3. Une politique économique inadaptée

a) Les risques des « 35 heures »

Les « 35 heures » accroissent toutes les tensions auxquelles l'économie française est actuellement confrontée.

Les « 35 heures » brident le développement de l'offre par les entreprises françaises. La mise en oeuvre des « 35 heures » s'effectue à rebours du cycle : normalement, lors des phases de reprise de l'activité, la durée du travail s'accroît, notamment par un recours accru aux heures supplémentaires. En l'espèce, la durée du travail est arbitrairement réduite, alors même que nombre d'entreprises éprouvent de réelles difficultés à trouver la main d'oeuvre dont elles auraient besoin. Dans certains secteurs d'activité, comme le bâtiment, la situation devient critique.

Il en résulte que nombre d'entreprises ne peuvent ajuster leur production à la demande. En conséquence, elles subissent de plein fouet les conséquences dommageables de la dépréciation de l'euro sur leurs coûts de production, sans pouvoir les compenser en bénéficiant de ses effets favorables sur leur compétitivité pour exporter davantage. Par surcroît, l'effet de signal résultant de la mise en oeuvre isolée des « 35 heures » réduit l'attractivité relative du territoire pour les entreprises étrangères.

Au total, les « 35 heures » réduisent les capacités de production de la Nation. Or, la réduction du temps de travail n'est durablement créatrice d'emplois que si elle ne freine pas la croissance.

La mise en oeuvre des « 35 heures » renforce les tensions inflationnistes. En effet, les entreprises qui sont déjà passées aux « 35 heures » sont celles pour qui l'opération était avantageuse ou relativement aisée. Pour les autres, la réduction du temps de travail accroît les coûts de production. Par ailleurs, les « 35 heures » accentuent les tensions sur les salaires. En effet, en période de reprise, les rémunérations réelles des salariés accélèrent, en raison notamment des heures supplémentaires. Cependant, compte tenu de la modération salariale nécessitée par les « 35 heures », les salariés voient la période de forte croissance s'accompagner d'une progression du pouvoir d'achat par tête qui reste très faible (moins de 1 % par an). Cette situation est difficilement tenable, notamment dans les secteurs qui connaissent des difficultés de recrutement. Il est donc à craindre que les coûts salariaux de production n'accélèrent. Or, la réduction du temps de travail n'est durablement créatrice d'emploi que sous la condition d'une modération durable des salaires.

Enfin, le coût des « 35 heures » pour les finances publiques ne cesse d'augmenter. Ce coût dépasse aujourd'hui très largement le point d'équilibre où s'égalisent les dépenses liées aux allégements de charges sociales, d'une part, les recettes liées aux créations d'emplois induites, d'autre part. Par surcroît, cette dérive risque de s'accentuer si les « 35 heures » sont étendues à la fonction publique sans gel des salaires. Or, la réduction du temps de travail n'est durablement créatrice d'emplois que si la mise en oeuvre ne dégrade pas le solde des finances publiques.

Au total, tous les équilibres macro-économiques sur lesquels le gouvernement fondait la réussite des « 35 heures » sont rompus.

Dans la conjoncture actuelle, non seulement la poursuite de la réduction obligatoire du temps de travail ne pourrait plus créer d'emplois, mais les emplois qui auraient pu être créés sont menacés. Dans ces conditions, votre rapporteur général estime indispensable d'assouplir immédiatement le régime des heures supplémentaires, et de reporter l'obligation légale de réduction du temps de travail, aussi bien pour les petites et moyennes entreprises que pour les secteurs confrontés à des difficultés de recrutement.

Il semble d'ailleurs que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ait tardivement pris conscience, puisqu'il s'est récemment prononcé en faveur d'un tel assouplissement. Pourtant, le gouvernement n'a, à ce jour, annoncé aucune mesure concrète en ce sens.

Comme sur la période 1988-1990, des erreurs de politique économique risquent donc de « casser » la croissance impulsée par un environnement international porteur.

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