Débat sur les PME

M. le président.  - L'ordre du jour appelle un débat sur la place des petites et moyennes entreprises dans notre économie.

M. André Reichardt, pour le groupe UMP.   - Notre débat, à l'initiative du groupe UMP, porte sur le rôle des PME dans notre économie. La préoccupation essentielle des Français est l'emploi, alors que pour le dix-neuvième mois consécutif, le chômage a augmenté en novembre dernier, à raison de 1 250 chômeurs supplémentaires chaque jour.

Sur les 60 450 faillites d'entreprises recensées par la Banque de France, 56 000 concernent des PME. Le regard se porte surtout sur les grands groupes, mais les plans sociaux silencieux restent ignorés. Les PSA et autres Sanofi ne sont qu'arbres qui cachent la forêt. Il est temps de mettre fin à ce malentendu et à la situation extrêmement difficile qui frappe les PME, dans tous les secteurs.

La production industrielle a reculé nettement en décembre, en données corrigées des variations saisonnières.

Dans le secteur des services marchands, la Banque de France note que l'activité est un peu moins déprimée en décembre mais ne prévoit aucun rebond à court terme. Dans le bâtiment, l'activité est correcte mais les prix sont très bas. Les marges étant à leur niveau le plus bas depuis trente ans en 2012, l'investissement des entreprises a ralenti. En 2013, les industriels prévoient un recul de 2 %. Quelles actions mettre en oeuvre en faveur des PME ? La première difficulté qu'elles rencontrent tient à leur compétitivité insuffisante. Pour avoir du travail, une entreprise doit remporter des marchés. Elle ne le peut que si elle est compétitive. Dans son rapport, Louis Gallois a préconisé un choc portant sur un transfert de charges de 30 milliards d'euros en un ou deux ans, la stabilité fiscale, l'accès facilité au financement, la sanctuarisation du budget de la recherche publique et du soutien à l'innovation, un véritable pacte pour les PME.

Sur la compétitivité-coût, le Gouvernement n'a pas souhaité alléger les cotisations sociales. Il a préféré un crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi adopté dans la loi de finances rectificative de la fin de l'année 2012. Certes, le CICE pouvait être l'occasion de créer un choc de confiance en abaissant le coût du travail. Son application dès 2013, pensions-nous, pouvait apporter aux entreprises une bulle d'oxygène. Encore eût-il fallu qu'il fût simple, lisible, traduisible en espèces sonnantes et trébuchantes, ce qui est loin d'être le cas. Près de 80 % des chefs d'entreprises pensent qu'il n'abaissera pas le coût du travail.

Le Gouvernement en a écarté les travailleurs indépendants, en l'absence de salaire, dixit le ministre du travail. Pourtant, ils ne sont pas, que je sache, exonérés de cotisations sociales. Leur indépendance, le risque qu'ils assument justifient-ils leur mise à l'écart ?

Le relèvement du taux normal et réduit de TVA préconisé par le rapport Gallois a, lui, bien été suivi d'effets. Il en résultera une baisse d'activité et un surcoût de concurrence des auto-entrepreneurs, non soumis à la TVA.

Il est à craindre que les PME en pâtissent. Quant à la compétitivité hors coût, les PME réclament une plus grande flexibilité dans le travail. Il faut saluer l'accord interprofessionnel du 11 janvier, même s'il ne constitue qu'une première étape. Je ne suis pas sûr de la sécurisation de l'emploi grâce à la taxation des CDD quand je lis sur le site du ministère du travail que le nombre de ces contrats ne sera pas divisé par deux. Cet accord doit être transposé en une loi. Nous serons attentifs à ce qu'elle ne soit pas vidée de ses articles concernant la flexibilisation.

Il est nécessaire de faire progresser l'innovation au sein de nos entreprises. Dans notre pays, on confond encore trop souvent la recherche fondamentale et l'innovation. C'est une culture de l'innovation qu'il faut diffuser sur le terrain. Un tel écosystème existe en Alsace, en particulier, avec «  Alsace innovation » qui accompagne et finance les projets.

Elle est la porte d'entrée des entreprises qui souhaitent innover, qu'elle accompagne, dans tout secteur économique et quelle que soit leur taille. Madame le ministre, il est souhaitable que l'État reste un partenaire fort des régions, même si son action par le CIR doit rester essentielle. Il faut aider les pôles de compétitivité, tout en tirant les leçons des évaluations récentes. Les clusters doivent se rapprocher des entreprises. Chaque région peut identifier les moteurs de croissances parmi les PME.

La formation professionnelle concerne au premier chef le développement de nos PME. La France compte 3 millions de demandeurs d'emplois, 4,7 millions si l'on inclut ceux qui ont une activité réduite. Or, 2,3 millions d'emplois ont été créés par les PME ces dernières années. C'est dire combien leur rôle est capital pour l'emploi.

Les incitations financières sont d'autant plus nécessaires que la conjoncture est difficile.

L'acte III de la décentralisation doit aboutir à une réforme profonde, passant par la création, dans les régions qui le souhaitent, d'un véritable service régional de la formation.

Les comparaisons avec l'Allemagne ne sont pas à notre avantage. Nos entreprises manquent de fonds propres, elles sont trop peu présentes à l'exportation. Il leur est de plus en plus difficile d'accéder au crédit.

La loi du 31 décembre 2012 a créé la BPI, « plate-forme de l'expansion des entreprises », en particulier des PME. Mais la BPI ne fonctionnera qu'en mode virtuel jusqu'à mai-juin, selon son directeur général. Or, un tiers des PME prévoient une dégradation d'ici là. La BPI réunira dans chaque région le SSI, les services d'Oseo et des filiales de la CDC.

