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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Question prioritaire de constitutionnalité

Débat sur l'application des lois

M. David Assouline, président de la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois

M. Claude Dilain, au nom de la commission des affaires économiques

M. Daniel Reiner, vice-président de la commission des affaires étrangères

Mme Catherine Génisson, vice-présidente de la commission des affaires sociales

Mme Marie-Christine Blandin, présidente de la commission de la culture

M. Michel Teston, vice-président de la commission du développement durable

M. Philippe Marini, président de la commission des finances

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois

Mme Éliane Assassi

Mme Nathalie Goulet

M. Philippe Kaltenbach

Mme Corinne Bouchoux

M. Christophe-André Frassa

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement

Débat sur la Corse

M. Nicolas Alfonsi, pour le groupe RDSE

Mme Éliane Giraud

Mme Anne-Marie Escoffier

M. Ronan Dantec

Mme Colette Giudicelli

M. Jean-Jacques Lasserre

M. Thierry Foucaud

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur

Clôture de la session ordinaire 2013-2014

Ordre du jour du mardi 1er juillet 2014




SÉANCE

du lundi 30 juin 2014

118e séance de la session ordinaire 2013-2014

présidence de Mme Bariza Khiari,vice-présidente

Secrétaires : M. Gérard Le Cam, Mme Catherine Procaccia.

La séance est ouverte à 16 heures.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu intégral publié sur le site internet du Sénat, est adopté sous les réserves d'usage.

Question prioritaire de constitutionnalité

Mme la présidente.  - M. le président du Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le vendredi 27 juin 2014, qu'en application de l'article 61-1 de la Constitution, la Cour de cassation a adressé au Conseil constitutionnel une décision de renvoi d'une question prioritaire de constitutionnalité portant sur le premier alinéa de l'article L. 651-2 du code de commerce (liquidation judiciaire d'une personne morale). Le texte de cette décision de renvoi est disponible à la direction de la Séance.

Débat sur l'application des lois

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle un débat sur le bilan annuel de l'application des lois.

M. David Assouline, président de la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois .  - Le débat sur le bilan annuel de l'application des lois constitue un temps fort de notre activité parlementaire. Depuis sa mise en place en janvier 2012, notre commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois a beaucoup travaillé, avec le soutien de toutes les commissions permanentes, des ministres successifs chargés des relations avec le Parlement, et du secrétaire général du Gouvernement.

Cette commission est le symbole d'une nouvelle culture de l'application des lois. Le Parlement ne saurait plus simplement voter les lois. Sa fonction de contrôle s'inscrit d'ailleurs dans la continuité de sa fonction législative. Le contrôle participe de la volonté d'améliorer notre environnement normatif. Nos moyens de contrôle sont certes limités par rapport à d'autres assemblées, comme le Sénat américain qui dispose d'une administration fournie En France, paradoxe de la Ve République, nous sommes contraints de demander au Gouvernement de nous donner les moyens de contrôler son action...

Quant à la qualité de la législation, elle ne doit pas s'apprécier seulement en termes de performance ou de rentabilité. Il appartient au Parlement d'arbitrer entre une approche trop technique et strictement politique pour voter de bonnes lois.

Quatre tendances se dégagent.

Une forte production législative, d'abord : 50 lois votées en 2012-2013, dont 19 d'origine parlementaire et 11 d'origine sénatoriale : c'est l'une des rares conséquences positives de la révision constitutionnelle de 2008.

Le taux global d'application des lois votées entre 2012 et 2013 s'établit à 64 %, dans le prolongement de la tendance observée depuis quelques années. Jusqu'en 2010, le taux était deux ou trois fois moindre. Le gouvernement de M. Ayrault s'était engagé à faire paraître les décrets dans les six mois. M. Valls a repris le même objectif. Ainsi 90 % des lois votées en 2012-2013 sont en application partielle ou totale.

Ces résultats traduisent une vraie prise de conscience. La création de notre commission y est pour quelque chose.

Toutefois l'application des textes d'origine parlementaire est moins bonne, et le Sénat est moins bien traité que l'Assemblée nationale : 67 % des mesures issues de l'initiative gouvernementale sont appliquées ; 48 % de celles dues à des amendements de l'Assemblée nationale, contre 20 % seulement de celles du Sénat. En outre, je regrette le recours systématique à la procédure accélérée, qui bride le travail parlementaire alors que les textes d'application tardent à venir. Le taux de mise en application du « stock ancien », c'est-à-dire des lois antérieures à 2007, ne progresse pas. Des lois finissent par devenir obsolètes sans être abrogées : c'est choquant.

Enfin, le taux de remise des rapports demandés au Gouvernement reste insuffisant. Sans doute faut-il que le législateur veille aussi à ne pas multiplier les demandes de rapport ! Mais ceux de l'article 67 sur l'application des lois restent de qualité inégale. Le Gouvernement a reconnu que des progrès restaient à faire.

Chaque pas visant à améliorer l'environnement normatif constitue un progrès. Je propose de mieux utiliser les questions écrites posées par les parlementaires. Monsieur le ministre, vous avez accepté que notre commission des lois puisse vous saisir en cas d'absence de réponse à une question relative à l'application des lois. Je recommande aussi de moins renvoyer à un décret en Conseil d'État, ce qui engorge la procédure, le décret simple, voire pas de renvoi suffisant le plus souvent.

En outre, il faut mettre en oeuvre le choc de simplification à l'égard des collectivités territoriales. Je salue la création d'un Conseil national des normes applicables aux collectivités territoriales, à l'initiative du Sénat, ainsi que la nomination d'un ministre chargé de ce dossier, et la nomination d'Alain Lambert comme médiateur.

Mme Nathalie Goulet.  - Excellent médiateur !

M. David Assouline, président de la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois.  - Ne baissons pas la garde. Il faut continuer les efforts. (Applaudissements)

M. Claude Dilain, au nom de la commission des affaires économiques .  - La commission des affaires économiques a suivi cette année l'application de 26 lois de son ressort, promulguées entre 2003 et le 30 septembre 2013, le suivi des lois trop anciennes n'ayant plus d'intérêt. Neuf de ces lois sont déjà totalement applicables, dont trois des quatre lois promulguées entre le 1er octobre 2013 et le 30 septembre 2013 : la loi de régulation économique outre-mer, la loi de mobilisation du foncier public et la loi habilitant le Gouvernement à prendre des mesures de nature législative pour accélérer les projets de construction.

Je me félicite d'ailleurs que six des sept ordonnances prévues par cette dernière loi aient déjà été ratifiées et que Mme Duflot ait pris la peine de venir en présenter le contenu à notre commission. Un regret cependant : à la suite d'une décision du Conseil constitutionnel de juillet 2013, relative aux pouvoirs de sanction de l'Arcep, le Gouvernement a introduit dans la loi du 2 janvier 2014 visant à simplifier la vie des entreprises une habilitation l'autorisant à sécuriser par ordonnance les pouvoirs de sanction de l'Arcep. Cette ordonnance a été publiée le 12 mars 2014. Mais le décret qui doit préciser ce texte n'a toujours pas été pris !

