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N° 38

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2017-2018

Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 octobre 2017

PROPOSITION DE LOI

visant à instaurer un Pass permis citoyen ,

PRÉSENTÉE

Par M. Édouard COURTIAL, Mme Christine BONFANTI-DOSSAT, M. François BONHOMME, Mme Pascale BORIES, MM. Jean-Marc BOYER, Max BRISSON, Mme Agnès CANAYER, MM. Patrick CHAIZE, Marc-Philippe DAUBRESSE, Mmes Jacky DEROMEDI, Nicole DURANTON, Dominique ESTROSI SASSONE, MM. Bernard FOURNIER, Christophe-André FRASSA, Mme Joëlle GARRIAUD-MAYLAM, MM. Bruno GILLES, François GROSDIDIER, Mmes Pascale GRUNY, Corinne IMBERT, MM. Alain JOYANDET, Roger KAROUTCHI, Daniel LAURENT, Mmes Florence LASSARADE, Nadège LEFEBVRE, MM. Antoine LEFÈVRE, Gérard LONGUET, Michel MAGRAS, Didier MANDELLI, Mme Marie MERCIER, M. Sébastien MEURANT, Mme Brigitte MICOULEAU, MM. Jean-Marie MORISSET, Philippe MOUILLER, Olivier PACCAUD, Christophe PRIOU, Jean-François RAPIN, André REICHARDT, Mme Frédérique GERBAUD et M. François-Noël BUFFET,

Sénateurs

(Envoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le permis de conduire est souvent considéré comme le premier pas vers l'indépendance et l'autonomie. S'il permet de se déplacer plus facilement mais également plus librement un double constat s'impose.

Pour les jeunes, il est un outil souvent indispensable et un atout incontestable pour décrocher un emploi.

Mais force est de constater que son coût d'environ 1 045 euros en moyenne sur le territoire national ne le rend pas, dans de nombreux cas, accessible aux jeunes disposant dans la majorité des cas de revenus modestes, n'étant pas encore entrés dans la vie active. Or pour y entrer, le permis de conduire est justement demandé par certains employeurs ou nécessaire pour les trajets domicile-travail. C'est donc pour certains jeunes un véritable parcours du combattant pour faire face à ce serpent qui se mord la queue.

Il en résulte que de nombreux candidats renoncent à le passer et ainsi parfois à répondre à une offre d'emploi ou conduisent sans permis créant ainsi des situations extrêmement dangereuses pour l'ensemble des usagers de la route.

Il est donc urgent que l'État apporte une solution concrète et opérationnelle à cette situation qui peut prendre la forme d'une aide financière.

Cette subvention, à plus forte raison lorsqu'elle est financée par l'impôt, doit avoir une contrepartie. En effet, si cette aide devient un droit, il doit également s'accompagner d'un devoir. L'un ne va pas sans l'autre. Un acte de solidarité de la collectivité au bénéfice d'une personne implique nécessairement un engagement de cette dernière envers elle.

Alors que les Français expriment leur désintérêt de l'action publique, voire un sentiment de défiance à son encontre, il semble nécessaire de redonner du sens aux actions mises en place par la collectivité au bénéfice de chacun, en réaffirmant la dimension républicaine de l'action publique. Celle-ci se traduit par une contrepartie au service de l'intérêt général.

C'est justement ce que l'auteur de cette proposition de loi a mis en place d'abord dans la commune d'Agnetz puis à l'échelle de l'Oise lorsqu'il présidait le conseil départemental dans avec le Pass permis citoyen qui connait un large succès avec plus de 5 332 jeunes inscrits en deux ans d'existence.

Le Pass permis citoyen est accessible uniquement au primo candidat au permis de conduire et n'est pas cumulable avec d'autres aides en la matière. Contrairement à l'ancien dispositif qui ne concernait que 20 % des Oisiens car il était soumis à des conditions de ressources, le Pass permis s'adresse, quant à lui, à tous les jeunes sans distinction à condition de consacrer un peu de son temps aux autres.

Concrètement, en échange d'un engagement de 70 heures dans une association agrée par le département ou une collectivité, le jeune, âgé de 18 ans ou 19 ans, bénéficie d'une aide de 600 euros pour passer son permis de conduire (type permis B).

