Avis n° 175 (2001-2002) de M. Pierre FAUCHON , fait au nom de la commission des lois, déposé le 16 janvier 2002

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N° 175

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2001-2002

Annexe au procès-verbal de la séance du 16 janvier 2002

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'Administration générale (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE APRÈS DÉCLARATION D'URGENCE , relatif aux droits des malades et à la qualité du système de santé,

Par M. Pierre FAUCHON,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. René Garrec, président ; M. Patrice Gélard, Mme Dinah Derycke, MM. Pierre Fauchon, José Balarello, Robert Bret, Georges Othily, vice-présidents ; MM. Jean-Pierre Schosteck, Laurent Béteille, Jacques Mahéas, Jean-Jacques Hyest, secrétaires ; M. Jean-Paul Amoudry, Mme Michèle André, M. Robert Badinter, Mme Nicole Borvo, MM. Charles Ceccaldi-Raynaud, Christian Cointat, Raymond Courrière, Jean-Patrick Courtois, Marcel Debarge, Michel Dreyfus-Schmidt, Gaston Flosse, Jean-Claude Frécon, Jean-Claude Gaudin, Charles Gautier, Paul Girod, Daniel Hoeffel, Pierre Jarlier, Roger Karoutchi, Lucien Lanier, Jacques Larché, Gérard Longuet, Mme Josiane Mathon, MM. Jacques Peyrat, Jean-Claude Peyronnet, Henri de Richemont, Josselin de Rohan, Bernard Saugey, Jean-Pierre Sueur, Simon Sutour, Alex Türk, Maurice Ulrich, Jean-Paul Virapoullé, François Zocchetto.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 3258 , 3263 et T.A. 705

Sénat : 4 et 174 (2001-2002),

Santé publique.

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS

Réunie le mercredi 16 janvier 2002, sous la présidence de M. René Garrec, président, la commission des lois a examiné, sur le rapport pour avis de M. Pierre Fauchon, le projet de loi relatif aux droits des malades et à la qualité du système de santé .

Le rapporteur pour avis a souligné que les dispositions du projet de loi relatives à la réparation des conséquences des risques sanitaires et notamment à la responsabilité médicale méritaient un examen par la commission des lois. Il a ajouté que la volonté du Gouvernement d'insérer dans le projet de loi la proposition de loi relative à la solidarité nationale et à l'indemnisation des handicaps congénitaux, renvoyée à la commission des lois, justifiait davantage encore l'intervention de celle-ci.

Le rapporteur pour avis a indiqué que le projet de loi tendait à préciser les règles de la responsabilité médicale et surtout à permettre l'indemnisation de l'aléa thérapeutique en cas de dommage grave . Il a observé que cette évolution était attendue depuis longtemps et que le Sénat avait pris des initiatives en ce sens en examinant en avril 2001 une proposition de loi de M. Claude Huriet. Il a précisé que le texte tendait à créer une procédure amiable d'indemnisation des accidents médicaux et à imposer à l'ensemble des professionnels de santé une obligation d'assurance. Il a ajouté que le projet prévoyait également une réforme bienvenue de l'expertise médicale.

La commission a adopté des amendements tendant notamment à :

- permettre à toute victime d'une faute médicale de bénéficier de la procédure amiable quelle que soit la gravité de son préjudice ;

- prévoir que les contrats d'assurance souscrits par les professionnels de santé peuvent comporter des limitations quant aux montants et à la durée de la garantie ;

- renforcer les dispositions relatives à l'amélioration de l'expertise médicale.

La commission a par ailleurs décidé de compléter le projet de loi pour prévoir la possibilité de prononcer une suspension de peine à l'égard de personnes détenues en fin de vie . Rappelant que cette disposition avait déjà été adoptée par le Sénat lors de l'examen d'une proposition de loi de MM. Jean-Jacques Hyest et Guy-Pierre Cabanel, le rapporteur a constaté que le projet de loi sur l'administration pénitentiaire ne serait pas examiné par le Parlement avant la fin de la législature. Il a estimé qu'il était urgent de prendre une mesure d'humanité à l'égard de détenus atteints d'une maladie mettant en jeu le pronostic vital ou incompatible avec le maintien en détention.

A propos de la « jurisprudence Perruche », la commission a adopté un amendement destiné à intégrer la proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale dans le projet de loi.

Elle a souhaité concilier le devoir de solidarité de la collectivité nationale à l'égard des handicapés, la prise en compte des spécificités des spécialités médicales concernées par la grossesse, enfin le respect des principes fondamentaux du droit.

Elle a décidé d'approuver les principes dégagés par l'Assemblée nationale tout en complétant le texte, en particulier pour répondre aux préoccupations de la Cour de cassation qui s'est inquiétée qu'une indemnité versée aux parents d'une personne handicapée soit soumise aux aléas de la vie de ceux-ci.

La commission a prévu que l'indemnité versée aux parents en cas de faute lourde d'un professionnel de santé n'ayant pas permis de déceler un handicap grave prendrait la forme d'une rente. Elle a également décidé que l'indemnité devrait être utilisée dans l'intérêt de l'enfant, qu'elle serait incessible et insaisissable et qu'en cas de prédécès des parents, elle ne serait transmise qu'à la personne handicapée. Elle a enfin souhaité que l'indemnité soit exonérée de droits de mutation.

« La sagesse pratique consiste à inventer les conduites qui satisferont le plus à l'exception que demande la sollicitude en trahissant le moins possible la règle. »

Paul Ricoeur

Soi-même comme un autre

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Le Sénat est appelé à examiner le projet de loi relatif aux droits des malades et à l'amélioration de la qualité du système de santé. Ce projet de loi est renvoyé pour son examen au fond à votre commission des affaires sociales.

Dès le dépôt du projet de loi sur le Bureau du Sénat, votre commission des lois a souhaité se saisir pour avis de certaines dispositions de ce texte. Le projet de loi prévoit en effet la création de « pôles de santé » judiciaires pour le traitement des affaires pénales relatives à la santé publique. Surtout, il contient des dispositions extrêmement importantes en matière de responsabilité médicale, qui relèvent également de la compétence de votre commission.

Depuis le dépôt de ce projet de loi, les conditions de sa future discussion ont été modifiées, le Gouvernement ayant fait part de sa volonté d'intégrer dans ce texte la proposition de loi relative à la solidarité nationale et à l'indemnisation des handicaps congénitaux adoptée il y a quelques jours par l'Assemblée nationale et dont votre commission des lois est saisie au fond. Le contenu de cette proposition de loi concerne en effet directement la responsabilité médicale.

Dans ces conditions, l'avis de votre commission des lois portera tant sur l'indemnisation de l'aléa thérapeutique, innovation majeure du projet de loi que sur la proposition de loi destinée à répondre à ce qu'il est convenu d'appeler la « jurisprudence Perruche ».

I. INDEMNISER L'ALÉA MÉDICAL : UN PROGRÈS LONGTEMPS ATTENDU

Les règles relatives à la responsabilité médicale se sont progressivement construites en l'absence de tout support législatif spécifique, à l'exception des règles générales de la responsabilité posées par le code civil. La jurisprudence des deux ordres de juridiction a progressivement évolué dans un sens de plus en plus favorable aux victimes d'accidents médicaux. Dans certaines situations particulières, le législateur est intervenu afin de définir lui-même les conditions d'indemnisation de certaines victimes.

Il reste néanmoins des situations dans lesquelles des accidents médicaux, parfois très graves, ne donnent lieu à aucune indemnisation . De plus, les deux ordres de juridiction appliquent des principes différents, à des rythmes différents et n'aboutissent pas à des solutions parfaitement identiques.

Une intervention du législateur était donc souhaitable et demandée depuis longtemps.

A. UNE JURISPRUDENCE SUR LA RESPONSABILITÉ MÉDICALE DE PLUS EN PLUS FAVORABLE AUX VICTIMES

Sur des fondements et avec des raisonnements différents, les juridictions judiciaires et les juridictions administratives ont élaboré, en matière de responsabilité médicale, une jurisprudence de plus en plus favorable aux victimes.

1. La responsabilité médicale devant les juridictions judiciaires

Par un arrêt Mercier du 20 mai 1936, la Cour de cassation a fondé la responsabilité du médecin sur une base contractuelle , qui lui a permis de définir le contenu des obligations nées du contrat médical dont la transgression peut constituer une faute.

Aux termes de cet arrêt fondamental, « il se forme entre le médecin et son client un véritable contrat comportant, pour le praticien, l'engagement sinon, bien évidemment, de guérir le malade, ce qui n'a d'ailleurs jamais été allégué, du moins de lui donner des soins, non pas quelconques, ainsi que paraît l'énoncer le moyen du pourvoi, mais consciencieux, attentifs et, réserve faite de circonstances exceptionnelles, conformes aux données acquises de la science ».

Pour l'essentiel, les obligations nées du contrat médical sont des obligations de moyens et non de résultat . Ainsi, le praticien n'a pas à rapporter la preuve d'un fait susceptible de l'exonérer de sa responsabilité, la charge de la preuve incombant au patient.

La jurisprudence a peu à peu précisé le contenu des obligations qui résultent du contrat médical.

Ainsi, le médecin a une obligation d'information du patient, tant en ce qui concerne l'affection dont il est atteint que les soins préconisés et les risques inhérents à ces soins.

Un médecin a également l'obligation de donner des soins personnels aux patients . Ainsi, la Cour de cassation a jugé qu'un médecin est responsable de l'oubli d'un champ opératoire dans l'abdomen du patient, même s'il avait confié à un membre de son équipe le soin de faire le compte des champs utilisés 1 ( * ) .

Naturellement, les médecins ont l'obligation de donner des soins suivant une technique consciencieuse et attentive .

En ce qui concerne l'obligation de donner des soins conformes aux données acquises de la science , la jurisprudence a progressivement précisé que ces données acquises peuvent résulter de traités médicaux, d'articles de spécialistes, des travaux des congrès médicaux ou d'entretiens médicaux. Dans un arrêt de 1974, la Cour de cassation a considéré qu'une erreur de diagnostic était excusable si elle était « normalement possible et justifiable en l'état de la science et de la pratique médicale à l'époque des faits » 2 ( * ) .

Au cours des dernières années, la référence à l'obligation de moyens du praticien a subi des atténuations, voire des dérogations . Ainsi, en matière d'information du patient, la Cour de cassation a décidé qu'il appartenait au praticien de rapporter la preuve qu'il avait bien informé le patient des risques encourus. Le présent projet de loi tend d'ailleurs à transcrire cette obligation dans la loi puisqu'il prévoit qu' « en cas de litige, il appartient au professionnel ou à l'établissement de santé d'apporter la preuve que l'information a été délivrée à l'intéressé (...) ».

Surtout, dans certaines hypothèses, la Cour de cassation a estimé que les médecins ou établissements de santé avaient, non une obligation de moyens, mais une obligation de sécurité de résultat . Cette obligation rend le médecin responsable, qu'une faute soit établie ou non, sauf à rapporter la preuve d'une cause étrangère.

- Cette évolution a tout d'abord concerné les « dispositifs » médicaux utilisés par certains praticiens. En 1985, la Cour de cassation a jugé que « si le chirurgien dentiste n'est tenu que d'une obligation de moyens quant aux soins qu'il prodigue à son patient, il est tenu, en tant que fournisseur de la prothèse, d'une obligation de résultat qui l'oblige à délivrer un appareil sans défaut ».

Ce régime de responsabilité s'applique également aux centres de transfusion sanguine.

De manière plus générale, la Cour de cassation a jugé en 1999 que « le contrat formé entre le patient et son médecin met à la charge de ce dernier, sans préjudice de son recours en garantie, une obligation de sécurité de résultat en ce qui concerne les matériels qu'il utilise pour l'exécution d'un acte médical d'investigation ou de soins » 3 ( * ) .

En pratique, ces décisions paraissent en pleine adéquation avec la directive communautaire relative à la responsabilité du fait des produits défectueux, transposée en droit français par la loi du 19 mai 1998.

- La jurisprudence met désormais également à la charge des établissements de santé une obligation de sécurité de résultat en matière d' infections nosocomiales , qui, très schématiquement, sont celles contractées dans un établissement de santé. Par trois arrêts du 29 juin 1999, dits « staphylocoques dorés », la Cour de cassation a jugé que les établissements de santé privés et les médecins étaient tenus d'une obligation de sécurité de résultat en matière d'infection nosocomiale dont ils ne pouvaient se libérer qu'en rapportant la preuve d'une cause étrangère .

2. La jurisprudence administrative

Comme la jurisprudence judiciaire, la jurisprudence administrative en matière médicale a progressivement évolué dans un sens de plus en plus favorable aux victimes.

Le juge administratif, qui, rappelons-le, n'applique pas le code civil, a longtemps distingué les actes d'organisation ou de fonctionnement du service ainsi que les actes de soins courants, qui peuvent engager la responsabilité du service hospitalier sur le fondement de la faute simple, et les actes médicaux, pour lesquels seule une faute lourde permettait d'engager la responsabilité du service public hospitalier.

En ce qui concerne la responsabilité pour faute de service, le juge administratif a admis dès 1958 que, pour l'activité hospitalière, la responsabilité de l'administration était engagée sur la base d'une faute présumée . Seule la preuve de l'imputabilité du dommage, destinée à établir le lien entre le dommage subi et le service public hospitalier est à la charge de plaignant.

Relèvent de ce régime de responsabilité les fautes commises dans l'organisation et le fonctionnement du service public hospitalier, les fautes liées à des soins délivrés par du personnel soignant, les fautes résultant d'un défaut d'information du patient.

En ce qui concerne les actes médicaux, le Conseil d'Etat a, pendant longtemps, subordonné l'engagement de la responsabilité de l'hôpital à la commission d'une faute lourde. Mais cette exigence a été abandonnée par un arrêt du 10 avril 1992 4 ( * ) . Cet arrêt a placé les victimes d'un accident médical à l'hôpital dans une situation équivalente à celle des patients du secteur de la médecine libérale, en exigeant une faute simple pour engager la responsabilité de l'hôpital.

3. L'indemnisation de l'aléa médical : les solutions divergentes des deux ordres de juridiction

L'aléa médical a pu être défini par M. Pierre Sargos, président de chambre à la Cour de cassation et spécialiste de la responsabilité médicale, comme « la réalisation, en dehors de toute faute du praticien, d'un risque accidentel inhérent à l'acte médical et qui ne pouvait être maîtrisé ».

Dans un arrêt Bianchi du 9 avril 1993, le Conseil d'Etat a admis, sous certaines conditions, l'indemnisation de l'aléa médical :

« Lorsqu'un acte médical nécessaire au diagnostic ou au traitement du malade présente un risque dont l'existence est connue mais dont la réalisation est exceptionnelle et dont aucune raison ne permet de penser que le patient y soit particulièrement exposé, la responsabilité du service hospitalier est engagée si l'exécution de cet acte est la cause directe de dommages sans rapport avec l'état initial du patient comme avec l'évolution prévisible de cet état, et présentant un caractère d'extrême gravité ».

Les conditions posées à l'indemnisation dans de tels cas sont strictes :

- l'acte réalisé doit être nécessaire au diagnostic ou au traitement ;

- l'existence du risque doit être connue , mais sa réalisation exceptionnelle ;

- le patient ne doit pas être particulièrement exposé au risque ;

- le dommage doit être d'extrême gravité et sans rapport avec l'état initial du patient.

Compte tenu de ces conditions, cette jurisprudence n'a jusqu'à présent reçu qu'un nombre d'applications limitées.

La Cour de cassation s'est pour sa part refusée, à plusieurs reprises, et récemment encore, dans un arrêt du 8 novembre 2000, à indemniser l'aléa thérapeutique en considérant que « la réparation des conséquences de l'aléa thérapeutique n'entre pas dans le champ des obligations dont un médecin est contractuellement tenu à l'égard de son patient ».

Dans son rapport sur cette affaire, M. Pierre Sargos, alors conseiller à la Cour de cassation avait notamment avancé les arguments suivants :

« (...) L'aléa thérapeutique est en réalité le constat de l'impuissance de l'intervention médicale face à un risque non maîtrisable en l'état des données acquises de la science à la date des soins. Il s'agit même, d'une certaine façon, de la survenance d'un cas fortuit qui est normalement exonératoire de la responsabilité.

« (...) Enfin, l'équilibre économique des membres des professions médicales qui font objectivement courir des risques majeurs aux patients serait tellement compromis qu'on pourrait craindre des difficultés d'assurance et une réticence des praticiens à s'engager dans des spécialités à risque .

« N'est-on pas avec la question de l'aléa thérapeutique dans un domaine qu'il n'incombe qu'au législateur de régler ? ».

En l'absence, jusqu'à présent, d'intervention du législateur, des accidents médicaux parfois extrêmement graves ne donnent aujourd'hui lieu à aucune indemnisation, cependant que les solutions différentes retenues par les deux ordres de juridiction créent une inégalité entre victimes.

4. L'intervention nécessaire du législateur

Au cours des deux dernières décennies, de nombreux travaux ont préconisé une intervention du législateur en matière de responsabilité médicale.

Ainsi, un rapport du ministère de la justice de 1991 proposait déjà de compléter les règles relatives à la responsabilité médicale pour permettre l'indemnisation d'un préjudice anormalement grave, subi par une victime se trouvant dans l'impossibilité d'en démontrer l'origine fautive.

De nombreuses propositions de loi ont été déposées sur cette question au cours des dernières années.

En 1999, à la demande du Gouvernement, l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) et l'Inspection générale des services judiciaires (IGSJ) ont présenté un rapport sur la responsabilité et l'indemnisation de l'aléa thérapeutique . Les auteurs ont proposé de permettre une indemnisation au titre de la solidarité nationale des accidents médicaux non fautifs les plus graves. Ils ont également proposé la création d'une procédure d'indemnisation extra-judiciaire destinée à faciliter une indemnisation rapide des victimes. Les dispositions du présent projet de loi s'inspirent largement des propositions de ce rapport.

Si le législateur n'est pas, jusqu'à présent, intervenu sur les règles générales de la responsabilité en matière médicale, il a néanmoins institué différents dispositifs destinés à faciliter la réparation des dommages résultant de certains types d'accidents médicaux : il a ainsi établi des mécanismes applicables aux dommages résultant d'une vaccination obligatoire, aux dommages subis par les victimes de la maladie de Creutzfeld-Jakob contaminées par l'hormone de croissance, aux dommages subis par les hémophiles et transfusés contaminés par le virus de l'immuno-déficience humaine (VIH).

Mais au cours des dernières années, une demande de plus en plus forte en faveur d'une intervention plus globale du législateur s'est exprimée. De nombreux reproches sont en effet adressés au système actuel :

- les règles de la responsabilité médicale sont devenues extrêmement complexes ; elles ne sont pas les mêmes suivant qu'un accident survient à l'hôpital ou dans une clinique privée ;

- certains accidents médicaux très graves ne donnent lieu à aucune indemnisation dès lors qu'une responsabilité ne peut être identifiée par les juridictions ;

- les victimes dénoncent également la longueur et le coût des procédures judiciaires ; les procédures de référé et de référé-provision offrent pourtant des possibilités d'indemnisation rapide, mais il est vrai que, lorsqu'une procédure au fond est engagée, elle peut s'étendre sur plusieurs années et occasionner des frais lourds.

Face à cette demande d'évolution des règles actuelles, le Sénat a joué tout son rôle d'initiative et de proposition. En avril 2001, il a en effet adopté, à l'initiative de notre ancien collègue M. Claude Huriet, une proposition de loi posant le principe d'une indemnisation de l'aléa médical au titre de la solidarité nationale.

Si cette proposition de loi n'a pas été inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale, certaines de ses dispositions ont incontestablement inspiré le dispositif proposé par le Gouvernement dans le présent projet de loi.

B. LES DISPOSITIONS DU PROJET DE LOI : PERMETTRE L'INDEMNISATION DES ACCIDENTS NON FAUTIFS GRAVES

Le titre III du projet de loi, dont votre commission s'est saisie pour avis au titre de sa compétence en matière de responsabilité civile, consacre le principe d'une indemnisation des accidents médicaux non fautifs les plus graves et tend à créer une procédure d'indemnisation entièrement nouvelle destinée à permettre aux victimes de recevoir rapidement une indemnisation.

1. Une définition législative des règles de la responsabilité en matière d'accidents médicaux

Le projet de loi, dans son article 58 (article L. 1142-1 du code de la santé publique), établit tout d'abord les règles de responsabilité applicables en matière d'accidents médicaux. Une telle définition législative aurait le mérite d'unifier les jurisprudences des juridictions judiciaires et administratives . Dans sa rédaction initiale, le projet de loi prévoyait que :

- la responsabilité des professionnels de santé pour des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins n'est engagée qu'en cas de faute ; naturellement, le mode d'établissement de la faute continuerait à relever, comme actuellement, des juridictions ;

- en l'absence de faute, les accidents médicaux, affections iatrogènes et infections nosocomiales 5 ( * ) donnent lieu, lorsqu'elles présentent un certain caractère de gravité, à une réparation au titre de la solidarité nationale.

