CHAPITRE II
DE LA TRANSPARENCE DANS LES ENTREPRISES

Sont regroupées sous ce deuxième chapitre des dispositions qui tendent à accroître la transparence dans le fonctionnement des entreprises pour une meilleure mise en oeuvre des principes du gouvernement d'entreprise.

Article 76
(Articles L. 225-37, L. 225-68 et L. 225-51 du code de commerce)
Information des actionnaires sur les méthodes de travail
du conseil d'administration ou du conseil de surveillance

L'article 76 du projet de loi traduit dans la loi une des préconisations du rapport établi à l'automne 2002 par le groupe de travail présidé par M. Daniel Bouton sur le thème « Pour un meilleur gouvernement des entreprises cotées » : celle tendant à assurer l'information annuelle des actionnaires sur les évaluations effectuées au sein de l'entreprise, en particulier sur le fonctionnement du conseil d'administration.

Le I complète ainsi l'article L. 225-37 du code de commerce relatif aux règles de fonctionnement du conseil d'administration des sociétés anonymes pour exiger dorénavant du président du conseil d'administration qu'il rende compte, dans un rapport à l'assemblée générale, des procédures mises en oeuvre pour organiser les travaux du conseil, des procédures de contrôle interne et des restrictions apportées, le cas échéant, aux pouvoirs du directeur général. Il s'agit, selon l'exposé des motifs, de faire en sorte que « le rôle et les prérogatives des mandataires sociaux soient mieux connus par les actionnaires et favorisent en conséquence la responsabilisation des administrateurs ». Une telle exigence a le double mérite d'obliger la direction de l'entreprise, selon une périodicité régulière, à faire le point sur les modalités de fonctionnement du conseil d'administration et de permettre aux actionnaires de vérifier que les questions importantes sont convenablement préparées et débattues. Le fait de rendre publiques ces informations devrait créer une émulation vertueuse entre les sociétés, en particulier celles faisant appel public à l'épargne, la situation de l'entreprise étant à l'avenir également jaugée à l'aune des procédures mises en oeuvre pour aboutir à la prise de décision.

Sur le I, votre commission des Lois vous soumet deux amendements , le premier pour préciser que le rapport fait à l'assemblée générale prend la forme d'un rapport joint au rapport annuel de gestion, ce qui évite la multiplication des rapports spéciaux distincts et permet d'assurer une plus large publicité des informations concernées par son dépôt au greffe du tribunal de commerce, le second pour souligner la nécessité que les mentions portées dans ce rapport joint décrivent bien les méthodes de travail concrètement mises en oeuvre pour l'organisation des travaux du conseil d'administration et ne soient pas des formules type relevant du règlement intérieur.

Le II modifie par coordination l'article L. 225-68 du code de commerce qui traite de la mission de contrôle exercée par le conseil de surveillance sur la gestion de la société par le directoire pour exiger du président du conseil de surveillance qu'il rende compte dans un rapport à l'assemblée générale des procédures de préparation des décisions et des procédures de contrôle interne mises en oeuvre.

Sur le II, qui transpose l'exigence de transparence explicitée précédemment aux sociétés à directoire et conseil de surveillance, votre commission des Lois vous soumet deux amendements de coordination avec les modifications introduites au I.

Le III modifie l'article L. 225-51 du code de commerce pour supprimer la mention, introduite par la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 sur les nouvelles régulations économiques, selon laquelle « le président du conseil d'administration représente le conseil d'administration ». Cette mention paraît en effet manquer de pertinence car la notion de représentation laisserait supposer que le président et le conseil d'administration constituent deux entités distinctes. Cette critique avait d'ailleurs été formulée lors de l'examen de la loi précitée par le Sénat. Sur ce paragraphe, votre commission des Lois vous soumet un amendement destiné à corriger une erreur matérielle.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 76 ainsi modifié .

Article 77
(Articles L. 225-105 du code de commerce)
Amélioration de l'information des actionnaires
en vue de la tenue de l'assemblée générale

L'article 77 du projet de loi modifie l'article L. 225-105 du code de commerce relatif à l'établissement de l'ordre du jour des assemblées générales pour prévoir une amélioration de l'information des actionnaires en vue de la tenue de l'assemblée générale.

Le I pose le principe de la « diffusion » aux actionnaires des projets de résolution inscrits à l'ordre du jour, les modalités de cette « diffusion » devant être précisées par décret.