Il lui appartient de prendre contact avec la structure choisie pour en arrêter les modalités (lieu, calendrier, mission) avant le dépôt de sa candidature. Le bénéficiaire dispose d'un délai d'un an pour effectuer son action citoyenne qui pourra être fractionnée dans l'organisme d'accueil. L'aide est versée une fois la contribution citoyenne effectuée et après production de l'attestation de fin de mission par le bénéficiaire à une auto-école.

Depuis sa création, ce dispositif donnant-donnant a profité dans l'Oise à plus de 448 communes, 11 communautés de communes, 10 syndicats de regroupement de communes et syndicats, 558 associations et autres structures, 48 collèges et autres établissements d'enseignement et au Service départemental d'incendie et de secours.

Accompagner les jeunes en facilitant leur mobilité et donc leur insertion professionnelle tout en renforçant l'esprit citoyen et en développant du lien social voilà l'ambition du Pass permis citoyen. En créant un droit il y associe un devoir, tel est le coeur de l'action mise en place dans le département de l'Oise. C'est une expression de l'Oise des droits et des devoirs.

Contrairement aux idées reçues, les jeunes sont volontaires, dynamiques et responsables pour préparer leur avenir. Cette mesure, sans condition de ressources et accessible à tous, remet l'effort et le travail au centre de l'action en faveur des jeunes leur permettant de valoriser leur curriculum vitae grâce à une action qu'ils choisissent et dont ils peuvent être fiers. Il s'agit donc d'un système gagnant-gagnant ou chacun y trouve son compte : le jeune qui reçoit une aide non négligeable pour obtenir un outil indispensable à sa rentrée dans la vie active, l'association et les collectivités qui bénéficient d'une aide précieuse dans un contexte de raréfaction de l'argent public mais aussi à l'heure de la fin des contrats aidés.

L'objet de la présente proposition de loi est donc d'étendre à l'ensemble du territoire national ce dispositif innovant, répondant à une véritable demande des jeunes adultes mais également des associations et des communes, partenaires à part entière de cette mesure.

À l'échelle nationale, il est proposé de confier l'exécution et le contrôle de ce dispositif aux conseils départementaux, échelon de proximité mais aussi garant d'un maillage territorial efficace.

Si l'on sait que 718 890 candidats se sont présentés aux épreuves du baccalauréat à la session de juin 2017, le Pass permis citoyen représente un coût pour l'État estimé à 432 millions d'euros.

Son financement serait assuré par un double gage permettant que ce dispositif ne constitue pas une charge supplémentaire pour les départements, déjà durement touchés par la baisse importante des dotations de l'État et la forte augmentation des dépenses sociales non compensées par lui. Pour y faire face, il est donc proposé d'augmenter les prélèvements sur les recettes de l'État au profit des départements et corrélativement pour l'État d'augmenter les prélèvements sur les jeux et paris en ligne.

PROPOSITION DE LOI

Article 1 er

Au début du chapitre I er du titre I er du livre II du code de la route, il est ajouté un article L. 211-1 A ainsi rédigé :

« Art. L. 211-1 A. -  I. - Toute personne âgée de 18 ou 19 ans à son inscription, résidant en France depuis plus de trois ans, souhaitant passer pour la première fois son permis de conduire de catégorie B, peut demander une subvention de 600 € en contrepartie d'une contribution de 70 heures au service d'une collectivité ou d'une association agréée par le conseil départemental de son lieu de résidence.

« II. - L'aide est versée une fois la contribution citoyenne effectuée et après production de l'attestation de fin de mission par le bénéficiaire à une auto-école agrée, choisie par lui. Elle ne peut être cumulée avec une autre aide ayant le même objet.

« III. - Le bénéficiaire dispose d'un délai d'un an pour effectuer son action citoyenne qui pourra être fractionnée dans l'organisme d'accueil.

« IV. - L'exécution et le contrôle du présent article sont confiés aux conseils départementaux.

« V. - Les modalités du présent article sont définies par décret en Conseil d'État. »

Article 2

Les charges pour les départements résultant de l'application de la présente loi sont compensées par une augmentation à due concurrence des prélèvements sur les recettes de l'État au profit des collectivités territoriales, et corrélativement pour l'État par l'augmentation des taux des prélèvements mentionnés aux articles 302 bis ZH et 302 bis ZI.

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