L'Assemblée nationale, animée par un souci de ne pas déresponsabiliser les professionnels de santé par une définition trop restrictive des situations permettant d'engager leur responsabilité a complété ces dispositions pour prévoir que la responsabilité de ces professionnels était engagée en cas de faute « ou de manquement quels que soient, selon l'appréciation du juge compétent, la nature ou le mode d'établissement de cette faute ou de ce manquement, prouvé ou présumé ».

Cette rédaction avait pour objectif de consacrer les acquis jurisprudentiels permettant, dans certaines situations, d'engager la responsabilité des médecins en l'absence de faute médicale prouvée.

2. Une procédure d'indemnisation entièrement nouvelle

Le projet de loi prévoit la mise en place d'une procédure d'indemnisation entièrement nouvelle, destinée à éviter aux victimes d'accidents médicaux les contraintes imposées par la procédure judiciaire.

Les principales étapes de la procédure proposée sont les suivantes :

- toute victime d'un accident médical, d'une affection iatrogène ou d'une infection nosocomiale peut saisir une commission régionale de conciliation et d'indemnisation, présidée par un magistrat et composée notamment de représentants des malades et de professionnels de santé ;

- la commission n'accueille que les dommages présentant un caractère de gravité, fixé par décret en Conseil d'Etat, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles ; rien n'est dit sur la manière dont est apprécié ce caractère de gravité, une expertise n'étant prévue que si cette première étape est franchie ;

- lorsque la commission régionale accueille une demande, elle émet un avis sur les circonstances, les causes, la nature et l'étendue des dommages, ainsi que sur le régime d'indemnisation applicable ;

- avant d'émettre son avis, la commission peut diligenter une expertise ;

- lorsque la commission conclut à l'existence d'une faute et que le dommage est grave, l'assureur du professionnel de santé considéré comme responsable doit faire une offre d'indemnisation à la victime. L'acceptation de l'offre vaut transaction. Si la victime n'accepte pas l'offre, elle peut former un recours devant la juridiction compétente. Si l'assureur refuse de faire une offre, l'Office national d'indemnisation se substitue à lui pour faire une offre à la victime et peut ensuite se retourner contre l'assureur. Les assureurs faisant des offres manifestement insuffisantes ou refusant à tort de faire des offres peuvent être condamnés à des pénalités civiles par le juge ;

- lorsque la commission conclut à l'existence d'une faute et que le dommage n'atteint pas le seuil de gravité prévu par le texte, la victime se voit renvoyée devant les juridictions de droit commun ;

- lorsque la commission conclut, en l'absence de faute, à l'existence d'un dommage grave lié à un acte de prévention, de diagnostic ou de soins, l'office national d'indemnisation fait une offre de réparation à la victime. Il peut par la suite exercer une action récursoire s'il estime qu'une faute a été commise.

Le déroulement de la procédure est enfermé dans des délais très stricts . L'avis de la commission doit être rendu dans les six mois suivant la demande. L'offre d'indemnisation doit intervenir dans les quatre mois suivant la réception de l'avis. Enfin, le versement des indemnités doit intervenir dans le mois suivant l'acceptation de l'offre.

A tout moment, la victime peut renoncer à cette procédure pour saisir le juge.

3. Une obligation d'assurance pour les professionnels de santé

Le dispositif proposé dans le projet de loi s'accompagne d'une obligation, pour les professionnels et établissements de santé, de souscrire une assurance destinée à les garantir pour leur responsabilité civile ou administrative susceptible d'être engagée en raison de dommages subis par des tiers et résultant d'atteintes à la personne, survenant dans le cadre de leur activité de prévention, de diagnostic ou de soins.

Corrélativement, les entreprises d'assurance proposant de couvrir ces risques de responsabilité civile pourront se voir imposer d'assurer certains professionnels. En effet, le projet de loi prévoit que lorsqu'un professionnel de santé se voit opposer deux refus d'assurance, il peut saisir un bureau central de tarification qui fixe le montant de la prime moyennant laquelle l'entreprise d'assurance est tenue de garantir le risque qui lui a été proposé.

4. Une réforme de l'expertise médicale

L'une des novations importantes du projet de loi est la mise en place d'une réforme de l'expertise médicale.

Le projet de loi tend à créer en effet une commission nationale des accidents médicaux (article 58 du projet - article L. 1142-10 du code de la santé publique), dont la responsabilité principale serait d'inscrire des experts médicaux sur une liste nationale d'experts en accidents médicaux. Seuls les experts figurant sur une des listes d'experts établies par la Cour de cassation ou les cours d'appel pourraient prétendre être inscrits sur cette liste. Ils devraient au préalable subir une évaluation des connaissances et des pratiques professionnelles.

Toutefois, pendant une période de trois ans, la commission nationale pourrait inscrire sur la liste nationale, en raison de leur qualification particulière, des experts ne figurant pas sur une liste établie par la Cour de cassation ou une cour d'appel (article 63).

C. LES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION DES LOIS : AMÉLIORER LE DISPOSITIF PROPOSÉ

1. Approuver les principes posés

Votre commission approuve pleinement le principe d'une indemnisation des victimes d'accidents médicaux au titre de la solidarité nationale lorsque la responsabilité d'un professionnel ou d'un établissement de santé n'est pas établie.

Sans doute aurait-il été souhaitable de pouvoir prendre en charge l'ensemble des accidents médicaux non fautifs et non seulement les plus graves d'entre eux, mais le projet de loi permettra incontestablement un progrès substantiel par rapport à la situation actuelle. Rien n'interdira à l'avenir de faire évoluer le seuil de gravité permettant aux victimes d'obtenir réparation.

Dans cette attente, votre rapporteur estime souhaitable que le législateur ne laisse pas au pouvoir réglementaire le pouvoir de décider seul du seuil de gravité à partir duquel une indemnisation au titre de la solidarité nationale sera possible . Il considère cependant qu'il revient à la commission des affaires sociales, saisie au fond du projet de loi , d'agir en ce sens.

Votre commission approuve également la réforme de l'expertise médicale proposée dans le projet de loi. Elle estime que cette réforme devrait être suivie à bref délai d'une réforme plus large qui concernerait toutes les expertises judiciaires. Les expertises jouent un rôle considérable dans les procédures judiciaires et il paraît essentiel d'être particulièrement rigoureux dans le choix des personnes susceptibles de procéder à ces missions.

2. Souligner les risques de la nouvelle procédure d'indemnisation

Si votre commission est pleinement favorable à l'indemnisation des accidents médicaux non fautifs graves, elle est plus réservée à l'égard de la procédure d'indemnisation retenue.

Il est en effet possible de s'interroger sur les modalités de constitution des commissions régionales qui seront appelées à statuer sur le régime d'indemnisation applicable. Ces commissions seront conduites à porter des appréciations sur des questions extrêmement délicates, en particulier sur le caractère fautif ou non fautif de certains actes . De telles appréciations ne devraient-elles pas continuer à relever de juridictions, dont il est légitime de penser que leurs conditions de fonctionnement offrent davantage de garanties que celles des futures commissions régionales ?

En ce qui concerne les délais de traitement des dossiers, il n'est pas certain que la nouvelle procédure constituera un progrès substantiel par rapport au système actuel. Les référés, qui permettent d'obtenir immédiatement une expertise, et les référés-provision, qui permettent d'obtenir une avance sur l'indemnité, sont en effet des procédures efficaces et rapides. En réalité, la longueur des procédures est liée à la longueur des expertises et le nouveau système ne supprime pas ces expertises.

D'une manière générale, votre commission estime qu'en présence de manques ou d'insuffisances dans le fonctionnement de la justice, il est préférable d'améliorer ce fonctionnement plutôt que de retirer à la justice certaines de ses prérogatives.

A titre personnel, votre rapporteur ne peut que s'étonner du choix consistant à mettre fin aux divergences de jurisprudence des juridictions judiciaires et administratives en créant une troisième voie procédurale...Comme M. Jean-François Mattéi, il regrette qu'une unification du contentieux de la responsabilité médicale au profit des juridictions judiciaires ne soit pas envisagée.

Néanmoins, votre commission n'a pas souhaité remettre en cause l'esprit du système proposé dès lors qu'il peut offrir à la victime certains avantages que le système judiciaire, malgré l'existence de la procédure de référé-provision, ne peut procurer en l'état. Ainsi, dès lors que l'avis de la commission reconnaîtra le droit à indemnisation de la victime, celle-ci pourra obtenir réparation même si, en cas de faute, un assureur refuse de faire une offre grâce à la substitution de l'office national d'indemnisation .

Votre commission souhaite en tout état de cause que la mise en place des commissions régionales soit préparée avec la plus grande attention ; les premiers mois de fonctionnement de la nouvelle procédure seront en effet déterminants pour la crédibilité du dispositif. .

3. Proposer des améliorations

Afin d'améliorer le fonctionnement du système proposé, votre commission a adopté plusieurs amendements tendant notamment à :

- définir plus clairement le seuil de gravité à partir duquel une indemnisation sera possible au titre de la solidarité nationale tout en laissant à la commission des affaires sociales, saisie au fond, le soin d'encadrer les conditions dans lesquelles le Gouvernement définira le taux d'incapacité à partir duquel l'indemnisation interviendra;

- prévoir, dans un souci de responsabilisation et de clarification, que les infections nosocomiales, conformément à la jurisprudence actuelle , engagent toujours -même lorsqu'une faute ne peut être établie- la responsabilité des établissements de santé sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère ;

- permettre aux victimes d'accidents fautifs dont les dommages n'atteignent pas le seuil de gravité fixé par le texte de bénéficier de la procédure de règlement amiable ; dans son état actuel, le projet de loi prévoit qu'après l'expertise médicale, la victime d'une faute qui n'aurait pas subi un dommage grave ne se verrait proposer aucune indemnisation, mais devrait saisir le juge pour obtenir réparation . Cette situation est particulièrement injuste.

En règle générale, les procédures amiables sont conçues pour les litiges les moins graves, les litiges graves relevant pour leur part du juge. Il ne paraît pas possible d'écarter, en cours de procédure, certaines victimes de fautes médicales sous prétexte que le dommage qu'elles ont subi n'est pas « suffisamment » grave ;

- rendre possible une limitation de la durée et des montants des garanties qui seront prévues dans le cadre de l'assurance obligatoire des professionnels de santé, afin d'éviter que cette obligation d'assurance ne conduise les professionnels de l'assurance à se retirer de l'assurance médicale;

- autoriser le bureau central de tarification à saisir le préfet du cas de médecins présentant un risque assurantiel particulièrement élevé ; le présent projet de loi autorise en effet le préfet à suspendre certains praticiens dont l'activité constituerait un danger pour leurs patients ;

- limiter à un an la période pendant laquelle il sera possible d'inscrire sur la liste nationale d'experts en accidents médicaux des experts ne figurant pas sur l'une des listes établies par la Cour de cassation et les cours d'appel. La réforme de l'expertise est une des innovations majeures du texte et il convient d'éviter qu'elle soit vidée de sa substance par le dispositif dérogatoire envisagé .

Sous réserve des améliorations qu'elle propose, votre commission approuve les dispositions du titre III du présent projet de loi.


II. RÉPONDRE À LA « JURISPRUDENCE PERRUCHE » : LA QUADRATURE DU CERCLE

L'arrêt Perruche du 17 novembre 2000, qui a reconnu le droit d'un enfant né handicapé de demander réparation à la suite d'une faute médicale ayant privé sa mère de la possibilité de recourir à une interruption de grossesse, a suscité une intense émotion dans la société et des débats passionnés.

Après l'adoption par l'Assemblée nationale d'une proposition de loi présentée par M. Jean-François Mattéi et modifiée par amendement gouvernemental, le Gouvernement a fait part de sa volonté d'insérer, par voie d'amendement, le texte adopté dans le projet de loi relatif aux droits des malades lors de son examen par le Sénat. Votre commission des lois, saisie au fond de cette question, a organisé le 18 décembre 2001, des auditions publiques 6 ( * ) et a choisi de traiter ce sujet dans le cadre de l'avis qu'elle est appelée à rendre sur le projet de loi relatif aux droits des malades.

A. QU'EST-CE QUE L'ARRÊT PERRUCHE ?

L'arrêt Perruche ne peut être compris que replacé dans le contexte de la jurisprudence de la Cour de cassation et du Conseil d'Etat en matière de faute médicale pendant la grossesse.

Les deux hautes juridictions ont retenu des solutions différentes lorsqu'elles ont été confrontées à des fautes médicales en cours de grossesse qui, sans créer le handicap, n'ont pas permis de déceler une malformation et ont donc privé la mère de l'information qui lui aurait permis de prendre, le cas échéant, la décision d'interrompre sa grossesse. Ces solutions doivent toutes deux être présentées.

1. L'arrêt Perruche et l'arrêt Quarez

Avant d'évoquer les jurisprudences de la Cour de cassation et du Conseil d'Etat en matière de handicap congénital non décelé pendant la grossesse à la suite d'une faute ayant empêché la mère de recourir à une interruption de grossesse, il convient de rappeler que les deux hautes juridictions s'étaient auparavant prononcées très clairement dans des cas non dépourvus de tout lien avec les affaires en cause.

En 1982, le Conseil d'Etat a statué sur le cas d'une jeune femme ayant subi une interruption volontaire de grossesse pour motif non thérapeutique et dont la grossesse s'est néanmoins poursuivie. Cette jeune femme, qui a mis au monde un enfant normalement constitué, a engagé une action devant le juge administratif en soutenant que l'échec de l'interruption de grossesse lui avait causé un préjudice.

Le Conseil d'Etat a jugé « que la naissance d'un enfant, même si elle survient après une intervention pratiquée sans succès, en vue de l'interruption de grossesse (...), n'est pas génératrice d'un préjudice de nature à ouvrir à la mère un droit à réparation par l'établissement hospitalier où cette intervention a eu lieu, à moins qu'existent, en cas d'échec de celle-ci, des circonstances ou une situation particulière susceptibles d'être invoquées par l'intéressée » 7 ( * ) .

Saisie de faits très voisins, la Cour de cassation a également rejeté la demande de réparation d'une jeune femme ayant subi, sans succès, une interruption volontaire de grossesse et dont l'enfant était né normalement constitué : « l'existence de l'enfant qu'elle a conçu ne peut, à elle seule, constituer pour sa mère un préjudice juridiquement réparable, même si la naissance est survenue après une intervention pratiquée sans succès en vue de l'interruption de la grossesse... qu'en l'absence d'un danger particulier qui, ajouté aux charges normales de la maternité, aurait été de nature à permettre à la mère de réclamer une indemnité, la Cour d'appel a légalement justifié sa décision » 8 ( * ) .

Ainsi, en l'absence d'un dommage particulier, de circonstances ou d'une situation particulière, la Cour de cassation comme le Conseil d'Etat ne reconnaissent pas l'existence d'un préjudice du seul fait de la naissance.

Dans un arrêt de 1989, le Conseil d'Etat a accepté d'indemniser la mère d'un enfant né handicapé à la suite des lésions provoquées par une interruption volontaire de grossesse qui avait échoué 9 ( * ) .

En 1991, la Cour de cassation a accepté l'indemnisation des parents d'un enfant affecté d'un grave handicap à la suite de l'absence de prescription de la sérologie de la rubéole lors de l'examen prénuptial de la mère, pratiqué avant la conception de l'enfant 10 ( * ) .

Ces différentes affaires n'ont suscité aucune émotion particulière, dès lors que l'indemnisation était accordée lorsque des fautes étaient à l'origine du handicap de l'enfant .

L'arrêt Quarez du Conseil d'Etat et l'arrêt Perruche de la Cour de cassation concernent quant à eux l'hypothèse d'un handicap non décelé au cours de la grossesse à la suite d'une faute médicale.

a) L'arrêt Quarez du Conseil d'Etat

A la suite d'une faute médicale lors de la réalisation d'une amniocentèse, une mère a mis au monde un enfant trisomique 21 et a saisi le tribunal administratif d'une demande tendant à mettre en cause la responsabilité du centre hospitalier.

Dans son arrêt du 14 février 1997, le Conseil d'Etat a considéré que la faute médicale devait être regardée comme la cause directe des préjudices entraînés pour les parents par l'infirmité dont était atteint l'enfant.

Au titre du préjudice matériel, le Conseil d'Etat a considéré que devaient être prises en compte « les charges particulières, notamment en matière de soins et d'éducation spécialisée » qui découleraient pour les parents de l'infirmité de leur enfant. A ce titre, la haute juridiction a condamné le centre hospitalier à payer aux parents une indemnité en capital représentant le versement d'une rente mensuelle de 5.000 F pendant toute la durée de la vie de l'enfant.

Dans ses conclusions, la commissaire du Gouvernement a traité l'ensemble des questions posées par cette affaire.

A propos de l'existence éventuelle d'un préjudice indemnisable de l'enfant lui-même, elle a apporté les précisions suivantes :

Extrait des conclusions de la commissaire du Gouvernement

« L'infirmité de Mathieu Quarez est génétique et incurable. Dès lors, la faute commise dans le diagnostic prénatal ne l'a pas causée, et n'a pas empêché de la guérir in utero. Mais il est indéniable que la faute hospitalière a eu pour conséquence la naissance d'un enfant infirme alors qu'en l'absence de faute cet enfant ne serait pas né.

« Toutefois, si nous avons admis que les parents à qui était offerte la possibilité légale de ne pas faire naître cet enfant pouvaient faire état du préjudice que leur causait la faute de l'hôpital en les obligeant à supporter les conséquences de cette naissance non désirée, nous ne pensons pas pouvoir pousser le raisonnement aussi loin pour leur enfant.

« (...) En premier lieu, nous ne pensons pas qu'un enfant puisse se plaindre d'être né tel qu'il a été conçu par ses parents, même s'il est atteint d'une maladie incurable ou d'un défaut génétique, dès lors que la science médicale n'offrait aucun traitement pour le guérir in utero. Affirmer l'inverse serait juger qu'il existe des vies qui ne valent pas d'être vécues et imposer à la mère une sorte d'obligation de recourir, en cas de diagnostic alarmant, à une interruption de grossesse. Ce serait, selon nous, aller contre tous les principes qui fondent notre droit en matière biomédicale.

« C'est pourquoi, nous estimons qu'il n'existe pas de lien de causalité directe entre le seul préjudice dont Mathieu Quarez peut utilement se prévaloir -son handicap- et la faute commise par l'hôpital.

« (...) Distendre le lien de causalité entre la faute et le dommage, dans un domaine où les occasions de faute et le champ possible du dommage vont considérablement s'étendre, ne nous paraît pas sans risque.

« Cet effort juridique semble d'autant plus inutile qu'il est possible de donner, dans une large mesure, satisfaction aux demandes indemnitaires formulées devant la cour sans avoir à reconnaître l'existence pour le jeune enfant d'un préjudice directement lié à la faute hospitalière . »

Ainsi, dans son arrêt Quarez, le Conseil d'Etat a refusé d'indemniser l'enfant né atteint d'un handicap incurable après qu'une faute médicale a privé sa mère d'exercer son droit de recourir à une interruption de grossesse. Il a en revanche indemnisé ses parents de la charge résultant de l'éducation et de l'entretien d'un enfant handicapé.

b) L'arrêt Perruche

Le 17 novembre 2000, la Cour de cassation a statué sur l'affaire Perruche. Dans cette affaire, une femme enceinte a demandé à subir un séro-diagnostic de la rubéole après que sa fille et elle-même ont présenté des symptômes de cette maladie. Elle a expressément manifesté sa volonté de recourir à une interruption de grossesse s'il s'avérait qu'elle n'était pas immunisée contre la rubéole. Des fautes commises par le médecin traitant et le laboratoire d'analyses ont faussement induit la femme dans la croyance qu'elle était immunisée. Son enfant est né gravement handicapé.

Les parents ont demandé l'indemnisation de leur préjudice personnel ainsi que de celui de leur enfant.

Après que la cour d'appel de Paris a refusé d'accueillir la demande d'indemnisation du préjudice de l'enfant, la Cour de cassation a cassé cette décision pour les motifs suivants : « Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il était constaté que les parents avaient marqué leur volonté, en cas de rubéole, de provoquer une interruption de grossesse et que les fautes commises les avaient faussement induits dans la croyance que la mère était immunisée, en sorte que ces fautes étaient génératrices du dommage subi par l'enfant du fait de la rubéole de sa mère, la cour d'appel a violé le texte susvisé » 11 ( * ) .

Malgré cet arrêt de la Cour de cassation, la cour d'appel de renvoi a considéré que l'enfant ne subissait pas de préjudice indemnisable en relation de causalité avec les fautes médicales.

Saisie de nouveau, la Cour de cassation a ainsi statué en assemblée plénière le 17 novembre 2000 : « Attendu, cependant, que dès lors que les fautes commises par le médecin et le laboratoire dans l'exécution des contrats formés avec Mme X avaient empêché celle-ci d'exercer son choix d'interrompre sa grossesse afin d'éviter la naissance d'un enfant atteint d'un handicap, ce dernier peut demander la réparation du préjudice résultant de ce handicap et causé par les fautes retenues ».

Le rapporteur de la Cour de cassation a longuement évoqué dans son rapport les raisons qui le conduisaient à proposer à la Cour d'accueillir la demande d'indemnisation de l'enfant.

