Réforme de l'asile (Procédure accélérée - Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la réforme de l'asile.

Discussion des articles (Suite)

ARTICLE 10

M. le président.  - Amendement n°197, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC.

Alinéa 3, première phrase

Après la référence :

L. 713-4

rédiger ainsi la fin de cette phrase :

et L. 723-1 à L. 723-14.

Mme Éliane Assassi.  - La loi donne compétence à la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) pour examiner les recours contre toutes les décisions de l'Ofpra. Il est logique que cela vaille aussi pour les décisions de refus de réouverture après clôture, et cela irait dans le sens de la simplification.

M. François-Noël Buffet, rapporteur de la commission des lois.  - Lorsqu'il n'y a aucun grief, ou que la décision du contrôle de légalité et non du contentieux de l'asile, cela ne se justifie pas. Avis défavorable.

Mme George Pau-Langevin, ministre des outre-mer.  - La décision contestée, en effet, ne porte pas sur le fond de la demande. Il n'est pas utile de confier le contentieux à la CNDA. Retrait ?

L'amendement n°197 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°131, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 4

Rédiger ainsi cet alinéa :

« La Cour nationale du droit d'asile statue en formation collégiale, dans un délai de six mois à compter de sa saisine. Toutefois, sans préjudice de l'article L. 733-2, lorsque la décision de l'office a été prise en application des articles L. 723-2 ou L. 723-10, la Cour statue dans un délai de trois mois.

Mme Esther Benbassa.  - Le présent amendement a pour objet de ramener le délai de jugement d'une affaire en procédure normale à six mois, conformément aux recommandations du rapport du Sénat du 14 novembre 2012, et celui d'une affaire en procédure accélérée à trois mois. Les délais de jugement ne doivent pas être expéditifs et empêcher un demandeur d'asile d'assurer convenablement sa défense. Le délai de cinq semaines est donc parfaitement déraisonnable, de l'avis de l'ensemble des acteurs du contentieux comme du défenseur des droits, qui préconise un délai de trois mois au moins.

Enfin, nous voulons permettre l'examen collégial de l'ensemble des recours soumis à la CNDA, contentieux particulièrement sensible qui a trait aux libertés fondamentales et qui nécessite des connaissances géopolitiques pointues, voir une expérience de terrain. Ce contentieux ne saurait être confié à un juge unique. De surcroît, l'abandon de la collégialité évincerait le HCR de la formation de jugement, ce qui appauvrirait considérablement le droit d'asile en France et serait contraire à la directive du 26 juin 2013. Il faut rappeler que la CNDA est juge en premier et dernier ressort du contentieux de l'asile, le Conseil d'État n'étant que juge de cassation.

M. le président.  - Amendement n°198, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC.

Alinéa 4

Rédiger ainsi cet alinéa :

« La Cour nationale du droit d'asile statue en formation collégiale, dans un délai de six mois à compter de sa saisine. Toutefois, sans préjudice de l'article L. 733-2, lorsque la décision de l'office a été prise en application des articles L. 723-2 ou L. 723-10, la Cour statue dans un délai de trois mois à compter de sa saisine. Si le Président de la Cour nationale du droit d'asile ou le président de la formation de jugement désigné à cette fin estime, le cas échéant d'office et à tout moment de la procédure, que la demande ne relève pas de l'un des cas prévus aux mêmes articles L. 723-2 et L. 723-10 et qu'elle soulève une difficulté sérieuse, la Cour nationale du droit d'asile statue, en formation collégiale, dans les conditions de délai prévues par cette formation.

Mme Éliane Assassi.  - La procédure, en effet, ne doit pas être expéditive : le demandeur doit pouvoir préparer sa défense, conformément aux articles 48 de la charte européenne des droits fondamentaux et 13 de la CEDH, et la Cour instruira convenablement le dossier. Vu la complexité de ce contentieux, il ne saurait être confié à un juge unique.

M. le président.  - Amendement n°20, présenté par MM. Mézard, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin et Hue, Mmes Laborde et Malherbe et M. Requier.

Alinéa 4, troisième phrase

Remplacer les mots :

D'office

par les mots :

De sa propre initiative

M. Jacques Mézard.  - La rédaction de l'article doit être clarifiée ; nous attendons à tout le moins les éclaircissements du Gouvernement sur ce renvoi « d'office » à une formation collégiale.

M. le président.  - Amendement n°1, présenté par M. Leconte.

Alinéa 4

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Enfin, si le président de la formation de jugement désigné à cette fin estime, le cas échéant d'office et à tout moment de la procédure, qu'il ne peut statuer seul sur la demande, bien qu'elle relève de l'un des cas prévus aux articles L. 723-2 et L. 723-10 et qu'elle soulève des difficultés, la Cour nationale du droit d'asile statue en formation collégiale, dans un délai de sept semaines. 

M. Jean-Yves Leconte.  - Nous rendons hommage aux avocats, qui font vivre le contradictoire devant la CNDA. Qu'une décision puisse être rendue rapidement sans mettre à mal le principe du contradictoire irait dans le bon sens. Le juge doit avoir les moyens de renvoyer l'affaire devant une formation collégiale, sans que le délai passe de cinq semaines à cinq mois. C'est l'objet de cet amendement qui crée une procédure accélérée en fermeture collégiale.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable aux amendements nos131 et 198, qui allongeraient les délais et supprimeraient la procédure importante du juge unique.

L'amendement n°20 soulève un problème purement verbal ; l'usage juridique est d'employer les mots « d'office ». Nous demandons très courtoisement le retrait.

L'amendement n°1 crée une nouvelle procédure qui ne paraît pas nécessaire. Si le juge unique renvoie à une formation collégiale, c'est bien qu'il y a un problème. Avis défavorable.

Mme George Pau-Langevin, ministre.  - Avis défavorable à l'amendement n°131 : les demandes manifestement irrecevables peuvent sans dommages être examinées en procédure accélérée tandis qu'on prendra le temps d'examiner les demandes pertinentes. Supprimer le juge unique n'est pas opportun car les garanties sont là : ce sera un magistrat professionnel, le rapporteur pourra examiner le dossier de manière approfondie, le renvoi devant une forme collégiale sera possible et l'aide juridictionnelle sera accessible de plein droit devant la CNDA. Avis défavorable, ainsi qu'à l'amendement n°198.

Je rends hommage, moi aussi, au travail des avocats. Mais la procédure intermédiaire proposée par M. Leconte compliquerait l'ensemble. Avis défavorable.

L'amendement n°131 n'est pas adopté.

M. Jean-Yves Leconte.  - Je ne voterai pas l'amendement n°198 mais j'attends des éclaircissements du Gouvernement sur les capacités de la CNDA à tenir les délais prévus ; il lui faudrait, pour cela, davantage de moyens.

À la demande du groupe CRC, l'amendement n°198 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici le résultat du scrutin n°184 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 341
Pour l'adoption 29
Contre 312

Le Sénat n'a pas adopté.

L'amendement n°20 n'est pas adopté.

L'amendement n°1 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°33 rectifié bis, présenté par Mme Létard et les membres du groupe UDI-UC.

Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

Mme Valérie Létard.  - Notre amendement à l'article 8, qui tendait à supprimer par transfert à la CNDA les recours à l'encontre des décisions de refus d'entrée sur le territoire au titre de l'asile, n'ayant pas été adopté, nous retirons celui-ci.

L'amendement n°33 rectifié bis est retiré, ainsi que l'amendement n°233.

M. le président.  - Amendement n°60, présenté par M. Guerriau.

Alinéas 11 à 13

Remplacer ces alinéas par deux alinéas ainsi rédigés :

c) Le 3° est ainsi rédigé :

« 3° Le rapporteur nommé par le vice-président du Conseil d'État, parmi les agents de la Cour sur proposition du président de la Cour nationale du droit d'asile, en raison de ses compétences dans les domaines juridique ou géopolitique. En toute indépendance et impartialité, garanties inhérentes à ses fonctions pour lesquelles il prête serment devant le vice-président du Conseil d'État, il donne lecture du rapport qui analyse l'objet de la demande et les éléments de fait et de droit exposés par les parties et fait mention des éléments propres à éclairer le débat. » ;

M. Joël Guerriau.  - Les formations de jugement de la CNDA sont actuellement composées d'un magistrat assisté par deux assesseurs, dont l'un est nommé par le vice-président du Conseil d'État sur proposition de l'un des ministres représentés au conseil d'administration de l'Ofpra. C'est d'autant plus discutable que l'Office est partie prenante aux affaires jugées par la Cour.

Afin de lever toute suspicion, le projet de loi propose de nommer les assesseurs au regard de leurs compétences juridiques ou géopolitiques sans qu'ils soient proposés par l'un des ministres représentés au conseil d'administration de l'Ofpra. Cependant, comme l'avait préconisé le rapport de la Commission d'évaluation et de contrôle (CEC) sur l'évaluation de la politique d'accueil des demandeurs d'asile, paru en avril 2014, sur l'exigence d'une professionnalisation accrue de la CNDA, l'intégration des rapporteurs actuels au sein de la formation de jugement, en lieu et place de ces assesseurs, renforcerait la cohérence de la jurisprudence et simplifierait la gestion logistique des audiences.

Les rapporteurs, en effet, sont présents tout au long de la procédure et maîtrisent les dossiers. Ce sont des fonctionnaires ou des agents contractuels du Conseil d'État, qui bénéficient de garanties d'indépendance.

Cette intégration des rapporteurs au sein des formations de jugement permettrait de garantir aux requérants un examen de leurs recours par des personnes très spécialisées, pivots de la procédure et au fait de la jurisprudence en matière d'asile. Elle permettrait de faire des économies, par la suppression des vacations et la prise en charge des frais de déplacement, voire d'hébergement, des assesseurs, remplacés par les rapporteurs, actuellement évalués à quelque 450 000 euros.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis très clairement défavorable, le rapporteur serait juge et partie, comme l'a établi l'arrêt Kress contre France de 2001 de la CEDH.

Mme George Pau-Langevin, ministre.  - Même avis. Si le rapporteur a un rôle important, il n'a pas les garanties statutaires d'indépendance et d'impartialité nécessaires pour faire partie de la formation de jugement.

L'amendement n°60 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°235, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 16

1° Remplacer les mots :

président de la formation 

par les mots :

président de formation

2° (Rejeté lors d'un vote par division) Après le mot : 

nommé

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

parmi les magistrats mentionnés au 1° du présent article.

Mme George Pau-Langevin, ministre.  - Afin d'élargir le vivier de magistrats auprès de l'Ofpra, supprimons la condition d'ancienneté imposée par l'Assemblée nationale.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis favorable au 1°, rédactionnel ; défavorable au 2° car la commission des lois tient à cette condition d'ancienneté. Nous demandons un vote par division.

M. Jean-Yves Leconte.  - Je soutiens la position de la commission, il faut éviter de trop grandes variations en fonction du président de la formation de jugement.

Le 1° de l'amendement n°235 est adopté.

Le 2° de l'amendement n°235 n'est pas adopté.

L'amendement n°235, ainsi rédigé, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°34 rectifié bis, présenté par Mme Létard et les membres du groupe UDI-UC.

Alinéa 16

Supprimer les mots :

du deuxième alinéa de l'article L. 213-9-1 et

Mme Valérie Létard.  - Comme le précédent, je le retire.

L'amendement n°34 rectifié bis est retiré, ainsi que l'amendement n°234.

M. le président.  - Amendement n°35 rectifié bis, présenté par Mme Létard et les membres du groupe UDI-UC.

Après l'alinéa 17

Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :

...° L'article L. 733-1 est ainsi modifié :

a) Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Aux mêmes fins, le président de cette juridiction peut également prévoir la tenue d'audiences foraines au siège d'une juridiction administrative ou judiciaire, après accord du président de la juridiction concernée. » ;

b) Au dernier alinéa, les mots : « deuxième alinéa » sont remplacés par les mots : « présent article » ;

Mme Valérie Létard.  - Dans le cadre de la concertation sur l'asile, nous avions envisagé le transfert d'une partie du contentieux de l'asile aux juridictions administratives de droit commun.

J'y ai finalement renoncé, le choix ayant été fait de mieux spécialiser la CNDA, mais je persiste à penser que la justice doit être rapprochée des demandeurs, d'où cet amendement qui s'inspire du rapport remis au Gouvernement le 28 novembre 2013, lequel préconise d'autoriser la CNDA à tenir des audiences foraines, notamment en métropole. Cela réduirait les délais et permettrait de mieux accompagner les demandeurs, au plus près des territoires et des justiciables.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Si l'Ofpra organise des audiences foraines avec succès, la CNDA ne le fait qu'en outre-mer et recourt plus volontiers à la visioconférence, qui n'est possible qu'avec l'accord du requérant.

La solution proposée est peut-être envisageable mais je suis tenu par l'avis défavorable de la commission.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois.  - La situation a changé depuis l'examen de l'amendement en commission, puisque le Sénat a donné hier une base légale à la déconcentration des audiences de l'Ofpra. Il me semblerait, en conséquence, peu cohérent de le refuser à la CNDA. À titre personnel, je voterai l'amendement.

Mme George Pau-Langevin, ministre.  - Il s'agit en effet de rapprocher la justice des demandeurs. Ce serait positif et cohérent avec le souhait de mieux répartir les demandeurs d'asile sur le territoire. Avis favorable.

M. François Zocchetto.  - La proposition de Mme Létard est frappée au coin du bon sens. En outre-mer, elle a donné de bons résultats, tandis que la visioconférence est aléatoire, eu égard aux moyens utilisés comme aux résultats obtenus. Les audiences foraines ont effectivement besoin d'une base légale.

L'amendement n°35 rectifié bis est adopté.

M. le président.  - Amendement n°133, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

Alinéas 21 à 25

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

3° bis L'article L. 733-2 est abrogé ;

Mme Esther Benbassa.  - L'article L. 733-2 du Ceseda permet à la CNDA de rejeter un recours sans audience selon des critères subjectifs et aléatoires. Comme cela a été développé par M. Jean-Marie Delarue, dans son rapport du 29 novembre 2012, la notion d'absence d'élément sérieux est trop délicate à caractériser. De surcroît, le droit d'être entendu par la CNDA, qui découle du droit à un recours effectif est garanti par le droit européen. L'ensemble de ces droits est consacré par la directive européenne du 26 juin 2013 relative aux procédures communes en matière de protection internationale par la Charte des droits fondamentaux et par la convention européenne des droits de l'homme.

