Renseignement (Procédure accélérée - Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif au renseignement et de la proposition de loi organique relative à la nomination du président de la commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (procédure accélérée).

Discussion des articles du projet de loi (Suite)

ARTICLE 3 (Appelé en priorité) (Suite)

M. le président.  - Amendement n°61, présenté par Mme Cukierman et les membres du groupe CRC.

Alinéas 2 à 20

Supprimer ces alinéas.

Mme Cécile Cukierman.  - La sonorisation et la captation d'images et de données informatiques sont des techniques très intrusives. La commission des lois a renforcé les garanties, et c'est heureux, mais le juge judiciaire devrait en contrôler le recours et la mise en oeuvre.

M. le président.  - Amendement n°104, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

Alinéas 4, 9 et 16, première phrase

Après les mots :

les renseignements,

insérer les mots :

relatifs aux finalités prévues aux 1°, 4° et 6° de l'article L. 811 - 3

Mme Esther Benbassa.  - L'utilisation des techniques de recueil de renseignements les plus intrusives ne doit être possible que pour certaines finalités : l'indépendance nationale, l'intégrité du territoire et la défense nationale, la prévention du terrorisme, et la prévention de la criminalité et de la délinquance organisées.

L'amendement n°17 rectifié quater n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°83, présenté par M. Hyest.

Alinéa 5

Remplacer les mots :

deux mois

par les mots :

trente jours

M. Jean-Jacques Hyest.  - Nous avons abordé hier les cas de recours aux techniques intrusives pour le terrorisme mais l'article 3 concerne tous les cas où il est possible.

La sonorisation d'un milieu privé avec enregistrement vidéo, ce n'est tout de même pas anodin... Je reste convaincu que la mesure la plus protectrice de la vie privée reste la restriction de la durée de recours à ces techniques. Un renouvellement plus fréquent contraindrait le service de renseignement à faire connaître plus rapidement ce qu'il a pu recueillir comme données utiles et à justifier l'éventuelle poursuite de l'opération. Si rien n'est obtenu, celle-ci doit cesser dans un délai raisonnable. Une durée de deux mois n'est pas conforme au principe de proportionnalité dont la prise en considération est prévue par la loi.

M. le président.  - Amendement identique n°160 rectifié, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste et apparentés.

M. Jean-Pierre Sueur.  - C'est le même amendement, présenté dans le même état d'esprit mais il est également motivé par des considérations de constitutionnalité. Depuis 1999, le Conseil constitutionnel considère que la vie privée est protégée par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Dans sa décision du 2 mars 2004, le Conseil estime qu'il incombe au législateur de concilier les mesures de sauvegarde de l'ordre public et la protection des libertés, dont le secret des correspondances, dans quoi il range le respect de la vie privée. Une durée de deux mois ne serait pas conforme au principe de proportionnalité.

L'amendement n°18 rectifié quater n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°66 rectifié bis, présenté par MM. Malhuret et Commeinhes, Mme Micouleau, MM. B. Fournier, Delattre, Falco et Fouché, Mme Lamure, MM. D. Laurent, Lenoir et de Legge, Mme Morhet-Richaud, MM. Bignon et Milon, Mmes N. Goulet et Cayeux, MM. Vial, Laufoaulu, Cadic et Kern, Mmes Imbert et Deroche et MM. Dériot, Carle et Gremillet.

Après l'alinéa 11

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« ...  -  Les dispositifs techniques utilisés à cette fin garantissent que les seules informations captées sont celles effectivement échangées lors d'une conversation sortant du lieu privé. Toute information recueillie accidentellement par ces dispositifs hors de ce cadre est détruite immédiatement.

M. Claude Malhuret.  - Un même outil de captation des informations émises et reçues par un système informatique peut être utilisé pour deux finalités distinctes : la captation des communications et celle de paroles prononcées à titre privé ou confidentiel, ou d'images dans un lieu privé. Cette deuxième finalité est organisée par l'article L. 853-1.

Les outils mis en oeuvre au titre de l'article L. 853-2 ne doivent pas être utilisés pour obtenir des informations qui auraient nécessité la mise en oeuvre des dispositions de l'article L. 853-1, plus protectrices, en restreignant leurs capacités de captation aux moments où une communication est effectivement en cours.

