II. PROGRAMME DE LA VISITE

A. LUNDI 2 SEPTEMBRE 2013

1. Village historique acadien à Caraquet : à la découverte de la culture acadienne

La visite de ce village fut une parfaite introduction à l'histoire acadienne et à ce séjour au Nouveau-Brunswick. Ouvert en 1977, à l'initiative d'Antoine Landry, ce village reconstitue la vie quotidienne des Acadiens à travers les bâtiments et les personnages, entre 1770 et 1949. Un vrai travail historique, mêlant historiens et passionnés, a été nécessaire pour mettre en place ce village. Les bâtiments ont été choisis et démontés, en divers lieux d'Acadie, pour être réinstallés à Caraquet. Ce village, qui a déjà accueilli plus de trois millions de visiteurs, est un outil vivant de conservation et de promotion de la culture acadienne.

2. Session de travail sur les enjeux environnementaux

Après la visite guidée, les délégués de l'AIFC se sont réunis dans le Château Albert, un édifice patrimonial situé dans le Village historique acadien. Ils ont ainsi pu échanger, pour la première séance de travail, sur des thèmes liés à la protection et la conservation des océans, du littoral, des espèces marines et de leurs habitats.

a) La protection et la conservation des océans, du littoral, des espèces marines et leurs habitats
(1) Au Canada

L'Hon. Geoff Regan a rappelé aux délégués que le Canada possède le plus long littoral au monde. De plus, le Canada est responsable de la gestion d'environ 7,1 millions de kilomètres carrés d'océan. Par ailleurs, plus de 16 000 espèces marines ont été répertoriées dans les eaux territoriales canadiennes, ce qui représente 40 % des espèces de mammifères marins du monde.

De nombreux défis se posent au Canada en matière de protection et de conservation des océans. Il y a l'augmentation du nombre d'espèces marines (116 espèces en 2012) en danger, la diminution de 52 % de la quantité de poissons de mer dans les océans du Canada entre les années 1970 et 1990, la surpêche, l'épuisement de nombreux stocks de poissons comme la morue de l'Atlantique, ainsi que l'effet de l'aquaculture sur les espèces sauvages. Il y a aussi le changement climatique et l'augmentation du niveau de la mer qui provoquent l'érosion côtière et l'intrusion d'eau salée dans les milieux humides et les eaux souterraines.

Le Canada a pris diverses mesures pour traiter ces problèmes. En 1997, le Canada est devenu le premier pays au monde à adopter une loi sur la gestion des océans. Plus tard, dans sa Stratégie sur les océans du Canada de 2002, le Gouvernement du Canada s'est engagé à mettre en oeuvre une approche écosystémique et intégrée de gestion des ressources océaniques et d'évaluation environnementale. En 2007, il a annoncé une nouvelle Stratégie nationale sur l'eau dont l'objectif est de protéger les milieux marins fragiles, de lutter contre la pollution et de renforcer les mesures préventives. En signant la Convention des Nations Unies sur la diversité biologique, le Canada a consenti à conserver 10 % des zones écologiques marines. Actuellement, le Canada protège 1 % de ses océans par l'entremise de huit aires marines protégées. Il a aussi deux aires marines nationales de conservation.

Le Canada s'est investi dans la prévention et la surveillance des déversements d'hydrocarbures en créant le Programme de surveillance intégrée de la pollution par satellite et le Programme national de surveillance aérienne.

Pour remédier au problème des espèces aquatiques envahissantes, le Canada a mis en place le Programme de monitorage des espèces aquatiques envahissantes pour détecter l'arrivée de nouvelles espèces et pour surveiller le développement des celles qui sont déjà établies. Des campagnes de sensibilisation sont également menées auprès des pêcheurs et des aquaculteurs à l'aide du Carnet d'identification des espèces aquatiques envahissantes.

Concernant le contrôle et la gestion des eaux et sédiments de ballast, le Canada a modifié la loi sur la marine marchande du Canada, en 2006, afin de mieux contrôler le déversement de ces eaux et, en 2010, a ratifié la Convention Internationale pour le Contrôle et la Gestion des Eaux de Ballast et Sédiments des Navires adoptée par l'Organisation Maritime Internationale (OMI) en février 2004. Par ailleurs, Environnement Canada gère un système de permis pour contrôler l'immersion des déchets en mer.

Dans le secteur de l'aquaculture, le Canada a lancé l'Initiative nationale pour des plans d'action stratégiques en aquaculture pour la période 2011-2015. Cette initiative vise à harmoniser les normes environnementales, la surveillance et les rapports d'une province à l'autre afin d'améliorer la gestion environnementale de l'industrie de l'aquaculture.

