B. LES SOLUTIONS DE GESTION DE LA DETTE DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES, ORIGINALES MAIS PÉRILLEUSES

La réforme territoriale introduit une nouveauté fondamentale qui change la donne pour l'élaboration et la planification des dépenses communales : l' interdiction du déficit budgétaire des collectivités locales 3 ( * ) . Le principe est que toute compétence obligatoire doit recevoir un financement correspondant, soit par des transferts financiers du budget de l'Etat, soit par des ressources propres.

Même si les interlocuteurs de TÖOSZ que la délégation a rencontrés ont dit en comprendre le bien-fondé, en raison du fort endettement historique des collectivités territoriales, ils ont souligné que les transferts de l'État ne suffiraient pas à couvrir l'ensemble des compétences des communes : les dotations ne compensent en moyenne que 50 % des dépenses annuelles des collectivités.

L'application de ce principe pose donc problème et les critiques de ce nouveau système n'ont pas manqué d'être vives. Toutefois les responsables locaux estiment que cela incitera les collectivités territoriales à mieux utiliser les recettes locales et à mieux prendre en compte leurs responsabilités, rappelant que la Hongrie a été le premier pays à faire l'objet d'un programme de sauvetage international et que le gouvernement a mis un point d'honneur à ne plus faire appel à des aides extérieures pour redresser les finances publiques.

Parallèlement, cette interdiction s'est accompagnée d'un apurement pur et simple de la dette des communes de moins de 5 000 habitants, soit une dépense de plus de 600 milliards de forints pour l'État central (environ 2 milliards d'euros). En dépit de cette mesure, bon nombre de communes se trouvent actuellement en difficulté, car elles ont l'obligation de financer des compétences obligatoires sans en avoir les moyens budgétaires ; il en est ainsi, par exemple, des cantines scolaires dont elles assurent la charge.

Cette situation est d'autant plus problématique que la majorité des communes n'a pas de ressources fiscales locales significatives, d'où l'absence de réelles marges de manoeuvre. En outre, les communes n'ont quasiment pas accès aux financements européens, la plupart ne disposant ni de la technicité ni des fonds propres nécessaires pour respecter les règles de cofinancement.

En ce qui concerne l'autonomie fiscale des communes, la loi définit les types d'impôts qui peuvent être levés localement ainsi que les taux. La taxe professionnelle représente la partie la plus importante (plus de 80 %) des recettes fiscales locales, ce qui induit des disparités très importantes d'une commune à l'autre en fonction de leur tissu industriel et commercial, étant noté que l'État calcule le montant des dotations qu'il reverse en fonction des recettes prévisionnelles de taxe professionnelle. Cette répartition de l'impôt crée automatiquement une tension importante et persistante entre les grandes et petites villes hongroises. Certaines grandes villes ont par ailleurs fait le choix des émissions obligataires, avec des effets dramatiques sur leurs ratios d'endettement. Même si l'État a dans certains cas repris la dette à hauteur de 60 ou 70 %, leur situation financière reste fragilisée.

Dans le cas des 23 villes à statut départemental, qui sont quasiment toutes dirigées par des maires de la même couleur politique que le gouvernement, il semble difficile d'envisager leur faillite. Ces villes reçoivent en outre des subventions supplémentaires au titre de la réserve parlementaire quand leur maire est aussi député. Ces disparités sont cependant amenées à disparaître, car, à partir de 2014, entrera en vigueur l' interdiction du cumul des mandats : il ne sera plus possible alors d'être à la fois maire et député. Mais la situation financière alarmante de nombreuses communes conduit à penser qu'une vague de défections aura lieu lors des prochaines élections municipales à l'automne 2014.

Szeged fait figure d'exception, car la situation financière de la ville est saine. Les autorités municipales ne sont pas fondamentalement gênées par les nouvelles mesures en matière d'endettement communal ; la notation de la ville auprès des banques est très bonne, le dernier recours à l'emprunt date de 2009 et l'État a d'ailleurs repris 50 % des encours de dette. Mais en contrepartie, il a diminué ses subventions d'un montant supérieur au coût des missions dont il assume désormais la charge. M. László Solymos a indiqué à la délégation que toutes les communes perdent aujourd'hui de l'argent du fait de ces transferts . Mme Anna Magyar, présidente du département de Csongrád, membre du FIDESZ, a fait état pour sa part d'une baisse des subventions de l'ordre de 50 % en l'espace de quatre ans seulement.


* 3 Elle est visée par l'article 34 (5) de la Loi fondamentale : « Afin de maintenir l'équilibre budgétaire, la loi peut subordonner à des conditions ou à l'approbation par le Gouvernement la contraction d'emprunts ou d'autres engagement par la collectivité locale dans le respect des limites fixées par la loi ». L'État se donne ainsi les compétences nécessaires pour maîtriser l'endettement des communes auxquelles il se substitue en dernier ressort en cas d'insolvabilité.

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