M. le président.  - Amendement n°21 rectifié ter, présenté par MM. Hyest, Allizard, G. Bailly, Béchu, Bignon, Bizet et Bonhomme, Mme Bouchart, MM. Bouchet, Bouvard, Buffet, Calvet et Cambon, Mme Canayer, MM. Cantegrit et Cardoux, Mme Cayeux, MM. César, Chaize, Charon, Chasseing, Chatillon, Commeinhes, Cornu, Dallier, Danesi, Darnaud et Dassault, Mmes Deroche, Deromedi, Des Esgaulx, Deseyne et di Folco, M. Doligé, Mme Duchêne, M. Dufaut, Mme Duranton, MM. Duvernois et Emorine, Mme Estrosi Sassone, MM. B. Fournier, J.P. Fournier, Frassa et Frogier, Mme Garriaud-Maylam, MM. J.C. Gaudin, J. Gautier, Genest et Gilles, Mme Giudicelli, MM. Gournac, Grosperrin, Guené, Houel et Houpert, Mme Hummel, MM. Huré et Husson, Mme Imbert, M. Joyandet, Mme Kammermann, MM. Karoutchi et Kennel, Mme Lamure, MM. Laufoaulu, D. Laurent, Lefèvre, Legendre, de Legge, Lenoir, P. Leroy et Longuet, Mme Lopez, MM. Magras, Malhuret, Mandelli, A. Marc, Masclet et Mayet, Mme Mélot, MM. Milon et de Montgolfier, Mme Morhet-Richaud et MM. Morisset, Mouiller, Nachbar, Nègre, de Nicolaÿ, Nougein, Paul, Pellevat, Pierre, Pillet, Pointereau, Portelli, Reichardt, Revet, Saugey, Savary, Sido, Vasselle, Vendegou, Vogel, Retailleau et Gremillet.

Alinéa 12

Rédiger ainsi cet alinéa :

« II.  -  Par dérogation à l'article L. 821-4, l'autorisation de mise en oeuvre de la technique mentionnée au 1° du I du présent article est délivrée pour une durée maximale de trente jours et celle mentionnée au 2° du même I pour une durée maximale de deux mois. L'autorisation est renouvelable dans les mêmes conditions de durée.

M. Jean-Jacques Hyest.  - Coordination.

M. le président.  - Amendement n°40, présenté par M. Leconte.

Alinéa 12

1° Remplacer les mots :

de deux

par les mots :

d'un

2° Compléter cet alinéa par les mots :

pour une même durée et après autorisation judiciaire

M. Jean-Yves Leconte.  - Capter toutes les données stockées dans un ordinateur, c'est un acte grave... Lors de l'examen du projet de loi antiterroriste, les juges antiterroristes nous ont fait part de leur manque de moyens juridiques. Ici tout est possible aux services de renseignements ! Certes, il s'agit de prévenir et pas de punir, mais il y a des limites.

Si l'on constate au bout d'un mois qu'il n'y a rien, il n'est pas utile de poursuivre la surveillance ; s'il y a quelque chose, un juge judiciaire doit être saisi pour proroger l'écoute.

M. le président.  - Amendement n°105, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

Après l'alinéa 15

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« ... - Le nombre maximal de sonorisations pouvant être autorisées simultanément est arrêté par le Premier ministre après avis de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement. La décision fixant ce contingent et sa répartition entre les ministères mentionnés à l'article L. 821-2 est portée à la connaissance de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement.

Mme Esther Benbassa.  - Il faut limiter le nombre de sonorisations autorisées : c'est une technique extrêmement attentatoire aux libertés individuelles. Jean-Marie Delarue, président de la CNCIS, le dit bien : « Une société où il y a 200 appartements sonorisés, on peut penser que c'est pour les criminels et les terroristes. Une société où il y en a 200 000 c'est La Vie des autres ».

M. le président.  - Amendement n°169, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 18, seconde phrase

Compléter cette phrase par les mots :

sans préjudice du neuvième alinéa de l'article L. 821 - 2

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur.  - Cet amendement préserve l'hypothèse dans laquelle le lieu faisant l'objet de l'intrusion est désigné par référence aux personnes faisant l'objet de la demande, prévue à l'article L. 821-2 du code de la sécurité intérieure.