On était déjà capable d'identifier les besoins des entreprises sans la BPI. Les agences des régions savent accompagner et repérer les entreprises à accompagner. Si la BPI n'est qu'un guichet unique, son utilité ne sera pas démontrée.

La commande publique doit être prise en compte, alors qu'un tiers du PIB mondial y est lié. L'Alsace a créé un service dédié.

Il n'est pas sot de réfléchir enfin aux besoins spécifiques des PME et de voter le small business act à la française annoncé depuis si longtemps.

« Si le Gouvernement accepte de sécuriser l'environnement des PME, en traçant de vraies perspectives à moyen et long terme, alors notre pays pourra véritablement compter sur le dynamisme de nos entreprises » : je suis heureux de citer le rapport d'Alain Chatillon.

Mme Nathalie Goulet.  - Et Martial Bourquin.

M. Daniel Raoul.  - Tout de même !

M. André Reichardt.  - Huit mois sont passés depuis... (Applaudissements à droite)

Mme Nathalie Goulet .  - Membre de la commission des affaires étrangères mais présidente du groupe de travail sur la désindustrialisation, présidé par M. Bourquin (« Ah ! » sur les bancs socialistes), je remercie l'UMP de ce débat opportun qui me permet cette année, la configuration politique ayant changé, de réitérer les observations que je présente normalement lors du débat budgétaire.

Nos ambassadeurs devraient être chefs de file de nos dispositifs économiques. Or, l'équipe de France marche souvent en ordre dispersé. L'attractivité de notre territoire commence à la porte de nos consulats. Que dire de la politique absurde des visas, jadis dénoncée par Adrien Gouteyron ?

Notre réseau consulaire est menacé. Le consulat de Shanghai a tiré la sonnette d'alarme cette année. Avec seize agents seulement, il faut huit semaines pour un rendez-vous dans cette circonscription qui pèse un quart du PIB chinois et 10 000 demandes sont rejetées chaque année faute de moyens pour les examiner.

Même les Italiens font mieux que nous. Compte tenu de ce que rapportent les touristes chinois, on estime à 340 000 euros la perte pour le budget de l'État et à 8 millions pour l'économie française le coût de la non-création d'un emploi pour traiter les demandes de visa. Cela vaut aussi pour Moscou, les Émirats et le Qatar.

Quant à nos missions économiques, où peu d'agents parlent les langues de leur pays de résidence et qui facturent leurs prestations, leurs résultats ne sont pas mesurés. Il manque une évaluation et un contrôle externe.

A Ubifrance, avec un budget de quelque 318 millions et une augmentation des frais de personnels, on arrive à un ratio de cinq entreprises aidées par agent ! Ses bureaux sont installés là où des prestations peuvent être vendues facilement. Cette attitude n'aide pas les entreprises à l'international, comme le soulignait M. Leconte l'an dernier. J'ai bien noté que les points 14 et 15 du pacte pour la croissance concernent l'accompagnement à l'international et le financement des PME. C'est à Ubifrance d'aller à la rencontre des acteurs de terrain. Il faut des outils de proximité.

Tous les membres d'une mission économique et d'Ubifrance devraient parler l'anglais et la langue du pays. Il est inconcevable qu'ils ne soient pas soumis à des obligations de résultats.

Vous êtes la ministre de l'économie numérique. Les réseaux sont essentiels. Les mesures que je préconise ne coûtent rien. Les gens qui viennent en France étudier ne sont pas suivis.

M. Marc Daunis.  - C'est vrai !

Mme Nathalie Goulet.  - Nos partenaires anglais et allemands parviennent à rester en contact par courriel avec 70 % de leurs anciens stagiaires. Chez nous, c'est 10 %, sur la base du volontariat et par courrier postal !

La coopération décentralisée est menée par 4 754 collectivités dans 134 pays. La Basse-Normandie coopère avec le Fujian, qui compte 38 millions d'habitants et la Haute-Normandie avec le Zhijiang qui en compte 51 millions. Nous souffrons à l'international des aberrations de notre système mais je me réjouis du partenariat État-région signé le 18 septembre pour favoriser l'exportation.

La diplomatie parlementaire n'est pas assez utilisée à l'appui de nos exportateurs. Les parlementaires en mission sont suspectés par principe de faire du tourisme sur argent public alors qu'ils sont les mieux placés pour soutenir leurs entreprises locales, dans la transparence. Les annonces de Laurent Fabius sur la diplomatie économique nous donnent espoir...

Je suis candidate, madame la ministre, à une mission que vous pourriez me confier (sourires sur les bancs socialistes) sur le concours que les parlementaires peuvent apporter à nos exportations. Vous n'aurez pas trop de cinq ans, avec notre ancienne collègue Nicole Bricq, pour mettre de l'ordre dans ce domaine. Nous sommes nombreux à souhaiter que l'équipe France gagne. Vous pouvez compter sur mon soutien (Applaudissements)

M. Jean-Pierre Plancade .  - Je tiens à rendre hommage à M. Martial Bourquin, co-auteur du rapport. (Applaudissements socialistes) Ce n'est pas très correct, monsieur Reichardt, de ne pas l'avoir cité. (Protestations sur les bancs UMP)

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Ce n'était pas volontaire.

M. Jean-Pierre Plancade.  - Le Gouvernement a d'ores et déjà engagé et annoncé des actions en faveur des PME. La BPI se met en place. Nous vous invitons, madame la ministre, à mettre rapidement en oeuvre les mesures annoncées et à les compléter. Le moral des dirigeants de PME n'est pas florissant.

On cite souvent l'exemple allemand, dont l'économie repose sur son tissu de PME. Certes, il n'est pas entièrement transposable mais les réformes courageuses menées ces dernières années outre-Rhin, en particulier concernant le marché du travail, ont joué un rôle crucial.

