EXAMEN DES ARTICLES

Les dispositions relatives au code civil figurant au titre premier sont de la compétence de la commission des lois. Votre commission des Affaires sociales vous invite donc à vous reporter au rapport n° 295 (1995-1996), fait, au nom de celle-ci par M. Luc Dejoie, rapporteur.

Elle a procédé, pour sa part, à l'examen du titre II (dispositions modifiant le code de la famille et de l'aide sociale), du titre III (dispositions modifiant le code de la sécurité sociale), du titre IV (dispositions modifiant le code du travail), du titre V (autres dispositions).

TITRE II - DISPOSITIONS MODIFIANT LE CODE DE LA FAMILLE ET DE L'AIDE SOCIALE

Ce titre qui contient les dispositions modifiant le code de la famille et de l'aide sociale comportait, dans la proposition de loi initiale, 14 articles. À la suite de la césure d'un article en deux, intervenue au cours de la discussion du texte en commission spéciale, il en compte désormais 15 dans la proposition de loi soumise à l'examen de votre commission. Celle-ci souhaite y ajouter deux articles additionnels, l'un de fond, avant l'article 28, sur l'accompagnement, l'autre de coordination, après l'article 30.

Article additionnel avant l'article 28 - Accompagnement pour les femmes accouchant secrètement

Votre commission a souhaité introduire, par voie d'amendement, le présent article additionnel afin de permettre aux femmes qui accouchent secrètement et qui se trouvent dans un état de grande détresse de bénéficier d'un accompagnement psychologique et social. Mais cet accompagnement ne leur sera offert par le service de l'aide sociale à l'enfance que si elles le souhaitent. Il n'est bien évidemment pas question de contraindre ces femmes qui sont encore 700 à 900 par an à accoucher de la sorte. Les Conseils généraux, dans le cadre de leurs compétences, auront toute latitude pour organiser cet accompagnement que certains pratiquent déjà. Cette possibilité est introduite par la création d'un nouvel alinéa après le deuxième alinéa de l'article 47 du code de la famille et de l'aide sociale qui est consacré à la prise en charge des frais d'accouchement de la femme qui a demandé le secret de son identité lors de celui-ci.

Votre commission vous demande d'insérer cet article additionnel par voie d'amendement.

Art. 28 (Art. 60 du code de la famille et de l'aide sociale) - Dispositions relatives à la situation des pupilles de l'État et au conseil de famille

Le présent article a pour objet de modifier l'article 60 du code de la famille et de l'aide sociale -qui compose, avec les articles 61, 62, 63, 64 et 65, le statut des pupilles de l'État-, sous trois aspects, la consultation du pupille de l'État qui est mineur capable de discernement par le tuteur et le conseil de famille, avant toute décision relative à son lieu et mode de placement, le rôle du préfet en cas de situation de danger manifeste pour l'enfant, et les modalités de renouvellement ainsi que la durée du mandat du conseil de famille. La proposition de loi initiale ne comportait, quant à elle, que deux de ces aspects : la consultation du mineur et les dispositions relatives au conseil de famille.

Le premier des trois aspects du présent article figure au 1° et s'insère dans le deuxième alinéa de l'article 60 du code de la famille et de l'aide sociale précité. Le texte actuel dispose qu'« avant toute décision du Président du Conseil général relative au lieu et au mode de placement des pupilles de l'État », outre l'accord du tuteur -soit le préfet- et celui du conseil de famille, doit être recueilli l'avis du mineur « dans les conditions prévues à l'article 58 ». L'article 58 du code de la famille et de l'aide sociale prévoit, en effet, que le service examine avec le mineur toute décision le concernant et recueille son avis. Il convient de remarquer, à cet égard, qu'il s'agit du mineur, quel que soit son âge, et que son avis n'est recueilli que par l'intermédiaire du service d'aide sociale à l'enfance.