M. le président.  - Amendement n°200, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC.

Alinéas 21 à 25

Remplacer ces alinéas par deux alinéas ainsi rédigés :

3° bis L'article L. 733-2 est ainsi rédigé :

« Art. L. 733-2.  -  Le président et les présidents de formation de jugement ne peuvent en aucun cas régler par ordonnance les affaires dont la nature ne justifie pas l'intervention d'une formation collégiale. » ;

Mme Christine Prunaud.  - En effet, la notion d'« absence d'élément sérieux » est à prendre avec précaution. L'oralité est importante et le droit au recours effectif est garanti par le droit européen. La CEDH a d'ailleurs sanctionné la France plusieurs fois sur ce fondement.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Une ordonnance dite « nouvelle » permet à la Cour de ne pas perdre de temps sur des recours qui ont peu de chances de prospérer ; le requérant peut prendre connaissance du dossier, qui est examiné par un rapporteur. Avis défavorable.

Mme George Pau-Langevin, ministre.  - Même avis, cette procédure évite de perdre du temps inutilement.

L'amendement n°133 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°200.

M. le président.  - Amendement n°202, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC.

Alinéas 33 et 34

Supprimer ces alinéas.

M. Patrick Abate.  - La CNDA est juge de plein contentieux depuis le 8 janvier 1982. Depuis, le Conseil d'État a effectué plusieurs revirements de jurisprudence. Ce projet de loi limite les possibilités d'annulation à quelques hypothèses, ce qui met à mal le caractère effectif du recours et va à l'encontre de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne.

Il serait plus simple de laisser à la CNDA le soin de définir son office, sous le contrôle du Conseil d'État.

M. le président.  - Amendement n°16, présenté par MM. Mézard, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin et Hue, Mmes Laborde et Malherbe et M. Requier.

Alinéa 33

Remplacer les mots :

l'office a pris cette décision sans procéder à un examen individuel de la demande ou en se dispensant, en dehors des cas prévus par la loi, d'un entretien personnel avec le demandeur

par les mots :

l'examen de la demande a été entaché d'un vice de procédure grave et qu'il ressort des pièces du dossier que ce vice de procédure a été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé le demandeur d'une garantie

M. Jacques Mézard.  - Notre amendement précise, en conformité avec les jurisprudences du Conseil d'État et de la Cour nationale du droit d'asile que l'annulation de la décision du directeur général de l'Office et le renvoi de l'examen de la demande d'asile doivent advenir dans le cas où une garantie essentielle a été méconnue, notamment quand le principe du contradictoire n'a pas été respecté.

M. le président.  - Amendement n°132, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 33

Supprimer les mots :

, en dehors des cas prévus par la loi,

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable. La Cour, juridiction de plein contentieux, ne peut annuler une décision de l'Ofpra sans y substituer sa propre décision, sauf dans des cas précisément définis par la jurisprudence. Le renvoi systématique devant l'Ofpra allongerait les délais.

Mme George Pau-Langevin, ministre.  - Même avis, le juge de l'asile est effectivement un juge de plein contentieux, le Conseil d'État l'a rappelé et le projet de loi consacre cet état de fait. Il circonscrit le contrôle aux garanties essentielles aux demandeurs. J'ajoute que la directive « Procédures » de 2013 reconnait l'autonomie procédurale des États membres.

Le projet de loi, madame Benbassa, généralise le principe de l'entretien individuel, sauf dans trois cas strictement délimités, permis par la directive et parfaitement légitimes.

M. Jean-Yves Leconte.  - La CNDA évalue certes la décision de l'Ofpra mais peut aussi donner sa protection au demandeur d'asile ; elle doit pouvoir le faire s'il en a besoin, sans en renvoyer systématiquement la responsabilité à l'Ofpra. Celui-ci doit, de son côté, bien prendre en compte la jurisprudence de la CNDA pour éviter de répéter les mêmes erreurs.

L'amendement n°202 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos16 et 132.

M. le président.  - Amendement n°199 rectifié, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC.

Alinéa 43

Rédiger ainsi cet alinéa : 

« Art. 9-4.- Le bénéfice de l'aide juridictionnelle peut être demandé dans le délai de recours contentieux ou dans le délai d'un mois à compter de la réception par le requérant de l'avis de réception de son recours. » ;

M. Jean-Pierre Bosino.  - Cet amendement rétablit le texte adopté par l'Assemblée nationale en accordant un délai raisonnable aux demandeurs d'asile pour pouvoir bénéficier de l'aide juridictionnelle.

M. le président.  - Amendement n°236, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 43

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. 9-4. - Devant la Cour nationale du droit d'asile, le bénéfice de l'aide juridictionnelle est de plein droit, sauf si le recours est manifestement irrecevable. Si l'aide juridictionnelle est sollicitée en vue d'introduire le recours devant la cour, elle doit être demandée dans le délai de quinze jours à compter de la notification de la décision de l'office. Dans le cas contraire, l'aide juridictionnelle peut être demandée lors de l'introduction du recours, exercé dans le délai. » ;

Mme George Pau-Langevin, ministre.  - Afin de concilier le droit à l'aide juridictionnelle et la nécessaire maîtrise des délais d'instance, il est suggéré de distinguer deux cas. Soit l'aide juridictionnelle est sollicitée en vue d'introduire le recours devant la CNDA ; dans ce cas, elle doit être demandée dans le délai de quinze jours à compter de la notification de la décision de l'Ofpra ; dans ce cas le délai maximum de dépôt du recours est limité, lorsqu'il est statué immédiatement sur cette demande, à un mois et quinze jours. Soit, si le requérant a pu former son recours, seul ou avec l'aide d'un conseil, l'aide juridictionnelle peut être demandée au plus tard lors de l'introduction du recours, exercé dans le délai de recours contentieux d'un mois.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable à l'amendement n°199 rectifié qui supprime paradoxalement le bénéfice de plein droit de l'aide juridictionnelle. L'amendement n°236 limite les délais ; or la commission des lois a souhaité conserver le délai d'un mois.

Mme George Pau-Langevin, ministre.  - Avis défavorable à l'amendement n°199 rectifié car le Gouvernement a souhaité que la demande d'aide juridictionnelle soit formulée le plus rapidement possible.

L'amendement n°199 rectifié n'est pas adopté.

L'amendement n°236 n'est pas adopté.

L'article 10, modifié, est adopté.

ARTICLE 10 BIS

M. le président.  - Amendement n°71, présenté par M. Leconte et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Supprimer cet article.

M. Jean-Yves Leconte.  - Nous souhaitons supprimer un nouvel article adopté par la commission des lois qui rend inopérant le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la Cour européenne des droits de l'homme devant le juge administratif de droit commun de l'éloignement, sauf exceptions. Cette disposition serait limitée au tribunal administratif et aux mesures d'éloignement relevant du champ de l'article L. 512-1 du Ceseda, ce qui rend le dispositif partiel et inapplicable dès lors que l'obligation de quitter le territoire français ainsi que le jugement du tribunal administratif peuvent intervenir très vite après la décision négative de la CNDA.

