Droit à la formation des élus (Procédure accélérée - Suite)

Discussion générale (Suite)

Mme Catherine Di Folco, rapporteur de la commission des lois .  - Ce texte est attendu. Notre délégation aux collectivités territoriales en a recommandé le dispositif et la commission des lois l'a approuvé en le modifiant.

Le droit individuel à la formation (DIF) des élus est de vingt heures sur la durée du mandat, financé par une cotisation obligatoire collectée par un organisme national ad hoc. Cependant, le décret en Conseil d'État nécessaire pour sa mise en oeuvre n'a pas été pris. D'où cette proposition de loi qui crée le fonds de financement du DIF, alimenté par un versement de 1 % maximum sur les indemnités perçues par 190 000 des 550 000 élus. Le texte en confie la gestion à la Caisse des dépôts et consignations et en règle les modalités techniques, en particulier les cotisations et leur usage.

Formations qualifiantes et professionnalisantes seraient accessibles et la formation pourrait être délivrée après la fin du mandat, dans un délai cependant limité. Un plafonnement serait instauré.

La commission des lois a clarifié le texte, notamment pour bien distinguer le financement et les bénéficiaires. Le financement est assis sur les cotisations mais le dispositif est accessible à tous les élus.

Un amendement du Gouvernement à la loi de finances rectificative pour 2015, censuré par le Conseil constitutionnel, est repris par l'article 3 de ce texte. Nous avons modifié l'intitulé en conséquence.

Le Gouvernement entend reporter l'application de l'article 42 de la loi NOTRe, en lien avec la rationalisation de la carte des EPCI ; cependant, il n'est guère équitable de changer les règles en cours de mandat pour les élus actuels : pourquoi ne pas étendre les règles jusqu'en 2020 ? Nous attendons une ouverture du Gouvernement ; nous comptons sur vous, madame la ministre ! (Applaudissements au centre et à droite)

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique .  - Le Gouvernement a prêté beaucoup d'attention à cette belle proposition de loi. Nous avons toujours été un peu en retard en ce qui concerne le statut de l'élu.

On ne dit pas assez que beaucoup d'élus sont bénévoles, que d'autres n'ont que de très faibles indemnités.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Voire pas d'indemnités du tout !

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - Leur droit à la formation est très limité, ce qui handicape certains dans l'exercice de leur mandat ; des élus de petites communes sont souvent démunis face à des questions simples.

L'article premier, très bien travaillé, crée un fonds dont la question est confiée, en toute transparence, à la Caisse des dépôts et de consignation, très proche des collectivités locales. C'était un oubli de la loi NOTRe.

On nous a demandé de réparer les effets d'un accident parlementaire. Les présidents de certains syndicats intercommunaux ont perdu leurs indemnités. Le Gouvernement a donc accepté de reporter l'entrée en vigueur de la réforme au 1er janvier 2018. J'ai un arbitrage qui suit ce qui est dans la loi. C'était soit le 1er janvier 2018, soit 2020. C'était lié à la question du transfert de compétences. D'ici 2020, nous avons le temps de voir s'il convient de faire subsister certains syndicats de périmètre inférieur à celui de l'intercommunalité. Le Sénat se saisira sans doute du sujet. Ma proposition personnelle était 2018 ; il faudra revoir l'entièreté du sujet : nos concitoyens sont très attentifs à ces questions, et les syndicats concernés doivent répondre à une réelle utilité - et non parer à la disparition de vice-présidences... Il faudra revoir cela de près.

Aujourd'hui, les comptables ne peuvent plus légalement payer les présidents de syndicat ; Christian Eckert, dans sa grande sagesse, leur a pourtant demandé de le faire, dans l'attente de cette proposition de loi. Il faut donc aller vite, et espérer un vote conforme. Le texte doit rester principalement consacré au droit individuel à la formation. (Applaudissements)

M. René Vandierendonck .  - Ce texte vient utilement compléter le volet formation de la loi du 31 mars 2015. La question du statut de l'élu est récurrente. Lors des États généraux de la démocratie locale, la grande majorité des élus, tout en disant que l'exercice de leur mandat leur apportait beaucoup de satisfaction, avait exprimé des attentes à ce sujet. Aucun véritable statut de l'élu n'avait en effet vu le jour, malgré la loi du 2 mars 1982.

