Service des études juridiques (septembre 2007)

ALLEMAGNE

La plupart des mesures normatives visant à lutter contre la dépendance aux jeux sont contenues, d'une part, dans le règlement fédéral du 6 février 1962 relatif aux machines de jeux automatiques et, d'autre part, dans le protocole sur les jeux de hasard conclu en 2004 entre les Länder (1 ( * )) , qui régit les jeux de loterie ainsi que les paris sportifs.

Le 28 mars 2006, la Cour constitutionnelle fédérale a estimé que le monopole des Länder en matière d'organisation des paris sportifs - qu'elle considère par ailleurs comme un bon moyen de lutter contre la dépendance aux jeux - n'était compatible avec le principe constitutionnel de liberté d'établissement que s'il était assorti de dispositions tendant à prévenir la pathologie du jeu. Elle a donc invité le législateur du Land de Bavière, mis en cause dans sa décision, à prendre les mesures nécessaires avant la fin de l'année 2007. En août 2006, elle a rendu une décision similaire dans une affaire concernant le Land de Rhénanie du Nord-Westphalie. Par conséquent, les Länder devraient prochainement conclure un nouveau protocole sur les jeux. Le texte en cours d'élaboration se fixe notamment pour objectifs la prévention de la dépendance aux jeux et l'établissement des conditions d'une lutte efficace contre celle-ci.

1) La protection des joueurs

a) La protection des mineurs

Le protocole sur les jeux de hasard interdit aux mineurs de participer aux jeux de hasard qu'il régit, c'est-à-dire aux divers jeux de loterie et aux paris sportifs. Le prochain protocole inclut les casinos dans son champ d'application. Il se fixe notamment comme objectif la protection des jeunes et devrait explicitement reconduire l'interdiction faite aux mineurs de jouer.

Le règlement du 6 février 1962 relatif aux machines de jeux automatiques interdit l'implantation de ces dernières dans des lieux essentiellement fréquentés par des enfants ou par des jeunes. Il impose également aux exploitants d'interdire aux mineurs l'accès aux locaux dans lesquels des machines à sous sont implantées.

b) L'interdiction de jeu

Actuellement, l'exclusion ne vaut que pour les casinos : toute personne a la possibilité de demander à être interdite de casinos pour une période qu'elle détermine elle-même. Jusque récemment, cette mesure était peu efficace. En effet, l'interdiction ne concernait que les jeux de table, et non les jeux automatiques, de sorte que les établissements n'avaient aucune obligation de contrôler les joueurs à l'entrée des salles où ces appareils sont implantés. De plus, la jurisprudence dominante considérait que le contrat conclu entre les joueurs interdits et les casinos était nul, mais que les perdants devaient payer leurs dettes. En décembre 2005, la Cour fédérale suprême a renversé cette jurisprudence, en donnant raison aux épouses de deux joueurs interdits de casinos qui avaient perdu en un soir une forte somme aux machines à sous du casino de Dortmund.

Le nouveau protocole devrait comprendre des dispositions plus strictes sur l'interdiction de casinos . La durée minimale de l'interdiction serait d'une année et la mesure serait valable dans tout le pays, les opérateurs ayant l'obligation de gérer un système interconnecté. L'interdiction pourrait, comme c'est actuellement le cas, être prononcée à la demande des joueurs, mais aussi à la demande de tiers, au courant des problèmes de dépendance ou de surendettement lié à la dépendance.

Le nouveau protocole devrait également prévoir l'extension de ces dispositions aux loteries et aux paris sportifs organisés par les opérateurs des Länder .

c) La limitation des moyens de paiement utilisables

Les machines automatiques ne peuvent fonctionner qu'avec des pièces et des billets de banque, et non avec des cartes bancaires. En outre, les exploitants n'ont pas le droit de faire crédit aux clients.