À l'exception de la loi du 25 mars 2008 sur la lutte contre l'exclusion et de celle de modernisation de l'agriculture, aucune nouvelle mesure d'application n'a été prise pour les lois votées depuis 2003 et examinées par notre commission. De plus, la seule loi votée à l'initiative de notre commission sur le certificat d'obtention végétale affiche le plus faible taux d'application. Huit lois votées entre 2004 et 2011 en procédure accélérée restent partiellement applicables...

Les rapports demandés par le Parlement se font trop longtemps attendre : entre le 1er avril 2013 et le 31 mars 2014, sept rapports sur 35 seulement ont été déposés... Des progrès restent à faire. Je salue enfin la coopération entre la commission pour le contrôle de l'application des lois et les commissions permanentes.

Nous examinerons bientôt le rapport de MM. Bérit-Débat et Lenoir sur l'application de la loi de juillet 2010 sur les réseaux consulaires. Ces rapports permettent d'apprécier l'effectivité de l'application des lois comme l'a voulu la réforme constitutionnelle de 2008.(Applaudissements)

M. Daniel Reiner, vice-président de la commission des affaires étrangères .  - Notre commission a été satisfaite de recevoir le rapport sur la loi de programmation militaire, un an avant l'échéance ! L'essentiel de notre activité consiste à approuver des traités : nous avons voté cette année 55 conventions internationales. Nous n'avons examiné en 2012-2013 qu'un seul projet de loi au fond, mais qui n'a pas encore été voté par l'Assemblée nationale.

Quant au stock des lois antérieures, onze, relevant de notre secteur, sont partiellement applicables.

Je regrette cependant que la loi du 28 juillet 2011 visant à faciliter l'utilisation des réserves civiles et militaires en cas de crise reste totalement inapplicable, faute de publication des quatre textes d'application.

Le rapport de la commission d'application des lois de 2013 sur l'indemnisation des victimes d'essais nucléaires montre qu'elle n'est pas appliquée, en dépit de quatorze auditions du ministre.

Le bilan est mitigé pour les rapports ; quatre rapports n'ont pas été publiés, alors qu'ils auraient parfois dû être publiés depuis plus de dix ans... Notre commission, consciente de son rôle dans le contrôle de l'application des lois, entend y prendre sa part afin que les lois soient appliquées dans des délais raisonnables.(Applaudissements)

Mme Catherine Génisson, vice-présidente de la commission des affaires sociales .  - Je salue la qualité de la synthèse réalisée par la commission sénatoriale d'application des lois, ainsi que le soutien du Gouvernement.

En 2012-2013, nous avons examiné quatorze lois au fond : cinq projets de loi, neuf propositions de loi. Six étaient directement applicables ; pour les huit autres, 132 mesures d'application étaient attendues : 80 % des mesures ont été prises au 31 mars 2014, dont 40 % dans les six mois. Ce résultat est plutôt satisfaisant et confirme une tendance à l'amélioration. Mais la situation est très différente selon qu'il s'agit des lois d'origine gouvernementale ou parlementaire. Le Gouvernement applique les premières avec diligence : les décrets prévus par les lois sur les emplois d'avenir ou le contrat de génération ont été publiés en quelques jours. La loi de sécurisation de l'emploi est applicable à 70 %, mais le décret sur la couverture santé et la généralisation des contrats d'entreprise se fait attendre : les négociations de branche ont pris du retard.

Le Gouvernement a fait un effort pour promulguer les décrets consécutifs au projet de loi de financement de la sécurité sociale. En revanche, quatre textes d'origine parlementaire restent inapplicables : loi du 30 mai 2013 réformant la biologie médicale, loi du 27 février 2013 relative aux soins psychiatriques, article premier de la loi sur la qualité de l'offre alimentaire outre-mer - il s'agit pourtant de santé publique -, loi du 24 décembre 2012 interdisant les contenants alimentaires comprenant du bisphénol A - en raison cette fois d'une procédure devant la Commission européenne.

En 2012-2013, vingt mesures d'application ont été prises sur des lois votées antérieurement, comme pour la loi sur la transmission d'informations entre les départements pour le suivi des enfants en danger dans le cas du déménagement des familles. Nous regrettons que la loi de 2012 sur la recherche sur la personne humaine manque encore des mesures règlementaires qui avaient fait l'objet d'un consensus entre nos rapporteurs successifs, Marie Thérèse Hermange et Jean Pierre Godefroy.

Nous attendons le rapport sur les emplois d'avenir et celui sur la juridiction prud'homale.

Notre commission qui s'est interrogée, parfois avec irritation sur le retard dans l'application des textes d'origine parlementaire note toutefois une amélioration globale. (Applaudissements)

Mme Marie-Christine Blandin, présidente de la commission de la culture .  - En 2012-2013, trois lois seulement ont été examinées par la commission de la culture, mais deux d'entre elles sont des textes majeurs : la loi sur la refondation de l'école et celle relative à l'enseignement supérieur et à la recherche. Les textes importants sont souvent présentés en début de législature. La loi sur les rythmes scolaires était d'application immédiate. Les lois sur la refondation de l'école et la loi sur l'enseignement supérieur ont été partiellement mises en application. Malheureusement la procédure de nomination des présidents d'organismes de recherche n'est pas encore définie.

Alors même que la procédure accélérée avait été déclarée pour la loi sur l'école, seules douze mesures d'application ont été prises.

Sur la loi ESR, sept mesures ont été prises dans les six mois, vingt-deux manquent encore, et j'ai découvert avec étonnement un amendement du Gouvernement dans la loi sur l'agriculture à ce sujet, modifiant les arbitrages du Parlement...

Nous attendons encore le rapport pour améliorer le mode de sélection et de formation des futurs médecins et élargir leur recrutement, pour lutter contre la désertification médicale, à la demande de notre commission du développement durable.

Enfin, la loi sur la rémunération de la copie privée et celle qui facilite l'organisation des manifestations sportives et culturelles sont entièrement applicables.

Grâce à la parution de mesures sur la loi Hadopi, et à la suppression de la peine contraventionnelle complémentaire à la suppression de l'accès à un service de communication, une inflexion a été donnée qui appelle une vraie la loi sur la société numérique.

Je note des progrès, mais nous avons besoin de moyens supplémentaires comme un portail Internet pour mobiliser l'opinion publique en faveur de l'application des lois.

Je vous invite, monsieur le ministre, à indiquer à Mme Fioraso que la loi sur l'agriculture ne doit pas servir à revenir sur les arbitrages du Parlement. Enfin, la loi sur les lanceurs d'alerte, qui visait à éviter les conflits d'intérêt, quatorze mois après, attend toujours son décret... (Applaudissements sur les bancs écologistes et du groupe CRC ; Mme Nathalie Goulet applaudit aussi)

M. Michel Teston, vice-président de la commission du développement durable .  - Je salue l'action de la commission sur l'application des lois qui a synthétisé nos recommandations.

