N° 91

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1999-2000

Annexe au procès-verbal de la séance du 25 novembre 1999.

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) sur le projet de loi de finances pour 2000 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME I

AGRICULTURE

Par M. Gérard CÉSAR,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Jean François-Poncet, président ; Philippe François, Jean Huchon, Jean-François Le Grand, Jean-Pierre Raffarin, Jean-Marc Pastor, Pierre Lefebvre, vice-présidents ; Georges Berchet, Jean-Paul Emorine, Léon Fatous, Louis Moinard, secrétaires ; Louis Althapé, Pierre André, Philippe Arnaud, Mme Janine Bardou, MM. Bernard Barraux, Michel Bécot, Jacques Bellanger, Jean Besson, Jean Bizet, Marcel Bony, Jean Boyer, Mme Yolande Boyer, MM. Dominique Braye, Gérard César, Marcel-Pierre Cleach, Gérard Cornu, Roland Courteau, Charles de Cuttoli, Désiré Debavelaere, Gérard Delfau, Marcel Deneux, Rodolphe Désiré, Michel Doublet, Xavier Dugoin, Bernard Dussaut , Jean-Paul Emin, André Ferrand, Hilaire Flandre, Alain Gérard, François Gerbaud, Charles Ginésy, Serge Godard, Francis Grignon, Louis Grillot, Georges Gruillot, Mme Anne Heinis, MM. Pierre Hérisson, Rémi Herment, Bernard Joly, Alain Journet, Gérard Larcher, Patrick Lassourd, Edmond Lauret, Gérard Le Cam, André Lejeune, Guy Lemaire, Kléber Malécot, Louis Mercier, Paul Natali, Jean Pépin, Daniel Percheron, Bernard Piras, Jean-Pierre Plancade, Ladislas Poniatowski, Paul Raoult, Jean-Marie Rausch, Charles Revet, Henri Revol, Roger Rinchet, Jean-Jacques Robert, Josselin de Rohan, Raymond Soucaret, Michel Souplet, Mme Odette Terrade, MM. Michel Teston, Pierre-Yvon Trémel, Henri Weber.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 1805 , 1861 à 1866 et T.A. 370 .

Sénat : 88 et 89 (annexe n° 3 ) (1999-2000).


Lois de finances.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Si l'année 1999 n'est pas " celle de tous les changements ", elle n'en est pas moins exceptionnelle en raison des multiples échéances qui l'ont rythmée :

Janvier 1999 : mise en place de l'Euro ;

Mars 1999 : Réformes de la Politique agricole commune et de la politique des fonds structurels ;

Juillet 1999 : promulgation de la loi d'orientation agricole ;

Novembre 1999 : Ouverture à Seattle des négociations dans le cadre de l'OMC.

Mais au-delà de ces dates importantes qui sont autant de défis pour l'agriculture du troisième millénaire, ce sont les contradictions -évidentes- entre les différentes politiques qui frappent l'esprit.

En effet, les récents travaux de l'OCDE en matière agricole, la réforme de la PAC et de nombreux Etats membres de l'OMC prônent un alignement du marché agricole européen sur le marché mondial, au détriment à la fois des hommes par une restructuration excessive des exploitations et des territoires par une concentration de la production. Or, la nécessaire préservation d'une agriculture à la fois performante, responsable, gérant l'espace et répondant aux attentes des consommateurs exige une régulation des marchés.

Dans ce contexte, l'examen des crédits inscrits au budget du ministère de l'agriculture revêt une importance toute particulière. Traditionnellement, l'avis de votre commission sur ces crédits est l'occasion non seulement de mesurer l'attention portée, budgétairement, à ce secteur, mais aussi de retracer les principaux événements au cours de l'année écoulée et du premier semestre de l'année en cours.

Au niveau communautaire, votre rapporteur analysera de manière détaillée les réformes de la PAC et des fonds structurels issues du Conseil de Berlin de mars dernier.

Au niveau national, les rapports successifs de notre collègue M. Michel Souplet, rapporteur du projet de loi d'orientation agricole, permettent de suivre l'évolution de ce texte depuis son dépôt sur le bureau de l'Assemblée nationale en juin 1998. Votre rapporteur se limitera ainsi à une brève synthèse de la loi promulguée en juillet dernier et aux apports spécifiques du Sénat.

Le cadre d'action pour l'agriculture française que constitue la loi d'orientation agricole pour les dix années à venir et la position commune des quinze Etats membres sur la PAC doivent permettre à la France et à l'Europe, d'une part, d'affronter leurs partenaires internationaux lors des négociations du millénaire au sein de l'OMC et, d'autre part, d'intégrer les pays d'Europe centrale et orientale. La multiplication des conflits avec les Etats-Unis, notamment sur la banane et la viande aux hormones, présagent des difficultés que l'Europe va rencontrer en matière agricole dans ce nouveau cycle de négociations, qui devrait s'étendre sur trois années.

Si l'on s'en tient au chiffre présenté par le ministère, le budget 2000 augmente de 3 % puisque les crédits s'élèvent -hors subvention BAPSA- à 29.197,03 millions de francs (4.425,93 millions d'euros) en 1999.

Néanmoins, à périmètre comparable (c'est à dire hors Fonds forestier national et rémunération d'ingénierie publique comptabilisés dans le budget cette année), ce même budget baisse de - 0,5 % puisqu'il s'élève à 28.056,04 millions de francs (4.277,12 millions d'euros).