La loi Sueur-Gourault du 31 mars 2015 a marqué une nouvelle étape : création d'un statut de salarié protégé, facilitation de l'accès des salariés du privé aux fonctions électives, crédit d'heures, validation des acquis de l'expérience lors de l'exercice d'un mandat local, etc...

Les élus peuvent ainsi mieux concilier leurs activités professionnelles et l'exercice de leur mandat. Cette loi a aussi étendu aux élus de la DIF, dont la présente proposition de loi définit les modalités. Merci à la rapporteur d'avoir apporté des précisions à l'article premier.

En 1982, Marcel Debarge affirmait ici même que la formation des élus était la conséquence nécessaire de la fin de la tutelle de l'État et des nouvelles missions qui leur étaient confiées.

Il faut aussi penser à tous ceux qui hésitent à se présenter aux élections de peur de ne pas retrouver du travail à l'issue de leur mandat. Le DIF leur permettra de préparer leur réinsertion professionnelle.

À cette question s'est greffée celle des syndicats intercommunaux de petite taille, dont les présidents et vice-présidents ont vu leurs indemnités supprimées du jour au lendemain, à la suite d'un amendement parlementaire à l'Assemblée nationale.

Il faut donc rétablir l'équité. N'oublions pas que ces syndicats emploient aujourd'hui 65 000 agents, soit un tiers du personnel des EPCI. Les schémas de coopération intercommunale créés par la loi NOTRe seront un facteur de rationalisation.

Vous vous entêtez, madame la Ministre, malgré le Premier ministre, à ne pas vouloir rétablir l'intégralité de ces indemnités jusqu'en 2020. Je demande que soit respecté l'engagement du Premier ministre. C'est en faisant confiance aux élus locaux - et aux préfets - que nous atteindrons l'objectif de rationalisation. (Applaudissements)

J'ai passé la moitié de la nuit à tenter de vous convaincre, madame la Ministre. Je vous estime mais, comme vous, je le dis quand je ne suis pas d'accord.

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - Mon amendement a été déposé !

M. Ronan Dantec .  - Cette proposition de loi répond à la volonté de voir mettre en oeuvre rapidement le DIF des élus, qui leur servira notamment à préparer leur réinsertion professionnelle. Le DIF contribue à la construction d'un statut de l'élu, encore bien maigre... Nous ouvrirons ainsi l'accès aux mandats locaux et améliorerons la représentativité des assemblées. Tout citoyen devrait pouvoir s'emparer de la chose publique ! Ce texte est aussi un message à l'adresse des 550 000 élus locaux qui se démènent au préjudice, parfois, de leur vie professionnelle et familiale.

La petite musique selon laquelle « il y a trop d'élus, trop payés » devient assourdissante. Pourtant, la plupart des élus sont bénévoles ! Je regrette que certains conseils régionaux aient décidé de réduire les indemnités de leurs membres, alimentant ce discours. Une grille nationale définie par le Parlement serait préférable, tant les situations sont aujourd'hui hétérogènes. (Assentiment sur divers bancs)

Certains élus rencontrent des difficultés pour se faire rembourser leurs formations d'élus : frais de transport, formation des élus d'opposition. Ne pourriez-vous adresser un courrier à ce sujet aux exécutifs locaux, madame la Ministre ?

Le groupe écologiste soutiendra cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs écologistes et du groupe socialiste et républicain)

M. Pierre-Yves Collombat .  - Mon intervention sera en mode mineur... (Sourires)

M. Michel Mercier.  - Pourvu que ça dure ! (Sourires)

Mme Jacqueline Gourault.  - Cela m'étonnerait !

M. Pierre-Yves Collombat.  - Il s'agit ici d'une proposition de rattrapage, qui complète la loi de mars 2015 et répare l'un des dégâts causés par la loi NOTRe... Il n'y a pas lieu de gloser.