L'excellent rapport Gallois a mis en exergue le rôle indispensable de la montée en gamme pour notre industrie. On a créé plus de deux fois plus d'entreprises en 2011 qu'en 2000. Les 4 400 « grandes PME » allemandes réalisent 40 % des exportations. Les PME qui exportent, qui innovent créent de l'emploi.

Le rapport Gallois préconise un mécanisme d'orientation de la commande publique qui aurait pour effet de garantir aux PME 2 % des achats courants de l'État. Il faut le mettre en oeuvre.

M. Gallois souhaitait également conditionner l'aide de l'État à l'action des grandes entreprises auprès de leurs sous-traitants.

Il est urgent d'évaluer l'impact des mesures fiscales. Il faudra faire un effort de pédagogie et de proximité. Simplifier et stabiliser la réglementation et la fiscalité est un objectif majeur.

La formation est un autre enjeu fondamental. La formation en alternance par l'apprentissage devrait être l'épine dorsale des PME. C'est pourquoi nous soutenons le pacte national pour la croissance et l'emploi.

L'accès au financement sera, je l'espère, amélioré par la création de la BPI. 40 % des PME disent rencontrer des difficultés de trésorerie. J'ai insisté, enfin, auprès du ministre de l'économie sur la nécessité de mesures spécifiques à l'égard des TPE et TPI. Le ministre à confié à Jean-Michel Charpin une mission sur les délais de paiement, qui plombent bien souvent la trésorerie de ces entreprises.

L'ensemble du groupe du RDSE incite le Gouvernement à accentuer ses mesures en faveur des PME et l'assure de son entier soutien. (Applaudissements)

M. Joël Labbé .  - Le mythe du retour durable de la croissance qui résoudrait la crise est dangereux. Il empêche l'exploration de sentiers de sortie de crise vers une économie moins carbonée. Sur cette question des PME, on nous oppose souvent l'exemple allemand. Mais c'est oublier le taux de pauvreté en Allemagne.

Accordons-nous sur ce constat : la crise est multiple. La transition écologique de notre économie sera durable. Les PME, créatrices d'emploi, innovantes et ancrées sur le territoire, peuvent y contribuer.

La crise est due à la dérégulation financière, à l'explosion des inégalités et à la crise écologique.

Certes, il faut exporter. Il faut aussi répondre à la consommation locale. La relance keynésienne classique se heurterait aussitôt aux immenses défis environnementaux et à la hausse du coût des matières premières et de l'énergie.

Il faut réindustrialiser nos territoires dans le respect de l'humain, produire local pour le consommateur, investir dans les technologies vertes. Ainsi la société Doux a profité des aides européennes pour produire du poulet bas de gamme destiné à l'exportation alors qu'un poulet sur trois, consommé en France, est importé.

Veillons à la proximité des emplois, des services et des logements. On peut créer des emplois verts non délocalisables dans le bâtiment, les énergies renouvelables, les transports.

Les PME sont les forces vives de la transition vers une économie moins carbonée. Les crédits de recherche doivent être orientés vers les PME innovantes plutôt que vers les grands groupes. Il convient aussi d'alléger l'imposition des structures d'économie sociale et solidaire. Chacun devrait disposer d'un crédit formation tout au long de la vie.

J'ai parlé avec le responsable d'une scierie qui me dit que tout le matériel utilisé dans ce secteur vient du Japon. Pourquoi ne pas investir dans cette filière ? Les pays nordiques sont en avance sur nous sur l'utilisation de l'énergie éolienne en complément des moteurs sur les bateaux de taille moyenne. Le matériel de désherbage mécanique est importé d'Autriche. Ce n'est que quelques exemples de voies d'investissement à suivre. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Philippe Darniche .  - La vitalité de nos PME dans l'économie n'est plus à démontrer. Elles emploient près de 50 % des salariés, réalisent 44 % du chiffre d'affaires et 42 % de la valeur ajoutée.

En Vendée, elles tiennent une place unique : 91 % de nos entreprises emploient 9 salariés ou moins. Ce maillage d'entreprises locales tisse les liens entre générations et est ouvert sur l'avenir.

En Vendée, on compte deux fois plus de sièges sociaux restés dans le département que la moyenne nationale. Oui, le modèle de nos PME est une réponse à la crise. Encore faut-il alléger la fiscalité et leur permettre d'accéder au financement. Puissent les objectifs du Gouvernement aller en ce sens ! Les mesures prises sur la TVA sont contreproductives. Elles risquent de détruire des emplois. Renforçons la compétitivité de nos PME ! Elles sont une des mamelles de la France, comme l'eût dit Sully. Préservons-les, développons-les ! Elles sont le coeur de notre économie.

Mme Nathalie Goulet.  - Très bien !

Mme Natacha Bouchart .  - L'avenir des PME est une part essentielle de l'avenir de la France. Leur place est considérée par tous comme capitale pour la prospérité et l'équilibre de notre société.

La PME est non seulement un lieu de travail mais un lieu de sociabilité. Il y a un consensus national à cet égard.

Comment expliquer, alors, que les PME se sentent mal aimées ? Il y a débat sur les réponses à mettre en oeuvre. Les bonnes réponses sont connues, elles ne demandent qu'à être appliquées.

Mme Nathalie Goulet.  - C'est vrai !

Mme Natacha Bouchart.  - Assumons-le, sinon nous devrons refaire ce débat périodiquement, d'année en année. Et ce serait plus qu'une erreur économique, une faute.

