Compétences eau et assainissement des communautés de communes

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi pour le maintien des compétences « eau » et « assainissement » dans les compétences optionnelles des communautés de communes.

Discussion générale

M. Jean Bizet, auteur de la proposition de loi .  - Ce texte répond à une forte attente de nos territoires et de leurs élus, face aux transferts des compétences eau et assainissement, dont le régime a été modifié par la loi NOTRe. L'assainissement était auparavant une compétence optionnelle, l'un des sept groupes relevant du choix des communautés de communes, et l'eau une compétence facultative. La loi NOTRe, afin de renforcer l'intégration communautaire, a élargi le bloc des compétences obligatoires, imposant aux communautés de communes de les prendre en charge obligatoirement au 1er janvier 2020. Avant cette échéance, la loi NOTRe a prévu des mesures transitoires. Les communautés de communes existant à la date de publication de la loi auront jusqu'au 31 décembre 2017 pour se conformer aux nouvelles dispositions.

Lors des débats sur la loi NOTRe, MM. Jean-Jacques Hyest et René Vandierendonck étaient opposés à la création de nouvelles compétences obligatoires pour les communautés de communes, introduite par un amendement du Gouvernement.

Notre assemblée avait classé l'eau et l'assainissement dans les compétences optionnelles. En matière territoriale, il faut faire preuve de pragmatisme. Les délais posent problème : ils sont trop courts et la gestion de l'eau est tributaire des conditions géographiques, et de la particularité physique des territoires que la loi ne peut pas anticiper. Les communes et leurs régies offrent déjà une eau de bonne qualité à bas coût.

Doit-on au nom du seul renforcement de l'intercommunalité mettre fin à ce qui se pratiquait avant. Comme le disait Churchill, « il n'y a rien de dangereux dans le changement, s'il est dans la bonne direction ! ». (Sourires) La loi NOTRe à cet égard ne va pas dans la bonne direction.

Le texte propose de maintenir la compétence eau et assainissement au rang des compétences optionnelles des communautés de communes, la commune était l'échelon territorial le plus adapté pour leur exercice.

Ce texte rappelle donc le principe de subsidiarité selon lequel, une compétence doit être exercée à l'échelon le plus pertinent.

Les communautés de communes doivent pouvoir choisir de procéder ou non au transfert de leurs compétences à l'intercommunalité. C'est une question de pragmatisme.

L'eau représente un enjeu de développement territorial. Serait-il judicieux de retirer à des syndicats compétents la gestion de l'eau pour la confier à une intercommunalité moins expérimentée ?

Le Sénat en adoptant ce texte fera preuve de sa vigilance habituelle s'agissant de l'adaptation de la loi NOTRe au sein des territoires. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Roger Karoutchi.  - Très bien !

M. Mathieu Darnaud, rapporteur de la commission des lois .  - L'Association des maires de France indique que la gestion de l'eau dépasse les frontières administratives. Elle nécessite un traitement d'autant plus particulier lorsqu'il s'agit des territoires ruraux où l'eau est un service essentiel et structurant. L'objectif de cette politique est de répondre aux inquiétudes des maires que nous avons rencontrés dans le cadre de la mission de suivi et de contrôle des dernières lois de la réforme territoriale, avec mes collègues Vandierendonck et Collombat.

À l'évidence, le transfert des compétences eau et assainissement vers l'intercommunalité est un souci majeur en termes de coûts. C'est aussi un problème pour les syndicats des eaux. Celui de la basse Ardèche assure à lui seul les services d'eau et d'assainissement de plusieurs intercommunalités.

Il est également essentiel de laisser l'initiative aux élus locaux, seuls aptes à juger de la situation.

Je veux dire avec force que là où les choses se passent naturellement, les transferts s'opèrent sans difficulté. Pour autant, il subsiste des cas lourds et nous devons leur porter une attention particulière. Voilà pourquoi le Sénat fait oeuvre utile avec cette proposition de loi.

Les structures intercommunales existantes recouvrent des territoires urbains et péri-ruraux qui rechignent à transférer les compétences eau et assainissement.

Il nous faut repenser aux communautés de communes ou communautés d'agglomération qui ont leur rôle à jouer dans ce problème de transfert de compétences.

L'application de la loi NOTRe ne doit pas contrarier les bonnes pratiques en oeuvre dans les territoires. Un transfert prématuré risquerait d'augmenter la facture pour les usagers.

Nous avons l'ardente obligation d'entendre la voix des territoires. Sans détricoter la loi NOTRe, nous pouvons l'adapter à la particularité de nos territoires. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales .  - L'objet de cette proposition de loi dont je salue les auteurs renvoie à la question des compétences exercées par les EPCI à fiscalité propre. Les communautés de communes et les communautés d'agglomération ont obtenu de nouvelles compétences : en matière d'accueil des gens du voyage, du traitement des déchets et même au 1er janvier 2018, de la gestion des milieux aquatiques.

Le transfert des compétences eau et assainissement est prévu pour 2020.

Le texte propose de rendre ces compétences optionnelles pour les communautés de communes mais pas pour les communautés d'agglomération.

Le service public de l'eau se décline en deux missions : l'une obligatoire de distribution et production, l'autre facultative de transport et stockage. L'assainissement est soit collectif soit non collectif.

Un transfert de la compétence assainissement emporte celui de la gestion des eaux pluviales urbaines. Selon le dernier rapport publié par l'Observatoire national des services publics d'eau et assainissement, il existe 35 000 services d'eau et d'assainissement.

D'après le rapport annuel de la Cour des comptes, la commune reste organisatrice dans 60 % des cas. C'est dire l'atomisation de notre organisation locale.

