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AVANT-PROPOS

Le précédent rapport annuel du Sénat sur le contrôle de l'application des lois a constaté avec satisfaction que l'exécution des lois était devenue une « ardente obligation » 1 ( * ) pour le Gouvernement. Pendant toute la durée de la XII e législature, les Premiers ministres successifs, MM. Jean-Pierre Raffarin et Dominique de Villepin ont pris d'importantes mesures pour accélérer la publication des décrets et des arrêtés requis par le législateur. Le Sénat, ainsi que l'Assemblée nationale, ont exercé toute leur influence, selon leurs propres procédures, pour stimuler le suivi réglementaire.

Des résultats probants ont ainsi été obtenus. Le recul du taux d'application constaté sous la XI e législature (56 %), a non seulement été enrayé, mais encore surmonté : 64 % des mesures réglementaires, particulièrement nombreuses, prescrites par les lois votées au cours de la XII e législature, avaient été publiées au 30 septembre 2007.

Le présent rapport analyse les mesures prises par l'exécutif sur la première année pleine de la XIII e législature.

Un nouveau gouvernement étant avant tout préoccupé par la préparation et la mise en oeuvre de son programme législatif, il n'est pas surprenant que le Premier ministre ait attendu les premiers mois de 2008 pour appeler ses ministres à veiller à l'application des lois : il a présenté une communication, sur ce sujet, au Conseil des ministres du 13 février 2008.

La circulaire du 29 février 2008 2 ( * ) , dont on trouvera le texte ci-après, traduit la volonté de poursuivre dans la voie de l'amélioration. Le Premier ministre confirme qu'une obligation de résultat pèse sur le Gouvernement et sur chacun des ministres, ce qui, faut-il le souligner et l'espérer, n'est pas vraiment une nouveauté. La circulaire impose une méthode précise consistant :

- à créer, au sein de chaque ministère, une structure responsable de la coordination du travail d'application des lois, chargée d'assurer un suivi centralisé de l'application des lois et des éventuelles difficultés, afin d'en répondre au cabinet du Premier ministre et au Secrétariat général du gouvernement ;

- à organiser, après l'adoption d'une loi, une réunion interministérielle, pour déterminer le ministère responsable de la préparation de chaque décret et pour arrêter un échéancier prévisionnel ;

- à prévoir que ces échéanciers sont transmis par le Premier ministre aux deux assemblées 3 ( * ) ;

- à demander à chaque ministre concerné de répondre rapidement après saisine d'un projet de décret par le ministre rapporteur.

L'objectif du Gouvernement est toujours de parvenir à prendre toutes les mesures requises dans un délai de six mois suivant la publication de la loi.

Circulaire du 29 février 2008 relative à l'application des lois

Le Premier ministre à Monsieur le ministre d'Etat, Mesdames et Messieurs les ministres, Mesdames et Messieurs les secrétaires d'Etat, Monsieur le haut-commissaire

Veiller à la rapide et complète application des lois répond à une triple exigence de démocratie, de sécurité juridique et de responsabilité politique.

Faire en sorte que la loi s'applique rapidement, efficacement et de façon conforme à son esprit est un impératif démocratique. Chaque disposition législative qui demeure inappliquée est une marque d'irrespect envers la représentation nationale et de négligence vis-à-vis de nos concitoyens.

Faire en sorte que la période qui sépare la publication de la loi de l'intervention des mesures réglementaires d'application soit la plus brève possible est facteur de sécurité juridique. Dans l'attente de la parution des textes réglementaires, déterminer quel est le droit applicable ne va pas sans incertitude, parce qu'il peut être délicat de faire le départ entre les dispositions de la loi nouvelle qui sont suffisamment précises pour être immédiatement applicables et celles qui ne pourront recevoir application qu'après l'intervention des mesures réglementaires qui leur sont nécessaires.

Faire en sorte que soient rapidement prises les mesures réglementaires nécessaires à l'application de la loi est une condition de la crédibilité politique des réformes engagées par le Gouvernement. Le vote de la loi n'est pas l'achèvement de la réforme. Pour traduire la réforme dans les faits, il faut investir dans sa présentation, sa mise en oeuvre, son suivi et son évaluation. Il faut, déjà, veiller à prendre rapidement les décrets d'application des lois.

Au cours des dernières années, des progrès ont été accomplis. Mais l'objectif consistant à prendre toutes les mesures réglementaires nécessaires dans un délai de six mois suivant la publication de la loi n'est pas encore atteint.