S'agissant de la santé des animaux aquatiques, le Canada a initié un programme national dont l'objectif est de prévenir l'introduction et la propagation d'éléments pathogènes graves liés aux animaux vivants au moyen de la déclaration obligatoire des maladies, des procédures de réponse d'urgence à une maladie, du contrôle des importations, du zonage et des permis pour les mouvements nationaux.

Dans un tout autre ordre d'idées, les Autochtones du Canada jouissent également d'un certain nombre de droits relatifs aux activités marines et côtières, conférés par traité ou par d'autres moyens. Le Programme autochtone de gestion des ressources aquatiques et océaniques a été mis en place pour accroître la participation des Autochtones dans la gestion intégrée des ressources océaniques et des bassins hydrographiques.

M. Regan a conclu en disant que le Canada accorde beaucoup d'importance à la coopération internationale afin de réaliser ses objectifs en matière de protection des océans, des espèces marines et de leur habitat.

(2) En France

Mme Pascale Got a débuté son intervention en affirmant que la France et le Canada partagent des défis similaires concernant la protection et la conservation des océans, du littoral et des espèces marines. La France possède un espace maritime considérable : 5 000 km de côtes et une zone économique exclusive de 11 millions de kilomètres carrés, deuxième après les États-Unis. La France rassemble également 1 200 communes maritimes. Par ailleurs, la France gère 5 des 25 points chauds de la biodiversité mondiale, 10 % des récifs coralliens mondiaux (seuls trois autres pays se classent devant la France dans ce domaine), soit 13 000 espèces endémiques et 20 % des atolls, répartis au sein des huit collectivités d'outre-mer tropicales. Face à la pression anthropique sur les zones littorales (10 % de la population sur 4 % du territoire, sans compter la pression touristique qui fait plus que doubler la population en été), la France s'est dotée d'un arsenal réglementaire varié pour protéger ces milieux fragiles. À ce jour, la France protège 8 % des océans en territoire français.

Plusieurs éléments menacent les espèces marines et les océans parmi lesquelles l'érosion marine. Différents outils existent, à plusieurs échelons, au premier rang duquel la loi littoral de 1986, qui vise à préserver les espaces rares et sensibles, à gérer de façon économe la consommation d'espace par l'urbanisation et les aménagements touristiques, à ouvrir plus largement le rivage au public, et à accueillir en priorité sur le littoral les activités dont le développement est lié à la mer. Elle interdit notamment de construire à 300 mètres du rivage, freinant ainsi l'urbanisation. Se pose également la question de la mise en sécurité des territoires en zones inondables. À la suite de la tempête Xynthia, un référentiel de protection contre les inondations dans l'estuaire de la Gironde a été instauré. De nombreux élus appellent à une modernisation de cette loi « Littoral ».

Dans le domaine de la politique de conservation du littoral et des océans, le Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres, créé en 1975, mène une politique foncière de sauvegarde du territoire. Dans le département de la Gironde, Mme Pascale Got a indiqué qu'un travail de concertation sur la politique environnemental est mené avec le Conservatoire. Sur sa circonscription, il existe une aire marine protégée. Une réflexion est ainsi menée au niveau des régions : en Gironde, un groupement d'intérêt public sur l'érosion marine a ainsi été mis en place et trois communes font office de sites pilote. En filigrane de la problématique de la protection du littoral, la question est de savoir comment organiser et faire cohabiter l'activité humaine et touristique sur ces territoires.

Outre l'arsenal réglementaire national, existent également des outils européens, via la politique commune de la pêche, instrument essentiel de l'Union européenne. Sur le plan du droit international, des progrès doivent être réalisés pour l'amélioration de la sécurité maritime. Par ailleurs, le rôle des organisations scientifiques et celui de l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (Ifremer) est essentiel.

À la suite des présentations de l'Hon. Geoff Regan et de Mme Pascale Got, les délégués ont pu échanger sur le sujet. Il a été rappelé que la France dispose, depuis 1982, d'une loi relative à l'indemnisation des victimes de catastrophes naturelles, qui est à l'origine d'un système d'indemnisation pour les dommages matériels causés par un phénomène naturel . Concernant la protection du littoral, les approches sont différentes de part et d'autre de l'Atlantique. Alors qu'il existe, en France, une interdiction d'installation à moins de 300 mètres du rivage, la majorité des provinces et des territoires canadiens permettent aux gens de s'établir à 30 mètres du rivage. Sur ce sujet, il convient de trouver un équilibre entre les enjeux écologiques et économiques. Plusieurs autres sujets ont été abordés : la gestion des aires marines protégées, le problème de la surpêche, le rôle de l'aquaculture (la France est le premier producteur aquacole), la cohabitation parfois difficile entre l'aquaculture et la pêche traditionnelle.