Le dispositif envisagé semble procéder d'une confusion entre l'office du juge de l'asile qui statue au regard des critères d'octroi de l'asile et la protection résultant des exigences de l'article 3 de la CEDH, qui a un champ beaucoup plus large. La CNDA peut rejeter « définitivement » une demande d'asile, tout en excluant l'intéressé du statut de réfugié ou de la protection subsidiaire. L'intéressé encourt dans ce cas des risques graves dans son pays d'origine.

Le risque d'une « discordance de jurisprudence » doit être relativisé. Le juge administratif de droit commun de l'éloignement se fonde sur ce qu'a jugé la CNDA pour apprécier le bien-fondé du moyen tiré de la violation de l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme.

En majorité, les affaires intéressant la France et portées devant la Cour européenne des droits de l'homme concernent des mesures d'éloignement prononcées à l'encontre de personnes déboutées du droit d'asile.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis favorable.

Mme George Pau-Langevin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°71 est adopté, et l'article 10 bis est supprimé.

L'article 11 est adopté.

ARTICLE 12

M. le président.  - Amendement n°36 rectifié bis, présenté par Mme Létard et les membres du groupe UDI-UC.

Alinéa 5, première phrase

Compléter cette phrase par les mots :

sans condition préalable de domiciliation

Mme Valérie Létard.  - La réforme prévoit que le demandeur d'asile rentre dans un schéma directeur d'hébergement et admet qu'il pourra voyager sur le territoire ; cette condition n'est donc plus utile. Un numéro de téléphone ou une adresse de messagerie suffirait.

M. le président.  - Amendement identique n°158, présenté par M. Leconte et les membres du groupe socialiste et apparentés.

M. Jean-Yves Leconte.  - Il est effectivement important de le préciser dans la loi.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable. Cette disposition a été introduite par l'Assemblée nationale. Cette condition résultait, selon le Gouvernement, d'une mauvaise interprétation d'une mesure réglementaire. Mettons plutôt en oeuvre la recommandation du rapport des inspections générales d'avril 2013 de supprimer l'exigence d'une adresse postale au stade de l'enregistrement de la demande.

Mme George Pau-Langevin, ministre.  - Les amendements vont dans le bon sens : avis favorable.

À la demande du groupe socialiste, les amendements identiques nos36 rectifié bis et 158 sont mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici le résultat du scrutin n°185 :

Nombre de votants 340
Nombre de suffrages exprimés 340
Pour l'adoption 193
Contre 147

Le Sénat a adopté.

M. le président.  - Amendement n°134, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 6, première phrase

Remplacer les mots :

L'étranger est tenu de coopérer

par les mots :

Le demandeur d'asile coopère

Mme Esther Benbassa.  - La rédaction initiale de l''article L. 741-1 opère une confusion entre immigration et asile. La référence à l'étranger est inopportune. De surcroît, le principe de coopération posé par les directives européennes mérite une vision positive et sereine de cette coopération, qui sert le demandeur avant toute autre personne. Ainsi, la formulation « est tenu de » risque de créer un antagonisme ou une vision sécuritaire de ce concept, ce qui n'est ni nécessaire ni souhaitable.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - La préfecture ne connaît pas des « demandeurs d'asile » ; elle ne connaît que des étrangers qui le sollicitent : avis défavorable.

Mme George Pau-Langevin, ministre.  - Avis favorable à cette rédaction plus neutre, qui ne change certes rien au fond.

L'amendement n°134 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°159, présenté par Mme Bouchoux et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 7, première phrase

Après les mots :

une attestation de demande d'asile

insérer les mots :

valant autorisation provisoire de séjour

Mme Esther Benbassa.  - C'est clair.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Une disposition similaire a été adoptée à l'Assemblée nationale à l'article 14. Lors des débats en séance, Mme Boistard a précisé, au nom du Gouvernement, que les droits des titulaires d'une autorisation de séjour et des bénéficiaires de l'asile étaient les mêmes. N'allons pas entretenir la confusion. Avis défavorable.

Mme George Pau-Langevin, ministre.  - Retrait : un tel amendement aurait plutôt sa place à l'article 14.

L'amendement n°159 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°52 rectifié ter, présenté par M. Courtois, Mmes Primas et Troendlé, MM. Savin, Retailleau, Bouchet, Calvet, Delattre, de Legge et de Raincourt, Mmes Deseyne, di Folco et Duranton, MM. B. Fournier, J. Gautier, Gournac, Grosperrin, Lemoyne et Mandelli, Mme Morhet-Richaud, MM. Mouiller, Paul, Pillet, Trillard, Frassa, Béchu, Bignon, Bonhomme, Cambon, Cardoux et Danesi, Mme Deromedi, M. Duvernois, Mme Estrosi Sassone, MM. Gilles, Houel, Karoutchi, D. Laurent, Malhuret et A. Marc, Mme Mélot, MM. Milon, Pellevat, Saugey, Savary, Sido, Soilihi, Allizard, J.P. Fournier et Gremillet, Mmes Lopez et Micouleau, MM. Reichardt et Legendre et Mmes Canayer et Hummel.

Alinéa 16, première phrase

Compléter cette phrase par les mots :

, tout en protégeant l'intérêt supérieur du mineur

M. Christophe-André Frassa.  - Cet amendement transcrit strictement l'article 24 de la directive « Accueil », en insistant sur le fait que l'intérêt de l'enfant doit primer.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis favorable.

Mme George Pau-Langevin, ministre.  - Même avis.

M. le président.  - Les enfants présents dans les tribunes peuvent constater l'intérêt que la Haute assemblée porte aux enfants.

L'amendement n°52 rectifié ter est adopté.

L'article 12, modifié, est adopté.

ARTICLE 13

M. le président.  - Amendement n°204, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC.

I.  -  Alinéas 4 à 8

Supprimer ces alinéas.

II.  -   Alinéa 9

Supprimer les mots :

Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1,

M. Jean-Pierre Bosino.  - Le projet de loi maintient un régime spécifique pour les demandeurs d'asile « dublinés », comme dit le jargon. En septembre 2012, la Cour de Luxembourg a dit que ces demandeurs d'asile devaient bénéficier des mêmes droits que les autres. Leur assignation à résidence n'est pas justifiée, sauf à définir des critères objectifs dans la loi. Cette mesure ne devrait intervenir qu'en dernier recours et être soumise au contrôle régulier d'un juge. Mieux vaut supprimer ce régime spécifique.

L'amendement n°160 est retiré.

M. François-Noël Buffet.  - Le régime qu'évoque l'amendement n°204 ne fait qu'appliquer le règlement Dublin III. Avis défavorable.

Mme George Pau-Langevin, ministre - Avis défavorable également. L'amendement n°204 n'est pas utile : les « dublinés » ne sont pas en danger sur notre territoire et bénéficient des mêmes droits que les autres demandeurs d'asile.