Extrait du rapport de M. Pierre Sargos

« Il convient donc de rechercher dans la présente affaire quelle était l'obligation contractuelle du médecin et du laboratoire, qui, tous deux, étaient contractuellement liés à Mme X (...) le médecin et le laboratoire devaient donner à Mme X grâce au séro-diagnostic de la rubéole, une information lui permettant d'exercer le choix qu'elle avait fait de recourir à une IVG si elle présentait une rubéole en cours. Et l'exercice de ce choix, expression de sa liberté personnelle et discrétionnaire, a été empêché par l'erreur commise. Le handicap de l'enfant apparu peu après sa naissance est donc bien la conséquence directe de la faute commise par le médecin et le laboratoire puisque sans cette faute il n'y aurait pas eu de handicap.

« Il n'y aurait pas non plus eu de vie, mais cette conséquence (...) est sans incidence sur l'appréciation du lien de causalité (...).

« On peut aussi observer que le refus d'admettre le préjudice de l'enfant tout en admettant celui des parents recèle une irréductible, sinon incohérente, contradiction interne (...). Cette incohérence tient au fait que le préjudice des parents est, en dernière analyse, fondé exactement sur la même faute que celle invoquée par l'enfant. En indemnisant les parents, on accepte nécessairement l'idée de faire abstraction de la vie qui, sans la faute commise, n'aurait pas existé (...).

« Quant à l'argument suivant lequel admettre la réparation du préjudice de l'enfant c'est admettre qu'il existe des vies qui ne méritent pas la peine d'être vécues puisqu'on les indemnise, il procède davantage de l'image que de la raison. Où est le véritable respect de la personne humaine et de la vie : dans le refus abstrait de toute indemnisation, ou au contraire dans son admission qui permettra à l'enfant de vivre, au moins matériellement, dans des conditions plus conformes à la dignité humaine sans être abandonné aux aléas d'aides familiales, privées ou publiques ? (...) »

Contrairement au Conseil d'Etat, la Cour de cassation a admis que l'enfant né handicapé pouvait lui-même demander réparation du préjudice résultant de son handicap lorsque sa mère a été privée, à la suite d'une faute médicale, de la possibilité de recourir à une interruption de grossesse.

Après l'arrêt du 17 novembre 2000, la Cour de cassation a rendu le 13 juillet 2001 trois arrêts concernant des affaires similaires. La principale différence avec l'affaire Perruche venait du fait que les fautes médicales étaient intervenues après la période pendant laquelle la femme peut recourir à l'interruption de grossesse sans qu'une attestation médicale soit nécessaire.

La Cour a réaffirmé le droit pour l'enfant handicapé d'être indemnisé du préjudice résultant de son handicap. Elle a toutefois jugé qu'une telle indemnisation n'était possible que si les conditions d'une interruption médicale de grossesse (affection d'une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic) étaient réunies. Elle a rejeté les pourvois en soulignant qu'il n'était pas démontré que ces conditions étaient réunies.

Enfin, le 28 novembre 2001, la Cour de cassation a de nouveau rappelé le principe posé le 17 novembre 2000 et jugé que l'enfant avait droit à la réparation intégrale du préjudice résultant de son handicap.

c) Comparaison

Après avoir présenté les jurisprudences du Conseil d'Etat et de la Cour de cassation, il est possible de comparer les solutions retenues :

- la Cour de cassation et le Conseil d'Etat admettent tous deux qu'une faute médicale ayant empêché la mère d'un enfant né handicapé d'exercer son droit de recourir à une interruption de grossesse cause aux parents un préjudice qui doit être indemnisé ;

- la Cour de cassation reconnaît un lien de causalité direct entre la faute médicale ayant empêché la mère de recourir à une interruption de grossesse et le handicap de l'enfant, acceptant en conséquence l'indemnisation du préjudice de ce dernier. Le Conseil d'Etat ne reconnaît pas ce lien ;

- les solutions de la Cour de cassation comme du Conseil d'Etat permettent une indemnisation au titre des charges matérielles particulières résultant du handicap de l'enfant .

Le Conseil d'Etat admet que les parents peuvent être indemnisés à ce titre et cette possibilité a été un des arguments du commissaire du Gouvernement pour refuser de reconnaître un préjudice de l'enfant : « Cet effort juridique semble d'autant plus inutile qu'il est possible de donner, dans une large mesure, satisfaction aux demandes indemnitaires formulées devant la Cour sans avoir à reconnaître l'existence pour le jeune enfant d'un préjudice directement lié à la faute hospitalière ».

La Cour de cassation admet que l'enfant lui-même puisse être indemnisé du préjudice matériel résultant de son handicap. Son rapporteur a souligné l'inconvénient de la solution retenue par le Conseil d'Etat : « La position du Conseil d'Etat, qui alloue en réalité aux parents l'indemnisation due à l'enfant (...) comporte d'ailleurs l'inconvénient d'un risque de dilapidation, en particulier si le couple se disloque ou abandonne l'enfant, ce qui est malheureusement assez fréquent. Et dans l'hypothèse où les parents meurent avant d'avoir pu agir, la solution « camouflée » de la réparation du préjudice de l'enfant à travers ses parents n'est même plus possible ».

2. Une émotion forte

L'arrêt Perruche et ceux qui l'ont suivi ont suscité une émotion forte dans la société. Les critiques adressées à cette jurisprudence ont été éloquemment résumées par l'avocat général de la Cour de cassation, M. Jerry Sainte-Rose, lors de son audition par votre commission des Lois :

« L'erreur commise par le praticien n'ayant pas permis à la femme de recourir à l'interruption volontaire de grossesse, le handicap serait alors la conséquence directe de la faute médicale puisque sans celle-ci, il n'y aurait pas eu d'infirmité car le foetus aurait été avorté. C'est bien l'aveu que la suppression du malade était la seule méthode envisageable pour éviter la maladie, laquelle préexistait à l'intervention du praticien (...) L'absence de préjudice quand on est infirme consiste à être mort.

« (...) Par ailleurs, nous ne savons toujours pas ce que l'enfant a perdu -c'est la condition première de la responsabilité civile-, ni de quel intérêt juridiquement protégé il peut se prévaloir : celui de n'avoir pas été privé d'une vie jugée inopportune ? Et surtout quel droit subjectif dont il aurait été le titulaire avant sa naissance aurait été violé ? Celui fantasmatique de ne pas naître ou de ne pas naître anormal ?

« L'eugénisme « rampant » (...) n'est pas absent de l'idée selon laquelle il vaut mieux être avorté que de naître handicapé (...). »

De nombreuses associations représentant les personnes handicapées et leurs familles ont fait part de leur émotion, l'arrêt Perruche étant ressenti comme une véritable agression à l'égard des personnes handicapées elles-mêmes, à l'égard aussi des parents qui acceptent un bouleversement complet de leur existence pour permettre à leur enfant handicapé de vivre dans les meilleures conditions possibles .

Une autre inquiétude s'est faite jour, celle des médecins échographistes et des spécialistes du diagnostic prénatal. La France a mis en place un dispositif de diagnostic prénatal extrêmement élaboré. Cette activité a connu des progrès fulgurants au cours des dernières années. Elle a aussi suscité des attentes fortes de la part de la population. Or, aujourd'hui encore, le diagnostic prénatal ne permet de déceler que 60 à 70 % des anomalies des foetus.

Après les différents arrêts de la Cour de cassation, les médecins ont exprimé la crainte forte d'une dérive qui mettrait à leur charge une obligation de résultat quant à l'information qu'ils devraient donner aux futures mères sur l'état de l'enfant à naître. D'ores et déjà, les primes d'assurances de ces praticiens ont connu une augmentation considérable.

Aussi, ces médecins ont-ils fait observer que leur responsabilité n'était jamais mise en cause lors d'interruptions de grossesse et que l'évolution jurisprudentielle portait en elle le germe d'une attitude de précaution extrême consistant à préconiser une telle interruption en présence du moindre doute.

Le 29 mai 2001, le comité consultatif national d'éthique a rendu un avis intitulé : « Handicaps congénitaux et préjudice ». Dans cet avis, il a notamment estimé que « la reconnaissance d'un droit de l'enfant à ne pas naître dans certaines conditions apparaîtrait hautement discutable sur le plan du droit, inutile pour assurer l'avenir matériel des personnes souffrant de handicaps congénitaux et redoutables sur le plan éthique. En effet, un tel droit risquerait de faire peser sur les parents, les professionnels du diagnostic prénatal et les obstétriciens une pression normative d'essence eugénique ».

Toutes ces réactions ne pouvaient laisser indifférent le législateur. De nombreuses propositions de loi ont été déposées, tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat 12 ( * ) , afin de mettre fin à la « jurisprudence Perruche ». Le Sénat, à l'initiative de notre ancien collègue M. Claude Huriet, a même adopté, en janvier 2001, lors de l'examen du projet de loi relatif à l'interruption volontaire de grossesse, un amendement sur cette question, sans cependant que l'Assemblée nationale le retienne.

Les 13 décembre 2001 et 10 janvier 2002, l'Assemblée nationale a finalement examiné et adopté, après modification, la proposition de loi de M. Jean-François Mattéi relative à la solidarité nationale et à l'indemnisation des handicaps congénitaux . Le Sénat devrait maintenant être appelé, dans le cadre du présent projet de loi, à se prononcer sur le texte adopté par l'Assemblée nationale.

B. LE TEXTE ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a eu un débat approfondi sur la proposition de loi de M. Jean-François Mattéi, qui tendait initialement à modifier ainsi le code civil :

« Nul n'est recevable à demander une indemnisation du fait de sa naissance.

« Lorsqu'un handicap est la conséquence directe d'une faute, il est ouvert droit à réparation dans les termes de l'article 1382 du présent code . »

Le texte prévoyait également la création d'un Observatoire de l'accueil et de l'intégration des personnes handicapées .

Si, dans un premier temps, les réserves du Gouvernement, tant sur le principe d'une intervention législative que sur le contenu de la proposition de loi n'ont pas permis à la discussion d'aboutir dès le 13 décembre 2001, la reprise du débat le 10 janvier dernier a conduit l'Assemblée nationale, sur la base d'un amendement gouvernemental modifié par plusieurs sous-amendements, à adopter le texte suivant :

Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale,
relative à la solidarité nationale et à l'indemnisation des handicaps congénitaux

Article 1 er

Nul, fût-il né handicapé, ne peut se prévaloir d'un préjudice du seul fait de sa naissance.

La personne née avec un handicap dû à une faute médicale peut obtenir la réparation de son préjudice lorsque l'acte fautif à provoqué directement le handicap ou l'a aggravé, ou n'a pas permis de prendre les mesures susceptibles de l'atténuer.

Lorsque la responsabilité d'un professionnel ou d'un établissement de santé est engagée vis-à-vis d'un enfant né avec un handicap d'une particulière gravité non décelé pendant la grossesse à la suite d'une faute lourde, les titulaires de l'autorité parentale peuvent demander une indemnité destinée à la personne handicapée, correspondant aux charges particulières découlant, tout au long de sa vie, de son handicap, déduction faite du montant des allocations et prestations, de quelque nature qu'elles soient, dont cette personne bénéficie au titre de la solidarité nationale ou de sécurité sociale. Dans ce cas très précis, les organismes sociaux ne peuvent exercer de recours à l'encontre de l'auteur de la faute pour obtenir le remboursement des allocations et prestations versées.

Les dispositions de la présente loi sont applicables aux instances en cours, à l'exception de celles où il a été irrévocablement statué sur le principe de l'indemnisation.

Article 2

Il est créé, dans des conditions définies par décret, un Observatoire de l'accueil et de l'intégration des personnes handicapées, chargé d'observer la situation matérielle, financière et morale des personnes handicapées en France et de présenter toutes les propositions jugées nécessaires au Parlement et au Gouvernement visant à assurer, par une programmation pluriannuelle continue, la prise en charge de ces personnes.

Article 3

L'article 1er de la présente loi est applicable en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie, dans les îles Wallis et Futuna et à Mayotte.

La solution qu'a souhaité retenir l'Assemblée nationale peut être ainsi résumée :

- aucune personne, même handicapée, ne peut se prévaloir d'un préjudice du seul fait de sa naissance ;

- conformément aux règles de droit commun établies bien avant la « jurisprudence Perruche », une personne née handicapée peut obtenir réparation de son préjudice lorsqu'une faute a créé son handicap, l'a aggravé ou n'a pas permis de prendre les mesures susceptibles de l'atténuer ;

- lorsqu'un enfant naît atteint d'un handicap d'une particulière gravité non décelé pendant la grossesse à la suite d'une faute médicale lourde, les titulaires de l'autorité parentale peuvent demander une indemnité destinée à la personne handicapée correspondant aux charges particulières découlant du handicap. Toutefois, priorité est donnée à la solidarité nationale sur l'indemnisation . L'indemnité doit être calculée après déduction de l'ensemble des allocations et prestations versés à cette personne. Ces allocations et prestations ne peuvent corrélativement donner lieu à aucune action en remboursement de la part des organismes sociaux ;

- ces dispositions s'appliquent aux instances en cours à l'exception de celles où il a été irrévocablement statué sur le principe de l'indemnisation.

Schématiquement, le dispositif retenu par l'Assemblée nationale a pour objectif d'écarter l'action de l'enfant tout en permettant une prise en compte, dans la réparation de la faute médicale, des charges résultant du handicap. Cette solution est celle retenue par le Conseil d'Etat dans son arrêt Quarez.

C. LÉGIFÉRER AVEC PRUDENCE

Sur la question posée par l'arrêt Perruche, des positions diverses s'expriment - éminemment respectables. Une intervention du législateur paraît désormais inévitable, qui ne saurait être interprétée comme une critique à l'égard du travail des juridictions. La Cour de cassation n'a pas failli à sa mission.

La société actuelle n'est pas telle en effet que le juge puisse traiter chaque cas particulier en lui appliquant de manière mécanique la règle générale. Tandis que la loi est parfois imprécise, contradictoire ou silencieuse, le juge est confronté à des situations nouvelles liées notamment aux progrès fulgurants de la science. Toutes les questions qui concernent le début de la vie font partie de ces situations pour lesquelles la loi ne règle pas tout et ne peut sans doute pas tout régler. Face à ces situations, « la sagesse pratique consiste à inventer les conduites qui satisferont le plus à l'exception que demande la sollicitude en trahissant le moins possible la règle » 13 ( * ) . A cet égard, si les arrêts de la Cour de cassation sont discutables, ils ne sont sûrement pas déshonorants.

Pour autant, il revient au législateur de prendre en compte la blessure provoquée chez certains par la jurisprudence de la Cour de cassation, ainsi que les inquiétudes fortes qu'elle a suscitées.

Afin de faciliter le travail du Sénat et son débat public, votre commission des Lois, après avoir organisé des auditions publiques sur cette question, a décidé de formuler une proposition sans attendre le dépôt par le Gouvernement d'un amendement reprenant le texte adopté par l'Assemblée nationale.

Si votre commission approuve les principes posés par l'Assemblée nationale dans la proposition de loi qu'elle a adoptée, elle constate que plusieurs difficultés sérieuses doivent encore être levées.

1. Approuver les principes dégagés par l'Assemblée nationale

Votre commission souscrit à la proposition de l'Assemblée nationale tendant à interdire à une personne, même handicapée, de se prévaloir d'un préjudice du seul fait de sa naissance tout en reconnaissant qu'une action est évidemment possible lorsqu'une faute médicale a créé un handicap in utero.

Il paraît indispensable en effet d'entendre les graves objections formulées à l'égard de l'action d'un enfant qui ne pouvait que naître handicapé ou ne pas naître . Personne ne mesure clairement les conséquences que pourrait avoir dans l'avenir l'admission d'une telle action. Sans doute, l'action d'un enfant reprochant à ses parents de l'avoir laissé naître ne serait-elle pas accueillie aujourd'hui. Il est difficile d'écarter avec certitude cette hypothèse pour l'avenir 14 ( * ) . Que penser de la situation d'un enfant dont la mère aurait accepté de la faire naître handicapé et qui engagerait une action à son encontre ?

Au demeurant, il suffit de constater le caractère contestable du lien de causalité entre la faute et le dommage pour considérer que l'action de l'enfant ne peut prospérer.

Votre commission a également décidé d'approuver le principe -lorsqu'une faute médicale n'a pas permis de déceler un handicap grave au cours d'une grossesse- du versement d'une indemnité correspondant aux charges matérielles particulières découlant du handicap.

Elle est favorable à ce que cette indemnité soit limitée aux seules charges qui ne seraient pas assumées par la solidarité nationale . Ainsi, les progrès futurs de la solidarité nationale pourraient permettre de faire diminuer ou même disparaître l'indemnité accordée par le juge.

Le principe du versement d'une telle indemnité ne met en aucun cas à la charge des médecins échographistes une obligation de résultat. Un handicap non décelé n'est pas à lui seul constitutif d'une faute médicale , la jurisprudence de la Cour de cassation est très claire sur ce point. Certes, dans certaines hypothèses, une discussion peut exister sur la faute, mais ce qui est alors en cause est le mode de preuve - en réalité la qualité de l'expertise. Sur ce point, le présent projet de loi, en réformant les règles relatives au choix des experts médicaux, pourrait apporter de réels progrès.

2. Recenser les difficultés soulevées par le texte adopté par l'Assemblée nationale

Le texte adopté par l'Assemblée nationale soulève des difficultés sérieuses que le législateur doit encore résoudre avant de statuer définitivement :

- la proposition initiale de M. Mattei prévoyait que « nul n'est recevable à demander une indemnisation du fait de sa naissance ». Lors du débat, le Gouvernement a fait observer qu'un tel principe risquait d'interdire les actions, aujourd'hui admises, d'enfants nés de viols ou d'inceste. L'amendement du Gouvernement, adopté par l'Assemblée nationale, a donc prévu que « nul ne peut se prévaloir d'un préjudice du seul fait de sa naissance ». Il a alors été observé qu'une telle rédaction ne remettait probablement pas en cause l'arrêt Perruche dès lors que le préjudice invoqué n'était pas le seul fait de la naissance. Le texte finalement adopté à la suite du vote d'un sous-amendement dispose que « nul, fût-il handicapé, ne peut se prévaloir d'un préjudice du seul fait de sa naissance ».

Il n'est pas certain que l'incise ajoutée in extremis au principe posé réponde entièrement aux objections soulevées et interdise aux tribunaux d'accueillir l'action de l'enfant né handicapé.

- Le troisième alinéa du texte proposé soulève également des difficultés :

* il exige une faute lourde pour que la responsabilité d'un médecin puisse entraîner le versement d'une indemnité destinée à la personne née handicapée sans que le handicap ait été décelé pendant la grossesse ; la notion de faute lourde, longtemps exigée par le juge administratif en matière de responsabilité médicale, a été abandonnée ; le juge judiciaire ne l'a jamais utilisée ;

* il ne fait pas référence aux conditions de l'interruption de grossesse ; or, le droit éventuel de demander une indemnité destinée à l'enfant a pour seul fondement le fait que la mère a été privée, du fait de la faute, de la possibilité d'interrompre sa grossesse. Si une telle possibilité n'existait pas, il est difficile de savoir sur quel fondement reposerait l'action ;

* surtout, il ne répond pas aux préoccupations de la Cour de cassation, qui avait accordé réparation à l'enfant lui-même pour éviter que l'indemnité soit soumise aux aléas de la vie des parents . Le texte précise que l'indemnité est accordée aux parents, mais destinée à l'enfant. Une telle rédaction ne peut suffire à garantir que l'indemnité sera utilisée dans l'intérêt de l'enfant, en particulier en cas de décès des parents.

3. Tenter d'améliorer le dispositif proposé

Dans sa réflexion sur la question très difficile qui lui était posée, votre commission des lois a souhaité prendre en considération les spécificités des activités médicales liées à la grossesse sans pour autant remettre en cause les principes fondamentaux du droit de la responsabilité . Elle a décidé de proposer plusieurs aménagements au dispositif adopté par l'Assemblée nationale :

- elle propose tout d'abord d'inscrire le dispositif proposé dans la partie du code de la santé publique relative à la responsabilité médicale que le présent projet de loi tend à créer ;

- en ce qui concerne le premier alinéa du texte adopté, votre commission estime qu'il ne répond pas à la « jurisprudence Perruche » ; il précise en effet que « nul, fût-il handicapé, ne peut se prévaloir d'un préjudice du seul fait de sa naissance ». Une telle rédaction n'exclut donc pas que l'on puisse se prévaloir d'un préjudice du fait d'être né dans certaines circonstances et notamment du fait d'être né handicapé . Or, la Cour de cassation n'a jamais accueilli l'action d'une personne se prévalant d'un préjudice du seul fait d'être née ; elle n'a accueilli l'action que lorsque la naissance s'accompagnait de certaines circonstances, notamment d'un handicap. Pour répondre précisément à la jurisprudence, votre commission vous propose de préciser que « nul ne peut se prévaloir d'un préjudice du seul fait d'être né handicapé » ;

- le deuxième alinéa du texte adopté par l'Assemblée nationale mérite d'être conservé, sous réserve de quelques modifications rédactionnelles ; il rappelle le droit commun de la responsabilité, qui veut que le médecin qui, par une faute survenue à l'occasion d'une grossesse, crée un handicap, aggrave ce handicap ou ne permet pas de prendre les mesures de nature à y remédier engage sa responsabilité à l'égard de la personne handicapée. Cette hypothèse recouvre notamment le cas du médecin qui, par une faute, ne permet pas le diagnostic d'une toxoplasmose, maladie qui n'a pour conséquence un handicap de l'enfant que si la mère n'est pas soignée pendant sa grossesse ;

- en ce qui concerne le troisième alinéa du texte adopté par l'Assemblée nationale, votre commission est favorable à ce que les parents d'une personne atteinte d'un handicap non décelé pendant la grossesse à la suite d'une faute puissent obtenir une indemnité correspondant aux charges matérielles découlant, tout au long de la vie de cette personne, de son handicap lorsque les conditions suivantes sont réunies :

* la faute commise doit être « lourde » ; certes, cette notion n'existe plus dans notre droit ; toutefois, il ne paraît pas anormal d'indiquer aux juridictions que, dans le cas particulier des spécialités médicales concernées par la grossesse, les fautes pouvant donner lieu à une indemnité compensant les charges matérielles particulières résultant du handicap doivent être fortement caractérisées ; les activités en cause sont en effet beaucoup plus délicates, en termes de diagnostic, que la plupart des autres activités médicales ;

* le handicap doit être d'une particulière gravité ;

* la mère doit avoir été privée de la possibilité de recourir à une interruption de grossesse ; si, en effet, les conditions d'une telle interruption n'étaient pas réunies, on perçoit mal sur quel fondement reposerait l'action.