b) La mise en oeuvre des principes de la pêche durable et responsable
(1) Au Canada

La séance de travail s'est poursuivie sur le thème de la mise en oeuvre des principes de la pêche durable et responsable. L'Hon. Michel Rivard a pris la parole et expliqué que le début de la gestion moderne de la pêche durable au Canada remonte à l'un des exemples les plus tragiques de mauvaise gestion d'une ressource dans l'histoire canadienne, c'est-à-dire l'effondrement des stocks de morue. Le déclin des stocks de morue du Nord et le moratoire « temporaire » subséquent décrété en 1992 ont coûté à l'économie canadienne plus de 700 millions de dollars et 31 000 emplois, dont 90 % se trouvaient à Terre-Neuve-et-Labrador. Les stocks, la pêche et le paysage culturel de Terre-Neuve-et-Labrador ne s'en sont jamais relevés.

La cause du déclin de la morue est souvent associée à la « tragédie des biens communs ». Dans le cas de la pêche, chaque homme est pris dans un système qui le force à pêcher sans limite - dans un monde qui est limité, ce qui le conduit inévitablement à la ruine. Ironiquement, la thèse de Garrett Hardin concernant la tragédie des biens communs a été écrite en 1968, l'année où les prises de morue ont atteint un sommet, à plus de 800 000 tonnes, ce que l'on a appelé le « sommet mortel », fruit d'une pêche libre de toute contrainte et de technologies de plus en plus performantes.

Comme l'a fait remarquer Hardin, une des solutions serait l'attribution des droits à une ressource publique. Dans le cas des pêches, il s'agirait de fixer des totaux et des quotas de captures admissibles ou de limiter l'effort de pêche. Les totaux de captures admissibles pour une pêcherie donnée (et les quotas qui y sont associés) ainsi que les limites de l'effort de pêche, toutefois, ne sont efficaces que dans la mesure où le sont l'évaluation de la santé des stocks, la fixation d'un maximum de captures et la capacité de faire respecter ce maximum. Quant à la morue, étant donné l'évolution rapide de la technologie, tous ces mécanismes ont échoué, d'où l'effondrement des stocks.

Dans les eaux territoriales du Canada (limite de 200 milles après 1977), l'évaluation de la santé des stocks fut sensiblement surestimée jusqu'en 1989, alors qu'une réévaluation des méthodologies a révélé une surestimation de l'ordre de 50 % des stocks. Le pêcheur côtier avait remarqué des signes annonciateurs bien avant cette date.

C'est en 1973 qu'on fixa pour la première fois un plafond de captures admissibles à l'intérieur des eaux internationales, mais ce plafond étant trop élevé, il ne fut pas appliqué. D'aucuns ont déclaré qu'il y avait eu surestimation des stocks parce que l'effort de pêche n'avait pas été correctement déterminé par rapport aux nouvelles technologies. En outre, la fixation de limites internationales peut devenir un exercice politique délicat et ces limites sont, de par leur nature, difficiles à mettre en oeuvre.

En réponse à la surpêche à la porte de ses frontières, le Canada a préconisé l'adoption de la convention des Nations Unies sur le droit de la mer « relative à la conservation et à la gestion des stocks de poissons chevauchants et des stocks de poissons grands migrateurs ». Un aspect important de cette convention de 1995 est l'introduction de l'approche de précaution pour la pêche afin de garantir la pérennité des stocks. L'approche de précaution est exécutée dans le secteur des pêches au Canada aux termes d'un cadre décisionnel pour les pêches intégrant l'approche de précaution. Celui-ci contient des points de référence définissant le moment à partir duquel un stock se trouve dans une zone critique, une zone de prudence ou une zone saine et celui à partir duquel il faut prendre des décisions de gestion sur les quotas, y compris les prises accessoires, à partir des évaluations des stocks par rapport à ces points de référence.

Le sénateur Rivard a conclu en rappelant que le Canada a appris à ses dépens les leçons d'une pêche non durable. La gestion des pêches est difficile et doit tenir compte d'une information limitée, des fluctuations environnementales imprévisibles et d'une aggravation des stress sur les milieux marins. Les évaluations des océans de la planète laissent croire que la situation est généralisée. L'application concertée de l'approche de précaution présente une solution puissante et nécessaire pour garantir la pérennité des pêches, car bien que la pêche non durable ne soit pas vraiment inhabituelle, elle comporte inévitablement des conséquences tragiques.