L'amendement n°204 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°135, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 11

1° Première phrase

Compléter cette phrase par les mots :

dans une langue qu'il comprend

2° Dernière phrase

Supprimer les mots :

d'un conseil

Mme Esther Benbassa.  - La création d'un recours suspensif contre les décisions de transfert vers un État membre de l'Union européenne désigné comme « responsable » du traitement de la demande d'asile constitue une avancée notable. Toutefois, un recours, même suspensif dans la forme, n'est réellement effectif que si les personnes soumises aux décisions de transfert sont mises en mesure de le former de façon efficace et en temps utiles. Il faut donc que la décision de transfert soit notifiée à l'intéressé dans une langue qu'il comprend et que celui-ci soit informé de l'ensemble des éléments de la décision.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Cet amendement outrepasse le règlement Dublin qui prévoit que la notification est transmise dans une langue dont il est raisonnable de croire que le demandeur d'asile la comprend. Avis défavorable. Cela ferait peser une contrainte très lourde pour l'administration.

Mme George Pau-Langevin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°135 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°136, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 12

Remplacer le mot :

sept

par le mot :

trente

Mme Esther Benbassa.  - Il convient également de laisser au demandeur le temps de faire valoir ses droits. Un délai de trente jours semble plus raisonnable que les sept jours prévus. De surcroît, si la décision de transfert doit être jugée dans les mêmes conditions que le contentieux de l'obligation de quitter le territoire français, il convient de l'assortir des mêmes garanties, pour un parallélisme des procédures.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable. Le recours est suspensif : cela allongerait l'ensemble de la procédure.

Mme George Pau-Langevin, ministre.  - Même avis. Il s'agit ici d'un renvoi vers le pays dans lequel l'asile est demandé. La brièveté du délai est dans l'intérêt du demandeur.

L'amendement n°136 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°137, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 13

Remplacer les mots :

quinze jours

par les mots :

trois mois

Mme Esther Benbassa.  - La juridiction saisie d'un recours doit avoir le temps de travailler sereinement.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable. C'est contraire à votre souhait d'accélérer les procédures.

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur.  - Même avis.

M. le président.  - Le ministre de l'intérieur nous arrive à l'instant de Rome.

M. Michel Mercier.  - C'est un bon point pour lui ! (Sourires)

L'amendement n°137 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°138, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 16, seconde phrase

Supprimer les mots :

sans conclusions du rapporteur public,

Mme Esther Benbassa.  - Cet amendement maintient les conclusions du rapporteur public dès lors que la procédure se déroule avec un juge unique et que le contentieux est technique.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable. En cas de procédure d'urgence, il est d'usage de ne pas avoir de conclusions du rapporteur public.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°138 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°139, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 18

Remplacer les mots :

quarante-huit heures

par les mots :

sept jours

Mme Esther Benbassa.  - Laissons au demandeur le temps de faire valoir ses droits.

M. le président.  - Amendement n°205, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC.

Alinéa 18

Remplacer le mot :

quarante-huit

par le mot :

soixante-douze

Mme Christine Prunaud.  - Le délai de quarante-huit heures en cas de placement en rétention ou d'assignation à résidence ne paraît pas suffisant pour permettre un droit au recours effectif.

Je profite de cet amendement pour saluer la mise en place d'un recours suspensif contre les décisions de transfert, même si nous jugeons trop court le délai de quarante-huit heures en cas de placement en rétention ou d'assignation à résidence.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Une décision de privation ou de restriction de liberté doit pouvoir être contestée le plus vite possible car le recours n'est pas suspensif : avis défavorable.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°139 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°205.

M. le président.  - Amendement n°140, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 20, seconde phrase

Remplacer les mots :

soixante-douze heures

par les mots :

sept jours

Mme Esther Benbassa.  - Il s'agit une fois encore de demander un délai raisonnable.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°140 n'est pas adopté.

L'amendement n°141 est retiré.

M. Jean-Yves Leconte.  - On dit souvent que le règlement Dublin III ne fonctionne pas. Cet article se fonde néanmoins sur lui. Il y a certes des évolutions à opérer, notamment en limitant les délais de traitement des dossiers. La France doit être exemplaire pour négocier la modification des règles européennes.

L'article 13 est adopté.

ARTICLE 14

M. le président.  - Amendement n°161, présenté par Mme Bouchoux et les membres du groupe écologiste.

I.  -  Alinéa 3

Remplacer le mot :

maintien

par les mots :

séjour provisoire

II.  -  Alinéa 4, première phrase

Remplacer les mots :

de se maintenir

par les mots :

au séjour provisoire

III.  -  Alinéa 7 

Remplacer les mots :

de se maintenir

par les mots :

au séjour provisoire

Mme Corinne Bouchoux.  - Le projet de loi prévoit que le demandeur d'asile a droit au maintien sur le territoire le temps de la procédure de détermination de l'État responsable. Une autorisation provisoire de séjour lui donnerait une meilleure stabilité sur le territoire français, un accès plus facile aux droits sociaux et un alignement avec la notion de droit au séjour telle que pensée en France.

M. le président.  - Amendement n°206, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC.

Alinéa 4, première phrase

1° Remplacer les mots :

L'étranger

par les mots :

Le demandeur d'asile

2° Après les mots :

sur le territoire français

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

et vaut autorisation provisoire de séjour. Ce document, dès lors que la demande a été introduite auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, est renouvelable jusqu'à ce que l'office statue et, si un recours est formé devant la Cour nationale du droit d'asile, jusqu'à ce que la Cour statue. Cette attestation autorise à travailler selon les dispositions de l'article L. 5221-5 du code du travail.

Mme Éliane Assassi.  - Le mot « étranger » entretient une regrettable confusion entre immigration et droit d'asile.

Cet amendement prévoit la possibilité pour un demandeur d'asile d'exercer une activité salariée pendant l'examen de sa demande. Une des causes des difficultés actuelles est la quarantaine sociale où l'on met les demandeurs d'asile en les empêchant d'exercer officiellement une activité. Cette hypocrisie a pour effet de les contraindre en fait à travailler au noir.

Cet amendement leur ferait gagner en autonomie, notamment ceux hébergés en Cada, et leur permettrait de suivre plus sereinement l'évolution de leur dossier.

M. le président.  - Amendement n°237, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 4

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée : 

Cette attestation vaut autorisation provisoire de séjour.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Cette disposition a suscité des craintes qui ne sont pas dissipées. Il n'est pas question de réduire les droits des demandeurs d'asile, au contraire. Le droit au maintien accordé à tous va dans le bon sens. Il sera valable même en cas de recours d'une décision de l'Ofpra, jusqu'à ce que la CNDA statue. Un équilibre raisonnable avait été trouvé à l'Assemblée nationale. Celle-ci a accepté que le dépôt d'une demande d'asile n'emporte pas abrogation d'une éventuelle obligation de quitter le territoire. Cet équilibre a été rompu par la commission des lois du Sénat. Nous regrettons ce choix.

M. le président.  - Amendement n°142, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

Alinéas 7 à 15

Supprimer ces alinéas.