Ces différentes conditions doivent permettre de prendre en compte les particularités des spécialités médicales associées au diagnostic prénatal.

Votre commission est en plein accord avec le choix de ne mettre à la charge des praticiens que la part des charges matérielles résultant du handicap qui n'est pas assumée au titre de la solidarité nationale et de la sécurité sociale.

Votre commission propose de compléter le texte pour répondre aux craintes de la Cour de cassation concernant le sort d'une indemnité accordée aux parents et non à l'enfant lui-même : l'indemnité prendrait la forme d'une rente ; elle ne pourrait être utilisée que dans l'intérêt de l'enfant ; si tel n'était pas le cas, le juge des tutelles pourrait être saisi et nommer un administrateur ad hoc ; en cas de prédécès des parents, l'indemnité ne serait transmise qu'à la personne handicapée ; elle serait exonérée de droits de mutation.

Ces différentes précisions doivent permettre de répondre aux critiques formulées par le rapporteur de la Cour de cassation sur l'arrêt Perruche à l'encontre de la jurisprudence du Conseil d'Etat.

Votre commission a par ailleurs adopté un amendement reprenant la proposition de création d'un Observatoire de l'accueil et de l'intégration des personnes handicapées, qui figure dans la proposition de loi de M. Jean-François Mattei adoptée par l'Assemblée nationale.

Votre rapporteur doit également préciser qu'il a envisagé d'inscrire dans le présent projet de loi un principe général rappelant le devoir de solidarité de la collectivité nationale à l'égard des personnes handicapées. Il a cependant constaté que ce principe venait d'être rappelé dans la loi de modernisation sociale et a en conséquence renoncé à ce projet. Encore faudrait-il que cette affirmation se traduise par des actes concrets car notre pays doit et peut faire davantage pour aider les handicapés.

Cette exigence ne devra pas être oubliée une fois passé le débat sur le présent projet de loi.

III. COMPLÉTER LE PROJET DE LOI POUR PERMETTRE UNE SUSPENSION DE PEINE POUR LES DÉTENUS EN FIN DE VIE

Il y a maintenant près de deux ans, la commission d'enquête du Sénat sur les conditions de détention dans les établissements pénitentiaires rendait ses travaux et qualifiait le système pénitentiaire français d'humiliation pour la République.

Parmi les 30 mesures d'urgence proposées par la commission d'enquête figurait la possibilité de prononcer une suspension de peine à l'égard des détenus atteints d'une maladie mettant en jeu leur pronostic vital . La commission d'enquête a constaté que la prison devenait parfois mouroir pour des malades du cancer, du SIDA...La grâce médicale est une procédure trop contraignante pour répondre efficacement à la situation de détenus en fin de vie.

En avril 2001, le Sénat a voté une proposition de loi relative aux conditions de détention prévoyant notamment la possibilité de prononcer une suspension de peine pour les détenus dont le pronostic vital est en jeu. Ce texte n'a malheureusement pas été inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale.

En revanche, le Gouvernement a repris cette disposition, qu'il a complétée, dans l'avant-projet de loi pénitentiaire qu'il a élaboré dans le cadre d'un Conseil d'orientation stratégique. Il est cependant acquis que la discussion de ce projet de loi ne pourra pas intervenir avant la fin de la présente législature, de sorte que l'adoption éventuelle de dispositions sur les conditions de détention n'interviendra pas avant des mois, sinon des années.

Le Sénat examine aujourd'hui un projet de loi relatif aux droits des malades. Ce texte, qui concerne tous les malades, offre une possibilité d'adopter, sans attendre davantage, une mesure d'humanité à l'égard des détenus mourants.

Votre commission vous propose par conséquent d'introduire dans le projet de loi un article additionnel permettant au juge de l'application des peines ou à la juridiction régionale de la libération conditionnelle, en fonction de la durée de la peine, de prononcer une suspension de peine pour les détenus atteints soit d'une maladie mettant en jeu le pronostic vital, soit d'une maladie est durablement incompatible avec le maintien en détention.

Afin d'éviter tout détournement de cette procédure, la suspension ne pourrait intervenir qu'après deux expertises médicales distinctes, dont les conclusions devraient être concordantes. Le ministère public devrait donner un avis. Le juge de l'application des peines pourrait à tout moment ordonner une expertise médicale à l'égard d'un condamné ayant bénéficié d'une mesure de suspension de peine et ordonner qu'il soit mis fin à la suspension si les conditions de celle-ci n'étaient plus réunies.

*

* *

Sous le bénéfice de ces observations et des amendements qu'elle a adoptés, votre commission a donné un avis favorable à l'adoption des dispositions du projet de loi dont elle est saisie.

EXAMEN DES ARTICLES
TITRE PREMIER
DÉMOCRATIE SANITAIRE

CHAPITRE PREMIER
DROITS DE LA PERSONNE

article additionnel après l'article 5
(article 720-1-1 nouveau du code de procédure pénale)
Suspension de peine pour les détenus en fin de vie

Dans son rapport, la commission d'enquête du Sénat sur les conditions de détention dans les établissements pénitentiaires a constaté que les prisons devenaient des mouroirs pour certains détenus atteints de maladies telles que le cancer ou le SIDA.

Elle a en conséquence proposé qu'une mesure de suspension de peine puisse être prononcée pour les détenus atteints d'une maladie mettant en jeu le pronostic vital.

En avril 2001, à l'initiative de notre excellent collègue M. Jean-Jacques Hyest et de notre ancien collègue M. Guy-Pierre Cabanel, le Sénat a adopté une proposition de loi sur les conditions de détention prévoyant notamment la possibilité de prononcer une mesure de suspension de peine à l'égard des détenus en fin de vie. Cette proposition de loi n'a malheureusement pas été inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale.

Dans l'avant-projet de loi sur le sens de la peine et le service public pénitentiaire qu'il a élaboré, le Gouvernement a repris cette proposition. Toutefois, ce texte n'a pas encore été examiné par le Conseil des ministres et son examen par le Parlement ne pourra être entamé avant la fin de la législature .

Le présent projet de loi, qui concerne les droits des malades et dans lequel l'Assemblée nationale a souhaité prévoir que « chacun a droit à une mort digne » offre l'occasion de traiter sans attendre la question des détenus en fin de vie.

Il est difficile en effet de percevoir quel sens peut avoir le maintien en détention d'un malade en phase terminale. Ajoutons que le personnel pénitentiaire n'est guère préparé à affronter ce type de situations.

Par un article additionnel , votre commission vous propose d'insérer dans le code de procédure pénale un article 720-1-1 pour permettre au juge de l'application des peines ou à la juridiction régionale de la libération conditionnelle de prononcer une suspension de peine pour les détenus atteints d'une maladie mettant en jeu le pronostic vital ou durablement incompatible avec le maintien en détention.

Un avis du ministère public serait indispensable. La mesure de suspension ne pourrait être prononcée que si deux expertises médicales distinctes aboutissaient à des résultats concordants. En outre, le juge de l'application des peines pourrait ordonner à tout moment une nouvelle expertise sur un détenu ayant vu sa peine suspendue et décider une nouvelle incarcération si les conditions de la suspension n'apparaissaient plus réunies.

CHAPITRE IV
RESPONSABILITÉ DES PROFESSIONNELS DE SANTÉ

Article 23 bis
(article 706-2 du code de procédure pénale)
Juridictions spécialisées pour les infractions en matière sanitaire

Cet article tend à insérer dans le livre IV du code de procédure pénale, qui traite « de quelques procédures particulières », un nouveau titre consacré à la poursuite, à l'instruction et au jugement des infractions en matière sanitaire.

Ce nouveau titre comprendrait un article unique, numéroté 706-2 (l'ancien article 706-2 a été supprimé en 1994).

Le texte proposé pour l'article 706-2 du code de procédure pénale prévoit que la compétence territoriale d'un tribunal de grande instance peut être étendue pour la poursuite, l'instruction et le jugement de certaines infractions « qui sont ou apparaîtraient » d'une grande complexité.

Cette extension concernerait les affaires relatives à un produit de santé ou un produit destiné à l'alimentation de l'homme ou de l'animal. L'article L. 5311-1 du code de la santé publique dresse une liste non exhaustive des produits de santé, parmi lesquels figurent les médicaments, les substances stupéfiantes et psychotropes, les produits contraceptifs, les dispositifs médicaux de diagnostic in vitro, les produits sanguins labiles, les organes, tissus, cellules et produits d'origine humaine ou animale...

Les infractions pour lesquelles le tribunal de grande instance à compétence élargie devrait être saisi seraient les atteintes à la personne humaine au sens du titre II du code pénal, les infractions prévues par le code de la santé publique et les infractions prévues par le code rural ou le code de la consommation.

Un décret fixerait la liste et le ressort des tribunaux spécialisés. La compétence du tribunal spécialisé serait concurrente de celle de la juridiction qui devrait être normalement saisie en application des règles posées par le code de procédure pénale. Une telle compétence concurrente est indispensable pour éviter des nullités dans l'hypothèse où une affaire ne serait pas renvoyée à une juridiction spécialisée.

Le présent article tend à prévoir, en matière de santé publique, les mêmes dispositions qui ont permis en 1994 la création des pôles économiques et financiers.

Pour certaines infractions complexes, il est indispensable en effet que des magistrats puissent acquérir une spécialisation poussée sans laquelle le travail d'investigation pourrait s'avérer vain. En pratique aujourd'hui, les affaires pénales de santé publique de grande ampleur sont renvoyées au tribunal de grande instance de Paris, les règles normales de compétence des juridictions aboutissant à ce résultat.

Le Gouvernement a toutefois voulu se réserver la possibilité de créer à l'avenir plusieurs « pôles de santé » et n'a donc pas prévu une compétence nationale pour la juridiction parisienne.

Le texte prévoit aussi que l'activité des « pôles de santé » pourra être facilitée par le recrutement d' assistants spécialisés en matière sanitaire , qui seraient recrutés parmi les fonctionnaires de catégorie A ou B relevant des ministres chargés de la santé, de la recherche et de l'agriculture ainsi que les personnes justifiant d'une qualification professionnelle définie par décret et d'une expérience professionnelle minimale de quatre années.

L'article 706 du code de procédure pénale prévoit des dispositions similaires s'agissant des « pôles économiques et financiers ». Il prévoit que « les assistants spécialisés assistent, dans le déroulement de la procédure, les magistrats sous la direction desquels ils sont placés, sans pouvoir procéder par eux-mêmes à aucun acte.

« Ils ont accès au dossier de la procédure pour l'exécution des tâches qui leur sont confiées et sont soumis au secret professionnel (...) ».

Actuellement, une vingtaine d'assistants spécialisés sont affectés dans les juridictions spécialisées en matière économique et financière.

Le ministère de la justice envisage d'aménager prochainement les dispositions relatives aux assistants spécialisés. En juin 2001, il a déposé un amendement en ce sens sur le Bureau du Sénat, qui a été écarté compte tenu de son dépôt très tardif. Cet amendement tendait notamment à permettre aux assistants spécialisés de participer aux perquisitions, saisies et interrogatoires et à prévoir la possibilité de verser au dossier de la procédure les notes d'étude élaborées par les assistants, qui devaient en outre recevoir le nom de conseillers techniques.

Les assistants spécialisés dans les « pôles de santé » exerceront les mêmes missions que celles dévolues aux assistants spécialisés dans les juridictions économiques et financières.

TITRE III
RÉPARATION DES RISQUES SANITAIRES

Le titre III du projet de loi, dont est saisie votre commission des lois, est consacré à la réparation des risques sanitaires. Il a pour objet essentiel de permettre une indemnisation de certains accidents médicaux au titre de la solidarité nationale. Il contient néanmoins quelques autres dispositions concernant notamment l'utilisation des tests génétiques par les entreprises d'assurance ainsi que l'assurance des personnes présentant des risques aggravés.

Article 58
(articles L. 1141-1 à L. 1142-28 nouveaux du code de la santé publique)
Responsabilité médicale et indemnisation de l'aléa médical

Cet article tend à insérer un nouveau titre dans le livre premier (protection des personnes en matière de santé) de la première partie (protection générale de la santé) du code de la santé publique. Le titre IV nouveau de ce livre serait consacré à la « réparation des conséquences des risques sanitaires ».

Trois chapitres sont appelés à composer ce titre nouveau :

- un chapitre consacré à l'accès à l'assurance contre les risques d'invalidité et de décès,

- un chapitre consacré aux risques sanitaires résultant du fonctionnement du système de santé,

- enfin, un chapitre consacré aux dispositions communes.

A. LES DISPOSITIONS RELATIVES À L'ACCÈS À L'ASSURANCE CONTRE LES RISQUES D'INVALIDITÉ OU DE DÉCÈS

Le projet de loi tend à consacrer un chapitre, du code de la santé publique, à l'accès à l'assurance contre les risques d'invalidité ou de décès.

Ce chapitre comporterait deux sections, l'une consacrée aux tests génétiques, l'autre aux risques aggravés.

Article L. 1141-1 du code de la santé publique
Interdiction de l'utilisation des tests génétiques par les assureurs

La section I du nouveau chapitre du code de la santé publique ne comporterait qu'un article, numéroté L. 1141-1.

Le texte proposé pour l'article L. 1141-1 du code de la santé publique prévoit que les entreprises et organismes qui proposent une garantie des risques d'invalidité ou de décès ne doivent pas tenir compte des résultats de l'examen des caractéristiques génétiques d'une personne demandant à bénéficier de cette garantie, même lorsque ces résultats leur sont transmis par la personne concernée ou avec son accord.

Le texte prévoit également qu'aucune question relative aux tests génétiques et à leurs résultats ne peut être posée aux personnes demandant à bénéficier d'une garantie. Les entreprises et organismes proposant une garantie des risques d'invalidité ou de décès ne pourraient naturellement pas demander à une personne de se soumettre à des tests génétiques avant la conclusion d'un contrat ou pendant la durée de celui-ci.

Le non-respect de ces dispositions serait puni d'un an d'emprisonnement et de 20.000 € d'amende.

Les interdictions posées par cet article sont particulièrement nécessaires. L'article L. 113-8 du code des assurances impose en effet aux personnes assurées une obligation de loyauté selon laquelle il peut y avoir nullité du contrat d'assurance en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de la part du cocontractant.

Il est cependant possible de se demander si le droit actuel ne couvre pas déjà les hypothèses visées dans le présent projet de loi.

L'article 16-10 du code civil, issu des lois dites « bioéthique » de 1994 prévoit que « l'étude génétique des caractéristiques d'une personne ne peut être entreprise qu'à des fins médicales ou de recherche scientifique ». Cette disposition protectrice ne concerne certes que l'étude des caractéristiques et non l'usage qui pourrait ultérieurement être fait des résultats.

Néanmoins, l'article 226-26 du code pénal punit d'un an d'emprisonnement et de 15.000 € d'amende « le fait de détourner de leurs finalités médicales ou de recherche scientifique les informations recueillies sur une personne au moyen de l'étude de ses caractéristiques génétiques ».

Ces dispositions interdisent probablement en elles-mêmes l'utilisation des tests génétiques par les assureurs. De plus, en 1994, par un moratoire, les assureurs se sont engagés à ne pas tenir compte des résultats de l'étude génétique des caractéristiques d'un candidat à l'assurance, même si ceux-ci leur étaient apportés par l'assurable lui-même. Ce moratoire a été renouvelé pour cinq ans en 1999.

Malgré l'existence de dispositions générales, le législateur a déjà commencé à « décliner » l'interdiction de l'utilisation des tests génétiques dans des textes particuliers. Ainsi la loi portant création d'une couverture maladie universelle interdit aux organismes susceptibles d'accorder une protection complémentaire en matière de santé de tenir compte de l'étude des caractéristiques génétiques d'une personne.

Dans ces conditions, il devient nécessaire de prévoir une disposition similaire pour les assureurs. Votre commission considère qu'une telle méthode n'est pas de bonne technique législative, dès lors qu'une interdiction générale pouvait suffire.

Il convient en outre de signaler que le présent projet de loi, dans son article 1 er bis tend à modifier le code civil et le code pénal pour interdire toute discrimination en raison des caractéristiques génétiques et rendre punissable une telle discrimination.

Or, que serait la prise en compte par un assureur des caractéristiques génétiques d'une personne sinon une discrimination ?

Par un amendement , votre commission vous propose de supprimer la sanction pénale prévue dans le texte proposé pour l'article L. 1141-1 du code de la santé publique, dès lors que des sanctions pénales sont déjà prévues à l'encontre du comportement visé.

Article L. 1141-2 du code de la santé publique
Convention relative aux personnes présentant des risques aggravés
en matière d'assurance

La section II du nouveau chapitre du code de la santé publique relatif à l'accès à l'assurance contre les risques d'invalidité ou de décès serait consacrée aux « risques aggravés » et comporterait deux articles.

Le texte proposé pour l'article L. 1141-2 du code de la santé publique tend à prendre en considération la situation particulière, au regard de l'assurance, des personnes exposées à un risque aggravé du fait de leur état de santé ou de leur handicap. Il prévoit qu'une convention détermine les modalités particulières d'accès à l'assurance contre les risques d'invalidité ou de décès de ces personnes qui ne peuvent trouver dans le cadre des pratiques habituelles de l'assurance de garantie des prêts à la consommation, immobiliers ou à caractère professionnel. Toute personne présentant, du fait de son état de santé ou de son handicap, un risque aggravé pourrait se prévaloir des dispositions de la convention.

Cette disposition a en fait pour objet de valider un processus conventionnel déjà accompli. En 1991, en effet, l'Etat et les fédérations professionnelles de l'assurance ont conclu une convention organisant les conditions d'assurance des personnes séropositives au VIH et de traitement de leurs données médicales par les compagnies d'assurance.

Le dispositif concernait l'assurance en cas de décès couvrant le remboursement d'un emprunt pour l'acquisition d'un logement ou de locaux et matériels professionnels.

En 1999, le Gouvernement a confié à M. Jean-Michel Belorgey une mission de réflexion sur la convention, afin d'améliorer la situation des personnes séropositives au VIH et d'étendre le bénéfice de la convention aux personnes atteintes d'autres maladies graves. A la suite du rapport rendu en mai 2000 par M. Belorgey, une nouvelle convention a été élaborée, qui s'adresse non seulement aux personnes séropositives au VIH mais également à toute personne présentant du fait de son état de santé ou de son handicap un risque de santé aggravé.

La validation du processus conventionnel était une revendication importante des associations de malades.

Le troisième alinéa du texte proposé pour l'article L. 1141-2 du code de la santé publique prévoit que la convention donne lieu préalablement à sa conclusion, à un avis de la commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) pour celles de ses dispositions qui prévoient les conditions de collecte et d'utilisation, ainsi que les garanties de confidentialité des données à caractère personnel de nature médicale.

Le quatrième alinéa prévoit qu'à défaut d'accord ou en cas de dénonciation compromettant la mise en oeuvre ou la pérennité du dispositif conventionnel, les conditions de collecte et d'utilisation ainsi que les garanties de confidentialité à caractère personnel de nature médicale, sont définies par décrets en Conseil d'Etat, après avis de la CNIL.

Article L.1141-3 du code de la santé publique
Parties à la convention - Comité de suivi

Le texte proposé pour l'article L. 1141-3 du code de la santé publique dispose que la convention est conclue entre l'Etat, des associations représentant les personnes malades ou handicapées, les organismes représentant les entreprises régies par le code des assurances, les établissements de crédit, les mutuelles régies par le code de la mutualité et les institutions de prévoyance.

Le texte prévoit qu'un comité de suivi veille à l'application du dispositif conventionnel. Ce comité serait composé de représentants des signataires, ainsi que de personnes choisies en raison de leurs compétences. Le comité serait présidé par une personnalité qualifiée, nommée par les ministres chargés de l'économie et de la santé.

