tués.

La France ne célèbre que des victoires. Célébrons-nous le 22 juin 1940, le 21 juillet 1954, date de la signature des accords de Genève ? Non, nous célébrons le 8 mai...

M. Alain Néri, rapporteur.  - Grâce à François Mitterrand !

M. François Rebsamen.  - Vous l'aviez supprimé !

M. Marcel-Pierre Cléach.  - ...et le 11 novembre. Et c'est une question de décence : on ne peut célébrer nos morts le jour où l'Algérie fête son indépendance. Choisir cette date, c'est raviver les souvenirs de ceux qui servirent en Algérie après cette date et qui assistèrent impuissants aux atrocités qui furent commises. Je ne peux croire que ce texte servira de caution avant le voyage de M. Hollande en Algérie. (Exclamations indignées à gauche)

La loi du 27 février 2005 portait reconnaissance de la Nation aux Français rapatriés. Nous avons voté à la quasi-unanimité la loi relative au 11 novembre, comme date commémorative de tous les conflits. M. Néri a fait adopter un amendement pour qu'on ne confonde pas cette date avec les autres commémorations. Ce texte est superfétatoire. (Exclamations à gauche) Alors que nous allions vers un apaisement des passions, vous ravivez les tensions !

M. Jean-Marc Todeschini.  - Le temps !

M. Marcel-Pierre Cléach.  - J'ai fini. Pour les soldats, le 19 mars a signifié le retour en métropole, pour nos compatriotes rapatriés d'Algérie et pour les harkis, c'est une date de grande tristesse. Pour toutes ces raisons, le groupe UMP ne votera pas ce texte. (Applaudissements à droite) Je remercie le ministre d'avoir choisi une position de rassemblement, comme ses prédécesseurs, en invitant le Sénat à un vote de sagesse.

M. Georges Labazée .  - Cinquante ans après la signature des accords d'Évian, il est temps de regarder la vérité en face. Le 19 mars sera une journée nationale, acte de mémoire que nous devons aux générations futures.

Les jeunes veulent la paix, la vérité et la justice, des deux côtés de la Méditerranée, victimes d'une histoire coloniale occultée ici, d'une guerre d'indépendance mythifiée là-bas. M. Néri déclarait à l'Assemblée nationale que cette guerre sans nom ne devait pas devenir une guerre sans date pour se recueillir. Le 19 mars s'impose à l'évidence comme la seule capable de symboliser les conflits en Afrique du Nord. La guerre d'Algérie a droit à une date de mémoire : le 19 mars s'impose, même si ce ne fut pas la fin de la guerre.

Cette décision fut ratifiée par le référendum d'avril, à une écrasante majorité. Le 19 mars n'est pas signe de victoire ou de défaite, mais d'une décision politique, l'arrêt des combats. Nous devons encourager la réconciliation nationale et la recherche historique, dans un but pédagogique, à la lumière des valeurs républicaines et humanistes sur lesquelles repose notre constitution. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. le président. - Je dois suspendre la séance. Le débat se poursuivra le 20 novembre à 14 h 30.