Comme vice-présidente d'agglomération et présidente d'une agence de développement économique, j'ai pu côtoyer au plus près les PME. Parmi les réponses qu'elles ont adressées à nos questions figure la réduction des délais de paiement -ramenés, grâce à la loi de modernisation de l'économie, à quarante-cinq jours fin de mois. Reste que des PME qui ont tout pour réussir font souvent face à des problèmes de trésorerie -le crédit interentreprises représente 500 milliards d'euros par an. Il leur faut trouver des financements complémentaires ; ceux qu'ils trouvent auprès des banques obèrent leur capacité de financement et leurs fonds propres. Le gouvernement Fillon a pris des mesures permettant de changer la donne, mais le calcul des quarante-cinq jours reste complexe. Faut-il se fonder sur l'échéance de la facture ou sur sa date d'émission ? Il faut clarifier et aller vers l'alignement sur le délai retenu en Allemagne, soit trente jours. Pourquoi retarder cette réforme de bon sens ? C'est qu'il faut passer outre les récriminations de certains acteurs, grandes entreprises ou banques. Mais n'est-il pas normal qu'un sous-traitant soit payé à trente jours, comme l'est un salarié ?

De nombreux patrons se plaignent de la complexité du CICE, calculé sur la base d'un pourcentage de la masse salariale mais qui se croise avec de multiples dispositifs antérieurs. Si bien que 56 % des chefs d'entreprise déclarent ne pas envisager de l'utiliser. L'échec annoncé du CICE impose de ne pas différer plus longtemps un allégement des charges et des initiatives en faveur de la compétitivité.

Il faut également s'attacher aux moyens d'aider prioritairement nos PME exportatrices. Tout tient dans leur compétitivité. Mérite aussi d'être posée la question de la revalorisation de leurs actifs, qui se heurte à l'obstacle de la fiscalité.

Un mot de la place des PME dans la commande publique. A quand un small business act à la française sur le modèle de ce qu'a proposé Nicolas Sarkozy lors de sa campagne ?

Mme Nathalie Goulet.  - Cela ne lui a pas réussi.

M. Yannick Vaugrenard.  - Il ne suffit pas d'en parler. Vous avez été vingt ans au pouvoir.

Mme Natacha Bouchart.  - Voyez les difficultés auxquelles s'est heurtée l'entreprise de Calais qui fabrique les uniformes de cérémonie de l'armée française ; l'appel d'offres du ministère de la défense a favorisé les délocalisations...

Nous sommes tous convaincus de l'urgence à appuyer les PME. Rendons-leur la confiance qu'elles méritent. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Martial Bourquin .  - (« Ah » sur les bancs socialistes) Nous sortons d'une longue période où les PME sont restées les parents pauvres des politiques économiques et fiscales. Quand la focale a été mise sur la fiscalité des grands groupes, on a vu qu'ils payaient 33 % d'impôt sur les sociétés et les PME, 8 %... Le CIR privilégie, de même, les grands groupes, et parfois les banques... Les jeunes PME innovantes sont trop souvent traitées en variable d'ajustement.

Après dix ans de propositions incohérentes, on n'a évidemment pas mis fin à l'exception française, un pays qui compte trop peu de PME, ni freiné la désindustrialisation.

Depuis six mois, le Gouvernement a fait de la lutte pour la réindustrialisation et contre le chômage une priorité. Le chemin de cette reconquête sera long, alors que l'économie européenne est à la peine. Dans cette reconquête, il faut considérer les PME comme des partenaires de premier plan. Nous sommes fiers de nos grands groupes mais ne pouvons nous désintéresser d'entreprises qui représentent des millions de salariés et une richesse incomparable. Aidons-les à se développer, à embaucher, à exporter, à innover.

Sans les PME, il n'y aura pas de résultat sur le front du chômage. Elles seules nous permettront de réanimer les bassins d'emplois, de transmettre les savoir-faire, de développer l'alternance. Voilà les réponses qu'apporte le Gouvernement, qui a pris en quelques mois des mesures structurelles.

Le nerf de la guerre, c'est le financement. La direction de la CGPME, que j'ai rencontrée ce matin, se plaint de la frilosité des banques et de l'indigence du capital-risque. La création de la BPI sera accessible de façon privilégiée aux PME.

M. Francis Delattre.  - Quand fonctionnera-elle ?

M. Martial Bourquin.  - Elle arrive !

M. Francis Delattre.  - Oseo fonctionnait. Pouvait-on se permettre de perdre un an ?

M. Yannick Vaugrenard.  - Vous avez perdu dix ans ! (Protestations à droite)

M. Daniel Raoul.  - C'est la vérité !

M. Martial Bourquin.  - Le CICE ? Elles y auront accès ; une réduction de 4 % des cotisations sociales, ce n'est pas rien !

Le Gouvernement travaille avec les partenaires sociaux pour simplifier les démarches administratives, parfois d'une complexité ubuesque.

Dernier point, le brevet unique européen. (M. Marc Daunis approuve) Dès le 1er mai, il ne faudra plus dépenser sans compter pour enregistrer son brevet dans les pays de l'Union européenne.

M. Daniel Raoul.  - Très bien !

M. Martial Bourquin.  - Le sujet des relations entre donneurs d'ordre et sous-traitants, également, est crucial. Notre mission d'information de 2010-2011 avait montré qu'elles n'étaient pas équilibrées. La masse du crédit inter-entreprise, 600 milliards d'euros, est un frein majeur à la compétitivité et à l'emploi. Allemands et Italiens ont pris des mesures pour protéger les petites entreprises innovantes, pas nous. Il faut en venir à des délais de paiement acceptables. Je me suis penché sur ces problèmes dans le secteur industriel et mon rapport proposera des mesures simples pour réguler et pacifier ces relations ; la santé de bien des PME en dépend.

