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Avis n° 335 (2000-2001) de MM. James BORDAS , Jean-Paul HUGOT et Jacques VALADE , fait au nom de la commission des affaires culturelles, déposé le 22 mai 2001

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N° 335

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2000-2001

Annexe au procès-verbal de la séance du 22 mai 2001

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires culturelles (1) sur le projet de loi , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE APRÈS DÉCLARATION D'URGENCE, portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel ,

Par MM. James BORDAS, Jean-Paul HUGOT et Jacques VALADE,

Sénateurs.

(1) Cette commission est composée de : MM. Adrien Gouteyron, président ; Jean Bernadaux, James Bordas, Jean-Louis Carrère, Jean-Paul Hugot, Pierre Laffitte, Ivan Renar, vice-présidents ; Alain Dufaut, Ambroise Dupont, André Maman, Mme Danièle Pourtaud, secrétaires ; MM. Jean Arthuis, André Bohl, Louis de Broissia, Jean-Claude Carle, Gérard Collomb, Xavier Darcos, Fernand Demilly, André Diligent, Jacques Donnay, Michel Dreyfus-Schmidt, Jean-Léonce Dupont, Daniel Eckenspieller, François Fortassin, Jean-Pierre Fourcade, Bernard Fournier, Jean-Noël Guérini, Pierre Guichard, Marcel Henry, Roger Hesling, Roger Karoutchi, Serge Lagauche, Robert Laufoaulu, Jacques Legendre, Serge Lepeltier, Mme Hélène Luc, MM. Pierre Martin , Jean-Luc Miraux, Philippe Nachbar, Jean-François Picheral, Guy Poirieux,  Jack Ralite, Victor Reux, Philippe Richert, Michel Rufin, Claude Saunier, René-Pierre Signé, Jacques Valade, Albert Vecten, Marcel Vidal, Henri Weber.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 3025 , 3032 et T.A. 668

Sénat : 322 et 339 (2000-2001)

Politique sociale.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Agrégat inconstitué de dispositions éparses, le projet de loi portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel se rattache à la grande famille de ces textes « fourre-tout » qui sont régulièrement soumis à l'examen du Parlement, et que les habitués ne désignent plus que par leurs initiales.

Le DDOSEC, pour l'appeler par son acronyme, marque cependant une étape supplémentaire, puisque les dispositions qu'il regroupe ne se rattachent pas à une matière unique, même entendue très largement, mais aux divers domaines du droit social, de l'éducation et de la culture.

Cette dispersion des sujets abordés a conduit votre commission à désigner trois rapporteurs pour avis, M. James Bordas pour les dispositions du titre IV (dispositions relatives à la jeunesse et à l'éducation populaire), et, pour le titre V, M. Jacques Valade pour l'article 12 (dispositions relatives à l'IEP de Paris) et M. Jean-Paul Hugot pour les dispositions relatives à la communication et à la culture.

Cette répartition des tâches s'imposait également compte tenu de l'extrême brièveté des délais impartis au Sénat pour l'examen de ce texte. Vos rapporteurs n'auront en effet disposé que d'une dizaine de jours, entre la transmission du texte au Sénat et son passage en commission, le 22 mai, pour étudier un dispositif augmenté de nombreux articles additionnels, et ce, alors que la déclaration d'urgence ne permettra même pas de disposer du délai de réflexion qu'offre une deuxième lecture.

Votre commission tient à rappeler que la précipitation est mauvaise conseillère en matière de travail législatif, et qu'il est préférable de se donner le temps d'adopter un texte bien conçu plutôt que de faire voter dans la fébrilité un dispositif qu'il faudra bientôt retoucher.

Le projet de loi qui nous est soumis en fournit une nouvelle illustration, avec la disposition inscrite à l'article 18 nouveau et relative à l'encadrement des cartes d'abonnement illimité au cinéma.

Le dispositif de cet article propose de modifier l'article 27 du code de la cinématographie dont la rédaction actuelle résulte de l'article 97 de la loi du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques. L'article 18 qui nous est soumis a été discuté et adopté par l'Assemblée nationale avant même que la loi du 15 mai 2001 ait été promulguée. On ne pourrait souhaiter un meilleur exemple de cette « précarité » de la loi que dénonçait récemment le vice-président du Conseil d'État.

*

* *

En accord avec la commission des affaires sociales, votre commission, saisie pour avis, se prononcera au fond sur les articles 8 (agrément des associations d'éducation populaire et de jeunesse), 9 (création du Conseil national de l'éducation populaire et de la jeunesse), 10 (création du Conseil national de la jeunesse), 12 (compétences du conseil de direction de l'Institut d'études politiques de Paris), 13 (dispositif anti-concentration applicable à la télévision numérique hertzienne terrestre), 14 (obligations des distributeurs de services à l'égard de la chaîne parlementaire), 16 (prorogation de l'homologation des diplômes fédéraux), 17 (campagnes législatives sur les antennes des sociétés nationales de programme) et 18 (formules d'accès au cinéma donnant droit à des entrées multiples).

Votre commission examinera en outre l'article 11 (réglementation de l'accueil des mineurs accueillis en centres de vacances et en centres de loisirs sans hébergement).

I. LES DISPOSITIONS RELATIVES À L'ÉDUCATION POPULAIRE ET À LA JEUNESSE (TITRE IV)

Le titre IV, intitulé « dispositions relatives à l'éducation populaire et à la jeunesse » comporte quatre articles, de portée très inégale, et que l'on peut regrouper autour de trois objectifs principaux :

- la réforme de la procédure d'agrément des associations actives dans le domaine de la jeunesse et de l'éducation populaire (article 8) ;

- la consécration législative de deux instances consultatives : le conseil national de l'éducation populaire et de la jeunesse (article 9), et le conseil national de la jeunesse (article 10) ;

- enfin, la réforme des dispositions régissant l'accueil des mineurs hors du domicile parental, et le nouveau régime juridique des centres de vacances (CV) et des centres de loisirs sans hébergement (CLSH).

A. LA RÉFORME DE LA PROCÉDURE D'AGRÉMENT

L'agrément des associations ayant une activité dans le domaine de l'éducation populaire et de la jeunesse est actuellement régi par les dispositions de l'article 6 de l'ordonnance du 20 octobre 1943, complétées par celles du décret n° 84-567 du 4 juillet 1984.

Le dispositif actuel confie au ministre de la jeunesse l'agrément des associations à caractère national et au préfet celui des associations à caractère régional, départemental ou local, sans toutefois se montrer très explicite sur les conditions que celles-ci doivent remplir. L'octroi de l'agrément, et son retrait, ne sont en effet assujettis qu'à une condition formelle : la consultation préalable du conseil de la jeunesse.

Les modifications apportées par le dispositif proposé portent, pour l'essentiel, sur les conditions et les conséquences de l'agrément.

1. Les conditions de l'agrément

A l'image de ce qu'avait fait la loi du 6 juillet 2000 pour l'agrément des groupements sportifs, le projet subordonne l'octroi de l'agrément des associations de jeunesse à certaines conditions.

Ces conditions tiennent à l'existence -et le projet ajoute opportunément au respect- d'un certain nombre de dispositions statutaires garantissant la liberté de conscience, le respect du principe de non discrimination, leur fonctionnement démocratique, la transparence de leur gestion, et permettant l'égal accès des hommes et des femmes et l'accès des jeunes à leurs instances dirigeantes.

Ces conditions se démarquent de celles de l'agrément des groupements sportifs sur trois points :

- la mention de deux conditions supplémentaires liées au respect de la liberté de conscience et du principe de non discrimination, inspirées par le souci de contrer certaines possibles dérives sectaires ;

- un assouplissement du dispositif en faveur de l'égal accès des hommes et des femmes aux instances dirigeantes, auquel le texte prévoit la possibilité de déroger dans les cas où son respect est incompatible avec l'objet de l'association et la qualité de ses membres ; dérogation inspirée par le souci de ne pas exclure, entre autres, certaines associations féminines oeuvrant en faveur de l'intégration ;

- la référence à des dispositions permettant l'accès des « jeunes » à leurs instances dirigeantes ; votre commission y est favorable dans son principe, même si elle tient à rappeler que la notion de « jeune » n'est pas une notion juridiquement -ni d'ailleurs biologiquement- très précise...

2. Les effets de l'agrément

L'agrément d'une association est un acte discrétionnaire émanant du ministre de la jeunesse et des sports, ou, le cas échéant, du représentant de l'Etat dans le département, agissant par délégation.

Il constitue une sorte de « label » de qualité attribué, à la demande de l'association, par l'autorité publique. Il est en outre une condition nécessaire, mais non suffisante, pour recevoir une aide publique.

Le dispositif proposé apporte deux modifications au régime antérieur :

- l'ordonnance de 1943 réservait aux associations agréées jeunesse et sports le bénéfice des subventions de l'Etat et des collectivités territoriales ; le projet ne fait plus de cet agrément qu'une condition pour bénéficier de subventions du ministère de la jeunesse ; autrement dit, les associations de jeunesse et d'éducation populaire qui n'auraient pas reçu l'agrément du ministère de la jeunesse, pourront dorénavant bénéficier de subventions provenant des autres ministères, et des collectivités publiques ;

- en outre, le projet autorise le ministère, de façon dérogatoire, à accorder des subventions à des associations non agréées, pour des montants et une durée limités ; au cours de son audition devant la commission, le 15 mai 2001, la ministre a précisé que cette mesure devait être considérée comme une forme d'accompagnement vers l'agrément, et qu'elle serait accordée à des associations émergentes, sur la base d'un projet, et pour des montants de l'ordre de 10 000 francs.

B. LA CONSÉCRATION LÉGISLATIVE DE DEUX INSTANCES CONSULTATIVES

Les articles 9 et 10 prévoient respectivement la création d'un Conseil national de l'éducation populaire et de la jeunesse, et d'un Conseil national de la jeunesse.

Toutefois, dans la mesure où ces organismes existent déjà, sur un fondement réglementaire, et sous des dénominations identiques ou à peine différentes, il est plus approprié de voir dans ces deux articles une consécration symbolique plutôt qu'une création véritable.

Cette consécration législative de deux organismes dont la création initiale n'avait relevé, pour l'une que d'un décret, et pour l'autre d'un simple arrêté ministériel, témoigne d'une conception ornementale de la loi, qui tourne le dos à la répartition opérée par les articles 34 et 37 de la Constitution entre le domaine de la loi et celui du règlement. Le recours à une disposition législative ne paraît en effet justifié que par le souci de conférer une dignité et une stabilité particulière à l'instance qui fait l'objet de cet adoubement.

1. Le Conseil national de l'éducation populaire et de la jeunesse

Le Conseil national de l'éducation populaire et de la jeunesse a été créé par le titre II du décret n° 86-148 du 29 janvier 1986, modifié par le décret n° 90-204 du 7 mars 1990.

Le Conseil est un organe consultatif auquel l'article 3 du décret reconnaît deux séries d'attributions :

- en formation plénière, il est invité à émettre un avis sur les projets de loi et de décret de caractère général relatifs à l'éducation populaire et à la jeunesse et sur les questions qui s'y rattachent ; il dispose en outre en ces matières d'un pouvoir de proposition ;

- en formation réduite, il est invité à émettre un avis sur des mesures individuelles relatives aux demandes d'agrément des associations (« commission d'agrément ») ou aux sanctions envisagées à l'encontre des personnes ayant gravement mis en péril la santé ou la sécurité matérielle des mineurs en centres de vacances ou de placement de vacances (« commission de protection des mineurs »).

L'article 8 du projet de loi apporte une confirmation législative aux attributions confiées au conseil en assemblée plénière, et renvoie à un décret en Conseil d'Etat la détermination de sa composition, de son fonctionnement et des modalités de désignation de ses membres.

Le CNEPJ sera donc désormais, comme le conseil national des activités physiques et sportives (CNAPS), qui constitue son équivalent dans le domaine sportif, inscrit dans la loi.

La ministre a indiqué, lors de son audition devant la commission, que la composition et le rôle du CNEPJ ne devraient pas être fondamentalement modifiés.

2. Le conseil national de la jeunesse

Le conseil national de la jeunesse, institué à l'article 10, n'est que le prolongement du conseil permanent de la jeunesse, créé par un arrêté de la ministre de la jeunesse et des sports du 7 janvier 1998.

L'article 10 confirme et renforce les attributions que lui reconnaissait déjà l'arrêté précité :

- il est habilité à donner un avis, et à formuler des propositions sur les questions que lui soumet le ministre de la jeunesse et des sports qui en assure la présidence ;

- à son initiative, il peut réaliser des études et formuler des propositions sur tout sujet d'ordre économique, social et culturel intéressant directement les jeunes.

L'article 10 ajoute qu'il établit chaque année un rapport d'activité déposé devant le Parlement et renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin de fixer la composition et les modalités de désignation de ses membres.

En l'état actuel des choses, le conseil permanent est composé :

- de 30 à 50 membres nommés sur proposition des organisations nationales de jeunes (syndicats, partis politiques, mouvements lycéens et étudiants, ...)

- de 20 à 30 membres nommés sur proposition des préfets de département représentant des associations locales de jeunesse et des conseils départementaux de la jeunesse ;

- de 20 à 30 personnalités qualifiées.

L'article 3 de l'arrêté précité précise que ceux-ci doivent être âgés de seize ans au moins et de vingt-huit ans au plus à la date de leur nomination et qu'ils sont nommés par arrêté du ministre de la jeunesse et des sports pour un mandat de deux ans renouvelable une fois.

C. LA RÉFORME DE LA RÉGLEMENTATION DES CENTRES DE VACANCES ET DES CENTRES DE LOISIRS SANS HÉBERGEMENT

La protection des mineurs accueillis hors du domicile parental est régie par les dispositions du chapitre VII du titre II (Enfance) du Livre II du code de l'action sociale et des familles.

Ces dispositions définissent l'accueil hors du domicile parental comme l'accueil du mineur hors du domicile de ses parents jusqu'au quatrième degré, ou de son tuteur, et le placent sous la protection des autorités publiques.

L'article L. 227-1 confie cette protection au président du Conseil général du département où se trouve le mineur, sous réserve d'un certain nombre de dispositions. Celles-ci se rapportent notamment à l'accueil du mineur en centre de vacances, placé sous la responsabilité du préfet, qui est en outre appelé à délivrer l'habilitation des centres de loisirs sans hébergement.

La compétence du préfet en matière de protection des mineurs accueillis en centre de vacances et en centre de loisirs est confirmée de façon explicite par le projet d'article L. 227-4.

Ces deux types d'organismes étaient jusqu'à présent régis par des dispositions réglementaires distinctes :

- les centres de vacances sans hébergement : essentiellement par le décret n° 60-94 du 29 janvier 1960 et par trois arrêtés des 19, 20 et 21 mai 1975 ;

- les centres de loisirs sans hébergement : par l'arrêté du 20 mars 1984.

Le dispositif proposé à l'article 11, qui s'inspire souvent de dispositions réglementaires existantes, et en particulier du dispositif régissant les centres de vacances, s'en distingue cependant sous trois aspects principaux :

- il se caractérise tout d'abord par un relèvement dans la hiérarchie des normes juridiques, puisqu'il substitue des dispositions législatives à des dispositions qui figuraient jusqu'alors dans des décrets voire de simples arrêtés ministériels ; ces nouvelles dispositions législatives viennent s'insérer sous la forme de huit nouveaux articles dans le chapitre VII du titre II du Livre II du code de l'action sociale et de la famille ;

- il procède à un alignement du régime des centres de loisirs sans hébergement, régi jusqu'alors par un dispositif assez léger, voire lacunaire, sur celui, plus contraignant, des centres de vacances ;

- il procède à un certain renforcement de ce régime, qui répond sans doute aux attentes des familles, avant tout soucieuses de sécurité, mais qui peut aussi se traduire par un alourdissement des contraintes administratives pesant sur ces centres.

1. Obligations assignées aux centres

Le projet généralise, dans les articles L. 227-4 et L. 227-5 un certain nombre d'obligations, qui dans les régimes réglementaires antérieurs, ne pesaient pas toutes sur tous les centres. Il s'agit en particulier de :

a) L'obligation d'établir un projet éducatif

L'article L. 227-4 fait obligation aux centres de vacances comme aux centres de loisirs sans hébergement, d'établir un projet éducatif.

Dans la réglementation antérieure, les centres de vacances étaient déjà soumis à cette obligation (article 1° de l'arrêté de 1975) mais les centres de loisirs n'y étaient tenus que dans l'hypothèse où ils étaient candidats à l'habilitation.

En outre, ce projet éducatif était, semble-t-il, largement laissé à l'initiative des directeurs et organisateurs de centres.

Le projet de loi renforce en revanche le contrôle de l'État sur l'élaboration du projet, qui doit être établi dans des conditions à préciser par décret en Conseil d'État, ainsi que sur sa mise en oeuvre.

Cette obligation a paru lourde à l'Assemblée nationale qui en a dispensé les garderies périscolaires.

b) L'obligation de déclaration préalable

L'article L. 227-5 subordonne l'accueil des mineurs dans les centres de vacances et de loisirs à une déclaration préalable auprès du préfet qui, à cette occasion, peut s'opposer à l'organisation de cette activité. Les motifs de cette opposition préfectorale peuvent être tirés, soit de l'absence de projet éducatif, soit du fait que les conditions d'accueil présentent un risque pour la santé et la sécurité physique ou morale des mineurs concernés.

Dans le régime antérieur, seuls les centres de vacances étaient astreints à cette obligation, les centres de loisirs sans hébergement n'étant soumis qu'à une procédure d'habilitation, au demeurant facultative.

L'Assemblée nationale a souhaité, par l'adoption d'un article L. 227-5-1 dispenser les garderies périscolaires de cette obligation.

En cas de modification des conditions de l'accueil, les organismes sont dorénavant tenus de déposer une nouvelle déclaration, alors qu'auparavant, les centres de vacances n'étaient tenus que de souscrire une déclaration complémentaire.

Les débats à l'Assemblée nationale ont soulevé la question des personnes à qui incombe cette obligation de déclaration. Elle a souhaité ne l'imposer qu'aux organisateurs de l'accueil, alors que le gouvernement souhaitait l'appliquer également aux exploitants des locaux dans lesquels se déroule l'accueil.

L'arrêté du 19 mai 1975 relatif au contrôle des centres de vacances prévoyait en effet deux déclarations distinctes :

- la déclaration des séjours de vacances, imposée aux organisateurs de l'accueil ;

- la déclaration de première ouverture, imposée à tout établissement dans lequel des séjours de vacances collectives de mineurs de plus de quatre ans sont organisés avec hébergement d'une manière permanente ou périodique.

Cette déclaration de première ouverture, qui doit être effectuée deux mois avant l'ouverture, a pour objet de permettre à l'administration de prendre connaissance, en temps utile, de la situation des locaux, de la nature de l'hébergement envisagé et des conditions d'hygiène et de sécurité.

Estimant qu'il serait regrettable de priver l'administration de cette possibilité d'exercer un contrôle préalable sur les locaux utilisés, votre commission vous proposera de restaurer l'obligation de déclaration pour les exploitants de locaux, en précisant que, dans son esprit, celle-ci ne doit toutefois s'appliquer qu'aux locaux où l'hébergement est organisé de manière permanente ou périodique.

c) L'obligation d'assurance

L'article L. 227-5 rend également obligatoire la souscription d'un contrat d'assurance garantissant les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile des organisateurs et des exploitants de locaux, ainsi que celle de leurs préposés et des participants aux activités organisées.

Cette obligation, déjà imposée aux centres de vacances par le décret du 29 janvier 1960, est étendue aux centres de loisirs sans hébergement.

Le texte proposé ne précise pas, comme l'avait fait l'article 37 de la loi du 16 juillet 1984 pour l'assurance des groupements sportifs, que les assurés sont considérés comme des tiers entre eux. La commission a souhaité ajouter cette précision, afin que les dommages que les assurés pourraient s'infliger mutuellement soient effectivement couverts.