Rappelons qu'en vertu du deuxième alinéa de l'article L. 225-105 la possibilité de requérir l'inscription à l'ordre du jour de projets de résolution est réservée à un ou plusieurs actionnaires représentant au moins 5  % du capital ou une association d'actionnaires répondant aux conditions fixées à l'article L. 225-120, c'est-à-dire regroupant des actionnaires de sociétés dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé, justifiant d'une inscription nominative depuis au moins deux ans et détenant ensemble au moins 5  % des droits de vote. Les conditions d'inscription des projets de résolution à l'ordre du jour de l'assemblée générale sont actuellement précisées par les articles 128 à 131 du décret n° 67-236 du 23 mars 1967 sur les sociétés commerciales.

Les modalités selon lesquelles les actionnaires seront désormais informés des projets de résolution sur lesquels l'assemblée générale aura à se prononcer seront définies par décret en prenant garde que les délais prévus pour la convocation de l'assemblée ne soient pas remis en cause.

Sur le I, votre commission des Lois vous soumet un amendement tendant à substituer la notion de « communication », généralement utilisée dans les textes de loi, à celle de « diffusion ». Il reviendra au décret de préciser les modalités et en particulier le support de cette communication dont il conviendrait d'éviter qu'elle soit lourde à gérer et coûteuse.

Le II prévoit la communication à l'assemblée générale de l'avis rendu par le comité d'entreprise en application de l'article L. 432-1 du code du travail sur les questions de modifications de l'organisation économique ou juridique de l'entreprise, notamment en cas de fusion, de cession ou de modification importante des structures de production, d'acquisition ou de cession de filiales, sur les mesures envisagées à l'égard des salariés lorsque les modifications susvisées emportent des conséquences pour eux, et sur les prises de participation dans une autre société.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 77 ainsi modifié .

Article 78
(Articles L. 225-235 du code de commerce)
Rapport du commissaire aux comptes sur les méthodes
et procédures de contrôle interne

L'article 78 du projet de loi vient compléter l'article L. 225-235 du code de commerce décrivant la mission qui incombe aux commissaires aux comptes pour exiger d'eux qu'ils présentent à l'assemblée générale un rapport exposant leurs observations sur les méthodes et procédures de contrôle interne mises en oeuvre par la société pour l'élaboration et le traitement de l'information comptable et financière, c'est-à-dire celles qui seront décrites dans le rapport fait à l'assemblée générale par le président du conseil d'administration ou le président du conseil de surveillance selon le cas.

Rappelons qu'en vertu du deuxième alinéa de l'article L. 225-100 du code de commerce, les commissaires aux comptes présentent à l'assemblée générale un rapport sur l'accomplissement de leur mission de certification des comptes. L'approbation des comptes de l'exercice écoulé doit être précédée de la lecture de ce rapport. Lorsque la société est tenue d'avoir deux commissaires aux comptes, l'assemblée est nulle si les rapports ont été établis et présentés par un seul des deux commissaires aux comptes.

Ce rapport général rend compte des vérifications que la loi impose au commissaire aux comptes et fait état, le cas échéant, d'observations sur les comptes de l'exercice et, éventuellement, des motifs pour lesquels ils refusent la certification ou l'assortit de réserves. Il doit aussi mentionner les observations sur la sincérité des informations données dans le rapport de gestion et dans les documents adressés aux actionnaires sur la situation financière de la société ainsi que sur la concordance de ces informations avec les comptes annuels. Le rapport général doit également signaler aux actionnaires un certain nombre de faits tels que des modifications apportées dans la présentation des comptes annuels ou dans les méthodes d'évaluation, une prise de participation significative dans le capital d'une autre société ou encore des infractions commises par les administrateurs ou les membres du directoire dont ils auraient eu connaissance.

Votre commission des Lois vous soumet un amendement de réécriture des dispositions proposées pour compléter l'article L. 225-235 afin d'en coordonner le libellé avec les modifications proposées à l'article 76 du projet de loi et de prévoir que le rapport du commissaire aux comptes sur les procédures de contrôle interne mises en oeuvre pour l'élaboration et le traitement de l'information comptable et financière sera joint au rapport général.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 78 ainsi modifié .