Compte tenu cependant de la modicité des indemnités de la plupart des élus - non revalorisées depuis 2002, et désormais assujetties à cotisations sociales - il est choquant de leur imposer une nouvelle cotisation pour assurer la couverture d'un risque découlant de leur engagement civique.

D'où mon amendement de suppression des alinéas 7 à 10 de l'article premier.

Devant les États généraux de la démocratie locale, François Hollande déplorait l'absence d'un statut de l'élu, singularité française qui subsiste. Le quinquennat va même se solder par une baisse de fait des indemnités !

Certains élus seront même privés de leurs indemnités syndicales. Et l'on y ajoute la litanie moralisatrice de la charte de l'élu local ! Fleurs et litanies, cela va finir par devenir funéraire...

La grande majorité du RDSE s'abstiendra.

Mme Jacqueline Gourault .  - La proposition de loi que j'avais déposée avec M. Sueur a conforté plusieurs aspects du statut de l'élu local - car il existe bel et bien, monsieur Collombat : conciliation du mandat avec l'activité professionnelle, DIF, préparation de la réinsertion professionnelle des élus : telles étaient nos priorités. Ne prétendons pas que rien n'existe, alors que certains élus ignorent leurs droits - on fait face à des maires récalcitrants ! Un document récapitulatif du ministère serait utile.

Merci à Antoine Lefèvre qui est à l'origine du DIF des élus, à Catherine Di Folco qui en a précisé le contenu, à Jean-Pierre Sueur qui a rédigé cette proposition de loi pour rendre le DIF effectif.

Nous en profitons pour régler un problème surgi lors de l'examen en deuxième lecture de la loi NOTRe... à l'Assemblée nationale. J'appellerai cela une malfaçon : les présidents et vice-présidents de syndicats infracommunautaires ne pouvaient plus percevoir d'indemnités ! Du fait de l'article 40, seul le Gouvernement pouvait y remédier et je le remercie de l'avoir fait. Réduire le nombre de syndicats est légitime : certains sont des coquilles vides, d'autres ont le même périmètre que des intercommunalités à naître et certaines de leurs compétences seront désormais assumées de droit par les intercommunalités, comme l'eau ou l'assainissement. Mais on aura encore besoin de syndicats, scolaires notamment. Il est normal que les présidents et vice-présidents soient rémunérés.

Mme Catherine Di Folco.  - Indemnisés.

Mme Jacqueline Gourault.  - Leur dévouement doit être reconnu. La situation n'est pas la même en Île-de-France et dans le Loiret...

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - Ou le Finistère !

Mme Jacqueline Gourault.  - Reste la question de la date... Sortirez-vous de votre poche l'amendement 2020, madame la ministre ? Cela nous ferait grand plaisir. (Applaudissements)

M. Christian Favier .  - L'article 15 de la loi du 31 mars 2015 a instauré un DIF des élus locaux destiné, par exemple, à préparer leur reconversion professionnelle. Un décret en Conseil d'État devait en déterminer les modalités d'application, il n'est jamais venu - le décret du 26 octobre 2015 ne traite que du crédit d'heures des élus municipaux et communautaires. Cette proposition de loi supplée-t-elle à ce décret ? Est-ce la raison de l'engagement de la procédure accélérée ? Un décret restera nécessaire...

Et cette proposition de loi sert de véhicule pour revenir sur la suppression des indemnités des présidents et vice-présidents de certains syndicats par la loi NOTRe. L'objectif de supprimer les petits syndicats n'est pas remis en cause. Nous y restons hostiles : pourquoi remplacer des syndicats construits sur la base de projets partagés par des intercommunalités trop grandes ? Nous défendrons la prolongation du versement des indemnités jusqu'en 2020.

Pourquoi, en outre, faire payer leur formation aux élus ?

Malgré tout, le groupe CRC votera ce texte, en rappelant que la question du statut de l'élu reste d'actualité. (Applaudissements à gauche)

M. Antoine Lefèvre .  - Tout arrive... Merci aux auteurs de cette proposition de loi qui donnera enfin aux élus accès à la formation à laquelle ils ont droit, trente ans après les premières lois de décentralisation, vingt ans après la loi de 1992.