L'article L. 227-5 généralise également à l'ensemble des centres l'obligation d'informer les parents de leur intérêt à souscrire un contrat d'assurance pour leurs enfants, obligation qui jusqu'alors n'était explicitement imposée qu'aux centres de vacances.

2. Le régime des incapacités professionnelles

L'article L. 227-6 édicte un certain nombre d'incapacités professionnelles ayant pour objet d'interdire aux personnes condamnées pour crime, ou pour un certain nombre de délits limitativement énumérés, d'intervenir dans les centres de vacances et les centres de loisirs.

Ces incapacités s'appliquent à l'ensemble des intervenants, y compris les personnels de service et les bénévoles, et non plus seulement, comme dans la réglementation antérieure, aux dirigeants et aux organisateurs.

La liste des délits visés est assez proche de celle qu'a instituée la loi du 6 juillet 2000 pour les incapacités à l'enseignement des activités physiques et sportives. Elle y apporte quelques adaptations dont votre commission ne conteste pas le bien fondé, à une exception près : dans la liste des délits incriminés, l'article L. 227-6 retient la provocation à l'usage de stupéfiants (article L. 3421-4 du code de la santé publique) mais non l'usage de stupéfiants (article L. 3421-1) contrairement au dispositif de la loi du 6 juillet 2000 précitée. Votre commission, qui considère que l'encadrement des mineurs ne mérite pas moins de précaution que celui des sportifs, vous proposera de corriger cette omission par un amendement.

L'article L. 227-7 sanctionne le non respect de ces incapacités professionnelles d'une peine d'un an de prison et de 15 000 € d'amende.

3. Les sanctions pénales

L'article L. 227-7 instaure, pour l'ensemble des organismes d'accueil, des sanctions pénales beaucoup plus lourdes que celles que prévoit l'article 9 du décret du 29 janvier 1960 dans une rédaction résultant du décret du 21 mai 1999.

Celui-ci sanctionnait le non-respect de l'obligation de déclaration préalable et des interdictions prononcées par le préfet, de l'amende prévue pour les contraventions de 5e classe, soit une amende de 10 000 F, susceptible d'être portée à 20 000 F en cas de récidive dans l'année.

Le projet porte :

- à six mois d'emprisonnement et à 3 750 € (25 000 F) d'amende les sanctions consécutives au non respect de l'obligation de déclaration (ou de nouvelle déclaration), et de l'obligation d'assurance ;

- à un an d'emprisonnement et à 15 000 € (100 000 F) d'amende les sanctions encourues pour non respect d'une décision préfectorale, et pour non respect des incapacités ; le fait de s'opposer « de quelque façon que ce soit » à l'exercice des fonctions de surveillance dont sont chargés les agents habilités du ministère de la jeunesse et des sports est puni des mêmes peines.

Cette échelle des sanctions est identique à celle que prévoient les articles 49 et 50 de la loi du 16 juillet 1984 en matière d'encadrement des activités physiques et sportives, à une exception près. L'article 50 dont la rédaction actuelle résulte des dispositions de la loi du 6 juillet 2000, ne punit en effet que d'une amende de 50 000 F et d'un emprisonnement d'un an le fait de s'opposer aux agents du ministère des sports habilités à accéder aux établissements où sont pratiquées des activités sportives.

Votre commission vous proposera de restaurer la cohérence de ces dispositifs, en alignant les sanctions prévues par l'article L. 227-7 pour ce délit sur celles que prévoit l'article 50 de la loi de 1984 précitée.

4. La surveillance des conditions d'accueil des mineurs

L'article L. 227-8 pose les principes régissant le contrôle exercé par les fonctionnaires habilités et assermentés du ministère de la jeunesse sur les centres de vacances et les centres de loisirs sans hébergement.

Ces dispositions ont vocation à se substituer aux dispositions prévues par l'arrêté du 19 mai 1975 pour les centres de vacances et à combler l'absence de dispositif spécifique de contrôle pour les centres de loisirs.

Le texte de l'article L. 227-8 prévoit de façon explicite un certain nombre de garanties qui ne figuraient pas dans l'arrêté du 19 mai 1975. Celles-ci ont trait :

- à l'habilitation et à l'assermentation des agents du ministère de la jeunesse et des sports ;

- à la limitation des heures d'accès dans les locaux au créneau 8 heures/20 heures, sauf circonstances exceptionnelles ;

- à la protection du domicile, ou de la partie des locaux servant de domicile ;

- à la nécessité d'une information préalable du procureur de la République.

Il précise en outre la procédure qui doit être suivie en cas de refus d'accès.

Le dispositif proposé s'inspire, au demeurant, moins de l'arrêté de 1975 que de l'article 49-1 de la loi du 16 juillet 1984, relatif aux pouvoirs de surveillance des agents du ministère des sports sur les établissements sportifs.

Il s'en distingue sur deux points.

Il prévoit la possibilité d'une visite hors du créneau horaire 8 heures/20 heures, en cas d'appel provenant d'une personne se trouvant à l'intérieur des locaux, en conformité avec la règle posée par l'article 59 du code pénal, ou en cas de plainte ou de réclamation ; il encadre strictement cette possibilité en la subordonnant à l'autorisation du tribunal de grande instance.

Cette possibilité d'une visite nocturne, dans des conditions bien encadrées, ne paraît pas anormale à votre commission, compte tenu de la nature de l'activité des centres de vacances.

En revanche, comme il a été vu dans le développement précédent, votre commission ne juge pas nécessaire de sanctionner de peines plus lourdes l'obstruction à la surveillance des centres que celle à la surveillance des établissements sportifs, et vous proposera de procéder à l'harmonisation qui s'impose.

5. Pouvoirs de police administrative du préfet

Les articles L. 227-9 et L. 227-10 précisent les pouvoirs de police administrative du préfet qui peuvent prendre la forme :

- soit de sanctions individuelles : mesures d'interdiction ou de suspension ;

- soit de sanctions à l'égard des établissements proprement dits pouvant aller jusqu'à la fermeture temporaire ou définitive.

a) Sanctions individuelles

L'article L. 227-9 donne au préfet le pouvoir, après avis d'une commission spécialisée, de prendre des mesures d'interdiction temporaires ou permanentes à l'encontre de toute personne dont le maintien en activité présenterait des risques pour la santé ou la sécurité physique et morale des mineurs. En cas d'urgence, il peut prononcer une mesure de suspension d'exercice, limitée à six mois.

Aucun texte réglementaire spécifique ne prévoyait la nature des sanctions administratives susceptibles d'être prises à l'égard des personnes travaillant en centre de loisirs sans hébergement. En revanche, le dispositif applicable aux centres de vacances est à la fois récent, puisqu'il a été fixé par le décret du 21 mai 1999 précité, et assez détaillé.

Le dispositif de l'article L. 227-9 s'en démarque sur les principaux points suivants :

- il procède à un élargissement des personnes susceptibles de faire l'objet de ces mesures d'interdiction ou de suspension ; celles-ci sont susceptibles d'être prises contre « toute personne », et non plus seulement contre « toute personne responsable », de façon à prendre également en compte les « personnels de service » ;

- il procède à une extension des motifs invocables puisqu'il vise, non plus ceux qui ont « gravement mis en péril la santé et la sécurité matérielle et morale des mineurs » mais ceux « dont le maintien en activité présenterait un risque pour la santé et la sécurité physique ou morale des mineurs ».

En cas d'urgence, le préfet peut, sans consultation de la commission spécialisée, prendre à l'égard de ces personnes une mesure de suspension d'exercice, dont la durée est limitée à six mois.

Compte tenu de la gravité des mesures envisagées pour les intéressés, on peut estimer que ceux-ci sont en droit d'exiger qu'une décision définitive, prise après consultation de la commission spécialisée, puisse être prise dans un délai inférieur à six mois. Votre commission vous proposera donc de ramener ce délai à trois mois.

b) Sanctions à l'égard des établissements

L'article L. 227-10 donne une base légale aux pouvoirs de police administrative du préfet à l'égard des centres de vacances et des centres de loisirs sans hébergement.

Jusqu'à présent, ceux-ci ne pouvaient s'exercer :

- à l'égard des centres de vacances que sur le fondement de l'article 7 du décret du 29 janvier 1960, et de l'arrête du 19 mai 1975 ;

- à l'égard des centres de loisirs sans hébergement, en l'absence de dispositions spécifiques, que par le recours aux dispositions générales des articles L. 221-5 et L. 221-6 du code de la consommation qui autorisent le ministre compétent ou le préfet, en cas de danger grave ou immédiat, à suspendre la prestation d'un service.

Le dispositif proposé à l'article L. 227-10 s'inspire en partie du dispositif de l'article 48 de loi du 16 juillet 1984 relatif à la police administrative des établissements sportifs.

Par rapport au système antérieur du décret du 29 janvier 1960 précité, il procède à un élargissement de la désignation des destinataires de l'injonction, puisque celle-ci dorénavant pourra être adressée à « toute personne qui exerce une responsabilité dans l'accueil des mineurs », et non plus seulement au directeur de l'établissement.

La liste des motifs de l'injonction est complétée pour assurer la cohérence avec le reste du dispositif et mentionne, outre le manquement à l'obligation de déclaration préalable, celui à l'obligation d'assurance, au non respect des incapacités professionnelles, ou encore aux normes de sécurité et de qualification.

Le préfet peut, après l'expiration du délai fixé, prononcer non seulement la fermeture temporaire de l'établissement déjà prévue par le décret de 1960 précité, mais également sa fermeture définitive.

II. CONSOLIDATION DE L'AUTONOMIE DE SCIENCES PO : CONSÉQUENCES SUR LE RECRUTEMENT DE L'INSTITUT D'ÉTUDES POLITIQUES DE PARIS

A. UNE AUTONOMIE REVENDIQUÉE DEPUIS L'ORIGINE

Créée en 1872 par Émile Boutmy à la suite de la faillite de l'Empire libéral et de la défaite de Sedan, sous l'impulsion d'intellectuels comme Taine et Renan, l'École libre des sciences politiques avait, dès son origine, vocation à former les élites politiques, économiques et administratives de la République.

La préoccupation permanente des responsables de Sciences Po fut d'ouvrir l'école sur le monde par la modernisation incessante des méthodes et des matières à enseigner mais également par une large ouverture à des étudiants de toutes origines. Nous constatons une nouvelle étape : cent trente ans plus tard, Sciences Po souhaite démocratiser le recrutement de ses élèves en s'ouvrant aux bacheliers méritants des zones d'éducation prioritaire.

1. De l'Ecole libre à Sciences Po : une recherche continue de l'autonomie

a) L'ordonnance du 9 octobre 1945 : la création de l'IEP et de la FNSP

Compte tenu du rôle joué par l'École libre dans la formation des hauts fonctionnaires de l'État, le Général de Gaulle, inspiré par Michel Debré et Jean-Marcel Jeanneney, prend la décision d'intégrer celle-ci dans le cadre du service public de l'enseignement supérieur, tout en préservant son autonomie : l'ordonnance n° 45-2284 du 9 octobre 1945 crée ainsi la Fondation nationale des sciences politiques (FNSP), fondation de droit privé, à laquelle est confiée la gestion de l'Institut d'études politiques de Paris (IEP), ces deux éléments indissociables constituant ce qu'il est convenu d'appeler « Sciences Po ».

b) La loi d'orientation de 1968 : l'IEP détaché de l'Université de Paris

La loi d'orientation, dite Edgar Faure de 1968, proposée par le gouvernement Couve de Murville après les événements de 1968, tend encore à accentuer l'indépendance de l'IEP de Paris en détachant celui-ci de l'Université de Paris, qui est elle-même organisée en plusieurs établissements dotés d'un statut d'autonomie.

c) La loi du 26 janvier 1984 sur l'enseignement supérieur : la spécificité des grands établissements

A l'initiative d'Alain Savary, ministre de l'éducation nationale du gouvernement Mauroy, celui-ci dépose le projet de loi sur l'enseignement supérieur qui deviendra la loi du 26 janvier 1984.

Au terme de son article 37, l'IEP de Paris est rangé dans la catégorie des « grands établissements », celle-ci englobant également l'École des Chartes, le Conservatoire national des arts et métiers, le Collège de France, l'Observatoire de Paris et l'ENSAM. Il s'agissait là de consacrer la singularité d'un certain nombre d'institutions anciennes, prestigieuses ou spécifiques, échappant au régime de droit commun des Universités.

Selon l'article 37, ces grands établissements, comme d'ailleurs les Ecoles normales supérieures et les Ecoles françaises à l'étranger, bénéficient de « règles particulières d'organisation et de fonctionnement (...) dans le respect des principes d'autonomie et de démocratie définis par la présente loi ».

En conséquence, des décrets en Conseil d'État pourront déroger aux dispositions des articles 20 à 23 de la loi de 1984, définissant les établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel de droit commun, des articles 38 à 48 précisant la composition des conseils, le régime financier, les relations extérieures, le contrôle administratif et financier des universités et de l'article 67 permettant à ces établissements de passer du statut de la loi d'orientation de 1968 à celui de la loi de 1984.

d) Le décret aujourd'hui contesté du 10 mai 1985

Au titre de l'article 37 de la loi de 1984, l'IEP de Paris se voit ainsi reconnaître une large autonomie. Celle-ci sera consacrée par le décret du 10 mai 1985, et notamment par son article 5 qui confère au conseil de direction de l'Institut compétence pour fixer les conditions d'admission des élèves et l'organisation des études.

e) La loi du 2 juillet 1998 : la confirmation de l'autonomie financière et de gestion de la FNSP

Complétant l'ordonnance fondatrice de 1945, une disposition de la loi du 2 juillet 1998, codifiée à l'article L.758-1 du code de l'éducation, dispose que la Fondation nationale des sciences politiques « assure la gestion administrative et financière de l'Institut d'études politiques de Paris. Elle fixe notamment les moyens de fonctionnement de l'Institut et les droits de scolarité pour les diplômes propres... »

2. Sciences Po aujourd'hui : une institution incontournable et une autonomie justifiée

Avant d'analyser la réforme proposée par l'article 12 du projet de loi, il convient très brièvement de rappeler l'importance de Sciences Po, qui justifie d'ailleurs son statut particulier et son autonomie.

a) Quatre missions essentielles

Géré par des instances dirigeantes (conseil d'administration de la FNSP et conseil de direction de l'IEP) qui définissent la politique pédagogique et scientifique de l'établissement, Sciences Po propose aujourd'hui :

- des formations universitaires à destination des étudiants du 1 er cycle jusqu'au doctorat et des actions de formation professionnelle continue ;

- un pôle de recherche scientifique en science politique, sociologie, économie et affaires internationales, avec son école doctorale et ses huit centres de recherche ;

- un centre de documentation en sciences sociales et humaines avec 820 000 volumes, 6 000 abonnements périodiques et 16 000 dossiers de presse ;

- les Presses de Sciences Po, spécialisées en sciences sociales et humaines, qui éditent six revues, disposent de 750 titres en catalogue et publient 30 nouveaux ouvrages par an.

b) L'admission et l'organisation de la scolarité : des procédures diversifiées

Le premier cycle comporte trois années, dont la dernière se déroule désormais à l'étranger : l'accès en première année se fait par examen, sauf entrée directe pour les bacheliers ayant obtenu une mention « très bien », après examen du dossier du candidat.

L'accès au cycle du diplôme, c'est-à-dire en 4 e année est conditionné à la réussite à un examen pour les candidats titulaires d'un diplôme sanctionnant au moins trois ans d'études supérieures, ou ayant acquis au moins cinq ans d'expérience professionnelle.

Le diplôme est obtenu à l'issue de la 5 e année.

c) Les formations post-diplôme et la recherche

- Sciences Po prépare chaque année plus de 250 étudiants aux concours de la haute fonction publique française et européenne : ENA, ENM, administration territoriale, Affaires étrangères, Commission européenne, Parlement européen, mais aussi Assemblée nationale et Sénat...

- L'Ecole doctorale comprend 60 universitaires, 500 doctorants des cycles supérieurs d'études européennes et américaines et propose 7 DEA et 5 DESS.

- Les huit centres de recherche regroupent 250 chercheurs, les plus connus étant l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), le Centre d'étude de la vie politique française (CEVIPOF), le Centre d'études et de recherche internationales (CERI), le Centre de sociologie des organisations (CSO)...

- Sciences Po propose un MBA et un centre de formation continue qui accueille environ 8 000 stagiaires par an.

d) L'ouverture sur l'international

Sciences Po accueille 1 000 étudiants étrangers par an, soit 25 % du total de ses étudiants.

Un partenariat a été engagé avec 190 universités étrangères. Ses étudiants doivent effectuer leur troisième année d'étude à l'étranger.

Les enseignants étrangers constituent le quart du corps enseignant et la semestrialisation des enseignements facilite la mobilité des enseignants et des étudiants.

Enfin, le positionnement du diplôme à bac + 5 permet de développer les équivalences et les échanges européens.

e) Des moyens importants

Avec 4 000 étudiants, 1 200 maîtres de conférence, 500 salariés de droit privé, Sciences Po dispose d'un budget de près de 400 millions de francs, dont 8 millions de francs sont consacrés à l'aide sociale aux étudiants (exonération de droits d'inscription, bourses de scolarité, aide à la mobilité internationale...)

B. QUEL PROJET DE LOI ET POURQUOI?

1. Une autonomie à consolider

Comme il a été vu, le décret du 10 mai 1985 relatif à l'IEP de Paris octroie des pouvoirs importants au conseil de direction, et son article 5 précise que ce dernier fixe notamment les conditions d'admission des élèves et l'organisation des études.

Une telle habilitation réglementaire est cependant fragile et susceptible d'être contestée au regard des dispositions législatives de l'ancien article 14 de la loi de 1984, désormais codifié à l'article L. 612-3 du code de l'éducation : en effet, au terme de cet article, les modalités de la sélection pour l'accès à certains établissements sont arrêtées par le ministre chargé de l'enseignement supérieur.

On rappellera pour mémoire que le premier alinéa de l'article L. 612-3 dispose que « le premier cycle est ouvert à tous les titulaires du baccalauréat ... et que son troisième alinéa précise : « Les dispositions relatives à la répartition entre les établissements et les formations excluent toute sélection. Toutefois, une sélection peut être opérée, selon des modalités fixées par le ministre chargé de l'enseignement supérieur, pour l'accès aux sections de techniciens supérieurs, instituts, écoles et préparations à celles-ci, grands établissements au sens du titre I et du livre VII, et tous établissements où l'admission est subordonnée à un concours national ou à un concours de recrutement de la fonction publique ».

L'exposé des motifs du projet de loi indique que, « afin de donner une plus grande sécurité juridique à ce dispositif », il est proposé d'affirmer par la loi la compétence du conseil de direction de l'Institut en ajoutant un article L. 621-3 aux dispositions du code de l'éducation relatives aux missions respectives des instituts d'études politiques et de la Fondation nationale des sciences politiques.

Dans un souci de sécurisation, il est ainsi demandé au Parlement d'inscrire dans la loi l'article 5 du décret du 10 mai 1985, en tant que ses dispositions donnent compétence au conseil de direction de l'IEP de Paris pour fixer les conditions d'admission des élèves.

a) La reconnaissance législative de la spécificité de l'IEP de Paris

Le paragraphe I de l'article 12 conduit ainsi à faire une place singulière à l'IEP de Paris au sein de la catégorie des grands établissements, compte tenu notamment de son histoire, alors que la loi en vigueur ne prévoit des dispositions spécifiques que pour la FNSP, qui est chargée d'assurer la gestion financière et administrative de l'IEP, de déterminer ses moyens de fonctionnement et les droits de scolarité pour ses propres diplômes.