Article 79
(Articles L. 621-18-2 et L. 621-18-3 du code monétaire et financier)
Publicité de certains mouvements de titres
concernant une personne faisant appel public à l'épargne

L'article 79 du projet de loi introduit deux nouveaux articles dans le code monétaire et financier pour :

- poser le principe de la communication à l'Autorité des marchés financiers et de la publicité des mouvements de titres réalisés par les dirigeants, les membres du conseil d'administration ou du conseil de surveillance ou des personnes entretenant des liens personnels avec eux. La définition des modalités de cette publicité est renvoyée à un règlement général de l'Autorité des marchés financiers ;

- prévoir que les sociétés faisant appel public à l'épargne devront, dans leurs documents d'information du marché, rendre publiques les informations relatives à l'organisation des travaux du conseil et aux procédures de contrôle interne selon des modalités fixées par le règlement général de l'Autorité des marchés financiers chargée d'établir chaque année un rapport sur ce sujet.

Sur cet article, votre commission des Lois s'en remet à la position de votre commission des Finances saisie au fond de l'ensemble du projet de loi.

Article 80
(Articles L. 225-39, L. 225-87, L. 225-115, L. 227-11
et L. 612-5 du code de commerce)
Régime des conventions courantes
conclues à des conditions normales

L'article 80 du projet de loi modifie plusieurs articles du code de commerce concernant les différentes formes de sociétés commerciales pour aménager le régime juridique applicable aux conventions courantes conclues à des conditions normales tel qu'il résulte de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 sur les nouvelles régulations économiques.

Rappelons que les « conventions portant sur des opérations courantes et conclues à des conditions normales », encore appelées « conventions libres » par opposition aux conventions réglementées, sont celles qui sont conclues par la société dans le cadre de son activité ordinaire et dont les conditions de conclusion répondent à des pratiques habituelles de la société dans ses rapports avec les tiers de telle sorte que le co-contractant n'en retire pas un avantage différent de celui auquel un fournisseur ou un client ordinaire aurait pu prétendre.

La loi du 15 mai 2001 précitée a soumis ces conventions à une obligation d'information dès lors qu'elles sont intervenues, directement ou par personne interposée, entre la société d'une part et, d'autre part, un de ses dirigeants, un administrateur, un actionnaire disposant d'une fraction des droits de vote supérieure à 5 %, la société mère ou encore une entreprise quelconque si un des dirigeants ou un des administrateurs de la société dirige ladite entreprise.

Ces conventions doivent être communiquées par l'intéressé, selon le cas, au président du conseil d'administration (article L. 225-39) ou au président du conseil de surveillance (article L. 225-87) pour les sociétés anonymes, au commissaire aux comptes pour les sociétés par actions simplifiées et tout associé a le droit d'en obtenir communication (article L. 227-11). En outre, dans le cadre des sociétés anonymes, la liste et l'objet des conventions courantes sont communiqués par le président aux membres du conseil d'administration ou du conseil de surveillance et aux commissaires aux comptes. Cette liste est tenue à la disposition des actionnaires, au siège social, quinze jours au moins avant l'assemblée générale ordinaire annuelle (article L. 225-115).

A l'usage, comme cela avait pu être craint lors de la discussion du projet de loi sur les nouvelles régulations économiques, l'établissement des listes de conventions courantes s'est avéré d'un lourd formalisme et d'un coût non négligeable pour un résultat qui n'est pas concluant, surtout dans les sociétés d'une certaine importance où ces conventions sont légions !

L'article 80 du projet de loi tente de réduire ces inconvénients en limitant le champ des conventions soumises à l'obligation de communication. Seraient ainsi exonérées de cette obligation les conventions qui « en raison de leur objet ou de leurs implications financières » « sont de faible importance pour l'ensemble des parties ». Il apparaît à votre commission des Lois que le critère proposé, du fait de son caractère subjectif, risque de poser plus de problèmes qu'il n'en résout et de susciter de nombreuses discussions ainsi qu'une abondante jurisprudence. Aussi vous propose-t-elle une solution beaucoup plus radicale qui est de revenir purement et simplement sur les dispositions introduites par la loi sur les nouvelles régulations économiques en considérant qu'un afflux excessif d'information finit par tuer l'information et par créer plus d'opacité que de transparence, contrairement à l'objectif initialement recherché. Elle vous soumet un amendement de réécriture de l'article 80 à cet effet.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 80 ainsi modifié .

Article 81
(Articles L. 228-2 et L. 233-7 du code de commerce)
Abrogation des dispositions relatives à la déclaration
de franchissement de seuils des intermédiaires inscrits

L'article 81 du projet de loi comporte deux paragraphes qui proposent des ajustements sur des dispositions concernant le régime d'inscription et de tenue en compte des valeurs mobilières.