J'attends aussi des mesures structurelles pour promouvoir la mise en réseau systématique des PME afin de créer des écosystèmes industriels intelligents, assurant une solidarité des territoires. Sochaux clustérise son territoire, Sophia Antipolis est à la pointe. C'est essentiel. Il faut tisser entre grands groupes et PME des rapports de complémentarité plutôt que de soumission afin que notre économie retrouve tout son dynamisme. (« Très bien ! » et applaudissements à gauche)

M. Gérard Le Cam .  - Les PME forment un monde très varié selon l'activité et la taille de l'entreprise. Elles sont créatrices nettes d'emplois -600 000 ces huit dernières années. Il faut donc sécuriser leur environnement, rééquilibrer les relations avec les grandes entreprises, encourager l'innovation et l'exportation.

Hétérogénéité des PME, certes, mais homogénéité des difficultés. Les difficultés de trésorerie et d'accès au financement sont le lot de toutes. La création de la BPI suscite donc beaucoup d'espoir. Elle ne nous semble pas cependant en mesure de répondre à leurs besoins. La BPI n'est pas un établissement de crédit et ne pourra se refinancer, comme nous le demandions, auprès de la BCE. La BCE a prêté en un an, sans condition, 1 000 milliards à 1 % aux banques privées, qui n'ont pas, loin de là, réinvesti la totalité dans l'économie. Nous plaidons pour une réforme de la BCE et estimons que le refinancement devrait être différent selon que les banques financent l'économie réelle ou des opérations financières.

Autre instrument censé relancer l'activité économique, le CICE, ses 20 milliards d'euros et l'augmentation de la TVA qui les finance. Sans conditionnalité, c'est un véritable chèque en blanc, sans garantie de relance de l'investissement ni de création d'emplois. Il ne bénéficiera qu'aux PME constituées en SA : c'est une source d'inégalité. Quant à l'augmentation de la TVA, son poids sur les ménages sera beaucoup plus récessif que le CICE ne sera dynamisant.

Délocalisations et faillites se multiplient sous la pression de la finance. Après PSA, Renault menace de l'un des pires plans sociaux de son histoire par un chantage inadmissible. L'État doit être aux côtés des salariés. Il faut interdire les licenciements boursiers, instaurer une taxe sur la réimportation des produits délocalisés. Il y va de la survie de nombreuses entreprises

Se pose aussi, dans le secteur automobile mais pas seulement, la question de la sous-traitance, où les pratiques illégales sont nombreuses : baisses de prix imposées, exploitation indue des brevets, travail non rémunéré, incitations à la délocalisation. Il est urgent de rétablir l'équilibre.

Il serait également utile de veiller aux relations commerciales entre PME d'un côté, centrales d'achat et grande distribution de l'autre.

Quid enfin du rapport de l'homme au travail, des discriminations salariales homme-femme, des méthodes de management ? Les entreprises, quelle que soit leur taille, doivent évoluer sur la question de l'humain. (Applaudissements à gauche)

M. Francis Delattre .  - Les PME emploient près de 7 millions de salariés, soit 50 % des salariés du privé. Il faut les accompagner, car elles sont l'arme la plus fiable pour lutter contre le chômage. Quelle que soit notre tendance politique, nous sommes toujours pointus sur le diagnostic, mais flous sur les solutions concrètes. Et c'est ainsi, rapport après rapport, que l'on réforme a minima. Depuis les engagements de campagne du président de la République, le vent s'est levé ; la crise, la grogne des pigeons sont passées par là... Le Gouvernement marche sur un fil, sans filet...

M. Daniel Raoul.  - C'est courageux !

M. Francis Delattre.  - ...sous le regard d'une majorité plurielle plutôt versatile... 80 % des entreprises françaises qui ont disparu sont des PME. L'industrie française y perd des emplois et des parts de marché à l'exportation. Les constats du rapport Gallois sont aujourd'hui largement partagés. Le choc de compétitivité qu'il préconisait aurait redonné de l'oxygène et de la confiance mais le dispositif annoncé est complexe et souffre de délais de mise en place, alors que nous ne pouvons attendre. LA TVA sociale aurait produit des effets dès 2013.

Et quelle vision de l'entreprise ! Un entrepreneur, un dirigeant de PME apporte son expertise, son sens créatif, son temps, son argent, et parfois sa santé. Il mériterait plus de considération dans la communication du Gouvernement. Mais face à la mondialisation, il n'attend pas grand-chose d'un État surendetté. Les entreprises ont besoin de stabilité juridique et de stabilité fiscale et sociale. Quand M. Sapin déclare que le Gouvernement veillera à ce que le CICE ne soit pas utilisé pour acheter une Jaguar, il choque et cela se comprend.

Les chefs d'entreprises savent quels efforts il faut faire pour sortir de la crise. Aujourd'hui, ils s'expatrient, comme jadis les Huguenots qui ont fait la prospérité de l'Europe du nord.

M. Yannick Vaugrenard.  - Ce n'est pas sérieux !

M. Francis Delattre.  - M. Schäuble, ministre allemand de l'économie, estime que la France, ce grand pays, se redressera grâce à ses chefs d'entreprise...

Il faut rendre à nos entreprises de la trésorerie pour qu'elles se remettent à investir. Dans la situation de l'emploi que nous connaissons, est-il sérieux d'attendre 2014 pour améliorer leur situation ? L'Espagne, l'Italie, qui ont mené des réformes structurelles fortes, nous prennent des parts de marché. Quid, madame la ministre, de réformes structurelles en France ? La non-déductibilité des charges financières sur les intérêts d'emprunt est une spécificité française, un véritable non-sens économique. Quand à l'augmentation de l'imposition du capital, elle va pénaliser les détenteurs d'entreprises. En 2008, 7 millions de personnes épargnaient dans l'économie réelle ; elles ne sont plus que 4 millions aujourd'hui.

Les experts s'attendent à voir 200 000 à 300 000 emplois détruits. Comme dit Yvon Gattaz, pour créer des emplois, il faut créer des employeurs.