L'article 12 tend donc à reconnaître au plan législatif la spécificité de l'IEP en insérant dans le code de l'éducation un nouvel article L. 621-3, qui déroge aux dispositions du 3 e alinéa de l'article L. 612-3, et qui reconnaît une compétence générale au conseil de direction pour fixer les conditions et modalités d'admission aux formations propres à l'institut : ledit conseil déterminerait ainsi les critères et les procédures destinées à assurer la sélection et le recrutement des élèves appelés à suivre la scolarité de l'IEP, sanctionnée par le diplôme ou par le certificat d'études politiques délivré par l'IEP de Paris ; la compétence du conseil de direction ne s'étendrait pas, en revanche, à la définition des conditions d'admission spécifiques pour les étudiants souhaitant poursuivre des études sanctionnées par un diplôme national.

En outre, et conformément à l'article 5 du décret de 1985, cette autonomie de principe serait également reconnue au conseil de direction pour l'organisation de l'ensemble des études, de la première année jusqu'au doctorat.

b) La validation des procédures existantes de recrutement

L'article 12 du projet de loi prévoit ensuite que le conseil de direction peut adopter des procédures d'admission selon des modalités particulières afin de diversifier le recrutement de l'Institut parmi les bacheliers.

Afin de « sécuriser » au plan juridique les multiples procédures d'admission différenciées mises en place depuis plusieurs années, y compris en faveur des étudiants étrangers, l'article 12 consacre le droit pour l'Institut de conclure des conventions avec des établissements d'enseignement secondaire ou supérieur, français ou étrangers, la finalité de ces conventions étant d'associer les établissements visés au recrutement de leurs élèves ou étudiants par l'IEP de Paris.

c) La validation de nouvelles procédures d'admission

L'article 12 du projet a également pour objet, dans son paragraphe II, d'autoriser le conseil de direction de l'institut à adopter des procédures d'admission spécifiques destinées à diversifier le recrutement des élèves : comme il a été dit, il prévoit la possibilité de passer des conventions avec des établissements d'enseignement secondaire et supérieur, français et étrangers, pour les associer au recrutement de leurs élèves par l'IEP de Paris.

Il se propose ainsi de valider les délibérations du conseil de direction du 26 mars 2001, instituant une procédure d'accès supplémentaire pour les candidats à l'admission en première année, ouverte aux lycéens d'établissements classés en zone d'éducation prioritaire (ZEP), au réseau d'éducation prioritaire (REP), ou d'établissements présentant des caractéristiques socio-culturelles analogues.

Selon l'exposé des motifs du projet, une telle validation garantirait la poursuite du dispositif qui a été engagé et permettrait aux premiers étudiants bénéficiant de cette nouvelle procédure d'être admis à l'IEP dès la rentrée d'octobre 2001.

2. La justification de l'ouverture de Sciences Po aux bacheliers méritants de l'« éducation prioritaire »

a) La position du conseil de direction de l'IEP de Paris
(1) En dépit d'efforts réels de diversification

Longtemps considérée comme une école parisienne, Sciences Po a considérablement diversifié son recrutement depuis plusieurs années : aujourd'hui, plus du quart de ses étudiants sont étrangers et plus de la moitié de ses étudiants français viennent de province.

Ayant élargi l'éventail de ses voies d'accès, l'IEP de Paris recrute désormais aussi bien des jeunes bacheliers, que des étudiants à bac + 1, des diplômés d'écoles de commerce et d'ingénieur ou des diplômés de l'université. Ces étudiants chevronnés coexistent avec les bacheliers ayant obtenu une mention « très bien » et avec ceux admis dans le cadre d'un accord avec une université partenaire.

Il convient enfin de rappeler que les étudiantes sont désormais majoritaires à Sciences Po.

(2) ... et d'aides financières non négligeables

Alors que les droits annuels s'élèvent à 6 200 francs par an, le quart des étudiants est exonéré de ces droits, le niveau de ressources par foyer en dessous duquel ces exonérations sont accordées est de 200 000 francs par an. Outre ces exonérations de droits et les bourses d'Etat, Sciences Po attribuent des aides financières à ses étudiants dont le montant est passé de 1,3 million de francs en 1994-1995 à 3,1 millions de francs pour l'année universitaire en cours.

Par ailleurs, un fonds de mobilité internationale permet aux étudiants de troisième année de partir à l'étranger pour une année d'étude : 1,3 million de francs seront consacrés à cette action en 2001-2002.

Au total, 7,8 millions de francs seront destinés aux étudiants lors de la prochaine année universitaire, contre 5 millions de francs en 1994-1995.

En dépit de cette volonté affirmée et de ces efforts réels de démocratisation, force est de constater qu'un « barrage social » perdure à l'entrée à Sciences Po.

(3) Les catégories sociales favorisées encore très majoritaires à l'examen d'entrée

Une enquête de 1998 montre notamment que la population des candidats à Sciences Po est marquée par des inégalités encore plus fortes qu'au sein des classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE).

Elle révèle que sur les 2 303 étudiants ayant tenté leur chance au concours d'entrée en première année, 54 % étaient des candidates, 98 % étaient français, 50 % provinciaux, 20 % parisiens, 26 % franciliens.

Les candidats sont pour leur très grande majorité des bacheliers généraux, issus de la filière L (31,5 %), ES (37 %) et S (31 %).

Plus de 80 % des candidats ont obtenu une mention au baccalauréat : mention assez bien (38,5 %), mention bien (35,5 %), mention très bien (6 %), ces derniers bénéficiant d'une procédure d'accès particulière.

Les candidats issus des classes préparatoires publiques représentent plus d'un tiers de l'effectif, alors que les « prépas » privées représentent 9 % des candidats ; les hypokhâgnes option Sciences Po représentent 24 % des candidats. Par ailleurs, 7,5 % des candidats sont passés par une hypokhâgne et 6 % par une « prépa » HEC, tandis que les étudiants justifiant d'une première année de DEUG représentent 8,5 % des effectifs.

Il reste que le profil des candidats admis à l'examen d'entrée en première année révèle par ailleurs une large prédominance des catégories socio-professionnelles favorisées, aussi bien par la fortune, que par le savoir ou la culture : celles-ci représentaient en 1998 quatre admis sur cinq (81 %) comme en témoigne le tableau ci-après :

RÉPARTITION DES ADMIS SELON LA PROFESSION DU CHEF DE FAMILLE

- Cadres et professions intellectuelles supérieures : 56 %

- Professions intermédiaires : 7,5 %

- Professions de l'enseignement : 15,5 %

- Artisans et commerçants : 2,5 %

- Chefs d'entreprise : 9,5 %

- Employés : 2 %

Ouvriers : 6,5 %

Autres : 6,5 %

Total 81  %

Total 19 %

(4) Un concours qui accentue les inégalités

Le tableau ci-après fait apparaître clairement que les candidats n'ont pas les mêmes chances d'être admis et que le concours accentue globalement les inégalités sociales :

ORIGINE SOCIALE DES CANDIDATS ET DES ADMIS AU CONCOURS D'ENTRÉE À SCIENCES PO (1998)

Candidats

Admis

Artisans et commerçants

4,5 %

2,5 %

Chefs d'entreprise

11,5 %

9,5 %

Cadres et professions intellectuelles supérieures

53,5 %

56 %

Professions de l'enseignement

10,5 %

15,5

Professions intermédiaires

8,5 %

7,5 %

Employés

4 %

2 %

Ouvriers

1,5 %

0,5 %

Autres, agriculteurs, retraités, militaires

6 %

5,5 %

Ce tableau révèle que les candidats issus de milieux de l'enseignement, et ceux dont les parents sont cadres ou exercent une profession intellectuelle supérieure, qui représentent à eux seuls 64 % des candidats, représentent 72 % des admis.

Alors que le rapport entre la probabilité de réussite de l'ensemble des candidats est de 12,5 %, plus un étudiant vient d'un milieu modeste, plus ses chances de réussite diminuent : les enfants des professions de l'enseignement et des cadres et professions intellectuelles supérieures, avec des taux respectifs de réussite de 19,5 % et de 13,5 %, ont plus de chances de réussir que la moyenne des candidats.

Force est donc de constater que les enfants issus de familles à fort capital économique et/ou culturel sont favorisés au détriment des candidats d'origine plus modeste.

Si le concours remplit incontestablement son rôle en sélectionnant les meilleurs étudiants, compte tenu de leur mention au baccalauréat, il convient aussi de souligner que les étudiants ayant intégré les CPGE ont le plus de chances de réussir.

Au total, et au-delà de certaines variables qui sont susceptibles d'avoir un effet non négligeable sur la réussite au concours (mention, itinéraire scolaire, type de préparation, ...) un constat général s'impose : le concours d'entrée à l'IEP de Paris pénalise incontestablement les étudiants d'origine modeste.

b) La comparaison avec les autres filières de l'enseignement supérieur

Si l'évolution démographique de ces dernières décennies s'est traduite par une plus grande démocratisation de l'enseignement supérieur, de grandes inégalités de chances persistent entre les filières et Sciences Po n'a pas le monopole de l'homothétie sociale.

(1) La mesure de la démocratisation à l'université, dans les classes préparatoires et dans les filières courtes professionnalisées

Les catégories sociales « défavorisées » se retrouvent en effet surtout dans les filières universitaires courtes et techniques tandis que les étudiants plus favorisés sur le plan culturel ou économique ont davantage accès aux filières longues et générales.

Si les ouvriers représentent encore 20 % de la population française, leurs enfants ne constituent que 10 % de la population étudiante, alors que les cadres, professions libérales et enseignants représentent moins de 10 % de la population globale, mais 33 % de la population étudiante.

Le tableau ci-après retrace l'origine socio-professionnelle des étudiants dans les principales filières de l'enseignement supérieur :

(en pourcentage)

Total

Université

Sciences Po 1 ( * )

CPGE

STS

IUT

Agriculteurs

1,87

2,14

-

1,97

2,81

3,27

Artisans, commerçants, chefs d'entreprise

4,60

7,04

12

6,93

8,38

8,16

Professions libérales, cadres supérieurs, enseignants

9,04

32,81

71,5

52,26

14,23

26,23

Professions intermédiaires

14,35

16,53

7,5

15,69

17,31

20,20

Employés

21,46

12,67

2

8,99

16,61

15,18

Ouvriers

19,76

10,98

0,5

5,77

24,63

16,13

Retraités, inactifs

28,93

9,77

-

7,03

12,63

7,33

Indéterminé

-

8,6

5,5 2 ( * )

1,35

3,40

3,50

Ce tableau fait apparaître que les enfants de cadres et de professions intellectuelles sont deux fois plus nombreux à Sciences Po qu'à l'université, soit 64 % des candidats contre 32,4 % des étudiants de 1 er cycle universitaire, et qu'ils représentent 53,2 % des effectifs des classes préparatoires aux grandes écoles.

Par ailleurs, les enfants des artisans, commerçants et chefs d'entreprise sont également sur-représentés par rapport à l'université et aux CPGE (16 % des candidats contre 7,2 % des élèves de classes préparatoires et 8,5 % des étudiants de premier cycle) ; on notera toutefois que les enfants de chefs d'entreprise représentent 11,5 % des candidats contre 4,2 % pour les enfants d'artisans et de commerçants.

S'agissant des étudiants dont les parents appartiennent à des professions intermédiaires, ces derniers sont deux fois moins nombreux dans la population des candidats du concours d'entrée (8,4 %) que dans celle des étudiants des premiers cycles universitaires (18,8 %) et ne représentent que 6,1 % des élèves des CPGE.

Enfin, si environ 15 % des enfants d'employés sont représentés à l'université et dans les CPGE, ils ne représentent que 4 % des candidats à Sciences Po ; quant aux enfants d'ouvriers, ils ne représentent que 1,5 % des candidats, contre 14,5 % des étudiants à l'université et 8,7 % des élèves des CPGE.

(2) L'évolution du recrutement social dans les grandes écoles

Le constat qui vient d'être rappelé sur la situation de Sciences Po au regard des inégalités sociales peut être comparé avec l'évolution du recrutement social de l'élite scolaire en France au travers d'une étude menée auprès de quatre grandes écoles prestigieuses : l'École Polytechnique, l'École normale supérieure, l'ENA et HEC 3 ( * ) .

Cette étude montre que la proportion des jeunes d'origine « populaire » (père paysan, ouvrier, employé, artisan commerçant) dans les quatre grandes écoles a diminué de manière sensible depuis 40 ans : environ 29 % des élèves étaient d'origine populaire au début des années 50 contre 9 % au début des années 90. Cette évolution doit être mise en relation avec l'évolution de la structure sociale constatée en France depuis le milieu du siècle dernier.

Les auteurs de l'étude concluent que les quatre grandes écoles étudiées ne se sont pas fermées aux couches populaires, et même se seraient plutôt ouvertes, mais moins que le reste de notre système éducatif, et notamment que l'université.

Cette étude est également intéressante en ce sens qu'elle rappelle que le nombre de places offertes dans les quatre grandes écoles a augmenté à un rythme voisin de celui du nombre de jeunes en âge de les intégrer : au début des années 90, comme au début des années 50, ces quatre écoles « distinguent » une élite de même ampleur, soit environ un jeune sur 1000.

Si l'on s'en tient aux seuls chiffres, le nombre des élèves d'origine populaire dans ces écoles a été divisé par trois en quarante ans : 21 % des élèves de Polytechnique, de l'ENA et de l'ENS étaient d'origine populaire entre 1950 et 1955 contre 7 % en 1990.

Cette baisse très sensible doit cependant s'apprécier au regard de la diminution de la part des jeunes d'origine populaire dans l'ensemble de la génération correspondante, qui est tombée pour la période de 91 % à 68 % : il est donc logique que l'on dénombre aujourd'hui moins de jeunes d'origine populaire dans les grandes écoles.

Dans la réalité, la baisse du recrutement populaire des quatre grandes écoles traduit non pas un accroissement de l'inégalité d'accès à ces écoles, mais une stabilité car cette baisse est à peu près parallèle à celle de l'importance des milieux populaires dans la société française : il y a 40 ans, un jeune d'origine populaire avait 24 fois moins de chances qu'un autre d'entrer dans une de ces quatre grandes écoles ; en 1990, il en avait 23 fois moins...

Sans tenir compte d'HEC, qui a toujours été une grande école plus ouverte, notamment pour les enfants d'artisans et de commerçants, on constate qu'un jeune de milieu populaire avait 37 fois moins de chance qu'un autre en 1950 d'entrer à l'Ecole Polytechnique, à l'ENA et à l'ENS, alors qu'il en avait 28 fois moins en 1990 : alors qu'il y a 40 ans, le recrutement de ces grandes écoles était deux à trois fois moins populaire que celui de l'université, en 1990, il l'était cinq à six fois moins.

Cette étude montre que le recrutement dans les quatre grandes écoles étudiées est plutôt moins inégalitaire qu'il y a trente ou quarante ans : on constate une réduction continue des inégalités à l'Ecole Polytechnique, une réduction suivie d'une augmentation préoccupante entre 1975 et 1990 à l'ENS et à l'ENA, dont l'accès reste toutefois moins inégalitaire en 1990 qu'au début des années 50.

c) A la recherche d'un recrutement plus diversifié

Afin de favoriser la diversification sociale de ses élèves, l'IEP de Paris a décidé de mettre en place à la rentrée 2001, une nouvelle voie d'accès à la première année : celle-ci est destinée aux meilleurs élèves de lycées classés en zone d'éducation prioritaire (ZEP), en réseau d'éducation prioritaire (REP), en zone sensible ou d'établissements présentant des caractéristiques socioculturelles analogues.

(1) Quelques rappels sur « l'éducation prioritaire » : le principe d'une discrimination positive

Lancée en 1981 par Alain Savary, ministre de l'éducation nationale, la politique de discrimination positive engagée en faveur des élèves des zones d'éducation prioritaire (ZEP) est fondée sur un constat : une relation directe entre l'échec scolaire et l'environnement socio-économique, aussi bien dans le domaine du travail que des loisirs, de l'habitat et de la sécurité.

Cette politique a été prolongée au début des années 90 par une circulaire de mai 1990 définissant la notion de zone sensible.

Enfin, la carte de l'éducation prioritaire a été redéfinie à la rentrée 1999, et a été complétée par une nouvelle notion, celle de réseau d'éducation prioritaire (REP) : les établissements concernés doivent mutualiser « leurs ressources pédagogiques et éducatives ainsi que leurs innovations au service de la réussite scolaire des élèves ».

On notera que si l'éducation prioritaire concerne aujourd'hui 1,7 million d'élèves de l'enseignement secondaire, rares sont les lycées d'enseignement général et technologique à bénéficier de ce classement ZEP, soit une cinquantaine sur l'ensemble du territoire national.

Le classement relève de l'initiative de chaque rectorat : l'académie de Versailles détient la palme en ce domaine et a obtenu le classement en ZEP de 24 lycées d'enseignement général ou polyvalents, alors que l'académie de Créteil ne compte que deux lycées classés ZEP mais onze classés en « zone sensible ».

(2) Une voie d'accès expérimentale à Sciences Po pour certains bacheliers méritants relevant du dispositif de l'éducation prioritaire

A côté de la procédure traditionnelle d'entrée en première année par examen, l'IEP de Paris a souhaité mettre en oeuvre, pour une période expérimentale de dix ans, une nouvelle voie d'accès.

Préparée avec les académies de Créteil, de Nancy-Metz et de Versailles, cette expérimentation a conduit l'Institut à retenir sept lycées pour la première année d'application : Jean Zay (Aulnay-sous-Bois), Auguste Blanqui (Saint-Ouen), Maupassant (Colombes), Félix Mayeur (Creutzwald), Saint-Exupéry (Fameck), Poncelet (Saint-Avold), l'Essouriau (Les Ulis).

Les critères de sélection retenus ont été les suivants :

- établissements classés en ZEP, appartenant à un REP, situés en zone sensible ou présentant des caractéristiques socioculturelles équivalentes ;

- forte présence d'élèves boursiers ou issus de catégories sociales défavorisées, ou très défavorisées, dont la part dans l'établissement dépasse de 20 points la moyenne nationale ;

- volontariat des proviseurs et des équipes pédagogiques d'établissements engagés depuis plusieurs années, avec succès, dans des politiques volontaristes.

(3) La procédure de sélection des candidats

Cette nouvelle procédure, en deux étapes, vise à associer les lycées concernés, via une convention passée avec l'IEP, à la sélection de leurs candidats méritants et motivés :

- un jury présidé par le proviseur et constitué d'un collège d'enseignants procède d'abord, par délégation de Sciences Po, à une présélection des candidats : celle-ci est fondée sur l'examen du dossier scolaire du candidat, depuis la classe de seconde, complété par une épreuve orale au cours de laquelle les lycéens pressentis doivent présenter des travaux de recherche effectués de manière autonome. Pour cette première expérimentation, les candidats doivent constituer un dossier de presse sur un thème de leur choix, complété par une note de synthèse et une réflexion personnelle ;

- la procédure d'admission proprement dite consiste en un entretien approfondi avec un jury dans les locaux de l'Institut ; cet entretien repose sur le dossier de presse présenté par le candidat. Constitué de deux enseignants et d'un représentant de la direction, le jury d'admission rend sa décision à la suite de l'entretien, en s'appuyant également sur le dossier scolaire et sur les résultats au baccalauréat du candidat, celui-ci devant être obtenu dès le premier tour pour prétendre à l'admission.

D'après les indications fournies à la commission, et pour la première année d'expérimentation, l'IEP de Paris sélectionnerait une vingtaine de candidats, effectif qui serait multiplié par trois en régime de croisière pour chaque promotion, sans qu'il soit envisagé de définir un quota spécifique : les lycéens retenus viendraient s'ajouter aux effectifs d'étudiants de première année.

(4) Des mesures particulières d'accompagnement pédagogique et financier

Les candidats sélectionnés bénéficieraient d'une période d'intégration au cours de l'été précédant la rentrée et d'un suivi pédagogique assuré par des étudiants parrains de deuxième ou de troisième cycle et par des enseignants dits référents jouant le rôle de tuteurs.

Ces étudiants bénéficieraient d'une bourse de mérite d'un montant annuel de 40.000 francs, allouée sur critères sociaux par l'éducation nationale, ainsi que d'une aide au logement de 20.000 francs accordée par les régions.