B. LES DISPOSITIONS RELATIVES À LA RESPONSABILITÉ MÉDICALE

Le projet de loi tend à consacrer un chapitre du code de la santé publique aux « risques sanitaires résultant du fonctionnement du système de santé ». Il s'agit en pratique de définir dans la loi les conditions d'indemnisation des accidents médicaux, notamment pour permettre l'indemnisation, au titre de la solidarité nationale, de l'aléa médical, le Conseil d'Etat et la Cour de cassation ayant actuellement des positions divergentes sur cette question.

Le texte prévoit la création d'une procédure entièrement nouvelle, reposant sur des commissions régionales chargées d'émettre un avis sur le régime d'indemnisation applicable. En l'absence de toute faute d'un professionnel de santé, l'indemnisation serait assurée, au titre de la solidarité nationale, par un office national d'indemnisation.

Le chapitre II du nouveau titre IV du Livre Ier de la première partie du code de la santé publique comporterait quatre sections respectivement consacrées aux principes généraux , à la procédure de règlement en cas d'accidents médicaux , d'affections iatrogènes ou d'infections nosocomiales, à l'indemnisation des victimes , enfin aux dispositions pénales .

1. Les principes généraux

Article L. 1142-1 du code de la santé publique
Conditions d'indemnisation des accidents médicaux

Le texte proposé pour l'article L. 1142-1 du code de la santé publique définit les conditions d'indemnisation des personnes victimes de dommages à l'occasion d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins.

Le premier paragraphe prévoit que, hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute.

Plusieurs observations peuvent être formulées :

- Les règles de responsabilité du fait des produits défectueux définies par la loi n° 98-389 du 19 mai 1998 ne sont pas remises en cause. Cette loi a transposé la directive communautaire du 25 juillet 1985 en créant un régime légal propre à la responsabilité des fabricants et des vendeurs professionnels pour le défaut de sécurité de leurs produits.

Dans le cadre de ce régime de responsabilité, la victime doit prouver son dommage, le défaut du produit et le lien de causalité entre l'un et l'autre. En revanche, elle est dispensée de prouver la faute du fabricant . La loi de 1998 précise qu'un produit est défectueux « lorsqu'il n'offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre ».

Deux causes d'exonération de sa responsabilité peuvent être invoquées par le fabricant :

* la conformité du produit avec des règles impératives d'ordre législatif ou réglementaire ;

* l'existence, au moment de la mise en circulation d'un produit, d'un défaut que l'état des connaissances scientifiques et techniques ne permettait pas de déceler à ce moment là (risque de développement). La loi exclut cependant le caractère exonératoire du risque de développement en ce qui concerne les dommages causés par les produits issus du corps humain.

- L'exigence d'une faute des professionnels de santé pour engager leur responsabilité correspond, pour l'essentiel, aux jurisprudences actuelles du Conseil d'Etat et de la Cour de cassation.

Néanmoins, certaines évolutions jurisprudentielles ont permis au cours des dernières années à des victimes d'être indemnisées en l'absence de faute établie :

* ainsi, en 1993, le Conseil d'Etat a accepté le principe de l'engagement d'une responsabilité sans faute de l'hôpital du fait de la réalisation d'un acte médical comportant un risque connu mais exceptionnel et provoquant des préjudices anormalement graves sans rapport avec l'affection soignée ;

* la Cour de cassation a retenu pour sa part une obligation de sécurité de résultat en ce qui concerne les dispositifs médicaux utilisés par le médecin pour l'exécution d'un acte médical d'investigations ou de soins ;

* de même, la Cour de cassation a récemment retenu une obligation de sécurité de résultat en matière d' infections nosocomiales .

- l'Assemblée nationale, à l'initiative de son rapporteur M. Claude Evin, a souhaité que les règles législatives définissant la responsabilité des professionnels de santé ne soient pas moins exigeantes que celles posées par les jurisprudences judiciaire et administrative.

Elle a donc complété le paragraphe du texte proposé pour l'article L. 1142-1 du code de la santé publique pour prévoir que la responsabilité des professionnels de santé n'est engagée qu'en cas de faute « ou de manquement quels que soient, selon l'appréciation du juge compétent, la nature ou le mode d'établissement de cette faute ou de ce manquement, prouvé ou présumé ».

Une telle rédaction, qui avait pour objectif de reprendre des formules jurisprudentielles, ne peut être retenue. L'introduction de la notion de manquement dans un régime de responsabilité fondé sur la faute risque d'introduire une grave confusion. L'un des objectifs du présent projet de loi est d'unifier les jurisprudences pour éviter les traitements différents de cas identiques. Il n'est donc pas opportun d'utiliser une formulation telle que « selon l'appréciation du juge compétent ».

En conséquence, votre commission vous propose, par un amendement , de supprimer les dispositions ajoutées à ce paragraphe par l'Assemblée nationale.

Si la rédaction retenue par l'Assemblée nationale ne paraît pas pouvoir être retenue, votre commission partage le souci de ne pas déresponsabiliser les établissements de santé en prévoyant dans la loi un régime moins exigeant que celui défini par la jurisprudence. En pratique, l'obligation de sécurité de résultat définie par la Cour de cassation concerne les dispositifs médicaux et les infections nosocomiales. Dès lors que le cas des produits de santé fait l'objet d'un autre cadre juridique protecteur pour la victime (la loi de 1998), le seul cas posant problème est celui des infections nosocomiales.

Bien souvent, de telles infections surviennent sans qu'une faute puisse être établie. La jurisprudence considère que les établissements sont toujours responsables de ces infections sauf s'ils apportent la preuve d'une cause étrangère. Votre commission, par un amendement , vous propose de reprendre ce principe dans le présent projet de loi.

Le second paragraphe du texte proposé pour l'article L. 1142-1 du code de la santé publique prévoit, innovation majeure du projet de loi, une indemnisation, au titre de la solidarité nationale, de l'aléa médical.

Il dispose en effet que lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement de santé ou d'un producteur de produits n'est pas engagée , un accident médical, une affection iatrogène ouvre droit à la réparation des préjudices du patient au titre de la solidarité nationale .

Dans la rédaction initiale du projet de loi, les infections nosocomiales étaient également mentionnées dans ce paragraphe, mais l'Assemblée nationale les en a écartées, souhaitant qu'elles relèvent toujours de la responsabilité des professionnels de santé. Votre commission a choisi, afin de ne pas abaisser le niveau de responsabilité, de prévoir que les infections nosocomiales demeureraient de la responsabilité des professionnels sauf s'ils apportaient la preuve d'une cause étrangère. Ce choix ne dispense cependant pas de mentionner les infections nosocomiales parmi les faits pouvant donner lieu à une indemnisation au titre de la solidarité nationale. En effet, si la preuve d'une cause étrangère est rapportée et que la responsabilité de l'établissement est dégagée, il faut néanmoins que la victime puisse obtenir indemnisation si son préjudice est grave. Par un amendement , votre commission vous propose de faire référence aux infections nosocomiales parmi les faits pouvant donner lieu à indemnisation au titre de la solidarité nationale.

Un accident médical peut être défini comme un événement imprévu causant un dommage accidentel ayant un lien de causalité certain avec un acte médical.

Une affection iatrogène peut être définie comme le dommage subi par le patient lié au traitement délivré.

Enfin, une infection nosocomiale peut être définie comme une maladie provoquée par des micro-organismes contractée dans un établissement de soins.

Plusieurs conditions doivent être réunies pour que l'indemnisation soit possible :

- les dommages doivent être directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins ;

- ils doivent avoir pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci ;

- les dommages doivent présenter un caractère de gravité prévu dans le texte proposé pour l'article L. 1142-8 du code de la santé publique.

L'existence d'un certain degré de gravité du dommage permettant l'indemnisation du patient au titre de la solidarité nationale est probablement inévitable au regard du coût que représenterait l'indemnisation de l'ensemble des dommages. Néanmoins, il est regrettable, sur le plan des principes, qu'une telle distinction doive être opérée . Il faut espérer qu'il sera possible à l'avenir d'envisager une indemnisation pour l'ensemble des aléas médicaux, quelle que soit la gravité du dommage subi. Dans cette attente, les dommages les moins graves ne pourront être indemnisés que dans le cadre d'assurances éventuellement souscrites par les patients.

Votre commission estime souhaitable que le degré de gravité du dommage permettant d'obtenir une indemnisation au titre de la solidarité nationale soit défini dès l'article L. 1142-1 du code de la santé publique et non renvoyé à l'article L. 1142-8.

Le texte proposé pour l'article L. 1142-8 prévoit que le caractère de gravité est fixé par décret en Conseil d'Etat et apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles mesurée en tenant compte du taux d'incapacité permanente ou du taux et de la durée de l'incapacité temporaire .

Afin de faire prévaloir une appréciation plus individualisée, l'Assemblée nationale a complété cette disposition en indiquant dans le projet de loi que « le caractère de gravité (...) est également apprécié au regard des conséquences sur la vie privée et professionnelle pour la personne concernée lorsque celles-ci sont d'une exceptionnelle gravité ».

Outre les difficultés posées par la rédaction de cette disposition, l'introduction d'un critère d'accès à l'indemnisation beaucoup moins objectif que celui de la perte de capacités fonctionnelles pourrait susciter des interprétations diverses de la part des commissions régionales et créer des inégalités préjudiciables à l'efficacité du nouveau dispositif. Votre commission comprend néanmoins le souci de l'Assemblée nationale de voir prévaloir une appréciation moins mécanique que la seule prise en compte de l'incapacité permanente.

Par un amendement , votre commission vous propose de compléter le texte proposé par l'article L. 1142-1 du code de la santé publique afin que le degré de gravité du dommage permettant d'accéder à l'indemnisation soit défini dans l'article énumérant les conditions de l'indemnisation.

Elle vous propose de prévoir que le caractère de gravité, défini par décret en Conseil d'Etat, sera apprécié « au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'incapacité permanente ou du taux et de la durée de l'incapacité temporaire ».

Article additionnel
Indemnisation des handicaps congénitaux

Votre commission vous propose d'insérer dans ce nouveau chapitre du code de la santé publique les dispositions de la proposition de loi de M. Jean-François Mattei relative à la solidarité nationale et à l'indemnisation des handicaps congénitaux adoptée par l'Assemblée nationale le 10 janvier 2002.

Votre commission a décidé d'approuver les principes dégagés par l'Assemblée nationale tout en complétant le dispositif. Les modifications qu'elle propose ont été présentées dans l'exposé général du présent rapport.

Article L. 1142-2 du code de la santé publique
Obligation d'assurance des professionnels de santé

Le texte proposé pour l'article L. 1142-2 du code de la santé publique institue une obligation d'assurance de responsabilité civile couvrant les éventuels dommages causés aux tiers dans l'exercice de leur activité pour tous les professionnels de santé exerçant à titre libéral, les établissements et services de santé et tout autre organisme exerçant des activités individuelles de prévention, de diagnostic ou de soins.

Actuellement, dans le système de santé, il n'existe d'obligation d'assurance que pour la recherche biomédicale et pour les établissements de transfusion sanguine . Le texte proposé ne vise que les professionnels exerçant à titre libéral dès lors que les professionnels salariés bénéficient de l'assurance de leur employeur. D'ores et déjà, les professionnels libéraux sont, pour la plupart, assurés , soit auprès du « Sou médical », mutuelle spécialisée, soit auprès des sociétés membres de la Fédération française des sociétés d'assurance.

En ce qui concerne les établissements de santé, quelques établissements publics ne recourent actuellement pas à l'assurance, dès lors qu'ils ont un volume d'activité et un budget leur permettant de faire face aux conséquences financières des accidents dont ils peuvent être déclarés responsables. Ils devront désormais souscrire une assurance, seul l'Etat étant dispensé de cette obligation.

Les producteurs, exploitants et fournisseurs de produits de santé sont également tenus de souscrire une assurance. Une exception est toutefois prévues pour les fournisseurs de produits et appareils destinés à la désinfection des locaux, de lentilles oculaires non correctrices et de produits cosmétiques. En outre, les loueurs de produits de santé ne sont pas tenus à l'obligation d'assurance.

Le projet de loi contient des dispositions destinées à permettre la mise en oeuvre dans de bonnes conditions de cette obligation d'assurance, en particulier la création d'un Bureau central de tarification . Ces dispositions, appelées à figurer dans le code des assurances, seront étudiées lors de l'examen de l'article 59 du projet de loi.

La mise en oeuvre du présent article constituera une obligation de très grande portée pour les assureurs présents dans le domaine de l'assurance médicale. Votre commission craint qu'en l'absence de toute autre précision, l'obligation d'assurance des professionnels de santé constitue un risque trop élevé pour des sociétés qui seraient alors tentées de se retirer de ce marché. Plusieurs compagnies ont déjà quitté ce secteur. Par un amendement , votre commission propose de prévoir qu'un décret en Conseil d'Etat fixe les limites en montants et en durée qui peuvent être apportées aux contrats. Elle vous soumet également un amendement de coordination.

Article L. 1142-3 du code de la santé publique
Règles de responsabilité en matière de recherche biomédicale

Le texte proposé pour l'article L. 1142-3 du code de la santé publique précise que les principes d'indemnisation définis par le projet de loi ne sont pas applicables au promoteur de recherche biomédicale. En effet, sa responsabilité peut être engagée dans le cadre de l'article L. 1121-7 du code de la santé publique.

Cet article prévoit notamment que « pour les recherches biomédicales sans bénéfice individuel direct, le promoteur assure, même sans faute, l'indemnisation des conséquences dommageables de la recherche pour la personne qui s'y prête et celle de ses ayants-droit, sans que puisse être opposé le fait d'un tiers ou le retrait volontaire de la personne qui avait initialement consenti à se prêter à la recherche ».

Aux termes de cet article, pour les recherches avec bénéfice individuel direct, le promoteur assure l'indemnisation des conséquences dommageables de la recherche pour la personne qui s'y prête et celle de ses ayants-droit, sauf preuve à sa charge que le dommage n'est pas imputable à sa faute ou à celle de tout intervenant.

Le texte proposé pour l'article L. 1142-3 permet aux personnes subissant des dommages dans le cadre de recherches biomédicales d'accéder aux commissions créées par le projet de loi afin de faciliter leurs démarches. Il prévoit surtout que ces personnes peuvent accéder à l'indemnisation au titre de la solidarité nationale lorsque, en cas de recherche biomédicale avec bénéfice direct, la responsabilité du promoteur n'est pas engagée.

Les victimes de recherches biomédicales se verront donc appliquer les mêmes conditions d'indemnisation que celles qui prévaudront, en l'absence de faute, pour les victimes d'accidents médicaux.

Par un amendement , votre commission vous propose de corriger une erreur de référence.

2. La nouvelle procédure de règlement en cas d'accidents médicaux, d'affections iatrogènes ou d'infections nosocomiales

L'une des innovations majeures du projet de loi est la création d'une procédure amiable en matière d'accidents médicaux, devant permettre aux victimes d'éviter, aussi souvent que possible, de saisir la justice. La procédure judiciaire implique en effet des démarches parfois longues et coûteuses de la part des victimes qui ont souvent besoin d'une aide immédiate.

Votre rapporteur ayant déjà fait part, dans la présentation générale du projet de loi, des réserves que peut inspirer la création d'une procédure extra-judiciaire, qui risque de ne pas offrir des garanties comparables à celles de la procédure judiciaire, il n'y reviendra pas ici.

Le nouveau dispositif aura l'avantage de s'appliquer à l'ensemble des accidents médicaux, qu'ils soient survenus à l'hôpital ou dans un établissement privé .

Cette procédure n'empêchera pas le recours à la procédure judiciaire , celui-ci restant ouvert à la victime si elle estime que les propositions qui lui sont faites ne correspondent pas à une juste indemnisation du dommage qu'elle a subi.

Les règles relatives au déroulement de la procédure de règlement ont vocation à être rassemblées au sein d'une section 2 du nouveau chapitre du code de la santé publique relatif aux risques sanitaires résultant du fonctionnement du système de santé.

Article L. 1142-4 du code de la santé publique
Droit à l'information des victimes d'accidents médicaux

Le texte proposé pour l'article L. 1142-4 du code de la santé publique permet à toute personne « victime ou s'estimant victime » d'un dommage imputable à une activité de prévention ou de soins d'obtenir une information de la part du professionnel ou de l'établissement sur les causes et les circonstances du dommage.

L'information devrait être délivrée dans les quinze jours suivant la découverte du dommage ou la demande lors d'un entretien au cours duquel la personne pourrait se faire assister par une personne de son choix.

Cette disposition vient compléter celle qui figure à l'article 6 du projet de loi, qui prévoit une information très complète du patient avant les investigations, traitements ou actions de prévention.

Votre commission vous soumet un amendement rédactionnel.

Article L. 1142-5 du code de la santé publique
Création de commissions régionales de conciliation et d'indemnisation

Le texte proposé pour l'article L. 1142-5 du code de la santé publique tend à créer dans chaque région une commission régionale de conciliation et d'indemnisation. Cette commission serait chargée de faciliter le règlement amiable des litiges relatifs aux accidents médicaux, aux affections iatrogènes et aux infections nosocomiales , ainsi que des autres litiges entre usagers et professionnels de santé, établissements de santé, services de santé ou organismes ou producteurs de produits de santé.

Une ordonnance du 24 avril 1996 a créé des commissions de conciliation à l'intérieur des établissements de santé. Le Gouvernement fait valoir, dans l'exposé des motifs du projet de loi, que ces commissions « n'ont pas réellement la possibilité de jouer un rôle de conciliation ».

Il a donc souhaité réorienter les missions des commissions internes aux établissements. L'article 8 du présent projet de loi prévoit que ces commissions auront désormais pour mission « de veiller au respect des droits des usagers et de contribuer à l'amélioration de la qualité de l'accueil des personnes malades et de leurs proches et de la prise en charge ». Ces commissions devraient faciliter les démarches de ces personnes et veiller à ce qu'elles puissent, le cas échéant, exprimer leurs griefs auprès des responsables de l'établissement, entendre les explications de ceux-ci et être informées des suites de leurs demandes.

Toute mission de conciliation ne semble donc pas exclue du rôle des commissions internes aux établissements tel qu'il est défini dans l'article 8 du projet de loi.

Dans ces conditions, il est possible de s'interroger sur l'opportunité d'une définition large des compétences des commissions régionales. Le règlement des accidents médicaux, affections iatrogènes et infections nosocomiales sera une mission lourde et difficile . Si les commissions régionales ne font pas preuve d'une efficacité immédiate, le nouveau système risque d'être lourd et plus complexe que le recours direct à la procédure judiciaire.

Dans leur rapport sur la responsabilité et l'indemnisation de l'aléa thérapeutique, dont le Gouvernement s'est inspiré pour l'élaboration du présent projet de loi, l'Inspection générale des affaires sociales et l'Inspection générale des services judiciaires avaient proposé la création de commissions régionales ou interrégionales « chargées de désigner les experts à la demande des victimes d'accidents thérapeutiques et de rendre un avis, après expertise, sur le régime d'indemnisation applicable aux accidents qui leur sont soumis ».

Une telle mission est considérable et votre commission n'est pas certaine que le choix de confier en outre à ces commissions une mission de conciliation pour les autres litiges entre patients et établissements soit pleinement réaliste.

Néanmoins, elle vous propose de ne pas modifier le projet de loi sur ce point, dès lors que ces commissions présentent l'avantage d'être extérieures aux établissements et pourraient donc, si elles en ont les moyens, jouer un rôle utile de conciliation pour certains litiges autres que les accidents médicaux.

Votre commission approuve pleinement la précision apportée par l'Assemblée nationale selon laquelle la commission régionale siège en formation de conciliation et en formation d'indemnisation. Ces deux formations permettront de distinguer plus clairement les missions des commissions régionales.

Article L. 1142-6 du code de la santé publique
Composition et fonctionnement des commissions régionales

Le texte proposé pour l'article L. 1142-6 du code de la santé publique prévoit que les commissions régionales sont présidées par un magistrat de l'ordre administratif ou un magistrat de l'ordre judiciaire, en activité ou honoraire. La composition des commissions et leurs règles de fonctionnement propres à garantir indépendance et impartialité seraient déterminées par décret en Conseil d'Etat, mais elles devraient, précise le projet de loi, comprendre notamment des représentants des personnes malades et des usagers du système de santé, des professionnels de santé et des responsables d'établissements et services de santé, ainsi que des membres représentant l'office d'indemnisation créé par le projet de loi et les entreprises d'assurance.

Le texte prévoit que les frais de fonctionnement des commissions régionales doivent être assurés par l'office d'indemnisation, qui devrait également mettre à la disposition des commissions le personnel nécessaire à leur fonctionnement.

Enfin, les membres des commissions et les personnes ayant connaissance des documents et informations qu'elles détiennent seraient tenus au secret professionnel dans les conditions prévues aux articles 236-13 et 226-14 du code pénal. L'article 226-13 punit d'un an d'emprisonnement et de 15.000 € d'amende la révélation d'une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire. L'article 226-14 prévoit des exceptions, notamment en ce qui concerne les personnes qui informent les autorités judiciaires, médicales ou administratives de punitions ou de sévices, y compris lorsqu'il s'agit d'atteintes sexuelles dont elles ont eues connaissance et qui ont été infligées à un mineur de quinze ans ou à une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son état physique ou psychique.