Transférer les compétences eau et assainissement aux communautés de communes et aux communautés d'agglomération favorisera la mutualisation.

Par définition, des regroupements faciliteront une approche plus globale de la gestion de l'eau. La gestion intercommunale constituera le trait d'union entre le petit cycle et le grand cycle de l'eau.

C'est aussi une mesure d'équité et de justice. L'accès à l'eau potable et à l'assainissement sont des services de première nécessité. La réforme territoriale assurera une cohérence à l'échelon intercommunal. C'est une avancée.

Le calendrier permet de se préparer dans de bonnes conditions. L'exercice obligatoire de ces compétences au 1er janvier 2020 ne se traduira pas du jour au lendemain pas l'harmonisation des tarifs, mais cela se fera dans un délai raisonnable. Des tarifs négociés pourront subsister. Ce n'est donc pas un big bang.

Quant aux syndicats de l'eau, certains subsisteront, d'autres non, dans un objectif de mutualisation. Il n'y a pas de disparition des outils existants.

Dans les syndicats recouvrant au moins trois EPCI à fiscalité propre, les intercommunalités se substitueront automatiquement aux communes membres. Les grands syndicats seront donc préservés. À mon sens, le modèle à suivre est d'ailleurs celui des syndicats départementaux. Je n'y suis pas parvenu en Tarn-et-Garonne, hélas, car un tarif de l'eau variant d'un village à l'autre, ce n'est guère équitable.

M. Alain Joyandet.  - Je ne vois pas pourquoi ! Et les impôts locaux ? Et les services publics ?

M. Jean-Michel Baylet, ministre.  - Cela n'a rien à voir, nous parlons d'un service de première nécessité.

M. Alain Joyandet.  - Et le prix du Ricard ?

M. Jean-Michel Baylet, ministre.  - Ironisez mais, en politique, après le temps de la discussion vient celui de l'action. Le Sénat a adopté la loi NOTRe après deux lectures le 16 juillet 2015 par 259 voix pour....

M. Pierre-Yves Collombat.  - Pas par nous !

M. Jean-Michel Baylet, ministre.  - ... dont la totalité du groupe socialiste et républicain. Les quatre premiers signataires de la proposition de loi l'ont tous votée. (On le conteste à droite et au centre) À vous entendre, personne n'a voté cette loi ! La réalité est tout autre. (MMRené Vandierendonck et Philippe Bonnecarrère applaudissent.) Pourquoi cette proposition de loi maintenant, le jour où l'on suspend les travaux parlementaires ? Pour des raisons purement électorales.

M. Jean Louis Masson.  - C'est vrai !

M. Jean-Michel Baylet, ministre.  - Le Sénat, ce qui n'est pas sa tradition, aime désormais à se conduire de manière originale.

M. Jean Bizet.  - Le Sénat prévoit l'avenir !

M. Jean-Michel Baylet, ministre.  - Le transfert des compétences eau et assainissement garantira un service public de qualité et une tarification plus juste, le Gouvernement est défavorable à cette proposition de loi. (M. René Vandierendonck applaudit, de même que MM. Jean-Jacques Filleul, Jean Desessard et Philippe Bonnecarrère)

M. Jean Bizet.  - C'est bien dommage !

M. Jean Louis Masson .  - Ne nous voilons pas la face : la loi NOTRe et celles qui l'ont précédée ont pour seul but de faire disparaître commune et département au profit de grandes intercommunalités et de grandes régions.

M. Bruno Sido.  - Tout à fait !

M. Jean Louis Masson.  - Monsieur le ministre a dit quelques vérités. Oui, 49 sénateurs ont voté contre et j'en fais partie. Et ceux qui ont voté pour viennent nous dire, en toute fin de session parlementaire, que la loi NOTRe, tout compte fait, n'est pas très bonne...

M. Mathieu Darnaud, rapporteur.  - Certains de ses aspects !

M. Jean Louis Masson.  - Qu'ils assument leurs responsabilités !

Mme Jacqueline Gourault.  - Très bien !

M. Jean Louis Masson.  - ... qu'ils ne savaient pas ce qu'ils faisaient ! Le but de ce texte est uniquement électoral.

M. Bruno Sido.  - Absolument pas !

M. Jean Bizet.  - Le Sénat travaille pour les communes.

M. Mathieu Darnaud, rapporteur.  - Vous auriez dû lire le rapport.

M. Jean Louis Masson.  - Ce texte est une mascarade et vous verrez bientôt à quoi aboutissent ces gesticulations. Vous ne serez pas déçus du résultat des élections dans mon département, je vous le promets !

M. Bernard Vera .  - Les collectivités ont besoin de stabilité pour mettre en oeuvre les politiques publiques dont elles ont la charge. Ne les contraignons pas inutilement. Cette proposition de loi redonne de la souplesse aux communes dans le cadre de la construction intercommunale.

M. Bruno Sido.  - Très bien.

M. Bernard Vera.  - Nous ne nous méprenons pas sur son caractère d'affichage : le groupe Les Républicains trouve désormais de bon ton de s'afficher comme le défenseur des libertés locales. Certes, le Sénat avait fait bloc contre le transfert obligatoire de ces compétences dans la loi NOTRe. Pour autant, la logique de dévitalisation des communes et leur asphyxie financière ont été amorcées alors que François Fillon était Premier ministre, avec la loi du 16 décembre 2010. Il s'agissait alors de prévoir le rattachement des communes isolées, de supprimer les syndicats intercommunaux, jugés obsolètes, et de rationaliser le périmètre des EPCI en donnant des pouvoirs aux préfets qui vont à l'encontre de la décentralisation. Ce quinquennat devait marquer une rupture... et les lois Maptam et NOTRe ont renforcé cette politique d'effacement des communes.

