CHAPITRE III

LA SÉCURITÉ

I. UN CONSTAT D'ÉCHEC

1. Un dispositif institutionnel complexe...

A l'image de la politique de la ville, la politique de la sécurité connaît une multiplication des dispositifs contractuels et des instances de concertation. En effet, on peut recenser :

- au niveau communal : les contrats locaux de sécurité (CLS), les contrats d'action et de prévention pour la sécurité de la ville (CAPS), les conseils communaux de prévention de la délinquance (CCPD) chargés de mettre en oeuvre ces contrats. A propos de cette structure le ministère de l'intérieur indique que " les conseils communaux de prévention de la délinquance ont ouvert la voie à une approche concertée au niveau local de la prévention de la délinquance même si à l'usage, il apparaît que nombre d'entre eux ont surtout mis l'accent sur l'échange d'informations et l'organisation d'actions ponctuelles visant essentiellement la prévention de la délinquance juvénile ".

- au niveau départemental : les plans départementaux de sécurité (dont le ministère de l'intérieur note qu'ils ont " - il s'agit là de leur objectif principal - favorisé le développement de la collaboration entre les services de l'Etat et une meilleure coordination de leurs actions ") et les plans départementaux de prévention de la délinquance, mis en place en 1997, et qui " visaient essentiellement à coordonner les actions des différents partenaires des politiques de prévention en articulant les différents schémas sectoriels d'intervention ".

Or, si la multiplication de ces dispositif a pu permettre une meilleure articulation des actions des services de l'Etat et des autres partenaires locaux, la situation sur le terrain n'a pas connu d'amélioration sensible .

2. ... qui ne permet pas de juguler la montée de la délinquance

Si la délinquance de voie publique a baissé en 1999 par rapport à 1998 (1.338.121 infractions, en diminution de 3,1 %), il faut noter l'augmentation sensible des vols avec violence sur la voie publique, qui traduit le caractère de plus en plus violent de la délinquance . Cette délinquance violente est de plus en plus le fait des mineurs (l'augmentation annuelle du nombre de mineurs mis en cause a été supérieure à 10 % entre 1996 et 1998, et s'élève encore à 4,1 % entre l'année 1998 et l'année 1999). Il en va de même pour les violences scolaires, puisque le nombre de faits constatés par les services de la sécurité publique en 1999 est en forte hausse par rapport à 1998 (2.096 contre 1.741 en 1998). En particulier, les violences commises à l'égard des élèves (+ 22,7 %) et contre les personnels enseignants (+ 8,6 %) sont en forte progression.

B. L'ÉCHEC DES CONTRATS LOCAUX DE SÉCURITÉ

Les contrats locaux de sécurité (CLS) avaient été présentés, à l'occasion du colloque de Villepinte, en octobre 1997, sur le thème " Des villes plus sûres pour des citoyens libres ", comme la solution aux problèmes de sécurité dans les villes, par l'établissement d'un diagnostic et la mise en oeuvre d'une coopération accrue entre les différents acteurs (police nationale, police municipale et justice notamment). Parmi les 289 contrats locaux de sécurité signés au 31 août 1999, 79 % d'entre eux concernaient des sites relevant de la géographie de la politique de la ville (47 % sont en contrats de ville et 32 % sont en contrat d'action et de prévention pour la sécurité (CAPS)). Au 10 août 2000, 415 contrats locaux de sécurité sont signés, dont 132 intercommunaux et 12 spécifiques " transport ". Par ailleurs, 296 contrats sont en cours d'élaboration, dont 62 intercommunaux et 5 spécifiques " transport ".

Lorsqu'un contrat de ville est conclu, le contrat local de sécurité constitue la convention thématique du contrat consacrée à la sécurité, comprenant l'ensemble des actions entrant dans le champ de compétence du conseil local.

Les contrats locaux de sécurité devaient permettre l'apport, par l'Etat, de moyens supplémentaires grâce au programme de création - à terme - de 35.000 emplois de proximité. Or, il faut constater que les contrats locaux de sécurité n'ont pas répondu aux attentes fortes des maires . En effet, ils ont nécessité la réalisation d'études préalables coûteuses, et de nombreuses réunions de concertation entre les différents partenaires impliqués dans ce contrat pour la réalisation d'un document définitif. En revanche, leur mise en oeuvre n'a pas conduit à un accroissement des moyens déployés par l'Etat . Au contraire, ces contrats ont parfois conduit à un désengagement de l'Etat : la police nationale étant parfaitement au fait des activités de la police municipale, dans le cadre des échanges d'information prévus par les contrats, elle a pu se désengager vis-à-vis de certaines de ses missions. Si les échanges d'information semblent fonctionner de manière correcte dans ce sens, il convient de remarquer qu'il n'en va pas toujours de même dans le sens inverse : la police nationale est bien souvent réticente à communiquer ses plans d'action et ses moyens aux autorités locales.

A titre d'exemple, le décret n°2000-275 du 24 mars 2000 pris en application de la loi du 15 avril 1999 relative aux polices municipales, prévoit la mise en oeuvre de conventions de coordination entre la police nationale et la police municipale . Ces conventions prévoient, en particulier, l'échange d'informations entre les différents acteurs de la sécurité sur le territoire de la ville concernée. Or, à l'image des contrats locaux de sécurité ces conventions conduisent les polices municipales à fournir des informations sur leurs activités aux services de l'Etat sans que ceux-ci ne mettent en oeuvre d'efforts particuliers en contrepartie.

La plupart des CLS se contentent de mettre en face d'objectifs globaux des actions de prévention qui ressemblent trop souvent à de simples déclarations d'intention. Seuls quelques contrats locaux ont élaboré de véritables fiches-actions complètes, qui contribuent à l'élaboration d'une stratégie concertée et à l'adaptation permanente du dispositif en fonction des réalités locales et de leur évolution.

Les mesures développées par le gouvernement afin d'améliorer la gestion des problèmes de sécurité au niveau local se traduisent donc essentiellement par une demande d'implication accrue des acteurs locaux, et se concluent parfois par un désengagement des services de l'Etat plutôt que par un renforcement des dispositifs conjoints.

Afin de prendre en charge le problème de la sécurité dans les quartiers, il conviendrait de redonner un certain pouvoir aux maires sur les forces de police.

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