Il a fallu un an à l'Assemblée nationale pour inscrire à son ordre du jour la proposition de loi Sueur-Gourault, qui n'a été votée qu'en 2015... et reste inappliquée, l'organisme collecteur du versement destiné à financer le DIF n'ayant pas été désigné. Il n'est que temps de prendre les décrets d'application et de voter cette proposition de loi.

La gestion d'une collectivité territoriale ne s'improvise pas. Or la démocratie représentative suppose que chaque citoyen puisse être élu, et pas seulement les sachants - d'où la nécessité de développer pour tous la culture de la formation.

La Caisse des dépôts et de consignation est un choix évident pour gérer le dispositif, puisqu'elle est déjà en charge du DIF dont disposent tous nos concitoyens.

Je ne reviendrai pas sur la saga des indemnités des présidents et vice-présidents de syndicats, me contentant de dire que je me réjouis de la perspective d'issue positive. (Applaudissements)

Mme Nicole Duranton .  - Cette proposition de loi conforte un dispositif voulu par le Sénat, soit le DIF, par lequel les élus peuvent préparer leur réinsertion professionnelle. Au-delà, la formation des élus est essentielle, comme le rappelait Antoine Lefèvre dans son rapport de 2012, vu la complexité de leurs tâches et la variété des compétences des collectivités territoriales depuis les lois de décentralisation.

L'autre enjeu est celui de l'après-mandat. Les États généraux de la démocratie locale ont révélé la nécessité de créer un véritable statut de l'élu. S'engager dans un mandat local, c'est mettre entre parenthèses sa carrière professionnelle et, surtout si l'on est jeune et encore sans beaucoup d'expérience professionnelle, prendre un gros risque. Le mandat d'élu est assimilable à une profession qui pourrait s'interrompre du jour au lendemain !

Confier la gestion du fonds à la Caisse des dépôts et de consignation est un gage d'efficacité. Le DIF participe aussi au renouvellement de la classe politique, contre la monopolisation et le cumul des mandats dans le temps.

Bref, je suis favorable à cette proposition de loi. (Applaudissements)

M. Jackie Pierre .  - Le proposition de loi Sueur-Gourault reprenant en partie de celle de Mme des Esgaulx et M. Saugey, vise à faciliter l'exercice pour les élus locaux de leur mandat. Une charte de l'élu local prévoit désormais ses droits et ses devoirs, définit la notion de prise illégale d'intérêt. Une meilleure conciliation entre mandat et vie professionnelle a été recherchée, ainsi que des garanties pour la réinsertion professionnelle et un droit à la formation.

Nombre d'élus ont dû renoncer à leurs activités professionnelles. Grâce à Antoine Lefèvre, les élus locaux bénéficient désormais d'un DIF pour préparer leur réinsertion. Le décret du 26 octobre 2015 a précisé la mise en oeuvre du dispositif.

Ce texte complète la loi du 31 mars 2015 en désignant la Caisse des dépôts et consignations come organisme collecteur. Elle a fait la preuve de son expérience en la matière.

Je voterai cette proposition de loi. J'espère qu'elle suscitera des vocations chez les jeunes qui souhaitent s'engager en politique. (Applaudissements au centre et à droite et sur quelques bancs)

Mme Marylise Lebranchu, ministre .  - Monsieur Favier, on ne pouvait désigner par décret un organisme collecteur. Une loi est nécessaire. J'entends vos propositions. Nous travaillons à mieux former les élus sur leurs droits.

Il ne s'agit pas de favoriser les élus comme certains le prétendent sur Internet. Les élus dans les petites communes doivent gérer des questions très variées et complexes sans avoir de services à leur disposition. Ayons le courage de le réaffirmer : nos élus font un travail essentiel en particulier dans nos petites communes où ils ne disposent pas souvent de moyens suffisants, ils sont les relais de la République dans nos territoires.