Le groupe CRC est le seul groupe à avoir combattu toutes ces lois, qui organisent le transfert du service public au secteur privé, que le groupe Les Républicains a votées. Le programme porté par François Fillon témoigne de cette logique libérale : il promet une baisse de la dépense publique de 100 milliards d'euros, dont la moitié reposant sur les collectivités. Avec ce texte, dont le champ se réduit aux territoires ruraux, Les Républicains se positionnent dans la campagne pour les élections sénatoriales.

Redonner du pouvoir aux communes c'est leur donner les moyens d'exercer leurs compétences.

Mettons fin à la baisse des dotations.

Sur le fond, la commune doit effectivement rester compétente en matière d'eau et d'assainissement ; charge à elle de déléguer cette compétence. Le contrôle de la qualité de l'eau doit pouvoir être exercé au plus proche par nos concitoyens. Mieux vaut éviter de multiplier les transferts de compétences en cascade qui rendent illisibles l'action publique.

Les régies publiques ont fait leurs preuves. Du reste, nous observons un mouvement de retour à la maîtrise publique. Tout bouleversement institutionnel autoritaire aurait des conséquences défavorables pour les usagers. Faisons confiance aux élus locaux : conservons la liberté d'appréciation des communes.

Le CRC votera cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes communiste républicain et citoyen, UDI-UC et Les Républicains)

M. Pierre-Yves Collombat .  - « Nous n'avons pas été bons sur la réforme territoriale », a dit Marylise Lebranchu. (Marques d'amusement) Ce texte constitue une énième rustine à la loi NOTRe, d'autres suivront. Le problème de fond demeure : que faut-il faire des lois NOTRe et Maptam au vu des résultats sur le terrain ? Les remettre à plat au risque d'accroître la confusion, ou perpétuer ce tombeau bureaucratique de la démocratie locale ?

Il est impératif d'arrêter la vampirisation des départements par les métropoles, de redonner aux départements les moyens d'assurer la solidarité territoriale, d'améliorer l'articulation entre communautés et syndicats. Enfin, il faudrait remettre à plat le fonctionnement des intercommunalités XXL avec leurs conseils pléthoriques, qui réservent les décisions à des cénacles choisis ou, pire, à la bureaucratie communautaire.

L'avenir n'est pas aux grandes structures, il est à la coopération volontaire, seule capable de faire émerger un idéal civique qui s'est perdu dans les sables de la modernisation libérale. (Applaudissements sur les bancs des groupes RDSE, communiste républicain et citoyen ainsi que sur quelques bancs à droite et au centre)

Mme Sophie Joissains .  - Merci à François Zocchetto et Bruno Retailleau de faire entendre la voix des communes. Avant la loi NOTRe, le transfert des compétences eau et assainissement reposait sur le critère optionnel, le critère du choix. Il s'incarne dans notre Constitution à l'article 72-2 avec le principe de subsidiarité, superbement ignoré par les lois NOTRe et Maptam.

Là où les compétences eau et assainissement ont été déléguées au secteur privé, le prix de l'eau a considérablement augmenté. Pensons à nos agriculteurs. Rendre leur transfert obligatoire est le signe d'un esprit aveugle, monolithique et adepte de la rationalisation jacobine. Pourquoi détruire ce qui fonctionne pour construire de l'aléatoire ? Il aurait fallu écouter les maires et les élus municipaux, ce sont eux qui font vivre la démocratie pour être, et je reprends la formule de Bruno Retailleau, « à portée d'engueulade ».

Je regrette le champ restreint de cette proposition de loi, il aurait dû toucher toutes les communes quelles qu'elles soient, y compris les métropoles - celle de Paris, qui est au point mort, et celle de Marseille, en grande difficulté financière.

Je voterai évidemment ce texte, comme la majorité du groupe UDI-UC, contre la rigidité de la loi NOTRe. (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Jean Desessard .  - Hier, la droite sénatoriale faisait au groupe écologiste un procès d'intention : on nous accusait de manoeuvre électorale en présentant un texte sur la mise en oeuvre effective du droit à l'eau potable et à l'assainissement. Que dire quand cette même droite électorale inscrit à l'ordre du jour en fin de session ce texte qui écarte le transfert obligatoire des compétences eau et assainissement aux communautés de communes ? D'autant qu'en décembre dernier, un orateur, au nom de la droite sénatoriale, refusait de voter notre proposition de résolution sur l'eau au nom de la gestion de l'intercommunalité.

Si nous comprenons que la modification des compétences des communes préoccupe les élus locaux, il n'est pas opportun de revenir sur un an de débat parlementaire et le compromis politique noué alors par un rapporteur socialiste à l'Assemblée nationale et un rapporteur de droite au Sénat.

Surtout, le niveau de l'intercommunalité est le plus adapté pour gérer l'eau et l'assainissement. Devant la baisse constante des dotations de l'État, favorisons les mutualisations mais aussi la simplification - que la majorité sénatoriale appelait de ses voeux hier ! Les compétences eau et assainissement pèsent sur le budget des petites communes si bien qu'elles sont souvent obligées de les déléguer au privé. Conséquences, une augmentation des tarifs et une dépossession des élus de la maîtrise d'un service public fondamental.

Le groupe écologiste est attaché au compromis politique, auquel Les Républicains ont participé. À terme, il sera avantageux pour les élus et les usagers du service public de l'eau. (M. Jean-Jacques Filleul applaudit)

M. Jean-Pierre Sueur .  - Soyons clairs. La loi NOTRe a été votée par la majorité du Sénat et de l'Assemblée nationale. Je l'ai votée et y suis attaché. Elle comporte des avancées importantes.

Je me souviens, monsieur Baylet, quand nous avions défendu la loi ATR.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Elle était bien celle-là !