Certains opérateurs limitent le montant des mises qu'ils acceptent de la part d'un joueur. C'est par exemple le cas de la société qui exploite les jeux de loterie dans le Land de Rhénanie du Nord-Westphalie : aucun joueur ne peut engager plus de 250 € par semaine.

d) L'information des joueurs

Le règlement du 6 février 1962 relatif aux machines de jeux automatiques oblige les fabricants de ces appareils à doter ceux-ci d'avertissements visibles portant sur les risques du jeu excessif et mentionnant la possibilité d'obtenir des conseils en cas de dépendance. Il oblige par ailleurs les exploitants des salles de jeu à mettre à la disposition de leurs clients des brochures sur les risques liés aux jeux.

Le nouveau protocole devrait inclure des dispositions sur l'obligation pour les opérateurs d'informer leurs clients des probabilités de gains et de pertes, des risques de dépendance - en particulier pour les jeunes - et des possibilités de traitement. Ainsi, les coupons de jeu et les reçus devraient contenir des renseignements sur les risques du jeu excessif et sur les aides possibles.

Les opérateurs des jeux de loterie s'efforcent d'informer les joueurs des risques liés à la dépendance. Ils le font notamment par le biais de leurs sites Internet. Outre des renseignements généraux (conseils pour éviter la dépendance, tests pour identifier sa propre dépendance, etc.), ces sites comprennent des liens vers des centres d'aide. Les revendeurs des jeux de loterie mettent également à la disposition de leurs clients des feuillets d'information.

2) La limitation et le contrôle de l'offre

a) Le numerus clausus

La législation sur les casinos relève de la compétence des Länder. Or, ces derniers limitent le nombre des casinos, soit en imposant un numerus clausus soit en énumérant les communes dans lesquelles des casinos peuvent être exploités.

En revanche, pour les machines de jeux automatiques, qui relèvent de dispositions fédérales, il n'existe aucun numerus clausus . Le règlement du 6 février 1962 qui régit ces machines limite toutefois le nombre d'appareils susceptibles d'être implantés dans un établissement donné : trois pour les débits de boisson et douze pour les salles de jeux, en fixant à une pour 12 m 2 la densité maximale de ces machines dans ces salles.

b) La limitation des gains et des pertes

L'Institut fédéral de métrologie ne peut agréer que les machines qui répondent à certains critères . Ainsi, la durée minimale d'une partie est de cinq secondes, la mise maximale par partie de 0,2 €, la mise maximale totale de 25 €, le gain maximal par partie de 2 €, la perte horaire étant limitée à 80 € et le gain horaire à 500 €.

Le nouveau protocole devrait inclure des dispositions spécifiques aux loteries présentant un risque particulier de dépendance : le montant du lot du Jackpot serait limité, de façon à rester compatible avec l'objectif général de lutte contre la dépendance, fixé à tous les opérateurs.

c) La formation du personnel des établissements de jeux

Le nouveau protocole devrait inclure un alinéa sur l'obligation faite aux opérateurs de sensibiliser leur personnel au problème de la dépendance aux jeux .

3) Le traitement des joueurs dépendants et l'information du grand public

Depuis 2001, les caisses d'assurance maladie reconnaissent que, dans certaines circonstances, la dépendance aux jeux est une pathologie à part entière, qui doit être traitée.

L'Agence fédérale pour l'information sanitaire ( Bundeszentrale für gesundheitliche Aufklärung ) a mis en place un numéro de téléphone pour répondre aux questions des joueurs dépendants et des proches de ces derniers.

En février 2007, les opérateurs des jeux de loterie ont signé avec l'Agence fédérale pour l'information sanitaire un accord de coopération selon lequel ils s'engagent notamment à verser des fonds (661 000 € entre le 15 février 2007 et le 15 février 2008) destinés à financer plusieurs projets liés à la prévention de la dépendance aux jeux.

Le nouveau protocole devrait comprendre un article sur le fait que les Länder assurent des travaux de recherche sur la dépendance.

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Les associations actives dans ce domaine déplorent l'absence d'une commission fédérale de contrôle des jeux de hasard , car elles estiment qu'une telle instance pourrait jouer un rôle majeur dans la lutte contre la dépendance aux jeux.

* (1) Voir l'étude de législation comparée LC 171, d'avril 2007, sur l'organisation des jeux d'argent.

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