Une évaluation de la procédure est prévue au cours de la période d'expérimentation, cette procédure devant être étendue dès 2002 à d'autres lycées et d'autres académies que les trois initialement concernées.

3. Une procédure contestable : la validation législative des décisions du conseil de direction de l'IEP prises antérieurement

L'article 12 a été introduit dans le projet de loi à la suite d'un recours contentieux portant sur la nouvelle procédure d'admission consistant à mettre en place un système dérogatoire d'accès à l'Institut en faveur d'un « quota » de lycéens issus de sept lycées situés en ZEP et discrétionnairement choisis par la direction de l'IEP.

a) L'origine du contentieux

Le 8 mars 2001, M. Richard Descoings, directeur de l'IEP de Paris a présenté un projet de conventions entre Sciences Po et des lycées classés en ZEP, en REP, en zone sensible ou de lycées présentant des caractéristiques socio-culturelles analogues.

Cette présentation a suscité une violente réaction du syndicat étudiant, l'UNI, qui a dénoncé pêle-mêle « l'hypocrisie de la direction parlant avec condescendance de zones d'excellence pédagogique mais envisageant parallèlement une voie d'admission dérogatoire, une procédure d'admission sur quotas et sans concours fondée sur l'appartenance supposée à une catégorie sociale et non sur une véritable exigence de niveau, qui ne peuvent à terme qu'entraîner la dévalorisation du diplôme de Sciences Po ». Lancée le 13 mars 2001 à l'initiative de l'UNI, une pétition a rassemblé plus de 400 signatures sur les 2 500 étudiants présents sur le site.

b) Les deux résolutions adoptées par le conseil de direction de l'IEP de Paris du 26 mars 2001

Ces résolutions 4 ( * ) portent sur les conventions passées entre Sciences Po et des lycées classés en ZEP, en REP, en zone sensible, ou de lycées présentant des caractéristiques socio-culturelles analogues.

- La résolution 1

Le conseil de direction décide d'instituer une procédure de sélection supplémentaire, à caractère expérimental et devant faire l'objet d'une évaluation annuelle, pour les candidats à l'admission en première année de l'IEP de Paris.

Par amendement, le conseil de direction a précisé que « cette expérimentation s'inscrit dans une réflexion plus globale sur les voies et moyens de limiter les biais sociaux inhérents à tout système sélectif, et constatés de manière générale à Sciences Po. Cette réflexion devra aboutir à des mesures concrètes afin de favoriser l'ouverture sociale de Sciences Po. »

La procédure comporterait deux étapes :

La constitution d'un jury dans chaque lycée concerné réunissant notamment des représentants de la direction et des équipes pédagogiques ;

- examen des résultats scolaires du candidat obtenus depuis la classe de seconde et du résultat à une épreuve individuelle dont le contenu est arrêté chaque année conjointement par Sciences Po et les lycées ;

- à la fin de leur année de terminale, le jury statue sur l'admissibilité des lycéens candidats.

L'épreuve d'admission organisée par et à l'IEP de Paris prendrait la forme d'un entretien oral avec un jury composé par le directeur de l'Institut et qui ne pourrait inclure des représentants des lycées partenaires.

Le jury prendrait souverainement la décision d'admettre ou non les candidats déclarés admissibles par les lycées partenaires, et seuls les candidats bacheliers pourraient être déclarés admis.

- La résolution 2

Le conseil de direction de l'IEP de Paris autorise son directeur à passer avec des établissements d'enseignement secondaire classés en ZEP, REP, zone sensible ou des établissements présentant des caractéristiques socio-culturelles analogues, des conventions de partenariats, celles-ci étant renouvelables tous les cinq ans par reconduction tacite, l'IEP et les établissements concernés se fixant un objectif initial de dix ans.

Ces conventions devront comporter des stipulations relatives à l'information sur l'IEP de Paris diffusées aux élèves de ces lycées, au soutien méthodologique apporté aux élèves intéressés, à l'épreuve spécifique co-organisée par des enseignants de ces lycées et l'IEP et destinée à mieux évaluer les élèves intéressés ; elles devront également préciser les conditions dans lesquelles les lycées décideront de l'admissibilité des élèves candidats, ainsi que celles dans lesquelles des représentants des lycées partenaires participeront à la commission de suivi de la mise en oeuvre de ces conventions.

c) La requête de l'UNI à l'origine de l'article 12 du projet de loi

Par une requête du 3 avril 2001, l'Union nationale universitaire (UNI), syndicat étudiant, a demandé l'annulation pour excès de pouvoir de la délibération, en date du 26 mars 2001, par laquelle le conseil de direction de l'IEP de Paris a approuvé deux résolutions relatives à cette nouvelle procédure.

L'UNI a également engagé un référé suspension en vue d'obtenir un sursis à exécution de cette délibération, que le tribunal administratif de Paris a rejeté le 20 avril 2001.

La direction de l'IEP a estimé que ce tribunal pourrait faire droit à un argument invoqué à l'appui de cette requête, faisant valoir que la délibération attaquée serait dépourvue de base légale, notamment s'agissant des compétences du conseil de direction : un risque d'annulation pesait ainsi non seulement sur les conventions entre l'IEP et les lycées classés en ZEP ou assimilés, qui sont à l'origine du contentieux, sur la procédure d'admission spécifique qui devait entrer en vigueur à la prochaine rentrée universitaire, mais aussi sur tout le système de sélection de l'IEP de Paris qui serait ainsi privé de base légale si le juge administratif retenait le moyen de l'exception d'illégalité invoqué par l'UNI à l'encontre de l'article 5 du décret de 1985.

En conséquence, le projet de loi propose dans le paragraphe II de l'article 12 de valider les décisions du conseil de direction du 26 mars 2001, ainsi que la sécurité juridique des décisions prises dans le passé en application de l'article 5 du décret de 1985 qui attribue notamment audit conseil compétence pour fixer les conditions d'admission des élèves.

d) Les validations législatives : un cadre contraint

Selon la jurisprudence du Conseil constitutionnel, depuis la décision du 22 juillet 1980 (n° 80-119 DC), une validation législative ne peut viser des décisions de justice passées en force de chose jugée, sauf à attenter au principe de la séparation des pouvoirs et à l'autorité judiciaire et ne saurait méconnaître le principe de non rétroactivité de la loi pénale.

Par ailleurs, la validation doit répondre à des motifs d'intérêt général, avoir un caractère limité et son objet doit être précisé : c'est manifestement le cas pour les décisions prises dans le passé en application de l'article 5 du décret de 1985 qui attribue notamment au conseil de direction compétence pour fixer les procédures d'admission des élèves. La stabilité des situations juridiques des élèves admis à Sciences Po constitue évidemment un motif d'intérêt général.

Enfin, le juge constitutionnel doit vérifier que l'acte validé n'est pas contraire à un principe de valeur constitutionnelle, comme par exemple le principe d'égalité.

e) La défense de Sciences Po

En réponse à la « guérilla juridique » engagée par l'UNI, Sciences Po estime que son dispositif n'introduit pas une rupture d'égalité entre l'ensemble des bacheliers, notamment pour la détermination des lycées concernés qui reprend le principe de la discrimination positive, fondement du classement en ZEP, qui associe les rectorats au choix des établissements, et répond à un objectif d'intérêt général : plus grande intégration des jeunes provenant de milieux socio-éducatifs défavorisés, souci de démocratisation ou de diversification de Sciences Po.

L'IEP de Paris soutient également que son dispositif, qui fait l'objet de la validation, ne constitue pas une rupture d'égalité entre les bacheliers issus de lycées ayant passé des conventions avec l'Institut, et les autres bacheliers issus de lycées présentant les mêmes caractéristiques, mais non conventionnés avec Sciences Po.

Il considère qu'une discrimination provisoire est inévitable dans le cadre d'une première expérimentation, qui exige de passer des conventions avec certains établissements, ce conventionnement n'exigeant d'ailleurs pas une reconnaissance législative, en dépit de la différence de traitement qu'il introduit nécessairement entre les lycées.

Enfin, cette expérimentation n'aurait qu'une durée de dix ans et une évaluation du dispositif serait effectuée chaque année.

*

* *

III. DISPOSITIONS RELATIVES À LA COMMUNICATION AUDIOVISUELLE

L'enjeu du débat proposé dans ce domaine au Parlement par le projet de loi est limité : nul ne met plus en doute la nécessité de faciliter la reprise en numérique de terre de chaînes du câble et du satellite actuellement détenues à plus de 49% par les opérateurs historiques de la télévision hertzienne terrestre, ni celle d'éclaircir le régime juridique des services rediffusés.

Le préalable de la constitutionalité du texte discuté une fois pris en compte, et l'on verra dans l'examen de l'article 13 que votre commission exprime plus que des doutes à l'égard des dispositions adoptées par l'Assemblée nationale, les deux difficultés relevées par le gouvernement dans la loi du 1er août 2000 seront donc résolues. Mais les questions essentielles n'auront pas été abordées pour autant. Le lancement du numérique de terre bénéficiera-t-il du cadre juridique nécessaire à un lancement rapide et à un développement harmonieux ?

Rien n'est moins sûr. Le débat sur les 49% cache une forêt d'autres problèmes. Prise en tenaille entre l'idéologie dirigiste qui imprègne son régime juridique et la complexe problématique économique et technique de son lancement, la télévision numérique de terre semble assez mal partie.

Votre commission tient à présenter quelques rappels à cet égard.

La télévision numérique de terre ne correspond pas a priori à un besoin du marché ni à une stratégie de développement élaborée par les opérateurs :

- les principaux diffuseurs privés ont axé leur développement sur le pari réussi du satellite. La télévision numérique de terre remet en question la rentabilité de cet investissement tout en suscitant d'importants besoins de financement ;

- les opérateurs du câble sont menacés par la perspective de la diffusion d'une offre de télévision qui pourrait être moins chère que la leur ;

- pour des raisons techniques, la télévision numérique de terre n'offre pas de perspectives aussi intéressantes que le satellite sur le marché émergent des services interactifs, qui nécessitent la disposition de capacités de diffusion importantes.

La télévision numérique de terre est donc d'abord un projet politique correspondant à une certaine vision de l'intérêt général.

D'une part en effet, le numérique de terre :

- implique, comme la diffusion analogique de terre, l'existence d'un réseau de relais implantés sur l'ensemble du territoire sous le contrôle des pouvoirs publics ;

- implique aussi, du fait de la relative rareté de la ressource de diffusion, le maintien d'un système d'autorisation qui permet de soumettre les services attributaires des fréquences à des obligations d'intérêt général.

Avec le numérique de terre, la France devrait conserver la disposition d'un instrument efficace de politique économique et culturelle.

D'autre part le numérique de terre peut aussi ouvrir la voie à un certain nombre d'évolutions socio-économiques souhaitables, dans la mesure où il devrait permettre :

- d'offrir au public le plus large un grand choix de programmes et de services innovants ;

- de favoriser le développement de la communication locale et de proximité ;

- de permettre aux opérateurs d'accroître à terme, grâce à la réduction de leurs coûts de diffusion, leur rentabilité et donc leur capacité investissement dans les programmes ;

- d'ouvrir un créneau de développement à la télévision publique, qui n'a pas su prendre le virage du satellite, et pour laquelle le numérique de terre apparaît comme un dernier moyen d'opérer la diversification thématique nécessaire pour suivre le fractionnement croisant de l'audience et éviter la marginalisation au sein du paysage audiovisuel.

C'est en fonction de l'ensemble de ces éléments que le Sénat avait pris l'initiative d'introduire dans le projet de loi devenu loi du 1er août 2000 un régime juridique susceptible de permettre le lancement du numérique de terre avec d'excellentes perspectives de succès.

Conscient du fait que le lancement de la télévision numérique de terre dépend de la mobilisation des opérateurs publics et privés, et du fait que la mobilisation du secteur privé dépend essentiellement de réalités économiques et financières sur lesquelles l'État a une prise limitée, le Sénat avait adopté, sur la proposition de votre commission, un régime juridique réaliste, souple et incitatif, susceptible d'assurer le concours de l'ensemble des acteurs de l'audiovisuel à la réussite de la télévision numérique de terre. Or le système mis en place sur la proposition du gouvernement par la loi du 1er août 2000 dessine un paysage numérique de terre rigide et largement administré.

Ce système fera en effet émerger à l'occasion des appels à candidatures une offre de programmes éclatée, qu'il appartiendra au CSA d'organiser de son seul chef, en s'inspirant éventuellement des souhaits exprimés par les éditeurs, afin de composer fréquence par fréquence une offre cohérente, attractive et susceptible de provoquer à terme la constitution d'une économie viable de la diffusion hertzienne numérique de terre.

En d'autres termes, le dispositif législatif confie au CSA le rôle d'ensemblier global de la diffusion numérique de terre, rôle crucial pour le lancement de ce marché comme il a été déterminant pour la réussite de la diffusion satellitaire (l'absence d'ensemblier a été en revanche largement responsable des pannes de l'économie du câble).

C'est ainsi, entre autres exemples, que :

- le distributeur de multiplexe, ensemblier naturel et véritable garant du lancement efficace du numérique de terre, en ce qui concerne particulièrement l'organisation et le développement de la diffusion, est réduit à un rôle purement technique et économiquement passif, les futures chaînes ne sachant pas, de leur côté, avec quels partenaires et sur quelles fréquences elles auront à s'entendre pour développer et optimiser leur diffusion ;

- une priorité est accordée aux chaînes gratuites alors que rien n'indique que le marché publicitaire pourra financer la création de plusieurs dizaines de chaînes nouvelles, nationales ou locales, alors que la pénétration du numérique de terre sera trop lente pour que soit possible le basculement vers le clair des chaînes payantes du câble et du satellite, et en dépit de l'essor que la constitution d'une offre payante significative donnerait à l'équipement des ménages en moyens de réception numériques (la présence d'une offre payante inciterait les distributeurs de multiplexe à subventionner largement l'équipement des ménages, comme ce fut le cas pour assurer le succès du Minitel, du satellite et du téléphone mobile) ;

- l'attribution pour 10 ans des autorisations service par service va figer le paysage numérique de terre alors d'une part que l'adaptabilité de l'offre est essentielle à son caractère attractif, alors d'autre part que l'évolution technologique va modifier en permanence les conditions d'une gestion optimale de la ressource disponible sur chaque fréquence, incitant à adapter de façon continue la composition optimale de l'offre de chaque multiplexe.

Votre commission estime que ces choix ont toutes les chances de freiner le lancement de la télévision numérique de terre, avec deux perspectives à la clé :

- un risque financier tout d'abord : la réticence manifeste des opérateurs privés les plus aptes à relever les défis de la télévision numérique de terre - réticence dont le débat sur le seuil de 49 % n'est qu'un indice - dessine à moyen terme la perspective d'un échec dont l'État portera la responsabilité politique du fait des choix idéologiques qui ont présidé à l'élaboration du régime législatif du numérique de terre.

L'État sera invité à prévenir l'échec en assumant certains coûts, on pense au financement des infrastructures de diffusion ou au coût du renouvellement des équipements de réception du public. Le cycle pervers de l'économie structurellement déficitaire et nécessairement subventionnée s'ouvrira ;

- un risque industriel ensuite : mise sous perfusion politique et financière par l'activisme des pouvoirs publics, la télévision numérique de terre atteindra vraisemblablement un stade de développement suffisant pour définitivement compromettre les perspectives de l'économie du câble, et pour infléchir la courbe de croissance du satellite. L'audiovisuel français pourrait ne pas sortir de l'aventure sans avoir laissé passer quelques chances de croissance plus sérieuses.

On comprendra dès lors que votre commission, si elle confirme son intérêt pour le numérique de terre en tentant de porter remède à l'inconstitutionnalité du dispositif proposé, aborde sans grand optimisme un déb at législatif un peu lacunaire.

EXAMEN DES ARTICLES

TITRE IV

DISPOSITIONS RELATIVES À LA JEUNESSE
ET À L'ÉDUCATION POPULAIRE

Article 8

Agrément des associations de jeunesse et d'éducation populaire, et conditions d'octroi d'une aide financière

I. Commentaire du texte du projet de loi

L'alinéa 1 de cet article précise un certain nombre de conditions que doivent respecter les associations déclarées ayant une activité dans le domaine de l'éducation populaire et de la jeunesse, pour pouvoir prétendre à l'agrément du ministère chargé de la jeunesse.

Ces conditions, qui auraient pu être définies par la voie réglementaire, sont au nombre de cinq, et tiennent à l'existence et au respect de dispositions statutaires garantissant la liberté de conscience, le respect du principe de non discrimination, leur fonctionnement démocratique, la transparence de leur gestion et permettant l'égal accès des hommes et des femmes à leurs instances dirigeantes (sauf circonstances particulières liées à l'objet ou à la qualité des membres de l'association), ainsi que l'accès des jeunes.

Au titre de l'article 6 de l'ordonnance de 1943, seules les associations ayant l'agrément « éducation populaire et jeunesse » pouvaient recevoir des subventions de l'État et des collectivités territoriales.

L'alinéa 2 prévoit que dorénavant cet agrément ne sera plus une condition préalable que pour l'octroi des subventions du seul ministre chargé de la jeunesse. Encore prévoit-il, à titre dérogatoire, que les associations agréées puissent également recevoir une aide pour une durée et des montants limités.

L'alinéa 3 précise que les conditions de l'agrément, de son retrait, et de l'octroi d'une aide financière aux associations non agréées seront définies par décret en Conseil d'État.

La possibilité d'un retrait de l'agrément était déjà évoquée par le deuxième alinéa de l'article 6 de l'ordonnance de 1943 précitée.

II. Position de l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

III. Position de la commission

Votre commission a adopté à cet article deux amendements tendant respectivement :

- à alléger la rédaction de l'alinéa 1 ;

- à préciser que la définition des conditions de l'agrément et de son retrait d'une part, et celle de l'octroi d'une aide financière aux associations non agréées d'autre part feront l'objet de décrets en Conseil d'État distincts.

Article 9

Conseil national de l'éducation populaire et de la jeunesse

I. Commentaire du projet de loi

Cet article dote d'un statut législatif le Conseil national de l'éducation populaire et de la jeunesse, instance consultative qui fonctionne actuellement sur la base réglementaire - juridiquement suffisante - du décret de 1986 modifié en 1990.

Cette consécration symbolique ne se traduit pas par une évolution de ses attributions, du moins telles qu'elles sont décrites par le projet de loi, et la ministre a précisé, au cours de son audition, qu'il n'est pas prévu de modifier son rôle ni sa composition.

II. Position de l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification

III. Position de la commission

La commission a adopté cet article sans modification.

Article 10

Conseil national de la jeunesse

I. Commentaire du projet de loi

Cet article a pour objet de conférer un statut législatif au « conseil permanent de la jeunesse » créé par un arrêté de 1998, et qui est rebaptisé, à cette occasion « conseil national de la jeunesse ».

Tout comme à l'article précédent, on peut s'interroger sur l'opportunité d'inscrire dans la loi l'existence d'un organisme qui a pu être valablement constitué par un simple arrêté ministériel. Certes, le Gouvernement entend, par cette consécration législative, marquer l'intérêt qu'il porte à cette instance de consultation de la jeunesse, mais la multiplication de ce type d'initiatives contribue à vider un peu plus la distinction opérée par les articles 34 et 37 de la Constitution entre le domaine de la loi et celui du règlement.

II. Position de l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification

III. Position de la commission

La commission a adopté cet article sans modification.

Article 11
(articles L. 227-1, L. 227-3 et L. 227-4 à L. 227-11
nouveaux du code de l'aide sociale et de la famille)

Réglementation des centres de vacances et des centres de loisirs sans hébergement accueillant des mineurs

I. Commentaire du projet de loi

1. Les paragraphes I et III de cet article procèdent à des modifications rédactionnelles dans l'intitulé du chapitre VII du code de l'action sociale et des familles consacré à l'accueil des mineurs hors du domicile, ainsi que dans l'article L. 227-1. La substitution du mot « accueil » au mot « hébergement » répond à la volonté de prendre en compte explicitement, non seulement les centres de vacances, mais les centres de loisirs sans hébergement.

