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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Conseil constitutionnel (Requêtes)

Questions prioritaires de constitutionnalité

Conseil constitutionnel (Décision)

Conseil constitutionnel (Saisine)

Organisme extraparlementaire (Candidature)

Engagement de la procédure accélérée

Dépôt d'un rapport

Conférence des présidents

Questions orales

Simplification des normes dans le secteur du tourisme

M. Luc Carvounas

M. Matthias Fekl, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger

Avenir des notaires

Mme Marie-France Beaufils

M. Matthias Fekl, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger

Organisation des intercommunalités

M. Jean-Claude Lenoir

M. Matthias Fekl, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger

TVA des télévisions locales

M. Philippe Leroy

M. Matthias Fekl, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger

Prélèvements sur le réseau Action Logement

M. Georges Labazée

Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité

Taxation des propriétaires de leur logement

M. Jean Louis Masson

Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargée de l'enseignement supérieur et de la recherche

Déménagement de la faculté de pharmacie de Châtenay-Malabry

M. Philippe Kaltenbach

Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargée de l'enseignement supérieur et de la recherche

Accueil des personnes âgées dépendantes

M. Jean-Pierre Bosino

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie

Santé et nucléaire

Mme Aline Archimbaud

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie

Majeurs sous tutelle

Mme Claire-Lise Campion

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie

Allocation équivalent retraite

M. Dominique Watrin

M. François Rebsamen, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social

Centre de l'établissement public d'insertion de la défense de Montry en Seine-et-Marne

M. Alain Gournac

M. François Rebsamen, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social

Dématérialisation des actes comptables dans les petites communes

M. Antoine Lefèvre

M. François Rebsamen, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social

Liaisons maritimes avec les îles du Morbihan

M. Michel Le Scouarnec

M. François Rebsamen, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social

Algues des Sargasses à la Martinique

M. Maurice Antiste

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique

Inadaptation du plan de prévention des risques de submersion pour la baie du Mont-Saint-Michel

M. Dominique de Legge

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique

Avenir des départements ruraux

M. Jean Boyer

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique

Conséquences du recentrement de la politique de la ville dans le Douaisis

M. Dominique Bailly

M. Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports

Désignation des conseillers prud'hommes (Procédure accélérée)

Discussion générale

M. François Rebsamen, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social

Mme Anne Emery-Dumas, rapporteure de la commission des affaires sociales

M. Jean-Baptiste Lemoyne

M. Jean Desessard

M. Dominique Watrin

M. Gilbert Barbier

M. Jean-Marie Vanlerenberghe

M. Jean-Pierre Caffet

M. François Rebsamen, ministre

Discussion des articles

ARTICLE PREMIER

M. Jean Desessard

ARTICLE 2

Interventions sur l'ensemble

M. Dominique Watrin

M. Jean Desessard

M. Jean-Pierre Caffet

M. Jean-Baptiste Lemoyne

M. Jean-Marie Vanlerenberghe

Mme Annie David

Code mondial antidopage (Procédure accélérée)

Discussion générale

M. Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports

M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur de la commission de la culture

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture

Mme Corinne Bouchoux

Mme Christine Prunaud

M. Jean-Claude Requier

M. Claude Kern

M. Michel Savin

M. Dominique Bailly

M. Patrick Kanner, ministre

Discussion des articles

Débat préalable au Conseil européen des 23 et 24 octobre 2014

Orateurs inscrits

M. Harlem Désir, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des affaires européennes

M. André Gattolin

M. Éric Bocquet

M. Jean-Claude Requier

M. Yves Pozzo di Borgo

Mme Fabienne Keller

M. Simon Sutour

M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission des affaires économiques

M. Hervé Maurey, président de la commission du développement durable, des infrastructures, de l'équipement et de l'aménagement du territoire

Mme Michèle André, présidente de la commission des finances

M. Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes

M. Harlem Désir, secrétaire d'État

Débat interactif et spontané

Mme Pascale Gruny

M. Jean-Yves Leconte

M. Philippe Bonnecarrere

M. Ladislas Poniatowski

M. Pascal Allizard

M. Michel Canevet

M. Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes

Ordre du jour du mercredi 15 octobre 2014

Analyse des scrutins publics




SÉANCE

du mardi 14 octobre 2014

4e séance de la session ordinaire 2014-2015

présidence de M. Claude Bérit-Débat, vice-président

Secrétaires : M. Bruno Gilles, Mme Valérie Létard.

La séance est ouverte à 9 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu intégral publié sur le site Internet du Sénat, est adopté sous les réserves d'usage.

Conseil constitutionnel (Requêtes)

M. le président.  - En application de l'article 59 de la Constitution, M. le président du Sénat a été informé que le Conseil constitutionnel a été saisi de dix-sept requêtes contestant les opérations électorales auxquelles il a été procédé, le 28 septembre 2014.

Questions prioritaires de constitutionnalité

M. le président.  - Le Conseil constitutionnel a communiqué au Sénat, par courrier en date du jeudi 9 octobre 2014, une décision relative à deux questions prioritaires de constitutionnalité portant sur la prolongation exceptionnelle de la garde à vue pour des faits d'escroquerie en bande organisée.

Conseil constitutionnel (Décision)

M. le président.  - Le Conseil constitutionnel a communiqué au Sénat, par courrier en date du 9 octobre 2014, le texte d'une décision concernant la conformité à la Constitution de la loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt.

Conseil constitutionnel (Saisine)

M. le président.  - Le Conseil Constitutionnel a informé le Sénat qu'il a été saisi le 9 octobre 2014, en application de l'article 12 de la loi organique du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française, des dispositions des articles premier et 30-I de la loi du 20 décembre 2007 relative à la simplification du droit et les dispositions des articles 59 et 77-I de la loi du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes.

Organisme extraparlementaire (Candidature)

M. le président.  - M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir désigner un sénateur appelé à siéger au sein de la Commission nationale de l'informatique et des libertés.

Conformément à l'article 9 du Règlement, la commission de la culture a été invitée à présenter un candidat. Sa nomination aura lieu ultérieurement, dans les conditions prévues par l'article 9 du Règlement.

Engagement de la procédure accélérée

M. le président.  - En application de l'article 45, alinéa 2, de la Constitution, le Gouvernement a engagé la procédure accélérée pour l'examen de la proposition de loi relative à l'amélioration du régime de la commune nouvelle, pour des communes fortes et vivantes, déposée sur le Bureau de l'Assemblée nationale le 3 octobre 2014 et de la proposition de loi relative au même sujet déposée sur le Bureau de l'Assemblée nationale le 7 octobre 2014.

Dépôt d'un rapport

M. le président.  - M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre, en application de l'article L.O. 1114-4 du code général des collectivités territoriales, le rapport sur l'autonomie financière des collectivités territoriales pour l'année 2012. Il a été transmis à la commission des lois, ainsi qu'à la commission des finances.

Conférence des présidents

M. le président.  - Je vais vous donner lecture des conclusions de la Conférence des présidents.

MARDI 14 OCTOBRE

- Questions orales

À 14 heures 30 :

- Projet de loi relatif à la désignation des conseillers prud'hommes

- Projet de loi habilitant le Gouvernement à prendre les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires pour assurer dans le droit interne le respect des principes du code mondial antidopage

À 21 heures 30 :

- Débat préalable à la réunion du Conseil européen des 23 et 24 octobre 2014

MERCREDI 15 OCTOBRE

À 14 heures 30 et le soir :

- Projet de loi renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme

En outre, à 14 heures 30 :

- Désignation des vingt et un membres de la commission d'enquête sur l'organisation et les moyens de la lutte contre les réseaux djihadistes en France et en Europe

JEUDI 16 OCTOBRE

À 9 heures 30 :

- Suite du projet de loi renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme

À 15 heures :

- Questions d'actualité au Gouvernement

À 16 heures 15 et le soir :

- Suite éventuelle de l'ordre du jour du matin

- Projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière

SEMAINE SÉNATORIALE DE CONTRÔLE

MARDI 21 OCTOBRE

À 9 heures 30 :

- Questions orales

À 14 heures 30 :

- Débats de contrôle

MERCREDI 22 OCTOBRE

De 14 heures 30 à 18 heures 30

Ordre du jour réservé au groupe socialiste et apparentés

JEUDI 23 OCTOBRE

De 9 heures à 13 heures :

Ordre du jour réservé au groupe UDI-UC

De 15 heures à 15 heures 45 :

- Questions cribles thématiques sur les accords de libre-échange

De 16 heures à 20 heures :

Ordre du jour réservé au groupe UMP

SEMAINE RÉSERVÉE PAR PRIORITÉ AU GOUVERNEMENT

MARDI 28 OCTOBRE

À 16 heures 15 :

- Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, en application de l'article 50-1 de la Constitution

Le soir :

- Deuxième lecture du projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral

MERCREDI 29 OCTOBRE

À 14 heures 30 et le soir

- Suite de la deuxième lecture du projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral

JEUDI 30 OCTOBRE

À 9 heures 30 :

- Six conventions internationales en forme simplifiée

- Suite de la deuxième lecture du projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral

À 15 heures :

- Questions d'actualité au Gouvernement

À 16 heures 15 et, éventuellement, le soir :

- Suite de l'ordre du jour du matin

L'ordre du jour est ainsi réglé.

Questions orales

Simplification des normes dans le secteur du tourisme

M. Luc Carvounas .  - Le pacte de responsabilité et de solidarité fait de la simplification des normes une priorité. La nomination de Thomas Mandon au secrétariat d'État auprès du Premier ministre chargé de la réforme de l'État en témoigne.

Le tourisme souffre particulièrement de l'inflation des normes alors qu'il représente la première industrie française. Lors des assises du tourisme, le 29 juin dernier, la publication d'une ordonnance de simplification a été annoncée. Les professionnels l'attendent avec impatience. Quel sera son contenu et quand sera-t-elle diffusée ?

M. Matthias Fekl, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger .  - Lors de ces assises de novembre 2013 à juin 2014, les participants ont appelé de leurs voeux unanimes une simplification du secteur du tourisme. Le ministre des affaires étrangères et du développement international, M. Fabius - dont je vous prie d'excuser l'absence - a annoncé une ordonnance de simplification.

L'article 31 bis du projet de loi relatif à la simplification des entreprises concerne ce secteur. L'habilitation donnée au Gouvernement à agir par ordonnance, adoptée par l'Assemblée nationale, sera examinée par le Sénat prochainement.

Des mesures d'actualisation et de clarification législative sont en effet nécessaires. L'administration a entamé la réflexion nécessaire. L'ordonnance sera transmise au Conseil d'État entre fin 2014 et début 2015 dans les plus brefs délais et respectera le périmètre de l'habilitation donnée par le Parlement.

M. Luc Carvounas.  - Ces décisions sont très attendues par les professionnels. Nous serons candidat à l'exposition universelle 2025 ; j'espère que notre industrie du tourisme sera à la hauteur.

Avenir des notaires

Mme Marie-France Beaufils .  - Les notaires sont inquiets et déterminés. Ils sont la cible des caricatures, bien éloignées de la vérité, de ceux qui souhaitent la déréglementation de leur profession. Ils ne méritent pas les attaques injustes dont ils sont l'objet. Un membre du Gouvernement annonce qu'une telle déréglementation apporterait 6 milliards d'euros de pouvoir d'achat supplémentaires ; un autre ministre le dément. De fait, on ne voit pas pourquoi une telle libéralisation augmenterait le nombre d'achats immobiliers ou de successions à régler. Aux Pays-Bas, cela a eu pour effet une hausse de 70 % du coût des actes notariés, avec les conséquences qu'on imagine en termes d'inégalités sociales. En outre, l'entrée de capitaux étrangers entraînerait la disparition des petites études, si importantes dans nos petites villes et en milieu rural. Affaiblissement de l'accès au droit et des services publics sont à craindre d'une telle déréglementation, conséquence observée de la réforme de la carte judiciaire.

En juin 2013, à Lyon, la garde des sceaux déclarait devant le congrès des notaires qu'elle avait dû lutter contre ceux qui sont persuadés qu'il faut déréglementer ces professions. Elle ajoutait : « Nous sommes armés d'une culture du service public. Nous avons la culture de la présence territoriale. Nous avons la culture de la citoyenneté. Armés de cela, nous avons décidé d'être invincibles et nous avons été invaincus ! »

Ne laissons pas détruire nos principes républicains !

M. Jean-Claude Lenoir.  - Très bien ! (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Matthias Fekl, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger .  - La garde des sceaux connaît l'importance des notaires dans le service public de la justice. Le Gouvernement a soutenu devant les institutions européennes la spécificité de la profession lors de la révision de la directive « qualifications professionnelles » et il a obtenu l'exclusion du notariat du champ d'application de cette directive.

La Cour de justice de l'Union européenne, par un arrêt du 24 mai 2011, a reconnu que les notaires garantissaient un service d'intérêt général. Elle a considéré que les restrictions relatives à l'organisation française du notariat pouvaient être compatibles avec la liberté d'établissement garantie par le droit de l'Union.

La concertation menée par le ministre de l'économie a déjà levé un certain nombre d'inquiétudes et désamorcé une partie des protestations.

3

La nécessité de réformer les professions juridiques réglementées est largement partagée, y compris par les professions elles-mêmes. Depuis 2012, la garde des Sceaux a lancé cette modernisation, en liaison avec leurs représentants. Le décret du 19 mai dernier a réduit le tarif des greffiers des tribunaux de commerce. L'ordonnance du 12 mars 2014 a modifié les conditions de désignation des administrateurs et mandataires judiciaires. Le nombre de notaires salariés pouvant être nommés a été augmenté par l'ordonnance du 27 février 2014. Des participations financières croisées sont rendu possibles entre professionnels du droit et du chiffre par le décret du 19 mars 2014. Le décret du 28 août dernier a étendu au département le ressort de compétence des huissiers de justice.

Poursuivons dans la logique le dialogue, sans simplisme ni caricature. Nous avons le souci de préserver un service public de la justice efficace, juste dans son maillage géographique, et performant.

Mme Marie-France Beaufils.  - Des contradictions demeurent dans les faits. Dans Les Echos sont parues des pistes de réflexion dont la profession n'a jamais été saisie. Soyez plus clairs et prenez garde à votre communication... Les citoyens qui paient ce que l'on appelle les « frais notariaux » ne voient pas que la majeure partie de ceux-ci sont en fait des impôts et que la rémunération du notaire n'en représente qu'une faible part.

M. Jean-Claude Lenoir.  - Nous approuvons cette intervention. (Applaudissements sur les bancs UMP)

Organisation des intercommunalités

M. Jean-Claude Lenoir .  - La loi du 16 décembre 2010 prévoit que les assemblées communautaires peuvent s'organiser sur la base d'un accord local. Or le Conseil constitutionnel vient de déclarer inconstitutionnelle cette disposition. La loi qui s'appliquera dès lors risque fort de priver les petites communes de toute représentation dans ces assemblées.

On nous dit que cette loi ne devrait s'appliquer qu'en 2020. Rien n'est moins sûr. Le problème risque fort de se poser dès l'année prochaine. (Mme Frédérique Espagnac le reconnaît). La décision du Conseil constitutionnel rendra plus difficiles, voire impossibles, des accords locaux pourtant indispensables pour une bonne représentation des territoires au sein des structures intercommunales.

Jean-Pierre Sueur et Alain Richard ont déposé une proposition de loi. C'est une base de réflexion possible. Quoi qu'il en soit, il y a urgence à légiférer.

M. Matthias Fekl, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger .  - Le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 20 juin 2014, a en effet jugé insuffisantes ces dispositions législatives, au regard du respect du principe d'égalité devant le suffrage. Il a toutefois modulé dans le temps les conséquences de sa décision, afin d'éviter de remettre en cause les résultats des récentes élections municipales et communautaires.

Le Gouvernement a précisé aux préfets la procédure à suivre pour la modification de la composition des conseils communautaires. Au-delà de cet accompagnement des élus locaux, le Gouvernement, est attaché à la possibilité d'accords locaux sur la composition des instances des communautés de communes ou d'agglomérations. Tout en respectant la décision du Conseil constitutionnel, il convient de redonner plus de souplesse aux élus. La possibilité de nouer des accords locaux de représentation est en effet une condition de l'efficacité de l'intercommunalité. Le Premier ministre l'a rappelé lors de la convention nationale de l'Assemblée des communautés de France du 9 octobre dernier.

Alain Richard et Jean-Pierre Sueur ont en effet déposé une proposition de loi, qui sera examinée demain en commission et la semaine prochaine en séance publique. Le Gouvernement envisage de saisir le Conseil d'État de ce sujet afin de clarifier la situation.

M. Jean-Claude Lenoir.  - Je suis heureux de ces engagements. Nous avons sans doute commis une erreur en rédigeant la loi de 2010 : nous avons écrit qu'il fallait « tenir compte » de la population, nous aurions dû écrire « en fonction » de celle-ci. La loi n'avait pas été censurée par la Conseil constitutionnel lorsqu'il en avait été saisi. C'est à la suite d'une QPC de la commune de Salbris qu'il a pris cette décision.

TVA des télévisions locales

M. Philippe Leroy .  - Le CGCT permet la mise en place de services de télévisions locales. On compte actuellement 48 télévisions locales sur la TNT et près de 100 télévisions câblées.

Les collectivités territoriales peuvent conclure avec ces télévisions des contrats d'objet et de moyens sur trois à cinq ans et leur attribuent des aides. L'économie du secteur est toutefois fragilisée par l'augmentation de la TVA, de 7 % à 10 %, qui s'applique aux subventions versées par les collectivités locales. Le taux appliqué à France Télévisions n'est que de 2,1 % : il y a là inégalité de traitement entre service public local d'une part et national d'autre part.

M. Matthias Fekl, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger .  - Les taux de TVA ont été en effet modifiés en janvier dernier. Les subventions versées par les collectivités territoriales sont soumises au taux intermédiaire passé à 10 %. Une baisse du taux de TVA - qui ne saurait de toute façon être inférieure à 5,5 % puisque c'est interdit depuis 1991 - introduirait une distorsion de concurrence avec les services qui ne sont pas soutenus par une collectivité territoriale. Le Gouvernement n'envisage donc pas de modifier le droit sur ce point, d'autant que les rémunérations versées aux collectivités territoriales et à leurs groupements en vertu des contrats d'objectifs et de moyens s'appliquant aux services de télévisions locales sont soumis au même taux de 10 % valant pour les abonnements souscrits par les usagers.

M. Philippe Leroy.  - C'est regrettable. France Télévisions et les télévisions locales sont de même nature : pourquoi les traiter différemment ? De plus, les télévisions locales ne reçoivent aucune autre forme d'aide publique, aide à la presse par exemple.

Les Français regardent ces télévisions locales environ 40 minutes par jour : c'est considérable !

Prélèvements sur le réseau Action Logement

M. Georges Labazée .  - Je salue la présence du grand quart sud-ouest à la présidence et au banc du Gouvernement ! Ma question porte sur le réseau Action Logement.

Le logement social est une priorité pour les Français et, heureusement, pour le Gouvernement. La contribution d'Action Logement est essentielle : 70 000 ménages ont été logés sur réservation des comités interprofessionnels du logement (CIL), et près de 560 000 ménages ont bénéficié de ses aides.

La lettre d'engagement mutuel signée en novembre 2012 permettait au réseau d'emprunter 3 milliards d'euros en contrepartie d'une réduction des prélèvements publics. Pourtant, en juillet 2014, le Gouvernement a décidé d'accroître ceux-ci. Les conséquences en seront désastreuses.

Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité .  - Le Gouvernement a pris une série de décisions pour relancer la rénovation de logements.

J'ai reçu les partenaires sociaux pour discuter de l'utilisation des fonds des employeurs. Renforcement de l'accession à la propriété, accompagnement de la mobilité professionnelle, soutien à la construction sont nos priorités.

Les grandes lignes de l'accord trouvé avec les partenaires sociaux font consensus. Nous n'en avons pas moins besoin de l'engagement de tous, et particulièrement des élus locaux, sur le terrain, pour ouvrir le plus largement possible l'accès au logement.

M. Georges Labazée.  - Je ne doute pas que nous trouverons une solution au relèvement des plafonds, pour produire plus de logements.