Sur les six lois promulguées en 2012-2013 dans le champ de compétence de notre commission, deux sont d'origine sénatoriale, comme celle sur la protection des lanceurs d'alerte.

Vingt-deux mesures d'application ont été publiées, ainsi que neuf mesures d'application sur des lois plus anciennes. Aucune des lois que nous avons examinées n'étaient totalement inapplicables, effort notable au vu des pratiques antérieures !

Nous étions inquiets que les mesures concernant les collectivités territoriales, prévues dans le texte sur la participation du public, échappent au Parlement. Le Gouvernement s'était engagé à nous transmettre le projet d'ordonnance. Cet engagement a été tenu.

Mais des progrès restent à faire. Sur les six lois que nous avons examinées, quatre restent encore partiellement inapplicables. Nous déplorons qu'un an après la décision de créer une commission sur les lanceurs d'alerte, aucune mesure n'ait été adoptée. Trente-six pour cent des lois adoptées antérieurement sont encore partiellement inapplicables et peu de lois sont applicables six mois après leur promulgation.

Regrettons enfin que la moitié à peine des rapports demandés au Gouvernement nous aient été remis, sur les 47 attendus.

Des progrès restent donc à faire pour atteindre l'objectif d'une mise en application de la loi dans les six mois, que le Gouvernement s'était assigné par circulaire en 2012. (Applaudissements à gauche)

M. Philippe Marini, président de la commission des finances .  - (Applaudissements sur les bancs UMP) La question de l'application des lois est importante aux yeux de la commission des finances. Si celle-ci n'a été saisie cette année que de 18 % des lois promulguées, elle a dû contrôler 40 % des textes d'application, soit 190 mesures contre 118 l'an dernier : c'est l'apport de la loi bancaire.

En 2013, 58 % des mesures attendues ont été prises, contre 76 % l'an dernier ; la loi bancaire n'est encore applicable qu'à 20 %... Dix des 21 rapports attendus restent à déposer.

Tout gouvernement est réticent à appliquer des mesures qui n'étaient pas de son initiative... Il en va ainsi depuis 2011 de la TGAP sur les sacs plastiques ; nous y reviendrons par un amendement au prochain collectif budgétaire.

Mme Marie-Christine Blandin, présidente de la commission de la culture.  - Très bien !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Ensuite, nous avons vu réapparaître - par voie de circulaire ! - une disposition censurée par le Conseil constitutionnel : la prise en compte des revenus non réellement perçus par le contribuable pour le calcul du plafonnement de l'ISF. C'est à la limite de l'imaginable. Le Conseil constitutionnel a heureusement réagi.

Nombre de rapports très attendus ne sont pas déposés : ainsi le jaune budgétaire sur notre réseau de conventions fiscales n'a été remis que le 4 avril 2014, sans qu'aucune explication ne soit fournie sur le retrait de Jersey et des Bermudes de la liste des États non coopératifs. Il en va de même de l'annexe au projet de loi de finances qui doit retracer depuis 2009 la mise en oeuvre par l'administration fiscale du dispositif anti-abus en matière de prix de transfert.

Comment expliquer que la loi bancaire reste, pour l'essentiel, lettre morte, alors qu'elle semblait revêtir une haute importance aux yeux du Gouvernement ? À l'inverse, le texte sur la résolution bancaire a été pris rapidement - est-ce dû à la situation spécifique de Dexia et du Crédit immobilier de France ? Sur quelle base se fera le recensement des activités qui devront être filialisées - le décret n'est pas publié ? Nous attendons toujours le texte relatif à la transparence des activités pays par pays ; quand sera-t-il publié ?

La loi américaine Fatca prévoit une première transmission de données aux États-Unis le 1er septembre 2014, portant sur des données collectées le 30 juin 2014, c'est-à-dire aujourd'hui. Or le projet de loi autorisant la ratification de l'accord avec les États-Unis n'a toujours pas été délibéré en conseil des ministres. La question n'est pas seulement formelle au regard du risque de retrait de la licence américaine des banques françaises... (Mme Nicole Bricq renchérit) Est-ce le moment de donner aux États-Unis tout ce qu'ils veulent alors qu'ils ont entamé une véritable guerre monétaire - eux qui détiennent le dollar, seule monnaie de transaction au niveau mondial, et qu'ils peuvent en imprimer ad libitum ? (Applaudissements à droite)

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois .  - Certes, 92 % des lois promulguées au cours de la période de référence sont applicables, mais le pourcentage ne signifie pas grand-chose, puisqu'il s'agissait de douze mesures d'application pour quatorze lois...

En revanche, la charge de travail de la commission des lois est bien réelle : elle a examiné 41 textes et produit 27 avis, dont 21 avis budgétaires. Nous ne nous en plaignons pas, tant le travail est intéressant.

Je me concentrerai sur l'application de la loi sur le mariage des personnes de même sexe et d'abord sur la célébration d'un mariage entre un Français et un étranger ressortissant d'un État n'autorisant pas le mariage de même sexe et lié à la France par une convention bilatérale. L'article 202-1, alinéa 2 du code civil permet désormais d'écarter la loi personnelle du futur époux. Cependant, cette règle de conflit de lois peut être mise en échec en application du principe de hiérarchie des normes. Comme le rappelle la circulaire du 29 mai 2013 cet alinéa ne pourrait s'appliquer aux ressortissants des pays avec lesquels la France est liée par des conventions bilatérales qui prévoient que la loi applicable aux conditions de fond du mariage est la loi personnelle de chacun des époux. La dépêche du 1er août 2013 diffusée aux procureurs généraux a précisé qu'une distinction pouvait être opérée entre les conventions qui renvoient expressément à la loi nationale de chacun des époux, qui ne peuvent être écartées, et celles qui ne visent que la situation des ressortissants français, qui pourraient donner lieu à interprétation.

Le TGI de Chambéry a jugé, le 11 octobre 2013, que le droit au mariage pour les personnes de même sexe faisait partie de l'ordre public international français et écarté pour cela l'application de la convention franco-marocaine du 10 août 1981 - jugement confirmé en appel mais objet d'un pourvoi en cassation par le Parquet général. Espérons que la Cour fixera la jurisprudence.

La seconde question est celle de l'adoption, désormais ouverte sous toutes ses formes à tous les couples mariés. À ce jour, les seuls cas soumis aux tribunaux concernent l'adoption de l'enfant du conjoint. Le TGI de Lille est le premier à avoir autorisé, le 14 octobre 2013, l'adoption plénière par une épouse des deux enfants de sa conjointe. Les TGI de Toulouse et de Limoges ont suivi. Mais un refus a été prononcé le 30 avril 2013 par le tribunal de grande instance de Versailles, s'agissant d'un enfant né d'un protocole de procréation médicalement assistée (PMA) en Belgique au motif d'une fraude à la loi. La PMA, contrairement à la gestation pour autrui, n'est pas contraire à l'ordre public français : on ne peut donc invoquer la fraude à la loi pour justifier un refus d'adoption. Rien ne permet d'ailleurs de savoir que l'enfant est né d'une PMA, puisque cela ne figure pas à l'état civil.