Je suis d'accord avec la proposition de Mme Gourault pour effectuer un travail transpartisan sur la réalité des indemnités, les choses sont très éloignées de ce qu'on en dit ici ou là !

M. Roland Courteau.  - C'est vrai !

M. Didier Guillaume.  - C'est clair !

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - C'est pourquoi j'avais proposé dans la loi NOTRe l'automaticité des indemnités, pour ne pas avoir à les négocier au coup par coup, ce qui nourrit le populisme. Les indemnités sont nécessaires au renouvellement des élus, à la démocratie elle-même. Le gel du point d'indice s'ajoute au problème des indemnités et les élus sont pénalisés deux fois. Ce n'est pas juste.

L'objectif est de parvenir à un vote rapide pour réparer une lacune s'agissant des présidents de syndicats. Après discussion avec les parlementaires, la date de 2020 a été arrêtée. Attention toutefois à parvenir à un vote conforme.

Il faudra aussi regarder dans les détails : parfois l'indemnité perçue en tant que président d'un syndicat est supérieure à celle perçue en tant que maire. Sur les 14 000 syndicats, 5 000 sont visés.

Il faut aussi regarder compétence par compétence : certains syndicats infracommunautaires exercent des compétences qui ne sont pas exercées par d'autres instances. Une mise à plat est donc nécessaire.

N'est-ce pas le rôle du Sénat ? En tout cas les préfets discutent avec les élus et sont prudents. Les propositions des élus locaux sont d'ailleurs souvent plus ambitieuses.

Ne nous laissons pas influencer par les commentaires populistes qui prolifèrent sur certains sites et sur ceux-ci seulement : nos concitoyens sont la plupart du temps très satisfaits du travail de leurs élus, loin des caricatures véhiculées dans certains médias. (Applaudissements au centre et à gauche)

M. Philippe Bas, président de la commission des lois .  - Vous avez dit que dans certains cas les propositions des élus locaux allaient souvent plus loin que celles du préfet.

Nous avons longuement débattu de la question du seuil des intercommunalités. Or nous nous apercevons à présent que souvent l'esprit de la loi n'est pas respecté : bien des schémas préfectoraux créent des intercommunalités dont la population est très supérieure aux seuils légaux. Je vous mets en garde contre des lendemains difficiles. La taille n'est pas tout. Une intercommunalité suppose une affectio societatis. Plus le territoire est vaste, plus l'harmonie est nécessaire. (Applaudissements à droite)

M. Alain Vasselle.  - Très bien !

La discussion générale est close.

Discussion des articles

ARTICLE ADDITIONNEL avant l'article premier

M. le président.  - Amendement n°1 rectifié, présenté par MM. Collombat, Amiel, Arnell, Barbier, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Mézard, Requier et Vall.

Avant l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.- Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa de l'article L. 2123-12-1 est ainsi rédigé :

« Les membres du conseil municipal bénéficient chaque année d'un droit individuel à la formation d'une durée de vingt heures, cumulable sur toute la durée du mandat. Le montant annuel des crédits qui y sont consacrés ne peut être inférieur à 1 % des indemnités des élus. Ces crédits sont collectés par un organisme collecteur national. » ;

2° Le premier alinéa de l'article L. 3123-10-1 est ainsi rédigé :

« Les membres du conseil départemental bénéficient chaque année d'un droit individuel à la formation d'une durée de vingt heures, cumulable sur toute la durée du mandat. Le montant annuel des crédits qui y sont consacrés ne peut être inférieur à 1 % des indemnités des élus. Ces crédits sont collectés par un organisme collecteur national. » ;

3° Le premier alinéa de l'article L. 4135-10-1 est ainsi rédigé :

« Les membres du conseil régional bénéficient chaque année d'un droit individuel à la formation d'une durée de vingt heures, cumulable sur toute la durée du mandat. Le montant annuel des crédits qui y sont consacrés ne peut être inférieur à 1 % des indemnités des élus. Ces crédits sont collectés par un organisme collecteur national. »

II.- La perte de recettes résultant du I pour le fonds pour le financement du droit individuel à la formation des élus locaux prévu à l'article L. 1621-3 du code général des collectivités territoriales est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Le DIF ne doit pas être financé en ponctionnant les indemnités des élus. Après avoir entonné ce bel hymne aux élus locaux, justifiant pleinement leurs indemnités, comment ne pas donner un avis favorable à mon amendement, madame la Ministre ? Non seulement, elles n'ont pas été réévaluées depuis 2002, mais elles ont baissé. Voilà l'occasion de les réévaluer.