Taxation des propriétaires de leur logement

M. Jean Louis Masson .  - Selon des rumeurs de presse insistantes, le Gouvernement aurait étudié la possibilité de taxer les propriétaires de résidences principales, au motif que ceux-ci perçoivent un revenu fictif, en raison du loyer qu'ils économiseraient. Il est incroyable de considérer que ceux qui ont travaillé toute leur vie pour acquérir leur logement auraient à être pénalisés ainsi. D'autant que les Français croulent sous les taxes et impôts divers, et que certains marginaux vivent aux crochets de la société en percevant des prestations sans travailler. Souvenez-vous des déclarations du père de la petite Leonarda, avouant carrément sur une chaîne italienne préférer la France en raison du niveau généreux des aides sociales. Au-delà de la provocation, il y a là une réalité à laquelle il convient de s'attaquer.

Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargée de l'enseignement supérieur et de la recherche .  - Le Gouvernement privilégie l'accompagnement vers l'autonomie des familles les plus en difficulté. La régulation des flux de populations auxquels vous faites allusion relève de la responsabilité européenne, et je n'en traiterai pas ici.

La taxation de la propriété d'un logement sur la base du loyer fictif a déjà été appliquée, jusqu'en 1965. Sur le plan technique, l'évolution de la valeur locative posait toutefois problème, le frein ainsi posé à l'accession à la propriété a conduit à l'abandon d'une telle mesure par la loi de finances pour 1965. En outre, les propriétaires sont soumis à des charges que n'ont pas les locataires. Il n'est pas envisagé d'y revenir.

M. Jean Louis Masson.  - On ne peut constamment évoquer cette différence entre propriétaire et locataire : la seule qui existe, c'est l'effort du premier, qui a sué sang et eau pour acquérir son logement.

Vous n'avez pas répondu à la question de savoir si le Gouvernement avait étudié l'hypothèse d'une telle taxation.

Déménagement de la faculté de pharmacie de Châtenay-Malabry

M. Philippe Kaltenbach .  - Il y a 50 ans, les pouvoirs publics ont décidé de faire de Châtenay-Malabry une ville universitaire, en y transférant l'École centrale de Paris et la faculté de pharmacie de l'avenue de l'Observatoire. Cette dernière, de 56 000 m², regroupe recherche et formation, accueille 3 500 étudiants et 210 enseignants chercheurs. L'université Paris-Sud a pris la décision de transférer sur le campus de Saclay à l'horizon 2018-2019. 

Quelles sont les grandes orientations de ce projet ? Quel en est le calendrier exact ?

Châtenay-Malabry dispose de ressources fiscales inférieures à la plupart des communes environnantes ; des projets de logements y ont déjà été décidés. Des compensations sont-elles envisagées ?

Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargée de l'enseignement supérieur et de la recherche .  - Le projet de Paris-Saclay est fondamental pour l'attractivité de notre pays. J'en profite pour saluer Jean Tirole, de même que Serge Haroche,... et Patrick Modiano. Cinq grandes récompenses internationales en si peu de temps. La France est bien un pays de connaissance et d'excellence.

Le Gouvernement a bien engagé un projet avec Paris-Sud - qui en est le chef de file - de construction d'un grand pôle de biologie prochainement desservi par le réseau Grand Paris Express. Le campus accueillera en outre Centrale, Supélec, et l'ENS de Cachan.

Le préfet de la région Île-de-France coordonne cette opération. Le transfert de la faculté de pharmacie est encadré par un protocole avec la ville de Châtenay-Malabry et concerne des emprises financières importantes.

Le site de Châtenay n'est pas directement concerné. Ce projet est un outil essentiel de lutte contre la crise du logement et de création d'emplois.

M. Philippe Kaltenbach.  - Merci pour ces précisions. Vous avez associé les collectivités locales ; les conditions sont réunies pour faire travailler ensemble tous les acteurs. Il y a en effet de belles opportunités dans ce projet.

Accueil des personnes âgées dépendantes

M. Jean-Pierre Bosino .  - J'attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales sur la pénurie de places et le coût des structures d'accueil pour personnes âgées dépendantes dans le département de l'Oise ainsi que sur la création d'un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) dans le bassin creillois, sur la commune de Montataire.

La situation des personnes âgées dépendantes est, dans notre pays, préoccupante et ce constat n'épargne par le département de l'Oise. Dans le bassin creillois, il n'existe que 312 places en maison de retraite pour 71 000 habitants, avec un coût mensuel moyen par lit de 2 500 euros. Soucieuse de ne pas s'enfermer dans une vision pessimiste et de s'inscrire, au contraire, dans une démarche constructive de recherche de solutions, la municipalité de Montataire a, en 2007, élaboré un projet d'Ehpad reposant sur une gestion associative. Ce projet s'est pourtant heurté à un refus du conseil général et de l'État, par l'intermédiaire de l'agence régionale de santé, au motif qu'il existerait une surcapacité d'accueil en Picardie.

Madame la ministre, nous avons besoin du soutien du Gouvernement pour apporter une réponse globale au défi de l'autonomie.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie .  - Douze Ehpad se trouvent dans un rayon de quinze kilomètres, avec 1 112 places. Le taux d'équipement de l'Oise est supérieur à la moyenne picarde et même nationale. Je vous remercie pour votre hommage à l'action du conseil général et de son président, Yves Romme.

Le diagnostic de besoins en 2012 confirme que l'arrondissement de Senlis dispose d'un taux d'équipement satisfaisant : le nombre de personnes âgées a certes augmenté, mais le nombre de places également.

L'accessibilité économique des places habilitées est un enjeu majeur. Le projet de loi relatif aux conséquences du vieillissement sera examiné en 2015 par votre assemblée. Des établissements sous conventions pourront accueillir des personnes en légère perte d'autonomie, afin de limiter ou retarder l'accueil en Ehpad, le souhait de l'immense majorité de nos concitoyens étant de vieillir à domicile.

M. Jean-Pierre Bosino.  - L'arrondissement de Senlis comporte le bassin creillois, peuplé de gens à revenus modestes, ouvriers, employés, qui n'ont pas accès aux places d'Ehpad qui se sont ouvertes récemment à plus de 3 000 euros par mois. D'où la question que j'ai soulevée. Certes, le conseil général fait des efforts pour maintenir à domicile le plus longtemps possible les personnes âgées, mais il est un moment où cela n'est plus possible. Il faut donc envisager d'autres solutions

Santé et nucléaire

Mme Aline Archimbaud .  - Un accord a été signé entre l'OMS et l'AIEA le 28 mai 1959. En 1986, la mainmise de l'AIEA a été renforcée par les conventions sur la notification rapide d'un accident nucléaire et sur l'assistance en cas d'accident nucléaire.

Cela n'est pas rassurant pour la transparence sur les conséquences de la radioactivité sur la santé. L'OMS n'est intervenue que cinq ans après le début de la catastrophe de Tchernobyl, sollicitée pour un rapport finalement fait par l'AIEA, et elle continue d'affirmer que cette catastrophe a provoqué moins d'une cinquantaine de morts. Elle a omis de publier les rapports des conférences de 1995 et 2001 sur les conséquences de Tchernobyl, au cours desquelles des informations très gênantes pour le lobby nucléaire ont été présentées.

Après Fukushima, l'OMS n'a pas protesté lorsque le gouvernement japonais a remonté la norme admissible pour les populations de 1 à 20 msviert/an, norme réservée aux travailleurs du nucléaire. De plus, elle a publié en 2013 un rapport citant des chiffres inférieurs y compris à ceux que Tepco et le lobby nucléaire ont eux-mêmes reconnus. Dernière alerte en date : l'OMS a supprimé son département radiation il y a quelques années.

Monsieur le ministre, comptez-vous freiner la révision de l'accord de 1959 en tant que représentant de la France à l'OMS ?

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie .  - C'est bien l'OMS qui est responsable de l'évolution sanitaire des conséquences de tels événements. L'AGNU a créé à cette fin un comité scientifique d'étude du niveau et des effets des rayons ionisants.

Après Tchernobyl, l'OMS a, dès mai 1986, réuni des experts de onze pays pour évaluer les conséquences de l'accident. L'OMS est la première organisation internationale à avoir publié un rapport sur les conséquences de l'accident de Fukushima, dès 2013, deux ans après cet événement.

L'OMS n'a pas compétence pour commenter les valeurs de références retenues par le gouvernement japonais, qui se situent dans la fourchette basse retenue au niveau international

Une analyse indépendante des conséquences radiologiques de l'accident de Fukushima sera réalisée par l'OMS.

Mme Aline Archimbaud.  - Je maintiens ma demande : l'OMS doit préserver la santé publique et à ce titre jouer un rôle plus important.

Majeurs sous tutelle

Mme Claire-Lise Campion .  - J'attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur la prise en compte de l'obligation alimentaire dans le calcul des ressources des majeurs sous tutelle.

Dans un souci de solidarité intergénérationnelle, pour ne laisser aucune personne âgée sans hébergement adapté et sans conditions de vie décentes, la loi oblige ses descendants à lui apporter, si besoin, une aide financière sous la forme d'une obligation alimentaire.

Lorsque l'obligation alimentaire est payée directement à un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) par les descendants, elle n'est pas considérée comme une ressource de l'ascendant si celui-ci bénéficie de faibles ressources, telle l'aide sociale aux personnes âgées (Aspa). Ainsi ces personnes âgées dépendantes ne sont pas imposables et restent éligibles aux aides sociales.

Lorsqu'une personne âgée est placée sous la tutelle d'une association habilitée, celle-ci est chargée de réunir les sommes dues par les descendants au titre de l'obligation alimentaire, puis de régler directement les frais d'hébergement à un Ehpad. Dans ce cas de figure, le montant versé au titre de l'obligation alimentaire est alors considéré comme une ressource de la personne dépendante et entre dans le mode de calcul de son impôt. Par ce mécanisme, cette dernière devient bien souvent imposable et perd le bénéfice des aides sociales auxquelles elle avait précédemment droit, telles l'Aspa ou l'allocation de logement social (ALS).

C'est un double poids pour la personne dépendante et pour ses proches, qui doivent de surcroît s'acquitter de frais de gestion plus importants auprès de l'association tutélaire calculés sur les ressources de la personne dépendante.

Dans l'intérêt des majeurs dépendants placés sous tutelle et celui de leurs proches, le Gouvernement entend-il uniformiser le mode de calcul actuel qui entrave la nécessaire solidarité intergénérationnelle au sein d'une même famille ?

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie .  - En application de l'article 79 du code général des impôts, dans le cas de l'entretien de l'ascendant dans une maison de retraite, celui-ci devrait être assujetti à l'impôt au titre de la pension alimentaire. L'administration fiscale admet toutefois qu'il ne soit pas imposé de ce chef, tempérament nécessairement limité, qui ne s'applique pas en cas d'aide versée à un proche valide disposant de faibles ressources ou de versement transitant par le compte de l'ascendant. La réponse à votre question est donc négative mais le Gouvernement est prêt à entamer une réflexion au fond car il serait souhaitable que ce dispositif complexe soit plus lisible pour les contribuables.

Mme Claire-Lise Campion.  - Merci pour votre réponse, merci de proposer une ouverture, sur le fond. Il faut poursuivre, à la lumière des questions posées ces dernières années par les parlementaires qui s'intéressent à ce sujet. Je suis à votre disposition pour ce faire.

Allocation équivalent retraite

M. Dominique Watrin .  - L'allocation équivalent retraite (AER) a été remplacée en juillet 2011 par l'ATS (allocation transitoire de solidarité). Le Gouvernement, contrairement à ses engagements, a décidé de prolonger cette mesure, très insuffisante pour les personnes concernées, en raison de son montant trop faible (500 euros par mois) et des conditions restrictives qu'elle leur impose, suscitant l'incompréhension et la colère de ceux qui n'en bénéficient pas, bien qu'ayant travaillé 40 ans sans discontinuité.

Rétablir l'AER, permettrait à des milliers de seniors français de ne plus vivre dans la misère, de redevenir des citoyens et des consommateurs. Les contrats de génération n'ont rien changé. Seuls 20 000 de ces contrats ont été signés.

Le montant de l'ASS et du RSA sont très inférieurs au seuil de pauvreté. Quelles mesures comptez-vous prendre, monsieur le ministre, pour mettre fin à cette injustice ?

M. François Rebsamen, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social .  - Je réaffirme à cette occasion l'engagement sans faille du Gouvernement pour la justice sociale, l'accompagnement vers l'emploi de tous nos concitoyens qui le demandent.

Le Comité interministériel de lutte contre l'exclusion réuni pour la première fois en janvier 2013 depuis 2006 a décidé l'engagement d'un plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté.

La revalorisation du montant du RSA-socle de 10 % sur cinq ans a été engagée, ce qui le fait passer à 510 euros par mois pour une personne seule sans autres ressources.

L'élargissement de l'ATS par décret du 4 mars 2013, a corrigé des injustices provoquées par la réforme menée par la précédente majorité. La majorité actuelle ne renie pas ses combats de l'époque où elle était dans l'opposition. Elle a fait inscrire dans la loi la remise d'un rapport au Parlement sur les personnes concernées par vos questions, ce qui sera fait cette semaine.

Fin 2014, toutes les personnes concernées, nées en 1952 et 1953, pourront faire valoir leurs droits à la retraite. Les services de l'État, en lien avec les acteurs locaux, proposent à chaque fois des solutions ou des conseils pertinents pour faire face aux situations individuelles difficiles.

La conférence sociale des 7 et 8 juillet dernier a fait de la lutte contre le chômage de longue durée une priorité. Les contrats aidés dans le secteur marchand sont systématiquement ciblés. Le maintien dans l'emploi des salariés de plus de 45 ans est une priorité. En 2015, l'aide au contrat de génération est doublée en cas d'embauche simultanée d'un jeune en formation. L'engagement du Gouvernement en faveur de la justice sociale est toujours aussi fort. La comparaison du taux de pauvreté des chômeurs français et des chômeurs allemands est au détriment de notre voisin d'outre-Rhin.

M. Dominique Watrin.  - Votre réponse n'apporte aucun élément nouveau susceptible d'apaiser la détresse de ces milliers d'hommes et de femmes qui ont droit à une retraite et à un traitement équitable pour les sortir de la pauvreté. Nous reparlerons du rapport que vous avez évoqué. Je pense aussi à ces anciens salariés nés de 1954 à 1957, qui ne sont pas concernés par l'ATS. Ils sont en colère, car ils ont travaillé dur, cotisé toute leur vie et sont victimes en quelque sorte d'une double peine. La France, pays riche, qui dégage des dizaines de milliards d'euros pour alléger les cotisations sociales des entreprises du CAC 40, devrait être capable de trouver les 800 millions d'euros nécessaires.

Centre de l'établissement public d'insertion de la défense de Montry en Seine-et-Marne

M. Michel Houel.  - En raison de mon extinction de voix, je vous prie d'accepter que M. Gournac pose ma question.

M. le président.  - Bien volontiers !

M. Alain Gournac .  - La question de M. Houel porte sur le devenir des centres de l'établissement public d'insertion de la défense (Epide) et plus particulièrement sur celui de Montry en Seine-et-Marne.

Selon un rapport du directeur général de l'Epide de mai 2014, dont la presse s'est fait l'écho, sont prévus la fermeture des Epide de Velet, Montry, Langres et Larnodec et le redéploiement des places et des moyens correspondants dans les autres centres existants.

Le premier centre de l'Epide a ouvert ses portes à Montry en 2005 et reçoit chaque année 150 jeunes volontaires de 16 à 25 ans, tous en grande difficulté. L'objectif n'est autre que de favoriser leur insertion professionnelle et leur intégration dans la société. La réussite de cet établissement seine-et-marnais n'est plus à démontrer. En 2013, il a enregistré 107 « sorties positives » : concrètement, 107 jeunes ont trouvé un emploi ou une formation durable. Cette réussite repose en partie sur la taille de la structure, son taux d'encadrement et la qualité professionnelle des 60 agents.

Alors que le chômage des jeunes est au plus haut, est-il raisonnable de sacrifier sur l'autel budgétaire des jeunes sans formation ? De fermer un établissement qui, depuis trois ans, a bénéficié d'importants travaux financés par l'État, ou encore de mettre en péril les emplois des agents travaillant sur le site ?

En Seine-et-Marne, les élus comme le personnel sont mobilisés pour sauver l'Epide de Montry, qui devrait servir d'exemple, au regard de ses résultats.

Il faut engager un dialogue constructif avec les professionnels et les élus locaux pour trouver une solution financière acceptable pour tous.

M. François Rebsamen, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social .  - Mis en place en 2005, l'Epide est chargé d'accompagner des jeunes de 18 à 25 ans sans diplôme ou en voie de marginalisation, pendant six à douze mois. Au total, plus de 2 000 jeunes sont ainsi accueillis sur l'ensemble du territoire. Vu le contexte budgétaire, les Epide et l'administration réfléchissent à la rationalisation de ce dispositif, dont le coût s'élève à 85 millions d'euros par an. La participation du ministère du travail, de 50 millions par an à l'origine, a été revue à la baisse par le gouvernement Fillon. En 2015, je maintiens la participation de mon ministère à 45 millions pour un budget global de 75 millions d'euros, le reste venant du ministère de la ville. L'établissement est entré dans une dynamique visant à mettre son format en adéquation avec ses moyens. Le budget 2014 prévoit 8 % d'économies de fonctionnement. Il faut refonder l'Epide pour trouver plus de solidité financière et de pérennité, et faire évoluer le projet pédagogique. D'où les schémas proposés par le directeur de l'Epide, dont se sont émus les parlementaires. Ils ne sont que des pistes de travail à ce jour. Les élus, le personnel, les partenaires territoriaux, les entreprises, seront associés à ces évolutions. La fermeture de Montry a été envisagée parce que le site possède un potentiel de valorisation élevé en raison de sa situation géographique. En raison d'un manque d'entretien, sa mise aux normes exigerait des travaux importants. Nous n'en sommes, je le répète, qu'au stade des pistes de travail. Je vous tiendrai personnellement informé de celles qui seront retenues par le Gouvernement.

M. Michel Houel.  - Merci monsieur le ministre. Je vous invite à Montry, qui n'est guère loin de Paris - mon problème de voix n'est pas contagieux.

M. Antoine Lefèvre.  - C'est la prochaine loi de finances qui nous laisse sans voix !

Dématérialisation des actes comptables dans les petites communes

M. Antoine Lefèvre .  - L'article 8 de l'arrêté du 3 août 2011 impose au secteur public local la dématérialisation de l'intégralité des pièces et des actes comptables qui étaient auparavant en support papier. Cette nouvelle réglementation fait peser l'intégralité des charges sur l'ordonnateur des dépenses, spécifiquement des collectivités locales. Par ailleurs, et compte tenu de la puissance des logiciels mis en service, les communes sont souvent dans l'obligation d'acquérir de nouveaux serveurs informatiques. Ainsi, outre la mise en oeuvre des rythmes scolaires et de la baisse des dotations aux communes, la mise en place du PSVE2 va avoir un impact financier important pour les plus petites d'entre elles : investir dans du matériel informatique performant et dans un scanner (dont une mauvaise saisie peut bloquer le dossier) ; réinstaller les nouveaux logiciels financiers, notamment de gestion du personnel (à coût de maintenance annuel plus élevé) sur le nouveau matériel, tâches qui nécessiteront un travail supplémentaire important pour les secrétaires de mairie. Ces derniers devront donc être formés (coût de formation à la charge de la commune). L'accès au service devra être possible du lundi au vendredi dans la journée, comme à la plate-forme d'assistance. Comment feront les communes ayant des permanences le samedi et en soirée ?

L'archivage électronique sécurisé est encore incertain pour les petites collectivités locales, qui ne disposent pas des moyens nécessaires. Cela risque d'entraîner de nombreux dysfonctionnements. Les petites communes en seront de leur poche pour 3 000 euros, ce qui est insupportable pour les plus petites d'entre elles. Or ces dépenses que devront assumer les communes feront faire de sensibles économies aux services des trésoreries. Ne pourrait-on partager leur coût ? Une circulaire du Premier ministre du 9 octobre, en imposant à compter du 1er janvier prochain la compensation de toute charge financière nouvelle des collectivités territoriales par une mesure de simplification ou d'allégement d'un montant équivalent, ouvre toutefois des perspectives qui appellent, monsieur le ministre, de votre part, une mise au point : comment alléger la facture des petites communes ?