M. Jean-Pierre Sueur.  - On nous disait pourtant déjà que nous tuerions les communes.

M. Pierre-Yves Collombat.  - C'était l'intercommunalité volontaire.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Les intercommunalités sont nécessaires, si elles sont au service des communes.

J'approuve l'idée, au fondement de la loi NOTRe, selon laquelle les structures territoriales doivent évoluer pour être à la hauteur des enjeux d'aujourd'hui. Les métropoles donnent la force nécessaire au monde urbain ; dans le monde rural, les petites et moyennes communes doivent elles aussi s'organiser.

Un compromis a été trouvé en CMP sur la loi NOTRe. Il faut s'en féliciter, car sinon le texte de l'Assemblée nationale aurait été voté. Ce n'est pas se dédire que d'affiner une loi que l'on a votée pour tenir compte de la réalité !

J'ai tout de suite pensé que le transfert des compétences eau et assainissement en 2018 était irréaliste. Par compromis, ce transfert a été repoussé à 2020. J'étais déjà persuadé qu'un nouveau report serait nécessaire. Nos collègues proposent une autre voie : rendre le transfert optionnel. Elle recueille notre accord. Nous qui parcourons chaque semaine les villes et villages de France, nous entendons ce que disent les élus !

Or, le 1er janvier dernier, de nouvelles communautés de communes ont vu le jour, qui comptent souvent trente à quarante communes, où la compétence eau est exercée tantôt en régie, tantôt en délégation de service public ou par le biais d'une société d'économie mixte, d'un syndicat dont les limites outrepassent quelquefois celles de l'intercommunalité...

M. Jean Desessard.  - Tout cela, vous le saviez il y a deux ans !

M. Jean-Pierre Sueur.  - Comment, en deux ans, mener à bien toutes les études et procédures pour parvenir à un régime unique ? On n'y arrivera pas, sinon à marche forcée ; les sociétés qui disposent de moyens d'expertise imposeront leurs choix aux élus. Cela me rappelle le plan local d'urbanisme intercommunale : une bonne idée, mais qui demande du temps.

Nous ne renions pas cette loi, mais elle n'est pas un monument tel que nous ne puissions l'améliorer sur un point précis. Ce texte est une réponse positive à une situation de fait.

M. Jean Bizet.  - Très bien !

M. Jean-Pierre Sueur.  - Le groupe socialiste et républicain le votera, par pragmatisme et dans le souci d'écouter les élus locaux. (Applaudissements sur la plupart des bancs du groupe socialiste et républicain et sur de nombreux bancs au centre et à droite)

M. Alain Joyandet .  - La loi NOTRe prévoit le transfert des compétences eau et assainissement aux intercommunalités au 1er janvier 2020. Pour les communautés de communes et d'agglomération, ces compétences sont aujourd'hui optionnelles. Elles sont exercées par les communes à 73 % pour l'eau potable, 88 % pour l'assainissement collectif et 53 % pour l'assainissement non collectif, ce qui explique les inquiétudes des élus locaux qui craignent une hausse des coûts. Pourquoi le prix de l'eau ne différerait-il pas là où cette compétence est gérée différemment ?

Dans beaucoup de communes, ces services sont gérés avec frugalité, presque bénévolement par des élus et des agents communaux polyvalents ou à temps partiel. Les intercommunalités, elles, devront recruter.

Elles ne sont d'ailleurs pas toutes en mesure d'exercer ces compétences. Un transfert à marche forcée déstabilisera une organisation qui donne satisfaction. Que faites-vous du principe de subsidiarité inscrit à l'article 72 de la Constitution ?

Faisons confiance aux élus. Cette compétence doit rester optionnelle. C'était la position du Sénat lors de la loi NOTRe. C'est la CMP qui a adopté cette mesure, dans un texte de compromis qui provoque d'ailleurs des drames - je pense au seuil de 15 000 habitants pour les intercommunalités. Il est normal de corriger ces erreurs aujourd'hui, ce qui ne signifie pas renier la loi NOTRe.

Plus généralement, il nous faut veiller à ce que l'âme des territoires ne disparaisse pas dans des intercommunalités géantes. Les intercommunalités, je le rappelle, sont exclusivement au service des communes, non l'inverse. (Mme Sophie Joissains applaudit) L'essentiel est la proximité. Si le pouvoir vient d'en haut, la confiance vient d'en bas.

Mme la présidente.  - Il faut conclure.

M. Alain Joyandet.  - De droite ou de gauche, nous avons trop malmené les communes ces dernières années, paralysé des initiatives. Les maires n'en peuvent plus ! (Applaudissements au centre et à droite)

M. Philippe Bonnecarrère .  - Comment vous convaincre en trois minutes de ne pas voter ce texte ?

D'abord, c'est une question de crédibilité du législateur ; peut-il modifier une loi qu'il vient juste de voter ?

M. Jean Desessard.  - Bonne question !

M. Philippe Bonnecarrère.  - Il est déjà revenu sur la compétence tourisme, il a tenté de le faire sur le transport scolaire...

Ensuite, la progression des compétences des intercommunalités ne doit rien au hasard. Elles doivent trouver leur place aux côtés des métropoles dans les grandes régions.

De plus, les élus locaux ont anticipé les transferts de compétences attendus en 2020. Ils se sont préparés. (M. Mathieu Darnaud, rapporteur, le conteste) Ne semons pas le doute !

M. Jean Desessard.  - Très juste !

M. Philippe Bonnecarrère.  - Surtout, sous prétexte de sauver le soldat communal, il ne faut pas affaiblir son meilleur rempart... l'intercommunalité ! Une articulation harmonieuse entre intercommunalité et communes, tel est l'enjeu.