La proposition de loi initiale prévoyait, quant à elle, que le conseil de famille ou la personne qu'il avait désignée à cet effet, devait entendre préalablement le mineur avant de donner son accord sur le lieu et le mode de placement de celui-ci en tant que pupille de l'État. L'avis du mineur recueilli selon les modalités de l'article 58 du code de la famille et de l'aide sociale disparaissait donc. Toutefois, lors de l'examen de ce texte en commission spéciale, le rapporteur a souhaité modifier sa proposition de loi sur ce point, en introduisant la notion de mineur capable de discernement, qui est déjà reconnue par le code civil 1 ( * ) , en permettant à ce dernier, non pas de donner simplement son avis au conseil de famille, ou à l'un de ses membres désignés à cet effet, mais d'être entendu par ce dernier ainsi que par le tuteur ou son représentant. Parallèlement, il réintroduit la disposition supprimée par la proposition de loi qui prévoyait le recueil de l'avis du mineur dans les conditions prévues à l'article 58 du code de la famille et de l'aide sociale précité. Il ne s'avérait, en effet, pas pertinent de supprimer dans ce cas précis cette référence qui permet au service d'aide sociale à l'enfance d'examiner avec l'enfant, quel que soit son âge, toute décision le concernant et de lui demander son avis.

Votre commission ne peut qu'approuver ce maintien et cette nouvelle rédaction.

Toutefois, votre commission juge utile de préciser que l'audition du mineur capable de discernement, que cela soit par le tuteur ou le conseil de famille, doit être préalable à l'accord que ces derniers doivent donner concernant le lieu et le mode de placement du pupille concerné. Elle vous propose donc un amendement en ce sens.

La deuxième modification de l'article 60 du code de la famille et de l'aide sociale que comporte le présent article est mentionnée au l°bis et consiste dans la possibilité offerte au préfet, qui est le tuteur du pupille de l'État, de prendre toutes les mesures d'urgence que l'intérêt de celui-ci exige lorsqu'il se trouve dans une situation de danger manifeste.

Cette disposition provient de l'adoption d'un amendement de Mme Véronique Neiertz et du groupe socialiste. Mme Neiertz soulignait, à l'appui de son amendement, les dysfonctionnements constatés en matière de protection de l'enfance et qui tenaient, selon elle, au conflit de compétences né de la décentralisation entre les pouvoirs accordés au Conseil général et ceux laissés à l'État. Elle estimait que ces dysfonctionnements pouvaient s'avérer préjudiciables en situation d'urgence et souhaitait donc, dans le cas des pupilles de l'État, confier au préfet, tuteur de ceux-ci, la responsabilité de prendre des mesures appropriées. Cet amendement a fait l'objet d'un avis favorable de la part de la commission spéciale et défavorable de la part du Gouvernement dans la mesure où ces dispositions semblaient être de nature réglementaire. Le décret du 23 août 1985, relatif au conseil de famille des pupilles de l'État, notamment son article 22, prévoit, certes, déjà qu'« en cas d'urgence, le tuteur peut prendre lui-même toutes dispositions utiles, sous réserve de les soumettre au conseil de famille et de s'enquérir de l'avis du mineur dans un délai de deux mois ».

Toutefois, dans le cas précis soulevé par Mme Neiertz, il s'agit de danger manifeste. Il semble donc utile à votre commission de maintenir cet alinéa afin de replacer le préfet dans ses responsabilités. Elle vous propose, donc, seulement, d'apporter, par voie d'amendement, des améliorations rédactionnelles ainsi que de transformer en obligation la possibilité pour le préfet de prendre des mesures d'urgence.

Enfin, la troisième modification de l'article 60 figurait déjà, dans la proposition de loi initiale sous une forme qui n'a pas été revue par l'Assemblée nationale. Elle traite du conseil de famille, de ses modalités de renouvellement et de la durée de mandat de ses membres.