M. François Rebsamen, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social .  - Excusez l'absence de M. Sapin, retenu à Luxembourg par un conseil Ecofin. J'aurais aimé qu'il puisse vous répondre directement. Je puis toutefois vous apporter quelques éléments. L'amélioration de la qualité comptable répond à une attente forte des acteurs locaux. D'où la généralisation prévue du protocole PES V2, en remplacement de protocoles moins performants. La circulaire du Premier ministre d'octobre ne vaut que pour l'avenir : elle n'a pas de caractère rétroactif et ne peut concerner l'arrêté pris en août 2011 par le ministre des finances de l'époque.

Ce protocole facilite les échanges entre ordonnateurs et comptables. Il oeuvre ainsi à la dématérialisation, sans en faire une obligation. Il améliore la performance de l'ensemble de la chaîne budgétaire et comptable, en limitant le nombre de pièces à transmettre. Il entraîne des économies de fonctionnement, par rapport au coût des transmissions traditionnelles. La Direction générale des finances publiques, en liaison avec les associations d'élus locaux, apportera aux ordonnateurs communaux tous les conseils nécessaires à la mise en oeuvre, de la généralisation du protocole.

M. Antoine Lefèvre.  - Je regrette à nouveau que le coût en soit assumé exclusivement par les collectivités locales, dans le contexte de baisse annoncée de leurs dotations. Je regrette aussi que la circulaire précitée ne soit pas rétroactive.

Liaisons maritimes avec les îles du Morbihan 

M. Michel Le Scouarnec .  - Traditionnellement, le vent souffle sur nos îles bretonnes. Mais les rafales s'accentuent.

Il faudra payer beaucoup plus pour moins de services, si l'on suit les propositions du conseil général du Morbihan, avec la redéfinition de la délégation de service public actuelle, à la fin de cette année, pour les îles de Groix, Belle-Île, Houat et Hoëdic, signée en 2008 par Océane, filiale de Véolia Environnement. Le conseil général s'appuie sur un rapport de la chambre régionale des comptes pour imposer de nouveaux tarifs plus élevés.

C'est regrettable. Ce projet ne répond pas aux préoccupations des habitants, les horaires envisagés sont inadaptés à la vie des îliens. Veut-on appauvrir encore un peu plus ces îles dont la fréquentation a baissé de 20 % depuis six ans. Il faut une offre de rotations acceptable, alors que la crise, malheureusement, frappe durement nos îles.

M. François Rebsamen, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social .  - Je suis l'actualité et j'ai entendu parler de ce problème, mais je vous prie d'excuser l'absence du secrétaire d'État aux transports, en réunion avec le Premier ministre.

Le Gouvernement comprend les préoccupations des élus locaux, des habitants, des commerçants. La desserte des îles est organisée, en vertu du code des transports, par le département. Elle est de la compétence exclusive du conseil général du Morbihan. Le Gouvernement ne peut répondre en ses lieu et place. Le secrétaire d'État aux transports, Alain Vidalies, a fait en sorte qu'une délégation départementale soit reçue dès cet après-midi à son cabinet.

M. Michel Le Scouarnec.  - Je me doutais de la compétence du département... Pour Belle-Île-en-Mer, la compagnie Océane passerait de 7 à 6 rotations en semaine, voire 5 le week-end. Depuis des années, les élus de ces territoires travaillent à un modèle économique viable.

Les îles vont au-devant de graves difficultés si les projets actuels sont maintenus. Il y a des progrès à accomplir sur la voie de la démocratie participative et de citoyenneté. Un fonds exceptionnel de solidarité pourrait être mis en place pour venir en aide aux collectivités concernées. Nous sommes loin de l'égalité devant le service public de tous les citoyens. J'espère que l'on trouvera une solution.

M. François Rebsamen, ministre.  - Je l'espère aussi.

Algues des Sargasses à la Martinique

M. Maurice Antiste .  - L'invasion durable de la Martinique par des algues jaunes en provenance de la mer des Sargasses est un désastre environnemental, économique et sanitaire.

La présence du tapis dense d'algues sur les côtes et dans toutes les baies du pays constitue, en premier lieu, une atteinte grave à l'environnement maritime et naturel, ainsi qu'aux ressources halieutiques et à la sauvegarde de la biodiversité.

Ces algues causent un grave préjudice économique pour les professionnels du tourisme et de la mer (pêcheurs, aquaculteurs, etc.) qui voient leurs outils de travail détériorés : difficultés à démarrer les moteurs, les algues obstruant les systèmes de refroidissement, dérèglement des sondeurs et des GPS. Quant aux aquaculteurs, ils sont nombreux à avoir perdu la totalité de leurs productions.

Il existe en outre un effet inattendu du dégagement de l'hydrogène sulfuré lors de la putréfaction de ces algues. Celui-ci attaque les circuits électroniques d'appareils domestiques, tels que télévisions, micro-ondes, climatiseurs, micro-ordinateurs. De nombreuses familles, habitants du littoral, ont ainsi perdu la plupart de leurs équipements.

Les importantes dépenses induites par l'enlèvement de ces algues, pour les communes du littoral concernées, sont en partie couvertes par des aides exceptionnelles adoptées en urgence par le conseil général (340 000 euros) et le conseil régional (350 000 euros), en l'absence de soutien de l'État.

Aucun mécanisme existant ne permet, à ce jour, de compenser les préjudices subis. Quelles mesures sont envisagées - tel un arrêté de catastrophe naturelle, par exemple - pour préserver les côtes du littoral et favoriser d'éventuelles indemnisations ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique .  - Je vous prie d'excuser Mme Royal. Nous avons connu un problème similaire en Bretagne.

À La Martinique, les pouvoirs publics ont apporté une aide aux communes pour qu'elles puissent effectuer le ramassage de ces algues.

Une instance spéciale a été mise en place pour suivre la situation en temps réel. Plusieurs dizaines de militaires en service adapté sont mobilisés sur place depuis une semaine. Des hélicoptères de la sécurité civile surveillent la zone. Les usagers sont régulièrement informés.

La ministre de l'écologie a mobilisé des crédits exceptionnels pour valoriser ces algues. Tous les services de l'État sont mobilisés. Le préfet a mis en place des groupes de travail pour valoriser ces algues dans l'agriculture ou la production d'énergie. Une expertise nationale sera missionnée pour mieux connaître et anticiper le phénomène.

La notion « d'agent naturel » visée par l'article L.125-1 du code des assurances pourrait s'appliquer à ce phénomène pour déclarer la situation de catastrophe naturelle : une étude est à faire.

Tous les services administratifs restent à votre disposition. La voie de la valorisation des algues doit être explorée pour tirer un bénéfice économique de cette catastrophe.

M. Maurice Antiste.  - Je me réjouis de la mobilisation des services de l'État. Je veux que tout le monde prenne conscience de l'ampleur du phénomène, qui touche l'ensemble des Caraïbes. Cuba, la République dominicaine sont d'ailleurs en avance dans le traitement de ce phénomène, qui n'est apparu chez nous qu'il y a deux ans. J'ose donc proposer l'organisation d'une conférence internationale sur ce sujet. J'insiste enfin à nouveau sur les conséquences sanitaires graves que pourrait entraîner l'inhalation des gaz produits par la décomposition de ces algues.

Inadaptation du plan de prévention des risques de submersion pour la baie du Mont-Saint-Michel

M. Dominique de Legge .  - La tempête Xynthia a été une tragédie et il faut en tirer les enseignements. J'ai participé à la mission sénatoriale d'enquête et je crois nécessaire de tenir compte de tous les particularismes locaux. Je m'interroge sur le plan de prévention des risques de submersion marine (PPRSM) pour la baie du Mont Saint Michel. Les vents dominants viennent de l'ouest et la baie est protégée par les pointes du Grouin et de Cancale ; la hauteur d'eau est limitée par l'ensablement, accéléré par le désensablement du Mont, ce qui menace la conchyliculture. L'application stricte du plan pose problème : installer des chambres à coucher à l'étage n'est pas aisé pour les maisons qui n'ont qu'un rez-de-chaussée !

Comment adapter le plan à la situation particulière de la baie du Mont-Saint-Michel, pour protéger la population tout en maintenant l'activité économique ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique .  - La liste arrêtée par le préfet coordonnateur de bassin comprend en effet la baie du Mont-Saint-Michel. Les territoires les plus bas, situés au sud de la baie, sont inclus dans les zones les plus exposées au risque d'inondation. Xynthia n'est pas une référence uniforme. L'adaptation au contexte local est toutefois recherchée, en s'appuyant sur l'historique local des risques, en mettant en évidence ceux qui reviennent en moyenne tous les 100 ans. L'aménagement des habitations est un autre axe majeur de la politique de la prévention. Un fonds spécial soutient les adaptations nécessaires, aux côtés des collectivités territoriales.

L'effort demandé est ambitieux mais le seul objectif est de mieux protéger la population. Ce territoire a été retenu au titre de l'atelier aménagement/risques pour 2015 conduit avec le ministère du logement. La coopération des différents niveaux de collectivité concernés est indispensable, notamment à l'échelle de l'intercommunalité, pour l'entretien des digues.

Lorsqu'une catastrophe survient, le maire est en première ligne. Nous veillons à les accompagner afin qu'ils protègent leur population, mais aussi contre des recours judiciaires qui pourraient être lourds.

M. Dominique de Legge.  - La liste des territoires exposés ne pose pas de problème, il n'y a pas lieu d'y revenir.

Je tiens à apporter une précision importante. Les maires ne demandent pas des dérogations, mais des adaptations. Je crains que les ateliers de réflexion que vous évoquez, qui se tiendront en 2015, n'ajournent indéfiniment la résolution du problème, alors que la situation est figée depuis deux ou trois ans.

Relayant la demande des maires, je demande que la ministre de l'écologie se rende sur place pour apprécier la situation.

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - Je transmettrai.

Avenir des départements ruraux

M. Jean Boyer .  - Ma question est générale. Le Premier ministre a décidé le maintien de départements ruraux et je m'en réjouis car ils sont indispensables. Je vis dans l'un d'eux où 22 cantons sur 35 sont en zone de revitalisation rurale. Mais il ne faut pas oublier les communes : si elles n'existaient pas il faudrait les créer.

La densité de population, dans ces territoires, nécessite une solidarité nationale. Parfois, leur population pourrait tenir dans un seul immeuble ou une seule ville ! Des communes de deux cents habitants ont cependant des dizaines de kilomètres de chemins ruraux et de réseaux à entretenir.

Notre avenir nous inquiète, madame la ministre. Je ne veux pas opposer la France urbaine et la France rurale, qui sont complémentaires.

Quelles seront les compétences, quels seront les moyens de ces départements ruraux ?

Depuis 1789, notre pays a connu bien des soubresauts historiques. La loi de la jungle mondiale, qui prévaut aujourd'hui, accroît notre inquiétude. Le « y'a qu'à », « faut que » ne suffit plus. Répondez-moi, madame la ministre, sans langue de bois ! Auvergnat, je sais que vous n'êtes pas Normande !

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique .  - Il est vrai qu'Auvergnats et Bretons ont beaucoup en commun, au-delà de leur caractère. J'ai la chance d'habiter dans un département rural et comprends votre inquiétude.

Notre préoccupation : répondre à la forte inégalité entre les territoires, qui se répercute sur les bases fiscales sur lesquelles comptent les communes.

Depuis 2010, nous cherchons par conséquent à renforcer l'intercommunalité. Notre réflexion sur les collectivités territoriales s'appuie sur le rapport Raffarin-Krattinger de janvier 2014, qui préconise de renforcer les régions.

Qu'est-ce qu'un département rural ? Une grande partie de l'Essonne ou du Val-d'Oise sont rurales, me disait justement ce matin André Vallini...

Nous aurons, ensemble, à définir la qualité des échelons, à préciser leurs compétences et à adapter leurs moyens.

Les zones rurales devront, quoi qu'il en soit, être préservées, faute de quoi, notre capacité agricole et donc notre souveraineté alimentaire seront, à terme, menacées.

Je n'ai pas toutes les réponses à votre question. Nous devons faire confiance aux pouvoirs publics, à la concertation, au dialogue, et nourrir le débat que vous avez ouvert.

M. Jean Boyer.  - Un coq chantant sur un tas de fumier : c'est cela la France rurale ! Nous ne demandons ni la tour Eiffel, ni les plages méditerranéennes. Nous n'aspirons qu'à une chose : la parité sociale, à défaut de parité économique et géographique, face aux évolutions actuelles, qui nous inquiètent.

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - Très bien !

Conséquences du recentrement de la politique de la ville dans le Douaisis 

M. Dominique Bailly .  - J'appelle l'attention de M. le ministre de la ville sur les conséquences de la réforme de la politique de la ville, en vigueur au 1er janvier 2015, qui introduira une certaine simplification dans la géographie des quartiers prioritaires. Si cette réforme a des fondements légitimes, notamment l'objectif de recentrer les critères sur le niveau de revenus des habitants, elle amène un certain nombre de difficultés.

En effet, derrière les aides attribuées, ce sont pas exemple des politiques locales d'insertion, de soutien à la réussite éducative, de rénovation urbaine qui sont mises en place avec un certain nombre d'emplois financés. La baisse des dotations aux collectivités rendra difficile la poursuite de ces politiques suite à l'arrêt des subventions. Dans l'arrondissement de Douai, treize communes ne seront plus concernées par le dispositif.

Des mesures complémentaires permettraient d'accompagner les communes concernées, a minima pour une période transitoire, afin de garantir la pérennité des politiques de redynamisation de leurs quartiers en difficulté.

M. Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports .  - Un critère unique a été identifié : la concentration de bas revenus, inférieurs à 60 % du revenu médian dans des zones d'au moins 1 000 habitants. Précisée par décret en Conseil d'État, cette méthodologie a permis d'identifier 1 300 quartiers.

Simplification, lisibilité, efficacité sont les mots d'ordre de cette réforme.

Dans l'arrondissement de Douai, treize communes ne sont plus concernées, du fait du changement de critères de géographie prioritaire. Il nous revient, dans ces territoires, de pérenniser les efforts d'investissement réalisés à ce jour. Pour autant, ces territoires ne sortent pas du radar de la politique de la ville. Les « territoires de veille active », prévus par la loi, le permettront, grâce à un cadre d'action spécifique ainsi que grâce à des programmes comme ceux de la réussite éducative et aux conventions adultes relais qui seront préservés. Il n'y aura pas d'abandon mais plutôt que d'un cadre unique défini depuis Paris, nous proposerons à ces territoires des réponses définies localement, pour consolider les dynamiques en cours. Ces engagements figureront dans les contrats de villes conclus d'ici la fin de l'année.

M. Dominique Bailly.  - Je me réjouis de la volonté politique dont fait preuve le Gouvernement, qui préserve le lien social fondamental, socle du projet républicain.

La séance est suspendue à midi.

présidence de Mme Jacqueline Gourault, vice-présidente

La séance reprend à 14 h 30.

Désignation des conseillers prud'hommes (Procédure accélérée)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi relatif à la désignation des conseillers prud'hommes.

Discussion générale

M. François Rebsamen, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social .  - Permettez-moi tout d'abord de saluer les sénateurs nouvellement élus ou plus anciens.

« Affaiblir les prud'hommes serait affaiblir les plus faibles ». Je reprends cette maxime de Pierre Joxe à mon compte. Ce serait aussi aller contre notre modèle social. Les prud'hommes sont une institution singulière, frappée du sceau du paritarisme et pionnière dans la reconnaissance de l'égalité dans l'effort : les femmes sont électrices depuis 1907, éligibles depuis 1908.

Les prud'hommes, institution vivante, doivent pourtant évoluer avec leur temps. Le rapport de M. Lacabarats, ancien président de la chambre sociale de la Cour de cassation, fournit des pistes de réflexion pour améliorer la procédure et la rendre plus efficace. Nous nous y emploierons, dans le dialogue avec les partenaires sociaux.

Le sujet qui nous occupe est plus limité mais aussi fondamental : le passage d'une élection directe à une désignation en fonction de l'audience des organisations syndicales.

Plusieurs raisons à cela. Le taux d'abstention est élevé - 75 % aux dernières élections en 2008 - ce qui mine la légitimité des juges comme de l'institution. Des réformes de la représentativité - syndicale en 2008, patronale en 2014 - ont été entreprises. Il faut en être fiers. Tirons-en les conséquences. Ni le paritarisme, ni le nombre de conseils ou de conseillers, ni la carte ne sont concernés par ce projet.

Celui-ci adosse la légitimité des prud'hommes à la mesure de l'audience des organisations syndicales lors des élections professionnelles. Quoi de plus solide ? Le principe de l'élection demeure. Le Sénat est bien placé pour savoir que le suffrage universel direct n'est pas la seule source de légitimité démocratique...

Si nous connaissons la représentativité des organisations syndicales, celle des organisations patronales ne sera mesurée qu'en 2017 ; c'est pourquoi le Gouvernement a décidé la prorogation des mandats de conseillers actuels pour deux ans.

Ces dispositions ont passé le double contrôle du Conseil d'État et du Conseil constitutionnel, celui-ci ayant été saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité au sujet d'une autre juridiction dont les membres élus ne le sont plus.

Un mot sur le recours aux ordonnances. Le Parlement ne les apprécie guère - il a raison. Mais le sujet est très technique. La loi instaure un principe et un cadre, ce qui est essentiel, et la réforme doit être construite avec les partenaires sociaux. Ici, l'ordonnance est le véhicule le plus adapté. Si l'habilitation est votée, et dès la promulgation de la loi, nous mènerons la consultation la plus large possible pour établir le régime définitif, celui qui sera mis en oeuvre en 2017.

L'organisation des élections prud'homales coûte 100 millions d'euros. Il ne s'agit pas ici de supprimer une élection pour faire des économies - la démocratie n'a pas de prix ! (M. Jean Desessard s'exclame) Mais cette somme ne serait-elle pas mieux employée pour financer la démocratie sociale, former les conseillers prud'homaux ? Le fonds paritaire créé par la loi du 5 mars 2014 va être prochainement mis en place.

M. Jean Desessard.  - Ah bon ?

M. François Rebsamen, ministre.  - Le temps est révolu où les élections prud'homales jouaient par substitution le rôle de mesure de la représentativité. Leur évolution dit quelque chose de notre démocratie sociale : un cap a été franchi, celui de la maturité. Représentativité, financement rationalisé et transparent, concertation très large, sont autant de gages de cette maturité.

Des évolutions ultérieures sont sans doute souhaitables. Personne n'ignore les difficultés de la justice prud'homale, notamment la durée moyenne de traitement d'une affaire - douze mois - qui conduit à de nombreuses procédures engageant la responsabilité de l'État pour méconnaissance des délais raisonnables sur le fondement de l'article 6 de la CEDH. Or 99 % des affaires sont portées par les salariés, qui sont les plus fragiles. Le temps est l'argument des forts et affaiblit les faibles.

Les salariés comme les employeurs ont besoin de prud'hommes qui fonctionnent mieux. La réforme qui nous occupe aujourd'hui n'a pas d'aussi grandes ambitions, mais tout se construit pierre par pierre. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Anne Emery-Dumas, rapporteure de la commission des affaires sociales .  - Ce projet de loi modernise le mode de désignation des conseillers prud'hommes. Son objet est circonscrit : il remplace l'élection par une désignation fondée sur l'audience des partenaires sociaux. Je rappelle à nos nouveaux collègues que la commission, sur le rapport de M. Le Menn, auquel je rends hommage, a adopté ce texte sans modification le 23 juillet 2014.

Pourquoi une telle réforme ? L'élection prud'homale a trois faiblesses, comme l'a montré le rapport Richard-Pascal commandé par le gouvernement Fillon en 2010. L'abstention d'abord : 4,7 millions de salariés seulement ont voté en 2008 ; et son taux ne cesse de croître : 67 % en 2002 et 75 % en 2008, 37,4 % en 1979... Sa complexité ensuite : les élections sont organisées par les communes, qui établissent et vérifient les listes électorales avec les services déconcentrés de l'État. Compte tenu de la lourdeur de cette mission, l'AMF demande régulièrement qu'elles soient déchargées de cette responsabilité. Partenaires sociaux, entreprises et prestataires privés sont également impliqués.