J'ajoute que les agences de l'eau seraient les premières à se réjouir du vote à venir ; elles préparent une recentralisation. (MM. Jean Desessard et Claude Kern applaudissent)

M. Daniel Laurent .  - Je me félicite de la discussion de ce texte. J'espère que l'amendement de M. Joyandet sera adopté. C'est faire preuve d'intelligence d'amender une loi si l'on constate qu'elle est inadéquate.

Je veux m'attarder sur la gestion des eaux pluviales urbaines. Une note de la Direction générale des collectivités locales du 13 juillet 2016 l'inclut dans la compétence assainissement. Le Conseil d'État en avait jugé ainsi le 4 décembre 2013, que la compétence assainissement soit optionnelle ou obligatoire. Cela me renforce dans mon soutien à ce texte : les collectivités ne sont pas prêtes. Il aurait aussi été judicieux d'attendre un retour d'expérience sur le transfert de la compétence Gemapi.

Ce transfert de compétence ne figurait pas dans la version initiale de la loi NOTRe. Il n'a fait l'objet ni d'une étude d'impact, ni d'une concertation. Nous étions nombreux à dire notre opposition, craignant que ce transfert à marche forcée ne désorganise les territoires et ne crée des inégalités territoriales. Plutôt que de faire confiance aux élus, le Gouvernement leur impose un modèle unique ! Les seuls effets seront une complexification administrative et des coûts accrus.

En Charente-Maritime, depuis 1952, un syndicat regroupe 463 communes sur 469. La mutualisation des ressources en eau, moyens techniques d'exploitation, ouvrages, la péréquation des prix permettent de faire jouer la solidarité et de satisfaire tous les usagers, des agriculteurs aux mareyeurs ostréicoles. La bonne échelle est celle des bassins versants hydrographiques pour les eaux de surface ou de bassins d'alimentation hydrogéologique pour les eaux souterraines. Il est rare que les périmètres administratifs leur correspondent.

Girondin, je sais qu'il faut faire confiance aux communes. Je voterai ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains ; M. Olivier Cigolotti applaudit aussi)

La discussion générale est close.

Discussion des articles

ARTICLE UNIQUE

M. Michel Savin .  - Je ne peux accepter la poursuite du démantèlement des communes. Surtout, sénateur d'un département montagneux, je sais que ce transfert alourdira les coûts supportés par les usagers. Aujourd'hui, la gestion de l'eau est assurée par un employé communal, parfois même un élu... Si elle est transférée à l'intercommunalité, celle-ci devra recruter ! En outre, les intercommunalités de montagne sont beaucoup trop grandes. La gestion de l'eau obéit à une logique de bassin, non à une logique administrative. Les maires attendent cette loi.

M. Yves Daudigny .  - Ma position n'est pas dictée par un intérêt électoral immédiat, puisqu'il n'y aura pas d'élections sénatoriales dans l'Aisne cette année. Il faut tenir compte de la très grande diversité des territoires. Dans le sud de l'Aisne, un gros syndicat prélève de l'eau dans la Marne pour la redistribuer à 60 000 habitants. Ailleurs, beaucoup de petits et moyens syndicats exercent leurs missions en partie grâce au bénévolat. Transférer cette compétence aux intercommunalités ne fera qu'augmenter les prix.

La mutualisation sur une large échelle est peut-être une perspective d'avenir, mais elle doit rester optionnelle.

M. Michel Savin.  - Très bien.

M. Jean Desessard .  - Certes, mais vous saviez déjà cela lorsque vous avez voté la loi NOTRe... Pourquoi y revenir maintenant ?

M. Ladislas Poniatowski.  - On a le droit d'être intelligent.

M. Jean Desessard.  - L'intelligence a progressé très vite !

Ensuite, je ne comprends pas pourquoi le transfert à l'intercommunalité engendre des coûts. Celle-ci n'a qu'à reprendre le personnel des syndicats.

M. Michel Savin.  - Pas si simple.

M. Jean Bizet.  - Monsieur Desessard, faites-nous confiance !

M. Mathieu Darnaud, rapporteur .  - Il est singulier d'entendre le ministre et certains dire que ce texte serait politique, sorti de nulle part juste avant les sénatoriales, alors que le Sénat a mis sur pied depuis deux ans une mission de suivi et de contrôle de la loi NOTRe. Tous les élus que nous avons rencontrés nous ont demandé d'agir. Ce texte intervient à la fin de la session parce qu'il nous a fallu rédiger notre rapport.

Prétendez-vous que toute loi serait immuable ? Doit-on alors renoncer à notre fonction de contrôle ? C'est un peu fort de café.

M. Pierre-Yves Collombat .  - À ce rythme, on sera encore plus intelligent en juillet... On ne cesse de revenir sur les textes, ce n'est pas infâmant. Sur le fond, les situations locales sont très différentes. L'argument du surcoût ne vaut pas.

Lorsque ma commune a rejoint la communauté d'agglomération qui exerce obligatoirement la compétence sur les ordures ménagères, la taxe a doublé. Laissons les communes s'organiser au mieux.

M. Daniel Gremillet .  - Notre posture n'est pas politique ni électorale mais d'écoute des territoires. Le débat n'est plus sur les intercommunalités. Simplement il faut corriger le tir sur certains points. Quel problème y a-t-il à laisser les acteurs s'organiser au mieux en fonction des besoins du terrain ?

La gestion de l'eau ne coûte quasiment rien grâce à l'action bénévole de milliers de gens dans les communes. Cette loi est une loi de bon sens, de proximité et de responsabilité. Elle est très attendue.