Article L.1142-7 du code de la santé publique
Saisine de la commission régionale

Le texte proposé pour l'article L. 1142-7 du code de la santé publique dispose que la commission régionale peut être saisie par toute personne « victime ou s'estimant victime » d'un dommage imputable à une activité de prévention, de diagnostic ou de soins, ou par ses ayants-droit si la personne est décédée ou, le cas échéant, par son représentant légal.

La saisine est donc aussi largement ouverte que possible. Votre commission vous soumet un amendement d'amélioration rédactionnelle de cette disposition.

Par un amendement , votre commission vous propose d'insérer dans cet article l'obligation pour la personne saisissant la commission d'indiquer sa qualité d'assuré social ainsi que les caisses de sécurité sociale auxquelles elle est affiliée pour les divers risques. La personne devrait indiquer également à la commission les prestations reçues ou à recevoir des autres tiers payeurs. Ces dispositions figurent actuellement dans le texte proposé pour un article relatif à l'expertise, ce qui ne paraît guère pertinent.

Le texte proposé prévoit que la saisine de la commission suspend les délais de prescription et de recours contentieux jusqu'au terme de la procédure. Cette disposition est parfaitement justifiée dès lors que la nouvelle procédure n'empêche en aucun cas les victimes d'accidents médicaux d'entamer une procédure judiciaire . La personne devrait informer respectueusement la commission des procédures juridictionnelles en cours et le juge de la saisine de la commission régionale. Aucune sanction du défaut d'information n'est cependant mentionnée.

Article L. 1142-8 du code de la santé publique
Avis de la commission régionale

Le texte proposé pour l'article L. 1142-8 du code de la santé publique prévoit que la commission régionale émet un avis sur les circonstances, les causes, la nature et l'étendue des dommages, ainsi que sur le régime d'indemnisation applicable.

Toutefois, cet avis n'est prévu que « lorsque les dommages subis présentent un caractère de gravité, fixé par décret en Conseil d'Etat, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles mesurée en tenant compte du taux d'incapacité permanente, ou du taux de la durée de l'incapacité temporaire ».

L'Assemblée nationale a souhaité préciser que « le caractère de gravité (...) est également apprécié au regard des conséquences sur la vie privée et professionnelle pour la personne concernée lorsque celles-ci sont d'une exceptionnelle gravité ». Ces dispositions peuvent susciter une certaine perplexité.

Assurément, il est inévitable aujourd'hui de limiter l'indemnisation de l'aléa médical aux cas les plus graves . Votre commission a adopté un amendement dans le texte proposé pour l'article L. 1142-1 précisant que l'indemnisation n'était possible que pour les dommages graves, dont elle a retenu une définition proche de celle qui figure dans le texte proposé pour le présent article L. 1142-8 du code de la santé.

En revanche, il paraît singulier d'écarter tout avis de la commission lorsque le caractère de gravité nécessaire pour obtenir une indemnisation n'est pas établi. Comment l'évaluation se fera-t-elle dans un tel contexte ? La commission se contentera-t-elle d'entériner les évaluations qui auraient pu être faites auparavant par les médecins des demandeurs ? Seule une expertise permet d'avoir une évaluation précise de la gravité des dommages.

Par ailleurs, est-il légitime d'écarter de la procédure amiable, par le biais du seuil de gravité, des personnes qui seraient victimes d'une faute médicale mais dont le dommage ne serait pas suffisamment grave ? Un tel système ne paraît pas pouvoir être retenu.

Votre commission vous propose, par un amendement , de réécrire entièrement le texte proposé pour l'article L. 1142-8 afin de prévoir les règles suivantes :

- possibilité pour la commission d'écarter les demandes qui ne rentrent manifestement pas dans le champ des principes de la loi (responsabilité des professionnels en cas de faute , indemnisation des dommages graves par la solidarité nationale en l'absence de faute ) ; un tel rejet de la demande ne priverait naturellement pas le demandeur de la possibilité d'agir en justice ;

- dans le cas contraire, avis de la commission portant :

• sur la nature, l'étendue et la gravité des dommages subis ;

• sur les circonstances et les causes de ces dommages ;

• sur le régime d'indemnisation éventuellement applicable.

Votre commission propose également d'inscrire dans cet article que l'avis doit être rendu dans un délai de deux mois, porté à six mois lorsqu'une expertise est ordonnée, et qu'il est transmis, ainsi que, le cas échéant, le rapport d'expertise, à la personne qui a saisi la commission, à toutes les personnes intéressées par le litige et à l'office d'indemnisation.

Votre commission propose en outre de mentionner que l'avis ne peut être contesté qu'à l'occasion de l'action en indemnisation introduite devant la juridiction compétente par la victime ou des actions subrogatoires que prévoit le projet de loi.

Ces différentes précisions figurent actuellement dans le texte proposé pour un article du code de la santé publique consacré par ailleurs à l'expertise. Votre commission estime plus opportun de les faire figurer dans l'article posant le principe d'un avis de la commission.

Enfin, votre commission propose de maintenir dans le texte proposé pour l'article L. 1142-8 la mention selon laquelle la commission régionale saisit l'autorité compétente lorsqu'elle constate des manquements susceptibles de donner lieu à des poursuites disciplinaires .

3. L'expertise médicale

Le projet de loi prévoit naturellement que l'avis des commissions régionales peut être précédé par une expertise. Il va cependant plus loin en procédant à une réforme des conditions d'accès au statut d'expert et en créant une commission nationale de l'expertise médicale . Pour que ces règles soient clairement identifiées dans le code de la santé publique, votre commission vous propose par un amendement de créer une section spécifiquement consacrée à l'expertise dans le nouveau chapitre du code de la santé publique relatif aux risques sanitaires résultant du fonctionnement du système de santé.

Article L.1142-9 du code de la santé publique
Possibilité pour la commission régionale
d'ordonner une expertise

Le texte proposé pour l'article L. 1142-9 du code de la santé publique mêle des dispositions relatives à l'expertise et plusieurs dispositions que votre commission a jugé préférable d'insérer dans d'autres articles (informations que la victime doit donner à la commission régionale, délai pour rendre l'avis, contestation de l'avis). Par deux amendements , votre commission vous en propose en conséquence la suppression.

En ce qui concerne l'expertise, le texte prévoit qu'avant d'émettre son avis, la commission peut diligenter une expertise, si elle l'estime nécessaire, et peut obtenir la communication de tout document, y compris d'ordre médical. Chaque partie concernée recevrait copie des demandes de documents formulées par la commission ainsi que tous les documents communiqués à celle-ci.

Dans leur rapport, l'IGAS et l'IGSJ avaient préconisé une expertise précontentieuse systématique tout en prévoyant une possibilité de mettre l'expertise à la charge du demandeur lorsqu'il apparaissait que sa demande ne relevait d'aucun régime d'indemnisation.

Le système retenu par le projet de loi, qui prévoit une expertise facultative mais jamais mise à la charge du demandeur, peut néanmoins être approuvé. Il pourra en effet arriver - rarement - qu'un cas soit particulièrement évident, tant en ce qui concerne la gravité des dommages que les causes et circonstances de ceux-ci. Il est donc utile de ménager la possibilité de ne pas recourir à l'expertise, même si celle-ci sera sans doute demandée le plus souvent.

Article L. 1142-10 du code de la santé publique
Commission nationale des accidents médicaux

Le texte proposé pour l'article L. 1142-10 du code de la santé publique prévoit la création d'une commission nationale des accidents médicaux placée auprès des ministres chargés de la justice et de la santé. Cette commission serait composée de professionnels de santé, de représentants d'usagers et de personnes qualifiées. Son président serait désigné par le ministre chargé de la justice et le ministre chargé de la santé.

Cette commission serait chargée :

- de prononcer l'inscription des experts sur une liste nationale d'experts en accidents médicaux après avoir procédé à une évaluation de leurs connaissances;

- d'assurer la formation des experts en matière de responsabilité médicale, dans des conditions définies par décret ;

- d'établir des recommandations sur la conduite des expertises , de veiller à une application homogène de la procédure par les commissions régionales et d'évaluer l'ensemble du dispositif dans le cadre d'un rapport remis chaque année au Gouvernement et au Parlement. Cette dernière mission est particulièrement importante. Il est particulièrement important qu'une « jurisprudence » des commissions régionales puisse progressivement s'établir afin d'éviter des saisines qui ne pourront se traduire que par des désillusions pour les demandeurs. Outre un amendement rédactionnel, votre commission vous soumet un amendement tendant à prévoir que le rapport sera remis avant le 15 octobre, afin qu'il puisse être débattu par le Parlement lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Votre commission vous soumet également un amendement tendant à prévoir que le rapport dresse la liste de l'ensemble des avis rendus par les commissions régionales et mentionne le nom des établissements concernés lorsque l'avis n'a pas fait l'objet de contestation. Il convient en effet que le nouveau système d'indemnisation s'accompagne d'un effort de transparence en ce qui concerne les accidents médicaux.

La composition et les règles de fonctionnement de la commission nationale des accidents médicaux seraient fixées par décret en Conseil d'Etat.

Article L.1142-11 du code de la santé publique
Inscription sur la liste des experts en accidents médicaux

Le texte proposé pour l'article L. 1142-11 du code de la santé publique définit les conditions d'établissement et de gestion de la nouvelle liste nationale des experts médicaux .

Actuellement, les règles relatives à l'expertise judiciaire sont déterminées par la loi n° 71-498 du 29 juin 1971 relative aux experts judiciaires . Cette loi prévoit que les juges peuvent, en matière civile, désigner en qualité d'expert toute personne de leur choix sous les seules restrictions prévues par la loi ou par les règlements.

Elle dispose également qu'il est établi chaque année une liste nationale dressée par le bureau de la Cour de cassation et une liste dressée par chaque cour d'appel , des experts en matière civile. Ces listes permettent aux experts concernés de se prévaloir de leur qualité d'expert agréé par la Cour de cassation ou d'experts agréés par la Cour d'appel.

Le choix des experts lors des contentieux relatifs aux accidents médicaux suscitent aujourd'hui de nombreuses critiques. Dans leur rapport sur la responsabilité et l'indemnisation de l'aléa thérapeutique, l'IGAS et l'IGSJ ont dressé un constat inquiétant de la situation de l'expertise judiciaire : « S'il faut se garder de toute généralisation, il est apparu à de nombreuses reprises, lors des auditions effectuées par la mission, que l'indépendance fonctionnelle ou la compétence technique des experts n'étaient pas toujours garanties par les modes actuels de sélection ni contrôlées avec une suffisante vigilance. On ne peut que s'interroger sur la liberté de langage d'un médecin expert spécialiste qui devra se prononcer sur la pratique professionnelle du confrère de la même spécialité qu'il côtoie géographiquement et avec lequel il entretient nécessairement des relations professionnelles pouvant le conduire à examiner les mêmes patients ou à partager la responsabilité d'un diagnostic ».

Le présent projet de loi prévoit que les médecins experts figurant depuis au moins trois ans sur une des listes instituées par la loi du 29 juin 1971 relative aux experts judiciaires peuvent demander à être inscrits sur la liste des experts en accidents médicaux s'ils justifient d'une qualification dont les modalités, comportent notamment une évaluation des connaissances et des pratiques professionnelles, sont fixées par décret en Conseil d'Etat. L'inscription vaudrait pour cinq ans et pourrait être renouvelée une fois, le renouvellement étant subordonné à une nouvelle évaluation des connaissances et pratiques professionnelles.

L'article 63 du projet de loi prévoit cependant une dérogation à la règle suivant laquelle seuls les médecins inscrits sur une des listes judiciaires pourraient figurer sur la liste nationale d'experts en accidents médicaux. Votre commission vous proposera de limiter l'étendue de la dérogation afin d'éviter que le présent dispositif de réforme de l'expertise soit vidé de sa substance.

La liste nationale actualisée serait adressée chaque année d'une part au Conseil d'Etat, aux cours administratives d'appel et aux tribunaux administratifs, d'autre part, à la Cour de cassation, aux cours d'appel et aux tribunaux de grande instance. Elle serait tenue à la disposition du public. On peut supposer que, sans y être contraintes, les juridictions seront conduites à choisir les experts dans cette nouvelle liste, offrant des garanties sérieuses, lorsqu'elles seront saisies d'affaires de responsabilité médicale.

Conformément à la règle qui prévaut pour les experts judiciaires, les personnes inscrites sur la liste nationale des experts en accidents médicaux ne pourraient faire état de leur qualité que sous la dénomination d'expert agréé par la commission nationale des accidents médicaux.

Enfin, une procédure de radiation est prévue en cas de manquement de l'expert à ses obligations, de faits contraires à l'honneur ou à la probité ou s'il n'est plus en mesure d'exercer normalement ses activités. La radiation serait prononcée par la commission nationale des accidents médicaux, sur demande ou après avis d'une commission régionale de conciliation. L'intéressé devrait être appelé à formuler ses observations. Le texte prévoit que la radiation d'une des listes prévues par la loi du 29 juin 1971 entraîne de plein droit radiation de la liste nationale des experts en accidents médicaux. Un expert pourrait également être radié à sa demande.

Votre commission vous soumet un amendement permettant à la commission nationale de prendre l'initiative d'une procédure de radiation d'un expert. Dans certains cas, des informations concernant certains experts pourraient émaner de juridictions et non d'une commission régionale. Or, dès lors que le projet de loi permet d'inscrire, à titre transitoire, sur la liste nationale des experts médicaux ne figurant pas sur les listes des experts judiciaires, ceux-ci ne pourraient, par définition, faire l'objet d'une radiation des listes prévues par la loi du 29 juin 1971.

Article L. 1142-12 du code de la santé publique
Déroulement de l'expertise

Le texte proposé pour l'article L. 1142-12 du code de la santé publique précise les conditions du déroulement de l'expertise, lorsqu'elle est ordonnée par une commission régionale :

- désignation d'un collège d'experts choisis sur la liste nationale des experts en accidents médicaux en s'assurant que ceux-ci remplissent toutes les conditions propres à garantir leur indépendance vis-à-vis des parties. La constitution d'une liste nationale permettra en particulier d'éviter des situations de proximité géographique ou relationnelle de l'expert avec une partie ;

- possibilité, lorsque cela est suffisant, de désigner un seul expert choisi sur la liste nationale ;

- lorsque la nature de préjudice le justifie, possibilité de nommer membre du collège d'experts un spécialiste figurant sur une des listes prévues par la loi du 29 juin 1971 ou même un expert choisi en dehors de toute liste. Une telle possibilité paraît acceptable, dès lors qu'elle ne pourra s'appliquer que dans les cas où un collège est désigné et non dans les cas où un expert unique est choisi ;

- fixation par la commission régionale de la mission du collège d'experts ou de l'expert et détermination du délai dans lequel le rapport doit être déposé ;

- information de l'office national d'indemnisation de la mission d'expertise ;

- possibilité pour le collège d'experts ou l'expert d'effectuer toute investigation et de demander la communication de tout document sans que puisse lui être opposé le secret médical ou professionnel ; soumission des experts au secret professionnel ; par un amendement , votre commission vous propose de préciser qu'en cas de carence des parties dans la transmission des documents, la commission régionale puisse autoriser l'expert à rendre son rapport en l'état et tenir compte de l'attitude des parties dans son avis ; cette disposition, destinée à encourager la coopération de toutes les parties à la procédure, est reprise de l'article 275 du nouveau code de procédure civile, qui prévoit un système similaire lorsqu'une action judiciaire est engagée ;

- déroulement contradictoire de l'expertise : les parties doivent être présentes ou dûment appelées. Elles peuvent être assistées d'une ou plusieurs personnes de leur choix. Le collège d'experts ou l'expert doit prendre en considération les observations des parties et joindre au rapport, sur leur demande, tous documents y afférents. L'avis d'un autre professionnel peut être recueilli ;

- prise en charge du coût des expertises par l'office d'indemnisation ; un remboursement est cependant possible lorsqu'une faute est établie et que l'assureur du professionnel de santé fait une offre à la victime ou que l'office exerce une action subrogatoire contre la personne responsable ou son assureur qui n'a pas fait d'offre d'indemnisation.

4. Indemnisation des victimes

Une section du nouveau chapitre du code de la santé relatif aux risques sanitaires résultant du fonctionnement du système de santé serait consacrée à l'indemnisation des victimes. Le texte distingue deux hypothèses :

- le cas où la commission régionale estime qu'une faute a été commise ;

- le cas où elle estime que l'indemnisation relève de la solidarité nationale.

Article L. 1142-14 du code de la santé publique
Règles d'indemnisation en cas de faute d'un professionnel
ou d'un établissement

Le texte proposé pour l'article L. 1142-14 du code de la santé publique définit les règles applicables lorsque la commission régionale estime que la responsabilité d'un professionnel de santé, d'un établissement ou d'un producteur d'un produit de santé est mise en cause.

Le texte prévoit que, lorsque la responsabilité d'un professionnel est engagée et que le caractère de gravité du dommage est constaté, l'assureur qui garantit la responsabilité civile ou administrative de la personne considérée comme responsable par la commission régionale adresse à la victime, dans un délai de quatre mois suivant la réception de l'avis, une offre d'indemnisation visant à la réparation intégrale des préjudices subis. En cas de décès de la victime, l'offre serait faite à ses ayants-droit.

Par trois amendements votre commission vous propose de simplifier la rédaction de ces dispositions et surtout d'exclure toute référence au caractère de gravité du dommage. Certes, en l'absence de faute, une indemnisation ne sera possible que pour des charges graves ; toutefois, lorsqu'il y a une faute, il est indispensable que la commission régionale puisse jouer son rôle et qu'une offre puisse être faite à la victime dans le cadre de la nouvelle procédure, quelle que soit la gravité du dommage . Il paraît anormal d'accueillir une demande, d'ordonner une expertise, de constater qu'une faute a été commise, mais de renvoyer la personne devant les juridictions au motif que le dommage subi ne serait pas assez grave.

Le texte proposé dispose que l'offre d'indemnisation doit indiquer l'évaluation retenue pour chaque chef de préjudice ainsi que le montant des indemnités qui revient à la victime, déduction faite des prestations qui donnent droit à un recours contre la personne tenue à réparation ou son assureur et des indemnités de toute nature reçues ou à recevoir d'autres débiteurs du chef du même préjudice.

Les prestations qui ouvrent droit à un recours des tiers payeurs sont énumérées à l'article 29 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation. Il s'agit notamment des prestations versées par les organismes, établissements et services gérant un régime obligatoire de sécurité sociale, ainsi que les salaires et accessoires du salaire maintenus par l'employeur pendant la période d'inactivité consécutive à l'événement qui a occasionné le dommage...

Le texte proposé dispose que l'assureur faisant une offre à la victime est tenu de rembourser à l'office d'indemnisation les frais d'expertise qu'il a supportés et que l'acceptation de l'offre de l'assureur vaut transaction.

En cas d'acceptation de l'offre, le paiement devrait intervenir dans le mois suivant l'acceptation par la victime , les sommes versées produisent intérêt au double du taux légal à compter de l'expiration de ce délai jusqu'au jour du paiement ou du jugement devenu définitif.

Si un assureur transigeait et estimait néanmoins que le dommage n'engageait pas la responsabilité de son assuré, il disposerait d'un recours subrogatoire contre le tiers effectivement responsable ou contre l'office national d'indemnisation en cas d'aléa médical.

La victime insatisfaite de l'offre de l'assureur pourrait engager une action en justice. Dans ce cadre, si le juge estimait que l'offre d'indemnisation a été manifestement insuffisante, il condamnerait l'assureur à verser à l'office d'indemnisation une somme au plus égale à 30 % de l'indemnité allouée.

Cette disposition est reprise du système prévu par la loi de 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation. Toutefois, la loi de 1985 prévoit que le juge peut condamner l'assureur à verser « une somme au plus égale à 15 % de l'indemnité allouée, sans préjudice des dommages et intérêts dus de ce fait à la victime ». Par un amendement , votre commission vous propose de retenir le même dispositif dans le présent projet de loi, dès lors qu'aucun motif ne paraît justifier des pénalités différentes en matière d'accidents médicaux et en matière d'accidents de la route.

L'Etat serait soumis aux mêmes obligations que les assureurs pour les activités de prévention, de diagnostic ou de soins qu'il exerce.

Article L. 1142-15 du code de la santé publique
Absence d'offre de l'assureur

Le texte proposé pour l'article L. 1142-15 du code de la santé publique concerne le cas dans lequel, malgré l'avis de la commission, l'assureur ne fait aucune offre ainsi que le cas de l'absence d'assurance du responsable. Dans ces situations, l'office d'indemnisation serait substitué à l'assureur .

Le projet de loi prévoit dans un tel cas que l'office présente à la victime une offre d'indemnisation, l'acceptation valant transaction. Il dispose également que l'office est alors subrogé dans les droits de la victime contre la personne responsable du danger ou son assureur .

En outre, en cas de silence ou de refus de la part de l'assureur de faire une offre, ou lorsque le responsable des dommages n'est pas assuré, le juge pourrait condamner l'assureur ou le responsable à verser à l'office d'indemnisation une somme au plus égale à 30 % de l'indemnité allouée. Pour les raisons énoncées lors de l'examen du texte proposé pour l'article L. 1142-14 du code de la santé publique, votre commission vous propose, par un amendement , de ramener à 15% de l'indemnité allouée le montant des pénalités auxquelles l'assureur pourrait être condamné.

