IV. VERS UNE RÉVISION DE LA LÉGISLATION SUR LA SÉCURITÉ CIVILE

Les difficultés rencontrées dans la mise en oeuvre des lois du 3 mai1996 sur la sécurité civile 4 ( * ) ont suscité une abondante réflexion de la part des différentes parties concernées, et l'annonce par M. Daniel Vaillant, ministre de l'Intérieur, du dépôt de deux projets de loi.

A. LE RAPPORT FLEURY

Le 21 décembre 1999, le Premier ministre a chargé M. Jacques Fleury, député de la Somme, d'une mission temporaire auprès du ministre de l'Intérieur pour étudier les problèmes rencontrés dans la mise en oeuvre de la réforme des services d'incendie et de secours introduite par les lois du 3 mai 1996 précitées.

M. Jacques Fleury a suggéré une nouvelle répartition des compétences des services d'incendie et de secours, un financement adapté à chaque niveau d'organisation ainsi que diverses mesures d'accompagnement.

1. Une nouvelle définition et répartition des compétences des services d'incendie et de secours

a) l'échelon zonal

M. Jacques Fleury propose que les services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) puissent se regrouper en établissements publics interdépartementaux (EPID) , avec attribution de compétences obligatoires en matière de recrutement et de formation .

La création d'un échelon zonal permettrait la mutualisation des équipements lourds et particuliers (pour les cas d'interventions rares ou délicates) ainsi que la gestion commune d'équipes spécialisées.

L'échelon zonal, qui correspondrait aux actuelles zones de défense, permettrait aussi la mise en place de centrales d'achat .

b) l'échelon départemental

Le rapport Fleury souhaite un renforcement du positionnement à l'échelon départemental des services d'incendie et de secours, avec une clarification de la répartition des compétences entre les centres d'incendies et de secours intégrés dans le corps départemental et ceux demeurant à l'échelon local .

Il propose également, dans le cadre de la création de la communauté urbaine de Marseille, de " redonner à la situation particulière de Marseille et des Bouches-du-Rhône, une organisation conforme au droit commun ". Ceci impliquerait qu'il soit mis fin à la juxtaposition du Bataillon des marins-pompiers de Marseille et du service départemental d'incendie et de secours des Bouches-du-Rhône, soit par une intégration du Bataillon au sein du SDIS de ce département, soit par sa dissolution dans un délai de quinze ans.

c) l'échelon communal

Le travail de proximité accompli par les centres de première intervention (CPI), lors des catastrophes de ces derniers mois, s'est avéré d'une importance déterminante pour la population.

M. Jacques Fleury souhaite, à côté de CPI intégrés aux SDIS, le maintien de CPI relevant de l'autorité des maires .

Il préconise aussi qu'une distinction soit opérée entre la formation des sapeurs-pompiers volontaires en service dans les CPI départementalisés et celle des volontaires exerçant dans des CPI non intégrés dans un SDIS, en raison de la différence de nature des tâches accomplies.

2. Un financement adapté à chaque niveau d'organisation

L'aggravation des dépenses des services départementaux d'incendie et de secours résulte de mesures statutaires prises par l'État (et supportées par les collectivités territoriales) et de la mise à niveau des équipements devenue nécessaire dans certains départements à la suite des réformes de 1996.

a) le financement par l'État et la recherche de recettes nouvelles

Le rapport Fleury, constatant que le domaine d'intervention des services départementaux d'incendie et de secours relève assez largement du pouvoir régalien de l'État, estime que " celui-ci devrait prendre pour le moins sa part dans le coût de ce service ".

Il souligne le caractère indispensable des aides exceptionnelles de l'État aux SDIS en cas de catastrophe naturelle de grande ampleur et considère que l'État doit aussi intervenir dans un souci de péréquation en faveur des départements " les moins riches, les moins peuplés ou les plus exposés ".