M. Jean Bizet.  - Très juste.

M. Alain Vasselle .  - Je n'étais pas encore redevenu sénateur lorsque la loi NOTRe a été votée. Les trois derniers orateurs ont fait preuve de sagesse. Le Sénat devrait les suivre. Deux remarques. Les périmètres des bassins versants ne coïncident pas toujours avec ceux des intercommunalités.

Dans le Morbihan, département de M. de Rohan, un syndicat départemental a été créé. Faudra-t-il le dissoudre ?

M. Alain Houpert .  - J'invite M. Desessard à traverser le périphérique. Dans une intercommunalité il y a les communes du centre et celles de périphérie. Ces dernières n'ont pas accès aux mêmes services. Notre rôle est d'ausculter les territoires, de revenir sur les aspérités de la loi NOTRe. La gestion de l'eau est souvent assurée sur la base du volontariat, par des conseillers municipaux, des bénévoles. En Côte-d'Or, Beaune est une commune riche ; les communes périphériques, plus pauvres, font preuve d'imagination, et sont efficaces à moindre coût.

Pour paraphraser un président de la République mort en fonction, arrêtons de faire des lois qui embêtent les Français !

Mme Marie-France Beaufils .  - L'essentiel est le volontariat. Mon intercommunalité regroupe des communes où l'eau est gérée tantôt en DSP, tantôt en régie. Le transfert obligatoire sera compliqué. Le plus simple serait de regrouper les communes qui ont choisi la régie et celles en délégation de service public. C'est angélique de croire que le transfert s'accompagnera d'une baisse des prix. Bien au contraire !

M. Alain Vasselle.  - Bien sûr !

M. Michel Savin.  - Pour le même service !

M. Marc Laménie .  - On peut revoir la loi NOTRe en fonction de ce qui marche et de ce qui ne marche pas. Les élus ruraux sont inquiets de la disparition des petits syndicats locaux, qui reposent souvent sur le volontariat et le bénévolat, avec efficacité. Qui connait mieux le réseau local que les fontainiers communaux et les élus ? L'intercommunalité n'est pas le bon échelon. Il faut privilégier la proximité.

M. Bernard Delcros .  - Une partie du débat est hors sujet. La question n'est plus loi NOTRe ou pas loi NOTRe, mais de l'utilité de certaines de ses dispositions.

En effet, madame Beaufils, mutualiser à l'échelle de l'intercommunalité ne s'accompagnera pas toujours d'une baisse de prix ou d'un meilleur service... Ce sont les élus qui savent déterminer le bon niveau dans un délai raisonnable. Je voterai ce texte.

M. René Danesi .  - La gestion de l'eau est tributaire des conditions géologiques et géographiques locales. Gare à l'uniformité au nom de l'idéologie ! Faisons aussi confiance aux élus locaux. Je voterai ce texte des deux mains, fort de mes 42 ans d'expérience en la matière.

Mme la présidente.  - Amendement n°1 rectifié quinquies, présenté par MM. Joyandet, D. Laurent, Lemoyne, Milon, Raison, Longuet, Danesi, G. Bailly, Vial, Vasselle, de Legge et J.P. Fournier, Mmes Lopez et Deseyne, MM. Grand, Revet, Pierre et Grosdidier, Mme Primas, MM. Huré, Chaize et Lefèvre, Mme Deromedi, MM. Vogel, Masclet, B. Fournier, Chatillon, Charon, Houpert, Laménie, Doligé, Calvet, Leleux, Bouvard, A. Marc, Chasseing et Pellevat, Mme Giudicelli, M. Bizet, Mme Gruny et MM. de Raincourt, Dufaut et Gremillet.

I.  - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  Le II de l'article 66 de la loi n°2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République est abroge?.

II.  -  En conséquence, compléter l'intitulé de la proposition de loi par les mots :

et des communautés d'agglomération

M. Alain Joyandet.  - J'ai été dix-sept ans maire de Vesoul. Nous avions créé un district, avec des services publics qui ont fait la preuve de leur efficacité. Ce transfert ne posait donc aucun problème pour nous, mais il en va différemment des autres intercommunalités de mon département. L'élaboration d'un schéma directeur coûte 100 000 euros. C'est beaucoup trop. Si l'on ajoute à cela que l'on est en train de couper des communautés de communes pour les répartir entre de nouvelles intercommunalités, vous comprenez le malaise.

On ne peut tout décider depuis Paris ! Beaucoup de communautés d'agglomération rencontrent le même problème que les communautés de communes.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°2 rectifié bis, présenté par M. Gabouty, Mme Billon, MM. Bockel, Capo-Canellas, Cigolotti et Delcros, Mme Doineau, M. D. Dubois, Mmes Gatel et N. Goulet, M. L. Hervé, Mmes Joissains et Loisier et MM. Luche et Vanlerenberghe.

M. Jean-Marc Gabouty.  - Le transfert de la compétence eau et assainissement est dû à la volonté sénatoriale de faire aboutir la CMP. Les gros EPCI ne sont plus une forme d'intercommunalité mais une supra-communalité ! Les transferts n'amoindrissent pas toujours les coûts. Auparavant, dans ma commune, il fallait un ou deux jours pour régler un problème ; désormais, il faudra attendre un mois...

Laissons à chacun la liberté d'apprécier quel échelon est le plus pertinent.

Mme la présidente.  - Amendement n°6 rectifié, présenté par MM. Collombat, Mézard, Castelli, Esnol, Fortassin, Guérini et Arnell, Mmes Jouve et Laborde et MM. Requier et Vall.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  Le II de l'article 66 de la loi n°2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République est abrogé.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Il n'y a pas de raison de traiter différemment les communautés de communes. La loi NOTRe en a créé de 50 communes et plus... Il faudra coller d'autres rustines à l'avenir.