Mme Esther Benbassa.  - L'article L. 743-2 prévoit de nombreuses possibilités pour l'administration de retirer à un demandeur d'asile son droit au maintien au séjour, ce qui l'expose à un risque de notification d'une mesure d'éloignement. On ne peut dès lors plus parler de recours suspensif contre le rejet de la demande d'asile. Cela revient à vider de sens l'engagement de la France de garantir à tous un droit au recours suspensif et l'expose à de nouvelles condamnations par la Cour européenne des droits de l'homme.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable à l'amendement n°161 : la notion de droit au maintien sur le territoire est issue de la directive « Procédures » qui rappelle qu'elle ne vaut pas titre de séjour. Avis défavorable à l'amendement n°206 ; nous reviendrons sur l'autorisation de travail à l'article 15. Avis défavorable à l'amendement n°237, pour les raisons que nous avons déjà évoquées lors de l'examen de l'article 12. Avis défavorable à l'amendement n°142 : ces alinéas sont nécessaires à l'équilibre général du texte.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Je demande le retrait de ces amendements au profit de celui du Gouvernement.

M. Jean-Yves Leconte.  - Le groupe socialiste votera l'amendement du Gouvernement.

M. Roger Karoutchi.  - Je ne voterai pas ces amendements et défendrai un amendement n°163 sur l'article 15. Ouvrons le marché du travail, dit Mme Assassi. Certes, mais le texte vise à réduire les délais et à raccompagner aux frontières ceux dont les demandes sont irrecevables. Leur permettre à tous de travailler, les intégrer à la société, sans savoir quel sort leur sera réservé, est absurde, d'autant que l'on sait que sur les 65 000 demandeurs, moins du quart sont admis à l'asile. Comment allez-vous reconduire à la frontière des gens qui se seront insérés dans la société par leur travail ? On va créer un appel d'air formidable. Vous dites aux passeurs « Essayez quand même ! ». C'est incohérent !

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Belle démonstration, mais qui n'a rien à voir avec l'amendement du Gouvernement. Je suis totalement hostile à ce que les demandeurs d'asile aient accès au marché du travail dès le dépôt de leur demande.

M. Roger Karoutchi.  - Je parlais de l'amendement de Mme Assassi !

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Vous pouvez refaire cette démonstration sur l'amendement analogue que présentera tout à l'heure Mme Garriaud-Maylam et qui va exactement dans le sens que vous dénoncez.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois.  - L'amendement de Mme Assassi procède d'une intention généreuse. Mais une telle mesure nous exposerait non plus à 70 000 demandes annuelles mais à 80 000, ou bien davantage. Il est sage que les conventions internationales, comme notre loi, prévoient un certain délai avant de pouvoir faire une demande d'accès au marché du travail. Encore faut-il que le Gouvernement se donne les moyens suffisants pour qu'il soit statué sur les demandes d'asile dans des délais courts.

Mme Evelyne Yonnet.  - Ce débat est tronqué. Il n'est pas dit que l'autorisation au travail a un effet immédiat. Le travail au noir perdurera, les marchands de sommeil sont l'arme au pied.

M. Jean-Pierre Bosino.  - Les employeurs, et pas seulement les marchands de sommeil, profitent de la situation. Voyez les étrangers qui attendent devant certains magasins comme Castorama... la question du droit au travail est majeure.

L'amendement n°161 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos206, 237 et 142.

M. le président.  - Amendement n°143, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

Alinéas 17 à 19

Supprimer ces alinéas.

Mme Esther Benbassa.  - La commission des lois a décidé que la décision définitive de rejet prononcée par l'Ofpra, le cas échéant après que la CNDA aura statué, vaudrait obligation de quitter le territoire français (OQTF) et que l'étranger débouté de sa demande d'asile ne pourra solliciter un titre de séjour à un autre titre. De surcroît, l'article L. 743-5, issu du texte de la commission, confirme que l'exécution de la mesure d'éloignement n'est suspendue, pour les cas d'irrecevabilité et de clôture, que jusqu'à la réponse de l'Ofpra, et non de la CNDA. Ainsi, les demandeurs d'asile ayant fait l'objet d'une décision de clôture ou d'irrecevabilité ne bénéficient pas d'un droit au recours suspensif. Ces dispositions sont contraires à la Convention européenne des droits de l'homme.

M. le président.  - Amendement n°37 rectifié bis, présenté par Mme Létard et les membres du groupe UDI-UC.

Alinéa 17

Supprimer cet alinéa.

Mme Valérie Létard.  - Nous partageons l'objectif du rapporteur d'aboutir à une procédure claire et efficace. Mais prévoir que les décisions définitives de rejet prononcées par l'Ofpra et la CNDA valent obligation de quitter le territoire français, ce serait créer la confusion entre appréciation du bien-fondé de la demande d'asile et appréciation du droit au séjour, celle-ci relevant de l'autorité préfectorale. En outre, selon l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, le maintien sur le territoire d'un demandeur d'asile dont la demande a été rejetée peut être justifié par des raisons tenant à sa situation personnelle ou familiale. Le texte de la commission ne parle que de « circonstances particulières » -comment le débouté les ferait-il valoir ?- qu'il reviendrait à l'Ofpra et à la CNDA eux-mêmes d'apprécier. Il faudrait que ces « circonstances » fussent appréciées avant le rejet ou le recours pour que la mesure d'éloignement fût compatible avec la Convention européenne des droits de l'homme.

De plus, d'autres raisons, prévues par le Ceseda et tentant à la santé ou à la situation professionnelle de l'intéressé, peuvent justifier son maintien sur le territoire, que l'Ofpra et la CNDA ne sont pas compétentes pour apprécier. La rédaction de la commission provoquerait un nouveau flux de contentieux vers les juridictions de droit commun.

Rien n'est prévu sur l'articulation avec la procédure prévue à l'article L. 512-1 du Ceseda, sur le délai et le caractère suspensif du recours, sur le délai et la formation du jugement.

Un argument d'opportunité, enfin : nous avons voulu écrire dans la loi que l'Ofpra exerce ses missions en toute indépendance et la CNDA est une juridiction également indépendante. Que leurs décisions de rejet vaillent obligation de quitter le territoire français reviendrait à leur confier des missions de police administrative.

Évitons de brouiller les décisions des agents de l'Ofpra et des juges de la CNDA. L'éloignement doit être le terme d'une procédure au cours de laquelle la personne concernée a pu faire valoir ses droits.

M. le président.  - Amendement identique n°75, présenté par M. Leconte et les membres du groupe socialiste et apparentés.

M. Jean-Yves Leconte.  - Avec cet article, nous parvenons à un tournant du texte ; nous verrons si le Sénat préfère faire une déclaration politique ou travailler à une amélioration du texte...

M. Roger Karoutchi.  - Pas de leçon !

M. Jean-Yves Leconte.  - Cet amendement supprime la mention selon laquelle une décision définitive de rejet prononcée par l'Ofpra, ou le cas échéant par la CNDA, vaut obligation de quitter le territoire français. La rédaction de la commission, à mes yeux, n'est pas la réponse adaptée à la mise en oeuvre effective de l'éloignement des déboutés du droit d'asile. C'est le préfet qui accorde l'autorisation de séjour, c'est à lui de la retirer.