Actuellement, le conseil de famille, qui doit examiner, au moins une fois par an, la situation de chaque pupille, est composé, conformément aux dispositions prévues par ce même article 60 du code de la famille et de l'aide sociale 1 ( * ) , de représentants du Conseil général, de membres d'associations à caractère familial notamment issus de l'UDAF -Union départementale des associations familiales-, d'associations d'assistantes maternelles et d'associations de pupilles et anciens pupilles de l'État 2 ( * ) , ainsi que de personnalités qualifiées.

Les représentants du Conseil général sont désignés par celui-ci, sur proposition de son président tandis que le préfet désigne les deux autres catégories de membres du conseil de famille, directement pour les personnalités qualifiées, à partir de listes établies par les associations pour les représentants de ces dernières.

C'est le décret n° 85-937 du 23 août 1985 qui précise, dans son article 3, la ventilation du conseil de famille selon les différentes catégories de membres, soit deux représentants du Conseil général, deux personnalités qualifiées, deux membres d'associations familiales, dont l'un provient d'une association de parents adoptifs, un membre de l'association d'entraide des pupilles et des anciens pupilles et, enfin, un membre d'une association d'assistantes maternelles, soit huit personnes.

Selon le huitième aliéna de l'article 60, en sa rédaction actuelle, la durée du mandat des membres du conseil de famille est de trois ans, renouvelable une fois. M. Mattéi, dans sa proposition de loi, estimait, à juste titre, que ce mandat était trop court pour avoir une continuité dans le suivi des pupilles concernés et de leur avenir. Il a donc proposé, et ce texte n'a pas été modifié par l'Assemblée nationale, de prévoir un mandat de six ans, renouvelable indéfiniment. Si votre commission est d'accord sur l'allongement de ce mandat, -ce qui supposera, par ailleurs, la refonte du décret du 23 août 1985 précité-, sur proposition de M. Jean-Louis Lorrain, elle a souhaité refuser le principe de la professionnalisation qu'implique la possibilité de renouvellement illimité de celui-ci. Elle souhaite donc instaurer une limite à la possibilité de renouvellement qui pourrait être au maximum de deux mandats, soit 12 ans. Le mandat serait donc renouvelable une fois. Votre commission vous propose donc un amendement en ce sens.

Par ailleurs, il convient de préciser que, selon la législation actuelle, le conseil de famille est renouvelable en totalité tous les trois ans. M. Mattéi, dans sa proposition de loi, propose de le rendre renouvelable par moitié. Si votre commission s'accorde bien volontiers sur cela, en revanche, elle s'interroge sur le point de départ de ce renouvellement. En effet, lorsque le conseil de famille, selon la législation actuelle, achèvera son mandat, il faudra que, au sein du nouveau conseil de famille, la moitié des membres ait un mandat de trois ans et l'autre un mandat de six ans pour que l'on puisse, ensuite, renouveler ledit conseil par moitié tous les trois ans.

Pour remédier à ce problème, votre commission vous propose, par voie d'amendement, d'insérer un paragraphe additionnel prévoyant, que dans le cadre de dispositions transitoires, précisées par voie réglementaire, les conseils de famille seront intégralement renouvelés, et que, pour ce seul renouvellement, la moitié des membres de ces conseils aura un mandat de trois ans, tandis que l'autre moitié bénéficiera d'un mandat de six ans.

Sous réserve des quatre amendements qu'elle vous a présentés, votre commission vous demande d'adopter cet article.

* 1 Cf. l'article 388-1 : « dans toute procédure le concernant, le mineur capable de discernement peut, sans préjudice des dispositions prévoyant son intervention ou son consentement, être entendu par le juge ou la personne désignée par le juge à cet effet ». Toutefois, il convient de rappeler que c'est à partir de treize ans que le consentement à l'adoption est requis conformément à l'article 360 du Code civil.

* 1 Dans la rédaction résultant de la loi n° 84-422 du 6 juin 1984.

* 2 Associations prévues à l'article 65 du code de la famille et de l'aide sociale.

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