ENTRETIEN DU GROUPE SÉNATORIAL D'AMITIÉ FRANCE-HONGRIE

Mardi 21 septembre 1999, SZEGED -- Université des Lettres, Attila JÓZSEF.

La délégation sénatoriale est accueillie par un groupe d'enseignants et d'étudiants en français et des collaborateurs de l'Alliance française.

Les responsables de l'enseignement du français ont tout d'abord rappelé que l'Université des Lettres comptait 200 étudiants en français

-contre 60, il y a quelques années, avant la suppression de l'enseignement obligatoire de la langue russe- chiffre modeste comparé à l'effectif total des étudiants en lettres, soit 7.000. Mais, en fait, c'est l'université de Pecs qui demeure spécialisée pour les études francophones.

Il a été noté que la demande des étudiants concernait de plus en plus le français technique et que des expériences d'enseignement linguistique spécialisé étaient tentées, notamment pour les études de droit - 40 étudiants en français se trouvaient en première année de licence en 1999.

S'il a été relevé que les diplômes les plus appréciés étaient ceux admis en équivalence pour poursuivre en France des diplômes d'études approfondies (D.E.A.), ce qui est possible lorsque tout l'enseignement est dispensé en français comme à Szeged, il a été déploré que l'université ne dispose actuellement que de deux lecteurs français et d'un lecteur belge francophone.

En revanche, de nouvelles possibilités ont été offertes grâce à la création d' un centre d'étude européen à l'université.

Des formules de coopération sont apparues permettant aux étudiants de passer un semestre ou une année en France, notamment auprès des universités d'Angers, grâce à l'aide du Conseil général du département de Maine-et-Loire.

Des accords existent aussi actuellement avec d'autres universités, comme celles de Strasbourg, de Paris III, et de Paris VIII .

Enfin, le programme européen Erasmus a permis de financer six bourses pour un semestre, avec une organisation satisfaisante mais qui pose des problèmes financiers, car le montant de cette bourse de base doit obligatoirement être complété par le Gouvernement hongrois.

En revanche, il demeure impossible d'offrir une réciprocité dans la mesure où il n'y a pas de Français qui vienne apprendre le hongrois.

Les enseignants ont noté aussi que le choix des études de français dépendait beaucoup de l'image de la France, notamment aux yeux des parents des étudiants qui considéraient les perspectives offertes par les entreprises françaises implantées dans la région de Szeged.

Les collaborateurs de l'Alliance française ont signalé que des cours étaient donnés dans les entreprises, pour environ 350 étudiants, qui obtiennent alors des diplômes reconnus dans le monde entier.

Cependant, dans la mesure où l'apprentissage du français technique est développé, il est fortement démotivant pour les étudiants de constater que c'est souvent l'anglais qui est utilisé dans les entreprises françaises implantées en Hongrie.

Elle a aussi observé que si l'étude du français concerne d'abord les étudiants en lettres, les étudiants en droit, voire les étudiants en médecine étaient également très intéressés.

M. Gérard LARCHER, Président de la délégation, a évoqué la place du français comme troisième langue vivante étrangère en Hongrie et s'est s'inquiété d'une baisse d'intérêt pour l'apprentissage de cette langue.

Il a souhaité que l'enseignement du français technique soit développé, en parallèle avec la croissance des investissements français en Hongrie.

Les représentants du corps professoral ont exprimé leur inquiétude devant la baisse des moyens budgétaires accordés et ont regretté l'absence d'affectation d'un coopérant du service national (CSN) cette année.

Mme Yolande BOYER et M. André FERRAND, Sénateurs, a fait part de leur enthousiasme devant la volonté marquée des étudiants de connaître mieux la France.

II. LE LYCÉE FRANÇAIS DE BUDAPEST

A. LE LYCÉE ACTUEL

Créé en 1962 , il comptait 17 élèves.

Agréé par l'Education nationale et dépendant de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE), le lycée a une double vocation : assurer la scolarité des Français résidant en Hongrie et promouvoir la culture française auprès d'étudiants hongrois et de pays tiers, et ce, de la maternelle à la terminale.