Enfin, le coût de ces élections n'est pas négligeable : 91,6 millions d'euros en 2008, trois fois celui du référendum sur le quinquennat... Certes, ce dernier argument ne justifie pas à lui seul la réforme. Mais une autre élection concurrente existe : en 2013, 5,4 millions de salariés ont voté pour les organisations syndicales de leur choix - 700 000 de plus qu'aux élections professionnelles. La loi du 5 mars 2014 a fixé les critères de représentativité des organisations patronales, mais les résultats ne seront connus qu'en 2017.

Des scénarios alternatifs à la suppression de l'élection étaient possibles, au suffrage direct ou indirect, mais leurs inconvénients dépassaient leurs avantages.

Venons-en au projet de loi proprement dit : l'article premier habilite le Gouvernement à remplacer, par ordonnance, l'élection par un dispositif de désignation fondé sur l'audience des organisations syndicales et patronales. Le périmètre de l'ordonnance est clairement précisé. Le dispositif transitoire pour la période 2015-2017, qui prévoyait notamment la désignation du collège employeurs selon des règles ad hoc, a été abandonné par une lettre rectificative du 16 juillet dernier. Ce qui a pour conséquence, après concertation avec les partenaires sociaux, de proroger de deux ans le mandat des conseillers actuels.

Ce texte pragmatique prévoit que la désignation des conseillers prud'hommes se fondera sur la mesure de l'audience des syndicats selon les règles établies en 2008 et 2014. Le Conseil d'État comme le Conseil constitutionnel, ce dernier statuant sur une QPC relative à la désignation des assesseurs des tribunaux de sécurité sociale, ont estimé que cette prorogation était justifiée.

Quelques difficultés techniques demeurent. Je fais confiance à M. le ministre pour trouver les solutions idoines, en concertation avec les partenaires sociaux.

Il reste indispensable que le Gouvernement réserve une suite au rapport de M. Lacabarats sur l'avenir du système. Les conseils de prud'hommes ont besoin d'efforts budgétaires pour assurer leur mission. Je vous invite à adopter le présent projet de loi. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Jean-Baptiste Lemoyne .  - Ce premier texte que nous examinons a trait à la question sociale. Faut-il y lire la volonté de faire passer en catimini une réforme importante pour les conseils de prud'hommes, institution très ancienne et qui a donné très précocement le droit de vote aux femmes ? Rappelons que cette institution fondamentale a rassemblé Léon Bourgeois et Albert de Mun...

Certes, elle n'en devait pas moins évoluer. Le groupe UMP partage le constat qu'il faut agir. J'observe toutefois que les précédentes tentatives dans ce sens n'ont pas fait l'objet d'un grand enthousiasme sur tous les bancs : à croire qu'un stagiaire facétieux du ministère des relations avec le Parlement testait toutes les possibilités dilatoires du règlement des assemblées...

Légiférer par ordonnances ? Cela ne me gêne pas. Peut-être y aurons-nous recours nous-mêmes en 2017 ! (Mme Annie David s'amuse) Mais si l'on veut agir vite, encore faut-il savoir où l'on va : au Gouvernement de fournir au Parlement des éléments d'impacts aussi précis que possible.

J'ai rencontré les conseillers prud'hommes de l'Yonne. Le réel doit éclairer nos travaux. Nombreux sont ceux qui pensent qu'il faut adapter les règles. Cooptation, abstention... Tout cela n'est pas neuf : en 1809, la participation n'était que de 22 %. Bref, l'histoire bégaie !

L'AMF a souhaité que les mairies soient déchargées de l'organisation de ces élections : leur coût, c'est vrai, n'est pas nul.

Le taux de conciliation est trop faible, dit-on. Trop de postures demeurent. Les différentes versions du texte n'ont guère fait pour la pédagogie de la réforme et, sur le terrain, les craintes sont nombreuses.

Le suffrage indirect, je le reconnais, est susceptible, nous le savons, de désigner des conseillers engagés et compétents.

Faire passer les mandats des conseillers employeurs actuels de 7 à 9 ans n'ira toutefois pas sans difficultés. L'audience prise en compte sera-t-elle nationale ou locale ? Quid des regroupements de sections qui risquent d'éloigner les partenaires sociaux de leurs juridictions ?

Améliorons la représentativité de notre démocratie sociale, réduisons les délais de traitement, repensons le système dans sa globalité.

Ce projet de loi, présenté à la hussarde, est trop peu ambitieux. Le groupe UMP s'abstiendra. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Jean Desessard .  - Le projet de loi autorise le Gouvernement à supprimer par ordonnance les élections prud'homales. Premier argument : le coût pour la collectivité, 91,6 millions en 2008. Pourtant, les élections européennes de 2009 ont coûté 120 millions d'euros, les présidentielles de 2007 davantage encore.

Les emplois en jeu sont un autre argument, qui devrait compter davantage, tout comme le pouvoir d'achat des employés municipaux...

L'abstention n'est pas un argument plus convaincant : dès lors, pourquoi ne pas supprimer les élections européennes ? Ou, pour reprendre la formulation technocratique du ministre, adosser la désignation des députés européens à la représentativité des partis, constatée lors de l'élection présidentielle ?

L'organisation des élections par les collectivités territoriales aurait pu faire l'objet d'un plus vaste débat - au Sénat par exemple - et de proposition de simplification. Coût, abstention, complexité : les trois arguments sont faibles, vous le voyez.

Le mécanisme proposé pose un problème de légitimité. La tradition prud'homale veut en effet que les juges soient désignés par leurs pairs. Les prud'hommes sont des élections nationales, couvertes médiatiquement, et suscitent des campagnes suivies. Elles n'ont rien à voir avec les élections professionnelles, plus localisées.

Quant aux chômeurs, involontairement privés d'emploi, ils ont la possibilité de voter aux élections prud'homales, mais pas aux élections professionnelles : cette réforme les éloigne donc davantage encore du monde du travail. Idem pour les travailleurs précaires.

Enfin, la place de l'économie sociale et solidaire n'est pas suffisamment prise en compte.

Bref, cette réforme ne correspond pas à notre vision de la démocratie sociale.

Il n'y a plus de tabous, dit le Gouvernement...

M. Alain Néri.  - Mais il y a des totems !

M. Jean Desessard.  - Y a-t-il encore un projet ? Nous ne voterons pas ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs CRC et écologistes)

M. Dominique Watrin .  - M. Rebsamen nous a indiqué en commission vouloir améliorer le fonctionnement des prud'hommes, institution très ancienne et fondatrice de notre modèle social.

Nous partageons cette ambition. La double exigence de parité et de démocratie doit être préservée.

Juridictions anciennes, les prud'hommes sont aussi modernes, cela a été rappelé. C'est ainsi la seule élection au suffrage universel direct sans distinction de nationalité.

Si leurs dysfonctionnements ont été rappelés, leur coût n'est pas un argument valable : il n'est que d'un euro par électeur et par an.

Mais plutôt que de rechercher des solutions aux problèmes, vous préconisez la suppression pure et simple des élections. S'il fallait supprimer toutes les élections où le taux d'abstention est important, il ne resterait plus grand-chose de notre démocratie !

Tous les acteurs n'ont pas été consultés. Certains font pourtant des propositions intéressantes, comme le décloisonnement du vote par section.

Ce projet de loi est un recul pour la démocratie. Les élections prud'homales ne mesurent pas d'audience : il s'agit d'une élection démocratique, irréductible à la représentativité syndicale. Ce projet de loi rapproche les conseils de prud'hommes du système des tribunaux de la sécurité sociale, presque de l'échevinage, avec des juges professionnels : nous ne l'acceptons pas.

En supprimant l'élection, on casse le thermomètre au lieu de chercher à guérir la fièvre !

Mesurer l'audience des syndicats ? Il faut savoir que 36 % des travailleurs ne se syndiquent pas par crainte de représailles de leur employeur !

Ce projet de loi est inefficace et nuisible. La substitution de l'élection par la désignation éloignera davantage les travailleurs de leurs juridictions : c'est un recul des droits des travailleurs. (Applaudissements sur les bancs CRC ; M. Jean Desessard applaudit aussi)

M. Gilbert Barbier .  - Enfin ! Ce dossier est en instance depuis près d'un an. Tout le monde dénonce la participation en baisse aux élections prud'homales - 63 % en 1979, 21 % en 2008. Le rapport de 2010 a clairement montré les problèmes soulevés par le système : complexité de son organisation, coût, etc. La participation n'a jamais été aussi faible qu'en 2008.

Les candidats sont méconnus, les électeurs se désintéressent de ses enjeux.

L'abstention menace à terme l'institution. Une réforme est nécessaire. Dans celle proposée, le principe électif demeure. J'en partage l'objectif.

5

Par souci de simplicité, vous avez souhaité proroger une nouvelle fois le mandat des conseillers actuels. La durée de neuf ans qui en résulte est bien trop longue (sourires) et risque de conduire à des démissions. Ce qui serait préjudiciable au bon fonctionnement de la justice prud'homale. Compte tenu de cette prorogation du mandat des conseillers actuels, est-il vraiment nécessaire de leur octroyer encore autant de jours de formation ?

Sur la forme, le RDSE est toujours réticent face aux ordonnances. En outre, la procédure accélérée s'imposait-elle ? Pour ma part, je voterai ce texte mais la grande majorité des membres du groupe aura donc une approche diversifiée. (Sourires sur divers bancs ; Mme Françoise Laborde applaudit)

M. Jean-Marie Vanlerenberghe .  - Personne ici ne remet en cause le conseil des prud'hommes et surtout pas notre groupe. Nous ne nous opposerons pas à ce projet qui répond à des considérations purement pragmatiques. En revanche, les raisons invoquées à l'appui de la suppression de l'élection prud'homale ne sont pas à nos yeux les meilleures. L'abstention ? Elle est préjudiciable à l'exercice de la démocratie, c'est vrai, mais ne peut à elle seule justifier la suppression de l'élection. La complexité ? Argument tout aussi léger : pourquoi ne pas simplifier, plutôt, quitte à opter pour l'élection électronique ? Le coût n'est pas non plus un argument valable.

La vraie raison de la suppression de cette élection est ailleurs : avec l'amélioration de la représentativité syndicale, elle est tout simplement devenue obsolète. Trois lois ont réformé la représentativité syndicale, qui a été mesurée pour la première fois selon les nouvelles règles en 2013. La loi du 5 mars 2014 a pour sa part démocratisé la représentation patronale. On ne peut donc dire que la suppression de l'élection prud'homale porterait un coup fatal à la démocratie sociale. L'argument ne tient plus que pour les demandeurs d'emplois... qui n'ont pas été plus de 5 % à voter en 2008.

Les modalités techniques sont adaptées, avec un régime transitoire, pour la période 2015-2017. Nous soutenons la prorogation de deux ans du mandat des actuels conseillers - on gagne en simplicité.

Reste l'éternelle question des ordonnances, que nous sommes d'ordinaire prompts à dénoncer. Dans ce cas de figure, le sujet étant technique et largement réglementaire, nous ne nous y opposerons pas. Le groupe UDI-UC soutiendra le présent projet de loi. (Applaudissement sur les bancs UDI-UC ainsi que sur quelques bancs socialistes)

M. Jean-Pierre Caffet .  - Je veux rendre hommage à notre premier rapporteur, Jackie Le Menn. Merci à Mme Emery-Dumas, qui a repris le flambeau. Enfin, je félicite M. Milon, nouveau président de la commission des affaires sociales.

L'abstention des salariés ne cesse de croître : de 37 % en 1979 à 75 % en 2008. Pour le collège employeur, elle frise les 70 %. Malgré les mesures de simplification, les campagnes de communication, elle n'a cessé de progresser. L'enjeu n'est pas toujours très clair pour les salariés ; ils ont le sentiment que toutes les candidatures sont équivalentes, puisque le juge est impartial.

Ces élections mobilisent de nombreux acteurs : services de l'État, communes, partenaires sociaux. Enfin, nous ne pouvons pas négliger le coût de ces élections si peu mobilisatrices : 100 millions d'euros tous les cinq ans.

Plusieurs rapports ont été publiés par d'éminents magistrats, proposant diverses solutions. Celle qui a été retenue est pragmatique. Les électeurs prud'homaux ont longtemps été pour les organisations syndicales un moyen détourné de mesurer leur audience.

M. Jean Desessard.  - Et alors ?

M. Jean-Pierre Caffet.  - Il est désormais caduc.

Le Parlement peut-il régler par la loi des questions aussi techniques que celles énumérées à l'article premier. J'ai quelques doutes...

L'article 2 proroge le mandat des conseillers actuels.

Les organisations syndicales sont légitimes pour représenter aussi bien les salariés que les chômeurs.

M. Roland Courteau.  - Très bien !

M. Jean-Pierre Caffet.  - D'autant que ces derniers ont vocation à retrouver au plus vite un emploi...

Le système proposé existe déjà dans le cadre des tribunaux des affaires de sécurité sociale. Nous ne sommes donc pas en terre inconnue. En 2010, le Conseil constitutionnel avait d'ailleurs avalisé ce principe. Voilà qui répond aux inquiétudes.

Ce projet de loi respecte le dialogue social. Au-delà, c'est toute la justice prud'homale qui doit être réformée, comme le constate le rapport commandé à M. Lacabarats par Mme Taubira. Le taux d'appel, de 60 %, est énorme. Les dysfonctionnements de la justice prud'homale sont préjudiciables aussi pour l'État, souvent condamné pour cause de délais excessifs... Les greffes doivent être renforcés, les conseillers doivent disposer d'un temps suffisant pour travailler, être indemnisés, être formés. M. Le Menn avait ainsi souhaité que l'argent économisé par la suppression de l'élection prud'homale serve essentiellement à financer la démocratie sociale, et notamment la formation des conseillers prud'hommes. Les moyens et la formation sont deux points fondamentaux. Le contexte social nous fait obligation de renforcer les conseils prud'hommes. Ce projet de loi ne porte pas atteinte à la démocratie - au contraire !

M. Jean Desessard.  - Oh !

M. Jean-Pierre Caffet.  - Quoi de plus démocratique que d'utiliser les résultats de la représentativité des organisations syndicales ? Cette réforme cohérente est un progrès démocratique : le groupe socialiste votera pour. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. François Rebsamen, ministre .  - À mon tour de saluer le président Milon. J'ai une pensée pour M. Le Menn, qui avait fourni un travail remarquable.

Monsieur Desessard, le coût des élections prud'homales de 2008 se décompose ainsi : 30 millions d'euros d'acheminement. Il y a peu d'emplois derrière, sauf pour les postiers, bien sûr.

Mme Annie David et M. Dominique Watrin.  - Ce n'est pas rien !

M. François Rebsamen, ministre.  - Plus de 11 millions d'euros pour la communication, 10 millions d'euros pour le remboursement de la propagande aux partenaires sociaux, et 10 millions d'euros pour l'élection proprement dite. La généralisation du vote électronique coûterait 20 millions d'euros.

Les conseillers prud'homaux bénéficient aujourd'hui des mêmes protections que les délégués syndicaux. Cela ne changera pas. Leur indépendance ne sera pas remise en cause. Les organisations syndicales sont légitimes pour représenter les demandeurs d'emploi, rien ne s'oppose à ce que ceux-ci figurent sur leurs listes.

Les ordonnances ? En l'occurrence, il faut une concertation rapide avec les partenaires sociaux. Le degré de détail nécessaire, sur chaque territoire, ne relève pas, à mon sens, de la loi. Enfin, l'échéance de 2017 est proche, et le calendrier est serré. Les ordonnances devront être publiées au deuxième semestre 2015.

Merci aux intervenants, à M. Lemoyne, même si j'aurais préféré un vote favorable. Le caractère paritaire de la juridiction sera bien entendu conservé.

J'ai répondu à M. Desessard sur la dépense. Les chômeurs n'ont pas vocation à le rester toute leur vie ! Le hors-champ sera pris en compte par l'ordonnance. J'ai apprécié le ton de M. Watrin, sa défense de l'institution et qu'il ne m'ait pas fait de procès d'intention.

Mais ses dysfonctionnements pénalisent les salariés. L'indépendance des conseillers sera respectée, je l'ai dit.

Merci à M. Barbier pour son soutien. Nul système n'est parfait, mais la réforme que nous proposons est la plus cohérente. Merci à M. Vanlerenberghe pour son pragmatisme, ainsi qu'à M. Caffet, qui a ouvert le débat sur l'avenir de cette institution fondamentale. La démocratie ne se mesure pas au nombre des élections mais plutôt à leur cohérence.

La discussion générale est close

Discussion des articles

ARTICLE PREMIER

M. Jean Desessard .  - Merci à M. le ministre d'avoir détaillé les frais de l'élection prud'homale. Mais toute dépense est un gain pour d'autres, en matière de salaire ou d'activité économique ! Ne vaut-il pas mieux dépenser pour la démocratie sociale que pour des tracts publicitaires ? Le chômage est provisoire, avez-vous dit. Là, vous m'avez soufflé ! Le chômage, la précarité sont là pour longtemps, même si vous nous avez promis leur disparition prochaine ! Les chômeurs voteront plus tard, quand ils auront un emploi ? Les précaires, quand la précarité aura disparu ? Mais le vote d'un chômeur n'est peut-être pas le même que celui d'un cadre ou d'un ouvrier ! La suppression d'une élection serait un progrès démocratique, dit mon collègue de Paris ?

M. Jean-Pierre Caffet.  - Ce n'est pas moi qui le dis : lisez le rapport !

M. Jean Desessard.  - Incroyable ! La représentation varie selon les élections, selon le message que veulent envoyer les électeurs : ma propre formation ne fait pas le même score aux présidentielles ou aux européennes ! Un rapport de un à dix !

Enfin, vous n'avez pas répondu sur l'économie sociale et solidaire, qui nous est chère.

M. François Rebsamen, ministre.  - Si !

M. Jean-Baptiste Lemoyne.  - Vous n'avez pas répondu, monsieur le ministre, à la question que j'ai posée : quelle est l'audience prise en considération ? L'audience mesurée au niveau national, ou au niveau de chaque circonscription prud'homale ? Ceci serait plus fin et plus respectueux des territoires ?

Mme la présidente.  - Amendement n°1, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste.

Supprimer cet article.

M. Jean Desessard.  - Les électeurs ne font pas la différence, a dit mon collègue de Paris. Alors, supprimons les élections politiques pendant que nous y sommes, puisque, à ce que l'on dit, beaucoup de gens ne font plus la différence entre la droite et la gauche et se demandent à quoi nous servons. L'objectif devrait plutôt être de revaloriser la politique et le Parlement ! L'élection prud'homale est une élection nationale, comme les élections politiques. Attention aux arguments que vous invoquez !

Mme la présidente.  - Amendement identique n°3, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe CRC.

Mme Laurence Cohen.  - Pour justifier un projet de loi dangereux pour la démocratie sociale, on invoque la faible participation. La participation faiblit à toutes les élections !

Les syndicats font des propositions alternatives intéressantes, pourquoi n'en débattons-nous pas ici ? Vous nous demandez de vous faire confiance. Drôle de façon de procéder ! Pour les chambres de commerce, le taux de participation est de 20 %. Allez-vous les supprimer ? Ce n'est pas en cassant le thermomètre que l'on guérit le malade.

L'existence des élections prud'homales est le résultat d'une bataille, d'une lutte sociale. Quel retour en arrière que ce projet de loi ! D'où notre amendement de suppression. Comme mon camarade Desessard, je m'inquiète de votre argumentation : drôle de conception de la démocratie !

Mme Anne Emery-Dumas, rapporteure.  - Notre commission a adopté conforme le projet de loi le 23 juillet dernier. L'article premier en constitue la colonne vertébrale : défavorable aux amendements de suppression.

M. François Rebsamen, ministre.  - Avis défavorable. Je suis surpris des arguments de M. Desessard. Je connais une formation politique qui préconisait naguère la suppression de l'élection présidentielle... (Sourires)

L'Association des maires de France a pris position contre le système actuel, qui pèse trop lourdement sur les communes. En 2008, seuls 5 % des demandeurs d'emploi étaient inscrits sur les listes. C'est à ce pourcentage d'inscrits qu'il faut appliquer celui des votants.