Si j'ai insisté sur ces points, c'est pour illustrer le fait que l'application des lois dépend aussi des décisions des tribunaux... (Applaudissements sur les bancs socialistes et écologistes)

Mme Éliane Assassi .  - Si la démocratie suppose le vote des lois par les représentants du peuple, son exercice suppose que ces lois soient effectivement appliquées. Le taux d'application des lois est en progression, mais on est encore loin du taux de 100 %, qui est le seul satisfaisant. Nous déplorons en particulier que les lois d'origine parlementaire soient moins appliquées que les autres, moins encore lorsqu'elles viennent du Sénat - et des groupes minoritaires...

Sur les rapports prescrits par la loi, le constat est affligeant : ils sont trop rarement déposés, alors qu'ils sont utiles aux parlementaires pour exercer leur contrôle. Les désormais fameuses études d'impact, (mouvements sur plusieurs bancs), obligation constitutionnelle, sont trop souvent incomplètes, quelquefois erronées, voire considérées comme facultatives...

L'effectivité de la loi doit aussi beaucoup aux conditions dans lesquelles elle est présentée et débattue. La procédure accélérée ne favorise pas une entrée en vigueur plus rapide de la loi ; elle nuit à la qualité des textes, sert souvent des objectifs politiques et à gagner du temps - tandis que les sessions d'été n'ont plus d'extraordinaire que le nom.

L'avalanche des lois rend la tâche difficile aux tribunaux et compromet le principe de légalité : comment les Français sont-ils censés connaître cette loi qui change sans cesse ?

Merci à M. Assouline de son travail et de celui de sa commission. Puisse le Gouvernement prendre en compte ses conclusions. Il reste beaucoup à faire. (Applaudissements à gauche)

Mme Nathalie Goulet .  - L'ennui naît de l'uniformité... J'éviterai donc de répéter des chiffres qui ont déjà été cités, en regrettant que le riche rapport de la commission pour le contrôle de l'application des lois soit entaché du vice qu'elle dénonce - il ne nous est parvenu que le 26 juin... En outre, cette commission fait doublon avec nos commissions permanentes, qui sont explicitement chargées du contrôle de l'application des lois. Peut-être le temps est-il venu de la supprimer... (On se récrie sur divers bancs) Et dans le même temps le président du Sénat refuse la création d'une délégation permanente sur l'évasion fiscale.

On parle de simplifier, de supprimer des normes - sujet cher à Alain Lambert, président du conseil général de l'Orne - mais celles qui sont nécessaires ne sont pas publiées ! Le Conseil constitutionnel est clair sur les critères de qualité de la loi. Certains textes n'ont de loi que le nom, comme le projet de loi sur l'aide au développement, dont la version initiale n'avait aucune valeur normative et se contentait de transformer le Parlement en relais de Mère Térésa... Heureusement, la commission des affaires étrangères s'en est mêlée et nous avons dû nous battre en CMP pour que fussent préservées les modifications apportées par le Sénat...

La loi interdisant le bisphénol A se heurtait au droit européen ? Peut-être, mais peut-on en dire autant des nombreuses mesures de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, qui restent lettres mortes ? De même, les décrets sur la protection des lanceurs d'alerte se font attendre, ainsi que ceux sur l'action de groupe. Tout le monde n'a pas les moyens de s'attaquer seul aux laboratoires pharmaceutiques...

Le rang international de la France repose aussi sur son respect des conventions internationales. Certaines restent dans les limbes, quelque part entre le Quai des Brumes, l'Assemblée nationale et le Sénat, parfois depuis onze ans... Je pourrai vous en communiquer la liste. Malgré mes efforts, le rapport sur les ambassadeurs thématiques n'est toujours pas paru ; on ne sait combien ils coûtent et on continue même à en nommer, une forme de recyclage d'amis en mal d'exotisme, obligés alimentaires de la République... En revanche, je salue le remarquable rapport de M. Le Drian sur l'application de la loi de programmation militaire. (Applaudissements à droite)

M. Philippe Kaltenbach .  - Je félicite la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois et son président, David Assouline, pour leur travail important. Nous pouvons en être collectivement fiers.

Nous ne pouvons pas nous satisfaire de voter des lois sans veiller à leur application. Dès 1971, le Sénat s'est doté d'un outil informatique ad hoc, avant de créer une commission dédiée à cette question en 2011 : fait unique en Europe, à l'exception du Royaume-Uni. J'espère bien qu'elle perdurera après le renouvellement.

Mme Nathalie Goulet.  - Inch'Allah !

M. Philippe Kaltenbach.  - La commission a contribué à l'émergence d'une culture du contrôle et de l'évaluation, essentielle pour redonner aux Français confiance dans l'activité législative et notre système politique ; si la loi n'est pas appliquée, le discrédit vis-à-vis de la politique croît.

Le taux d'application des mesures législatives votées durant la session atteint 65 %, contre 10 à 35 % jusqu'en 2010. La publication des décrets d'application dans un délai de six mois était un objectif du gouvernement Ayrault, elle l'est encore pour le gouvernement Valls. contrario, la loi pénitentiaire adoptée en 2009 n'était toujours pas entièrement applicable en 2012... Tous les décrets ont été pris depuis grâce à Mme Taubira. Le gouvernement Ayrault a dû mettre en application des lois votées par la majorité précédente.

Certains voudraient faire croire que la multiplication des amendements parlementaires serait responsable de l'allongement des délais de publication des mesures d'application. Cette polémique n'a pas lieu d'être : le droit d'amendement reste consubstantiel à la fonction parlementaire. Les textes votés, c'est au Gouvernement d'agir. Pour les textes d'origine parlementaire, les délais sont plus longs, et c'est encore plus vrai des textes issus du Sénat. Serions-nous victimes d'une discrimination ? M. Le Guen a heureusement jugé cet état de fait inacceptable ; à nous de rester vigilants.

Le plus important, c'est l'évaluation. (Mme Nathalie Goulet renchérit) La commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois s'y attelle aussi dans une démarche qualitative pour préparer notre travail législatif. J'ai ainsi été l'auteur, avec Mme Muguette Dini, d'un rapport sur la loi de 2008 créant le statut d'autoentrepreneur, qui a contribué à rééquilibrer le projet de réforme, et je travaille avec Mme Jacqueline Gourault à un rapport sur la précarité dans la fonction publique et l'intégration des contractuels. Chacun prend aujourd'hui conscience de la nécessité de mieux légiférer. Cela vaut aussi pour les normes applicables aux collectivités territoriales : je me félicite de la création d'une commission ad hoc à l'initiative du Sénat et je salue la proposition de loi de Mme Jacqueline Gourault et de M. Jean-Pierre Sueur sur le sujet.

Il est indispensable de développer l'open data pour que citoyens et associations puissent suivre l'activité parlementaire et gouvernementale. Il existe des sites sur l'activité des parlementaires, pourquoi pas sur l'application des lois par le Gouvernement ?