Aux termes du texte proposé, en cas de transaction entre l'office et la victime, cette transaction serait opposable à l'assureur ou au responsable sauf contestation devant le juge du principe de la responsabilité ou du montant des sommes dues. En toute hypothèse, les sommes versées à la victime lui resteraient acquises .

Article L. 1142-16 du code la santé publique
Recours des tiers payeurs contre la victime

Le texte proposé pour l'article L. 1142-16 du code de la santé publique précise que lorsque la victime n'a pas informé la commission régionale des prestations reçues ou à recevoir des autres tiers payeurs que les caisses de sécurité sociale, ceux-ci disposent d'un recours contre la victime à concurrence de l'indemnité qu'elle a perçue de l'assureur ou de l'office au titre du même chef de préjudice.

Conformément à l'article 31 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation, les recours s'exerceraient dans les limites de la part d'indemnité qui répare l'atteinte à l'intégrité physique de la victime, à l'exclusion de la part d'indemnité de caractère personnel correspondant aux souffrances physiques ou morales par elle endurées et au préjudice esthétique et d'agrément ou, s'il y a lieu, de la part d'indemnité correspondant au préjudice moral des ayants droit.

Les tiers payeurs devraient agir dans un délai de deux ans à compter de la demande de versement des prestations.

Article L. 1142-17 du code de la santé publique
Règles d'indemnisation en l'absence de faute
d'un professionnel ou d'un établissement

Le texte proposé pour l'article L. 1142-17 du code de la santé publique vise l'hypothèse dans laquelle la commission régionale estime que le dommage est indemnisable au titre de l' aléa médical . Dans un tel cas, l'office jouerait le même rôle que l'assureur en cas de responsabilité d'un professionnel :

- offre d'indemnisation à la victime ou à ses ayants droit dans les quatre mois suivant la réception de l'avis ; votre commission vous soumet deux amendements d'amélioration rédactionnelle.

- indication dans l'offre d'indemnisation de l'évaluation retenue pour chaque chef de préjudice ainsi que du montant des indemnités qui reviennent à la victime, déduction faite des prestations pouvant donner lieu à recours à des tiers payeurs ;

- caractère provisionnel de l'offre en l'absence de consolidation de l'état de la victime ;

- caractère de transaction de l'acceptation de l'offre par la victime ;

- paiement dans le délai d'un mois à compter de la réception par l'office de l'acceptation par la victime de son offre ;

- possibilité pour l'office d'exercer une action subrogatoire s'il estime que la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme, ou d'un producteur de produits est engagée. Cette dernière disposition est particulièrement importante pour qu'une harmonisation des « jurisprudences » des commissions soit possible. Il convient d'éviter en effet que, dans un souci de simplification ou de conciliation, certaines commissions régionales soient tentées de retenir aussi souvent que possible l'hypothèse d'une indemnisation au titre de la solidarité nationale. Une telle évolution porterait gravement atteinte aux règles de la responsabilité civile, qui veulent que l'auteur d'une faute en assure la réparation.

Article L. 1142-18 du code de la santé publique
Accident médical ne résultant que partiellement d'une faute

Le texte proposé pour l'article L. 1142-18 du code de la santé publique vise l'hypothèse dans laquelle un accident relèverait pour partie seulement de la responsabilité d'un professionnel de santé. En pareil cas, la commission régionale devrait déterminer la part de préjudice imputable à la responsabilité et celle relevant d'une indemnisation au titre de l'office .

Article L. 1142-19 du code de la santé publique
Information par la victime de l'office et du juge

Le texte proposé pour l'article L. 1142-19 du code de la santé publique fait obligation à la victime d'informer respectivement l'office des procédures juridictionnelles en cours, le juge de la saisine de l'office. Une obligation similaire est prévue à l'égard de la commission régionale dans le texte proposé pour l'article L. 1142-7 du code de la santé publique.

Article L. 1142-20 du code de la santé publique
Absence d'offre de la part de l'office
ou refus de l'offre par la victime

Le texte proposé pour l'article L. 1142-20 du code de la santé publique permet à la victime ou à ses ayants droits d'agir en justice contre l'office si aucune offre ne lui a été présentée ou si elle n'a pas accepté l'offre qui lui a été faite. L'action serait engagée devant la juridiction compétente selon la nature du fait générateur du dommage.

Votre commission considère que l'hypothèse de l'absence d'offre de l'office peut être rappelée pour mémoire, mais qu'il est difficile d'imaginer qu'une telle situation se produise dès lors qu'une commission régionale aurait estimé qu'un dommage doit être indemnisé au titre de la solidarité nationale.

Article L. 1142-21 du code de la santé publique
Appel de l'office en qualité de défendeur
lorsqu'une juridiction est saisie

Le texte proposé pour l'article L. 1142-21 du code de la santé publique prévoit que lorsqu'une action judiciaire en indemnisation est engagée et que la procédure fait apparaître que les dommages relèvent de l'aléa médical et sont donc indemnisables au titre de la solidarité nationale, l'office d'indemnisation est appelé en la cause et devient défendeur en la procédure.

Article L.1142-22 du code de la santé publique
Statut et composition de l'office national d'indemnisation

Le texte proposé pour l'article L. 1142-22 du code de la santé publique définit le statut et la composition de l'office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales :

- il s'agira d'un établissement public à caractère administratif de l'Etat, placé sous la tutelle du ministre chargé de la santé,

- l'office aura pour mission l'indemnisation au titre de la solidarité nationale des aléas médicaux. Il se substituera également aux assureurs lorsque ceux-ci refuseront de faire une offre à la victime ou lorsqu'il apparaîtra que le responsable d'un dommage n'est pas assuré.

- l'office sera administré par un conseil d'administration comprenant, outre son président, pour moitié des représentants de l'Etat et pour moitié des personnalités qualifiées ainsi que des représentants des usagers, des professionnels et établissements de santé, des organismes d'assurance maladie et du personnel de l'office ;

- les agents de l'office seront régis par les règles actuellement applicables aux agents de l'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé ;

- enfin, les membres du conseil d'administration et le personnel de l'office seront tenus au secret professionnel comme les membres des commissions régionales et les experts.

Article L. 1142-23 du code de la santé publique
Charges et recettes de l'office national d'indemnisation

Le texte proposé pour l'article L. 1142-23 du code de la santé publique énumère les charges et recettes de l'office national d'indemnisation.

Il prévoit que les charges sont constituées par :

- le versement d'indemnités aux victimes ;

- les frais de gestion administrative de l'office et des commissions régionales ;

- les frais des expertises diligentées par les commissions.

L'étude d'impact du projet de loi, dont les évaluations sont toutes présentées en francs, évalue à 150 à 170 millions de francs ( 23 à 26 millions d'euros) le coût de fonctionnement de l'office d'indemnisation et des commissions régionales.

En ce qui concerne le coût des commissions régionales, il est évalué entre 20 et 25 millions de francs (entre 3 et 3,8 millions d'euros). Le Gouvernement estime qu'un effectif de 75 agents est envisageable « compte tenu de la possibilité de créer des commissions interrégionales ». Votre commission ne voit guère comment des commissions interrégionales pourraient être créées dès lors que le projet de loi dispose que « dans chaque région », une commission est chargée de faciliter le règlement des accidents médicaux. Le chiffre de 75 agents pour assurer le fonctionnement des commissions régionales paraît donc modeste.

En ce qui concerne l'office, ses frais de fonctionnement sont évalués à 10 à 15 millions de francs par an (1,5 à 2,3 millions d'euros).

La charge des expertises est évaluée à 200 millions de francs par an (30,5 millions d'euros), mais la charge réelle ne représenterait, selon le Gouvernement, que la moitié de cette somme, le reste étant récupéré sur les responsables des accidents ou leurs assureurs.

En ce qui concerne les indemnités proprement dites, l'étude d'impact fournit les éléments suivants : « A partir des données disponibles sur les déclarations de sinistres faites aux assureurs, et en tenant compte d'un effet d'appel plus ou moins important, la charge d'indemnisation des aléas peut être estimée à 1 à 1,5 milliard de francs (152,5 à 228,6 millions d'euros), pour un nombre total de dossiers reçus par les commissions (accidents fautifs, aléas et demandes hors champ) qui serait au maximum, selon une hypothèse très haute, de 10.000 ».

Le texte prévoit que les recettes de l'office sont constituées par :

- une dotation globale émanant de l'assurance maladie , dont les modalités de fixation et de réunion sont déterminées par décret en Conseil d'Etat ;

- le produit des remboursements des frais d'expertise ;

- le produit des pénalités qui pourront être infligées par le juge aux assureurs ;

- le produit des recours subrogatoires que peut exercer l'office.

Article L. 1142-24 du code de la santé publique
Règle de non cumul d'indemnités

Le texte proposé pour l'article L. 1142-24 du code de la santé publique prévoit que les indemnités accordées au titre des risques sanitaires ne peuvent se cumuler avec celles versées par le fonds d'indemnisation des transfusés et des hémophiles pour les mêmes préjudices.

5. Dispositions pénales

Le projet de loi tend à consacrer aux dispositions pénales une section du nouveau chapitre du code de la santé publique relatif aux risques sanitaires résultant du fonctionnement du système de santé.

Article L. 1142-25 du code de la santé publique
Sanction du non-respect de l'obligation d'assurance

Le texte proposé pour l'article L. 1142-25 du code de la santé publique punit de 45.000 € le fait pour les professionnels et établissements de santé de manquer à l'obligation d'assurance prévue dans le texte proposé pour l'article L. 1142-2 du code de la santé publique.

Le texte précise que les personnes physiques encourent également la peine complémentaire d'interdiction d'exercer l'activité professionnelle ou sociale dans l'exercice de laquelle l'infraction a été commise. Conformément à l'article 131-27 du code pénal, la peine pourrait être prononcée à titre définitif ou pour une durée ne pouvant excéder cinq ans.

Article L. 1142-26 du code de la santé publique
Responsabilité pénale des personnes morales

Le texte proposé pour l'article L. 1142-26 du code de la santé publique prévoit la responsabilité pénale des personnes morales pour le délit d'absence d'assurance prévu dans le texte proposé pour l'article L. 1142-25 du code de la santé publique. Les peines encourues seraient l'amende (dont le montant pourrait atteindre, conformément aux dispositions de l'article 131-38 du code pénal, le quintuple de celui prévu pour les personnes physiques) et l'interdiction d'exercer l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de laquelle l'infraction a été commise.

Article L. 1142-27 du code de la santé publique
Sanction de l'usurpation de la qualité d'expert agréé

Le texte proposé pour l'article L. 1142-27 du code de la santé publique tend à réparer le fait de se prévaloir à tort de la qualité d'expert agréé par la commission nationale des accidents médicaux ou d'une dénomination présentant une ressemblance de nature à causer dans l'esprit du public une méprise. Cette infraction serait punie d'un an d'emprisonnement et de 15.000 € d'amende, conformément aux peines prévues par l'article 433-17 du code pénal pour usurpation de titres.

Une disposition similaire figure dans la loi du 29 juin 1971 relative aux experts judiciaires pour punir les personnes utilisant à tort les dénominations d'expert agréé par la Cour de cassation ou d'expert agréé par la cour d'appel.

6. Prescription

Après le texte proposé pour l'article L. 1142-27, votre commission vous propose, par un amendement , d'insérer une section additionnelle dans le chapitre du code de la santé publique consacré aux risques sanitaires résultant du fonctionnement du système de santé, afin d'inscrire dans le code de la santé publique les règles relatives à la prescription que l'Assemblée nationale a inscrite, sans les codifier, à l'article 58 ter du présent projet de loi.

Votre commission vous propose de préciser que les actions tendant à mettre en cause la responsabilité des professionnels de santé ou des établissements de santé publics ou privés à l'occasion d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins se prescrivent par dix ans à compter de la consolidation du dommage .

Rappelons qu'actuellement la prescription est de trente ans lorsqu'est en cause un établissement privé ou un professionnel libéral et de quatre ans lorsqu'est en cause un établissement public. Une telle différence est très choquante. Dès lors que le projet de loi ne procède pas à l'unification du contentieux de la responsabilité médicale, il paraît au moins nécessaire d'unifier les règles de prescription.

La durée de dix ans retenue par l'Assemblée nationale correspond à celle recommandée par le Sénat lors de la discussion de la proposition de loi de notre ancien collègue M. Claude Huriet relative à l'indemnisation de l'aléa médical et à la responsabilité médicale.

Votre commission des Lois considère simplement qu'une règle aussi importante doit être codifiée, raison pour laquelle elle propose, par amendement , son transfert dans le code de la santé publique.

C. DISPOSITIONS COMMUNES

Le projet de loi tend à insérer dans le nouveau titre du code de la santé publique consacré à la réparation des conséquences des risques sanitaires un troisième chapitre relatif aux dispositions communes et composé d'un unique article.

Article L. 1142-28 du code de la santé publique
Dispositions réglementaires d'application

Le texte proposé pour l'article L. 1142-28 du code de la santé publique prévoit que les modalités d'application du nouveau titre du code de la santé publique sont déterminées, sauf dispositions contraires, par décret en Conseil d'Etat.

Cette disposition peut laisser perplexe dès lors que sept décrets en Conseil d'Etat sont déjà prévus dans les différents textes proposés pour les articles du nouveau titre. Cette disposition ultime est peut-être de précaution...

Article 58 bis
(art. L. 133-1 nouveau du code des annexes)
Codification dans le code des assurances des règles relatives
aux tests génétiques et aux risques aggravés

Cet article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale, tend à insérer dans le titre III du livre 1 er du code des assurances, consacré aux règles relatives aux assurances de personnes et aux opérations de capitalisation, un chapitre III intitulé : « Accès à l'assurance contre les risques d'invalidité ou de décès ».

Ce chapitre comporterait un unique article L. 133-1 dans lequel seraient reproduits les articles L. 1141-1, L. 1141-2 et L. 1141-3 du code de la santé publique relatifs aux tests génétiques et à l'assurance des personnes exposées à un risque aggravé. Ces dispositions ont été examinées à l'article 58 du projet de loi.

Le rapporteur de l'Assemblée nationale, M. Claude Evin a estimé souhaitable que ces dispositions du code de la santé publique figurent également dans le code des assurances, en tant que « code suiveur » du code de la santé publique en cette matière.

Article 58 ter
Prescription en matière de responsabilité médicale

Cet article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale, tend à unifier les règles de prescription en matière de responsabilité médicale. La durée de la prescription est actuellement de trente ans lorsqu'est en cause un établissement privé ou un professionnel libéral et de quatre ans lorsqu'est en cause un établissement public. Le présent article prévoit une durée unique de dix ans.

Votre commission ayant décidé, à l'article 58, de codifier cette disposition dans le code de la santé publique, elle vous propose la suppression du présent article.

Article 59
(art. L. 251-1 à L. 252-2 nouveaux du code des assurances)
Obligation d'assurance et rôle
du bureau central de tarification

Cet article tend à inscrire dans le code des assurances les règles relatives à l'assurance obligatoire des professionnels de santé définies dans le code de la santé publique. Il prévoit en outre le recours à un bureau central de tarification lorsqu'un professionnel ne parvient pas à s'assurer.

Formellement, cet article vise à insérer dans le livre II du code des assurances (Assurances obligatoires) un titre V consacré à l'assurance de responsabilité médicale. Ce titre comporterait deux chapitres respectivement consacrés à l'obligation de s'assurer et au bureau central de tarification.

1. L'obligation de s'assurer

Le chapitre 1 er du nouveau titre du code des assurances relatif à l'assurance de responsabilité civile médicale ne comporterait qu'un unique article, numéroté L. 251-1.

Article L.251-1 du code des assurances
Reprise dans le code des assurances des dispositions
sur l'assurance obligatoire des professionnels de santé

Le texte proposé pour l'article L. 251-1 du code des assurances tend à reproduire dans ce code le texte proposé par l'article 58 du projet de loi pour l'article L. 1142-2 du code de la santé publique, qui prévoit l'obligation pour tous les professionnels et établissements de santé de souscrire une assurance de responsabilité civile. Ces dispositions ont été présentées lors de l'examen de l'article 58. Il paraît opportun qu'elles figurent à la fois dans le code de la santé publique et dans le code des assurances. Votre commission vous soumet deux amendements de coordination.

2. Le bureau central de tarification

Le chapitre II du nouveau titre du code des assurances relatif à l'assurance de responsabilité civile serait consacré au bureau central de tarification et comporterait deux articles numérotés L. 252-1 et L. 252-2.

Article L.252-1 du code de la santé publique
Bureau central de tarification
en matière d'assurance médicale

Le texte proposé pour l'article L. 252-1 du code des assurances permet aux professionnels de santé assujettis à l'obligation d'assurance prévue par le code de la santé publique qui se voient opposer deux refus de la part d'une entreprise concernant les risques de responsabilité civile en matière médicale de saisir un bureau central de tarification. Les conditions de constitution de ce bureau et ses règles de fonctionnement seraient fixées par décret en Conseil d'Etat.

Le texte prévoit que le bureau a pour rôle exclusif de fixer le montant de la prime moyennant laquelle l'entreprise d'assurance est tenue de garantir le risque qui lui a été proposé.

Néanmoins, le bureau central de tarification pourrait également déterminer le montant d'une franchise restant à la charge de l'assuré.

Dans son troisième alinéa, le texte proposé par l'article L. 252-1 proscrit, à peine de nullité, toute clause des traités de réassurance tendant à exclure certains risques de la garantie de réassurance en raison de la tarification adoptée par le bureau central de tarification.

Il s'agit donc de faire en sorte que l'obligation d'assurance proposée par le projet de loi pour les professionnels de santé puise être mise en oeuvre en toutes circonstances. Le recours au bureau central de tarification doit permettre à tout professionnel de souscrire une assurance garantissant sa responsabilité civile en raison de dommages subis par des tiers dans le cadre d'activités de prévention, de diagnostic ou de soins .

Votre commission approuve ces dispositions. Elle s'inquiète néanmoins du risque qu'un tel système permette en toute hypothèse à des professionnels qui seraient concernés de manière répétée par des accidents médicaux de continuer à souscrire une assurance et donc à exercer.

Par un amendement , votre commission vous propose que le bureau central de tarification puisse saisir le préfet de la situation de personnes qui présenteraient un risque d'assurance particulièrement élevé. Le présent projet de loi permet en effet au préfet de suspendre immédiatement un praticien dont l'activité serait susceptible de mettre en danger ses patients.

Article L. 252-2 du code des assurances
Sanction du refus d'assurer

Le texte proposé pour l'article L. 252-2 du code des assurances prévoit que toute entreprise qui maintient son refus de garantir le risque dont la prime a été fixée par le bureau central de tarification est considérée comme ne fonctionnant plus conformément à la réglementation en vigueur.

Dans une telle situation, les entreprises qui doivent obtenir un agrément pour exercer certaines activités pourraient se voir privées de cet agrément. Les entreprises exerçant en France en libre prestation de services, sans qu'un agrément soit nécessaire, pourraient faire l'objet de sanctions prononcées par la commission de contrôle des assurances, qui pourrait interdire à l'entreprise de conclure des contrats en libre prestation de services sur le territoire français.

Article 60
Date d'applicabilité des dispositions relatives
aux accidents médicaux, aux affections iatrogènes
et aux infections nosocomiales

Cet article prévoit que les nouvelles dispositions relatives aux accidents médicaux s'appliqueront aux accidents médicaux, affections iatrogènes et infections nosocomiales survenus à la suite d'activités de prévention, de diagnostic ou de soins réalisées au plus tôt six mois avant la publication de la loi , qu'une action judiciaire ait ou non été engagée.

Cela signifie que tous les accidents survenus plus de six mois avant la publication de la loi et pour lesquels une procédure est en cours ne pourront se voir appliquées les nouvelles règles définies par le projet de loi.

L'interdiction de tenir compte des résultats de l'examen des caractéristiques génétiques d'une personne, dans le cadre des contrats d'assurance, s'appliquerait aux contrats en cours à la date de parution de la loi .

Article 61
Présomption d'imputabilité de contamination
par le virus de l'hépatite C

Cet article crée une présomption d'imputabilité d'une contamination par le virus de l'hépatite C à une transfusion sanguine ou à une injection de produits dérivés du sang pour la période antérieure à l'entrée en vigueur de la loi.

Concrètement, le demandeur devrait apporter des éléments laissant supposer que la contamination a pour origine une transfusion de produits sanguins ou une injection de médicaments dérivés du sang. Il incomberait alors à la partie défenderesse de prouver que la transfusion ou l'injection n'est pas à l'origine de la contamination.

1. Une connaissance encore imparfaite de l'hépatite C et de ses conséquences

Dans leur rapport sur la responsabilité et l'indemnisation de l'aléa thérapeutique, l'IGAS et l'IGSS ont présenté les principales données disponibles à propos de l'hépatite C.

On estimait, en 1995, que 500.000 à 650.000 personnes étaient séropositives au virus de l'hépatite C, dont 80 % étaient porteuses du virus, parmi lesquelles plus de la moitié ignoraient leur statut sérologique.