La démocratie est sauve, puisque nous avons des mesures précises de l'audience des syndicats ; la réforme renforce la légitimité de la justice prud'homale, son caractère paritaire est préservé comme l'interdiction des mandats impératifs. L'ensemble des employeurs seront pris en compte : l'audience de l'économie sociale et solidaire sera bien mesurée. Enfin, les partenaires sociaux seront consultés au cours du premier semestre 2015.

M. Jean-Baptiste Lemoyne.  - L'abstention ne justifie pas la suppression ? L'amendement de suppression, lui, justifie notre abstention.

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Je n'ai pas eu de réponses satisfaisantes aux questions que je posais déjà à M. Sapin, sur les chômeurs, sur l'économie sociale et solidaire. Les élections professionnelles ont bénéficié d'une campagne de communication bien plus importante que les élections prud'homales et il n'y a pas eu incomparablement plus d'électeurs : 5,4 millions au lieu de 4,8.

D'autre part, je ne suis pas convaincu par l'échelle nationale du vote : la représentativité relative des syndicats varie beaucoup selon les endroits.

Tout cela m'amène, à mon grand regret, à voter les amendements de suppression.

M. Jean Desessard.  - Monsieur le ministre, vous m'avez interpellé sur la VIe République que nous appelons de nos voeux. À une époque, le PS était contre le régime présidentiel de la Ve République...

M. Jean-Pierre Caffet.  - Hors sujet !

M. Jean Desessard.  - Cela a évolué, manifestement, il n'y a plus de tabous... (Sourires) 

M. François Rebsamen, ministre.  - Il reste des totems !

M. Jean Desessard.  - La présidentialisation entraîne l'affaiblissement du Parlement, qu'il faut revaloriser. Nous en reparlerons...

Avec mes camarades communistes, je regrette que le Parlement ne soit pas saisi des modalités de ces élections. Pourquoi seulement 5 % de chômeurs inscrits ? Considérez-vous que c'est de leur faute ?

M. François Rebsamen, ministre.  - Démagogie...

M. Jean-Louis Carrère.  - Eh oui !

M. Jean Desessard.  - Ils sont en situation de détresse ! La vraie question, c'est de les inciter à aller voter. Aux européennes aussi, qui profitent pourtant à notre parti, les chômeurs et les ouvriers votent moins que les cadres. Comment intégrer les chômeurs, les précaires, les salariés de petites entreprises dans la démocratie sociale ? Il manque un vrai projet de cogestion ! (Applaudissements sur les bancs CRC et écologistes)

Les amendements identiques nos1 et 3, ne sont pas adoptés.

Mme Laurence Cohen.  - Ce qui se passe ici est très grave. Les élections prud'homales sont en quelque sorte une université des droits. On s'achemine vers une désignation, sans présenter au Sénat des propositions d'amélioration concrètes. Pourquoi n'y a-t-il pas plus d'inscrits sur les listes parmi les plus fragiles ? On va faire reculer la démocratie dans notre pays. Nous voterons contre cet article premier.

L'article premier est adopté.

ARTICLE 2

Mme la présidente.  - Amendement n°2, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste.

Supprimer cet article.

M. Jean Desessard.  - Défendu.

Mme Anne Emery-Dumas, rapporteure.  - Cet article important ne doit pas être supprimé. Avis défavorable.

M. François Rebsamen, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°2 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°4, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe CRC.

Alinéa 1

Remplacer l'année :

2017

par l'année :

2016

Mme Annie David.  - Je réaffirme avec mon groupe que ce texte porte atteinte à la démocratie sociale. Monsieur le ministre, quelles mesures pourraient laisser penser que la suppression de ces élections serait un progrès ?

Les conseillers prud'hommes ont été élus en 2008 pour un mandat de cinq ans, le prolongement jusqu'en 2017 des conseillers ne permet pas un bon fonctionnement de la juridiction.

Il y a des carences, des conseillers prud'hommes s'en vont, épuisés car leur tâche n'est pas facile. Il y a donc des élections partielles qui sont rendues nécessaires. Nous aurions préféré avancer les élections en 2016. Je retire cet amendement qui n'a plus d'objet.

M. Charles Revet.  - Sagesse !

L'amendement n°4 est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°5, présenté par Mme Emery-Dumas, au nom de la commission.

Alinéa 5

1° Remplacer les mots :

aux dispositions

par les mots :

à la dernière phrase du premier alinéa

2° Après le mot :

général,

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

les affectations prévues à l'article L. 1423-10 du code du travail en cas de difficulté provisoire de fonctionnement d'une section peuvent être renouvelées au-delà de deux fois.

Mme Anne Emery-Dumas, rapporteure.  - Amendement de clarification juridique.

Le premier alinéa de article L. 1423-10 du code du travail dispose que « Lorsque le président du conseil de prud'hommes constate une difficulté provisoire de fonctionnement d'une section, il peut, après avis conforme du vice-président, sous réserve de l'accord des intéressés, affecter temporairement les conseillers prud'hommes d'une section à une autre section pour connaître des litiges relevant de cette dernière. Ces affectations sont prononcées pour une durée de six mois renouvelable deux fois dans les mêmes conditions. »

L'article 2 de cet alinéa assouplit l'une des modalités d'application en prévoyant que les affectations temporaires peuvent être renouvelées au-delà de deux fois jusqu'à la date du prochain renouvellement général des conseils de prud'hommes.

La rédaction actuelle de l'alinéa 5 de l'article 2 peut être source de confusion, car il est indiqué que le projet de loi déroge aux dispositions de l'article L.1423-10 du code du travail, tout en prévoyant explicitement d'appliquer son premier alinéa.

Cet amendement ne modifie aucunement l'intention initiale du Gouvernement et permettra d'appliquer l'ensemble des autres dispositions de droit commun de l'article L.1423-10 du code du travail.

M. François Rebsamen, ministre.  - Favorable.

M. Jean-Baptiste Lemoyne.  - Cet amendement apporte une réponse concrète à des situations complexes que nous avons constatées sur le terrain. Le groupe UMP le votera.

L'amendement n°5 est adopté.

L'article 2, modifié, est adopté.

Interventions sur l'ensemble

M. Dominique Watrin .  - Le groupe CRC prend acte du rejet de ses amendements. Comme nous l'avions annoncé, nous voterons contre ce projet de loi, qui est un rendez-vous manqué.

Les organisations syndicales qui siègent aux conseils de prud'hommes ont formulé des propositions pour rendre ce scrutin plus efficace. Force est de constater qu'elles n'ont pas été entendues. La CGT réclame depuis 2008 la création d'une commission ad hoc destinée à examiner ses propositions alternatives à la suppression d'un droit démocratique.

Les organisations syndicales ont fait des propositions fort intéressantes. Ainsi, la CGT a proposé de tenir le scrutin sur les lieux de travail, dans les mairies pour les chômeurs, tout en simplifiant son organisation.

Ce matin, nous avons tenu une conférence de presse pour donner la parole aux syndicats. La France a été condamnée 71 fois pour ses délais excessifs de jugement. Mais ce sont les gouvernements successifs qui ont réduit le nombre de greffiers et contingenté le temps consacré à chaque dossier. Les conseillers prud'hommes prennent aujourd'hui sur leur temps personnel pour étudier comme il faut les litiges. Ces difficultés seront encore renforcées, les présidents de tribunaux seront dans l'obligation de réfléchir à l'organisation d'élections complémentaires, alors que ce texte supprime l'élection.

Il s'inscrit dans un ensemble de projets qui visent tous à réduire les mécanismes de protection des salariés : décret sur l'inspection du travail, relèvement des seuils sociaux, projet de loi sur la modernisation de la vie des entreprises.

Qui est responsable des délais trop longs ? Les politiques d'austérité ont réduit considérablement les moyens budgétaires. Mme Dati sous la présidence de M. Sarkozy a supprimé 25 % des conseils prud'homaux.

Des solutions existent qui doivent sauvegarder ces tribunaux. (Applaudissements sur les bancs CRC et écologistes)

M. Jean Desessard .  - Nous ne voterons pas ce projet de loi. On pourrait discuter longtemps des aspects financiers et par exemple s'interroger sur le CICE. S'agit-il de donner de l'argent aux actionnaires ou de faciliter l'activité locale, en redonnant aux collectivités les moyens d'investir?

Je ne sais si ce projet de loi était dans les cartons du gouvernement précédent. Je conteste que la démocratie sociale, ce soit moins d'élections. Les gens veulent donner leur voix plus souvent, participer. Limiter la consultation à une seule élection, ce n'est pas convenable. La démocratie sociale se construit. Discutons-en des modalités. Comme nos collègues communistes ...

M. Jean-Louis Carrère.  - Camarades !

M. Jean Desessard.  - ... nous étions prêts à discuter des modalités. On exclut les précaires et les chômeurs, les plus défavorisés, les plus pauvres, ceux qui souffrent le plus.

Les syndicats doivent aussi les représenter. On leur dénie ce droit. C'est très grave ! Ne serait-ce que pour cet argument, l'ensemble des sénatrices et des sénateurs écologistes ne voteront pas ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs écologistes et CRC)

M. Jean-Pierre Caffet .  - Je redis solennellement notre attachement aux conseils de prud'hommes. On nous a fait un faux procès. Les conseils sont une conquête sociale, qui plonge ses racines dans la Révolution française, au même titre que l'inspection du travail ou la médecine du travail.

J'ai été le seul à demander au ministre de faire un effort financier sur la formation des conseillers, en y destinant une partie des économies qui seront réalisées.

Trois questions se posent : la légitimité, l'exclusion de certaines catégories, le fonctionnement de la démocratie sociale.

Monsieur Desessard, je rappelle que les organisations syndicales ont vocation à représenter les chômeurs et les précaires. Si vous pensez qu'elles s'en désintéressent, tirez-en les conclusions, mais telle n'est pas ma conception. Quant à la démocratie, nous nous occupons précisément des modalités d'exercer leur mandat par les conseillers de prud'hommes. Il n'a jamais été question de remettre en cause leur légitimité, qu'ils tirent d'un processus électoral.

M. Jean-Louis Carrère.  - Les parlementaires aussi sont élus au deuxième degré !

M. Jean-Pierre Caffet.  - Consacrons les moyens destinés à l'organisation des élections professionnelles (100 millions d'euros tous les cinq ans) à la formation des conseillers prud'homaux.

Monsieur Desessard, relisez page 45 le rapport de Jacky Le Menn : « Il ne nous paraît pas que l'évolution vers la désignation porte atteinte à la démocratie. La réforme envisagée constitue au contraire un progrès démocratique ». (Mme Laurence Cohen proteste) Ces propos, semblables aux miens à la tribune, ont été tenus par une grande organisation syndicale.

Mmes Annie David et Laurence Cohen.  - La CFDT !

M. Jean-Pierre Caffet.  - Elle n'est pas représentative ?

M. Jean-Baptiste Lemoyne .  - Le groupe UMP s'abstiendra. Nous avons assisté à un débat théologique sur les élections. Dans la vie réelle on est confronté à un problème de candidatures. Si l'on comparaît le nombre de candidats au nombre de postes à pourvoir, on s'approcherait sans doute plus d'une cooptation que d'une élection. S'il y a eu suppression des élections, c'est par la modification du scrutin municipal qui a interdit le panachage dans les communes de plus de 1 000 habitants.

Pour en revenir aux conseils de prudhommes, le système proposé n'est pas parfait. Le CRC s'est référé à la position d'une seule organisation syndicale. Parmi les autres organisations syndicales, un certain consensus règne.

Mmes Annie David et Laurence Cohen.  - Non !

M. Jean-Baptiste Lemoyne.  - Je regrette que le ministre n'ait pas répondu sur le regroupement de certaines sections et la mesure d'audience.

Je salue les femmes et les hommes qui s'engagent dans ces fonctions exigeantes. Ils sont parfois à bout. Il faut que les conseils prud'homaux puissent examiner au fond chaque dossier.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe .  - Le groupe UDI-UC votera ce texte. Nous ne remettons pas en cause l'institution du conseil de prud'hommes.

M. François Rebsamen, ministre.  - Naturellement.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe.  - Il s'agit de leur mode d'élection. Démonstration a été faite qu'il était imparfait. Nous serons très attentifs au contenu de ces ordonnances, qui ne seront pas faciles à rédiger. (Exclamations sur les bancs CRC)

Mme Annie David .  - Je vous invite à mon tour à lire le rapport de Jacky Le Menn, qui reprend l'ensemble des auditions que nous avons tenues. Sur les cinq organisations syndicales représentatives de salariés, deux seulement ont approuvé la réforme. Une autre en a pris acte, tout en s'interrogeant. Deux autres s'y sont opposées. Les organisations patronales étaient d'accord, certes. Mais les organisations de magistrats et d'avocats y étaient aussi opposées.

On ne peut pas se satisfaire du taux de participation. Le législateur a du travail, pour améliorer ces élections. On ne peut accepter que ces modifications aient lieu par ordonnance. Nous serons nous aussi très attentifs à son contenu. Je rappelle que la représentativité prud'homale est différente, selon nous, de la représentativité professionnelle. Ce texte nie sa spécificité. J'ai retiré en séance le deuxième amendement sur la prorogation des mandats des conseillers prud'homaux en place, c'est que nous espérions un sursaut de nos collègues. Il n'a pas eu lieu, nous le regrettons.

À la demande du groupe CRC, l'ensemble du projet de loi est mis aux voix par scrutin public.

Mme la présidente.  - Voici le résultat du scrutin n° 1

Nombre de votants 342
Nombre de suffrages exprimés 187
Pour l'adoption 155
Contre 32

Le Sénat a adopté.

La séance, suspendue à 17 h 5, reprend à 17 h 10.

Code mondial antidopage (Procédure accélérée)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi habilitant le Gouvernement à prendre les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires pour assurer dans le droit interne le respect des principes du code mondial antidopage.

Discussion générale

M. Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports .  - Nous abordons un sujet qui ne souffre aucune polémique partisane. Je suis heureux du vote unanime de la commission. Oui, il s'agit d'un projet de loi d'habilitation. J'aurais aimé qu'il en fût autrement, pour le premier projet que je défends devant vous, mais nous devions agir vite, avant le 1er janvier 2015, à propos d'un texte technique, qui appelle le consensus.

Je connais l'investissement du Sénat sur ces questions. Notre pays a adopté et notre Parlement ratifié la convention internationale de l'Unesco du 19 octobre 2005 contre le dopage dans le sport. Mon prédécesseur, Valérie Fourneyron, a été élue par le Conseil de l'Europe pour le représenter au sein de l'Agence mondiale antidopage (AMA). Je salue son engagement et son élection à la présidence de la commission santé de l'agence.

Le recours à l'ordonnance se justifie par la nature particulièrement technique de ce texte. L'absence d'amendement montre qu'il n'offre pas l'occasion de revoir en profondeur notre législation.

Je salue le rapport, qui a montré que l'avenir de la lutte contre le dopage réside dans les échanges d'informations, au moins aussi importants que les analyses médicales. Il s'agit d'encourager les sportifs à fournir une « aide substantielle » à la découverte des infractions, comme ce fut le cas dans l'affaire Armstrong. Le code du sport devra être modifié en ce sens.

Seules les fédérations internationales et les organisations internationales antidopage sont habilitées à délivrer des recommandations thérapeutiques. Désormais, les organisateurs d'événements pourront le faire.

Le délai de prescription est porté de huit à dix ans .De nouvelles techniques d'analyse pourront être utilisées. Le CIO s'attache à conserver de nombreux prélèvements pour pouvoir procéder à des analyses postérieures.

Le code mondial et le code du sport identifient les infractions qui peuvent être commises par les sportifs. L'infraction d'association à une personne qui a fait l'objet d'une sanction est désormais inscrite dans le code mondial. Trop de sportifs comptent encore dans leur encadrement de telles personnes.

La création d'une nouvelle infraction de « complicité en matière de trafic de substance ou de méthodes dopantes », entendue comme l'assistance, l'incitation, la conspiration, sera sanctionnée par une peine allant jusqu'à quatre ans de suspension.

Les enquêtes menées par l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) concerneront les personnes de l'encadrement du sportif. Le code du sport intègrera une nouvelle disposition législative imposant aux fédérations sportives de signaler à l'AFLD ou à l'AMA tout fait de dopage.

Les contrôles antidopage à domicile du sportif entre 21 heures et 6 heures impliquent la possibilité d'y accéder, dans le respect du principe constitutionnel d'inviolabilité du domicile, sujet juridiquement délicat, qui fait l'objet de consultations complémentaires, dont je vous tiendrai informés.

Le dopage est un danger sanitaire, un fléau moral. Ces dispositions visent à mener une lutte plus efficace. Elles vont dans le bon sens. D'autres mesures sont prises, avec le même objectif. Sur la recommandation de la commission d'enquête du Sénat, les agents régionaux sont devenus interrégionaux, afin de mieux coordonner les efforts de tous les services concernés par cette lutte.

Le sentiment de défiance est un ogre insatiable qui se nourrit de chaque manquement. Mettons-le à la diète, en rassurant nos concitoyens quant au respect des valeurs de justice et de probité. J'espère que vous adopterez ce texte à l'unanimité et que je pourrai revenir rapidement avec un projet de loi de ratification. (Applaudissements sur les bancs socialistes, écologistes et du RDSE)

M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur de la commission de la culture .  - Le Gouvernement a déposé, début juillet, ce projet de loi nécessaire pour respecter les principes du nouveau code mondial antidopage adopté par l'AMA. Il s'agit de la troisième version de ce code, dont la première a été élaborée en 2003.

Quelle est la portée juridique de cette nouvelle version ? Quels sont ses apports ? Ses risques éventuels ? Quelles sont les principales dispositions à faire figurer dans l'ordonnance ?

Le statut du code mondial est particulier. Il ne fait pas partie intégrante de la convention et ne crée aucune obligation contraignante en droit international. Il n'y a pas non plus obligation pour la France à le transcrire dans son droit interne au 1er janvier 2015. Cette transcription n'en demeure pas moins une nécessité politique et même éthique, morale, sportive. L'exemplarité de la France et de l'Europe est la meilleure garantie pour inciter les autres pays signataires de la convention de 2005 à être eux-mêmes irréprochables et à ainsi décourager des sportifs de s'installer dans des pays moins stricts.

Les modifications apportées au nouveau code mondial ne modifient pas son économie générale, mais visent à renforcer l'efficacité du contrôle. La plupart sont d'ailleurs très techniques.

Les tricheurs intentionnels devront être suspendus pour une durée de quatre ans, sauf si le sportif peut établir que la violation des règles n'était pas intentionnelle.

Le nouveau code met l'accent sur le renseignement, la coopération et les échanges d'informations. Les preuves non objectives - sportifs repentis, témoignages - sont mises en avant, tirant les enseignements de l'affaire Armstrong.

Le délai de prescription a été porté de huit à dix ans, pour tenir compte de la sophistication des techniques de dopage. La mise en cause du personnel d'encadrement est facilitée : le code sanctionne désormais les « associations interdites ».

Un meilleur équilibre est en outre atteint entre le rôle des fédérations internationales et celui des organisations nationales antidopage. Ces dernières pourront désormais effectuer des contrôles en dehors des lieux de manifestation organisées par les fédérations internationales.

Les avancées sont réelles, si elles ne sont pas révolutionnaires. Des problèmes subsistent toutefois. De compétence, d'abord : les décisions d'autorités nationales investies par la loi de prérogatives de puissance publique ne sauraient être contrôlées par une autorité internationale. L'ordonnance ne devait donc pas transcrire dans notre droit la compétence du tribunal arbitral du sport.

Deuxième difficulté : l'automaticité des sanctions, contraire au principe d'individualisation des peines. Le Conseil d'État a estimé que ces dispositions devaient être lues comme instaurant un régime de sanction maximale.

Enfin, l'obligation pour les sportifs de se rendre disponibles « à tout moment et en tout lieu » pour des contrôles heurte le principe de l'inviolabilité du domicile et celui du droit au respect de la vie privée. Les propositions de compromis de l'AFLD n'ont pas été retenues par l'AMA, l'exposé des motifs précisant simplement que la transcription devait respecter « les principes constitutionnels et conventionnels ». J'ai demandé au Gouvernement davantage d'informations sur ce point. Je salue d'ailleurs la qualité des échanges que nous avons eus avec le ministère, qui nous a transmis l'avis du Conseil d'État. L'ordonnance devra ainsi comprendre l'interdiction des contrôles après 21 heures sans le consentement du sportif ; une limitation de ceux-ci au prélèvement d'échantillons, la garantie d'une proportionnalité entre les atteintes aux droits des sportifs et les enjeux de la lutte contre le dopage. Toutes garanties sont ainsi données.