Pour conclure en paraphrasant Montesquieu, je dirai que les décrets non publiés affaiblissent les lois nécessaires... (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Corinne Bouchoux .  - Nous votons beaucoup de lois, mais 24 % seulement de nos amendements sont suivi d'effets. Six mois après la réforme législative de l'indemnisation des victimes d'essais nucléaires, les associations se désespèrent, car rien n'a avancé - il ne faut pas ouvrir la boîte de Pandore, dit-on avec franchise au cabinet du ministre... Le travail du Sénat sert-il encore à quelque chose ? À en croire certains travaux universitaires, il y a de quoi en douter... Le chômage persiste, les Français sont champions du monde de la consommation d'antidépresseurs, aujourd'hui tout le monde a hâte d'aller voir le match de foot en espérant un miracle qui redonne le moral au pays...

La commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois a le mérite d'illustrer la transversalité de notre travail. Les écologistes sont cependant déçus par le bilan de l'année écoulée, par exemple, en ce qui concerne les lanceurs d'alerte. Nous espérons que nos points de vue et idéaux seront davantage pris en considération à l'avenir...

Le travail de grande qualité de la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois illustre une crise de régime où il faut se rouler par terre et menacer de ne pas voter le budget pour se faire entendre. Nous appelons à une réflexion sur l'évolution de la Ve République.

Il est temps de passer de l'impuissance à l'efficacité. (Applaudissements à gauche ; Mme Nathalie Goulet applaudit aussi)

M. Christophe-André Frassa .  - Le contrôle de l'application des lois est indispensable à une séparation équilibrée des pouvoirs. Je salue donc le travail de la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois, même si plus d'objectivité eût parfois été souhaitable...

Nous ne pouvons admettre les entraves mises par le Gouvernement au travail parlementaire. Vous reprochiez à la précédente majorité de recourir trop souvent à la procédure accélérée, mais vous persévérez dans cette voie. L'urgence semble toutefois cesser au lendemain du vote, puisque les décrets se font attendre longtemps... Ainsi de l'application de la loi du 22 juillet 2013, dont les décrets ont été publiés huit mois plus tard, six jours seulement avant la date limite de dépôt des candidatures aux élections consulaires...

Les rapports demandés au Gouvernement, peut-être trop nombreux, sont trop souvent de mauvaise qualité. De même, les insuffisances notoires des études d'impact - voir celle sur la réforme territoriale - nous obligent à légiférer à l'aveuglette... De même encore les circulaires de l'exécutif qui, négligeant la hiérarchie des normes, détournent l'esprit de la loi.

Le Gouvernement traite inégalement les lois dont il a lui-même pris l'initiative, et qu'il applique plus vite, et celles d'origine parlementaire. Inégalité de traitement aussi entre les lois issues de l'Assemblée nationale et celles issues du Sénat...

Le rapport relève que le choc de simplification se transforme en choc de complexité. Les très nombreux textes qui nous sont soumis sont souvent bâclés, et nous devons les réécrire pour leur donner du fond et de l'ambition, faire en sorte qu'ils répondent aux attentes. Je forme le voeu que nous contrôlions encore davantage l'action du Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement .  - Merci de vos riches interventions.

Je salue le travail accompli par la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois : quatorze rapports, onze débats en séance depuis sa création. C'est une institution vivante.

Les demandes de rapports au Gouvernement sont extrêmement nombreuses : 900 au cours de la précédente législature, c'est intenable. Elles doivent être mieux ciblées.

Vous m'avez interpellé sur le retard pris dans l'application de certains textes. La loi sur les Certificats d'obtention végétale, d'abord : les décrets seront bientôt publiés. La loi Alur, ensuite : impossible pour l'administration de préparer 177 décrets en six mois.

M. Reiner a évoqué la loi du 29 juillet 2011 ; un projet de décret est en cours d'examen et sera bientôt proposé au comité technique ministériel ; il devrait être publié en juillet.

Mme Génisson fait remarquer que certaines lois relevant de la commission des affaires sociales n'ont fait l'objet d'aucune mesure d'application. Pour la loi sur les soins psychiatriques, un premier décret est devant le Conseil d'État depuis le 17 juin, un second devant la Haute Autorité de santé. Les décrets sur la loi de mai 2013 sur la biologie médicale sont en cours de finalisation.

Madame Blandin, la loi pour l'enseignement supérieur et la recherche nécessite encore dix mesures d'application ; la plupart seront prises avant la rentrée. Sept projets de décrets sont soumis à l'avis des organismes concernés. La loi sur les lanceurs d'alerte sera bientôt intégralement applicable. Deux décrets sont pendants.

Le président Marini a insisté sur la loi bancaire. Le Gouvernement est conscient des problèmes ; il devra progresser dans sa réflexion et rattraper son retard. Dix décrets seront publiés avant la fin de l'année. Son bilan est sévère, mais non infondé.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Merci, monsieur le ministre.

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement.  - Mme Assassi a abordé la question des études d'impact. Reconnaissez la ténacité de la commission, qui a fait progresser le travail parlementaire.

J'ai répondu à Mme Goulet sur les lanceurs d'alerte. L'action de groupe est un sujet essentiel, pour lequel le Sénat a été précurseur. Le décret sera publié début octobre.

M. Kaltenbach considère que le renvoi à un grand nombre de décrets peut servir d'écran de fumée pour retarder l'application de lois auxquelles le Gouvernement n'est pas attaché. Le secrétaire général du Gouvernement fait tout ce qu'il peut pour éviter ce type de retard.

Mme Bouchoux s'est interrogée sur le fonctionnement de nos institutions. Il ne m'appartient pas d'y répondre. Attention à ne pas insister sur la prétendue impuissance des politiques : ne donnons pas à croire que nous ne servirions pas à grand-chose.

M. Frassa a évoqué la publication tardive du décret sur l'AFE. C'est vrai, mais il avait un périmètre très large, nécessitant une concertation approfondie ; il était impossible de le rédiger en quelques semaines.

Je reste à votre disposition tout au long de l'année pour répondre à vos questions. Merci et bonne chance à l'équipe de France ! (Applaudissements)

La séance est suspendue à 18 h 10.

présidence de Mme Bariza Khiari,vice-présidente

La séance reprend à 21 h 35.

Débat sur la Corse

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle un débat sur la Corse et la réforme territoriale, à l'initiative du groupe RDSE.

M. Nicolas Alfonsi, pour le groupe RDSE .  - Je me félicite du succès de l'équipe de France, expression d'une solidarité qu'on aimerait voir étendue à d'autres domaines.

Merci, monsieur le ministre, d'avoir accepté ce débat, dont on peut cependant se demander s'il est toujours d'actualité, maintenant qu'il a été repoussé jusqu'après votre voyage en Corse. Il permettra, espérons-le, d'éclaircir quelques zones d'ombre. Il concernera l'organisation territoriale de la Corse, mais c'est l'ensemble des problèmes propres à ce territoire que nous voulions à l'origine évoquer.