Les principaux modes de contamination sont :

- la transmission par voie transfusionnelle (le risque était très important jusqu'en 1989 faute de test de dépistage) ;

- la transmission par toxicomanie intraveineuse , dont on considérait en 1995 qu'elle représentait de 20 à 30 % des contaminations estimées ;

- la transmission nosocomiale .

L'évolution de la maladie est très variable selon les individus et dépend notamment de l'association éventuelle de la contamination à d'autres co-facteurs d'atteinte hépatique tels que la co-infection, par d'autres voies, l'âge au moment de la contamination, une alcoolisation excessive...

2. Le traitement juridictionnel du contentieux des contaminations transfusionnelles

Actuellement, les deux ordres de juridiction admettent une responsabilité sans faute des établissements de transfusion sanguine, quelle que soit la date de contamination.

Le lien de causalité est presque toujours considéré comme établi lorsque l'enquête post-transfusionnelle pratiquée dans toutes les expertises permet d'établir la séropositivité de l'un des donneurs. Lorsque tel n'est pas le cas, les juridictions considéraient jusque récemment que ce lien pouvait être considéré comme établi à partir de présomptions graves, précises et concordantes. Ces présomptions tenaient pour l'essentiel à l'importance en volume des produits transfusés, aux caractéristiques -notamment de dates- de l'apparition des troubles hépatiques, et à l'existence ou à l'absence d'autres facteurs de risques.

Par un arrêt du 9 mai 2001, la Cour de cassation a encore facilité l'action de la victime en considérant que lorsqu'une personne démontre que la contamination dont elle est atteinte est survenue à la suite de transfusions sanguines et qu'elle ne présente aucun mode de contamination qui lui soit propre, il appartient au centre de transfusion sanguine de prouver que les produits sanguins qu'il a fournis étaient exempts de vices.

Malgré cette jurisprudence favorable, les victimes n'en rencontrent pas moins des difficultés de preuve importantes, compte tenu notamment de l'ancienneté des transfusions incriminées.

En ce qui concerne les principes et modalités d'évaluation des préjudices, les juridictions judiciaires et administratives ne retiennent pas le principe d'un préjudice spécifique de contamination similaire à celui consacré en matière de contamination par le VIH. Le Conseil d'Etat accepte cependant l'indemnisation du préjudice personnel résultant des troubles dans les conditions d'existence occasionnés par la contamination ; la Cour de cassation admet l'indemnisation du préjudice moral -résultant de l'anxiété induite par la nécessité d'une surveillance médicale stricte et régulière- dès le stade de la séroconversion, sans qu'il soit besoin d'attendre les manifestations pathologiques de l'infection.

3. Un progrès limité

Le texte proposé dans le projet de loi, en inversant la charge de la preuve, facilitera à l'avenir l'action des personnes victimes d'une contamination transfusionnelle par le virus de l'hépatite C.

Toutefois, les deux ordres de juridiction ayant d'ores et déjà procédé récemment à ce renversement de la charge de la preuve, le texte proposé ne vient que confirmer cette évolution.

Il est possible de se demander si une prise en charge par la solidarité nationale de l'indemnisation des personnes contaminées par ce virus n'aurait pas été préférable. Il semble cependant, d'après les explications données par le Gouvernement à l'Assemblée nationale, qu'une telle solution ne soit guère envisageable, pour des raisons financières. Les multiples incertitudes relatives aux modes de contamination comme à l'évolution de la maladie rendent difficile la prise en charge par un fonds de l'indemnisation des personnes contaminées.

Article 62
(article L. 3111-9 du code de la santé publique)
Réparation des dommages imputables
à une vaccination obligatoire

Dans sa rédaction actuelle, l'article L. 3111-9 du code de la santé publique prévoit que la réparation d'un dommage imputable à une vaccination obligatoire est supportée par l'Etat, sans préjudice des actions qui pourraient être exercées conformément au droit commun.

Le présent article tend à compléter cette disposition pour prévoir que la réparation est versée pour le compte de l'Etat par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales dans des conditions définies par une convention conclue entre l'Etat et l'office.

Article 63
Dérogation en matière d'inscription sur la liste nationale
d'experts en accidents médicaux

Le présent projet de loi tend à modifier certaines règles relatives à l'expertise en matière médicale. Il prévoit en particulier qu'une commission nationale procédera à l'inscription des experts sur une liste nationale d'experts en accidents médicaux. La commission ne pourrait inscrire sur cette liste, après évaluation de leurs connaissances et pratiques professionnelles, que des experts figurant depuis trois ans sur la liste d'experts dressée par la Cour de cassation ou sur une liste dressée par une Cour d'appel.

Le présent article prévoit néanmoins un dispositif dérogatoire puisqu'il tend à permettre à la commission nationale, pendant une période de trois ans, d'inscrire sur la liste nationale d'experts en accidents médicaux des experts ne figurant sur aucune des listes établies par les juridictions. Cette inscription serait possible en raison de la qualification particulière de certains experts.

A l'issue du délai de trois ans, ces experts devraient figurer sur une liste établie par une juridiction pour pouvoir continuer à figurer sur la liste nationale d'experts en accidents médicaux.

Votre commission craint qu'une dérogation aussi large ne vide largement de sa substance la réforme de l'expertise prévue par le présent projet de loi. Par trois amendements , elle propose :

- que le délai prévu pour inscrire sur la liste nationale des experts ne figurant sur aucune liste soit ramené à un an ;

- que l'inscription de ces experts soit à tout le moins précédée d'une évaluation de leurs connaissances et de leurs pratiques professionnelles ;

- que le délai à l'issue duquel ces experts devront figurer sur l'une des listes établies par les juridictions soit ramené à deux ans.

Article additionnel après l'article 63
Création d'un Observatoire de l'accueil
et de l'intégration des handicapés

Par un article additionnel , votre commission vous propose de prévoir la création d'un Observatoire de l'accueil et de l'intégration des handicapés. Cette disposition figure en effet dans la proposition de loi relative à la solidarité nationale et à l'indemnisation des handicaps congénitaux adoptée par l'Assemblée nationale.

Dès lors que cette proposition de loi a vocation à être intégrée dans le présent projet de loi, il convient de prévoir dans ce texte la création de l'Observatoire, qui pourra avoir une grande utilité pour formuler des propositions susceptibles d'améliorer les conditions dans lesquelles la collectivité nationale apporte son soutien aux personnes handicapées.

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Sous le bénéfice de ces observations et des amendements qu'elle a adoptés, votre commission a donné un avis favorable à l'adoption des dispositions du projet de loi dont elle est saisie.

ANNEXE


AMENDEMENTS PRÉSENTÉS
PAR VOTRE COMMISSION DES LOIS

~~~

AMENDEMENTS PRÉSENTÉS
PAR VOTRE COMMISSION DES LOIS

- : -

Article additionnel après l'article 5

Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

«Après l'article 720-1 du code de procédure pénale, il est inséré un article 720-1-1 ainsi rédigé :

«Art. 720-1-1.- La suspension peut également être ordonnée, quelle que soit la nature de la peine ou la durée de la peine restant à subir, et pour une durée qui n'a pas à être déterminée, pour les condamnés dont il est établi par deux expertises médicales distinctes concordantes, qu'ils sont atteints soit d'une maladie mettant en jeu le pronostic vital, soit d'une maladie qui est durablement incompatible avec le maintien en détention.

«Cette suspension est ordonnée, après avis du ministère public, par décision motivée du juge de l'application des peines pour les peines d'une durée inférieure ou égale à dix ans d'emprisonnement ou pour lesquelles la durée de la détention restant à subir est inférieure ou égale à trois ans et de la chambre régionale de la libération conditionnelle dans les autres cas.

«Le juge de l'application des peines peut à tout moment ordonner une expertise médicale à l'égard d'un condamné ayant bénéficié d'une mesure de suspension de peine en application du présent article, et ordonner qu'il soit mis fin à la suspension si les conditions de celle-ci ne sont plus remplies.

«Les dispositions de l'article 720-2 ne sont pas applicables lorsqu'il est fait application des dispositions du présent article.»

Article 58
(art. L. 1141-1 du code de la santé publique)

Supprimer le second alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 1141-1 du code de la santé publique.

Article 58
(art. L. 1142-1 du code de la santé publique)

Après les mots :

qu'en cas de faute

supprimer la fin du texte proposé par cet article pour le I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique.

Article 58
(art. L. 1142-1 du code de la santé publique)

Après le texte proposé par cet article pour le I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, insérer un alinéa ainsi rédigé :

«Toutefois, les établissements de santé sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère».

Article 58
(art. L. 1142-1 du code de la santé publique)

Dans le texte proposé par cet article pour le II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, après les mots :

une affection iatrogène

insérer les mots :

ou une infection nosocomiale

Article 58
(art. L. 1142-1 du code de la santé publique)

A la fin du texte proposé par cet article pour le II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, remplacer les mots :

et présentant le caractère de gravité prévu aux deux premiers alinéas de l'article L. 1142-8

par les mots :

et présentent un caractère de gravité, fixé par décret en Conseil d'Etat, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'incapacité permanente ou du taux et de la durée de l'incapacité temporaire.

Article 58
(art. L. 1142-1 du code de la santé publique)

I.- Après le texte proposé par cet article pour l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, insérer un article ainsi rédigé :

« Art.   .- Nul ne peut se prévaloir d'un préjudice du seul fait d'être né handicapé.

« La personne atteinte d'un handicap dû à une faute médicale survenue à l'occasion de la grossesse de sa mère peut obtenir la réparation de son préjudice lorsque l'acte fautif a provoqué directement le handicap, l'a aggravé ou n'a pas permis de prendre les mesures susceptibles de l'atténuer.

« Lorsque la responsabilité d'un professionnel ou d'un établissement de santé est engagée à l'égard des parents d'une personne atteinte d'un handicap d'une particulière gravité non décelé pendant la grossesse du fait d'une faute lourde ayant privé la mère de la possibilité de recourir à une interruption de grossesse, les père et mère  peuvent obtenir une indemnité, qui prend la forme d'une rente, correspondant aux charges particulières découlant, tout au long de la vie de cette personne, de son handicap, déduction faite du montant des allocations et prestations de toute nature, dont cette personne bénéficie au titre de la solidarité nationale ou de la sécurité sociale. Les organismes sociaux ne peuvent exercer de recours à l'encontre de l'auteur de la faute pour obtenir le remboursement des allocations et prestations concernées.

« L'indemnité doit être gérée dans l'intérêt exclusif de la personne handicapée. Si elle n'est pas utilisée à cette fin, tout intéressé peut saisir le juge des tutelles à l'effet de voir désigné un administrateur ad hoc chargé de gérer cette indemnité.

« L'indemnité mentionnée au présent article est incessible et insaisissable. En cas de prédécès des parents, elle n'est transmise qu'à la personne handicapée à laquelle elle est affectée. Elle est exonérée de droits de mutation.

« Les dispositions du présent article sont applicables aux instances en cours, à l'exception de celles où il a été définitivement statué sur le principe de l'indemnisation. »

II.- La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'exonération des droits de mutation prévue au I est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Article 58
(art. L. 1142-2 du code de la santé publique)

Après le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 1142-2 du code de la santé publique, insérer un alinéa ainsi rédigé :

«Les contrats d'assurance souscrits en application de l'alinéa précédent peuvent comporter des limitations quant aux montants et à la durée de la garantie. Les limitations minimales de garanties sont fixées par décret en Conseil d'Etat.»

Article 58
(art. L. 1142-2 du code de la santé publique)

A la fin du second alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 1142-2 du code de la santé publique, remplacer les mots :

à l'alinéa précédent

par les mots :

au premier alinéa

Article 58
(art. L. 1142-3 du code de la santé publique)

Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L 1142-3 du code de la santé publique, remplacer la référence :

L. 1127-7

par la référence

L. 1121-7

Article 58
(art. L. 1142-4 du code de la santé publique)

A la fin du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 1142-4 du code de la santé publique, remplacer les mots :

de cet accident

par les mots :

de ce dommage

Article 58
(art. L. 1142-7 du code de la santé publique)

Rédiger comme suit le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 1142-7 du code de la santé publique :

«Art. L. 1142-7.- La commission régionale peut être saisie par toute personne s'estimant victime d'un dommage imputable à une activité de prévention, de diagnostic ou de soins, ou, le cas échéant, par son représentant légal. Elle peut également être saisie par les ayants droit d'une personne décédée à la suite d'un acte de prévention, de diagnostic ou de soins.»

Article 58
(art. L. 1142-7 du code de la santé publique)

Après le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 1142-7 du code de la santé publique, insérer un alinéa ainsi rédigé :

«La personne indique sa qualité d'assuré social ainsi que les caisses de sécurité sociale auxquelles elle est affiliée pour les divers risques. Elle indique également à la commission les prestations reçues ou à recevoir des autres tiers payeurs du chef du dommage qu'elle a subi.

Article 58
(art. L. 1142-8 du code de la santé publique)

Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour l'article L. 1142-8 du code de la santé publique :

«Art. L. 1142-8.- Lorsqu'une saisine ne répond manifestement pas aux conditions posées par l'article L. 1142-1, la commission régionale la déclare irrecevable.

«Dans le cas contraire, la commission rend un avis :

«- sur la nature, l'étendue et la gravité des dommages subis ;

«- sur les circonstances et les causes de ces dommages ;

«- sur le régime d'indemnisation éventuellement applicable.

«L'avis de la commission est émis dans un délai de deux mois porté à six mois lorsqu'une expertise est ordonnée, à compter de sa saisine. Cet avis ainsi que, le cas échéant, le rapport d'expertise sont transmis à la personne qui l'a saisie, à toutes les personnes intéressées par le litige ainsi qu'à l'office institué à l'article L. 1142-22.

«L'avis ne peut être contesté qu'à l'occasion de l'action en indemnisation introduite devant la juridiction compétente par la victime ou des actions subrogatoires prévues aux articles L. 1142-14, L. 1142-15 et L. 1142-17.

«La commission saisit l'autorité compétente lorsqu'elle constate des manquements susceptibles de donner lieu à des poursuites disciplinaires.»

Article 58
(art. L. 1142-9 du code de la santé publique)

Avant le texte proposé par cet article pour l'article L. 1142-9 du code de la santé publique, insérer une division additionnelle ainsi rédigée :

«Section ...

«Procédure d'expertise en matière d'accidents médicaux»

Article 58
(art. L. 1142-9 du code de la santé publique)

Supprimer le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 1142-9 du code de la santé publique.

Article 58
(art. L. 1142-9 du code de la santé publique)

Supprimer les deux derniers alinéas du texte proposé par cet article pour l'article L. 1142-9 du code de la santé publique.

Article 58
(art. L. 1142-10 du code de la santé publique)

Au début du texte proposé par cet article pour le deuxième alinéa de l'article L. 1142-10 du code de la santé publique, remplacer le mot :

Elle

par les mots :

La commission nationale des accidents médicaux

Article 58
(art. L. 1142-10 du code de la santé publique)

Dans le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 1142-10 du code de la santé publique, après les mots :

chaque année

insérer les mots :

avant le 15 octobre

Article 58
(art. L. 1142-10 du code de la santé publique)

Compléter le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 1142-10 du code de la santé publique par une phrase ainsi rédigée :

Ce rapport dresse la liste de l'ensemble des avis rendus par les commissions régionales et mentionne le nom des établissements concernés lorsque l'avis n'a pas fait l'objet de contestation.

Article 58
(art. L. 1142-11 du code de la santé publique)

Dans le dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 1142-11 du code de la santé publique, après les mots :

commission nationale des accidents médicaux peut,

insérer les mots :

de sa propre initiative,

Article 58
(art. L. 1142-12 du code de la santé publique)

Après le cinquième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 1142-12 du code de la santé publique, insérer un alinéa ainsi rédigé :

«En cas de carence des parties dans la transmission des documents demandés, la commission régionale peut autoriser le collège d'experts ou l'expert à déposer son rapport en l'état. La commission peut tirer toute conséquence du défaut de communication des documents".

Article 58
(art. L. 1142-14 du code de la santé publique)

Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 1142-14 du code de la santé publique, après les mots :

qu'un dommage

supprimer les mots :

relevant du premier alinéa de l'article L. 1142-8

Article 58
(art. L. 1142-14 du code de la santé publique)

Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 1142-14 du code de la santé publique, après les mots :

à la victime

insérer les mots :

ou à ses ayants-droit

Article 58
(art. L. 1142-14 du code de la santé publique)

Supprimer le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 1142-14 du code de la santé publique.

Article 58
(art. L. 1142-14 du code de la santé publique)

A la fin de l'avant-dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 1142-14 du code de la santé publique, remplacer les mots :

au plus égale à 30 % de l'indemnité allouée

par les mots :

au plus égale à 15 % de l'indemnité qu'il alloue, sans préjudice des dommages et intérêts dus de ce fait à la victime.

Article 58
(art. L. 1142-15 du code de la santé publique)

A la fin de l'avant-dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 1142-15 du code de la santé publique, remplacer les mots :

au plus égale  30 % de l'indemnité allouée par le juge

par les mots :

au plus égale à 15 % de l'indemnité qu'il alloue.

Article 58
(art. L. 1142-17 du code de la santé publique)

Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 1142-17 du code de la santé publique, après les mots :

à la victime

insérer les mots :

ou à ses ayants-droit

Article 58
(art. L. 1142-17 du code de la santé publique)

Supprimer le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 1142-17 du code de la santé publique.

Article 58
(art. L. 1142-27 du code de la santé publique)

Après le texte proposé par cet article pour l'article L. 1142-27 du code de la santé publique, insérer une division additionnelle ainsi rédigée :

«Section ...

«Prescription en matière de responsabilité médicale

«Art......- Les actions tendant à mettre en cause la responsabilité des professionnels de santé ou des établissements de santé publics ou privés à l'occasion d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins se prescrivent par dix ans à compter de la consolidation du dommage.»

Article 58 Ter

Supprimer cet article.

Article 59
(art. L. 251-1 du code de la santé publique)

Après le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 251-1 du code des assurances, insérer un alinéa ainsi rédigé :

"Les contrats d'assurance souscrits en application de l'alinéa précédent peuvent comporter des limitations quant aux montants et à la durée de la garantie. Les limitations minimales de garanties sont fixées par décret en Conseil d'Etat."

Article 59
(art. L. 251-1 du code des assurances)

A la fin du dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 251-1 du code des assurances, remplacer les mots :

à l'alinéa précédent

par les mots :

au premier alinéa

Article 59
(art. L. 252-1 du code des assurances)

Après le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 252-1 du code des assurances, insérer un alinéa ainsi rédigé :

«Le bureau central de tarification saisit le représentant de l'Etat dans le département lorsqu'une personne assujettie à l'obligation d'assurance prévue à l'article L. 1142-2 du code de la santé publique présente un risque d'assurance particulièrement élevé.»

Article 63

Au début du premier alinéa, remplacer les mots :

Pendant un délai de trois ans

par les mots :

Pendant un délai d'un an

Article 63

Dans le premier alinéa, après les mots :

en matière d'accidents médicaux,

insérer les mots :

dont les modalités comportant notamment une évaluation des connaissances et des pratiques professionnelles sont fixées par décret en conseil d'Etat.

Article 63

Au début du dernier alinéa, remplacer les mots :

A l'issue du délai de trois ans susmentionné

par les mots :

A l'issue d'un délai de deux ans à compter de leur inscription,

Article additionnel après l'article 63

Après l'article 63, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 114-5 du code de l'action sociale et des familles, il est inséré un article L. 114-6 ainsi rédigé :

« Art. L.114-6.- Il est créé, dans des conditions définies par décret, un observatoire de l'accueil et de l'intégration des personnes handicapées, chargé d'observer la situation matérielle, financière et morale des personnes handicapées en France et de présenter toutes les propositions jugées nécessaires au Parlement et au Gouvernement visant à assurer, par une programmation pluriannuelle continue, la prise en charge de ces personnes ».

* 1 Cass. 9 octobre 1984.

* 2 Cass.4 janvier 1974.

* 3 Cass. cil. 29 octobre 1983.

* 4 CE, 10 avril 19921, M. et Mme V.

* 5 Un accident médical peut être défini comme un événement imprévu causant un dommage accidentel ayant un lien de causalité certain avec un acte médical ;

Une affection iatrogène peut être définie comme le dommage subi par le patient lié au traitement suivi ;

Une infection nosocomiale peut être définie comme une maladie provoquée par des micro-organismes contractée dans un établissement de soins.

* 6 « Jurisprudence « Perruche » : faut-il légiférer », rapport d'information n°164 (2001-2002) présenté par M. René Garrec.

* 7 CE, 2 juillet 1982, D lle R.

* 8 Cass. civ., 25 juin 1991.

* 9 CE, 27 septembre 1989, Mme K.

* 10 Cass. civ., 16 juillet 1991.

* 11 Cass. civ., 26 mars 1996.

* 12 Proposition de loi n° 442 (2000-2001) présentée par M. Claude Huriet et plusieurs de ses collègues, proposition de loi n° 103 (2001-2002) présentée par M. Bernard Fournier et plusieurs de ses collègues, proposition de loi n° 124 (2001-2002) présentée par M. Jacques Blanc, renvoyées à la commission des lois.

* 13 Paul Ricoeur, Soi-même comme un autre.

* 14 De telles actions ont été accueillies pendant quelques années aux Etats-Unis, mais ne le sont plus actuellement.

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