2. Les paragraphes II et IV procèdent à différentes mesures de coordination respectivement dans le deuxième alinéa de l'article L. 227-1 et dans l'article L. 227-3 en substituant aux anciennes références réglementaires, les références aux articles L. 227-4 à L. 227-11 (nouveaux).

3 . Le paragraphe V regroupe les huit articles nouveaux qui instituent la nouvelle réglementation des centres de vacances et des centres de loisirs sans hébergement.

• Article L. 227-4 (nouveau)

L'alinéa 1 confie au préfet la responsabilité de la protection des mineurs accueillis en centres de vacances et en centre de loisirs sans hébergement.

L'alinéa 2 rend obligatoire, pour les centres de vacances et les centres de loisirs, l'élaboration d'un projet éducatif, soumis au contrôle de l'État.

• Article L. 227-5 (nouveau)

Le premier alinéa impose l'obligation aux organisateurs des centres de vacances et de loisirs de déposer une déclaration préalable au préfet. Il précise qu'une nouvelle déclaration est nécessaire en cas de modification des conditions de l'accueil et de l'exploitation des locaux. Il reconnaît au préfet la possibilité de s'opposer à l'organisation de l'accueil lorsque les conditions dans lesquelles il est envisagé présentent des risques pour la santé et la sécurité physique et morale des mineurs concernés, ou en cas d'absence de projet éducatif.

L' alinéa 2 oblige les organisateurs des centres ainsi que les exploitants des locaux où l'accueil se déroule à souscrire un contrat d'assurances garantissant les conséquences pécuniaires de leur responsabilité civile, ainsi que celle de leurs préposés et des participants aux activités proposées.

L' alinéa 3 fait obligation aux organisateurs des centres d'attirer l'attention des représentants légaux des mineurs sur leur intérêt à souscrire un contrat d'assurance.

L' alinéa 4 subordonne l'octroi d'une aide financière publique au respect des dispositions de l'article.

L' alinéa 5 renvoie à un décret du Conseil d'Etat la détermination des conditions d'application des dispositions de l'article et la définition des normes d'hygiène et de sécurité et des exigences de qualification des personnels.

• Article L. 227-6 (nouveau)

Cet article interdit aux personnes ayant été condamnées pour crime ou à une peine d'emprisonnement pour un certain nombre de délits, limitativement énumérés, d'exercer des fonctions, à quelque titre que ce soit, dans les centres de vacances et les centres de loisirs pour mineurs.

Ces délits sont :

* soit des atteintes à la personne humaine ; sont ainsi visées :

- les atteintes involontaires à l'intégrité de la personne humaine ;

- les agressions sexuelles ;

- le proxénétisme et les infractions assimilées ;

- la mise en péril des mineurs ;

* soit des appropriations frauduleuses, comme l'escroquerie et l'abus de confiance.

A ces délits, désignés par leur référence dans le code pénal, s'ajoute celui de provocation à l'usage de stupéfiants, visé à l'article L. 3421-4 du code de la santé publique.

• Article L. 227-7 (nouveau)

L'article L. 227-7 sanctionne pénalement le non-respect de certaines règles applicables à l'accueil des mineurs en centres de vacances et en centres de loisirs sans hébergement, en s'inspirant de certaines des sanctions prévues par les articles 49 et 50 de la loi du 16 juillet 1984 en matière d'enseignement des activités sportives ou de surveillance des établissements sportifs.

Il punit de six mois d'emprisonnement, et de 3 750 € d'amende (25 000 F) :

- le non-respect de l'obligation de déclaration préalable, ou de nouvelle déclaration, en cas de modification des conditions de l'accueil ;

- le non-respect des obligations d'assurance.

Il punit d'un an d'emprisonnement, et de 15 000 € d'amende (100 000 F) :

- le non-respect des incapacités professionnelles de l'article L. 227-6 ;

- l'inexécution des décisions prises par les préfets en matière de police administrative ;

- le fait de s'opposer « de quelque façon que ce soit » à l'exercice des fonctions de surveillance reconnues aux agents habilités du ministère de la jeunesse par l'article L. 227-8.

• Article L. 227-8 (nouveau)

L'article L. 227-8 pose les principes régissant le contrôle exercé par les fonctionnaires habilités et assermentés du ministère de la jeunesse sur les centres de vacances et les centres de loisirs sans hébergement.

Ces dispositions ont vocation à se substituer aux dispositions prévues par l'arrêté du 19 mai 1975 pour les centres de vacances et à combler l'absence de dispositif spécifique de contrôle pour les centres de loisirs sans hébergement.

Le premier alinéa confie la surveillance des centres de vacances et des centres de loisirs aux agents placés sous la double autorité du préfet et du ministre chargé de la jeunesse et des sports.

L'alinéa 2 confie la recherche et la constatation des infractions aux officiers de la police judiciaire ainsi qu'aux fonctionnaires du ministère de la jeunesse et des sports habilités à cet effet par le ministre, et assermentés dans des conditions définies en Conseil d'Etat.

L'alinéa 3 les autorise à pénétrer dans les locaux où se déroule l'accueil des mineurs, à l'exclusion des parties de ces locaux servant de domicile. Ils peuvent se faire communiquer tout document professionnel, et recueillir sur convocation et sur place les renseignements et justifications.

L'alinéa 4 précise que le procureur de la République doit être préalablement informé des opérations envisagées.

L'alinéa 5 limite les possibilités d'inspection au créneau 8 heures/20 heures, et subordonne une visite en dehors de ces horaires à des conditions strictes :

- un appel provenant de l'intérieur des locaux (conforme au demeurant à la règle instituée par l'article 59 du code pénal) ou une plainte ou réclamation ;

- une autorisation préalable du président du tribunal de grande instance.

Les alinéas 6, 7, 8, et 9 précisent la procédure à suivre en cas de refus de l'accès aux locaux. Les étapes en sont :

- la formulation d'une demande précisant les locaux à visiter, et les raisons de nature à justifier la visite ;

- une ordonnance rendue par le président du tribunal de grande instance mentionnant les lieux dont la visite est autorisée, et les nom et qualité de l'agent habilité à y procéder ; la visite s'effectuera sous le contrôle de ce magistrat qui peut se rendre sur place au moment de l'intervention ;

- la notification de l'ordonnance à la personne responsable des locaux ;

Les alinéas 10 et 11 précisent respectivement que l'ordonnance est exécutoire à titre provisoire, et que les procès-verbaux, transmis au procureur de la République dans les cinq jours, font foi jusqu'à preuve du contraire.

Enfin, l'alinéa 11 fait obligation aux personnels des centres de fournir tous renseignements nécessaires aux agents habilités dans l'exercice de leur mission de surveillance.

• Article L. 227-9 (nouveau)

Cet article pose les bases légales du pouvoir de police administrative reconnu au préfet à l'égard des personnes travaillant dans les centres de vacances et les centres de loisirs.

Le premier alinéa autorise le préfet, après avoir pris l'avis d'une commission mixte, comprenant à la fois des représentants de l'Etat et des représentants des mouvements de jeunesse et d'éducation populaire agréés, à prononcer des mesures d'interdiction temporaire ou permanents.

Le second alinéa autorise le préfet, en cas d'urgence, à prendre des mesures de suspension d'exercice, limitées à six mois, ou en cas de poursuite pénale, s'appliquant jusqu'à l'intervention d'une décision de justice définitive.

• Article L. 227-10 (nouveau)

Cet article donne une base légale aux pouvoirs de police administrative du préfet à l'égard des centres de vacances et des centres de loisirs sans hébergement.

Jusqu'à présent, ceux-ci ne pouvaient s'exercer :

- à l'égard des centres de vacances que sur le fondement de l'article 7 du décret du 29 janvier 1960, et de l'arrêté du 19 mai 1975 ;

- à l'égard des centres de loisirs sans hébergement, en l'absence de dispositions spécifiques, par le recours aux dispositions générales des articles L. 221-5 et L. 221-6 du code de la consommation qui autorisent respectivement le ministre compétent et le préfet, en cas de danger grave ou immédiat, à suspendre la prestation d'un service.

Le dispositif proposé par le projet de loi qui s'inspire en partie du dispositif de l'article 48 de loi du 16 juillet 1984 relatif à la police administrative des établissements sportifs, reconnaît au préfet :

- un pouvoir d'injonction ;

- un pouvoir de sanction .

• Article L. 227-11 (nouveau)

Cet article prévoit que les conditions d'application des pouvoirs de police des préfets sont précisés par décret en Conseil d'Etat.

4. Le paragraphe VI de l'article précise les délais d'entrée en vigueur de l'obligation faite aux organisateurs de centres et aux exploitants de souscrire un contrat d'assurance.

II. Position de l'Assemblée nationale

Outre des amendements rédactionnels ou de précision, l'Assemblée nationale a apporté à cet article plusieurs modifications :

• à l'article L. 227-5 (nouveau) elle a adopté des amendements n'imposant l'obligation de déclaration préalable qu'aux organisateurs de l'accueil, imposant l'obligation d'assurance aux exploitants des locaux comme aux organisateurs de l'accueil, et précisant que l'obligation d'une formation n'est imposée qu'aux organisateurs ;

• Elle a adopté un article L. 227-5-1 (nouveau) excluant les garderies périscolaires de l'obligation de déclaration préalable et de l'obligation d'établir un projet éducatif ;

III. Position de la commission

Votre commission a adopté six amendements aux dispositions incluses dans le paragraphe V de cet article :

• A l'article L. 227-5 (nouveau) , elle a adopté deux amendements :

* le premier a pour objet d'imposer l'obligation de déclaration préalable aux exploitants de locaux.

L'arrêté du 19 mai 1975 relatif au contrôle des centres de vacances prévoyait en effet deux déclarations distinctes :

- la déclaration des séjours de vacances, imposée aux organisateurs de l'accueil ;

- la déclaration de première ouverture, imposée à tout établissement dans lequel des séjours de vacances collectives de mineurs de plus de quatre ans sont organisés avec hébergement d'une manière permanente ou périodique.

Cette déclaration de première ouverture, qui doit être effectuée deux mois avant l'ouverture, a pour objet de permettre à l'administration de prendre connaissance, en temps utile, de la situation des locaux, de la nature de l'hébergement envisagé et des conditions d'hygiène et de sécurité.

Estimant qu'il serait regrettable de priver l'administration de cette possibilité d'exercer un contrôle préalable sur les locaux utilisés, votre commission vous proposera de restaurer par un amendement l'obligation de déclaration pour les exploitants de locaux, en précisant que, dans son esprit, celle-ci ne doit toutefois s'appliquer qu'aux locaux où l'hébergement est organisé de manière permanente ou périodique.

* Le second amendement est destiné à préciser la portée des garanties d'assurance en mentionnant explicitement que « les assurés sont tiers entre eux ».

Cette mention permettra de garantir que les personnes assurées au titre du contrat d'assurance que doivent contracter les organisateurs de l'accueil des mineurs sont bien considérées comme des tiers entre-elles, et qu'elles sont bien couvertes même dans l'hypothèse des dommages qu'elles se créent mutuellement.

Tel pourrait être le cas lorsque la responsabilité d'un enfant est engagée lors d'un accident dont serait victime un autre enfant du centre de vacances ou de loisirs.

• A l'article L. 227-6 (nouveau), elle a adopté un amendement pour compléter la liste des délits justifiant une incapacité professionnelle.

Votre commission relève que dans la liste des délits visés, l'article L. 227-6 comprend la provocation à l'usage de stupéfiants (article L. 3421-1 du code de la santé publique) mais non l'usage de stupéfiants (article L. 3421-1) alors que celui-ci était explicitement mentionné par la loi du 6 juillet 2000 parmi les motifs d'incapacités à l'enseignement ou à l'encadrement des activités physiques et sportives. Votre commission, qui considère que l'encadrement des mineurs ne mérite pas moins de précaution que celui des sportifs, vous proposera de corriger cette omission par un amendement .

• A l'article L. 227-7(nouveau), elle a adopté un amendement destiné à harmoniser l'échelle des sanctions pénales.

Votre commission a relevé une disparité entre les peines d'amendes sanctionnant l'obstruction aux missions de surveillance des centres de vacances et de loisirs, que le projet envisage de punir de 100 000 F d'amende, et l'obstruction aux missions de surveillance des établissements sportifs, punie d'une peine de 50 000 F, aux termes de l'article 50 de la loi du 16 juillet 1984.

Elle vous propose donc de procéder à l'harmonisation nécessaire, en alignant la sanction prévue à l'article L. 227-7 sur celle de l'article 50 de la loi de 1984 précitée.

• A l'article L. 227-8 (nouveau), la commission a adopté un amendement de façon à permettre aux agents de police judiciaire, de seconder, comme le prévoit le code de procédure pénale, les officiers de police judiciaire dans l'exercice de leurs fonctions.

• A l'article L. 227-9 (nouveau), votre commission a adopté un amendement pour ramener de six à trois mois la durée des mesures de suspension provisoire que peut prononcer le préfet.

Elle a estimé que, compte tenu de la gravité des mesures envisagées pour les intéressés, cette durée de trois mois constituait un délai suffisant pour réunir la commission consultative prévue au premier alinéa de l'article et prendre une décision selon la procédure régulière.

TITRE V

DISPOSITIONS RELATIVES À L'ÉDUCATION
ET À LA COMMUNICATION
Article 12
(article L.621-3 nouveau code de l'éducation)

Compétences du conseil de direction
de l'Institut d'études politiques de Paris

I. Commentaire du texte du projet de loi

L'article 12 tend d'abord à conférer au conseil de direction de l'IEP de Paris les compétences en matière d'admission des étudiants aux formations dispensées par cet établissement d'enseignement supérieur et d'organisation des études.

Il a en outre pour objet de valider, à titre de précaution, les délibérations du conseil de direction prises en mars 2001, celles-ci visant à expérimenter une nouvelle procédure d'admission en première année.

1. Une validation législative de l'autonomie de l'IEP de Paris

- Le paragraphe I de l'article 12 a d'abord pour objet de consolider pour l'avenir le rôle actuel du conseil de direction de l'IEP de Paris quant à la définition des modalités particulières d'admission, qui autrement relèverait de la compétence du ministre de l'éducation nationale.

Compte tenu de la rédaction de l'article L. 612-3 du code de l'éducation, une validation législative s'impose pour reconnaître la compétence dudit conseil de direction pour fixer, à la place du ministre chargé de l'enseignement supérieur, les modalités particulières d'admission à cet Institut, qui relève de la catégorie des grands établissements.

Il est ainsi inséré un nouvel article L. 621-3 qui déroge aux dispositions du troisième alinéa de l'article L. 612-3 du code de l'éducation et qui reconnaît une compétence générale au conseil de direction pour fixer les conditions et modalités d'admission aux formations propres à l'Institut : ledit conseil détermine ainsi les critères et les procédures permettant d'assurer la sélection et le recrutement des élèves dont la scolarité sera sanctionnée par le diplôme de l'IEP de Paris ou par le certificat d'études politiques délivré par l'Institut.

Il a également compétence pour organiser l'ensemble des études, de la première année jusqu'au doctorat, comme le prévoyait l'article 5 du décret de 1985.

- Le paragraphe I dudit article vise ensuite les modalités particulières susceptibles d'être adoptées par le conseil de direction pour diversifier le recrutement parmi les élèves du second degré, notamment sur le plan social, et qui sont susceptibles de déroger aux procédures classiques de sélection à l'entrée de l'IEP.

Afin de « sécuriser » sur le plan juridique les diverses procédures d'admission différenciées mises en oeuvre depuis de nombreuses années, en particulier en faveur des étudiants étrangers, le paragraphe I de l'article 12 reconnaît à l'IEP de Paris le droit de conclure des conventions avec des établissements de l'enseignement secondaire ou supérieur, français et étrangers, ces conventions visant à associer lesdits établissements au recrutement de leurs élèves et étudiants par l'IEP.

2. Une validation de précaution des décisions du conseil de direction de l'IEP

Le paragraphe II de l'article 12 a été introduit dans le projet de loi à la suite du recours contentieux formé par un syndicat étudiant portant sur la nouvelle procédure d'admission en faveur des lycéens méritants des zones d'éducation prioritaire, ou assimilées, et mettant en cause les compétences exercées par le conseil de direction de l'IEP de Paris pour l'admission de ses étudiants.

Comme il a été dit précédemment, l'autonomie reconnue au conseil de direction, par le décret de 1985, ne semble pas conforme au principe posé par le troisième alinéa de l'article L. 612-3 du code de l'éducation qui stipule qu'« une sélection peut être opérée, selon des modalités fixées par le ministre de l'éducation nationale, pour l'accès aux grands établissements au sens de la présente loi ... ».

Compte tenu du risque juridique susceptible d'hypothéquer les conventions entre l'IEP et les lycées de ZEP pressentis, le paragraphe II de l'article 12 propose de garantir l'entrée en vigueur et la sécurité de la procédure supplémentaire d'admission à l'IEP de Paris, visant à diversifier le recrutement, en validant les décisions du conseil de direction du 26 mars 2001.

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

Après avoir repoussé deux amendements de suppression présentés par MM. Georges Sarre et Bernard Accoyer, l'Assemblée nationale a adopté sans modification l'article 12 du projet de loi en complétant toutefois celui-ci par un amendement présenté par M. Pierre-Christophe Baguet tendant à étendre le dispositif « Sciences Po » à l'ensemble des établissements d'enseignement supérieur.

Dans un cadre expérimental, et sur la base d'un volontariat, les universités pourraient ainsi passer avec les établissements du second degré, des conventions dans le but de favoriser la diversification sociale de leur recrutement.

III. La position de la commission

- S'agissant du paragraphe I de l'article 12, la commission ne saurait remettre en question l'autonomie et le statut de Sciences Po, qui sont consacrés depuis le siècle dernier, et qui sont parfaitement justifiés compte tenu du rôle majeur de cette institution qui accueille aujourd'hui quelque 4 000 étudiants, dont 15 % d'étudiants étrangers, ou remettre en cause les procédures actuelles rigoureuses et diversifiées d'admission à tous les stades de la scolarité, ainsi que la situation des étudiants en cours d'étude.

Elle est ainsi favorable, dans un souci de sécurisation juridique, à une validation de l'article 5 du décret du 10 mars 1985, dont le sort est devenu très incertain après le recours de l'UNI, et qui donne compétence au conseil de direction de l'IEP de Paris pour fixer les conditions d'admission de ses étudiants.

La commission observe par ailleurs que le nouvel article L. 621-3 du code de l'éducation introduit par le paragraphe I de cet article, précise que ledit conseil peut proposer des procédures d'admission par voie de convention passées avec les établissements d'enseignement secondaire au supérieur, français ou étrangers, pour diversifier le recrutement social à Sciences Po : toutes les possibilités de démocratisation de l'IEP de Paris sont ainsi ouvertes pour l'avenir, pour peu que celles-ci répondent au principe d'égalité.

- S'agissant du paragraphe II de l'article 12 relatif à la validation, à titre de précaution, des décisions du conseil de direction du 26 mars 2001, visant à ouvrir aux meilleurs élèves des ZEP, hors concours, l'accès en première année, la commission est en revanche beaucoup plus réservée.

Cette procédure spécifique de recrutement, destinée à être appliquée dès la rentrée universitaire de 2001, a été adoptée par l'IEP de Paris sur le fondement juridique incertain du décret de 1985. De ce fait, la commission estime que le Parlement n'a pas à valider a posteriori une procédure juridiquement douteuse qui a toutes les chances d'être annulée par le tribunal administratif de Paris.

Outre le fait que le Parlement est mis en quelque sorte devant le fait accompli, ce dispositif apparaît critiquable à la commission, même s'il s'inspire du principe de la discrimination positive qui a été consacré au début des années 80 par la mise en place des zones d'éducation prioritaire.