Vous appelez à une réflexion transpartisane. Mais lorsque le Gouvernement nous a imposé la loi NOTRe, que je n'ai pas votée, avec la suppression des syndicats et des indemnités, il ne nous a pas consultés !

Les hymnes aux élus locaux sont touchants, mais le temps est venu de mettre enfin des actes en accord avec les paroles !

Les citoyens ne sont pas dupes. Ils connaissent le travail de leurs élus, se représentent l'engagement qu'il exige, en tout cas dans les collectivités que je connais bien, les petites communes.

Mme Catherine Di Folco, rapporteur.  - Retrait ou avis défavorable. Cet amendement ne précise pas de financement pour remplacer le prélèvement sur les indemnités.

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - Avis défavorable. Il est vrai que la rédaction du texte est ambiguë. Comment affirmer que le DIF est obligatoire et demander aux élus de le financer ? Il nous faudra examiner cette question.

Il faudra aussi revoir la grille des indemnités. Je continuerai à travailler sur ce sujet. Mais cela demande du temps.

M. Alain Vasselle.  - Les collectivités territoriales ont l'obligation de financer la formation des élus dans la limite de 20 % des indemnités. Certes la loi n'a pas précisé que ces crédits dédiés couvraient le DIF des élus, mais des associations départementales de maires l'ont compris ainsi, en diffusant des brochures proposant des formations à ce titre, dont les élus déduisent, c'est le cas dans l'Oise, qu'ils pourront exercer leur droit individuel à la formation sans prélèvement sur leurs indemnités. Je voterai cet amendement.

Pourquoi ne pas profiter du temps qui nous reste jusqu'à la CMP pour préciser que l'assiette est celle des indemnités versées par les collectivités territoriales, en excluant les indemnités des maires et des adjoints ?

M. Gérard Bailly.  - L'État demande des économies aux collectivités territoriales mais les oblige à prendre la totalité des indemnités des élus.

La collectivité territoriale est libre de fixer le montant des indemnités dans le respect d'un plafond. Pourtant les préfets parfois refusent, comme dans le Jura, obligeant les maires de communes de moins de mille habitants à percevoir la totalité de leurs indemnités, même lorsqu'ils ne le souhaitent pas.

Le Gouvernement entend-il donner des instructions aux préfets afin de clarifier la situation des maires des communes de moins de mille habitants ?

M. Éric Doligé.  - Je souscris aux propos de MM. Collombat et Vasselle. Si nous ne votons pas l'amendement de M. Collombat, nous devrions changer le titre de la loi, celui-ci devenant « baisse des indemnités des élus ».

De plus, il serait pertinent de fusionner les différents régimes de formation existants - DIF et formation des maires et adjoints. (Applaudissements à droite)

M. François Pillet.  - Je ne puis pas ne pas réagir. Il est inadmissible de reprocher à des maires de petites communes de percevoir une indemnité, surtout quand on en connaît le montant, alors même que souvent ils renoncent à se faire rembourser les frais de transports auxquels ils ont droit.

La loi a clarifié heureusement les choses et fixe les modalités de versement des indemnités. C'est tant mieux. Un maire qui se trouve réellement dans une situation telle qu'il n'exerce son mandat que pour le plaisir peut toujours faire don de son indemnité au Centre communal d'action sociale (CCAS), à une association locale voire à sa commune. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Michel Mercier.  - Je ne suis pas spécialiste de ces questions mais je suis sûr d'une chose : il ne peut y avoir de démocratie sans élus. Il est aussi normal qu'ils soient indemnisés.