Le I modifie l'article L. 228-2 du code de commerce pour remplacer la référence à « l'organisme central d'instruments financiers » par celle du « dépositaire central d'instruments financiers ».

En vertu de l'article L. 228-1 du code de commerce, les valeurs mobilières émises par les sociétés par actions doivent être inscrites en compte au nom de leur propriétaire. Cette obligation a été créée par la loi n° 81-1162 du 30 décembre 1981 de mise en harmonie du droit des sociétés commerciales avec la deuxième directive du Conseil des communautés européennes du 13 décembre 1976. Les valeurs mobilières sont donc conservées en compte soit par la société émettrice, soit par les intermédiaires financiers habilités à tenir des comptes d'instruments financiers.

D'autres acteurs du marché sont les dépositaires centraux d'instruments financiers, réglementés par le code monétaire et financier et le Conseil des marchés financiers, dont la mission est d'enregistrer dans un compte spécifique l'intégralité des instruments financiers, d'ouvrir des comptes courants aux teneurs de comptes d'instruments financiers et d'assurer le règlement et la livraison des titres.

Or, cette fonction de règlement et de livraison des titres se distingue désormais de celle de la compensation des titres. Alors que jusqu'à présent l'organisme chargé de la compensation des titres cumulait ces deux fonctions, la fonction de compensation des titres est aujourd'hui assurée par des chambres de compensation alors que celle de règlement-livraison échoit à des dépositaires centraux. C'est pourquoi le I de l'article 81 du projet de loi propose de remplacer dans le code de commerce la terminologie obsolète d'organisme chargé de la compensation par celle de dépositaire central d'instruments financiers.

Le II procède également à une adaptation en proposant d'abroger le dernier alinéa de l'article L. 233-7 du code de commerce qui met à la charge des intermédiaires financiers inscrits comme détenteurs de titres l'obligation d'informer les émetteurs de titres dont des personnes viendraient à détenir une certaine fraction de leur capital ou des droits de vote. Jusqu'à la loi du 15 mai 2001 sur les nouvelles réglementations économiques, cette obligation pesait uniquement sur la ou les personnes agissant de concert accédant aux seuils légaux de détention (information de la société concernée dans les quinze jours du franchissement du seuil ; information du Conseil des marchés financiers dans les cinq jours de bourse à compter de ce franchissement lorsque les actions de la société sont admises aux négociations sur un marché réglementé).

La loi du 15 mai 2001 précitée a en effet autorisé des intermédiaires inscrits à détenir des titres pour le compte d'actionnaires ne résidant pas en France : elle a ainsi permis aux résidents à l'étranger de détenir indirectement des actions d'une société établie en France, l'inscription faite pour le compte de ces propriétaires par l'intermédiaire pouvant prendre la forme d'un compte collectif ou de plusieurs comptes individuels (article L. 228-1 du code de commerce). Ces intermédiaires ont donc été soumis à l'obligation d'information susvisée rendue applicable, en cas de tenue d'un compte collectif, à l'ensemble des actions d'une société détenues pour le compte de l'ensemble des actionnaires. Or, cela a conduit à une confusion entre les déclarations individuelles de franchissement de seuil et les déclarations émanant des intermédiaires inscrits enregistrant les mouvements de titres pour l'ensemble de leurs clients sans qu'il y ait franchissement des seuils légaux pour chacun d'eux. Le II de l'article 81 du projet de loi propose de supprimer l'obligation déclarative pour ces intermédiaires afin d'éviter dorénavant toute confusion de ce type, source de perturbation des marchés.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 81 sans modification .

Article 82
(Articles L. 452-1 du code monétaire et financier)
Droit d'ester en justice des associations d'investisseurs

L'article 82 du projet de loi modifie l'article L. 452-1 du code monétaire et financier afin de faciliter la possibilité pour les associations d'investisseurs d'agir en justice.

Jusqu'à présent, ces associations n'étaient admises à ester que si elles étaient agréées ; dorénavant, il suffira qu'elles satisfassent des critères de représentativité définis par décret ou les critères de détention de droits de vote définis à l'article L. 225-120 du code de commerce (association regroupant des actionnaires justifiant d'une inscription nominative depuis au moins deux ans et détenant ensemble au moins 5 % des droits de vote) et qu'elles aient communiqué leurs statuts à l'Autorité des marchés financiers.

Sur cet article du projet de loi qui modifie le code monétaire et financier, votre commission des Lois s'en remet à la position de votre commission des Finances.

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