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - Beaucoup ont souligné qu'il n'y a pas un modèle unique de communautés d'agglomération. Certaines sont très urbaines ; d'autres associent des territoires ruraux et urbains, et leur situation rejoint celle des communautés de communes.

Personnellement, j'étais pour la sagesse mais la commission des lois a émis un avis défavorable.

M. Jean-Michel Baylet, ministre. - Monsieur Joyandet, on n'a rien imposé depuis Paris ! La loi a été votée à Paris, mais ce sont les commissions départementales de coopération intercommunale qui se sont prononcées sur le terrain, et les élus locaux y sont présents.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Nous ne voterons pas ces amendements. Il nous parait raisonnable d'apporter de la souplesse aux communautés de communes. En revanche, nous n'avons pas été assez vigilants dans la définition des communautés d'agglomération : on a parfois créé une agglomération avec une commune de dix mille habitants et soixante villages. Ce ne sont pas des instances urbaines : la notion de communauté d'agglomération est détournée. Ce sont en réalité de grosses communautés de communes. Je suis pour une organisation moderne et dynamique du monde rural comme de l'urbain, pas pour la confusion qui consiste à nommer agglomération ce qui n'en est pas.

M. Michel Savin.  - Je voterai ces amendements. Avec la création des grosses intercommunalités, le prix payé par l'abonné a fortement augmenté, pour un service identique ou moins bon. Lorsqu'une petite commune a un ou deux agents, ceux-ci s'acquittent de tâches multiples. Impossible de les transférer à l'agglomération en même temps que la compétence eau. Résultat, celle-ci est obligée d'embaucher. Loin d'être une économie, c'est un coût supplémentaire.

M. Jean-Baptiste Lemoyne.  - Très bien.

M. Alain Vasselle.  - Je voterai ces amendements sans hésitation.

Nous vivons une situation que nous risquons de revivre, comme l'a dit M. Collombat. La loi NOTRe est un compromis qui n'a fait que sauver les meubles et qui ne contente personne. Pour preuve, toutes ces propositions de loi qui reviennent dessus !

Les préfets eux-mêmes avaient déposé en CDCI des projets de création de syndicats départementaux. Ne dites pas aujourd'hui le contraire !

Il serait bon de revenir à l'esprit des lois Chevènement : les premières intercommunalités s'appuyaient sur le volontariat. On a abouti à un éloignement des services de proximité. Les décisions sont prises de manière technocratique au niveau national, contre la volonté de nos concitoyens et des élus locaux. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Daniel Gremillet.  - Je soutiens ces amendements. La réalité c'est que les maires doivent avancer à marche forcée, contrairement à l'esprit de la loi.

M. Ladislas Poniatowski.  - Bien sûr.

M. Daniel Gremillet.  - Face à ce constat, revenons aux réalités du terrain. Le périmètre des communautés d'agglomération a changé depuis le 1er janvier : dans certains départements, elles réunissent le tiers des communes ! Ces vastes espaces militent pour que la compétence soit optionnelle : c'est essentiel pour être en harmonie avec le terrain. (Applaudissements à droite et au centre)

Les amendements nos1 rectifié quinquies et 2 rectifié bis sont adoptés.

L'amendement n°6 rectifié devient sans objet.

L'article unique, modifié, est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

Mme la présidente.  - Amendement n°4 rectifié, présenté par MM. Longeot et Cigolotti, Mmes Billon, Gatel, Létard et Loisier et MM. Gabouty, Capo-Canellas, Kern, L. Hervé, Canevet, Roche et Vanlerenberghe.

Après l'article unique

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au huitième alinéa de l'article L. 2224-2 du code général des collectivités territoriales, le nombre : « 3000 » est remplacé, deux fois, par le nombre : « 5000 ».

M. Jean-François Longeot.  - La loi NOTRe a prévu que les compétences eau et assainissement seraient transférées à titre obligatoire aux intercommunalités au 1er janvier 2020. Celles-ci devront équilibrer leurs budgets annexes de l'eau et de l'assainissement par les seules redevances des usagers. Afin d'éviter une augmentation excessive du prix, je propose de relever le seuil de 3 000 à 5 000 habitants pour les communes et les EPCI.

M. Mathieu Darnaud, rapporteur.  - Avis favorable à cet amendement de bon sens.

M. Jean-Michel Baylet, ministre.  - Amendement empreint de bon sens, auquel nous aurions pu être favorables dans un autre véhicule. En l'état, avis défavorable.

L'amendement n°4 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

Mme la présidente.  - Amendement n°5 rectifié bis, présenté par Mme Joissains, MM. Capo-Canellas, Gabouty et Guerriau, Mme Doineau et M. Canevet.

Après l'article unique

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le II de l'article L. 5218-7 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque la compétence visée au a) du 5° du I de l'article L. 5217-2 est déléguée au conseil de territoire, celui-ci peut la confier aux communes ou groupements de communes qui l'exerçaient antérieurement. »

Mme Sophie Joissains.  - Souvent, comme le disait M. Sueur, les métropoles ont une ville centre entourée d'une multitude de villages. Un tiers des habitants de la métropole Aix-Marseille Provence vivent en zone rurale. Sur les 118 maires, 115 ont voté contre la création de cette métropole aux compétences pléthoriques et déjà endettée. L'alléger de certaines compétences ferait respirer les communes. Dans un état de droit, il convient que chacun ait les mêmes droits, communautés de communes comme communautés d'agglomération.

M. Mathieu Darnaud, rapporteur.  - Je comprends les motivations de Mme Joissains, mais si la métropole Aix-Marseille peut déléguer des compétences, c'est là l'exception. Avis défavorable.

