Vote par Internet : l'urne planétaire...

Michel LAFLANDRE,
Service des relations internationales du Sénat

Ce sujet avait été évoqué quatre ans auparavant. Aujourd'hui, je perçois un certain scepticisme chez les universitaires quant au vote électronique. Je pense toutefois que le vote par Internet a un avenir. Ainsi, la déterritorialisation résulte de l'ouverture d'un nouvel espace par l'Internet. Le cyberespace est donc une notion pouvant être validée.

Le vote par Internet est un avatar moderne du vote par correspondance. Le vote-papier par correspondance est ou a été un système largement pratiqué en France et à l'étranger. Le vote par correspondance est :

• A été utilisé en France dans les élections politiques jusqu'en 1975 ;

• largement pratiqué dans les élections administratives, professionnelles, consulaires,

• au point d'être devenu le mode exclusif de votation dans certaines élections non politiques ;

• est le mode classique d'expression du suffrage politique dans plusieurs pays (en Suisse, par exemple) ;

• survit dans une élection politique française pour les Français de l'étranger.

Dès lors, existe-t-il une différence entre le vote-papier par correspondance et le vote par Internet ? J'estime que la démarche est la même.

La suppression en 1975 du vote par correspondance dans les élections politiques a été une mesure inspirée par le « principe de précaution ». La mesure a ainsi été largement décriée par de nombreux électeurs.

Abordons la déterritorialisation de l'acte de vote induit par le vote par Internet. Jusqu'alors, nous nous sommes intéressés essentiellement aux raisons justifiant le recours au vote par Internet. Nous n'avons donc pas encore suffisamment réfléchi à qui il s'adressait. En France, les Français de l'étranger constituent le premier groupe intéressé par un vote par Internet. Louis DUVERNOIS affirme qu' « à l'étranger, le principal obstacle à l'expression du suffrage des citoyens français est la distance les séparant du bureau de vote ». De nombreux pays ont donc mis en place des expérimentations. En 2003, les Etats-Unis ont lancé une expérimentation pour les Américains de l'étranger servant sous les drapeaux. En 2008, lors des primaires, les expatriés démocrates ont pu voter en ligne pour choisir leur candidat à l'élection présidentielle. Concernant le vote par Internet des Français de l'étranger, Richard YUNG estime que le tabou du vote par Internet devra être brisé pour favoriser la participation.

Le décret n°2006-285 du 13 mars 2006 prévoit que les Français inscrits sur les listes électorales consulaires peuvent voter par voie électronique. Sa mise en place a toutefois été compliquée car on l'avait entourée de précautions excessives pour prévenir les fraudes. Ainsi, une préinscription et une confirmation d'inscription étaient nécessaires. Du coup, l'expérimentation du vote par Internet a donc constitué un échec. Ainsi, 28 000 des 525 000 électeurs seulement avaient choisi de voter par Internet. Néanmoins, la réflexion se poursuit. Les moyens techniques doivent être améliorés, car l'idée n'est pas intrinsèquement mauvaise.

L'objectif est d'abolir la distance entre l'électeur et l'urne. Ainsi, les personnes handicapées ou à mobilité restreinte, les personnes hospitalisées et les individus incarcérés sont des publics concernés. Les individus votant par procuration trouvent également un intérêt au vote par Internet.

Le vote par Internet permet de réduire le nombre des abstentionnistes, notamment chez les jeunes. De plus, la technique semble bien proportionnée à l'exercice de la citoyenneté européenne. En effet, les intérêts politiques y transcendent les intérêts nationaux. L'UE a donc d'ores et déjà testé de nombreuses formules de vote par Internet.

En conclusion, le vote par Internet s'illustre par une équation C(yber espace) = 3D + 3T. Les trois « D » sont la déterritorialisation, la délocalisation et la dématérialisation. Les trois « T » sont la simplicité, la rapidité et l'efficacité.

Jean-Claude MASCLET

Je vous remercie de cet exposé optimiste quant au développement du vote par Internet. Je cède la parole à Anne ESAMBERT.