Un tel dispositif, destiné à une vingtaine d'élèves, introduit d'abord incontestablement une inégalité de traitement entre les bacheliers des lycées classés en ZEP, puisque seuls sept lycées de trois académies ont été retenus selon des critères qui restent particulièrement vagues.

Il est par ailleurs incontestablement discriminatoire à l'égard des élèves méritants de lycées hors ZEP, qui resteront, eux, soumis au régime de droit commun du concours d'entrée, sauf s'ils ont obtenu une mention « très bien » au baccalauréat.

Dans la pratique, on peut craindre que les lycéens de ZEP retenus dans le cadre de ce dispositif soient surtout des enfants d'enseignants regroupés dans les classes dites « CAMIF » ou « MAIF », qui disposent, comme le montrent les statistiques, de tous les atouts pour réussir à Sciences Po.

Compte tenu de la rédaction du paragraphe I de l'article 12, qui n'appelle pas d'objection, l'IEP de Paris aura toute liberté, à partir d'une base législative désormais sûre, pour mettre en place de nouveaux dispositifs destinés à diversifier son recrutement : à titre d'exemple, des classes préparatoires « Sciences Po » pourraient sans difficultés être mises en place dans un certain nombre de lycées d'enseignement général classés en ZEP, une telle formule répondant, elle, au principe d'égalité devant le concours.

Par ailleurs, et compte tenu de la désaffection qui touche de plus en plus les filières scientifiques supérieures, la commission estime qu'il conviendrait de favoriser simultanément l'orientation des bacheliers méritants d'origine modeste vers ces filières, y compris vers les grandes écoles, qui ont besoin d'élèves brillants venant de tous les horizons.

En conséquence, la commission proposera de supprimer le paragraphe II de l'article 12 du projet de loi.

- S'agissant du paragraphe III de l'article 12, celui-ci étend aux universités le dispositif prévu pour l'IEP de Paris par le paragraphe I du même article.

Dans un cadre expérimental et fondé sur le volontariat, les établissements d'enseignement supérieur pourraient ainsi passer des conventions avec des établissements de l'enseignement secondaire pour favoriser la diversification sociale de leur recrutement. Une telle extension s'appliquerait également aux IEP de province, qui relèvent des universités, et qui étaient exclus par la rédaction initiale de l'article 12.

La commission considère qu'une telle disposition, qui est incontestablement de nature à démocratiser encore davantage l'accès à l'enseignement supérieur, est aussi susceptible de donner un nouvel élan à l'autonomie de nos universités qui sont trop souvent confrontées à une réglementation excessivement rigide.

Elle est donc favorable au maintien de ce paragraphe III, sous réserve des explications que le ministre chargé de l'enseignement supérieur ne manquera pas de produire en séance publique.

Sous réserve de ces observations, et de la suppression du paragraphe II, la commission a donné un avis favorable à l'adoption de cet article.

Article 13

(articles 30-1, 30-5, 39, 41 et 41-2-1 de la loi n° 86-1067
du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication)

Dispositif anti-concentration applicable à la télévision
numérique hertzienne terrestre

I. Commentaire du texte du projet de loi

Dans sa rédaction initiale, l'article 13 du projet de loi comportait trois paragraphes, le premier modifiant les conditions d'application aux services de télévision diffusés par voie hertzienne terrestre numérique du plafond de détention par une même personne du capital des sociétés détentrices d'autorisation, les deux derniers modifiant les conditions d'application du système anti-concentration aux services rediffusés par voie hertzienne terrestre numérique.

A. L'APPLICATION DU PLAFOND DE DÉTENTION PAR UNE MÊME PERSONNE DU CAPITAL DES SOCIÉTÉS DÉTENTRICES D'AUTORISATION

1. Le dispositif prévu par la loi du 1er août 2000

Il convient de rappeler sommairement les conditions d'élaboration et la portée des dispositions dont la modification est proposée au Parlement.

• L'extension à la télévision numérique de terre de la règle des 49%

Le plafond de détention par une même personne du capital d'une société titulaire d'une autorisation de service de télévision par voie hertzienne terrestre a son origine dans la décision n° 86-217 DC du 18 septembre 1986 du Conseil constitutionnel. La loi du 27 novembre 1986 a, en conséquence de cette décision, institué un plafond de détention de 25%, que la loi du 1 er février 1994 a porté à 49 %.

Cette règle figure dans le premier alinéa du I de l'article 39 de la loi du 30 septembre 1986, que la loi du 1 er août 2000 n'a pas modifié. Visant les « sociétés titulaires d'une autorisation relative à un service national de télévision par voie hertzienne terrestre », sans autre précision, elle est devenue applicable à l'ensemble des chaînes qui seront diffusées par voie hertzienne terrestre numérique.

• Une extension irréaliste

Toutes les études économiques, et le simple bon sens, montrent que le lancement de la télévision numérique de terre se fera largement grâce à la reprise sur ce support des chaînes créées pour le câble et pour le satellite. L'équilibre économique des chaînes thématiques est trop fragile et les ressources supplémentaires d'abonnement ou publicitaires trop incertaines pour que la trentaine de canaux disponibles en numérique de terre soient occupés, à côté des chaînes hertziennes traditionnelles actuellement diffusées en analogique, par des service spécifiques et nouveaux.

Or nombre des chaînes thématiques créées pour le câble et pour le satellite ont été conçues par les opérateurs traditionnels, TF1, M6 et Canal Plus, en fonction d'une stratégie globale de développement et de marketing qui implique souvent, de leur point de vue, la détention de parts de capital supérieures à 49 %. Ces opérateurs ont repoussé la perspective d'avoir à céder des parts de capital de leurs services thématiques, à la seule fin de participer à l'aventure incertaine de la télévision numérique de terre. Notons à titre d'illustration que M6 détient 50 % du capital de Série Club, 51 % du capital de Téva, 100 % du capital de M6 musique et de Fun TV ; Canal Plus détient 100 % de i Télévision et de Demain, ainsi que plus de 60 % de Multithématiques, société qui contrôle Planète, Seasons, etc. ; TF1 détient 100 % du capital de LCI et 20 % du capital de Série Club.

L'assouplissement de la règle du plafond de 49 % en fonction de cette situation est apparu nécessaire pour assurer la participation des diffuseurs hertziens traditionnels au lancement de la télévision numérique de terre.

• L'absence d'initiative du gouvernement et les solutions de fortune avancées lors de l'élaboration de la loi du 1 er août 2000

Le ministre de la culture et de la communication a déclaré à l'Assemblée nationale le 10 mai dernier, au cours de la première lecture du présent projet de loi, que l'assouplissement de la règle des 49 % avait été souhaité par le gouvernement mais qu'il n'avait pas été accepté par la majorité sénatoriale.

Il est utile de rappeler à cet égard que le gouvernement a élaboré le régime juridique du numérique de terre figurent dans la loi du 1 er août 2000 en méconnaissant parfaitement les réalités économiques du secteur audiovisuel et en ignorant totalement aussi bien les avis raisonnables prodigués par les opérateurs, que les propositions efficaces présentées par votre commission et adoptées par le Sénat en deuxième lecture.

Aussi la question du plafond de 49 % n'a-t-elle fait l'objet d'aucune initiative de sa part, et n'a-t-elle été abordée qu'en nouvelle lecture, au Sénat, sous la forme d'un amendement parlementaire dont votre rapporteur a dû proposer le rejet au Sénat, observation faite des graves défauts de ce texte élaboré dans la hâte à l'extrême fin du débat législatif 5 ( * ) .

Cet aboutissement est entièrement du à l'obstination, pour ne pas dire l'autisme, du gouvernement lors de la phase initiale d'élaboration de la loi. Aussi est-on surpris que le ministre de la culture et de la communication ait cru bon de réagir au juste rappel de cet arrière-plan, qui lui était fait le 10 mai à l'Assemblée nationale, en déclarant qu'il ne pouvait pas laisser réécrire l'histoire du travail gouvernemental et parlementaire, et en imputant à la majorité sénatoriale une situation dont le gouvernement est seul responsable.

2. La solution proposée

Le gouvernement ne s'est rendu aux objections et arguments des futurs opérateurs de la télévision numérique de terre que pour proposer au Parlement l'adoption d'un dispositif extrêmement contestable sur le plan juridique.

• L'application du plafond de 49 % serait soumise à un critère d'audience

Le I de l'article 13 du projet de loi propose pour le premier alinéa du I de l'article 39 de la loi du 30 septembre 1986 une nouvelle rédaction aux termes de laquelle le plafond de 49 % de détention par une même personne du capital ou des droit de vote d'une société titulaire d'une autorisation relative à un service national de télévision resterait appliqué à tout service diffusé par voie hertzienne terrestre, en mode analogique ou numérique, mais désormais à la condition que l'audience moyenne annuelle, tous supports confondus, du service, y compris ses rediffusions, dépasse 3 % de l'audience totale des services de télévision.

Le CSA serait chargé d'appliquer cette nouvelle règle dont les modalités seraient fixées par décret en Conseil d'État, la loi précisant simplement que les personnes franchissant le seuil de 3 % auraient un délai maximum d'un an pour se défaire de leur part de capital excédant le niveau de 49 %.

• Le dispositif proposé a été conçu afin que le plafond de 49 % ne frappe que les chaînes hertziennes actuellement diffusées en mode analogique

Aucune des chaînes thématiques existantes ne dépasse actuellement le taux de 1 % d'audience calculé par rapport au public potentiel de chacune.

Compte tenu de la tendance à l'éclatement de l'audience provoquée par l'extension continuelle de l'offre de télévision, il semble peu probable que le seuil de 3 % soit franchi dans un proche avenir par ces chaînes, et moins encore par celles qui seront créées pour le numérique de terre.

Cette analyse concerne surtout les chaînes thématiques, dont l'audience est par nature très fractionnée.

On peut imaginer en revanche qu'une chaîne de format généraliste proche de celui de M6 à ses débuts, créée pour la diffusion terrestre numérique, obtienne assez rapidement 3 % d'audience nationale et passe dès lors sous le régime du plafond de 49 %.

Quoiqu'il en soit, le système imaginé par le gouvernement donne satisfaction aux opérateurs, qui se sentent assurés, en moyenne période, de la stabilité du tour de table de leurs thématiques.

• Un double soupçon d'inconstitutionnalité

Dans son tardif et partiel ralliement aux réalités économiques du numérique de terre, le gouvernement a négligé les contraintes que la jurisprudence constitutionnelle impose à la modification du régime des libertés publiques.

(1) On notera d'abord que le mécanisme prévu au I de l'article 13 du projet de loi tombe directement sous le coup de la vigoureuse critique que le Conseil constitutionnel adressait dans sa décision n° 84-181 DC du 10 octobre 1984, à d'éventuelles dispositions législatives qui « imposeraient à tout moment aux personnes possédant ou contrôlant les quotidiens visés le respect de plafonds dont le dépassement peut dépendre du succès auprès du public desdits quotidiens ou des mécomptes des quotidiens concurrents » . De telles dispositions « porteraient ainsi à la liberté de ces personnes et, plus encore, à la liberté des lecteurs, une atteinte directement contraire à l'article II de la Déclaration de 1789 » .

« Prises isolément ces dispositions seraient évidemment inconstitutionnelles » , énonçait le Conseil, avant de constater que les plafonds en cause, institués par les articles 10, 11 et 12 de la loi visant à limiter la concentration et à assurer la transparence financière et le pluralisme des entreprises de presse, n'étaient pas viciés par ce motif d'inconstitutionnalité dans la mesure où, en application de son article 13, « la loi elle-même exclut le jeu des plafonds au cas ... de développement de la diffusion dû à d'autres causes que des opérations d'acquisition ou de prise de contrôle ; que, donc, la liberté de création et de développement des quotidiens n'est en rien atteinte ni le libre choix des lecteurs » .

Rappelons d'une part que l'article 11 de la Déclaration de 1789, point de départ de l'analyse du Conseil Constitutionnel, énonce le principe de la libre communication des pensées et des opinions, et d'autre part que la décision du Conseil Constitutionnel n° 86-217 DC du 18 septembre 1986 place expressément la communication audiovisuelle sous le régime de la libre communication des pensées et des opinions énoncé par l'article 11 de la Déclaration, précisant en particulier que « l'objectif à réaliser est que les auditeurs et les téléspectateurs qui sont au nombre des destinataires essentiels de la liberté proclamée par l'article 11 de la Déclaration de 1789 soient à même d'exercer leur libre choix sans que les intérêts privés ni les pouvoirs publics puissent y substituer leurs propres décisions, ni qu'on puisse en faire l'objet d'un marché » .

Il est bien évidemment indispensable, dans ces conditions, d'appliquer au dispositif du I de l'article 13 du projet de loi le raisonnement énoncé par la décision n° 84-181 DC du 10 octobre 1984, ce qui conduit à constater que le jeu du seuil de 3 % d'audience, résultant indiscutablement du succès des services de télévision auprès du public, ferait manifestement obstacle à la liberté de création et de développement naturel de ces services et au libre choix des auditeurs . Il faut alors bien admettre que, pour reprendre l'expression de la décision n° 84-181, « ces dispositions seraient évidemment inconstitutionnelles » .

Et si l'on opposait à ce raisonnement la faible probabilité du dépassement du seuil de 3 % par un service numérique non soumis initialement au plafond de 49 %, il n'en resterait pas moins tout à fait possible qu'une chaîne généraliste nouvelle ou une thématique pouvant intéresser un assez large public atteignent rapidement ce seuil. Les projets élaborés à cet égard par certains « nouveaux entrants » n'ont d'ailleurs de sens que compte tenu de cette perspective.

(2) On notera par ailleurs que le I de l'article 13 du projet de loi ne satisfait pas l'objectif de valeur constitutionnel du pluralisme des courants d'expression socioculturels, appliqué à la communication audiovisuelle par la décision n° 86-217 DC du 18 septembre 1986 mentionnée ci-dessus. En effet, cette disposition permet à une même personne de posséder la totalité du capital de cinq sociétés détentrices d'autorisations relatives à des services nationaux de télévision par voie hertzienne terrestre numérique, à condition que chaque service ne dépasse pas le seuil de 3 % d'audience. Une même personne pourrait donc contrôler un ensemble de services atteignant 15 % de l'audience nationale, ce qui représente presque celle de M6, qui est assujettie à la règle des 49 %.

Un élément important du dispositif créé à la demande du Conseil Constitutionnel afin d'assurer le pluralisme dans la communication audiovisuelle disparaîtrait ainsi sans qu'aucune mesure compensatoire soit proposée et sans qu'aucun bouleversement du paysage audiovisuel le justifie.

On ne saurait en particulier soutenir que le passage de six à une trentaine du nombre des canaux utilisables pour la diffusion hertzienne terrestre crée une telle abondance dans l'offre de services de télévision qu'il serait possible d'entamer le démantèlement du dispositif anti-concentration de la loi de 1986, dont le plafond de 49 % est un élément crucial.

B. L'APPLICATION DU SYSTÈME ANTI-CONCENTRATION AUX SERVICES REDIFFUSÉS

1. Le dispositif prévu par la loi du 1er août 2000

La loi du 1 er août 1986 a prévu (au 14° de l'article 28-1 de la loi du 30 septembre 1986) l'encadrement par les conventions des services des modalités de rediffusion, intégrale ou partielle, d'un service de télévision en plusieurs programmes.

La rediffusion décalée, avec une grille de programmes éventuellement redistribuée afin de privilégier un aspect particulier, du programme d'une chaîne hertzienne traditionnelle sera en effet l'une des principales modalités de lancement de la télévision numérique de terre. Canal Plus a d'ores et déjà fait du « multiplexage » de ses programmes un argument de vente de son bouquet satellitaire.

Or la loi du 1 er août 2000 n'a pas prévu d'autorisation spécifique pour les programmes rediffusés (article 30-1 de la loi du 30 septembre 1986), mais a simplement transposé au numérique de terre le texte de l'article 30 de la loi de 1986 disposant que « l'usage des fréquences pour la diffusion de services de télévision par voie hertzienne terrestre en mode analogique est autorisé par le Conseil supérieur de l'audiovisuel » .

Cette rédaction, combinée avec celle du troisième alinéa de l'article 41 de la loi de 1986, qui prévoit la séparation juridique des sociétés titulaires d'autorisations pour le numérique contrôlées par une même personne, aboutit, selon l'exposé des motifs du projet de loi -car l'ensemble de ce dispositif est conçu et rédigé de façon particulièrement compliquée et obscure 6 ( * ) , à soumettre à l'obligation de filialisation et par suite à la règle des 49 % les rediffusions du programme d'une chaîne de télévision.

2. La solution proposée

La solution proposée par le projet de loi aux exigences découlant de la rédaction de la loi du 1 er août 2000, comporte deux volets, figurant au II et au III de l'article 13.

Le II prévoit l'octroi d'une autorisation à chaque programme consistant en la rediffusion intégrale ou partielle d'un service.

On peut estimer inopportune l'introduction dans la loi de 1986, déjà fort complexe, et dans le régime juridique de la télévision numérique de terre, particulièrement complexe, de la notion d'autorisation délivrée à un programme à côté de la notion habituelle et bien cernée d'autorisation délivrée à un service de télévision. Puisque l'objectif est, afin de dénouer le problème évoqué ci-dessus, de prévoir expressément la délivrance d'autorisations d'utiliser des fréquences pour la rediffusion d'un service autorisé, pourquoi introduire dans la loi la notion ambiguë de programme, au lieu de mentionner directement et simplement la possibilité d'autoriser des rediffusions ?

Compte tenu de la distinction opérée au II entre les autorisations relatives à des services et les autorisations relatives à des programmes (ces programmes étant en fait des services rediffusés), le III de l'article 13 du projet de loi reformule le troisième alinéa de l'article 41 de la loi de 1986, relatif au nombre maximum de sociétés titulaires d'autorisations pour la diffusion en mode numérique, contrôlées par une même personne, afin de soustraire les « programmes » rediffusés à l'obligation de filialisation et par voie de conséquence à la règle des 49 % quand le service principal n'y est pas lui-même soumis.

On ne saurait affirmer que le texte proposé à cet effet est d'une parfaite limpidité.

II. Position de l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a précisé que l'audience prise en compte pour l'application du plafond de 49 % devait être calculée sur l'ensemble des vecteurs de diffusion du service considéré : voie hertzienne terrestre, câble et satellite.

C'est donc l'ensemble du marché qui sera pris en compte.

L'Assemblée nationale a réduit par ailleurs à 2,5 % le seuil d'audience au-delà duquel s'appliquera le plafond de 49 % de parts du capital d'un service de télévision détenues par une même personne. Il convient d'observer que pour Canal Plus, dont l'audience tend à régresser depuis quelques années et se situe en 2001 aux alentours de 3,8 % (contre 4,1 % en 2000 et 4,5 % en 1999), la fixation initiale du seuil à 3 % rendait tout à fait possible un franchissement permettant une concentration accrue du capital de la chaîne : qui peut aujourd'hui mesurer l'impact que la perte d'un grand contrat sportif pourrait avoir sur l'audience de Canal Plus ? La fixation du seuil à 2,5 % rend plus improbable l'acquisition du droit de franchir le plafond de 49 % de détention de parts du capital.

La fixation du seuil à 2,5 % apparaît donc plutôt positive du point de vue de l'efficacité du régime anti-concentration. Elle rend cependant plus probable à plus court terme la perspective du franchissement du seuil par une télévision du câble ou du satellite, dont les propriétaires devraient alors se conformer à la règle des 49 %. A titre d'exemple, on notera que RTL 9 représentait en 1999 3,8 % de l'audience dans la population accédant à l'offre élargie, c'est-à-dire à l'ensemble des chaînes distribuées par le câble et diffusées par satellite. Dans la mesure où le paysage de la télévision numérique de terre sera relativement proche de celui que l'offre élargie propose à l'heure actuelle, il est tout à fait concevable qu'une chaîne comme RTL 9 ou toute chaîne nouvelle à format plus ou moins généraliste, conçue pour un public non segmenté, franchisse à moyen terme le seuil de 2,5 %, concrétisant l'inconstitutionnalité du système proposé par le gouvernement.

