N° 93

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2000-2001

Annexe au procès-verbal de la séance du 23 novembre 2000

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires culturelles (1) sur le projet de loi de finances pour 2001 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME I

CULTURE

Par M. Philippe NACHBAR,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Adrien Gouteyron, président ; Jean Bernadaux, James Bordas, Jean-Louis Carrère, Jean-Paul Hugot, Pierre Laffitte, Ivan Renar, vice-présidents ; Alain Dufaut, Ambroise Dupont, André Maman, Mme Danièle Pourtaud, secrétaires ; MM. François Abadie, Jean Arthuis, André Bohl, Louis de Broissia, Jean-Claude Carle, Gérard Collomb, Xavier Darcos, Fernand Demilly, André Diligent, Jacques Donnay, Michel Dreyfus-Schmidt, Jean-Léonce Dupont, Daniel Eckenspieller, Jean-Pierre Fourcade, Bernard Fournier, Jean-Noël Guérini, Marcel Henry, Roger Hesling, Pierre Jeambrun, Roger Karoutchi, Serge Lagauche, Robert Laufoaulu, Jacques Legendre, Serge Lepeltier, Mme Hélène Luc, MM. Pierre Martin , Jean-Luc Miraux, Philippe Nachbar, Jean-François Picheral, Guy Poirieux,  Jack Ralite, Victor Reux, Philippe Richert, Michel Rufin, Claude Saunier, René-Pierre Signé, Jacques Valade, Albert Vecten, Marcel Vidal, Henri Weber.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 2585 , 2624 à 2629 et T.A. 570

Sénat : 91 et 92 (annexe n° 8 ) (2000-2001)

Lois de finances .

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Les crédits du ministère de la culture s'élèvent en 2001, en dépenses ordinaires et crédits de paiement, à 16,671 milliards de francs, en progression à structure constante de 2,5 %.

Si l'on peut se féliciter de la poursuite de l'effort engagé au cours des précédents exercices en faveur de la culture, votre rapporteur soulignera que l'action culturelle ne peut être appréciée sur le seul critère de la progression des crédits.

Les marges de manoeuvre du ministère n'augmentent pas proportionnellement à ses crédits.

En effet, pèse sur le budget de la culture la contrainte des charges de fonctionnement d'une administration aux missions de plus en plus étendues. Les dépenses de fonctionnement inscrites au titre III qui s'élevaient à moins de 40 % du budget en 1995, en absorbent désormais plus de 47 %.

Le ministère doit également assumer le poids des établissements publics, croissant depuis l'achèvement des grands travaux et dont la montée en charge est encore loin d'être achevée, la création de nouveaux équipements constituant traditionnellement une preuve du dynamisme de la politique culturelle. Si l'on tient compte de l'ensemble des dotations qui leur sont destinées, leur coût total s'élevait, en effet, en 1999, dernière année pour laquelle votre rapporteur dispose de données exhaustives, à près de 5 milliards de francs, soit environ le tiers du budget.

S'agissant des dépenses d'intervention, la charge des dépenses reconductibles d'une année sur l'autre limite les possibilités d'arbitrage. Si les réformes engagées visent à permettre, grâce à une meilleure évaluation des structures subventionnées, une allocation plus efficace des crédits, force est de constater que les possibilités de redéploiement sont en réalité très faibles. Ainsi, les 80 millions de francs de mesures nouvelles ouvertes en 2001 en faveur du spectacle vivant sont, pour une large part, soit 50 millions de francs, consacrées à consolider les moyens supplémentaires dégagées par le collectif de printemps.

Le ministère se doit d'assumer au fil des ans dans de bonnes conditions ces charges faute de quoi les investissements souvent très lourds consentis par la Nation risquent de paraître inutiles. A cet égard, votre rapporteur ne peut que mettre en garde contre les effets d'une dictature de la nouveauté, consistant à créer sans cesse de nouvelles institutions sans se doter des moyens de faire fonctionner l'existant.

Il s'agirait là d'une politique à courte vue qui à terme ne pourrait que remettre en cause la pertinence des dépenses culturelles.

Or, aujourd'hui la France doit plus que jamais faire la preuve de la légitimité de l'intervention de la puissance publique dans le domaine culturel.

Les retards pris par les négociations de l'OMC à la suite de l'échec de la conférence de Seattle à la fin de l'année 1999 ne doivent pas nous conduire à relâcher notre vigilance. En effet, l'enjeu du combat engagé alors pour imposer notre conception de l'exception culturelle s'est déplacé au sein même de l'Union européenne où se fait jour à nouveau la tentation de soumettre la culture à la seule logique économique.

A cet égard, la défense de la diversité culturelle suppose certes une ambition politique mais également plus de rigueur dans la gestion de l'action culturelle, rigueur qui fait encore parfois défaut.

I. UN BUDGET QUI DEMEURE CONTRAINT

A. UNE AUGMENTATION DES CRÉDITS DE LA CULTURE

1. Le projet de budget

a) Une croissance de 2,5 % à structure budgétaire constante

En 2001, le budget de la culture s'élèvera en dépenses ordinaires et crédits de paiement à 16,671 milliards de francs, en augmentation de 3,7 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2000 (16,08 milliards de francs), soit une variation de 590 millions de francs.

Cependant, cette progression est pour une large part optique.

En effet, en 2001, ont été transférées sur le budget du ministère de la culture diverses dépenses pour un montant total de 176,47 millions 1 ( * ) .

A structure constante mais y compris les modifications de structures gouvernementales 2 ( * ) , la progression n'atteint que 2,5 % entre 2000 et 2001, les crédits passant de 16,08 milliards de francs à 16,49 milliards de francs.