Le dopage est un fléau mondial. Les enjeux sont à la fois éthiques, de santé publique, éducatifs, économiques, géopolitiques. Je sollicite donc l'adoption de ce projet de loi. (Applaudissements)

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture .  - Je veux d'abord saluer le travail de ma prédécesseure à la tête de la commission, Marie-Christine Blandin, pour son implication et sa disponibilité ; elle a toujours su faire vivre le débat au sein de notre commission.

Ce projet de loi a été étudié par notre commission en juillet dernier. Il y a désormais urgence à légiférer avant que la France accueille le comité exécutif de l'AMA. Le Gouvernement a renoncé à déposer un projet de loi d'orientation pour le sport, qui aurait permis de traiter plus largement de toutes ces questions. On ne peut que regretter cette occasion manquée.

Le rôle du Sénat est d'abord d'être un bon législateur, avec pour seule boussole l'intérêt général. La lutte contre le dopage est pour nous, vous le savez, monsieur le ministre, une priorité. Vous pouvez faire confiance au Sénat et compter sur notre soutien ; nous formons le voeu que les conclusions de la commission d'enquête sénatoriale sur le dopage soient plus amplement reprises.

Pour nous, le sport doit être un secteur d'excellence, porteur de valeurs et d'exemplarité, dans lequel la France doit investir davantage. Certes, nous regrettons le recours aux ordonnances ; il n'est jamais facile de se dessaisir de ses prérogatives... Je remercie le rapporteur d'avoir veillé à ce que le Gouvernement apporte les garanties de droit nécessaires. (Applaudissements)

Mme Corinne Bouchoux .  - Je veux d'abord saluer les nouveaux sénateurs. Les parlementaires n'aiment pas les ordonnances, c'est naturel. Il y a toutefois urgence à agir sur ce sujet technique. Le sport doit être clean, sans dopage ni dopés. Le dopage est un danger sanitaire et participe d'une logique mafieuse. La France ne relâche pas ses efforts, c'est bien. Au-delà de l'harmonisation des pratiques de lutte et des sanctions, il faut une meilleure coopération entre les États - le dopage de connaît pas de frontières -, mettre les moyens nécessaires et développer la prévention dès le plus jeune âge.

Le modèle économique et social dans lequel le sport professionnel et amateur évolue est une des zones grises de ce texte. L'industrialisation du sport à des fins financières, l'attente toujours plus grande des spectateurs - toujours plus, toujours plus loin - participent de l'incitation au dopage. Résultat : addictions, dépendances médicamenteuses, suicides parfois. Le dopage est le fruit d'un système économique soumis au règne de la compétitivité, dont nous sommes tous un peu collectivement responsables. Le maillon faible du texte est là, qui ignore l'économie souterraine. Le dopage ne se limite pas au sport mais s'infiltre dans la vie économique, le spectacle, la vie tout court.

Le groupe écologiste votera ce texte. (Applaudissements sur les bancs écologistes)

Mme Christine Prunaud .  - La vision émancipatrice du sport de Pierre de Coubertin, que nous partageons, a été balayée par la pression médiatique, la marchandisation, la pression des calendriers surchargés. Les sportifs sont aujourd'hui victimes d'une sur-compétition inhumaine qui prend le pas sur le sport lui-même.

Le dopage est un fléau. Pour le combattre, se limiter à la sanction de pratiques répréhensibles ne suffit pas. La France a été pionnière en matière de lutte antidopage, avec la loi Buffet...

M. Jean-Louis Carrère.  - Absolument !

Mme Christine Prunaud.  - ... qui a ouvert la voie à une réflexion au niveau international. Quinze ans plus tard, la bataille est loin d'être gagnée. Il faut donner à la lutte contre le dopage davantage de moyens.

Le nouveau code mondial va dans le bon sens mais plusieurs de ses dispositions suscitent des réserves, celles notamment qui contreviennent aux principes d'individualisation des peines, d'inviolabilité du domicile et de respect de la vie privée. Nous n'avons du Gouvernement que sa promesse qu'il respectera l'avis du Conseil d'État... Le recours à une ordonnance, méthode que nous ne cessons de dénoncer, ne nous rassure pas complètement. Au nom du respect des principes démocratiques et constitutionnels, nous nous abstiendrons. (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. Jean-Claude Requier .  - Plus vite, plus haut, plus fort : voilà le monde sportif d'aujourd'hui, sous l'emprise des enjeux médiatiques et financiers. Avec pour conséquence le dopage, qui mine la logique sportive, offre un mauvais exemple aux jeunes et nuit à la santé publique.

Un cadre juridique, aussi complet soit-il, ne dispense pas d'une coopération internationale renforcée. La création de l'AMA en 2000 a été une première étape, le nouveau code mondial une deuxième, et d'importance.

Avec la nouvelle version du code qui entrera en vigueur le 1er janvier prochain, les sportifs ne pourront plus faire appel à des encadrants déjà sanctionnés pour manquement à la législation antidopage. Les sportifs seront également incités à dévoiler les pratiques dont ils ont pu avoir connaissance.

L'échange d'informations sera facilité entre organismes nationaux et internationaux ; les organisations nationales pourront effectuer des contrôles en dehors des sites des manifestations internationales ; les sanctions disciplinaires seront renforcées. Responsabilisation des sportifs et pédagogie vont dans le bon sens.

Des difficultés demeurent toutefois : l'exigence de disponibilité totale des sportifs est contraire au principe de respect de la vie privée, l'automaticité des sanctions l'est à celui de l'individualisation des peines, la compétence exclusive du tribunal arbitral du sport dans certaines compétitions l'est à notre droit. Les solutions proposées par le Conseil d'État ne sont pas de nature à obérer la lutte contre le dopage. Restera à améliorer l'efficacité des contrôles, notamment grâce à un déploiement accéléré du passeport biologique.

Le groupe RDSE unanime soutient ce texte. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Claude Kern .  - Je suis heureux et honoré d'intervenir pour la première fois sur un sujet consensuel et important.

La lutte contre le dopage est un enjeu de santé publique, de pédagogie vis-à-vis des jeunes et d'éthique. Je n'ai pas participé aux travaux de la commission, mais je salue le travail du rapporteur Jean-Jacques Lozach, dans la ligne du rapport de la commission d'enquête présidée par notre ancien collègue Jean-François Humbert. Leurs travaux illustrent l'expertise du Sénat en la matière.

Sur la forme, ce projet de loi signifie l'abandon de notre pouvoir de législateur, ce que celui-ci ne fait jamais de bon coeur. Le groupe UDI-UC regrette le recours aux ordonnances, le rôle du Parlement n'est pas de valider les propositions du Gouvernement. Pourquoi ne nous avoir pas confié l'examen de toutes ces dispositions ? Je propose que M. le ministre vienne devant notre commission exposer le contenu de l'ordonnance avant sa publication.

M. Jean-Louis Carrère.  - Très bonne idée !

M. Claude Kern.  - Les comportements en matière de dopage évoluent et imposent aux pouvoirs publics à s'adapter. Malheureusement, les tricheurs ont souvent une longueur d'avance. La coopération entre États et entre fédérations internationales doit être une priorité. La création de l'AMA a été une grande avancée mais la matière n'est pas stable.

La France, qui a déjà montré l'exemple, doit adapter sa législation à la troisième version du code mondial antidopage. Oui à l'augmentation du délai de prescription, au renforcement des sanctions. La commission d'enquête du Sénat avait fait de nombreuses propositions, notamment en matière de prévention et de recherche, qui n'ont pas encore été reprises. Où en est-on, monsieur le ministre ? Quel budget consacrez-vous à la prévention ? La recherche est d'ailleurs la grande oubliée du code mondial antidopage : c'était pourtant le premier axe du rapport sénatorial. Quelle est l'ambition du Gouvernement ?

Le dopage intellectuel est aussi passé sous silence. Fléau chez les cadres, chez les étudiants, voire les politiques, il témoigne du développement d'une culture de la performance intellectuelle et de la réussite. Un étudiant sur cinq serait consommateur de produits destinés à améliorer les capacités intellectuelles. À l'approche des examens, les vitrines des pharmacies regorgent de ces boîtes magiques. Les étudiants en médecine ou en classes préparatoires en sont particulièrement friands. La plupart de ces produits sont légaux et vendus librement. Mais se développe aussi la vente sur Internet de substances illégales en France. À nous de légiférer pour encadrer ces pratiques dangereuses, qui dépassent le monde du sport.

Le groupe UDI-UC votera ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs UDI-UC, ainsi que sur quelques bancs socialistes et écologistes)

M. Michel Savin .  - Ce projet de loi va dans le bon sens. Notre pays est depuis plusieurs années leader en matière de lutte antidopage. Il doit continuer à montrer l'exemple. En 2013, notre Haute Assemblée a publié un rapport proposant de prendre une longueur d'avance en la matière, sur la base du travail de la commission d'enquête présidée par Jean-François Humbert. Soixante propositions ont été adoptées à l'unanimité, sur la prévention des trafics, la promotion de la recherche, ou encore, le renforcement des sanctions et de la coopération internationale.

Les modifications apportées au code mondial sont bienvenues - période de suspension portée à quatre ans en cas de dopage intentionnel, prescription portée à dix ans, répression accrue de la complicité, création d'une nouvelle infraction d'association avec un encadrant ayant déjà fait l'objet de sanction. Nous y sommes favorables.

La commission d'enquête du Sénat préconisait une réforme législative globale en matière disciplinaire, dont le transfert du pouvoir de sanction des fédérations, juges et parties, à l'AFLD, avec possibilité d'appel devant le Conseil d'État. La répartition des compétences des différentes autorités n'a pas été revue depuis 2003. La nouvelle version du code mondial clarifie les choses mais l'occasion n'a pas été saisie de remettre à plat les compétences respectives des instances nationales et internationales. Le risque de conflit d'intérêt demeure.

Publié fin 2013, le rapport du Sénat n'a pu être repris plus extensivement faute de temps. Nous souhaitons toutefois vous entendre à ce sujet, monsieur le ministre, ainsi que sur le projet de loi-cadre sur le sport qui a été annoncé.

Je me réjouis que le sport nous rassemble. Mondialisé comme le sport, le dopage appelle un combat à l'échelle internationale. Le groupe UMP votera ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Dominique Bailly .  - Félicitations à M. Lozach pour l'adoption unanime de son rapport qui montre l'implication du Sénat en matière de lutte contre le dopage.

Le code mondial antidopage a vocation à évoluer avec les pratiques. Le présent projet de loi vise à adapter notre droit à sa troisième version - par ordonnance, comme lors de la parution de la deuxième version.

M. Braillard entendait intégrer ces dispositions au projet de loi-cadre sur le sport, annoncé pour fin 2013. Le report de ce texte à 2015 explique le présent projet de loi d'habilitation. La tenue en France en novembre du comité exécutif de l'AMA le rend d'autant plus urgent. Je salue à mon tour Valérie Fourneyron, qui représente l'Europe en son sein. La France est à l'avant-garde de la production de normes pour lutter contre ce fléau qu'est le dopage. Le code mondial est dans cette lutte un outil inestimable, même si les États s'impliquent diversement pour le faire respecter...

Les modifications apportées au code mondial antidopage n'en modifient pas l'économie mais améliorent le dispositif de sanctions, la coopération entre autorités, la conduite par l'AMA de ses enquêtes et la prise en compte de toutes les complicités et systèmes organisés ; les droits des sportifs sont mieux protégés.

Trois axes se dégagent : respect du principe de proportionnalité, dispositif disciplinaire plus sévère et mieux ciblé - ce qu'avait souhaité la commission d'enquête sénatoriale - meilleure coopération entre les acteurs. Ce texte est porteur de progrès. Les risques constitutionnels ne sont pas absents, cela a été dit, qu'il s'agisse de la compétence reconnue au tribunal arbitral du sport, de l'automaticité des sanctions ou de la possibilité d'effectuer des contrôles à tout moment et en tout lieu. Le cadre fixé par le Conseil d'État pour éviter ces écueils devra être respecté.

Les pratiques dopantes sont toujours plus innovantes. Il faudra adapter sans cesse les moyens de lutte, renforcer la coopération entre les États, mieux partager l'information. Le groupe socialiste votera ce texte. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Patrick Kanner, ministre .  - Merci pour cette unanimité. Je m'engage à venir présenter le texte de l'ordonnance devant votre commission dès qu'il sera prêt.

Le recours à l'ordonnance s'imposait par l'urgence de ce chantier, alors que la France s'apprête à accueillir le comité exécutif de l'AMA et son conseil des fondateurs les 15 et 16 novembre prochains. Mais il faudra aller plus loin à l'occasion d'un débat parlementaire.

Nous pourrons montrer à l'AMA que la transposition du nouveau code est en bonne voie et que la France agit. Vous serez bien sûr conviés à cet événement. La loi-cadre viendra, ce sera un moment fort, dès lors qu'elle aura un contenu significatif.

Nous nous adressons aux 17 millions de licenciés, aux 34 millions de Français au total qui pratiquent le sport. C'est un élément de cohésion sociale et d'union nationale. La France obtient des résultats remarquables et va accueillir toute une série d'événements sportifs majeurs : coupe Davis, euro de basket-ball, euro de football.

Le sport français doit être propre. Il le sera grâce à votre vote. (Applaudissements)

La discussion générale est close.

Discussion des articles

L'article unique, constituant l'ensemble du projet de loi, est adopté.

Mme la présidente.  - Le projet de loi est adopté à l'unanimité des suffrages exprimés.

La séance est suspendue à 18 h 35.

présidence de M. Thierry Foucaud, vice-président

La séance reprend à 21 h 30.

Débat préalable au Conseil européen des 23 et 24 octobre 2014

M. le président.  - L'ordre du jour appelle un débat préalable à la réunion du Conseil européen des 23 et 24 octobre 2014.

Orateurs inscrits

M. Harlem Désir, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des affaires européennes .  - Je vous remercie de l'organisation de ce débat, alors que l'Europe doit faire face à des crises internationales, que la croissance est à l'arrêt, l'inflation faible, le chômage élevé, en particulier chez les jeunes, l'investissement de 15 % inférieur à 2007. Aucun pays n'est à l'abri, pas même l'Allemagne. S'ajoutent la crise de confiance, le rejet du projet européen lui-même et enfin la crise climatique. L'Union européenne est à un moment charnière.

Les nouveaux commissaires ont été auditionnés par le Parlement européen, le collège sera installé dans les prochaines semaines, de nouvelles priorités ont été fixées, la France y a pris toute sa part.

Le Conseil portera sur une grande priorité stratégique : la politique énergétique et climatique de l'Union européenne. Il s'agit à la fois d'assurer notre sécurité et notre indépendance énergétique et d'organiser la transition énergétique. Les décisions doivent être prises dès ce Conseil d'octobre, pour que l'Europe contribue au succès de la convention sur le climat, qui sera négocié à Paris fin 2015 pour prendre le relais du Protocole de Kyoto.

Ce Conseil doit aboutir à un accord ambitieux, fondé sur trois principes : l'efficacité, la responsabilité, la solidarité. Tout l'enjeu sera d'obtenir un accord entre États membres sur de grands objectifs pour 2020 : 40 % de réduction des émissions de gaz à effet de serre, 27 % de réduction de notre consommation finale d'énergie, 30 % d'efficacité énergétique supplémentaire.

Pour y parvenir, nous devons aboutir à des compromis. Les efforts européens doivent s'appuyer sur un marché du carbone réformé, avec un prix de la tonne de carbone incitatif, qui devra prendre en compte les risques de fuite, avec des quotas gratuits pour les secteurs industriels les plus exposés à la concurrence internationale.

Les discussions comportent des enjeux de solidarité : il s'agit de permettre à certains États membres de bénéficier d'une partie réservée du marché européen du carbone. Nous devons nous accorder sur les grands principes de répartition de l'effort, grâce à une répartition équitable fondée sur le PIB par habitant. L'accord final devra aussi reconnaître les spécificités du secteur agricole. Il faudra veiller aux exigences du groupe de Visegrad (Hongrie, Pologne, Slovaquie, République tchèque). J'étais d'ailleurs la semaine dernière à Bratislava puis à Prague. Nous serons particulièrement attentifs aux interconnexions européennes.

La France veillera à ce que les objectifs soient réalisables et répondent aux besoins. Il faut prendre en compte les situations nationales et les réalités économiques. Dans cette négociation délicate, l'Europe doit définir très vite une position commune. Il s'agit de convaincre nos partenaires que c'est de l'intérêt commun de faire de l'Europe un pionnier de la transition énergétique.

Le Conseil européen sera suivi d'un sommet de la zone euro, qui connaît une situation économique difficile et est menacée de déflation. Le président de la BCE, M. Draghi a annoncé une décision audacieuse de réduction des taux. Mais, comme il l'a dit lui-même, cela ne saurait suffire, il faut aussi des actions de politique budgétaire, des investissements, des réformes structurelles, pour renforcer l'attractivité, la compétitivité de l'Europe. Notre priorité doit aussi être le soutien à l'investissement, qui a chuté de 15 % depuis 2008.

L'énergie, le transport, le numérique, les télécommunications sont des secteurs clés. Nous soutenons la proposition de Jean-Claude Juncker d'un plan d'investissements européen de 300 milliards. Cela serait utile pour des interconnexions de transport comme, chez nous, le canal Seine-Nord ou la liaison Lyon-Turin.

La doctrine de risque de la BEI devrait évoluer, tandis qu'elle doit renforcer sa coordination avec les banques publiques nationales.

Nous devons mobiliser les fonds européens pour pérenniser les project bonds, les « obligations de projet ». Quatre ont été lancées, dont une en France, pour l'équipement en haut débit de plusieurs de nos régions. Au-delà, nous devons réfléchir à de nouveaux outils de financement, comme un fonds de garantie, et la mobilisation de l'épargne privée.

C'est dans cet esprit que la France abordera les prochaines échéances avec la Commission de Jean-Claude Juncker.

Je n'élude pas la question de la trajectoire budgétaire, même si elle ne figure pas à l'ordre du jour du prochain Conseil. Notre projet de budget 2015 repose sur un équilibre entre la poursuite des réformes et la traversée d'une période exceptionnellement difficile. Nous poursuivons le dialogue avec la Commission. Nous ne demandons ni exception ni changement de règles. Le débat est plus large : celui du choix des politiques économiques en Europe. De grandes institutions internationales comme le FMI et l'OCDE mettent en garde contre une stagnation qui durerait en Europe, alors que la croissance repart ailleurs.

Nous ne voulons pas remettre en cause nos engagements sur une baisse de 40 milliards des prélèvements fiscaux et sociaux sur les entreprises, pour qu'elles contribuent davantage à la croissance et à l'emploi. Des politiques d'austérité trop violentes mettraient en cause la reprise de la croissance. Le consensus des économistes va en ce sens. (Applaudissements sur les bancs socialistes ; le président de la commission applaudit également)

M. André Gattolin .  - Je vous remercie, monsieur le ministre, d'avoir ouvert votre propos sur le paquet climat-énergie. Nous tenons ce débat au moment où l'Assemblée nationale débute l'examen du budget 2015. Je ne doute pas que certains ici y reviendront. Je me concentrerai pour ma part sur les implications géostratégiques du débat sur les choix énergétiques et les dérèglements climatiques, enjeux nouveaux pour la stabilité de la planète. Le département de la défense des États-Unis a inclus dans sa nouvelle doctrine sur les dangers accrus liés au réchauffement.

Je salue la réflexion de Leila Aïchi sur ces sujets. Nous peinons à prendre ces enjeux à bras-le-corps, comme à propos de la Russie qui fournit à elle seule 39 % du gaz consommé en Europe et est le seul fournisseur extérieur de gaz naturel pour six États membres. En temps de paix, une telle dépendance n'est pas sans risque. Elle devient franchement problématique en temps de crise, comme celle que nous connaissons en Ukraine.