Il existe, de la part des élus et de l'Assemblée de Corse, une revendication permanente de légitimité. L'Assemblée s'arroge le droit de voter des motions qui ne relèvent pas de sa compétence normale... Autre donnée fondamentale : le sentiment permanent que les Corses ont de leur différence. On se veut tellement différent qu'il suffirait que la France devînt un État fédéral pour que nous réclamions l'indépendance ! Dans ces conditions, le dialogue est naturellement difficile...

1982, 1992, 2002, 2012 : il existe comme une fatalité décennale en Corse. Depuis l'élection de 2010, on ne cesse de parler d'une nouvelle réforme. Monsieur le ministre, à Ajaccio, vous avez dit l'essentiel sur la langue. Mais je suis toujours partisan de la proposition 56 du candidat Hollande sur une révision constitutionnelle qui concernerait toutes les régions, mais opposé à toute mesure spécifique pour la Corse. Vous avez dit votre position sur le statut de résident. Des élus ont déposé un texte. Il a été voté, par 29 voix contre 9. Enfin, sur le troisième point, fondamental, je n'ai pas réussi à décrypter votre discours sur la révision constitutionnelle.

Une résolution a été votée par la droite et la gauche pour introduire un nouvel article 72-5, au prix d'un quiproquo car pour les uns il s'agit du droit de résident, pour les autres du droit de chasse. Au fond, on se range aux positions du FLNC. Dans sa dernière déclaration, celui-ci réclame un nouveau statut « négocié avec l'État français ». L'Assemblée de Corse et le FLNC disent la même chose car depuis dix ans les nationalistes ont la volonté de négocier sur un pied d'égalité avec l'État. Vous avez parlé de « dialogue », ce n'est guère différent... Vous avez dit que l'inscription de la Corse dans la Constitution pourrait servir de base à une reconnaissance de la singularité corse. Comme pour la Nouvelle-Calédonie, à ceci près que, pour celle-ci, l'article 77 énumère précisément les compétences transférées.

Ce ne serait certes pas contraire au principe constitutionnel d'égalité, mais cela nous placerait dans une situation inextricable, en encourageant de nouvelles revendications qui nous éloigneraient encore de la République. Après tant de palabres, il est temps de prendre position. Vous parlez d'une aspiration légitime à une singularité institutionnelle. Institutionnelle ou constitutionnelle ? C'est tout le débat. Il serait temps que le président de la République prenne une position claire.

Après avoir dit ce que je crains, il est temps de dire ce que je souhaite : opposé à toute révision constitutionnelle, je suis favorable à une évolution institutionnelle pour régler des problèmes de fond.

Tout d'abord le régime électoral. Je me suis battu pour obtenir du Congrès un amendement constitutionnel prévoyant un statut particulier pour la Corse. J'avais obtenu du Sénat une prime pour la liste arrivée en tête, mais j'ai joué trop petit bras : celle-ci ne se monte qu'à 17 % au lieu de 25 % dans le régime général. C'est trop peu pour que la Corse soit gouvernable.

Deuxième point : la suppression des départements. J'ai toujours été opposé à la suppression des départements afin d'éviter tout risque de recentralisation. Je faisais mien le principe « il faut que le pouvoir divise le pouvoir ». Mais je me prends à douter. Ferons-nous la réforme organisationnelle à chaud, en même temps que l'on réforme « la carte et le territoire », après avoir perdu de nombreuses années, ou bien prendrons-nous le temps de la réflexion ?

J'aurais pu aussi parler de la fiscalité : en Corse, c'est un peu comme à Naples, où, selon un mot fameux, les gens meurent de faim mais tremblent de peur dès que le Vésuve fume... Ou encore de la loi Littoral : chacun souhaite protéger un patrimoine qu'il n'a pas et les élus sont sous la pression des associations.

Si les concours financiers de l'État ont pu donner l'illusion que les retards auraient été comblés par rapport à la métropole, trop de connivences et de non-dits ont perturbé cette quête. Tous les acquis ont été obtenus grâce à l'évolution de la société civile. La Corse mérite mieux que la mauvaise réputation dont on veut bien l'affubler. (Applaudissements)

Mme Éliane Giraud .  - Le groupe socialiste se félicite de la tenue de ce débat. Élue de l'Isère et vice-présidente de la région Rhône-Alpes, je suis sensible au charme de la Corse, cette montagne posée sur la mer, aux merveilles de ses réserves marines et terrestres. La Corse mérite notre soutien pour ce qu'elle nous a apporté et pour son importance stratégique en Méditerranée hier, aujourd'hui et demain.

Je rends hommage, monsieur Alfonsi, à votre action et à votre engagement en faveur de l'unité de la République et de la reconnaissance de la spécificité de la Corse. Le gouvernement de M. Valls, après celui de M. Ayrault, est particulièrement à l'écoute de la Corse et de ses habitants. Après l'adoption par l'Assemblée de Corse d'une résolution, le Gouvernement a reçu plusieurs élus. Une unité de travail a été installée pour réfléchir sur le statut de la langue corse.

Un établissement foncier régional a été créé, ainsi qu'une taxe pour financer les réserves naturelles. Vous-même, monsieur le ministre, vous êtes rendu en Corse. Depuis 1982, les compétences de la région Corse se sont accrues. La loi de 2002 a apporté un nouvel essor. Ainsi, la vie des citoyens s'est améliorée. La Corse a connu la plus forte croissance des régions françaises ces dernières années. Les réflexions de M. Chaubon s'inscrivent dans la bonne perspective. Il s'agit de tenir compte des nouvelles aspirations de la population.

Le redécoupage des régions ne concerne pas la Corse, mais les élections régionales auront lieu en décembre 2015. Parmi les pistes, la simplification, afin de ne plus rendre nécessaire la mention explicite de la Corse dans les lois pour les rendre exécutoires, un soutien au pluralisme, un prolongement du plan d'investissement, etc. Mendès France disait qu'un responsable politique ne se détermine pas selon les conséquences bonnes ou mauvaises que son action peut avoir pour lui, mais en fonction de l'intérêt général. C'est ce que fait le Gouvernement, c'est ce que nous faisons. (Applaudissements)

Mme Anne-Marie Escoffier .  - Je ne parlerai pas de la Corse avec le même talent que M. Alfonsi, car si j'ai quelques racines dans l'île, je n'ai pas les mêmes fondamentaux...

Me rendant en Corse en 1991, j'ai rencontré des habitants qui résumaient la situation de leur territoire par ces deux mots : insularité, marginalité. Les choses ont fort heureusement changé. Et puis, la collectivité territoriale de Corse était créée. Les Corses ont trouvé un mode de fonctionnement, ont expérimenté un transfert de compétences large, ont bénéficié d'un régime original où l'exécutif est responsable devant son Assemblée.

Vingt ans après, la Corse s'interroge à nouveau. Elle est soumise aux mêmes problèmes que la métropole - sécurité, accès au logement, développement... - avec, en outre, la contrainte de l'insularité. Plusieurs membres du Gouvernement se sont déplacés en Corse. Ni M. Valls, ni Mme Lebranchu, ni vous-même, monsieur le ministre, n'avez ménagé votre peine.