Après les 35 heures, les entrepreneurs en ont assez des taxes, de l'empilement des règlements et des normes, de l'instabilité fiscale. Ils sont au bord de la révolte. Entendez-les ! (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Yannick Vaugrenard .  - La crise dure, qui met nos entreprises à l'épreuve : 59 780 redressements et liquidations directes en 2012. Pour les PME, les défaillances sont d'abord dues à des difficultés de financement. Le Gouvernement n'a pas perdu de temps et a décidé de prendre le problème à bras-le-corps. Les propositions de M. Gallois, résultat du constat d'échec des politiques précédentes...

M. Pierre Hérisson.  - Ce n'est pas dans le rapport !

M. Yannick Vaugrenard.  - ...ont été reprises dès novembre, dans un arsenal qui mêle actions d'urgence et mesures de long terme.

La BPI sera un outil de financement indispensable : elle ouvrira aux entreprises un financement de proximité, alors que la crise a accru les difficultés de financement pour les petites entreprises. Sa capacité d'intervention sera de plus de 40 milliards d'euros, avec un effet de levier important. Elle développera également des activités de conseil et de capital risque. Car il s'agit aussi d'aider les PME à atteindre une taille critique. La France manque d'entreprises de taille intermédiaire : 4 600 contre plus de 12 000 en Allemagne. Il faut enrayer le phénomène d'absorption par les grands groupes.

J'en viens à la question épineuse des délais de paiement, préjudiciable à la compétitivité de nos entreprises, même si la loi de modernisation de l'économie a un peu amélioré les choses. Dans les faits, seul un tiers des entreprises règlent dans les délais et un quart des créances des PME ne sont acquittées qu'au-delà de soixante jours. C'est pourquoi le Gouvernement Ayrault a repris les choses en mains. Les PME pourront s'appuyer sur l'administration pour obtenir des sanctions. Quand le plan annoncé se mettra-t-il en place ? L'État s'est de son côté engagé à réduire ses propres délais de paiement à un maximum de vingt jours en 2017. La directive européenne de 2011 impose, au-delà de soixante jours, des indemnités de retard. Souhaitons que sa transposition, aujourd'hui effective, améliore les choses.

Je suis convaincu que le soutien à l'économie et à l'emploi passe par une attention accrue aux PME. Au-delà du soutien que doit leur apporter l'État, les grandes entreprises doivent comprendre que c'est leur intérêt d'aider leurs partenaires : l'esprit d'équipe et de solidarité doit prévaloir. La France en a besoin. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Antoine Lefèvre .  - Les plans sociaux dans les PME se multiplient. Je ciblerai mon propos sur les secteurs du bâtiment et de l'hôtellerie-restauration, qui contribuent à l'aménagement du territoire et à la création d'emplois non délocalisables. Or, les récentes réformes, décidées par le Gouvernement dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2012, sont pour eux très préoccupantes.

L'hôtellerie-restauration est à forte intensité de main-d'oeuvre ; en dépit de la crise, elle reste un des premiers secteurs créateurs d'emplois, qui plus est non délocalisables. Or, le nombre des disparitions annuelles d'entreprises inquiète et montre sa fragilité. Des mesures s'imposent pour éviter la désertification de zones entières du territoire. D'autant que d'autres facteurs, comme les charges supplémentaires décidées fin 2012, l'augmentation de la TVA et celle du prix des matières premières, la majoration des baux commerciaux ou des mises aux normes coûteuses viennent le pénaliser.

Le bâtiment, avec le relèvement de la TVA, l'exclusion des travailleurs indépendants du CICE, la frilosité des banques, est lui aussi dans une situation difficile. Les carnets de commandes se réduisent, les trésoreries sont exsangues, 35 000 emplois ont été perdus -1 800 pour le seul département de l'Aisne. Sans compter les difficultés d'accès à la commande publique ou la fiscalité de la transmission de l'outil de travail.

Les responsables du secteur ont des propositions, parmi lesquelles la prorogation de l'éco-prêt, la sécurisation des délais de paiement ou la limitation dans le temps du régime de l'auto-entrepreneur : ils méritent d'être entendus.

Je veux aussi plaider pour les opticiens indépendants, profession dynamique que la réforme projetée du code de la mutualité pourrait mettre en grande difficulté ; contraints de baisser en gamme, ils pourraient être contraints d'importer des produits, au détriment d'entreprises françaises innovantes.

Sachons garder vivace le potentiel si dynamique de nos entreprises ! (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Marc Daunis .  - Il n'est jamais inutile de débattre des PME, premier employeur national qui s'articule avec l'intelligence de nos territoires, en particulier celui que j'ai l'honneur de représenter, qui abrite Sophia Antipolis, écosystème exemplaire. Il n'y a pas, monsieur Delattre, de défenseurs de l'entreprise d'un côté de l'hémicycle et de l'autre des obscurantistes qui veulent retourner au temps des Huguenots. Nous militons tous pour nos entreprises. Vous ne pouvez nous accuser d'immobilisme, après dix ans d'attentisme notamment sur la TVA sociale, le doublement de la dette -bravo !- un déficit commercial abyssal et 700 000 emplois industriels perdus - bravo encore ! (Exclamations à droite)

Notre constat est souvent partagé : partons de cette base commune. Le Gouvernement a pris en quelques mois des mesures importantes, sachez les apprécier !

Le contexte économique s'impose à nous. Le Gouvernement ne peut refuser l'héritage au motif que le passif est trop lourd. (M. Francis Delattre s'exclame) Alors que les grands groupes licenciaient massivement, les TPE et PME ont conservé l'essentiel de leurs personnels et de leurs savoir-faire, bien souvent au détriment des investissements. Aujourd'hui leurs marges sont au plus bas. D'où la nécessité absolue du pacte national pour la croissance, la compétitivité et l'emploi.