(2) En France

Le député M. Patrice Martin-Lalande a affirmé, qu'il y a en la matière, la nécessité de concilier la viabilité économique d'un secteur économique stratégique et soumis à une forte concurrence avec la protection des écosystèmes et des ressources naturelles. Il existe pourtant une contradiction entre l'industrialisation croissante du secteur (bateaux de plus en plus grands, techniques de captures extensives, installation de moyens de conservation et de traitement des poissons à bord, allongement de la durée des campagnes, etc.) et la vulnérabilité du milieu (effondrement des stocks de certaines espèces, pollutions des navires en mer, etc.). La notion de pêche durable est donc un impératif environnemental, qui doit permettre de perpétuer la ressource, de protéger les milieux et, in fine , d'assurer l'avenir du secteur. Toutefois, cet impératif se heurte à un défi économique de grande ampleur, dû notamment à la concurrence croissante de pêcheries extensives et moins scrupuleuses s'agissant des garanties sociales et environnementales.

La pêche durable et responsable est ainsi un impératif environnemental. On estime qu'un stock est exploité de manière durable ou non en fonction de deux critères : le seuil de biomasse des reproducteurs, c'est-à-dire le nombre d'animaux reproducteurs pour chaque espèce en-deçà duquel le renouvellement des générations n'est plus garanti, et le taux d'exploitation (ou taux de mortalité par pêche, qui quantifie la pression que la pêche fait subir à un stock) au-delà duquel le risque de pêcher trop de reproducteurs est élevé. Le respect simultané de ces deux critères permet de dire d'une pêche qu'elle est durable.

Le député a fait un état des lieux de la pêche en France : en dix ans, la quantité de poissons pêchés en France a diminué d'un quart environ en raison de la réglementation européenne visant à réduire les flottes pour protéger les stocks. La production actuelle est de l'ordre de 420 000 tonnes par an, dont un peu plus de 300 000 tonnes de poisson frais et le reste de produits congelés, à quoi il faut ajouter près de 300 000 tonnes de production aquacole (dont les deux tiers d'huîtres et de moules).

Cette baisse de la production a permis aux espèces pêchées, presque toutes surexploitées au début des années 2000, de retrouver des niveaux acceptables (sur la façade atlantique, un tiers environ des stocks demeurent surexploités). Pour l'essentiel, les niveaux de captures sont compatibles avec l'indice de rendement maximal durable (RMD) calculé à partir des deux critères précités. Cela étant, il existe encore de fortes variations annuelles de « recrutement » (c'est-à-dire l'abondance des jeunes poissons de l'année), et les conséquences de la forte surexploitation passée (depuis la fin des années 1970) se font encore sentir.

Il existe un autre problème environnemental : le gaspillage qui s'observe en amont (le « rejet » de poissons non commercialisables) et en aval (la part du poisson qui n'est pas commercialisée).

S'agissant des rejets, l'Ifremer évalue la part de poissons rejetés en mer après capture dans les eaux françaises à environ 20 %, la moyenne européenne étant à un quart environ. La très grande majorité des poissons rejetés sont déjà morts ou moribonds. Les poissons rejetés le sont pour trois raisons : soit il s'agit d'espèces interdites à la pêche, non comestibles ou sans valeur commerciale, soit les poissons sont « hors taille » (trop jeunes), soit ils sont hors quotas (dépassant les quantités autorisées par la réglementation européenne par espèce). En France, les rejets de la pêche côtière sont plus importants que ceux de la pêche hauturière. L'Union européenne (UE) a fixé un objectif « zéro rejet » pour 2015 qui apparaît peu réaliste aux professionnels du secteur. Ce gaspillage a évidemment un impact sur les stocks, notamment ceux d'espèces protégées et menacées, ou ceux d'espèces dont les taux de renouvellement sont faibles. Cela étant, de nombreux chercheurs font valoir que ce « gaspillage » est en fait recyclé naturellement : les poissons rejetés sont consommés en surface par les oiseaux, ou au fond de l'océan par les espèces dites « benthiques », qui vivent dans les grandes profondeurs. On a même constaté que l'application d'une réglementation plus stricte en matière de rejets en mer sur les côtes bretonnes mettait la frégate, un oiseau protégé, en difficulté.

Tel n'est évidemment pas le cas du gaspillage à terre, qui s'apparente bien davantage à du gâchis. Deux phénomènes : d'une part, les invendus des criées, qui n'alimentent que partiellement le circuit de distribution aux plus démunis, l'essentiel étant détruit ; d'autre part, les déchets produits au cours de différentes opérations de transformation - éviscération, étêtage, filetage, pelage, décorticage, écorçage, lavage, décongélation, cuisson. En France, ces opérations concernent environ 50 % du produit de la pêche, l'autre moitié étant directement consommée en alimentation humaine. Une meilleure valorisation de ces produits présenterait un grand intérêt écologique, mais aussi économique.