Je considère qu'une obligation de résultat pèse sur le Gouvernement et sur chacun d'entre vous. Elément central du suivi des réformes, l'application de la loi doit retenir, tout autant que son élaboration, votre attention personnelle.

Une approche méthodique doit être retenue en ce domaine impliquant un effort d'organisation interne à chaque ministère, de programmation et de suivi des mesures attendues.

1. Je vous demande de désigner, au sein de votre administration centrale, une structure clairement identifiée qui sera responsable de la coordination du travail d'application des lois pour l'ensemble de votre ministère. Vous indiquerez au secrétariat général du Gouvernement, dans les meilleurs délais, les dispositions que vous aurez prises.

Il appartiendra à cette structure d'assurer un suivi centralisé de l'état des travaux de votre département ministériel au titre de l'application des lois et d'en répondre envers mon cabinet et le secrétariat général du Gouvernement.

Elle devra être en mesure de vous alerter en temps utile sur les difficultés susceptibles d'apparaître dans la préparation des mesures, qu'il s'agisse de difficultés afférentes à l'organisation des services, de difficultés interministérielles ou de mise en oeuvre des obligations de consultation.

2. L'adoption d'une loi nouvelle est suivie d'une réunion interministérielle qui permet de déterminer le ministère responsable de la préparation de chaque décret et d'arrêter un échéancier prévisionnel.

Cet échéancier sera désormais transmis par mes soins aux deux assemblées.

Un point de situation sera fait à l'issue d'une période de trois mois après l'adoption de la loi. Il permettra d'identifier les textes dont la préparation se heurte à des difficultés particulières. Ces textes feront l'objet d'un suivi étroit.

Un bilan de l'application des lois sera établi tous les six mois, ministère par ministère. Il sera adressé au Parlement, remis à la presse et mis en ligne sur internet.

3. De façon générale, je demande à chaque membre du Gouvernement de répondre rapidement lorsqu'il est saisi d'un projet de décret par le ministre rapporteur.

Toute difficulté, qu'elle résulte d'un différend interministériel exprès ou vienne d'une absence de réponse, doit être signalée sans tarder à mon cabinet qui provoquera une réunion d'arbitrage.

Par ailleurs, le gouvernement a introduit dans la loi de finances pour 2008 deux indicateurs de performance globale : le taux d'exécution des lois promulguées depuis le début de la législature et le taux d'application des lois promulguées au cours de la dernière session parlementaire, non renseignés pour le moment 4 ( * ) . Ces indicateurs complètent tous les autres indicateurs de même nature, figurant spécifiquement sous diverses missions budgétaires.

On notera également que M. François Fillon, Premier ministre, a expressément indiqué, dans son « Point de presse » sur la situation économique, le 18 août 2008, qu'il avait demandé « d'accélérer l'adoption des décrets d'application de la loi de modernisation de l'économie, pour que ses effets, notamment sur la baisse des prix, mais aussi sur le soutien aux entreprises, et en particulier aux PME, se fasse sentir sans délais ».

Un premier bilan semestriel, établi au 1 er juillet 2008, peut être consulté sur Légifrance , faisant apparaître « le taux d'exécution de l'ensemble des lois qui, parmi celles publiées entre le début de la XIII e législature (juin 2007) et le 31 décembre 2007, appellent des décrets d'application ».

L'Assemblée nationale et le Sénat ont également incité les ministres à une diligence accrue.

Les commissions de l'Assemblée nationale ont poursuivi pendant l'année parlementaire 2007-2008, la publication de leurs rapports sur l'application de lois particulières. Une douzaine de rapports ont été publiés, dont on trouvera la liste en annexe.

Le Sénat, comme chaque année, a fait preuve de vigilance pour contrôler l'application des lois. La procédure des questions au Gouvernement, orales ou écrites , a été largement utilisée, soit pour obtenir des informations sur l'état d'avancement de publication des décrets 5 ( * ) , soit pour s'assurer de la conformité à la loi des textes réglementaires déjà parus 6 ( * ) .

Les sénateurs, membres de la commission des affaires économiques, ont ainsi posé, en 2007-2008, 26 questions écrites sur l'exécution des lois.

Le contenu des rapports des commissions contribue également au contrôle de l'application des lois.