Nous examinerons un texte sur la Corse à la rentrée, inspiré des préconisations exprimées par l'Assemblée de Corse : l'applicabilité directe à la Corse de toutes les dispositions valables pour les autres régions, lorsqu'elles ne sont pas contraires aux dispositions propres à la Corse ; la possibilité de modifier la liste des compétences de l'exécutif au cours du mandat ; la possibilité de retour au sein de l'Assemblée des membres de l'exécutif en cas de démission collective ou de vote de défiance ; enfin, le prolongement de deux ans du programme exceptionnel d'investissement de la Corse. Mais qu'adviendra-t-il après ?

Je connais votre accord de principe, monsieur le ministre, et votre souci d'obtenir le consensus le plus large. Nulle révision de la Constitution n'est nécessaire pour cela, mais il faut être attentif au démarches des élus corses : unité, diversité, subsidiarité.

Un mot enfin sur la problématique sécuritaire. Je salue le dévouement et le courage des forces de sécurité qui risquent leur vie pour faire leur devoir.

J'espère que les promesses d'apaisement de certaines factions se concrétiseront, que la Corse sera belle d'une harmonie retrouvée.

M. Ronan Dantec .  - À travers la chronique des faits divers la Corse apparaît de prime abord comme un territoire à problèmes, une terre de violence atavique ou un symbole des impuissances de l'État. Je crois, pour ma part, qu'elle peut être un laboratoire d'excellence de la modernité territoriale. La Corse mérite mieux qu'un affrontement sans fin entre autonomistes et républicanistes sourcilleux, une exaspération qui masque les enjeux réels et empêche de trouver des solutions.

La Corse n'est pas dénuée d'atouts. Son environnement d'abord : la société corse a su mieux que d'autres en Méditerranée préserver son patrimoine naturel. L'adoption d'un Plan d'aménagement et de développement durable de la Corse ira dans le même sens. La Corse peut être aux avant-postes de la transition énergétique, pour peu que l'on fasse les investissements nécessaires. De même, la Corse a su défendre sa langue. Il faut la soutenir. Il est temps d'en finir avec les vieilles lunes jacobines. La France, chantre de la diversité culturelle, gagnerait en crédibilité en soutenant la co-officialité de la langue corse et ratifiant la Charte des langues minoritaires.

La pression touristique fait flamber les prix de l'immobilier entraînant une crise de l'immobilier. Il faut sortir l'île de sa dépendance au tourisme. L'industrie de l'énergie solaire est une piste. Étendons aussi la loi Duflot et plafonnons le taux de résidences secondaires. Si le statut de résident semble bien contraire à la Constitution, comme le droit du sang, on peut réfléchir à une citoyenneté de résidence, afin de sortir des clientélismes. Il faut accompagner les politiques modernes au service d'un territoire qui fut longtemps en avance sur son temps.

Mme Colette Giudicelli .  - En février dernier, Mme Lebranchu a mis en place un comité de travail sur l'organisation de la Corse. Le Gouvernement a exprimé son soutien aux revendications de l'Assemblée de Corse, suscitant de nombreuses réserves, d'autant que certains ont souhaité la co-officialité de la langue et la création d'un statut de résident.

Aussi, hostile à une rupture, soucieux d'affirmer le principe d'égalité et d'unité, vous avez fermé la porte à une réunion constitutionnelle. Mais votre annonce a déçu la population corse attachée à la parole donnée. La désillusion est à la hauteur des espoirs suscités ! Il y a une marge d'action entre la fin de non-recevoir que vous avez choisie et la rupture inévitable. La Corse a été en pointe statutairement : dès 1755, elle connaissait le suffrage des femmes.

Notre rôle n'est pas de freiner toute réforme, mais de veiller au bien-être de notre île.

Nos territoires ont besoin que l'on respecte leur diversité, et que leur patrimoine soit transmis aux nouvelles générations dans la maison France. La réforme territoriale pourrait être fatale à la Corse, qui ne bénéficiera pas des mêmes leviers de mutualisation que les autres régions.

La Corse est un symbole de notre identité millénaire, unitaire mais plurielle. Quelle est donc la position réelle du Gouvernement sur la réforme des institutions corses ?

Je remercie à mon tour M. Alfonsi d'avoir pris l'initiative de ce débat car nous avons tous la Corse au coeur. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Jean-Jacques Lasserre .  - Je m'associe à ces remerciements. Ce débat peut être rapproché de celui concernant les basques.

Dans la perspective d'une évolution future, il convient de dialoguer sans a priori. Après avoir appartenu à la République de Gênes, indépendante en 1735, la Corse a été rattachée finalement à la France. Il existe des liens singuliers entre la République et la Corse : c'est la seule collectivité territoriale à statut particulier au sens de l'article 72-1 de la Constitution. La loi du 2 mars 1982 a créé l'Assemblée de Corse, disposant de larges compétences ; mais ensuite les autres régions ont acquis des compétences proches. Néanmoins, la loi de 1991 a donné à la Corse un statut sur mesure. Aujourd'hui, le projet de loi relatif à la nouvelle représentation de la République consacre un chapitre à la Corse. Le premier enjeu est de garantir l'identité culturelle de la Corse, comme des autres territoires. Le deuxième est économique : attention à ne pas créer des régions à deux vitesses.

Parmi les mesures envisagées, l'application à la Corse de toutes les mesures de droit commun applicables aux régions et la prolongation du programme d'investissements vont dans le bon sens.

L'Assemblée de Corse a formulé de nouvelles demandes qui se heurtent à des dispositions de droit national et européen, mais méritent d'être étudiées.

Régionalisme et République peuvent-ils être conciliés ? Oui, résolument !

Dans le domaine de la langue, de la culture, les spécificités doivent se refléter au niveau de la gouvernance.

Pour endiguer la violence, le dialogue doit se poursuivre ! Égalité ne signifie pas uniformité. Au Pays Basque, en Bretagne ou en Corse, la réforme territoriale doit être l'occasion de traiter des spécificités régionales et de créer des modes de gouvernance adaptés et responsabilisants, en concertation avec l'ensemble des partenaires.

M. Thierry Foucaud .  - Quelle logique anime la réforme territoriale du Gouvernement ? Nous commençons à l'envers, avec un redécoupage territorial dont on ne comprend pas les critères, avant d'étudier la répartition des compétences. Les départements seront vidés de leur substance et, à terme, inutiles... La Corse, elle, échappe au big bang. Elle aurait pu être regroupée, comme d'autres et de manière aussi improbable, avec une région telle que la région Paca... Mais il ne fallait pas froisser les susceptibilités...

L'article 13 concerne cependant la Corse. Toute réforme doit avoir pour seul objectif d'améliorer l'existant. Le 31 mars, l'Assemblée de Corse a formulé des propositions : nous en reparlerons cet automne. Nous redirons alors notre opposition à la suppression des départements.