L'Assemblée nationale a aussi adopté un amendement rédactionnel afin de préciser plus clairement, pour autant que cela soit possible, que le II de l'article 13 est destiné à modifier les conditions d'application de la règle qui autorise un opérateur à contrôler jusqu'à cinq chaînes hertziennes terrestres numériques.

L'Assemblée nationale a enfin réparé une erreur de référence introduite dans la loi du 30 septembre 1986 par la loi du 1 er août 2000, et une imprécision de la même loi en ce qui concerne le champ d'application du dispositif anti-concentration applicable aux services locaux de télévision terrestre numérique.

III. Position de la commission

Votre commission a poursuivi deux objectifs : d'une part proposer une modalité d'assouplissement du plafond de 49% conforme aux exigences de la jurisprudence constitutionnelle, d'autre part clarifier la rédaction des dispositions concernant la position des rediffusions à l'égard du système anti-concentration.

C. LE PLAFOND DE 49 %

• Le principe

Votre commission a estimé que l'application aux quelque 30 chaînes de formats très divers qui formeront la télévision numérique de terre du plafond de 49%, conçu pour les 5 ou 6 chaînes généralistes diffusables actuellement par voie hertzienne terrestre, était non seulement inopportune au regard des nécessités du lancement de la télévision numérique de terre, mais encore injustifié au regard des motifs de la création de ce plafond. La sauvegarde du pluralisme des courants d'expression socioculturels, unique raison d'être du dispositif anti-concentration de la loi du 30 septembre 1986, n'exige manifestement l'application du plafond de 49% qu'aux chaînes jouant un rôle à l'égard de l'objectif de pluralisme, celles dont les programmes contribuent à l'information politique et générale.

C'est d'ailleurs une faiblesse du système proposé par le gouvernement que soumettre potentiellement à la règle des 49% des chaînes thématiques tout à fait anodines du point de vue du pluralisme, comme par exemple une chaîne musicale ou une chaîne cuisine. Inversement, on ne comprends pas qu'une chaîne généraliste créée pour le numérique puisse attendre d'atteindre le seuil de 2,5 ou 3% pour être soumise à la règle des 49%. Indépendamment du problème de constitutionnalité mentionné ci-dessus, le dispositif proposé par le gouvernement ne me semble manifestement pas très bon.

Votre commission a donc retenu l'idée de limiter l'application du plafond de 49% aux services, existants ou futurs, dont les programmes contribuent à l'information politique et générale.

Le plafond resterait en conséquence appliqué aux services actuellement diffusés par voie hertzienne terrestre, dont les programmes généralistes contribuent manifestement à l'information politique et générale, y compris ceux de M6, dont la convention (art. 25) définit le format comme généraliste et exige (art. 27) une « politique de programmation de magazines et de documentaires favorisant la compréhension du monde contemporain, en abordant des domaines diversifiés tels que par exemple l'emploi, l'intégration, l'économie, la science, l'écologie, la consommation » .

Le plafond de 49% deviendrait par ailleurs en principe applicable, au moment de leur migration vers le numérique de terre, aux services existants du câble et du satellite contribuant à l'information politique et générale.

Le CSA aurait à préciser le contenu de cette notion dans le cadre du pouvoir de définir les catégories de services numériques, que lui attribue le § I de l'article 30-1. Il ne s'agit d'ailleurs pas d'une véritable novation. Les articles 10 et 11 (abrogés) de la loi du 23 octobre 1984, visant à limiter la concentration et à assurer la transparence financière et le pluralisme des entreprises de presse, faisaient des « quotidiens d'information politique et générale » une catégorie juridique spécifique, et cette notion est toujours utilisée dans le cadre du régime des aides publiques à la presse. Par ailleurs, la loi du 1 er août 2000 a introduit la notion d'émission d'information politique et générale dans l'article 13 de la loi de 1986, en confiant au CSA le soin de veiller particulièrement au respect du pluralisme dans ces émissions.

Si la proposition de votre commission est suivie, le CSA devra appliquer dans les conventions des services, prévues à l'article 28 de la loi de 1986, la définition qu'il aura élaborée. C'est principalement lors de l'élaboration des conventions liant le CSA et les services autorisés, qu'il conviendra de préciser la position de chaque service à l'égard du plafond de 49%.

A titre de première approche, il est possible de considérer qu'entreraient vraisemblablement dans la catégorie des services dont les programmes contribuent à l'information politique et générale les services généralistes et les services thématiques diffusant de façon autre qu'occasionnelle des journaux, documentaires, magazines ou débats consacrés à l'histoire, l'économie, l'information, la culture.

• L'exception

On aura noté que la position de principe évoquée ci-dessus ne résout pas le problème de LCI, dont TF1 refuse assez naturellement de partager le capital, et qui apparaît comme un des principaux services susceptibles de faciliter le lancement de la télévision numérique de terre.

Il parait alors opportun de tenir compte de cette situation en exemptant de la règle des 49% les services existants dont les programmes contribuent à l'information politique et générale, et dont le capital était détenu à plus de 49% par une même personne à la date d'entrée en vigueur de la loi du 1 er août 2000.

Cette exemption peut dans une certaine mesure être fondée sur le principe de non remise en cause des situations existantes légalement acquises intéressant une liberté publique (décision n° 84-181 DC du 10 octobre 1984). Il faut cependant tenir compte, en sens contraire, du fait que c'est à l'occasion de leur migration vers le numérique, migration facultative et ouvrant potentiellement la voie à une montée en puissance importante de leur audience, que les chaînes concernées verraient leur actionnariat remis en cause en l'absence de dérogation. Le principe du maintien des droits acquis n'est donc pas indiscutablement applicable au cas que nous examinons. En revanche, l'adoption d'une dérogation en faveur des chaînes existantes crée une inégalité entre leurs actionnaires et ceux des chaînes de même format créées pour le numérique de terre, qui seraient soumises au respect du plafond de 49%. Un risque d'inconstitutionnalité découle de cette inégalité que ne justifie pas indubitablement le principe constitutionnel du maintien des situations existantes légalement acquises intéressant une liberté publique. Il est utile de prévenir ce risque en instituant une mesure compensatrice.

• La compensation

Le nombre des autorisations que peut détenir pour la diffusion hertzienne terrestre numérique une personne bénéficiant de la dérogation mentionnée ci-dessus pourrait être réduit d'une unité afin de rétablir l'égalité avec les actionnaires des nouveaux services dont les programmes contribueront à l'information politique et générale. Cette formule aurait aussi l'avantage de maintenir le niveau global du dispositif anti-concentration en compensant la perte de portée de la règle des 49%, actuellement applicable à l'ensemble des services diffusés par voie hertzienne terrestre. En effet, en multipliant par un facteur de cinq ou six le nombre de services diffusés par voie hertzienne terrestre, la télévision numérique de terre ne va pas provoquer un bouleversement du paysage audiovisuel tel que les exigences relatives au pluralisme posées par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 86-127 DC du 18 septembre 1986 pourraient être globalement revues à la baisse.

En fin de compte, votre commission a estimé possible et opportun d'adopter les orientations suivantes :

- le plafond de 49% serait à l'avenir appliqué aux seuls services dont les programmes contribuent à l'information politique et générale ;

- il ne serait pas appliqué aux services contribuant à l'information politique et générale existant à la date d'entrée en vigueur de la loi du 1 er août 2000 et dont une même personne détient plus de 49% du capital ;

- le nombre des autorisations que peut détenir une personne bénéficiant de la dérogation précédente serait réduit d'une unité.

Votre commission a adopté un amendement de réécriture du I de l'article 13 en fonction de ces orientations.

D. L'APPLICATION DU SYSTÈME ANTI-CONCENTRATION AUX SERVICES REDIFFUSÉS

Convaincue que la façon la plus claire de mentionner dans la loi la possibilité de délivrer des autorisations pour la rediffusion de services autorisés par ailleurs est d'énoncer directement cette possibilité à l'endroit approprié, votre commission a adopté un amendement de réécriture du II de l'article 13 afin d'énumérer dans le premier alinéa de l'article 30-1 de la loi de 1986 les trois objets possibles de l'octroi d'une autorisation d'utiliser en télévision les fréquences hertziennes terrestres en mode numérique.

Votre commission a enfin adopté un amendement de réécriture du III de l'article 13 afin de clarifier la rédaction de cette disposition.

Sous réserve de l'adoption de ces trois amendements, la commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article .

Article 14

(article 45-3 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986
relative à la liberté de communication)

Obligations des distributeurs de services
à l'égard de la chaîne parlementaire

I. Position de l'Assemblée nationale

L'article 45-3 de la loi de 1986, inséré par la loi du 1 er août 2000, impose à « tout distributeur de services » l'obligation de diffuser à ses frais les programmes de la chaîne parlementaire.

L'Assemblée nationale a précisé que cette obligation ne s'appliquait qu'aux distributeurs du câble et du satellite. En effet, dans sa rédaction actuelle, l'article 45-3 est applicable aux distributeurs de services diffusés en numérique de terre, ce qui est inutile puisque la loi attribue un canal de diffusion à la chaîne parlementaire, et absurde puisque les distributeurs du numérique de terre ne seront que des opérateurs commerciaux ou techniques dépourvus de toute maîtrise de l'offre.

II. Position de la commission

Votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article.

Article 16 (nouveau)

Prorogation de la validité des diplômes
délivrés par les fédérations sportives

I. Position de l'Assemblée nationale

Cet article additionnel adopté par l'Assemblée nationale a pour objet de proroger jusqu'au 31 décembre 2002 les décisions d'inscription sur la liste d'homologation des diplômes prises avant le 10 juillet 2000.

Avant le 10 juillet 2000, date d'entrée en vigueur de la loi du 6 juillet 2000, modifiant la loi de 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives, les diplômes fédéraux permettaient à leurs titulaires, sous réserve de leur homologation, d'enseigner ou d'encadrer contre rémunération les activités physiques et sportives.

La loi du 6 juillet 2000 précitée a supprimé cette possibilité, lui préférant un mécanisme de validation des expériences acquises dont les modalités devront être définies par un décret en Conseil d'Etat attendu pour la fin de l'année.

Dans l'intervalle, plusieurs fédérations sportives, et en particulier la fédération de voile, risquent de se trouver confrontées à une pénurie de moniteurs, particulièrement pendant la période estivale.

Cet article additionnel propose, pour prévenir ce risque, de proroger jusqu'à la fin de l'année 2002 la validité des diplômes fédéraux qui ont été homologués avant l'entrée en vigueur de la nouvelle législation.

II. Position de la commission

La commission a adopté cet article sans modification .

Article 17 (nouveau)
(article L. 167-1 du code électoral)

Campagnes législatives sur les antennes
des sociétés nationales de programmes

I. Position de l'Assemblée nationale

Le I de l'article L. 167-1 du code électoral, qui régit l'utilisation des antennes des sociétés nationales de programmes pour les campagnes législatives des partis et groupements, prévoyait la diffusion simultanée des émissions par les sociétés concernées. Il s'agit de France 2, de France 3 ainsi que de la Cinquième, devenue société nationale de programmes depuis l'entrée en vigueur de la loi du 1 er août 2000.

L'Assemblée nationale a supprimé l'obligation de diffusion simultanée, qui représente une contrainte inutile pour la programmation des chaînes publiques.

II. Position de la commission

Votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article .

Article 18 (nouveau)
(article 27 du code de l'industrie cinématographique)

Formules d'accès au cinéma donnant droit
à des entrées multiples

I. Position de l'Assemblée nationale

Cet article additionnel résulte d'un amendement du gouvernement proposant une nouvelle rédaction de l'article 27 du code de l'industrie cinématographique, déjà réécrit par la loi du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques, qui n'avait pas encore été publiée lors de l'examen par l'Assemblée nationale du présent projet de loi.

La promulgation de cette loi est maintenant intervenue. Aussi votre commission prendra-t-elle pour point de départ de son examen le texte de l'article 27 du code de l'industrie cinématographique, tel qu'il résulte de l'article 97 de la loi du 15 mai 2001 précitée.

Le texte adopté par l'Assemblée nationale s'écarte sur trois points de ce dispositif, destiné à encadrer les conditions de mise en place de formules d'accès au cinéma donnant droit à des entrées multiples, c'est-à-dire des formules de « cartes illimitées ».

1) Les modalités de calcul de la rémunération des ayants droit

Dans le deuxième alinéa du 2 de l'article 27 du code précité, le projet précise que la rémunération des ayants droit de chaque oeuvre cinématographique ne sera pas calculée seulement sur la base d'un prix de référence par place (correspondant au prix réduit moyen pratiqué par chaque exploitant) mais aussi sur la base d'un « taux de location ».

Le « taux de location » est un pourcentage, négocié à l'occasion de la location d'un film par une salle, et qui procède à la répartition des recettes entre, d'une part l'exploitant, et de l'autre le distributeur, en qualité de mandataire du producteur et des autres ayants droit.

Cette précision vise à rassurer les distributeurs, qui craignent que la mise en service des formules d'accès illimité ne soit l'occasion, pour les exploitants de salles, d'exercer une pression sur le taux de location.

Un sous-amendement ayant même objet, déposé par le groupe socialiste du Sénat, lors de la discussion en nouvelle lecture du projet de loi sur les nouvelles régulations économiques, avait été adopté par le Sénat dans sa séance du 18 avril 2001, mais n'avait pu, pour des raisons de procédure, être retenu par l'Assemblée nationale.

2) La création d'une nouvelle catégorie intermédiaire d'exploitants

L'article 27 du code précité oblige les exploitants de salles d'une certaine importance à associer à la formule de cartes d'abonnement illimité qu'ils mettraient en place les petits exploitants qui le souhaiteraient.

Cette obligation est assortie de celle de garantir à ces petits exploitants « un montant minimal de la part exploitant par billet émis » qui soit au moins égal au montant de la part qu'ils devront reverser au distributeur.

Ce dispositif a pour objet, dans l'hypothèse d'une forte utilisation de la carte d'accès qui réduirait fortement le montant de la recette par place, d'obliger les grands exploitants initiateurs de la formule à garantir un revenu minimum aux petits exploitants associés, et à assumer seuls le risque économique.

Ces deux catégories d'exploitants sont définies par référence à des pourcentages de recettes, ou d'entrées, enregistrées au niveau national, ou au niveau d'une zone d'attraction :

- les grands exploitants sont définis comme ceux qui détiennent plus de 25 % des entrées ou des recettes dans une zone d'attraction (seuil ramené à 8 % dans la zone constituée par Paris et la petite couronne), ou plus de 0,5 % au niveau national ;

- tous les autres sont considérés comme petits exploitants.

Le texte du projet de loi remet en question les frontières de ces catégories en reprenant un dispositif défendu sans succès par le groupe socialiste du Sénat, au cours de la nouvelle lecture du projet de loi relatif aux nouvelles régulations économiques, le 18 avril 2001.

Une nouvelle définition des seuils lui permet de dessiner une catégorie intermédiaire d'exploitants. Ceux-ci, s'ils deviennent opérateurs de carte, ne sont pas tenus de l'ouvrir aux petits exploitants, mais ils ne peuvent pas non plus revendiquer, s'ils adhèrent à une carte, la garantie de recettes réservée aux petits exploitants.

Cette nouvelle catégorie des « exploitants intermédiaires » est obtenue par un relèvement de certains des seuils définissant les grands exploitants, et qui permet d'en retrancher certains établissements. Les grands exploitants y sont en effet définis comme ceux qui détiennent plus de 25 % des entrées dans une zone d'attraction donnée (chiffre inchangé) ou plus de 15 % (et non 8 %) des entrées dans la zone de Paris et de la petite couronne, ou qui, à l'échelon national, réalisent plus de 3 % des recettes, et non plus 0,5 %.

3) Enfin, dans le 4 de l'article 27 du code, le texte de l'Assemblée nationale précise que les engagements pris par les exploitants vis-à-vis des distributeurs le sont aussi vis-à-vis des producteurs et des ayants droit.

Cette disposition rappelle que, dans leur négociation avec les exploitants de salles, les distributeurs n'agissent pas seulement en leur nom propre, mais en qualité de mandataire des producteurs et des ayants droit.

II. Position de la commission

L'article 18 nouveau complète le texte de l'article 27 du code de l'industrie cinématographique adopté dans le cadre de la loi NRE pour y inclure des amendements présentés lors de la nouvelle lecture du Sénat, dont un seul avait été adopté et n'avait pu être inclus dans le texte adopté en lecture définitive à l'Assemblée nationale, laquelle, en application du dernier alinéa de l'article 45 de la constitution, avait dû reprendre tel quel le texte voté par elle en nouvelle lecture.

Il constitue donc, en quelque sorte, une nouvelle « nouvelle lecture » de ce dispositif, et souligne les inconvénients du recours abusif à la procédure d'urgence, et au dépôt, en cours de discussion, d'amendements du gouvernement hâtivement préparés.

Votre commission vous propose une rédaction de l'article 18 procédant à l'insertion dans l'article 27 du code précité de deux des nouvelles dispositions incluses dans le texte adopté par l'Assemblée nationale et qui précisent :

- que la rémunération des ayants droit de chaque oeuvre est calculée non seulement sur la base d'un prix de référence par place, mais aussi d'un taux de location ;

- que les engagements pris par les exploitants à l'égard des distributeurs, le sont aussi à l'égard des producteurs et des ayants droit, dont ils sont les mandataires.

En revanche, votre commission vous propose de ne pas retenir la nouvelle définition des seuils qui aboutit à la constitution d'une catégorie intermédiaire d'exploitants.

Celle-ci ne rassemblerait en effet que cinq exploitants de salles. Encore trois d'entre eux exercent-ils leur activité en province, encore peu concernée par le phénomène des formules de cartes d'accès illimité.

Il semblerait donc que ce dispositif ne soit susceptible de s'appliquer, dans l'immédiat, qu'à deux exploitants de salles. On peut donc légitimement s'interroger sur l'opportunité de remettre en question, quelques jours après son entrée en vigueur, le dispositif adopté dans la loi du 15 mai 2001 précitée, et ce, au bénéfice d'un nombre aussi limité de sociétés.

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Sous réserve de l'adoption des amendements proposés, votre commission a émis un avis favorable à l'adoption des dispositions du projet de loi faisant l'objet du présent avis.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours d'une réunion tenue le mardi 22 mai 2001 sous la présidence de M. Adrien Gouteyron, président , la commission a examiné le rapport pour avis de MM. James Bordas, Jean-Paul Hugot et Jacques Valade sur le projet de loi n° 322 (2000-2001) adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel.

La commission a tout d'abord entendu M. James Bordas, rapporteur pour avis, sur le titre IV et sur l'article 16 du projet de loi.

Elle a ensuite adopté les amendements proposés par son rapporteur pour avis.

Puis, elle a entendu M. Jacques Valade, rapporteur pour avis, sur l'article 12 du projet de loi.

Un large débat a suivi l'exposé du rapporteur pour avis.

M. Jean-Claude Carle s'est déclaré favorable à tout système permettant d'engager des expérimentations dans un système universitaire qui est trop souvent figé, ainsi qu'à une consolidation législative du statut et de l'autonomie de l'Institut d'études politiques de Paris.

Il a cependant jugé quelque peu contradictoire de refuser de valider une expérience devant entrer en vigueur à la prochaine rentrée universitaire et qui permettrait de diversifier le recrutement à Sciences Po.

Il s'est en revanche rallié à la proposition du rapporteur pour avis consistant à permettre l'extension de ce dispositif à l'ensemble des universités, après expérimentation.

M. Roger Karoutchi a estimé indispensable de valider le décret de 1985 afin d'établir de manière incontestable l'autonomie de l'IEP de Paris, mais a exprimé ses réserves quant à la suppression du paragraphe II de l'article 12, celle-ci pouvant être mal interprétée par l'opinion.

