3. Les comptes du FSV

a) L'évolution du solde du FSV

Le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) a été créé en 1993 pour prendre en charge les avantages de vieillesse à caractère non contributif relevant de la solidarité nationale. Il s'agissait alors de clarifier les rôles respectifs de l'assurance vieillesse et de l'Etat.

Les comptes du FSV montrent que le fonds est progressivement passé d'une situation d'excédent à une situation de déficit en raison des modifications apportées par la loi portant création de la couverture maladie universelle (juillet 1999), les lois de financement de la sécurité sociale pour 2000, 2001 et 2002, et la loi portant création de l'APA (juillet 2001) sur ses recettes et ses dépenses.

L'existence d'un fonds de roulement important a permis jusqu'à maintenant au FSV de faire supporter par sa trésorerie ce passage à une situation déficitaire. Ainsi, les pertes attendues de 127 millions d'euros en 2001 et de 622 millions d'euros en 2002 seront imputées sur le fonds de roulement du FSV, le ramenant à 551 millions d'euros à la fin de l'année 2002.

Ces pertes, outre qu'elles ne pourront durer au-delà de 2002 en raison de l'épuisement du fonds de roulement, font une victime collatérale, le Fonds de réserve des retraites, bénéficiaire de l'excédent du FSV quand il existe.

Le budget du FSV - 1 ère section

(en millions d'euros et droits constatés)

2000

2001

2002

Ressources

11.495

11.471

11.162

Charges

11.209

11.598

11.784

Solde

+ 287

-127

- 622

Transfert FRR

- 287

0

0

Fonds de roulement

+ 1.300

+ 1.173

+ 551

Il convient par ailleurs de noter que le FSV s'est vu priver de la gestion du FRR, qu'il assumait jusqu'alors, par l'article 6 de la loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001 portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel qui a créé un établissement public autonome 59 ( * ) . En revanche, il s'est vu confier par la loi n° 2001-647 du 20 juillet 2001 relative à la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et à l'allocation personnalisée d'autonomie la gestion du fonds de financement de cette allocation. Enfin, le décret portant création du FOREC a confié la gestion de ce fonds au FSV.

b) Les changements de périmètre
(1) Sur les comptes 2001

L'excédent 2000 du FSV a été affecté au FRR, conformément aux dispositions de code de la sécurité sociale sur les ressources de ce dernier, soit 287 millions d'euros. Votre rapporteur pour avis tient à rappeler que cet excédent avait été minoré par la perte de ressources, rétroactive, en 2000 pour le FSV de 823 millions d'euros de droits de consommation sur les boissons (dits droits 403) affectés au FOREC pour le financement des 35 heures. Le FRR aurait donc dû se voir transférer normalement 1,113 milliard d'euros au titre de l'excédent 2000 du FSV.

(2) Sur les comptes 2002

Les différentes mesures intervenues depuis la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 ont eu pour effet de prélever sur le Fonds de solidarité vieillesse 421 millions d'euros sous forme de transferts de ressources ou de charges nouvelles, dont 430 millions d'euros résultent du transfert au fonds de financement de l'APA de 0,1 point du produit de la CSG jusqu'alors affecté au FSV, et malgré l'apport de 457 millions d'euros de ressources supplémentaires en provenance de la CNAF.

Les changements intervenus sur le FSV
depuis la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001

(en millions d'euros)

Ressources

- 410

Perte de la taxe sur la prévoyance

- 437

Transfert de la CNAF au titres des majorations de pensions

+ 457

Perte de 0,1 % de CSG

- 430

Charges

+ 11

Coup de pouce sur les pensions

- 11

Effet sur le solde tendanciel

- 421

(a) La perte de 437 millions d'euros de produit de la taxe prévoyance

L'article 6 du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 transfère à partir du 1 er janvier 2002 au FOREC le produit de la taxe sur les contributions des employeurs au bénéfice des salariés pour le financement de prestations complémentaires de prévoyance. La perte de ressources pour le FSV s'élève à 437 millions d'euros.