M. le président.  - Amendement n°76, présenté par le Gouvernement.

Après l'alinéa 19

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque l'introduction mentionnée au I et portant sur un lieu privé à usage d'habitation est autorisée après avis défavorable de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, le Conseil d'État est immédiatement saisi. La formation collégiale, le président de la formation restreinte mentionnée à l'article L. 773 - 2 ou le membre qu'il délègue statue dans un délai de vingt-quatre heures à compter de cette saisine. La décision d'autorisation du Premier ministre ne peut être exécutée avant que le Conseil d'État n'ait statué, sauf si elle a été délivrée au titre du 4° de l'article L. 811 - 3 du présent code et que le Premier ministre a ordonné sa mise en oeuvre immédiate.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Le Gouvernement tient à renforcer encore les garanties en exigeant la saisine immédiate du Conseil d'État lorsque l'introduction a été autorisée après avis défavorable de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement. Sauf en matière de terrorisme, cette saisine suspend l'exécution de l'intrusion ainsi autorisée.

M. le président.  - Sous-amendement n°196 à l'amendement n° 76 du Gouvernement, présenté par M. Bas, au nom de la commission des lois.

Amendement n° 76, alinéa 3

1° Première phrase

Après les mots :

immédiatement saisi

insérer les mots :

par le président de la commission

2° Deuxième phrase

a) Remplacer le mot :

collégiale

par les mots :

spécialisée mentionnée à l'article L. 773-2 du code de justice administrative

b) Remplacer les mots :

à l'article L. 773-2

par les mots :

au même article

M. Philippe Bas, rapporteur de la commission des lois.  - L'amendement n°76 est opportun, mais le Conseil d'État devrait être saisi par le président de la CNCTR. L'amendement du Gouvernement enferme le Premier ministre dans une schizophrénie : celui-ci devrait saisir le Conseil d'État de son propre refus de suivre l'avis défavorable de la CNCTR. Le parallèle avec la saisine par le président de la République du Conseil constitutionnel après l'examen parlementaire est trompeur car cette saisine laisse au Conseil sa faculté d'appréciation, tandis que celle du juge administratif vaut demande expresse d'annulation.

Avis défavorable à l'amendement n°61, de même qu'à l'amendement n°104. Avis favorable aux amendements identiques nos83 et 160 rectifié. L'amendement n°66 rectifié bis est incorrectement rédigé : avis défavorable. L'amendement n°21 rectifié ter est très intéressant : avis favorable. L'amendement n°40 est contraire à la Constitution : le juge judiciaire n'a pas compétence pour juger de la légalité de mesures de police. L'amendement n°105 contraindrait fortement l'activité des services : avis défavorable, ainsi qu'à l'amendement n°169.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Pourquoi êtes-vous défavorable à l'amendement n°169 ?

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Parce qu'il introduit une précision inutile. L'article L. 821-2 du code de la sécurité intérieure s'applique par principe et que l'article L. 853-3 crée une obligation de moyens. Nos motifs sont donc strictement de nature légistique.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Dans ces conditions, je le retire. Ces amendements sont motivés par les craintes que suscitent les techniques les plus intrusives. Le régime qui leur est applicable est extrêmement strict. L'autorisation d'y recourir ne sera délivrée que s'il n'y a aucune alternative possible ; elle sera limitée à deux mois, et non quatre dans le droit commun. La CNCTR sera saisie.

Je ne crois pas qu'il y ait la schizophrénie dénoncée par le rapporteur mais je ne me battrai pas là-dessus : je m'en remettrai à la sagesse. Ce qui compte, c'est que le juge soit saisi.

Nous apportons des garanties qui devraient apaiser vos craintes. Le Conseil constitutionnel admet l'utilisation de ces techniques pourvu que leur usage soit adapté et proportionné. L'avis est donc défavorable aux amendements nos61 et 104, ainsi qu'aux amendements identiques nos83 et 160 rectifié. Ne risquons pas de priver les services de renseignement d'efficacité. Pour la même raison, ne contingentons pas l'emploi de ces techniques qui sera, nécessairement, limité : avis défavorable à l'amendement n°21 rectifié ter. Sur les professions protégées, le texte du Gouvernement a été substantiellement enrichi par l'Assemblée nationale et la commission des lois du Sénat. La CNCTR sera saisie collégialement et le contenu des comptes rendus lui sera transmis. Un équilibre a été trouvé. Je partage les craintes de M. Raffarin sur la rupture de cet équilibre.