Cette augmentation, comparable à celle constatée en 2000 (soit 2,1 %) consacre la relative décélération de l'effort gouvernemental en faveur de la culture. On rappellera que les crédits du ministère de la culture avaient progressé en 1998 et en 1999 respectivement de 3,8 % et de 3,5 %.

Toutefois, il convient de relever que les crédits de la culture continuent à bénéficier d'une priorité au sein du budget de l'Etat, dont les dépenses n'augmentent en 2001 que de 1,5 %.

b) Un pas supplémentaire vers le 1 %

En 2001, le budget de la culture représentera 0,99 % du budget de l'Etat dans sa structure actuelle, c'est-à-dire y compris les différents transferts de crédits.

A structure constante, cette proportion doit être ramenée à 0,98 % contre 0,967 % en 2000.

On s'approche donc progressivement du seuil symbolique du 1 %.

Votre rapporteur ne pourra que s'étonner une fois de plus que ce chiffre constitue pour le gouvernement un objectif de politique culturelle alors que le budget du ministère de la culture ne représente que le tiers de l'effort financier de l'Etat dans le domaine de la culture 3 ( * ) et à peine la moitié du montant des dépenses culturelles des collectivités locales, estimé à environ 35 milliards de francs.

Par ailleurs, comme il l'a souligné à plusieurs reprises, votre rapporteur soulignera que les modifications intervenues dans le périmètre du budget du ministère de la culture prive de sens cette référence budgétaire qui, réclamé voilà trente ans par Jean Vilar, n'a été atteinte qu'une fois, lors du vote de la loi de finances initiale pour 1993.

2. L'exécution des crédits en 2000 : le renforcement des moyens du ministère

Les crédits ouverts en 2000 se sont révélés largement supérieurs aux crédits adoptés en loi de finances initiale, atteignant 17,18 milliards de francs au 31 août 2000 (soit + 3 %).

Le budget de la culture a notamment bénéficié d'importantes ouvertures de crédits dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2000 du 13 juillet 2000.

Ces ouvertures de crédit, d'un montant total de 550 millions de francs en dépenses ordinaires et en crédits de paiement, ont permis pour l'essentiel de dégager les crédits nécessaires pour remédier aux dégâts provoqués par la tempête de décembre 1999 mais également, quoique dans une moindre mesure, d'allouer au ministère des moyens supplémentaires d'action.

* Les crédits " tempête "

Les monuments comme les parcs et jardins classés ou inscrits à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques ont particulièrement souffert de la tempête de décembre 1999, ce qui a conduit le ministère de la culture à mettre en place plusieurs dispositifs d'aide et de subvention qui ont nécessité des ouvertures de crédits pour un montant de 500 millions de francs réparties de la manière suivante :

au titre des dépenses ordinaires :

- 3 millions de francs sur le chapitre 31-90 " autres rémunérations principales " afin de financer les vacations des architectes et paysagistes des services de l'Etat pour fournir une assistance gratuite aux propriétaires de monuments dans l'évaluation des dommages causés par les intempéries ;

- 60 millions de francs pour des travaux d'urgence. Cette enveloppe a été répartie à parts égales entre le patrimoine de l'Etat (chapitre 35-20 " patrimoine monumental et bâtiments ") et le patrimoine n'appartenant pas à l'Etat (chapitre 43-30 " interventions culturelles déconcentrées ").

au titre des dépenses en capital :

- 242 millions de francs en autorisations de programme et crédits de paiement pour la réparation sous maîtrise d'ouvrage par l'Etat des monuments endommagés (chapitre 56-20). Au sein de cette dotation, 170 millions de francs seraient consacrés à la réparation de monuments appartenant à l'Etat et 72 millions de francs, aux monuments dont sont propriétaires les collectivités locales ou les particuliers ;

- 195 millions de francs en autorisations de programme et crédits de paiement pour les subventions d'investissement, dont 100 millions de francs, destinés au domaine de Versailles particulièrement éprouvé.

Tout en se félicitant que les crédits votés en loi de finances initiale n'aient pas été amputés par les circonstances exceptionnelles engendrées par la tempête de 1999, votre rapporteur relèvera toutefois qu'une très faible partie de ces moyens nouveaux a pu être affectée à la réparation des dégâts constatés, faute d'une accélération des procédures d'engagement des crédits.

* Des moyens d'action supplémentaires pour soutenir la création

Le secteur du spectacle vivant a bénéficié d'ouvertures de crédit pour un montant de 50 millions de francs, répartis entre interventions d'intérêt national pour 17 millions de francs (soit 34 %) et interventions déconcentrées pour 33 millions de francs (soit 66 %).

Ces moyens supplémentaires devaient permettre de renforcer les marges de manoeuvre financières des structures subventionnées afin de soutenir leur activité de création.

* 1 173,4 millions de francs de cotisations sociales maladie employeurs ont été transférés à partir du budget des charges communes ; 0,5 million de francs, à partir du budget de l'enseignement supérieur, correspondant à la création de 5 emplois sur le budget de l'établissement public de maîtrise d'ouvrage des travaux culturels ; 2,57 millions de francs provenant des services communs de l'équipement pour financer l'indemnité spécifique de service allouée aux fonctionnaires des corps techniques de l'équipement en fonction au ministère de la culture.

* 2 La création d'un secrétariat d'Etat au patrimoine et à la décentralisation culturelle entraîne une augmentation des crédits de rémunération de 0,53 million de francs.

* 3 Au sens du " jaune " correspondant, cet effort s'élève en 2001 à 55,59 milliards de francs.

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