Géré par l'Association des parents d'élèves, le Lycée français de Budapest est aidé par la Fondation du Lycée français de Budapest, créée en 1993 par l'Association des parents d'élèves et la Chambre de commerce franco-hongrois. Depuis 1994, cette fondation perçoit la subvention de l'État hongrois pour la scolarisation des élèves nationaux et les dons des mécènes.

Il est à noter que l'effectif de la communauté française en Hongrie augmente rapidement : de 1991 à 1994, le nombre d'élèves français a augmenté de 146 % (passant de 67 à 165). Dans le même temps, l'effectif des élèves hongrois passait de 133 à 164 (+ 23 %) et celui des élèves tiers progressait de 74 % (passant de 42 à 73). Cette progression s'est poursuivie et, à la rentrée 1999 - 2000, le lycée a accueilli 420 élèves dont 66 % de Français, 19 % de Hongrois et 15 % d'élèves d'autres nationalités.

Cette évolution a conduit au recentrage du Lycée français sur son rôle premier: la scolarisation des élèves français et des enfants, notamment francophones qui n'ont pas d'alternative scolaire sur place sans abandonner pour autant l'idée que l'école élémentaire et le lycée font partie du dispositif culturel de la France en Hongrie.

Au terme de leur scolarité, les élèves hongrois ont la possibilité de passer un double baccalauréat mais n'y sont pas tenus pour s'inscrire à l'université. Les résultats obtenus témoignent de la qualité de l'enseignement dispensé : en 1998 et 1999, le taux de réussite au baccalauréat fut de 100 % .

L'enseignement est aussi développé vers une ouverture sur la culture hongroise (langue, littérature, histoire) pour les élèves hongrois et une initiation à la civilisation hongroise pour les autres élèves.

Le problème actuel du Lycée français de Budapest découle en partie de son succès.

En effet, les simulations des entreprises et des conseils en recrutement présents à Budapest prévoyaient, en 1996, que les effectifs potentiels du lycée pourraient approcher 500 élèves à la rentrée 1997 et 600 élèves à la rentrée 1999, et que, à cette date, la proportion d'élèves français pourrait dépasser 50 % et celle des élèves hongrois descendre jusqu'à 27 % .

L'exiguïté des locaux actuels n'a pas permis une évolution aussi marquée non plus que l'accueil d'un nombre plus grand d'élèves hongrois.

B. LE PROJET DE NOUVEAU LYCÉE

Actuellement locataire de trois bâtiments différents sur un terrain exigu, le Lycée français envisage son déménagement et son extension depuis plusieurs années.

Après un choix de terrains d'implantation un peu laborieux, un terrain de 23.000 m 2 vient d'être acquis au début de l'année 2000 au nord de Budapest.

Une consultation d'architectes a été lancée pour un établissement permettant d'accueillir 480 élèves et les appels d'offres pour les entreprises seront effectués avant l'été afin de permettre l'ouverture du nouvel établissement à la rentrée 2001.

Le plan de financement envisage un coût total de plus de 50 millions de francs, soit un montant de T.V.A. de près de 10 millions de francs.

Comme l'a noté la délégation sénatoriale lors de sa visite en septembre 1999, l'équilibre de l'opération serait grandement facilité par la possibilité d'obtenir le remboursement de la T.V.A. sur la construction des nouveaux locaux.

Il est à noter que, pour une opération analogue, l'école américaine de Budapest a obtenu une telle facilité aux termes d'un accord hongrois-américain rendu public en février 1999.

M. André FERRAND, Sénateur des Français établis hors de France, s'est préoccupé activement de cette question depuis son retour de Budapest, après avoir rencontré, en Hongrie, divers responsables liés au projet du nouveau lycée.

III. L'INSTITUT FRANÇAIS DE BUDAPEST

Depuis 1992, un nouvel immeuble situé au bord du Danube abrite l'Institut français.