Je relève une contradiction entre votre dénonciation du CICE et votre demande de son extension aux artisans...

M. Daniel Raoul.  - Très bien !

M. Francis Delattre.  - Nous avons juste déploré qu'il n'y ait rien en 2013.

M. Marc Daunis.  - Relisez-vous !

Autre point de consensus : un small business act à la française, dans le cadre européen. Nous en construisons les piliers, fiscalité adaptée, accès facilité à la commande publique, accompagnement sur les marchés extérieurs, accès simplifié aux financements. Les fondamentaux sont là. Le Gouvernement a déjà pris des mesures en faveur du redressement économique. La BPI a vu le jour. J'ai entendu les critiques, ce n'est jamais assez. Et le CICE va injecter, excusez du peu, 20 milliards dans l'économie !

M. Francis Delattre.  - En 2014 ! Et vous venez de reprendre 30 milliards !

M. Marc Daunis.  - A quoi s'ajoutent 2,2 milliards d'euros des investissements d'avenir réorientés vers les PME innovantes et le numérique, la création d'un brevet unique européen, mesure majeure que Martial Bourquin a opportunément rappelée, ou le contrat de génération que l'Assemblée nationale vient d'adopter, qui garantira la transmission des savoirs essentiels au développement des entreprises.

Dans un monde en mutation, nos PME sont soumises à une concurrence féroce et à des défis majeurs, dont la stabilité juridique.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Nous l'avons dit !

M. Marc Daunis.  - Oui, mais ces normes, ces dispositifs, vous en êtes l'auteur, vous étiez dans la majorité ces dernières années ! Le Gouvernement a estimé qu'une réduction des charges administratives de 25 % permettrait d'augmenter le PIB européen de 1,5 %.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Et la fiscalité ?

M. Marc Daunis.  - M. Bourquin...

M. Francis Delattre.  - Encore lui !

M. Marc Daunis.  - ...a insisté fortement sur la nécessité de soutenir l'écosystème favorisant l'innovation.

Il faut restaurer un cadre de confiance collectif. Les grands groupes, s'ils bénéficient d'argent public, doivent rendre des comptes. (Applaudissements à gauche)

Mme Joëlle Garriaud-Maylam .  - Sénatrice des Français de l'étranger, je me félicite de cette excellente nouvelle : la libération, après sept ans de détention au Mexique, de notre compatriote Florence Cassez. (Applaudissements sur les bancs de l'UMP) Je remercie mes collègues à la droite de l'hémicycle de leurs applaudissements, qui montrent le soutien que le Sénat a apporté et apporte encore à cette jeune femme. Je tiens aussi à exprimer ma gratitude à la Cour suprême du Mexique.

J'insiste sur l'enjeu de l'internationalisation des PME, encore négligé par les entreprises comme par l'administration. Un quart des PME allemandes réalisent 20 % à 30 % de leur chiffre d'affaires à l'étranger, 8 % des françaises seulement. Plus inquiétant encore, le nombre de PME exportatrices a baissé de 20 % en dix ans ; la crise n'explique pas tout.

Quelle est la réponse du Gouvernement ? La pharaonique BPI, censée exister depuis le 1er janvier. De quel guichet unique parle-t-on ? Les principaux freins à l'export ne sont pas liés au crédit, mais à la complexité bureaucratique, à une fiscalité dissuasive et à la méconnaissance des marchés convoités. Ce manque d'accès aux informations stratégiques explique la propension de nos PME à se concentrer sur les pays européens au détriment de pays émergents, qui sont pourtant les principaux réservoirs de croissance.

La ministre du commerce extérieur a assuré que la BPI conseillerait les entreprises à l'export. Est-ce bien le métier d'une banque ? Rien de nouveau par rapport à l'équipe de France de l'export d'Anne-Marie Idrac !

Mme Nathalie Goulet.  - Avec quels résultats ?

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - J'attends des éclaircissements sur le dispositif.

Il faut mieux mobiliser l'expertise des entreprises françaises déjà présentes à l'international. Le concept de la diplomatie économique est un serpent de mer. Où en sommes-nous des conseils économiques dans les ambassades, annoncés par Laurent Fabius ? Qui en fera partie ? Comment évaluer les résultats de la BPI ?

M. le président.  - Il est temps de conclure.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Le tissu des PME françaises à l'étranger a besoin de suivi, de continuité. La confiance ne se décrète pas. Elle se construit sur le long terme. Nos PME de statut local sont ignorées des autorités françaises.

Ainsi, en Algérie, on refuse des contrats de travail au fils d'un entrepreneur, condamné à s'expatrier dans un autre pays. Il faudrait collaborer avec les pays d'accueil pour mettre en place une véritable sécurité juridique !

M. le président.  - Veuillez conclure !

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Le précédent orateur a largement dépassé son temps. (Protestations sur les bancs socialistes)

Le défi du développement à l'international est aussi celui du recrutement. Je me réjouis de la volonté du Gouvernement de renforcer le volontariat en entreprise. Il est aussi essentiel de favoriser la coopération universitaire, il y a des potentialités immenses. Nous pouvons solliciter les investisseurs étrangers. J'ai constaté leur dynamisme au Mexique, où j'ai vu le développement de programme de coopération entre écoles d'ingénieurs françaises et mexicaines. Les facteurs de développement des PME à l'international sont multiples : n'en négligeons aucun ! (Applaudissements sur les bancs UMP)

Mme Fleur Pellerin, ministre déléguée auprès du ministre du redressement productif, chargée des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique .  - Je remercie Mme Garriaud-Maylam de s'être félicitée de la décision de la Cour suprême du Mexique en faveur de notre compatriote.

