EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. UNE LIAISON FERROVIAIRE MIXTE STRUCTURANTE POUR L'EUROPE

A. UNE RÉPONSE À LA PRESSION DU TRAFIC ROUTIER TRANSALPIN

1. L'évolution du trafic de fret sur l'arc alpin : la route prédominante

Entre 1999 et 2011, le trafic transalpin de marchandises a augmenté de 22,7 % pour atteindre 197 millions de tonnes. Cette croissance sur la décennie recouvre la succession de trois périodes distinctes : une augmentation de 30,1 % entre 1999 et 2007 (soit une hausse de 3,3 % par an en moyenne), suivie d'une forte diminution de 16,2 % des tonnages entre 2007 et 2009 résultant de la crise économique, puis une forte reprise de 12,6 % entre 2009 et 2011.

Le mode routier apparaît fortement prédominant à travers les Alpes, avec une part modale de 65,7 % en 2011. Avec 28,2 millions de tonnes, le Brenner est le premier passage transalpin routier, ce qui correspond à une part de 21,8 % des tonnages routiers. Les deux passages suivants, par ordre d'importance, sont celui de Vintimiglia (18 millions de tonnes) et le Schoberpass (15,5 millions de tonnes).

Les deux points de passage ferroviaire les plus importants en 2011 sont le Gothard (14,4 millions de tonnes, soit 21,2 % du total des tonnages ferroviaires) et le Brenner (14,1 millions de tonnes, soit 20,8 % du total).

La part modale du ferroviaire apparaît très variable selon les trois pays concernés. Alors qu'elle est de 34,3 % sur l'ensemble de l'arc alpin, elle s'élève à 63,9 % en Suisse, à 33,5 % en Autriche, mais n'est que de 8,4 % en France.

Les points de passage entre la France et l'Italie sont au nombre de cinq : le tunnel routier du Mont-Blanc, le tunnel ferroviaire du Mont-Cenis, le tunnel routier du Fréjus, le passage routier et le passage ferroviaire côtiers de Vintimiglia. 91,6 % des marchandises transitant entre les deux pays passent par la route.

Source : Observatoire des trafics marchandises transalpins

2. Les limites des liaisons routières transalpines : pollution et insécurité

En 2011, 2,7 millions de poids lourds ont franchi les passages entre la France et l'Italie, soit une moyenne de 7 400 camions par jour. Le passage de Vintimiglia est le plus important, avec 1,3 million de poids lourds (49,2 % du total), suivi par le tunnel du Fréjus (700 000 poids lourds) et par le tunnel du Mont-Blanc (600 000 poids lourds).

Les nuisances sont importantes pour les populations riveraines, en termes de pollution sonore comme de pollution atmosphérique . Les vallées alpines sont très sensibles à cette dernière, et présentent des taux de pollution parfois supérieurs à ceux des grandes zones urbaines.

Les liaisons routières transalpines présentent également des faiblesses au regard de la sécurité. Les accidents survenus le 24 mars 1999 dans le tunnel du Mont-Blanc, où l'incendie d'un poids lourd a provoqué la mort de 39 personnes, et le 4 juin 2005 dans le tunnel du Fréjus, où l'incendie d'un poids lourd a provoqué la mort de 2 personnes, sont venus rappeler la réalité des risques inhérents à ces infrastructures.

3. Une solution radicale : un nouveau tunnel ferroviaire de base

La Convention pour la protection des Alpes signée en 1991 par les pays de l'arc alpin les engage à « limiter les nuisances environnementales et les risques dus au trafic, principalement routier, en s'abstenant de construire de nouvelles routes à grand débit pour le trafic transalpin » et à prendre les mesures appropriées « en vue de réduire les nuisances et les risques dans le secteur du transport interalpin et transalpin, de telle sorte qu'ils soient supportables pour les hommes, la faune et la flore ainsi que pour leur cadre de vie et leurs habitats, notamment par un transfert sur la voie ferrée d'une partie croissante du trafic, en particulier du trafic de marchandises, notamment par la création des infrastructures appropriées et de mesures incitatives conformes au marché, sans discrimination pour des raisons de nationalité . »

Conformément à ces orientations, la France et l'Italie ont envisagé dès le début des années 1990 le percement d'un nouveau tunnel ferroviaire à travers les Alpes, afin de favoriser un report modal massif de la route vers le chemin de fer.

La modernisation de la ligne ferroviaire actuelle n'apparaît pas comme une alternative à la mesure de l'enjeu. Les infrastructures existantes ont déjà fait l'objet de travaux importants de rénovation, mais demeurent sous-utilisées en raison de leurs caractéristiques techniques inadaptées. Les pentes d'accès au tunnel du Mont-Cenis, qui est situé à 1 296 mètres d'altitude, sont trop fortes. Le tunnel lui-même est monotube, ce qui ne répond plus aux exigences de sécurité actuelles. Enfin, la transformation de la liaison ferroviaire historique, forcément très progressive, se traduirait par une interruption durable du trafic, contraire à l'objectif poursuivi.

La nouvelle ligne ferroviaire Lyon-Turin empruntera donc un tunnel situé à beaucoup plus basse altitude que le tunnel historique, qui permettra la circulation de flux massifs dans des conditions techniques et de sécurité satisfaisantes. Cette solution du tunnel ferroviaire « de plaine » est d'ailleurs celle qui a été retenue par la Suisse avec « l'initiative des Alpes » adoptée par référendum en 1994, qui prévoit les deux nouvelles percées du Lötschberg, en service depuis 2007, et du Saint-Gothard, qui sera en service fin 2016. C'est aussi la solution choisie par l'Italie et l'Autriche pour le nouveau tunnel ferroviaire du Brenner, qui sera en service à l'horizon 2025.

Grâce à son grand gabarit, l'autoroute ferroviaire constituant le coeur de la nouvelle ligne Lyon-Turin pourra capter les trafics routiers de tous gabarits. Les trains de voyageurs pourront y circuler jusqu'à une vitesse de 220 km/h et les trains de fret ou d'autoroute ferroviaire jusqu'à une vitesse de 120 km/h. Il s'agira d'un tunnel ferroviaire de troisième génération, capable de donner une réelle compétitivité au chemin de fer.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page