Ce déménagement a permis un changement d'échelle dans les activités culturelles françaises. Le moment était bien choisi puisque les entreprises françaises en Hongrie commençaient à se développer et que les autres pays d'Europe de l'ouest manifestaient aussi un regain d'intérêt pour la Hongrie.

Le nombre important d'ouvrages mis à la disposition du public, la fréquence des manifestations culturelles qui y sont organisées grâce à une équipe renforcée font de l'Institut français un lieu fréquenté et bien apprécié des Budapestois.

La commémoration du 40ème anniversaire de la Révolution hongroise de 1956 fut marquée par le succès d'une exposition et de débats organisés à l'Institut français sur ce thème.

La délégation sénatoriale avait visité cette exposition et apprécié l'extrême qualité de sa préparation et l'impact de la présentation retenue, cette exposition fut considérée comme un événement de référence dans l'évocation d'une page tragique de l'histoire, très présente au coeur des Hongrois.

En 1999, l'Institut hongrois accueille 400 étudiants dans ses cours (+ 55 % par rapport à 1996) ; la médiathèque a effectué 8000 prêts et, d'une manière générale, les activités de l'Institut sont largement reprises dans les médias.

Ces succès ont été permis, notamment, par la bonne connaissance du pays et de la sensibilité de ses habitants de la part de l'équipe de l'Institut.

IV. LA PROMOTION DES INDUSTRIES CULTURELLES FRANÇAISES

Cette compréhension franco-hongroise se manifeste aussi, à des degrés divers, dans d'autres domaines culturels.

Qu'il s'agisse de la radio, de la télévision ou du cinéma, la France et la Hongrie ont beaucoup à accomplir en commun. La coopération avec la France s'est, par exemple, traduite pour la radio à travers le cours de français de spécialité "Comment vont les affaires ?" ou la reprise du programme de chansons françaises "Top France".

À la télévision, des accords existent avec France 3, Art, l'INA.

Pour le cinéma, les Hongrois et les Français coproduisent chaque année deux ou trois longs-métrages sur la douzaine que compte aujourd'hui la production hongroise.

Mais c'est aussi au niveau de la distribution et de l'exploitation des films que cette coopération devrait davantage s'exercer dans un intérêt commun comme l'illustrent les chiffres suivants : en 1995, sur 143 films distribués pour la première fois en Hongrie, 95 étaient américains, 32 européens, dont 11 français et 9 hongrois et surtout, la même année, sur 10.713.356 entrées en salle, les films américains représentaient 88,33 % desdites entrées, les films européens 9,2 % dont les films hongrois 1,1 % et les films français 0,9 % .

Certes, la distorsion entre l'importance des films français coproduits, le nombre encore significatif de ceux distribués et le faible impact en nombre d'entrées en salle provient de la proportion importante de films français « art et essai » projetés.

Mais il n'en demeure pas moins que Français et Hongrois ont une carte à jouer ensemble pour assurer la pérennité et la diffusion de leur cinéma ; tous deux rencontrent autant de difficultés pour parvenir de l'auteur au spectateur. Car l'évolution constatée n'est pas irréversible. À titre d'exemple, entre 1993 et 1995, la part du cinéma européen en salle s'est améliorée passant de 5,8 % à 9,2 % .

Au moment où, en Hongrie, le nombre des salles de cinéma a chuté, passant de 3.600 en 1990 à 580 en 1995), - dont près de 500 déficitaires - et où se sont implantées en deux ans près d'une dizaine de salle multiplexes 16 ( * ) , la présence du cinéma français et la force des liens avec le cinéma hongrois demeurent des signes essentiels de la vitalité et de la diffusion de la culture française.

Par ailleurs, grâce au Festival du cinéma français, organisé chaque année depuis 1997, la promotion des oeuvres cinématographiques françaises peut être assurée auprès du grand public.

En 1999, 23 films français y ont été achetés par des distributeurs hongrois pour être exploités dans un réseau de salles qui accueillent 20 millions de spectateurs par an.

* 16 Près de 50 % des entrées et 70 % des recettes sont réalisées par ces nouvelles structures.

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