Votre rapporteur pour avis ajoute, dans un souci de transparence, que la baisse des taux d'intérêts entraîne une légère baisse automatique du budget en raison de la chute des dépenses de bonification des prêts (- 900 millions de francs / - 137,20 millions d'euros). En outre, le budget pour 2000 ne comptabilise plus la subvention au BAPSA qui était en baisse, en raison de l'amélioration des ressources propres de ce BAPSA.

Comme le souligne la présentation du budget par le ministère de l'agriculture et de la pêche, ce projet privilégie quatre grandes orientations : t out d'abord le financement des contrats territoriaux d'exploitation dont la dotation devrait atteindre 950 millions de francs (144,83 millions d'euros) ; ensuite, la qualité et la sécurité sanitaires des aliments, dont l'enveloppe globale est en hausse de plus de 921 millions de francs (140,41 millions d'euros). Par ailleurs, la promotion des actions en faveur de la forêt est encouragée. Enfin, la formation et l'enseignement voient leurs crédits augmenter globalement de 4 %. Sur ce dernier point, votre commission des Affaires économiques s'en remet à l'analyse de notre collègue M. Albert Vecten, rapporteur pour avis de la commission des Affaires culturelles.

Votre rapporteur pour avis prend acte de ces priorités. Il souhaite, néanmoins, porter à votre connaissance un certain nombre d'éléments qui tendent à relativiser l'enthousiasme du Ministre de l'agriculture qui, lors de la présentation de son budget, a considéré qu'un tel budget " permettra de satisfaire toutes les priorités de la nouvelle loi d'orientation agricole ".

Il ne s'agit pas ici de mettre en cause un manque de crédits : la rigueur dans la gestion de la dépense publique est aujourd'hui un impératif , impératif qui, soit dit en passant, n'est guère pris en compte au niveau global des dépenses de l'Etat pour l'année 2000.

On observe, en revanche, que l'augmentation des crédits en faveur de la qualité et de la sécurité sanitaires ainsi que la revalorisation des retraites est antérieure à 1997 : pour les retraites, le mouvement de revalorisation a débuté dès 1994 ; en ce qui concerne les dépenses en faveur de la qualité et de la sécurité alimentaires, M. Philippe Vasseur en avait fait l'une des priorités de son ministère.

Ensuite, votre rapporteur pour avis s'inquiète quelque peu de la priorité affichée par le Gouvernement en matière forestière. Un projet de loi d'orientation et de modernisation forestière est en préparation. Or, en intégrant le fonds forestier national au budget de l'Etat et en majorant les dépenses de l'Etat en faveur de la forêt pour 2000, ce dont votre rapporteur pour avis ne peut que se féliciter, le Gouvernement ne se prémunit-il pas de l'ardente obligation d'insérer dans le futur projet de loi les dispositions, notamment fiscales, nécessaires pour ce secteur d'activité ?

Par ailleurs, votre rapporteur pour avis a cherché en vain, dans le projet de loi de finances, les dispositions fiscales promises par le Gouvernement dans le domaine agricole lors de la discussion de loi d'orientation agricole. Or, depuis juin 1997, le Gouvernement aurait eu le temps de mettre en oeuvre les dispositions fiscales nécessaires à notre agriculture. Sans doute le Ministre nous répondra-t-il qu'il faut attendre les conclusions du rapport sur la fiscalité agricole : soit, mais souhaitons que cette attente sur la fiscalité agricole n'emprunte pas le chemin sinueux tracé par le Gouvernement pour l'avenir des retraites : réflexion, rapport, études, concertation et, de nouveau, rapport...

Néanmoins, dans l'attente de dispositions fiscales, les agriculteurs devront se contenter de l'extension de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) aux produits phytosanitaires affectée au budget de la sécurité sociale dans le cadre de la réduction du temps de travail. Votre rapporteur pour avis considère la TGAP sur les phytosanitaires comme un impôt injuste et inefficace et s'étonne d'une telle affectation.

De plus, votre rapporteur pour avis juge avec une certaine sévérité le système mis en place pour le financement des CTE soit, pour deux raisons principales : en premier lieu, c'est à nouveau un redéploiement de crédits qui alimentera ce fonds : ainsi on ampute des dotations telles que le fonds pour l'installation de 145 millions de francs et la dotation aux jeunes agriculteurs de 155 millions de francs alors que de nombreuses opérations avaient été initiées sur ces fondements budgétaires. Seront-elles maintenues ? L'année passée, il s'agissait des opérations groupées d'aménagement foncier ; à l'heure où l'installation est tombée à des seuils critiques, un tel redéploiement n'est guère raisonnable.

En second lieu, 950 millions de francs -soit l'équivalent du FCTE- devraient provenir de la modulation des aides provenant de la PAC. Si votre rapporteur pour avis n'est pas systématiquement contre ce principe de modulation, il constate qu'une fois de plus le Gouvernement de la majorité plurielle met en place " une usine à gaz ". D'ailleurs, à peine ce mécanisme a-t-il été annoncé que le Gouvernement faisait marche arrière, en précisant, lors de la Conférence agricole du 21 octobre dernier, qu'il en corrigeait les effets pervers. Il est vrai qu'entre temps, plusieurs études avaient montré que l'application de la modulation voulue par le Ministre risquait d'entraîner à moyen terme la disparition de plusieurs centaines d'exploitations agricoles situées en zones intermédiaires. Votre rapporteur regrette l'annonce hâtive et démagogique effectuée par le ministre de l'agriculture le 28 juillet dernier sur la modulation des aides.

Votre commission des Affaires économiques sera très vigilante sur l'évolution de ce dossier.

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