L'impératif environnemental se heurte, en effet, à un vaste défi économique, qui met le secteur français de la pêche en difficulté, comme l'ont montré les crises de 2008 et 2009. L'évolution du marché repose sur deux facteurs : l'émergence de nouvelles flottes (Chine, Inde, Indonésie etc.) et les changements des habitudes de consommation.

La consommation de poissons et autres produits de la mer est en hausse régulière depuis une vingtaine d'années, d'où une perspective de croissance pour le secteur. À l'échelle mondiale, la production devrait augmenter de 15 % dans les dix prochaines années, alors même que les prix continueront eux aussi de progresser. Or, près d'un tiers de la production française est destinée à l'importation (huîtres notamment). Mais la France, qui dispose de 5 000 km de côtes et de la deuxième zone économique exclusive du monde (11 millions de km carrés dont 700 000 en Europe) importe 80 % de sa consommation de produits de la mer. La balance commerciale du secteur est donc déficitaire, à hauteur de 3,5 milliards d'euros.

L'un des défis de la pêche française est donc la reconquête de son marche intérieur face à des flottes qui produisent davantage et à moindre coût, alors même que la demande des consommateurs s'oriente notamment vers des espèces non produites en France (saumon ou encore pangasius produit en Asie orientale). Or, la pêche française ne saurait combattre la concurrence, proche ou lointaine, en cassant les prix : le secteur n'y survivrait pas en dépit du système d'aides et de subventions. Il lui faut donc s'adapter en tâchant d'orienter la demande vers des espèces pêchées en France, et s'adapter à l'offre en proposant notamment davantage de poissons filetés. Les coûts de production, et notamment ceux de l'énergie, constituent un autre chantier à exploiter. Enfin, la labellisation, garantie d'origine et de fraîcheur des produits, peut offrir un autre atout à la reconquête du marché français.

Pour respecter l'impératif environnemental de pêche durable tout en s'adaptant à l'évolution d'un marché mondialisé, le secteur de la pêche français a un atout : il s'agit d'un secteur encore largement artisanal (c'est-à-dire des bateaux de moins de 24 mètres, avec des équipages réduits, qui peuvent pêcher en haute mer mais dont les sorties sont généralement de quelques jours tout au plus, et qui constituent actuellement 80 % des capacités de pêche du pays). Très souvent, le capitaine du navire de pêche est encore aujourd'hui le propriétaire - il est le patron-pêcheur. En Europe du Nord, au contraire, les entreprises de pêche sont très concentrées et leur capital financier et social n'est plus aux mains des pêcheurs eux-mêmes. Or, les pêcheries artisanales ont certes un rendement parfois inférieur, mais une plus grande souplesse et une meilleure capacité d'adaptation, outre le fait qu'elles permettent de transmettre un savoir-faire et de susciter des vocations à l'échelle locale. De plus, dans certains territoires (les côtes bretonnes et les outremers en particulier), la pêche est un facteur de cohésion sociale et d'aménagement du territoire. La durabilité et la viabilité du secteur sont donc essentielles au développement des zones concernées.

À la suite de ces présentations, les délégués ont discuté de divers sujets, dont le marché des pêches en France et au Canada, les différents mécanismes en place pour la surveillance de la pêche illicite, les exigences des consommateurs et les changements d'habitudes alimentaires et leur impact sur l'offre, la traçabilité et l'étiquetage des produits de la mer ainsi que la pêche artisanale.

3. Soirée acadienne : le patrimoine culturel acadien à l'honneur

Un dîner culturel réunissant les personnalités politiques de la péninsule acadienne ainsi que des représentants associatifs (Société Nationale de l'Acadie, Société Nationale du Nouveau-Brunswick, Association France-Canada de Caraquet) a mis à l'honneur le patrimoine artistique acadien.

Cette soirée a permis en particulier d'appréhender une importante facette de la culture acadienne, la musique. La chanson Grand-Pré d'Angèle Arsenault, interprétée par une artiste acadienne, Isabelle Thériault, raconte l'événement douloureux du Grand Dérangement. À Caraquet, a d'ailleurs lieu chaque année le festival acadien, réunissant des artistes du pays, pour promouvoir la culture acadienne. La culture est, en effet, un des vecteurs de promotion et de conservation de l'identité acadienne.

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