Souvenez-vous de ce mot d'Alphonse Baudin, juché sur une barricade lors du coup d'État du 2 décembre 1851, qui jeta, avant de s'effondrer mortellement blessé par une balle : « Vous allez voir comment l'on meurt pour 25 francs par jour ! ». C'était le montant de l'indemnité parlementaire de l'époque.

Après les régionales, certains ont décidé de baisser leurs indemnités, de 10 %, par exemple, sur un montant de 3 000 euros, et cela descend en cascade. Un élu local, avec peu de ressources, se voit contraint de céder à la démagogie ambiante et de subir une baisse de ses indemnités.

Il faudrait prévoir que ces indemnités soient versées par un centre de gestion, sans prévoir une délibération de l'ensemble du conseil municipal, afin d'éviter de céder à la démagogie ambiante. Autrement, les élus n'auront bientôt plus aucun droit ! (Applaudissements au centre)

M. Pierre-Yves Collombat.  - Le débat est révélateur de la culpabilisation des élus à laquelle nous assistons. La création d'une charte des élus va dans le même sens. Qu'il s'agisse d'indemnités, de patrimoine, de liens familiaux, de je ne sais quoi encore, il s'agit de ne cesser de battre notre coulpe, de nous flageller en permanence, et avec le sourire !

Les élus passent leur temps à faire des déclarations. C'est l'ère du soupçon généralisé. Où allons-nous de la sorte ? Que devient le respect dû à notre République et à ceux qui la servent ? Il faut en finir avec l'autoflagellation ! (Applaudissements au centre)

M. Ronan Dantec.  - Pour mettre un terme au populisme, le législateur doit se saisir de cette question et réfléchir en effet, comme nous y a invités la ministre, à la fixation d'une nouvelle grille indemnitaire. Libre à chacun d'en rétrocéder une partie, mais au moins chacun aura le choix d'exercer ou non cette faculté.

Ne confondons pas toutefois formation des élus pour assurer leur mandat et DIF. C'est pourquoi je ne voterai pas cet amendement. (M. Alain Vasselle s'exclame)

Mme Jacqueline Gourault.  - Pendant des années, lorsque j'en étais vice-présidente, l'AMF a réclamé, avec le soutien de l'association des maires ruraux, l'automaticité du versement des indemnités. J'avais même déposé une proposition de loi... Il faut encourager les jeunes à assurer des mandats locaux. Ils sont de plus en plus nombreux à vouloir le faire.

Une dotation de l'élu rural a été créée pour compenser les frais des maires des petites communes.

M. Alain Vasselle.  - Partiellement.

Mme Jacqueline Gourault.  - Certes. Libre à chacun néanmoins de rétrocéder une partie de ses indemnités. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-UC, à droite et sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Mme Catherine Di Folco, rapporteur.  - On s'éloigne du texte... Mais je suis prête à ouvrir ce chantier. En attendant, il est urgent de voter ce texte et de trouver un accord avec l'Assemblée nationale.

Monsieur Collombat, la rédaction de votre amendement, je le maintiens, est imprécise. Il manque le financeur. Retrait ?

L'amendement n°1 rectifié n'est pas adopté.

ARTICLE PREMIER

M. le président.  - Amendement n°2 rectifié, présenté par MM. Collombat, Amiel, Arnell, Barbier, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Mézard, Requier et Vall.

Alinéas 7 à 10

Supprimer ces alinéas.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Le chantier à peine ouvert est aussitôt refermé ! Cet amendement est défendu.

Mme Catherine Di Folco, rapporteur.  - Avis défavorable.

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - Avis défavorable.

M. Alain Vasselle.  - Mme la ministre a ouvert la porte à une réflexion. J'y insiste, trouvons une solution d'ici la CMP.

L'amendement n°2 rectifié n'est pas adopté.

L'article premier est adopté.

ARTICLE 2

M. le président.  - Amendement n°4, présenté par le Gouvernement.

Supprimer cet article.

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - Je lève le gage.

Mme Catherine Di Folco, rapporteur.  - La commission des lois n'a pas examiné cet amendement mais il me paraît sage.