Avis défavorable aux amendements nos66 rectifié bis, qui est techniquement impraticable, 40 et 105.

L'amendement n°61 n'est pas adopté.

L'amendement n°104 n'est pas adopté.

Les amendements identiques nos83 et 160 rectifié sont adoptés.

M. Claude Malhuret.  - Votre argument ne tient pas. Il suffirait que l'interception se coupe automatiquement dès que la communication est coupée. Un étudiant en informatique de première année saurait le faire...

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Votre rédaction dit le contraire car elle vise les communications sortantes.

M. Claude Malhuret.  - Mais non !

L'amendement n°66 rectifié bis n'est pas adopté.

L'amendement n°21 rectifié ter est adopté.

L'amendement n°40 n'a plus d'objet.

L'amendement n°105 n'est pas adopté.

L'amendement n°169 est retiré.

Le sous-amendement n°196 est adopté.

L'amendement n°76, modifié, est adopté.

Mme Cécile Cukierman.  - L'acquisition de ces nouvelles techniques impliquera de nouvelles ressources et des moyens de contrôle supplémentaires. Les spécialistes du renseignement avaient relevé la difficulté à prévoir les menaces d'attentats au vu de la masse des données à traiter. Quels seront les moyens humains supplémentaires ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Le Premier ministre a pris des mesures dès janvier pour augmenter les moyens humains affectés aux services de renseignement. Depuis le début du quinquennat, les effectifs ont déjà été augmentés de 432. Au terme du quinquennat, 1 500 nouveaux emplois seront créés : 500 pour la direction centrale du renseignement territoriale, 500 pour la sécurité intérieure, 400 pour les autres services. Une enveloppe de 233 millions favorisera l'équipement numérique des services, l'acquisition de véhicules, etc. C'est un effort considérable pour que nos services puissent travailler dans de bonnes conditions.

L'article 3, modifié, est adopté.

M. le président.  - Nous revenons à l'ordre normal de la discussion, à l'amendement n°92 à l'article premier.

ARTICLE PREMIER (Suite)

M. le président.  - Amendement n°92, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 27

Compléter cet alinéa par les mots :

lorsque les renseignements ne peuvent être recueillis par un autre moyen légalement autorisé

Mme Esther Benbassa.  - Le recours aux techniques de recueil de renseignements envisagées par le présent texte ne doit être possible que lorsque les renseignements ne peuvent être recueillis par un autre moyen légalement autorisé. Nous tenons à ce que ce principe soit affirmé dans la loi.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Nous avons prévu que l'usage d'une technique de renseignement ne sera légal que si elle est proportionnée. Inutile de surcharger la CNCTR en lui demandant de se prononcer, en opportunité, chaque fois sur chaque technique.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Avis défavorable à cet amendement qui est moins protecteur que le texte du Gouvernement. La meilleure garantie pour les citoyens est le respect du principe de proportionnalité.

L'amendement n°92 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°177 rectifié, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 28, seconde phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

Chaque ministre ne peut déléguer cette attribution individuellement qu'à des collaborateurs directs habilités au secret de la défense nationale.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - S'il s'avère nécessaire d'augmenter le nombre de personnes à qui chaque ministre peut déléguer cette attribution, encore faut-il que ces délégataires soient habilités « Secret défense » et placés sous l'autorité du ministre dont ils dépendent. 

M. Philippe Bas, rapporteur.  - La commission des lois a modifié l'article 821-4 sur la liste des personnes délégataires. Cet amendement, par parallélisme, modifie l'article 821-1. L'idée est de circonscrire le nombre de personnes habilitées pour éviter la constitution d'une bureaucratie du Renseignement régie par l'entre soi, ce qui diluerait la responsabilité. Avis favorable.

L'amendement n°177 rectifié est adopté.