En revanche, monsieur le ministre, nous estimons nous aussi inopportun d'ouvrir la voie à des évolutions institutionnelles pour la Corse, d'une autre nature que la réforme territoriale, qu'il s'agisse des compétences fiscales de l'Assemblée corse, de la co-officialité de la langue, ou du statut de résident.

Ces dernières semaines, la question du statut de la Corse a refait irruption. Le FLNC, estimant que la plupart des élus rejoignaient sa propre doctrine, a annoncé sa volonté de renoncer aux armes. J'estime pour ma part, comme mon ami Dominique Buchini, président de l'Assemblée corse, que la solution aux problèmes de la population corse n'est pas là.

J'espère aussi que le dialogue permettra d'effacer les aspects négatifs de la réforme.

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur .  - Je remercie à mon tour M. Alfonsi d'avoir organisé ce débat, occasion d'évoquer non seulement les questions institutionnelles et constitutionnelles, qu'il a distinguées avec rigueur, mais aussi le développement économique, le logement, la spéculation financière...

J'ai entendu, madame Giudicelli, votre satisfaction face aux mesures prises par le Gouvernement, mais aussi votre impatience. La politique est un processus itératif...

Il importe de respecter ceux à qui on s'adresse, c'est l'esprit de Pierre Mendès France, de ces grands républicains qui ont voulu affronter les problèmes de leur temps avec rigueur intellectuelle, sans tordre le droit, sans tout sacrifier aux charmes de la politique, et en tenant le même discours en tous lieux.

Le débat est aussi ancien que la République : en France, l'État a préexisté à la nation et la nation s'est incarnée dans l'État, dans un processus de centralisation. La République, une et indivisible, est-elle compatible avec la diversité de ses territoires ? Telle est notre question. Elle n'est ni simple, ni insurmontable, si l'on procède avec bonne foi et en privilégiant le dialogue.

Vous avez parlé d'économie et du droit des Corses à voir les atouts de leur île valorisés. La République s'est toujours efforcée d'accompagner la Corse : il y a dix ans, le gouvernement Jospin promettait un programme d'investissements : grâce à ces 2 milliards d'euros, la Corse a connu un taux de croissance annuel de plus de 2 %, supérieur à celui de bien des régions du continent. Il était normal que l'État compensât les obstacles liés à l'insularité.

Une question d'actualité concerne l'accès au logement et le droit de propriété. Jusqu'ici, la Corse était dotée d'un régime des successions particulier, en raison de la difficulté d'établir les titres de propriété, problème non résolu depuis 1801. Le Gouvernement n'a pas été sourd aux doléances des élus de Corse : souvenez-vous des amendements débattus ici même lors du projet de loi de finances, auxquels le Gouvernement avait donné un avis de sagesse malgré les risques d'inconstitutionnalité. Les juristes divergeaient, le Conseil constitutionnel a tranché, je ne discute pas ses décisions mais tiens compte de ses considérants pour élaborer un nouveau texte qui ne serait pas jugé contraire au principe d'égalité. Nulle fermeture d'esprit de ma part, donc. Les postures ne sont rien, ce qui compte est de trouver un chemin. Si je ferme une porte, c'est sur une impasse !

Autre sujet : le statut de résident. En raison de la spéculation foncière qui rend les prix prohibitifs, la collectivité territoriale de Corse propose un statut de résident donnant accès à la propriété. Cette proposition mérite-t-elle d'être méprisée ? En aucun cas, car le problème est réel. Mais elle se heurte au principe d'égalité face à la propriété, principe éminemment républicain, figurant dans la Déclaration des droits de l'homme et qui fait partie du bloc de constitutionnalité. Faut-il donc changer la Constitution ? Non, car on se heurterait alors au droit européen - des dispositions transitoires n'ont été admises que dans les nouveaux États membres. Dire le droit, quand on est chargé du contrôle de légalité, est-ce fermer la porte ? Non, c'est cela aussi, la République.

Continuons à rechercher ensemble des solutions, comme la mise en place d'un établissement foncier permettant à la puissance publique d'acquérir les terrains où les spéculations sont les plus fortes. Voyez que j'ouvre des portes, toutes grandes... Pour agir vite, mieux vaut prendre les chemins les plus courts !

Troisième sujet : la langue. Beaucoup de Corses sont tristes de voir leur lange s'étioler. Cette préoccupation est légitime. Ce qui est plus discutable, c'est la solution proposée, c'est-à-dire la co-officialité de la langue corse : ainsi, pour accéder à l'emploi public en Corse, il faudrait être en mesure de répondre aux administrés en Corse ? Le principe d'égalité des citoyens face aux emplois et charges publics s'en trouverait malmené.

La co-officialité ne donne d'ailleurs aucune garantie sur l'enseignement du corse dans le système scolaire. Je souhaite, moi aussi, que la pratique du corse s'étende. Je crois, moi aussi, que le français n'a rien à en craindre. Mais les solutions recherchées doivent être réellement efficaces, conformes à notre droit, et résidant dans l'éducation.

Préconiser une révision constitutionnelle - pour écrire quoi, d'ailleurs ? - suppose que l'on obtienne une majorité des trois cinquièmes au Congrès. Cela ne dépend pas de la seule volonté de l'Assemblée de Corse... Attaquez-vous aux problèmes urgents plutôt que de vous en remettre à des solutions aléatoires.

Évitons donc les procès d'intention. D'autres se sont exprimés avant moi, et ont rappelé le cadre juridique : je n'ai rien dit de plus. Je n'ai pas voulu décevoir les enthousiasmes, mais les mobiliser sur un chemin au bout duquel il y ait de la lumière. Aux élus de Corse, quelle que soit leur sensibilité, je veux dire qu'ils trouveront toujours dans le Gouvernement un gouvernement ouvert, rigoureux dans son approche du droit, désireux de trouver des solutions. J'espère que nous aurons bientôt l'occasion de reparler de ce sujet, trop passionnant et important pour qu'on l'aborde sans rigueur intellectuelle. (Applaudissements des bancs socialistes aux bancs UMP)

Clôture de la session ordinaire 2013-2014

Mme la présidente.  - Aux termes du premier alinéa de l'article 28 de la Constitution, « le Parlement se réunit de plein droit en une session ordinaire qui commence le premier jour ouvrable d'octobre et prend fin le dernier jour ouvrable de juin ».

Nous allons lever la dernière séance de la session ordinaire qui sera close à minuit.

Nous nous retrouverons demain mardi 1er juillet, à 15 heures, avec l'ordre du jour suivant :

- Ouverture de la session extraordinaire 2013-2014 ;

- Lecture des conclusions de la Conférence des présidents.

La séance est levée à 23 h 15.

Jean-Luc Dealberto

Directeur des comptes rendus analytiques

Ordre du jour du mardi 1er juillet 2014

Séance publique

À 15 heures

Présidence : M. Jean-Pierre Bel, président

Secrétaires : M. Jean Boyer - Mme Marie-Hélène Des Esgaulx

1. Ouverture de la session extraordinaire 2013-2014 ;

2. Lecture des conclusions de la Conférence des Présidents.