L'Union européenne importe 53 % de l'énergie qu'elle consomme. Faut-il pour autant exploiter toutes les sources d'hydrocarbures sur le continent ? La souveraineté de l'Europe passe par la mise en place d'une véritable politique énergétique. Celle-ci doit être repensée avec notre politique climatique et stratégique, sinon chacune d'entre elles échouera. Mettre tout cela en cohérence est éminemment complexe mais souvenons-nous que le mois de septembre écoulé aura été le plus chaud dans le monde depuis 1880 et les premiers relevés. Tout laisse à penser que les politiques engagées ont échoué.

Je me suis rendu il y a quelques semaines au Groenland, pour la commission des affaires européennes du Sénat. Le plus grand glacier de l'hémisphère nord a autant reculé en dix ans qu'il l'avait fait auparavant en un siècle. Plus les glaciers fondent, plus le réchauffement s'accélère ; il sera de plus en plus difficile de briser cette spirale infernale.

L'Europe doit se montrer plus ambitieuse et cohérente. Les propositions sur la table pour le paquet énergie-climat sont inégales. Celles de la Commission européenne sont clairement insuffisantes, celles du Parlement européen plus ambitieuses. Les écologistes proposent d'aller au-delà, avec un objectif de 45 % d'énergie renouvelable, 40 % d'efficacité énergétique et de 60 % de réduction des gaz à effet de serre.

Monsieur le ministre, pourriez-vous nous apporter des précisions sur la volonté de la France en la matière, d'autant que ce Conseil européen est une étape essentielle pour la prochaine Conférence Paris climat (COP 21). L'Europe doit être exemplaire face au monde, la France face à ses partenaires européens, pour ne pas perdre toute crédibilité sur ce dossier. (M. Jean Bizet et Mme Michèle André applaudissent)

M. Éric Bocquet .  - Certes, il faut prendre des mesures sur l'énergie. Mais, pour avancer, il faut reparler de l'économie. Le futur commissaire européen chargé de l'emploi, de la croissance et de la compétitivité a déclaré qu'il fallait investir plus, grâce aux partenariats public-privé, pour « attirer de l'argent privé dans les grands projets d'infrastructures », car, ajoute-t-il, « le secteur privé ne peut prendre la totalité des risques ».

La Cour fédérale allemande a dit ce qu'elle en pensait, les partenariats public-privé ayant coûté un tiers de plus que si les infrastructures avaient été financées par le contribuable allemand.

La rigueur, remède miracle à tous nos maux ? Le directeur du DIV, M. Fratzscher, a montré, dans die Deutsche Illusion, que l'Allemagne est un modèle fragile. L'investissement public y représente 1,6 % du PIB, contre 2,1 % en moyenne dans la zone euro. La croissance y est faible, les salaires y progressent moins que dans le reste de la zone euro et un enfant sur cinq y vit sous le seuil de pauvreté. L'Allemagne n'investit pas dans son avenir. Le déficit d'investissement pèse sur la croissance. Voilà où la sacro-sainte rigueur nous conduit. Il faut investir de façon intelligente. La dette qui investit a des vertus.

Ce n'est pas par un excès de dépenses que la France est touchée, mais par un déficit persistant des recettes. Les cadeaux aux entreprises ont atteint 488 milliards d'euros, les intérêts versés aux banques 589 milliards, l'évasion fiscale a coûté 484 milliards depuis 1980.

La question de la transition énergétique est un défi majeur, pour relancer l'économie en tenant compte de l'ensemble des variables. Le sommet de l'ONU sur le climat est très loin d'avoir atteint ses objectifs.

En 2015, Paris accueillera la prochaine conférence sur le climat. En mars dernier, la Commission n'a pas fixé d'objectifs contraignants, en termes d'émissions ou d'énergies renouvelables. Les États doivent se réengager dans des filières d'avenir comme le photovoltaïque. Monsieur le ministre, expliquez-nous la position de la France !

Je m'étonne enfin de la procédure de nomination des commissaires européens. Sur le papier, le passage devant le Parlement européen a fière allure. Mais les tractations de couloir donnent une piètre image de l'Europe citoyenne et le déficit démocratique reste béant.

M. Jean-Claude Requier .  - Au menu du Conseil européen, en plat de résistance, l'énergie et l'économie. Vous pourriez ajouter, au dessert, des crises comme celle qui sévit en Ukraine. En revanche, dans la guerre en Irak, la France est l'un des seuls appuis des États-Unis, bien que la plupart des États de l'Union européenne soient concernés par le djihadisme. Au Mali, l'Union européenne n'a pu s'affirmer comme l'acteur d'une politique étrangère commune. Ce sont avant tout les relations intergouvernementales qui prévalent. Ce n'est pas faute de s'être doté d'outils de politique étrangère, soutenus par les radicaux de gauche, dans la lignée du traité de Maastricht, qui a créé la Politique étrangère et de sécurité commune (Pesc).

Il y a eu aussi le Haut Représentant pour la politique étrangère et la sécurité. J'espère que Mme Mogherini, la nouvelle titulaire, fera jouer le charme latin, après la rigueur britannique de Mme Ashton. (Sourires) Tout reste à faire pour doter l'Europe d'une capacité d'action autonome en matière de défense.

On peut se féliciter que le dernier Conseil européen ait rappelé le rôle d'une politique étrangère et de défense commune pour la paix. Au-delà de ces déclarations, un appel à la mutualisation des capacités militaires a été lancé. L'effort de défense est en effet consenti à 40 % par la France et la Grande-Bretagne. Il n'est pas soutenu par le budget de l'Union, à moins que le Conseil ne statue à l'unanimité. Je sais que la majorité qualifiée est un sujet délicat.

Lors du Conseil européen du 6 décembre 1983, le président François Mitterrand rappelait que l'Europe devait rester elle-même et être fidèle à son ambition : d'étape en étape, définir des responsabilités communautaires nouvelles, au prix d'un engagement collectif puissant.

Oui, l'Europe peut devenir un acteur de premier plan sur la scène internationale si elle en affirme la volonté. Monsieur le ministre, je compte sur vous et sur le Gouvernement pour contribuer à l'approfondissement de notre Pesc. (Applaudissements sur les bancs socialistes, du RDSE, ainsi que quelques bancs UDI-UC)

M. Yves Pozzo di Borgo .  - L'ordre du jour du prochain Conseil européen est aussi riche qu'hétéroclite.

Je m'interroge sur la portée effective d'un accord sur le climat, alors que la politique énergétique dépend en définitive des choix d'investissement nationaux. C'est un marché de dupes qui se joue entre la France et l'Allemagne, laquelle importe une partie de son électricité nucléaire de France. Comment cet accord-cadre européen fera-t-il évoluer cette situation ?

La crédibilité économique et budgétaire de notre pays est fragilisée. La France s'est engagée à mener des réformes structurelles importantes. Le pacte de responsabilité est intéressant, mais ne prévoit de fait que 20 milliards d'euros d'économies en trois ans. Les 30 autres milliards annoncés iront en fait à la diminution du coût du travail. C'est un signal inquiétant dans le concert européen. L'Union européenne n'est pas concevable sans la France et la France n'a pas d'avenir sans l'Union. Il est triste que notre pays ne sache pas se montrer à la hauteur des exigences européennes, qu'il se livre à une course pour reporter les échéances, pour gagner à chacune d'elle quelques mois de plus.

J'en viens à la politique internationale européenne face à la crise ukrainienne, qui est une véritable crise européenne. Des sanctions individuelles économiques, industrielles, militaires ont été prises. Cette escalade de sanctions et de contre-sanctions fragilise notre économie depuis des mois. De récentes déclarations de Wolfgang Schäuble attestent combien l'Allemagne est touchée : les délocalisations vers la Chine et l'Inde s'accroissent. Les conséquences de notre politique sont dramatiques sur le sol ukrainien.

M. Jean-Yves Leconte.  - S'il n'y avait pas de troupes russes en Ukraine, il en irait tout autrement !

M. Yves Pozzo di Borgo.  - La situation est complexe... Vous connaissez le rôle que joue l'extrême droite ukrainienne !

M. Jean-Yves Leconte.  - Il n'empêche, ce sont les Russes qui tirent.

M. le président.  - Poursuivez.

M. Yves Pozzo di Borgo.  - C'est aussi sur ce sujet que nous attendons les conclusions du Conseil européen. (Applaudissements sur les bancs UDI-UC et UMP)

Mme Fabienne Keller .  - Le prochain Conseil européen aura trois sujets à son ordre du jour, dont la situation internationale. Sur ce dernier point, je formule le voeu que le Conseil européen évoque l'épidémie Ebola et mette en place une coordination efficace, traduisant l'idéal européen de protection des personnes. Cette coordination pourrait passer par une veille sanitaire aux frontières de l'Union européenne et des mesures conjointes dans les aéroports.

Le Sénat examinera avant la fin de l'année le projet de loi sur la transition énergétique ; l'engagement européen en la matière, qui représente 80 % du corpus législatif en France, s'inscrit dans la durée. Dans le domaine environnemental, l'Europe a souvent été un fer de lance et un aiguillon. Dès 2008, l'Union s'est dotée d'un ensemble de directives et de règlements pour appliquer le paquet « 3 x 20 ».

Le projet de loi sur la transition énergétique, à cet égard, se contente de l'existant. Nous attendons davantage. M. Lenoir y reviendra.

J'en viens à la situation économique de la France. Le groupe UMP s'inquiétait dès le débat d'orientation budgétaire à propos de l'équation budgétaire pour 2015, résultant sur un décrochage de notre économie. Nos analyses se sont hélas avérées. Le Gouvernement est au pied du mur, face au cercle infernal de l'accumulation des déficits, de la faible compétitivité, d'un chômage élevé. Et il refuse de regarder la vérité en face. Avec 4,1 % de déficit, on ne mène pas une véritable politique d'austérité. L'Italie a d'ores et déjà fait savoir qu'elle prendrait toutes les mesures nécessaires pour respecter le ratio de 3 % en 2017.

Alors que vous allez présenter votre projet de budget pour 2015, quelle est la stratégie du Gouvernement ? Allons-nous respecter nos engagements ? L'Europe n'est pas une contrainte ! Elle a été acceptée : c'est votre majorité qui a ratifié le TSCG, avec notre accord bien sûr.

Vous avez déjà obtenu deux ans de délai. Nous attendons du Gouvernement un discours de vérité et de prudence car certaines économies peuvent être illusoires : la baisse des dotations des collectivités locales, entraînera une baisse de l'investissement public et donc des recettes de l'État.

M. André Reichardt.  - Absolument !

Mme Fabienne Keller.  - Nous attendons des actes. La question n'est pas que l'Europe respecte la France, comme l'a dit M. Valls, mais que la France respecte sa parole à l'égard de ses partenaires européens. (Applaudissements sur les bancs UMP et UDI-UC)

M. Jean-Claude Lenoir.  - Très bien !

M. Simon Sutour .  - Ce débat intervient à un moment clé pour l'Union européenne : celui de la définition de son agenda. L'architecture de la Commission a été rénovée. C'était nécessaire pour qu'elle puisse enfin jouer un rôle politique plus efficace. Mais la complexité de cette architecture risque de n'en faire qu'une coquille vide...

Deuxième inquiétude : que la volonté de M. Juncker de faire du consensus la clé de voûte du fonctionnement de la nouvelle Commission ne conduise à des compromis sans relief, à une vision purement technique. Or la Commission doit agir vite et fort. Il faut renforcer la solidarité pour la croissance et l'emploi en Europe, et surtout l'emploi des jeunes. Or la Garantie jeunesse, dotée de 6 milliards d'euros, peine à être distribuée... Nous soutenons sa pérennisation et sa montée en puissance jusqu'en 2020 pour atteindre 20 milliards d'euros.

Il ne peut y avoir de croissance sans relance à l'échelle européenne. L'union bancaire, la régulation financière, le soutien aux actions non conventionnelles de la BCE sont indispensables. Un rééquilibrage social mais aussi un rééquilibrage des politiques économiques en faveur de l'investissement s'imposent. C'est la condition d'un choc de croissance. La nouvelle Commission devra élaborer un plan d'investissement précis sur la provenance des fonds mobilisés. Elle fera appel à des fonds privés, a-t-elle d'ores et déjà annoncé. Nous devons être plus novateurs, trouver d'autres sources de financement. Des propositions existent, comme la taxe sur les transactions financières. Il faut pouvoir vite débloquer ces fonds.

L'Union européenne ne peut se contenter d'être gestionnaire, elle doit être visionnaire. Après l'union bancaire, dont on ne mesure encore pas assez l'aspect novateur, il faut une union de l'énergie, une plus grande solidarité. Nos économies sont interdépendantes ; poursuivons la mutualisation de nos moyens et de nos efforts. Cette solidarité ne se limite pas à un partage du fardeau, qu'il s'agisse de l'immigration ou du climat.

Le traité de Lisbonne nous a donné de nouveaux droits. Il faut faire plus, obtenir un règlement ambitieux de la conférence interparlementaire de l'article 13, mieux travailler avec le Parlement européen. Une Europe qui soutient, qui investit, qui fédère, voilà trois ambitions qui sont à notre portée. (Applaudissements sur les bancs socialistes et du RDSE)

M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission des affaires économiques .  - Les gouvernements de l'Europe vont prendre une décision finale sur le nouveau cadre d'action en matière de climat et d'énergie pour une meilleure interconnexion de l'Europe d'ici 2030.

Quelle langue technocratique ! Est-ce derrière ces mots que l'on ressent un souffle ? Je doute de la volonté de l'Europe de construire une vraie politique de l'énergie. En la matière, c'est chacun pour soi, et foin des voisins - sauf à leur vendre notre énergie... À la Commission, les directions en charge du climat et de l'énergie jusqu'à présent ne se parlent pas.

Dans le domaine du climat, la France soutient des initiatives fortes pour lutter contre le réchauffement ; elle n'a pas de leçons à recevoir en la matière, elle pourrait plutôt en donner.

Ensuite, il faut donner à l'Europe des moyens pour peser face aux États-Unis et à l'Asie.

N'allez pas devant nos partenaires européens avec le sentiment que nous sommes le mauvais élève : c'est le contraire. La France émet 7 000 tonnes de gaz à effet de serre par habitant et par an, l'Allemagne 12 000 tonnes. Notre électricité est carbonée pour 10 %, celle de l'Allemagne pour 58 %.

M. Jean-Claude Requier.  - C'est le nucléaire !

M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission des affaires économiques.  - Que chaque pays puisse définir son propre bouquet énergétique. Le nôtre comprend une part importante de nucléaire : consolidons cet acquis, même si nous avons d'autres perspectives, certaines raisonnables, d'autres plus audacieuses, pour les énergies renouvelables. Le bouquet énergétique allemand, lui, repose largement sur les énergies fossiles : la part du charbon dans la production d'électricité y est passée de 30 % à 42 % - avec celle du gaz, on atteint presque 60 %. Est-ce un modèle à suivre ? Il faut aussi tenir compte de la consommation d'électricité, qui va très certainement évoluer.

Les écologistes veulent, avec une grande constance, que l'énergie soit chère, que le prix de l'électricité et du pétrole augmente. Sur ce dernier point, le projet de loi de finances leur donnera toute satisfaction, au grand dam des consommateurs... Rappelons que le développement des énergies renouvelables est supporté par eux au travers de la contribution au service public de l'électricité (CSPE), soit 15 à 16 euros par mégawatt/heure en France - en Allemagne, on est déjà à 53 euros.

M. Jean-Claude Requier.  - Absolument.

M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission des affaires économiques.  - L'éolien, le photovoltaïque coûtent bien plus cher à produire que l'électronucléaire. La politique française ne doit pas être honteuse, nous avons des atouts et des acquis à défendre.

Le prix Nobel d'économie a été attribué à Jean Tirole, qui a beaucoup travaillé sur la force des marchés et la régulation. En matière d'énergie, il faut, monsieur le ministre, à la fois du marché, de la régulation et aussi de l'ambition. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Hervé Maurey, président de la commission du développement durable, des infrastructures, de l'équipement et de l'aménagement du territoire .  - La politique énergétique et climatique est l'une des cinq priorités stratégiques de l'Union européenne. Le Conseil de juin a confirmé la réorientation de la stratégie. Les trois objectifs du paquet énergie-climat ont été rappelés. Le dernier, l'efficacité énergétique, a été ajouté en juillet dernier ; on sait son importance pour la sécurité d'approvisionnement, notamment en gaz.

À ce stade, seul l'objectif des 27 % d'énergie renouvelable dans le mix énergétique est contraignant, qui plus est à l'échelle de l'Union européenne et non pays par pays. Le marché européen du carbone doit être structurellement réformé ; la commission du développement durable a déjà eu l'occasion de le dire. Les objectifs européens sont cohérents avec ceux que la France s'est fixés.

Certains États membres se sont interrogés sur la pertinence de ces objectifs et réclament plus de flexibilité ; les pays de l'Est refusent ainsi tout objectif contraignant avant la Conférence de 2015 - celle-ci est une priorité de la diplomatie française. Trois mécanismes de solidarité sont en discussion. Ces contreparties permettront-elles d'emporter un accord ? Quelle sera la position de la France ?

La feuille de route fixée en 2011 à Durban est claire : un accord en 2015 sur des objectifs contraignants pour contenir le réchauffement à deux degrés. L'Union doit dans cette perspective adopter une position commune. La commission du développement durable contribuera à la réflexion. Les parlements ont dans cette affaire un rôle essentiel à jouer.

Le Conseil européen doit envoyer un message fort, tout en restant réaliste. Les industriels se mobilisent pour la transition énergétique, ils sont nombreux à appeler à un paquet énergie-climat ambitieux ; mais ils ont besoin, comme les investisseurs, d'un cadre juridique cohérent et stable.

La position de la France conditionne sa crédibilité. Il faut des objectifs chiffrés. L'Europe n'a plus le droit à l'erreur. (Applaudissements sur les bancs UMP et UDI-UC)

Mme Michèle André, présidente de la commission des finances .  - Le futur Conseil européen examinera la situation économique de l'Union européenne. En 2014, la première priorité est de concilier assainissement budgétaire et croissance économique. Ce que fait la France. Certains de nos partenaires ne sont toutefois pas prêts à dépasser le stade du discours... Nous saurons prochainement si la Commission demande un projet de budget révisé. Les prévisions de croissance ont été abaissées, le dynamisme de l'économie allemande semble marquer le pas, peut-être sur la durée. N'empêchons pas l'Union européenne de relancer la croissance. La place de la BEI, des banques publiques nationales, du Mécanisme européen de stabilité (MES) font débat quand on évoque le fonds d'investissement qui doit mettre en oeuvre le plan de 300 milliards. Celui-ci portera-t-il essentiellement sur les infrastructures ? Le débat ne fait que commencer.

En matière bancaire et financière, le fonds de résolution unique fera suite au mécanisme de surveillance unique. Le projet de loi dit « DDADUE » prévoit l'adaptation de notre droit à la nouvelle architecture. La commission des finances n'oublie pas que le contribuable français sera indirectement sollicité... Elle s'inquiète aussi de la contribution des banques françaises au fonds. Un amendement adopté à l'initiative du rapporteur, M. Yung, propose de surseoir tant que nous ne connaissons pas les modalités de financement du fonds : pourquoi les banques françaises paieraient-elles plus que les banques allemandes ? Si le fonds de résolution unique ne suffit pas, quel filet de sécurité ? L'accord politique au sein de l'Eurogroupe en juin pose des conditions au financement in fine par le MES... L'idée de pareil financement prospère-t-elle ?

La France ne doit pas baisser la garde en matière de régulation. La Commission européenne dit faire de l'encadrement du shadow banking, la finance de l'ombre, une priorité ; aidons-la à passer des discours aux actes. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes .  - Je salue mon prédécesseur, M. Sutour. Les institutions européennes viennent d'être renouvelées. Le collège de la Commission sera bientôt investi. Il s'agit pour lui de se concentrer sur quelques priorités, sur lesquels l'opinion publique attend l'Europe. La subsidiarité doit jouer pleinement son rôle : aux parlements nationaux d'y veiller.