Ce n'est pas parce qu'on est débouté qu'on devrait avoir moins de droit qu'un étranger en situation irrégulière... En Allemagne, la même institution est compétente pour statuer sur le droit d'asile, les autorisations de séjour et les obligations de quitter le territoire. Le système ne fonctionne pas : 100 000 déboutés là-bas, 45 000 en France, mais le même nombre de personnes éloignées... On ne traite pas le problème en copiant à moitié un dispositif qui ne marche pas... Mieux vaut travailler à réduire les délais. Faisons preuve de sang-froid. En rester au texte de la commission serait transformer le texte en produit d'annonce politique.

M. le président.  - Amendement identique n°238, présenté par le Gouvernement.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Nous devons faire preuve de pragmatisme. Notre but est de réduire les délais pour humaniser la procédure et faciliter le processus de reconduite des déboutés. Si les déboutés ont droit à un titre de séjour sur un autre motif, ils ne sont pas reconduits à la frontière.

Nous sommes tous attachés au maintien du droit d'asile, conformément à notre tradition. Je souhaite que nous puissions avancer de concert. Je salue la rigueur juridique de Mme Létard. C'est la bonne solution. Il n'y a pas lieu d'instrumentaliser la question.

Le Gouvernement est défavorable au texte de la commission des lois car il pose de nombreuses difficultés juridiques et accroît la complexité de la procédure de reconduite au risque de rendre inexécutable l'OQTF -c'est la conclusion d'un rapport de l'IGA. Il mélange les genres entre appréciation du bien-fondé de la demande d'asile, qui relève de l'Ofpra et de la CNDA, et appréciation du droit au séjour, qui relève du préfet. Qui jugera des circonstances exceptionnelles pour permettre le maintien sur le territoire ? L'Ofpra n'a pas accès aux éléments pertinents. Examiner si un étranger a été persécuté dans son pays ou si sa situation en France le rend éligible à un titre de séjour sont deux choses différentes. Une OQTF prononcée sur le fondement d'un refus d'asile serait illégale à peine prononcée.

De plus, le texte allonge les délais. La commission, qui a vu un loup, a dû prévoir un recours suspensif devant le tribunal administratif. Tout devient alors compliqué. Le juge administratif deviendra juge de la CNDA, ce qui est parfaitement baroque... Et pour être exécutoire, l'OQTF devra être complétée par une décision du préfet, elle-même susceptible de recours.

En définitive, deux autorités différentes, deux recours différents, allongeant d'autant les délais. Si votre objectif est de faciliter l'exécution des OQTF et de réduire les délais...

La position du Gouvernement est purement juridique et non partisane, preuve en est qu'il retire son amendement au profit de celui de Mme Létard. C'est un sujet de droit, un sujet républicain. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

L'amendement n°238 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°76, présenté par M. Leconte et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Alinéa 18

Remplacer les mots :

ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre et

par les mots :

et qui ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre

M. Jean-Yves Leconte.  - Un individu débouté de sa demande d'asile peut se maintenir sur le territoire national pour d'autres raisons que l'asile, notamment sa situation familiale ou son état de santé.

M. le président.  - Amendement identique n°239, présenté par le Gouvernement.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Il s'agit de revenir au texte de l'Assemblée nationale. On ne peut considérer qu'une personne dont la demande d'asile a été rejetée doive automatiquement quitter le territoire français.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Nous sommes à un moment crucial, stratégique de cette discussion. Avis défavorable à tous ces amendements. Notre objectif est de rendre la procédure de l'asile plus efficace. C'est pourquoi nous avons réduit les délais, maintenu le juge unique, prévu des mesures d'irrecevabilité et de clôture.

Sur 65 000 demandes, 14 000 ont fait l'an dernier l'objet d'une décision favorable... Chaque année, plus de 40 000 personnes rejoignent ainsi l'immigration clandestine. Nous savons que les déboutés, qui ont passé deux ans sur le territoire national, souhaitent y rester et cherchent à obtenir un titre de séjour en se fondant sur d'autres moyens comme leur situation familiale ou personnelle. Nous savons aussi que beaucoup sont aux mains de filières mafieuses, qu'on leur dit que faire une demande d'asile, c'est l'assurance de rester deux ans...

Notre droit doit marcher sur ses deux jambes. C'est pourquoi la commission des lois a décidé que lorsque la décision de rejet de l'Ofpra ou de la CNDA a un caractère définitif, elle vaut obligation de quitter le territoire français. Un recours contre l'OQTF devant le tribunal administratif reste évidemment possible mais les délais entre la décision et l'éloignement seront raccourcis. Voilà qui envoie un message clair.

Deuxième point... Une partie des demandeurs d'asile sont des immigrés économiques. S'ils n'obtiennent pas protection, il ne faut pas, sauf circonstances particulières, leur permettre de demander une autorisation de séjour à un autre titre. Sans réduire les droits, nous devons veiller à sauvegarder notre système de protection. Si nous continuons sans rien faire, le système continuera à produire des clandestins. Nous aurions préféré examiner ensemble les textes sur l'asile et sur l'immigration : certes, les deux sont distincts mais il y là un point de contact qu'on ne peut négliger. Le sujet est difficile. On parle d'êtres humains, non de marchandises ; je conviens que notre rédaction n'est peut-être pas aboutie juridiquement mais nous devons agir.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Le rapporteur a fait un travail très approfondi mais le texte de la commission des lois nous conduit dans une impasse juridique et allongerait considérablement les délais.

Je partage les préoccupations de la commission : les déboutés de l'asile doivent être reconduits, ne laissons pas les situations s'enkyster, sauf à provoquer des désastres humanitaires et à mettre en danger la soutenabilité de notre système d'asile.

C'est pourquoi le Gouvernement proposera, pour réduire au maximum les délais, un amendement n°240 qui permet au préfet de délivrer une obligation de quitter le territoire français dès qu'une décision de rejet d'asile est devenue définitive. Voilà une mesure sûre juridiquement qui répondrait à votre préoccupation et montrerait que nous sommes capables, sur un tel sujet, de nous entendre puisque nous avons les mêmes objectifs. La représentation nationale en sortirait grandie. Je souhaite le retrait de l'amendement n°143 au profit des amendements identiques nos37 rectifié bis et 75 ; favorable à l'amendement n°76.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois.  - Le constat est partagé. Chaque année, 60 000 demandes d'asile sont déposées, seules 20 000 environ reçoivent une réponse favorable. Que deviennent les 40 000 déboutés ? Ils restent très majoritairement sur le territoire national. La commission des lois refuse de s'accommoder de cette situation. Ses solutions ne sont pas parfaites mais sont le fruit d'une réflexion juridique approfondie.

Monsieur le ministre, vous dites que, de par la loi, il appartient au préfet de se prononcer sur l'éloignement de la personne concernée. Mais ne sommes-nous pas en train de faire la loi ? Vous vous êtes ému que le juge administratif puisse censurer des décisions de la CNDA. Mais nous avons explicitement prévu que la CNDA ne se prononcerait que sur l'OQTF.

De plus, nous avons prévu que lorsque certaines conditions sont réunies, ce que nous avons appelé des « circonstances particulières », l'OQTF peut ne pas être prononcée. Je fais toute confiance au Gouvernement pour prendre les décrets précisant ce que sont ces circonstances. Et nous n'avons pas changé les règles d'attribution du titre « étranger malade ». Cela compliquera-t-il la procédure ? Comme il s'agira d'une même procédure, on gagnera du temps.