La place des PME dans l'économie française est importante. Vous avez rappelé les chiffres. Notre économie est tributaire du sort de ces entreprises sensibles aux aléas de la conjoncture mais riches de l'énergie de leurs dirigeants et salariés. Elles font partie de notre patrimoine national et sont autant de source d'espoir et de réalisation pour ceux qui y travaillent. La croissance des PME est aussi vitale pour l'économie française que pour notre cohésion sociale.

Les PME sont fragiles structurellement. La crise a aggravé leurs faiblesses.

Les conditions de naissance des PME sont souvent difficiles, avec zéro salarié et souvent un capital inférieur à 8 000 euros ; leurs conditions de financements sont délicates, avec une mortalité prématurée : la moitié disparaissent sous cinq ans.

Elles souffrent d'un sous-investissement relatif. Leur part dans la commande privée comme publique reste limitée. L'Allemagne compte trois fois plus de PME exportatrices que nous, qui n'en avons que 117 000. Chaque année, de nombreuses PME sont absorbées par un grand groupe. Plus de 90 % d'entre elles sont exposées à des retards de paiement. La crise les a frappées de plein fouet. Le Gouvernement n'a pas ménagé sa peine pour réinscrire durablement les PME dans une trajectoire de croissance. Le président de la République a fixé le cap de la bataille de l'emploi que l'on ne pourra remporter sans les PME. Plus de la moitié des décisions du pacte national pour la croissance, la compétitivité et l'emploi les concernent.

Notre première ambition a été et demeure de répondre à l'urgence, de trésorerie notamment. Le risque de credit crunch était avéré. La garantie de la BPI s'appliquera à la trésorerie des PME, à hauteur de 500 millions.

Le non-respect des délais de paiement par les donneurs d'ordre sera sanctionné. L'État doit être exemplaire : il améliorera ses délais de paiement pendant le quinquennat. Le financement bancaire s'est ralenti depuis le début de 2012. Ne surestimons pas le renforcement de leurs fonds propres, parfois allégué ces dernières années : il y a une augmentation de la trésorerie par précaution qui ne facilite pas pour autant le recours à des financements pour investir.

Nous aurons besoin de nouveaux instruments pour faire face aux besoins de demain. La BPI doit faire ses preuves. Le préfinancement du CICE est disponible dès 2013, contrairement à ce qu'a prétendu M. Delattre. Si la BPI sera le porte-avion de la compétitivité, nous aurons à mieux mobiliser l'épargne.

Nous n'avons pas un problème de volume d'épargne mais un problème lié à son orientation. Il s'agit de mieux orienter l'épargne des Français vers les PME. Dix milliards de prêts des fonds d'épargne seront à la disposition de la BPI. En outre il va y avoir une réforme de la fiscalité de l'épargne financière. L'accès des PME aux marchés financiers doit être facilité. C'est l'objet d'une disposition du pacte national. Un nouveau segment de marché leur sera ouvert. Nous voulons simplifier la vie de ces entreprises L'environnement dans lequel elles évoluent n'a pas été pensé pour les PME.

M. Marc Daunis.  - C'est vrai !

Mme Fleur Pellerin, ministre déléguée.  - Il a été construit sur des rapports de domination et non de coopération. Nous inciterons les grands groupes à adopter des rapports plus vertueux. Dans le cadre du pacte de compétitivité, j'ai fait adopter un plan de simplification. La dématérialisation des procédures administratives, sociales et fiscales allégera leurs formalités. Avec Arnaud Montebourg nous veillerons à éviter une surréglementation lors des transcriptions de directives. L'environnement fiscal doit être stabilisé. Nous avons progressé dans cette direction. Je vous renvoie en particulier à la décision n°26 du pacte. Le CIR et les dispositifs Madelin et autres sont intégralement préservés.

Le crédit d'impôt innovation prolonge le CIR. Il était dans l'air du temps depuis plusieurs années. Le Gouvernement de Jean-Marc Ayrault l'a fait.

La part de l'innovation dans les achats publics sera revalorisée. Une charte a été signée par plusieurs entreprises dont l'État est actionnaire. Nous avons nommé un médiateur des marchés publics. La charte des relations interentreprises a recueilli l'adhésion de 341 opérateurs.

Enfin nous nous efforçons de stimuler l'esprit d'entreprendre, la mobilisation entrepreneuriale. La moitié des entreprises créées disparaissent dans les cinq ans. Les performances des entreprises sont supérieures lorsqu'elles sont accompagnées. J'ai lancé les Assises de l'entrepreneuriat le 14 janvier dernier pour définir un programme d'action visant à doubler le nombre d'entreprises innovantes. J'ai réuni plus de 300 entrepreneurs et 18 parlementaires de la majorité et de l'opposition nous rejoindrons pour nourrir notre réflexion, qui aboutira avec l'annonce de mesures concrètes par le Gouvernement d'ici à la fin du mois d'avril.

Malgré de très fortes contraintes budgétaires, le Gouvernement a mis l'accent sur l'innovation, pour faciliter la montée en gamme de notre économie. Une vaste réforme de notre système d'innovation sera entreprise à partir de mars, lorsque nous seront remises les conclusions de la mission que nous avons diligentée à cet effet avec Mme Fioraso et M. Montebourg.

Je vous remercie pour cet échange qui en appelle beaucoup d'autres. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Prochaine séance aujourd'hui, jeudi 24 janvier 2013, à 10 heures.

La séance est levée à minuit dix.

Jean-Luc Dealberto

Directeur des comptes rendus analytiques

ORDRE DU JOUR

du jeudi 24 janvier 2013

Séance publique

A 10 heures

1. Débat sur la police municipale.

A 15 heures

2. Questions d'actualité au Gouvernement.

A 16 heures 15

3. Débat sur l'avenir du service public ferroviaire.