Il en va ainsi notamment du rapport d'information fait par M. Philippe Dallier, au nom de la commission des finances, sur le suivi du rapport d'information relatif à l'établissement public d'aménagement de la Défense (EPAD) 7 ( * ) . L'état de la publication, au 27 mars 2008, des décrets de la loi du 27 février 2007 est jugé « réalisé partiellement » ; aussi bien, M. Philippe Dallier affirme-t-il, dans ce document, la volonté de la commission des finances de poursuivre son contrôle et « faire que la loi du 27 février 2007, qui a posé les fondements de la nouvelle gouvernance de la Défense, ne reste pas lettre morte ». Une telle initiative traduit bien la persévérance dans l'action.

La commission des affaires culturelles a publié un rapport d'information de Mme Catherine Morin-Desailly sur les difficultés de mise en oeuvre de la décentralisation des enseignements artistiques 8 ( * ) et la commission des affaires sociales, un rapport de Mme Marie-Thérèse Hermange, sur l'évaluation de la loi du 31 janvier 2007 relative à l'accès au crédit des personnes présentant un risque aggravé de santé 9 ( * ) .

Les rapports budgétaires comportent des références au contrôle de l'application des lois.

Citons, par exemple :

- le commentaire de M. Marc Massion, rapporteur spécial de la commission des finances pour la mission budgétaire « Pilotage de l'économie française », sur le deuxième objectif du programme « Contribuer à l'accessibilité et à la clarté de la norme fiscale et accélérer la production des textes d'application de la législation fiscale » : après avoir constaté l'amélioration du pourcentage des textes d'application publiés dans le délai de 6 mois après l'entrée en vigueur de la disposition à appliquer, le rapporteur spécial souligne toutefois que « si l'indicateur proposé permet effectivement une évaluation des délais de production des textes d'application de la législation fiscale , il ne vise nullement à évaluer la clarté de cette norme fiscale . Il s'agit pourtant bien là également de l'un des volets de cet objectif fixé au programme » 10 ( * ) ;

- le jugement de M. Auguste Cazalet, rapporteur de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », sur l'évolution du délai moyen d'application des lois, en voie d'allongement, qui paraît « inacceptable » 11 ( * ) .

Mentionnons également, le bilan très précis effectué par Mme Jacqueline Gourault, dans son avis budgétaire présenté au nom de la commission des lois, sur le suivi réglementaire des trois lois de 2005 et de 2007 relatives à la fonction publique (loi du 26 juillet 2005 portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique ; loi du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique territoriale ; loi du 19 février 2007 relative à la fonction publique territoriale) 12 ( * ) .

La mobilisation de l'exécutif et du législatif ne s'est pas relâchée au cours de l'année parlementaire 2007-2008, ce qui témoigne de la volonté de tous les pouvoirs publics pour persévérer sur la voie d'une meilleure exécution des lois.

* 1 59 e rapport (année parlementaire 2006-2007), p.11 et sqq.

* 2 Journal officiel du 7 mars 2008.

* 3 Ainsi en a-t-il été pour les échéanciers des lois adoptées depuis le 1 er janvier 2008.

* 4 Mission « Direction de l'action du Gouvernement », programme 129, « Coordination du travail gouvernemental ».

* 5 Question orale sans débat de Mme Bariza Khiari, JO Sénat du 24 janvier 2008 (réponse JO Sénat du 6 février 2008) sur le décret d'application prévu par l'article 24 de la loi du 31 mars 2006 sur l'égalité des chances (« Curriculum vitae » anonyme, issu d'un amendement déposé par M. le Président Nicolas About, et adopté).

* 6 Question orale sans débat de M. Francis Grignon, JO Sénat du 29 novembre 2007 (réponse JO Sénat du 16 janvier 2008) sur le décret du 24 septembre 2007 portant application de l'article 1 er de la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat (application en Alsace-Moselle de l'exonération des heures supplémentaires).

* 7 Rapport d'information fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation, sur le suivi du rapport d'information n° 7 (2007-2008) relatif à l'établissement public d'aménagement de la Défense (EPAD) (Sénat, n° 246, session ordinaire 2007-2008, 27 mars 2008, pages 5, 7 et 9 à 11).

* 8 Sénat, n° 458 (2007-2008).

* 9 Sénat, n° 491 (2007-2008).

* 10 Sénat, n° 91, session ordinaire 2007-2008, tome III, annexe n° 19 (« Pilotage de l'économie française »), pages 23 et 24.

* 11 Sénat n° 91, session ordinaire 2007-2007, tome III, annexe n° 31 (« Solidarité, insertion et égalité des chances »), page 43.

* 12 Sénat, n° 96, session ordinaire 2007-2008, tome II (« Gestion des finances publiques et des ressources humaines », « Fonction publique et modernisation de l'Etat »), pages 37 à 39.

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