M. Ivan Renar a déclaré partager une grande partie des préoccupations exprimées par le rapporteur à l'égard d'une telle procédure dérogatoire mais a souligné le caractère généreux de la démarche engagée par l'IEP de Paris, qui s'inscrit d'ailleurs dans le problème plus général de l'égal accès de tous les élèves à l'enseignement supérieur. Il a également fait observer que le dispositif prévu par le conseil de direction était aujourd'hui expérimental, mais qu'il avait vocation à être étendu.

M. André Maman a souligné l'intérêt de l'initiative prise par l'actuel directeur de Sciences Po, un tel dispositif expérimental devant, selon lui, faire l'objet d'une évaluation ultérieure.

Il a par ailleurs rappelé que la troisième voie d'accès à l'Ecole nationale d'administration ne pouvait être considérée comme une réussite. Il a fait remarquer que de nombreux étudiants américains suivaient une année d'études à Sciences Po dans le cadre de leur parcours universitaire. Il s'est enfin inquiété de l'application du dispositif prévu pour l'IEP de Paris aux autres Instituts d'études politiques de province.

Après avoir rappelé la qualité des enseignements dispensés à Sciences Po, qui vont très au-delà de la seule formation générale, Mme Danièle Pourtaud est convenue que toutes les tentatives engagées pour diversifier le recrutement de Sciences Po n'avaient enregistré qu'un succès relatif ; un tel constat ne saurait justifier selon elle le refus de valider le dispositif proposé par le conseil de direction car les candidats potentiels à cette procédure de recrutement dérogatoire sont en effet déjà informés des nouvelles possibilités qui leur seraient offertes ; une position négative du Sénat, sur ce point, risquerait, à son sens, d'être interprétée de manière négative.

S'associant aux réserves exprimées par M. Jean-Claude Carle, elle a par ailleurs estimé qu'il ne convenait pas d'étendre trop rapidement un tel dispositif à l'ensemble des établissements d'enseignement supérieur.

Ajoutant que ce dispositif dérogatoire pouvait être démotivant pour certains élèves de classes préparatoires préparant le concours d'entrée de droit commun, et après avoir souligné le rôle de la culture générale pour la réussite à ce concours, elle a indiqué qu'elle était favorable à l'article 12 tel que celui-ci a été voté par l'Assemblée nationale.

M. Jacques Legendre a exprimé son attachement à la démocratisation de l'enseignement supérieur et a rappelé que la loi Haby, dont il avait été le rapporteur à l'Assemblée nationale, prévoyait, outre une réforme du collège, la mise en place de baccalauréats optionnels permettant une orientation plus satisfaisante à l'université.

Il s'est rangé à la position proposée par le rapporteur pour avis, celle-ci permettant de conférer des prérogatives incontestables au conseil de direction de l'IEP de Paris, notamment pour diversifier le recrutement des élèves et d'éviter que le Parlement ne soit invité chaque année à valider un nouveau dispositif.

M. Michel Dreyfus-Schmidt a estimé qu'il convenait d'abord de s'en prendre aux causes des inégalités sociales plutôt qu'à leurs conséquences. Il a indiqué qu'il était favorable à des expérimentations tendant à élargir le recrutement de sciences Po à condition que celles-ci ne portent pas atteinte au principe d'égalité. Il a par ailleurs exprimé sa préférence en ce domaine pour une formule de concours de type troisième voie, qui définirait les mêmes conditions d'accès à l'Institut, pour tous les candidats, quels que soient leur lycée ou leur académie d'origine.

Répondant à ces interventions, M. Jacques Valade, rapporteur pour avis, a notamment apporté les précisions suivantes :

- l'IEP de Paris souhaite donner une valeur législative à un décret contestable dont la validité n'a pas été contestée depuis seize ans ;

- la suppression du paragraphe II de l'article n'empêchera pas l'Institut d'expérimenter des formules nouvelles permettant de diversifier le recrutement de ses élèves, puisqu'il y sera autorisé au titre du paragraphe I ;

- à l'inverse, la validation des résolutions prises en mars dernier par le conseil de direction de l'IEP de Paris, prévue par le paragraphe II, conduirait nécessairement le Parlement à intervenir chaque année pour donner force de loi à tous les dispositifs dérogatoires ;

- une fois la loi promulguée, le conseil de direction aura toute latitude pour expérimenter de nouvelles formules d'accès à l'IEP sous le contrôle du juge administratif ;

- le maintien du paragraphe III de l'article 12 devrait permettre aux universités, ainsi d'ailleurs qu'aux IEP de province, d'expérimenter des dispositifs de type IEP de Paris, alors que cette possibilité leur était interdite, le développement de classes préparatoires auprès de ces établissements pouvant constituer une modalité de démocratisation du recrutement des élèves ;

- le dispositif issu des deux résolutions prises par le conseil de direction de l'IEP de Paris introduit incontestablement un élément discriminant en dispensant certains élèves sélectionnés de passer le concours, alors que les bacheliers méritants des lycées hors ZEP y resteront soumis.

Convenant de la logique de la position du rapporteur pour avis, M. Jean-Claude Carle a toutefois fait observer que la suppression du paragraphe II de l'article 12 conduirait nécessairement à différer d'un an la mise en oeuvre de la réforme.

M. Adrien Gouteyron, président , a indiqué que la validation du paragraphe I était essentielle pour l'IEP de Paris et que le dispositif résultant de la délibération du conseil de direction de mars dernier, adoptée en faveur des lycéens de ZEP, pourrait être repris et applicable à la prochaine rentrée universitaire, la loi devant être promulguée avant la fin de la présente session parlementaire.

Il a également estimé que le paragraphe III de l'article 12 ouvrait des perspectives intéressantes pour l'ensemble de notre système universitaire.

La commission a ensuite adopté l'amendement proposé par le rapporteur pour avis.

La commission a enfin entendu M. Jean-Paul Hugot, rapporteur pour avis , sur les dispositions du projet de loi relatives à la communication audiovisuelle et à la culture.

Le rapporteur pour avis a tout d'abord analysé les dispositions du projet de loi relatives à la communication audiovisuelle.

Un débat a suivi son exposé.

Mme Danièle Pourtaud a noté que l'exposé du rapporteur pour avis traduisait une logique politique différente de celle du gouvernement. La télévision numérique de terre, a-t-elle indiqué, ne répond pas à une demande du marché mais à une demande des citoyens. Son objectif, de nature effectivement politique, est d'offrir à la majorité de nos concitoyens, non câblés ou non abonnés au satellite, la possibilité d'accéder aisément à un grand nombre de services de télévision. Il s'agit d'une démarche d'aménagement du territoire conforme aux préoccupations traditionnelles du Sénat. Aussi Mme Danièle Pourtaud s'est-elle déclarée surprise du caractère essentiellement économique des analyses du rapporteur pour avis. Celui-ci, a-t-elle noté, souhaite que les grands groupes historiques de télévision pilotent le lancement de la télévision numérique de terre, ce qui revient à accepter l'uniformité des programmes et à retirer au CSA la mission de veiller à la satisfaction des besoins des téléspectateurs.

Le gouvernement a proposé de revenir sur la règle des 49 % car le maintien de celle-ci en l'état écarterait de l'offre numérique de terre des services existants pouvant intéresser l'ensemble des téléspectateurs. Le groupe socialiste avait d'ailleurs posé ce problème au cours du débat précédant l'adoption de la loi du 1 er août 2000.

M. Henri Weber a relevé l'existence d'un accord sur la nécessité d'adapter la règle des 49 %, et a rappelé que le groupe socialiste avait déposé un amendement dans ce sens lors de la discussion de la loi du 1 er août 2000. Il a rappelé que la diffusion hertzienne terrestre numérique effacerait progressivement la pénurie des capacités de diffusion disponibles. La lutte contre le processus de concentration suivre cette évolution.

Il a aussi rappelé l'avancée continuelle des techniques, notant que l'industrie était actuellement en mesure de mettre sur le marché, pour quelques 1.100 francs, des décodeurs permettant l'accès aux 36 chaînes de la télévision numérique de terre.

Il a noté que les candidats à l'entrée dans la télévision numérique de terre étaient nombreux et dynamiques : c'est ainsi que le groupe Lagardère envisage de diffuser cinq chaînes. Or le régime juridique choisi par le gouvernement est destiné à favoriser les nouveaux entrants et à faciliter l'effacement du système oligopolistique qui permet actuellement aux diffuseurs d'imposer leurs conditions aux producteurs de programmes.

Il s'est enfin déclaré optimiste à l'égard du lancement du numérique de terre, estimant que les différents vecteurs se spécialiseraient peu à peu. Le câble sera le vecteur des services de télécommunications et d'Internet, le satellite sera le vecteur principal des services payants et la télévision numérique de terre permettra à l'ensemble des Français d'accéder rapidement à une offre de quelques trente chaînes. A ce propos, Télédiffusion de France a annoncé qu'elle était en mesure d'assurer en un an l'accès de 50 % de la population à la télévision numérique de terre.

M. Jean-Paul Hugot, rapporteur pour avis , a indiqué qu'il y avait au sein de la commission un large accord sur l'opportunité de permettre l'accès de l'ensemble de la population à l'offre audiovisuelle élargie rendue possible par le numérique de terre, et que seule la voie retenue pour y aboutir faisait l'objet de choix divergents.

Il a estimé que l'octroi au Conseil supérieur de l'audiovisuel d'un rôle pilote pour l'élaboration de l'offre faisait peser sur la puissance publique la responsabilité de la réussite du projet. Chacun sait par exemple que la couverture de la moitié de la population sera aisément effectuée, mais que les coûts, au-delà, progresseront de façon exponentielle. Or, personne ne peut dire à l'heure actuelle qui, de l'État ou des diffuseurs, prendra en charge le coût de l'indispensable extension de la couverture.

C'est pour des raisons de cet ordre qu'il aurait été opportun d'inciter les grands opérateurs historiques à prendre en charge le lancement de la télévision numérique de terre en créant un modèle économique viable, dans le respect des objectifs d'intérêt général qui ont conduit le législateur à prendre une initiative.

Le rapporteur pour avis a également souligné les risques d'inconstitutionnalité du dispositif proposé pour adapter à la télévision numérique de terre la règle interdisant à une même personne de détenir plus de 49 % du capital ou des droits de vote d'une société titulaire d'une autorisation relative à un service national de télévision par voie hertzienne terrestre.

Mme Danièle Pourtaud , tout en notant la complexité du problème, a estimé que la solution proposée par le rapporteur bâtissait une « usine à gaz » et que sa complexité ferait obstacle à l'entrée des opérateurs dans la télévision numérique de terre. Elle a aussi exprimé un doute sur l'interprétation, proposée par le rapporteur, de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, notant que le dispositif adopté par l'Assemblée nationale avait été inspiré par le dispositif anti-concentration appliqué avec succès aux radios par la loi du 30 septembre 1986. Elle a noté par ailleurs que la jurisprudence citée par le rapporteur pour avis concernait la presse et non l'audiovisuel, et a jugé que le critère, proposé par lui, de la participation des programmes à l'information politique et générale, n'était pas approprié compte tenu de l'opportunité d'adopter un dispositif s'appliquant à l'ensemble des chaînes numériques, quelle que soit la tonalité du programme. Elle a enfin estimé que l'amendement avait été conçu pour résoudre le problème de LCI.

M. Henri Weber a noté que l'argument de l'inconstitutionnalité était souvent développé et a jugé inopportun de construire sur mesure une règle destinée à résoudre le problème de LCI.

M. Jean-Paul Hugot, rapporteur pour avis , a rappelé la difficulté de concilier la prise en compte de l'existant et le respect des principes clairement posés par le Conseil constitutionnel. Il a estimé que le texte dont il proposait l'adoption n'était en aucune manière plus compliqué que la rédaction proposée par le gouvernement. Il a enfin noté qu'il n'était pas possible de rapprocher le mécanisme proposé par le gouvernement, fondé sur le dépassement d'un seuil d'audience, et le système anti-concentration applicable aux services radiophoniques, fondé sur la prise en compte de bassins géographiques d'audience. Dans le premier cas, ce sont les choix des auditeurs qui provoquent le franchissement du plafond fixé par la loi, dans le second cas, le franchissement du plafond résulte de phénomènes de concentration industrielle. Le Conseil constitutionnel n'a nullement exclu, dans ce second cas, la création par la loi de plafonds dont le dépassement oblige le propriétaire du capital des entreprises concernées à diminuer sa participation.

A l'issue de ce débat, la commission a adopté les amendements proposés par son rapporteur pour avis à l'article 13 du projet de loi.

M. Jean-Paul Hugot, rapporteur pour avis , a ensuite analysé les dispositions de l'article 18 (nouveau) du projet de loi modifiant l'article 27 du code de l'industrie cinématographique relatif aux formules d'accès au cinéma donnant droit à des entrées multiples.

A l'issue de l'exposé du rapporteur, M. Henri Weber a déploré que celui-ci ne se soit pas déclaré favorable à la partie du dispositif, adopté par l'Assemblée nationale, qui tend à permettre la prise en compte de la situation particulière des exploitants de salles de taille intermédiaire.

Il a estimé que ceux-ci constituaient déjà, en pratique, une catégorie à part, dont il convenait de reconnaître l'existence, même si elle ne regroupe encore actuellement qu'un petit nombre d'exploitants, car la dynamique d'un secteur en pleine évolution est susceptible, à l'avenir, de lui permettre d'étoffer ses effectifs.

La commission a ensuite adopté l'amendement proposé par le rapporteur pour avis.

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Puis, la commission a donné, sous réserve de l'adoption des amendements proposés, un avis favorable à l'adoption du titre IV et des articles 12, 13, 14, 16, 17 et 18 du titre V du projet de loi.

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AMENDEMENTS PRÉSENTÉS PAR LA COMMISSION

Article 8

Amendement

Rédiger ainsi le début de la seconde phrase du premier alinéa de cet article :

L'agrément est notamment subordonné à l'existence et au respect de dispositions statutaires garantissant...

Article 8

Amendement

I. Compléter le premier alinéa de cet article par une phrase ainsi rédigée :

Les conditions de l'agrément et du retrait de l'agrément sont déterminées par décret en Conseil d'Etat.

II. Compléter le deuxième alinéa de cet article par une phrase ainsi rédigée :

Les conditions de l'octroi d'une aide financière aux associations non agréées sont déterminées par décret en Conseil d'Etat.

III. En conséquence, supprimer le troisième alinéa de cet article.

Article 11

(article L. 227-5 du Code de l'action sociale et des familles)

Amendement

Rédiger ainsi la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le V de cet article pour l'article L 227-5 du code de l'action sociale et des familles :

Les personnes organisant l'accueil des mineurs mentionné à l'article L. 227-4, ainsi que celles exploitant les locaux où cet accueil se déroule, doivent préalablement en faire la déclaration auprès du représentant de l'État dans le département, qui délivre un récépissé.

Article 11

(article L. 227-5 du Code de l'action sociale et des familles)

Amendement

Compléter le deuxième alinéa du texte proposé par le V de cet article pour l'article L. 227-5 du code de l'action sociale et des familles par une phrase ainsi rédigée :

Les assurés sont tiers entre eux.

Article 11

(article L. 227-6 du Code de l'action sociale et des familles)

Amendement

Dans l'avant dernier alinéa du texte proposé par le V de cet article pour l'article L. 227-6 du code de l'action sociale et des familles, après les mots :

à l'article

insérer les mots :

L. 3421-1 et

Article 11

(article L. 227-7 du code de l'action sociale et des familles)

Amendement

I. Après le quatrième alinéa du texte proposé par le V de cet article pour l'article L. 227-7 du code de l'action sociale et des familles, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Est puni d'un an d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende le fait de s'opposer de quelque façon que ce soit à l'exercice des fonctions dont sont chargés les agents mentionnés à l'article L. 227-8.

II. En conséquence supprimer l'avant dernier alinéa (3°) de ce même texte.

Article 11

(article L. 227-8 du code de l'action sociale et des familles)

Amendement

Dans le deuxième alinéa du texte proposé par le V de cet article pour l'article L. 227-8 du code de l'action sociale et des familles, après les mots :

Outre les officiers

insérer les mots :

et les agents

Article 11

(article L. 227-9 du code de l'action sociale et des familles)

Amendement

A la fin de la deuxième phrase du second alinéa du texte proposé par le V de cet article pour l'article L. 227-9 du code de l'action sociale et des familles, remplacer les mots :

six mois.

par les mots :

trois mois.

Article 12

Amendement

Supprimer le II de cet article.

Article 13

Amendement

Remplacer le I de cet article par trois paragraphes ainsi rédigés :

...- Le premier alinéa du I de l'article 39 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est complété in fine par les mots suivants :

dont les programmes contribuent à l'information politique et générale.

...- Le IV de l'article 39 de la même loi est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation aux dispositions du premier alinéa du I du présent article, une même personne peut détenir plus de 49 % du capital ou des droits de vote d'une société titulaire d'une autorisation relative à un service national de télévision diffusé par voie hertzienne terrestre en mode numérique dont les programmes contribuent à l'information politique et générale si ce service constitue la reprise intégrale et simultanée d'un service diffusé par satellite avant la date d'entrée en vigueur de la loi n° 2000-719 du 1 er août 2000 et édité par une société dont elle détenait, avant la même date, plus de 49 % du capital ou des droits de vote.

...- Après le troisième alinéa de l'article 41 de la même loi, est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Une même personne détenant, en application des dispositions du second alinéa du IV de l'article 39, plus de 49 % du capital et des droits de vote d'au moins une société titulaire d'une autorisation relative à un service national de télévision diffusé par voie hertzienne terrestre en mode numérique ne peut contrôler, dans les conditions prévues à l'alinéa précédent, plus de quatre sociétés titulaires d'une telle autorisation, ce nombre étant ramené à trois si elle bénéficie d'une autorisation au titre du deuxième alinéa du III de l'article 30-1.

Article 13

Amendement

Rédiger ainsi le II de cet article :

II. - Dans le premier alinéa l'article 30-1 de la même loi, après les mots : « pour la diffusion » sont insérés les mots : « , la reprise intégrale et simultanée ou la rediffusion intégrale ou partielle »

Article 13

Amendement

Rédiger ainsi le texte proposé par le III de cet article pour le troisième alinéa de l'article 41 de la même loi est ainsi rédigé :

« Une même personne peut être titulaire, directement ou indirectement, d'un nombre maximal de cinq autorisations relatives chacune à un service national de télévision diffusé ou rediffusé par voie hertzienne terrestre en mode numérique, à condition que les services bénéficiant d'une autorisation de diffusion soient édités par des sociétés distinctes. Lorsque cette personne bénéficie d'une autorisation de reprise intégrale et simultanée dans les conditions prévues au deuxième alinéa du III de l'article 30-1, ce nombre est ramené à quatre. »

Article 18 (nouveau)

Amendement

Rédiger ainsi cet article :

L'article 27 du code de l'industrie cinématographique est ainsi modifié :

1°) Dans la première phrase du deuxième alinéa du 2, après les mots : « par place » sont insérés les mots : « et d'un taux de location »

2°) La première phrase du 4 est complétée par les mots : «, des producteurs et des ayants droit »

* 1 Chiffres Sciences Po 1998

Les autres chiffres concernent l'année universitaire 1999-2000

* 2 Sont visés les agriculteurs, les retraités, les inactifs et les militaires

* 3 Le recrutement social de l'élite scolaire en France - Evolution des inégalités de 1950 à 1990 - Michel Euriat et Claude Thélot - DEP - Revue française de sociologie XXXVI, 1995.

* 4 Elles ont été adoptées par 26 voix pour, 2 contre et une abstention

* 5 Cf. J.O. Sénat - Séance du 27 juin 2000, pp. 4467 à 4469

* 6 Remarquons à titre d'exemple que le troisième alinéa du III de l'article 30-1 invite le CSA à accorder à tout éditeur de télévision hertzienne terrestre existante qui en fait la demande une autorisation pour un service édité par une autre personne morale. Cette personne doit être contrôlée par l'éditeur bénéficiaire de l'autorisation. La délivrance des autorisations par personne interposée n'en est pas moins une curieuse novation juridique.

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