M. Jean-Michel Baylet, ministre.  - Nous venons d'accepter que les communes puissent conserver la compétence tourisme. Là, nous sommes dans le cadre général : avis défavorable.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Le trophée de la tératologie administrative revient incontestablement à la métropole Aix-Marseille. Si on peut la faire fonctionner, ce ne serait pas plus mal... Cessons de bricoler ! Je soutiens cet amendement.

L'amendement n°5 rectifié bis est adopté et devient un article additionnel.

Mme la présidente.  - Amendement n°7 rectifié, présenté par Mme Gatel, MM. D. Dubois, Détraigne et Capo-Canellas, Mme Morin-Desailly, MM. Luche, Kern et Gabouty, Mme Doineau, MM. Longeot, L. Hervé, Canevet et Bockel, Mmes Billon et Loisier et M. Namy.

Après l'article unique

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 6° du II de l'article L. 5214-16 du code général des collectivités territoriales est complété par les mots : « des eaux usées et, si des mesures doivent être prises pour assurer la maîtrise de l'écoulement des eaux pluviales ou des pollutions apportées au milieu par le rejet des eaux pluviales, la collecte et le stockage de ces eaux ainsi que le traitement de ces pollutions dans les zones délimitées par la communauté en application des 3° et 4° de l'article L. 2224-10 ».

M. Michel Canevet.  - C'est par interprétation jurisprudentielle que la compétence eaux pluviales découle de la compétence assainissement. Président d'une collectivité rurale, j'ai le plus grand mal à intégrer la compétence, car aucune recette ne peut être mise en face... Il faudrait que les communautés puissent se l'approprier librement, en définissant charges et ressources. L'échéance est fixée au premier janvier 2018 : imaginez les difficultés !

M. Mathieu Darnaud, rapporteur.  - Avis favorable.

M. Jean-Michel Baylet, ministre.  - Avis défavorable.

M. Alain Vasselle.  - Je voterai cet amendement. Alain Richard a toutefois souligné en commission que la compétence eaux pluviales risquait de devenir obligatoire pour les communautés de communes...

Nous nous retrouverions dans une situation inverse à celle recherchée. Il faudra y veiller lors de la navette.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Je ne comprends pas comment le Conseil d'État est parvenu à cette jurisprudence. Ne sait-il pas que les réseaux d'assainissement sont depuis longtemps séparatifs ? Sans doute les conseillers ne sortent-ils guère de chez eux... Il faudrait plutôt rattacher les eaux pluviales à la compétence Gemapi - d'autant que le problème tient plutôt au ruissellement. On aurait des recettes, et peut-être une vraie politique de prévention des inondations. Je voterai cet amendement.

L'amendement n°7 est adopté et devient un article additionnel.

Interventions sur l'ensemble

M. Jean-Pierre Sueur .  - Le groupe socialiste votera cette proposition de loi. Il n'a qu'un regret, le vote de l'amendement étendant les dispositions aux communautés d'agglomération, qui sont de deux types.

M. Daniel Gremillet.  - On est d'accord.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Nous avons eu tort de les appeler du même nom. L'Association des communautés de France comme l'association France Urbaine n'ont aucune objection au maintien du dispositif de la loi NOTRe.

Mme Marie-France Beaufils.  - Sauf si l'on écoute les élus !

M. Jean-Pierre Sueur.  - Pour le deuxième type, c'est différent. Lorsque la communauté d'agglomération compte une ville comme Privas, préfecture de 8 000 habitants, et 60 villages, il s'agit en réalité d'un pays rural. Nous comptons sur la navette pour préciser les choses à bon escient.

M. Daniel Gremillet.  - Très bien.

M. Yves Daudigny.  - Très bien.

M. Marc Laménie .  - Merci aux auteurs de la proposition de loi et au rapporteur pour son travail.

Nous traitons d'un sujet d'importance. Il faut valoriser le travail des élus de proximité dans la gestion du service public de l'eau et de l'assainissement. L'eau est un bien précieux. Je voterai cette proposition de loi avec conviction.

M. Jean Bizet, auteur de la proposition de loi .  - Je me réjouis du vote qui s'annonce. L'examen de ce texte, qui dépasse les clivages politiques traditionnels, honore le Sénat. Il est du rôle du législateur de corriger la loi quand on s'aperçoit, à l'épreuve du terrain, qu'elle ne correspond pas aux attentes : le principe de réalité l'emporte.

Il existe des syndicats d'alimentation en eau potable de dimension départementale, preuve que les élus locaux se sont déjà largement pris en main.

La proposition de loi, ainsi modifiée, est adoptée.

M. Jean-Michel Baylet, ministre .  - La loi est votée, merci à ceux qui l'ont soutenue. C'est original, je suis tenu de remercier le sénateur Masson, c'est une première pour moi ; le sénateur Bonnecarrère, dont la position ne m'étonne pas, car c'est un élu remarquable qui a transformé Albi ; le sénateur Desessard. J'ai admiré le numéro d'équilibriste de Jean-Pierre Sueur, dont je connais le talent. Monsieur Vasselle, la loi autorise les syndicats départementaux, qui sont une excellente chose.

Je remercie le rapporteur Darnaud, qui a déclaré que la mauvaise foi était savoureuse, délicieuse. Mais comparez ce qui est comparable ! Cette proposition de loi a plus une visée électorale qu'une prospérité.

Madame la présidente, je vous remercie. J'apprécie toujours votre façon de présider.

Merci à l'ensemble des sénateurs, au nom du Gouvernement et en mon nom personnel - le ministre des collectivités territoriales n'est-il pas plus que tout autre le ministre des sénateurs ? Merci pour le respect et l'esprit constructif que vous avez mis en oeuvre pour construire des textes bien ficelés dans l'intérêt général. (Applaudissements)