(b) Une hausse de 457 millions d'euros du transfert de la CNAF

Parallèlement, l'article 25 poursuit le transfert progressif, prévu pour s'échelonner jusqu'en 2007, de la fraction de dépenses liées à la majoration de pension pour enfants du FSV vers la CNAF. La part mise à la charge de cette dernière passera ainsi de 15 % en 2001 à 30 % en 2002. Ce transfert prend la forme du versement par la CNAF au FSV d'une contribution représentative de ces dépenses. Elle était de 442 millions d'euros en 2001 et s'élèvera à 916 millions d'euros en 2002.

c) Un détournement de 1,6 milliard d'euros depuis 2000 au détriment du Fonds de réserve des retraites

Le FSV, hors mesures décidées par le gouvernement, connaît une situation d'excédent structurel qui justifiait une réflexion poussée sur son périmètre exact et sur l'affectation de cet excédent. Au lieu de cela, le gouvernement s'est comporté de manière schizophrénique en tenant un langage en parfaite contradiction avec ses actes.

Théoriquement, et de manière d'ailleurs parfaitement logique avec l'objet même du fonds, les excédents du FSV ont pour objectif de constituer une des ressources du Fonds de réserve des retraites.

En pratique, l'analyse des tours de passe-passe réalisés depuis la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 montre que le FSV a été régulièrement ponctionné pour financer les 35 heures (pertes de ressources), les déficits du BAPSA, la mise en place de l'APA, et la dette de l'Etat envers l'AGIRC et l'ARRCO. Quant aux compensations mises en place par le gouvernement, elles cachent mal un mécanisme de transfert de ponctions sur les excédents de la branche famille vers la branche vieillesse.

Ainsi, alors que le FSV doit financer le FRR, le gouvernement a détourné près de 1,6 milliard d'euros (sans prendre en compte les affectations de C3S au BAPSA 60 ( * ) ). Non seulement la sécurité sociale a payé pour les 35 heures, mais en plus le FSV y a grandement contribué.

Les modifications cumulées du périmètre des ressources et charges du FSV

(en millions d'euros)

2000

2001

2002

Total

Ressources

- 200

- 630

- 429

- 1.259

Transfert taxe boissons au FOREC (*)

- 823

- 937

- 2.643

C3S

+ 623

+ 551

+ 679

+ 1.853

Transferts CSG

à la CNAMTS (0,15 point)

-

- 1.070

- 1.113

- 2.183

Au fonds APA (0,10 point)

-

-

- 430

- 430

Transfert prélèvement de 2 % sur les revenus du patrimoine

-

+ 384

+ 402

+ 786

Transferts CNAF

-

+ 442

+ 916

+ 1.358

Charges

-

+ 483

+ 522

+ 1.005

Remboursements AGIRC/ARRCO

-

+ 442

+ 448

+ 890

CATS

-

+ 30

+ 63

+ 93

Allocation de fin de formation (AFF)

-

+ 11

+ 11

+ 22

Total

- 200

- 1.113

- 951

- 2.264

(*) Calculés sur une base de l'affectation début 1999 de 0,55 % des droits 403 au FSV.

Votre rapporteur pour avis ne peut que constater que la politique du gouvernement revient à placer le FSV dans une situation financière difficile dès 2003, à utiliser l'ensemble de sa trésorerie pour financer des dépenses récurrentes, et à priver le FRR des ressources qui auraient légitimement dû lui revenir. Plutôt que d'affecter le fonds de roulement du FSV au FRR dès 2000, le gouvernement a préféré l'utiliser pour financer la CMU, les 35 heures, l'APA, les dettes de l'Etat. Les retraites attendront 61 ( * ) .

* 59 Voir infra .

* 60 Voir infra .

* 61 Cette analyse est partagé par le rapporteur pour avis de la commission des finances de l'Assemblée nationale, notre collègue député Jérôme Cahuzac, qui note ainsi dans son avis sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 (n° 3319, XI ème législature), page 112 : « on constate donc une dégradation du solde du FSV pour la deuxième année consécutive, résultant d'une diminution des recettes conjuguée à une augmentation des dépenses. Cette évolution est inquiétante pour deux raisons : d'une part le fonds de roulement du fonds ne pourra pas financer le déficit indéfiniment ; d'autre part, pour chaque déficit du FSV, c'est autant de transferts en moins vers le Fonds de réserve des retraites, dont l'abondement est une priorité gouvernementale. Votre rapporteur déplore cette situation ».

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