L'amendement n°4 est adopté.

L'article 2 est supprimé.

ARTICLE 3

M. Claude Kern .  - Je salue l'initiative de notre rapporteur qui a inclus cet article 3. L'article 15 de la loi NOTRe a suscité l'incompréhension des élus locaux. Les syndicats sont appelés à se multiplier à cause de l'extension de leurs compétences.

Le Gouvernement a reconnu son erreur. J'avais déposé une proposition de loi. L'article 3 apporte une solution. Je le voterai.

M. Didier Guillaume .  - L'amendement du Gouvernement est important. L'erreur de la loi NOTRe pose beaucoup de problèmes. Les élus des petits syndicats ont beaucoup de responsabilités et n'ont souvent pas l'assistance de services techniques dédiés. Leurs présidents sont sans cesse sur le terrain, aux côtés des ingénieurs ou des responsables de travaux.

Nous aurions souhaité que l'on aille jusqu'à la fin du mandat municipal. Mais comme il nous faut parvenir à un vote conforme, nous voterons cet article qui constitue une avancée. Le Sénat tout entier y a contribué. Nous aurons le temps d'approfondir la réflexion. Je ne doute pas du vote de l'Assemblée nationale.

M. René Danesi .  - Dans mon département, nous fusionnons les sept communautés de communes qui constituent notre pays. L'idéal serait de donner à l'intercommunalité les compétences stratégiques, économie et développement durable, eau et assainissement, urbanisme, et de confier les autres à des syndicats spécialisés.

Les difficultés dues au climat actuel sont du pain bénit pour les opposants à cette fusion. Ce texte est bienvenu.

M. Philippe Bas, président de la commission.  - Il nous reste très peu de temps pour adopter un texte qui puisse ensuite être voté conforme. Le contre-la-montre est commencé !

M. le président.  - Merci de ce rappel utile !

Amendement n°5, présenté par le Gouvernement.

I.  -  Alinéas 1 et 5

Remplacer les mots :

deux ans après la publication de la loi précitée

par les mots :

à compter du 1er janvier 2020

II.  -  Alinéa 2

Remplacer les mots :

à l'expiration du délai de deux ans fixé au I

par les mots :

au 31 décembre 2019

III.  -  Alinéa 6

Remplacer les mots :

à l'expiration du délai de deux ans fixé au IV

par les mots :

au 31 décembre 2019

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - Il est défendu.

Mme Catherine Di Folco, rapporteur.  - La commission des lois n'a pu examiner cet amendement déposé cet après-midi. Mais il semble qu'il vous donne largement satisfaction, même s'il ne va que jusqu'au 1er juin 2020.

L'amendement n°5 est adopté.

L'article 3, modifié, est adopté.

Interventions sur l'ensemble

M. Hervé Maurey, président de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable .  - La suppression des indemnités avait été adoptée nuitamment de manière scandaleuse. Elle accréditait l'idée que les élus étaient des profiteurs, gavés d'indemnités. Je suis bien content de n'avoir pas voté la loi NOTRe. J'espère que le Gouvernement tiendra ses engagements sur les indemnités. Les syndicats font un travail réel et essentiel.

Mme Françoise Gatel .  - Je suis heureuse que nous corrigions une telle erreur. Il est inadmissible aussi de modifier en cours de mandat les indemnités des élus ! (« Très bien ! » et applaudissements au centre et à droite)

M. Pierre-Yves Collombat .  - Ce n'est pas une avancée mais un moindre recul : pour l'après-2020, le problème reste entier !

M. Didier Guillaume.  - S'il n'y avait que celui-là !

M. René Vandierendonck .  - En partant exercer ses fonctions au Conseil constitutionnel, M. Hyest nous a invités à rationaliser la loi et... à corriger cette boulette.

J'ai discuté ensuite une partie de la nuit avec M. Dussopt, rapporteur de l'Assemblée nationale. Je ne doute pas qu'elle votera ce texte conforme.

La proposition de loi est adoptée.

(Applaudissements)