M. le président.  - Amendement n°132 rectifié, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste et apparentés.

I. - Alinéa 32

Rédiger ainsi cet alinéa :

« 2° La finalité poursuivie ;

II. - Alinéa 37

Après les mots :

au regard de

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

la finalité poursuivie.

M. Jean-Pierre Sueur.  - L'article L. 821-2 énonce la liste des précisions que doivent comporter les demandes de mise en oeuvre sur le territoire national des techniques du recueil du renseignement.

La demande ainsi que son renouvellement doivent préciser la ou les finalités poursuivies. Nous souhaitons associer à chaque demande une seule finalité afin de faciliter le contrôle et donc de renforcer les garanties, en obligeant les services de renseignement à motiver à chaque fois leur demande.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Vu la porosité entre le terrorisme et la criminalité organisée, une même personne peut être surveillée à ce double titre. Votre amendement serait contre-productif car il est opportun que la CNCTR dispose d'une vision globale pour se prononcer. Retrait.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Si vous me garantissez que chaque finalité sera précisée dans la demande, je retire mon amendement.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Je vous le garantis.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Vu la précision et la force de cet engagement solennel, je peux retirer mon amendement.

L'amendement n°132 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°133 rectifié, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Après l'alinéa 38

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque deux membres au moins lui en font la demande, le président réunit la commission en formation plénière. Elle formule le cas échéant un nouvel avis qui remplace l'avis initial.

M. Jean-Pierre Sueur.  - La commission des lois a supprimé la faculté introduite à l'Assemblée nationale permettant à deux membres de la CNCTR qui contestent l'avis émis par le président de la commission ou l'un des membres chargés de le suppléer, de demander au président de réunir la commission, laquelle doit statuer dans un délai de trois jours ouvrables suivant l'avis initial. Dans ce cas, le nouvel avis émis par la commission remplace l'avis initial.

Le Sénat n'a eu de cesse d'accroître les garanties, ne restons pas en deçà de l'Assemblée nationale sur celle-ci !

M. Philippe Bas, rapporteur.  - La commission des lois est sensible à ce propos tenu par un de ses membres les plus éminents : oui, nous nous sommes efforcés de renforcer les garanties offertes aux citoyens. Mais cet amendement n'y contribue pas : il organise plutôt un bégaiement de la CNCTR. Si un avis est donné, il faut passer à l'étape suivante, le recours devant le Conseil d'État. Nous l'avons rendu effectif en prévoyant une saisine par trois membres seulement de la CNCTR. Ne risquons pas d'introduire du désordre dans les procédures. Avis défavorable.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice.  - L'avis du Gouvernement est plus nuancé. La commission des lois est attachée à la fluidité de la décision. Le Gouvernement avait autorisé la CNCTR à siéger selon les cas en formation restreinte ou plénière. Sagesse.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Respectons les personnes atteintes de bégaiement ! (Sourires entendus) Certaines surmontent leur bégaiement avec aisance, pas toutes.

La réponse du rapporteur est inappropriée. Lorsque le Gouvernement demande une seconde délibération, nul ne dit que le Parlement bégaie ! Notre droit prévoit aussi des possibilités de recours. Ce n'est pas non plus un bégaiement. Nous sommes très attachés à l'existence d'une deuxième lecture ; les gouvernements un peu moins mais ils ne parlent pas non plus de bégaiement.

M. Jean-Jacques Hyest.  - Un climat de confiance doit prévaloir au sein de la CNCTR. D'autre pays reconnaissent les opinions dissidentes ; dans notre tradition, la loi de la majorité prévaut. Des recours restent toujours possibles. Ne créons pas un climat de suspicion a sein de la CNCTR.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - La comparaison avec la seconde délibération ne tient pas...

M. Jean-Jacques Hyest.  - Comparaison n'est pas raison...

M. Philippe Bas, rapporteur.  - L'avis de la CNCTR est créateur de droits et d'effets juridiques, ce n'est pas le cas de la première délibération.

M. Jean-Pierre Sueur.  - C'est juste. Je me suis laissé aller à une certaine facilité. (Sourires)

L'amendement n°133 rectifié n'est pas adopté.

La séance est suspendue à 13 h 10.

présidence de M. Gérard Larcher

La séance reprend à 15 heures.