Si nous n'adoptons pas le texte de la commission des lois, le débat sera clos et nous ne pourrons essayer de trouver un terrain d'entente en CMP.

Je propose que la commission des lois se réunisse pour examiner l'amendement qu'a annoncé le Gouvernement.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Il faudra, pour que l'obligation de quitter le territoire français soit exécutée, que le préfet ouvre un dossier, statue sur le délai de départ et le pays de renvoi -c'est la directive « Retour ». Un recours supplémentaire, un délai supplémentaire... L'amendement du Gouvernement ? Efficacité et zéro risque juridique... La commission des lois l'a déjà examiné.

Mme Catherine Tasca.  - La situation d'inexécution des obligations de quitter le territoire français n'est pas satisfaisante mais je fais confiance au Gouvernement pour y remédier. Je souscris aux amendements de Mme Létard et M. Leconte.

Assimiler décision de rejet de l'asile et obligation de quitter le territoire français crée une confusion entre demandeurs d'asile et immigration irrégulière d'une part, entre institutions d'autre part. Nous devons veiller à la clarté de la loi. Cette confusion ne peut qu'entretenir la défiance de nos concitoyens à l'égard de la loi et de ceux qui la font. À l'Ofpra et à la CNDA de statuer sur les demandes d'asile, au préfet la charge de délivrer les OQTF.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois.  - La commission des lois a en effet examiné l'amendement n°240 du Gouvernement, qui n'est pas nouveau... Il crée une faculté, non une obligation pour le préfet...

Un large accord se dégage pour adopter l'alinéa 18. Reste l'alinéa 17. Si nous voulons nous rapprocher d'une rédaction consensuelle, je propose d'adopter le texte de la commission des lois et de mettre à profit le délai qui nous sépare de la CMP. (Exclamations sur les bancs socialistes) Ainsi le Sénat aura-t-il exprimé sa position politique. Je suggère à Mme Létard de retirer son amendement... (Mêmes mouvements)

M. Michel Mercier.  - Nous sommes, dans cette situation inextricable, à peu près d'accord sur le fond. Pour trouver une solution, il faut se respecter et se faire confiance. La commission des lois veut qu'il n'y ait plus aucun délai entre le rejet définitif, administratif ou juridictionnel, d'une demande d'asile et une obligation de quitter le territoire français. Nous sommes d'accord pour réduire les délais au maximum mais ce n'est pas qu'une question de droit, c'est aussi une question d'humanité.

Si le rejet de la demande vaut obligation de quitter le territoire français, cela ne réduira pas les délais. Une décision de rejet par l'Ofpra peut être contestée devant la CNDA, et en cassation devant le Conseil d'État. Le recours contre la décision d'éloignement, lui, donne lieu à la saisine du juge de l'annulation, qui n'a pas les mêmes pouvoirs. Il faut bien distinguer ces deux types de contentieux.

Le ministre a dit qu'il détenait la solution, mais celle qui propose n'est pas complète.

Le droit d'asile doit être transpartisan. Recherchons une solution en dehors de toute considération partisane. Je souhaite en ce sens que M. le président Bas précise sa proposition et que le Gouvernement y travaille, avec la commission des lois, d'ici à la réunion de la CMP.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - L'intervention de M. Mercier, très intéressante, nous fait progresser. Le texte réglementaire d'application est sans ambiguïté : le préfet doit statuer dans un délai d'un mois. Je suis tout prêt à sous-amender pour remplacer « peut » par « doit » si cela lève toute ambigüité. (« Très bien ! » sur les bancs socialistes)

Mme Valérie Létard.  - Il est bien difficile d'intervenir à ce moment du débat. (Exclamations sur les bancs socialistes) Je veux avant tout saluer le travail accompli par la commission des lois, qui a considérablement amélioré le texte pour rendre les procédures plus simples et plus efficaces : nous sommes tombés d'accord sur plus de 200 amendements, je tiens à le souligner.

Mais si mon groupe a déposé cet amendement n°37 rectifié bis, c'est que certaines questions restent sans réponse, dans le texte du Gouvernement comme dans celui de la commission. Oui, il y a ici un lien entre asile et immigration clandestine. La fermeté est indispensable si nous voulons décourager les filières et préserver notre système d'asile. Cela passe par le raccourcissement des délais.

Je ne suis pas juriste. J'ai tenu à entendre tous les experts et acteurs de l'asile. Je fais confiance au président de la commission des lois. (On s'en désole sur les bancs socialistes) J'ai assez montré que j'étais animée par l'intérêt général !

La réflexion doit se poursuivre d'ici la CMP. Si le texte définitif ne nous convient pas, nous le dirons. Trouvons ensemble, avec le Gouvernement et l'Assemblée nationale, une solution humaine et efficace. (Applaudissements au centre et à droite)

L'amendement n°37 rectifié bis est retiré.

M. Jean-Yves Leconte.  - Oui, la séance publique devrait être le lieu d'émergence de ces solutions transpartisanes que M. Mercier a appelé de ses voeux. Nos débats ont fait apparaître les problèmes juridiques soulevés par le texte de la commission. Pourquoi ne pas l'amender, ici et maintenant ?

À nos yeux, c'est un point dur. J'appelle à la responsabilité de chacun : que le vote sur cet amendement nous permette de donner, lors du vote solennel mardi prochain, une image de rassemblement.

Mme Catherine Tasca.  - Je remercie Mme Létard de l'état d'esprit qu'elle a constamment manifesté. Mais je regrette moi aussi qu'au terme de nos débats dans l'hémicycle, le Sénat ne prenne pas clairement position, en séance publique, au lieu de s'en remettre à la CMP. (Applaudissements sur les bancs socialistes, Mme Esther Benbassa applaudit aussi)

Mme Éliane Assassi.  - Très bien !

Mme Evelyne Yonnet.  - M. le ministre peut-il redéposer son amendement ?

M. Roger Karoutchi, rapporteur pour avis de la commission des finances.  - Je regrette que la commission des lois et le Gouvernement ne soient pas parvenus dès aujourd'hui à un accord. La rédaction de la commission des lois pose peut-être problème, mais l'amendement du Gouvernement aussi : si le préfet « peut » et ne « doit » pas statuer immédiatement, les délais ne diminueront pas. Puisque l'amendement de Mme Létard a été retiré, nous suivrons la commission.

L'amendement n°143 n'est pas adopté.

À la demande du groupe socialiste, l'amendement n°75 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici le résultat du scrutin n°186 :

Nombre de votants 340
Nombre de suffrages exprimés 339
Pour l'adoption 151
Contre 188

Le Sénat n'a pas adopté.

Les amendements identiques nos76 et 239 ne sont pas adoptés.

M. Jean-Yves Leconte.  - Cet article, tel qu'il résulte des travaux de la commission, n'est ni juridiquement correct ni efficace. La majorité sénatoriale l'a transformé en communiqué de presse... Nous ne le voterons pas.

L'article 14 est adopté.

La séance, suspendue à 17 h 55, reprend à 18 h 10.