Le défi climatique est immense. L'année 2013 a marqué un nouveau record en matière d'émissions de CO2. Selon le Giec, au rythme actuel, le réchauffement atteindrait six degrés d'ici la fin du siècle - le changement climatique deviendrait incontrôlable au-delà de deux degrés... On a trop privilégié l'écologie punitive sur l'écologie éducative : veillons à ce que l'Union européenne ne se fragilise pas unilatéralement en cherchant à être la première de la classe. Or aucun engagement international ne lie aujourd'hui l'Inde ou la Chine en matière d'émissions, alors que celles-ci ont augmenté de 214 % en Chine de 1990 à 2011, de 130 % en Inde, de 8 % aux États-Unis et... baissé de 10 % en Europe. D'où l'importance de la Conférence de Paris. Certains secteurs industriels tirent la sonnette d'alarme sur le risque de désavantage compétitif : il faut apporter à ces questions des réponses mondiales.

En pleine désindustrialisation, à la recherche de nouveaux moteurs de croissance, l'Europe réfléchit à sa politique énergétique. Aujourd'hui, le faible prix de l'énergie nucléaire apporte les seules ressources disponibles pour financer la transition énergétique et le développement des énergies renouvelables, d'autant que les investissements nécessaires pour pallier l'intermittence n'ont pas été réalisés.

Face à l'atonie de l'économie européenne, M. Juncker a annoncé un plan d'investissement de 300 milliards d'euros. Il ne faudrait pas que son financement repose sur une partie des fonds structurels. Tout détournement ferait l'effet d'une douche froide pour les collectivités territoriales confrontées à la baisse de leur dotation. J'attends des explications du Gouvernement sur ce point.

Le débat sur la relance ne peut dispenser la France de rétablir ses finances publiques. C'est demain que le Gouvernement doit soumettre à la Commission son projet de budget. Si celle-ci en demande la révision, je souhaite que nous demandions à la Commission européenne de venir expliquer sa position devant le Sénat, comme le TSCG le permet. (Applaudissements sur les bancs UMP et UDI-UC) L'avis plus que réservé du Haut Conseil des finances publiques augure mal de la position de Bruxelles. Je doute que la clause de circonstances exceptionnelles, invoquée en 2013, puisse l'être à nouveau, même au niveau collectif... Des États comme l'Espagne ont fourni de gros efforts - qui commencent à porter leurs fruits. Au-delà des clivages partisans, l'heure est au courage politique, dans l'intérêt de la France. (Applaudissements sur les bancs UMP, UDI-UC ; M. André Gattolin applaudit aussi)

M. Harlem Désir, secrétaire d'État .  - Merci pour ces très riches interventions. M. Gattolin, que je remercie pour son travail de sensibilisation des dirigeants européens à la situation alarmante de l'Arctique, a souligné le lien entre la politique énergétique et climatique et les enjeux géostratégiques pour l'Union européenne. Beaucoup d'États membres sont dépendants, pour 50 % à 100 %, de la Russie pour leur fourniture de gaz ; ce n'est pas sain. Tout en respectant les choix de mix énergétique des uns et des autres, nous avons intérêt à réduire notre dépendance extérieure, et un des moyens pour y parvenir est de développer l'efficacité énergétique. C'est un des objets de la loi de transition énergétique. Il en va de l'indépendance énergétique de l'Europe, de son leadership industriel, de ses emplois. N'opposons pas notre savoir-faire en matière nucléaire et le développement des énergies renouvelables : si l'Europe est leader dans ces domaines, nos entreprises y gagneront. Mais tous les pays européens ne partent pas du même point : en Pologne, l'électricité est encore à 90 % issue du charbon. En France, la part du nucléaire est de 75 %. Nous allons remplacer nos plus anciennes centrales par des EPR. En Pologne, l'objectif est de ne plus dépendre du charbon...

Nous allons fixer un objectif contraignant en matière d'efficacité énergétique dans la loi de transition énergétique ; au niveau européen, nous aurons une cible, une amélioration de 30 %.

Le ministère de l'économie allemand évalue le besoin d'investissement dans les infrastructures à 80 milliards par an. Outre la réduction de l'endettement, il faut que la consolidation budgétaire s'accompagne d'investissements, pour la croissance future. C'est pourquoi le pacte de stabilité et de croissance devra être manié avec toute la flexibilité qu'il autorise : la situation n'est pas la même quand la croissance est négative...

M. Bocquet a évoqué les négociations autour de la nomination des commissaires. Les auditions devant le Parlement européen ont joué leur rôle, c'est un mécanisme démocratique utile pour vérifier que le collège va bien se concentrer sur quelques grandes priorités et respecter le principe de subsidiarité : croissance, emploi, politique énergétique, numérique, politique migratoire, Pesc. Le processus n'est pas artificiel, il est solide. Je me réjouis que la nomination du commissaire français, Pierre Moscovici, au plus éminent portefeuille économique, ait reçu un avis positif.

M. Requier a insisté sur les enjeux de la Pesc et sur la nécessaire solidarité européenne en matière de défense. En Irak, comme au Mali, la France a agi sans attendre, car il y avait urgence. Cela a permis de mettre un coup d'arrêt à l'offensive de Daesh sur la ville martyr de Kobané. Nous avons entraîné les Européens au Mali, dans la formation de la future armée malienne, en RCA, dans la coalition internationale qui combat Daesh, un groupe qui terrorise la population. L'Allemagne fournit des armes aux Kurdes d'Irak.

Cette priorité était à l'ordre du jour du Conseil de décembre dernier. Nous avançons et c'est essentiel pour la France. Nous renforçons notre coopération avec nos principaux partenaires.

Monsieur Pozzo di Borgo, vous avez insisté sur la nécessité de respecter la souveraineté de chacun des États. Mais n'opposons pas nos choix, favorables à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, à la coopération européenne. Même si d'autres pays ont fait d'autres choix, nous devons approfondir nos objectifs énergétiques et climatiques. La politique en ce domaine est un grand projet pour l'Europe, un projet industriel, économique, social, qui touchera l'ensemble des citoyens et notre tissu économique.

Pour développer les interconnexions ou les technologies du futur comme le stockage de l'énergie, nous devons investir ensemble. L'Europe peut devenir un leader en ces matières. Un accord mondial, priorité diplomatique de la France, passe par un accord européen.

Sur l'Ukraine, les sanctions ne sont pas une fin en soi, mais l'outil indispensable pour faire pression sur la Russie, dire notre refus des violations des grands principes du droit international. Il n'y aura de solution que politique. La France a oeuvré afin que le dialogue se poursuive. Nous faisons en sorte que soit mis en oeuvre et respecté point par point l'accord signé à Minsk, qui a mis en place un cessez-le-feu, malheureusement instable. Le Conseil européen examinera au fur et à mesure l'exécution de ce plan de paix pour décider de la levée ou non des sanctions.

Mme Keller a évoqué la crise sanitaire liée à l'épidémie d'Ebola qui frappe l'Afrique de l'Ouest, mais aussi l'Europe et les États-Unis... La France a apporté 40 millions d'euros d'aide bilatérale, 35 millions d'aide multilatérale. Nous avons installé un centre de traitement en Guinée équatoriale, d'autres pourraient suivre, le président de la République l'a confirmé.

Mme Keller est revenue sur le budget 2015. Je la rassure : nous respectons et respecterons nos engagements à l'égard de nos partenaires européens. Comme l'a dit le Premier ministre, les partenaires doivent aussi se respecter, les déclarations du président de l'Euro Groupe étaient à cet égard particulièrement déplacées.

Mme la présidente André a insisté justement sur l'union bancaire et les mécanismes de résolution bancaire. Chacun de nos pays est amené à contribuer financièrement à la mise en oeuvre de ces instruments. Personne ne met en doute la crédibilité de la France. Dans la situation d'aujourd'hui, le débat sur la consolidation budgétaire doit prendre en compte la réalité de la situation.

Je vous engage à faire valoir la contribution de la France à la résolution de la crise européenne, son respect des traités, sa stratégie de soutien à l'investissement, afin de rééquilibrer les politiques européennes, comme l'a souhaité Simon Sutour, et lutter contre le chômage.

La garantie pour la jeunesse est un instrument très important. Le fonds de 6 milliards d'euros doit être débloqué plus rapidement. La Commission européenne doit mettre en oeuvre les procédures nécessaires.

J'assure Jean-Claude Lenoir que l'organisation de la future Commission résoudra la contradiction qu'il a soulignée : il y aura un même commissaire pour l'énergie et le climat. Il ne faut pas opposer la spécificité de chaque pays à notre politique énergétique commune.

Monsieur le président Maurey, la France s'est engagée à mettre un milliard d'euros à disposition du fonds vert, tout comme l'Allemagne. Parmi les autres pays, seule la Norvège a annoncé une contribution. La Chine, confrontée à la pollution de ses villes, ainsi que les États-Unis, ont émis à New York des signaux encourageants pour le succès de la Conférence de Paris.

Je remercie le président Bizet pour ce débat, en amont du Conseil européen, au début des travaux du Sénat renouvelé. Le plan de soutien aux investissements doit venir en supplément des labels existants. (Applaudissements sur les bancs socialistes, écologistes, RDSE, ainsi que sur quelques bancs UDI-UC et UMP)

Débat interactif et spontané

Mme Pascale Gruny .  - La France n'a plus de rôle moteur, elle n'est plus attractive ; son instabilité fiscale inquiète les entreprises et les investisseurs étrangers, ce qui pénalise l'emploi. Le Conseil européen du 8 octobre a été un rendez-vous majeur pour l'emploi, particulièrement pour l'emploi des jeunes. Mais la France est de plus en plus isolée dans sa logique de la subvention et de la dépense. L'objectif de la garantie pour la jeunesse est louable, mais la méthode, on le voit avec l'échec des contrats d'avenir, totalement inefficace. Il ne s'agit pas de trouver une occupation aux jeunes mais de les inscrire dans le monde de l'entreprise en leur donnant une formation efficace. Alors que l'Italie met en place des réformes structurelles, que comptez-vous faire, monsieur le ministre ? Merci pour votre réponse, elle est attendue par notre jeunesse.

M. Harlem Désir, secrétaire d'État.  - Le sommet de Milan a confirmé la mobilisation de l'ensemble des États membres en faveur de la garantie jeunesse. C'est un défi social autant qu'un enjeu politique et économique. Le chômage des jeunes atteint 25 % dans certains pays et régions. On ne fera pas l'avenir de l'Europe avec une génération sacrifiée.

Les chefs d'État et de gouvernement n'ont pas renoncé à ce projet. Au contraire, ils ont demandé à la Commission de débloquer les fonds plus rapidement. La France est le premier pays à avoir signé une convention avec l'Union européenne. Je suis allé à Marseille, dans une mission locale : il ne s'agit pas « d'occuper les jeunes », mais bien de les insérer en entreprise. Ils sont pris en charge, ils réapprennent des habitudes, ils sont mis en situation de travail. Nous partageons le même objectif : qu'ils puissent vivre de leur travail, et non de l'assistanat.

M. Jean-Yves Leconte .  - La Commission européenne a indiqué le montant des aides publiques des États en faveur des différentes énergies. Quelle est la position de la France sur la réforme envisagée par la Commission, afin que ces aides n'aillent plus vers les énergies carbonées ?

Le prix du gaz russe varie considérablement d'un pays à l'autre : que devient, dans ces conditions, le marché unique ? Comment faire pour que ces écarts de compétitivité ne soient plus imposés de l'extérieur ? L'insécurité énergétique de l'Allemagne est un problème aussi pour les entreprises européennes.

M. Harlem Désir, secrétaire d'État.  - Comment avoir une énergie abordable, peu chère, conforme à nos engagements environnementaux, dans des conditions qui ne nous rendent pas trop dépendants de l'extérieur ?

Le prix de l'énergie est évidemment une variable clé. Quand on renonce au nucléaire et qu'on ne veut pas dépendre du gaz, on utilise le charbon et on subventionne très largement les énergies renouvelables. Et si on veut préserver les entreprises, ce sont les ménages qui paient. Les énergies renouvelables doivent être développées ; mais nous estimons nécessaire de préserver une part de nucléaire, pour fournir une énergie abordable, non dépendante de l'extérieur, qui puisse compenser le coût élevé, dans un premier temps, des renouvelables. Nous sommes très satisfaits de la décision de la Commission européenne sur le développement des installations nucléaires de type EPR en Grande-Bretagne.

La contribution de l'énergie nucléaire au mix énergétique européen autorisera des prix abordables et accroîtra notre indépendance.

M. Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes.  - Très bien !

M. Philippe Bonnecarrere .  - Notre agriculture est confrontée à une directive « Nitrates » aux conséquences considérables. Le Premier ministre s'est dit favorable à une révision de ce texte. Quel est son calendrier ? Comment compte-t-il infléchir la position de la Commission et de nos partenaires ? Les contraintes imposées à nos éleveurs risquent de faire disparaître notre élevage extensif. (Applaudissements sur les bancs UDI-UC)

M. Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes.  - Très bien !

M. Harlem Désir, secrétaire d'État.  - La Cour de Luxembourg a condamné la France au motif des périodes, des zones d'épandage, des autorisations de stockage, de l'absence de garantie d'utilisation équilibrée des sols. Il faut prendre en compte les exigences environnementales, mais aussi les réalités agricoles. Il convient aussi d'éteindre le contentieux sur la délimitation des zones vulnérables.

Le ministre de l'agriculture a demandé à cette fin une expertise scientifique. Il faut combiner les objectifs environnementaux avec le maintien d'une agriculture de qualité. L'approche normative de la directive « Nitrates » a montré ses limites. Des propositions d'évolution seront faites, en lien avec d'autres États membres. Montrons comment nous respectons les objectifs principaux de protection des eaux et des sols de cette directive, tout en la faisant évoluer.

M. Ladislas Poniatowski .  - L'énergie est un facteur clé d'une croissance durable. Le Portugal et l'Espagne remettent en cause leur programme d'ENR, l'Allemagne se débat dans ses problèmes de réseau et d'éoliennes, qui affectent toute l'Europe. La France doit faire ses choix ; tout en respectant ceux de nos partenaires, nous devons leur demander de respecter les nôtres.

Le programme nucléaire français est le fruit d'une politique de long terme, que nous ne pouvons dilapider. Le socle de notre mix énergétique complet doit continuer à reposer sur le nucléaire.

Comment préserver l'indépendance énergétique de la France ? Comment éviter que les entreprises françaises qui croulent sous les taxes et les charges, ne voient demain leur facture d'électricité exploser ? (Applaudissements sur les bancs UMP et UDI-UC)

M. Harlem Désir, secrétaire d'État.  - J'ai dit que nous veillons à ce que le paquet énergie-climat respecte les choix des États membres. La France, tout en apportant sa contribution au développement des énergies renouvelables et en engageant la transition énergétique, maintient un mix énergétique diversifié. Nous sommes attentifs à ce que cette combinaison soit rendue possible. C'est pourquoi la décision prise par la Commission européenne sur le projet de construction d'EPR en Grande-Bretagne nous importe beaucoup. Elle pourrait inspirer d'autres pays. Ainsi, en République tchèque, une part importante de l'électricité est produite à partir du nucléaire. La décision prise à propos de la Grande-Bretagne y a été examinée avec attention, de même qu'en Pologne. Nous devons être leaders dans tous les domaines de l'énergie.

M. Pascal Allizard .  - Transition énergétique, croissance, emploi, situation internationale tendue, guerre contre le terrorisme, avec plusieurs milliers d'Européens engagés dans le djihad... Quel sera le champ d'action de la France pour mieux articuler la lutte contre le terrorisme entre services européens et nationaux ?

Et quid des frontières, face aux flux de djihadistes ? Quelle sera la position de l'Union européenne face à la Turquie, qui se trouve en première ligne et où les combattants kurdes anti-islamistes sont très peu appréciés d'Ankara ? (Applaudissements sur les bancs UMP et UDI-UC)

M. Harlem Désir, secrétaire d'État.  - La lutte contre le terrorisme est une priorité. Le ministre de l'intérieur s'est rendu dans plusieurs pays afin de coordonner l'action des services concernés. Un plan a été proposé, soutenu par les États membres, qui va dans le même sens que le projet de loi que vous examinez demain, afin que les personnes candidates au terrorisme soient arrêtées dès le premier signalement, afin que les personnes qui participent aux activités terroristes soient poursuivies, afin de lutter contre la propagande par Internet.

Aucun de nos pays ne peut lutter seul contre ce fléau. La coalition internationale participe de cette lutte, qui doit être menée ici.

Schengen n'est pas seulement un espace de libre circulation des citoyens européens, c'est aussi un espace de coordination, d'échanges, d'action, qui doit être renforcé. Tous nos efforts sont déployés pour que l'Europe renforce son action dans ce domaine.

Nous sommes extrêmement attentifs à la situation en Turquie. Le ministre de l'intérieur s'est rendu à Ankara pour établir des procédures, afin que ne se reproduise plus l'incident récent concernant nos ressortissants. La ville martyre de Kobané ne doit pas tomber aux mains de ce groupe barbare.

M. Michel Canevet .  - Je ne suis guère rassuré par les propos du ministre sur la volonté réelle de la France concernant l'union économique et monétaire. Le président Bizet a évoqué l'utilisation des fonds structurels. Sur les affaires maritimes et la pêche, la France n'a pas encore transmis à Bruxelles le programme opérationnel, alors que les projets sont nombreux dans nos territoires.

Certes, la Commission européenne n'est pas encore en place, mais la France doit présenter des projets sans attendre, dans le domaine numérique notamment. (Applaudissements sur les bancs UDI-UC)

M. Harlem Désir, secrétaire d'État.  - La France a adopté son accord de partenariat pour l'utilisation des fonds structurels le 8 août dernier. Les discussions avancent. Le programme opérationnel sur l'océan sera adopté dans des délais normaux. La France est une très grande utilisatrice de la PAC, elle a un niveau de consommation des fonds européens très élevés.

La politique commune de l'agriculture et de la pêche est un acquis. Je sais que vous êtes très mobilisé ; le Gouvernement l'est aussi pour défendre les agriculteurs et les pêcheurs.

M. Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes .  - Je remercie M. Canevet de cette question. Le Sénat, représentant des territoires, est très attentif à ces fonds structurels, qui s'élèvent à quelque 320 milliards d'euros, soit le deuxième poste budgétaire de l'Union européenne, juste après la PAC. Il appartient aux élus des territoires, avec les régions, avec le Sénat, d'être inventifs pour optimiser la consommation des fonds structurels. C'est aussi le rôle du Sénat que d'aider les élus locaux à cet égard et je suis persuadé, monsieur le ministre, que vous nous aiderez.

Le débat est clos.

Prochaine séance aujourd'hui, mercredi 15 octobre 2014, à 14 h 30.

La séance est levée à minuit vingt.

Jean-Luc Dealberto

Directeur des comptes rendus analytiques

Ordre du jour du mercredi 15 octobre 2014

Séance publique

À 14 heures 30 et le soir

Présidence : M. Hervé Marseille, vice-président

Mme Jacqueline Gourault, vice-présidente

Secrétaire : M. Claude Haut

Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme (n° 807, 2013-2014)

Rapport de MM. Jean-Jacques Hyest et Alain Richard, fait au nom de la commission des lois (n° 9, 2014-2015)

Texte de la commission (n° 10, 2014-2015)

En outre, à 14 heures 30 :

Désignation des vingt et un membres de la commission d'enquête sur l'organisation et les moyens de la lutte contre les réseaux djihadistes en France et en Europe

Analyse des scrutins publics

Scrutin n° 1 sur l'ensemble du projet de loi relatif à la désignation des conseillers prud'hommes.

Résultat du scrutin

Nombre de votants :342

Suffrages exprimés :187

Pour :155

Contre : 32

Le Sénat a adopté.

Analyse par groupes politiques

Groupe UMP (143)

Abstentions : 143

Groupe socialiste (112)

Pour : 110

Contre : 2 - M. Jean-Pierre Godefroy, Mme Marie-Noëlle Lienemann

Groupe UDI-UC (43)

Pour : 42

Abstention : 1 - M. Henri Tandonnet

Groupe CRC (18)

Contre : 18

Groupe du RDSE (13)

Pour : 1 - M. Gilbert Barbier

Contre : 2 - MM. Pierre-Yves Collombat, Robert Hue

Abstentions : 10

Groupe écologiste (10)

Contre : 10

Sénateurs non inscrits (9)

Pour : 2

Abstention : 1 - M. Jean-Louis Masson

N'ont pas pris part au vote : 6 - MM. Michel Amiel, Jean-Noël Guérini, Mme Mireille Jouve, MM. David Rachline, Stéphane Ravier, Alex Türk