M. Jacques Fleury, rappelant que les SDIS accomplissent de plus en plus souvent des tâches qui ne relèvent pas directement de leurs missions , évoque la participation financière des agences régionales d'hospitalisation , sous forme de conventionnement pour tenir compte des interventions des sapeurs-pompiers en lieu et place des services médicaux d'urgence.

Il suggère aussi un financement par les sociétés d'autoroute (les sapeurs-pompiers interviennent sur le domaine autoroutier mais doivent acquitter le péage...), par les sociétés d'assurance et envisage la participation de la région et de l' Union européenne pour les actions de formation.

b) le financement par les collectivités territoriales

M. Jacques Fleury considère que " la réduction de la charge supportée par les communes et par les établissements publics de coopération intercommunale permettrait de résoudre plus aisément les problèmes politiques que pose aujourd'hui la répartition des dépenses entre les différents acteurs locaux ".

Il estime que " plus grande sera la part prise par le budget départemental dans les dépenses restant à la charge des collectivités locales, mieux seront corrigées les injustices résultant de l'histoire qui subsistent au travers des cotisations versées par les communes et les établissements publics de coopération intercommunale ".

M. Jacques Fleury ajoute que " les départements dont les conseils généraux assument une part de financement très élevée semblent être ceux qui rencontrent le moins de problèmes " mais considère néanmoins utile de laisser une part de dépenses aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale , afin de maintenir un lien entre ces collectivités et les services départementaux d'incendie et de secours.

Il préconise, dans une première étape , de plafonner la part globale des communes et des établissements publics de coopération intercommunale au niveau atteint dans les budgets 2000, toute dépense supplémentaire étant donc assumée par le département.

M. Jacques Fleury propose, dès cette première étape, de donner aux représentants du conseil général la majorité des sièges au sein des conseils d'administration des services départementaux d'incendie et de secours, " car les présidents des conseils d'administration ne peuvent continuer de rechercher à chaque budget une majorité aléatoire ".

Il préconise une réduction progressive des " écarts injustifiés " entre les contributions des communes et des établissements publics de coopération intercommunale, " par l'application d'un nombre limité de critères objectifs " qui seraient inscrits dans la loi.

Les étapes suivantes de la réforme conduiraient, dans le souci d'une meilleure mutualisation, à augmenter progressivement la contribution des conseils généraux , prioritairement au bénéfice des collectivités dont la participation par habitant est supérieure à la moyenne départementale.

M. Jacques Fleury souligne qu'une intervention de l'État dans le financement des SDIS serait de nature à faciliter l'évolution proposée et souhaite " un moratoire sur les (...) nouvelles sources de dépenses supplémentaires ".

3. Les mesures d'accompagnement

Le rapport Fleury comporte aussi diverses propositions destinées à faciliter le fonctionnement des conseils d'administration des services départementaux d'incendie et de secours, et, en particulier, la possibilité pour les maires et les présidents d'établissements publics de coopération intercommunale de s'y faire représenter respectivement par les maires-adjoints et les vice-présidents .

Il préconise la création de trois vice-présidents de conseil d'administration (au lieu d'un seul) et d'un bureau permanent, chargé du traitement des " affaires courantes ".

Le rapport Fleury recommande une procédure d'adoption des budgets des SDIS selon les règles de droit commun applicables aux collectivités locales (au lieu de la majorité des deux tiers).

Enfin, M. Jacques Fleury propose une évolution de certaines dispositions régissant le personnel , comme l'institution d'un concours interne ouvert aux volontaires pour le recrutement des sapeurs-pompiers professionnels et la validation de connaissances acquises dans le cadre du volontariat comme formation professionnelle pour l'accès à certaines professions extérieures.

* 4 N° 96-369 relative aux services d'incendie et de secours (articles L.1424-1 et suivants du code général des collectivités territoriales) et n° 96-370 relative au développement du volontariat dans les corps de sapeurs-pompiers.

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