Rapport n° 253 (2001-2002) de Mme Gisèle GAUTIER , fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 20 février 2002

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N° 253

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2001-2002

Annexe au procès-verbal de la séance du 20 février 2002

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) sur la proposition de loi de M. Daniel GOULET portant sur certaines mesures de prévention des risques de pollutions maritimes par les hydrocarbures ,

Par Mme Gisèle GAUTIER,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Gérard Larcher, président ; MM. Jean-Paul Emorine, Marcel Deneux, Gérard César, Pierre Hérisson, Jean-Marc Pastor, Mme Odette Terrade, vice-présidents ; MM. Bernard Joly, Jean-Paul Émin, Patrick Lassourd, Bernard Piras, secrétaires ; MM. Jean-Paul Alduy, Pierre André, Philippe Arnaud, Gérard Bailly, Bernard Barraux, Mme Marie-France Beaufils, MM. Michel Bécot, Jean-Pierre Bel, Jacques Bellanger, Jean Besson, Claude Biwer, Jean Bizet, Jean Boyer, Mme Yolande Boyer, MM. Dominique Braye, Marcel-Pierre Cleach, Yves Coquelle, Gérard Cornu, Roland Courtaud, Philippe Darniche, Gérard Delfau, Rodolphe Désiré, Yves Detraigne, Mme Evelyne Didier, MM. Michel Doublet, Paul Dubrule, Bernard Dussaut, André Ferrand, Hilaire Flandre, François Fortassin, Christian Gaudin, Mme Gisèle Gautier, MM. Alain Gérard, François Gerbaud, Charles Ginésy, Francis Grignon, Louis Grillot, Georges Gruillot, Charles Guené, Mme Odette Herviaux, MM. Alain Journet, Joseph Kerguéris, Gérard Le Cam, Jean-François Le Grand, André Lejeune, Philippe Leroy, Jean-Yves Mano, Max Marest, René Monory, Paul Natali, Jean Pépin, Daniel Percheron, Ladislas Poniatowski, Jean-Pierre Raffarin, Daniel Raoul, Paul Raoult, Daniel Reiner, Charles Revet, Henri Revol, Roger Rinchet, Claude Saunier, Bruno Sido, Daniel Soulage, Michel Teston, Pierre-Yvon Trémel, André Trillard, Jean-Pierre Vial.

Voir le numéro :

Sénat : 158 (1999-2000)

Environnement.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

C'est quelques jours seulement après le dramatique naufrage du pétrolier Erika, intervenu, rappelons-le, le 12 décembre 1999, que M. Daniel Goulet déposait la présente proposition de loi qui tendait à proposer des mesures immédiates de prévention des risques de pollutions maritimes par les hydrocarbures.

Il convient de rendre un hommage appuyé à l'esprit d'initiative et de réactivité de notre collègue qui a imaginé, dans un délai extrêmement bref, des solutions tout à la fois dissuasives, répressives et institutionnelles au problème de la prévention des pollutions causées par les navires pétroliers.

Aux termes de l'article 28-2 du règlement du Sénat, les propositions de loi sur lesquelles le Sénat n'a pas statué deviennent caduques de plein droit à l'ouverture de la troisième session ordinaire suivant celle au cours de laquelle elles ont été déposées.

La proposition de loi de M. Daniel Goulet serait ainsi devenue caduque à l'ouverture de la session ordinaire 2002-2003, à l'automne prochain.

Il convenait donc, afin que ce problème majeur soit à nouveau abordé dans un contexte européen qui en fait un sujet d'une brûlante actualité, que notre commission des affaires économiques examine rapidement les tenants et les aboutissants d'un texte dont les motivations et les objectifs ne peuvent que recueillir l'assentiment général.

Que propose cette proposition de loi ?

Elle met avant tout en place une préférence communautaire pour le choix des armateurs et des organismes émetteurs de certificats (les sociétés dites de « classification ») en ce qui concerne les navires utilisés pour le transport d'hydrocarbures.

L'article premier de la proposition de loi dispose, ainsi, que le recours à des affréteurs, sous-affréteurs, armateurs ne relevant pas d'un pays appartenant à l'Union européenne est interdit aux sociétés pétrolières exerçant directement ou indirectement une activité sur le territoire national.

L'article 2 de la proposition de loi prévoit, dans son premier alinéa, que les certificats délivrés par un Etat non communautaire ou n'ayant pas ratifié de conventions internationales ayant pour objet la prévention de la pollution par les hydrocarbures et l'indemnisation des victimes de pollution, devront être délivrés par une société de classification dont le siège est établi dans l'un des pays de l'Union européenne.

Le texte ajoute, dans un second alinéa, que les certificats établis par les Etats non communautaires ne pourront être validés que par une « commission nationale » et sous réserve du versement d'une garantie bancaire d'un montant au moins équivalent à celui de la valeur marchande de la cargaison.

Les autres articles de la proposition proposent des mesures que l'on pourrait qualifier de dispositions de conséquence ou de procédure.

Sur le plan pénal, l'article 3 énonce que les infractions aux dispositions précitées seront punies de dix ans d'emprisonnement et d'une amende de 152.449 euros (1.000.000 de francs), les tentatives desdites infractions étant punies de la même peine.

Il est ensuite précisé que le fait de s'opposer ou de faire obstacle à ces procédures sera puni de cinq ans d'emprisonnement et de 76.224,51 euros (500.000 francs) d'amende.

L'article 4 énonce que les personnes morales pourront être déclarées responsables pénalement dans les conditions prévues par le code pénal.

Les peines encourues par les personnes morales seront, précise-t-il, outre l'amende et les autres peines mentionnées par le même code, les interdictions d'exercice.

L'article 5 dispose, notamment, que les officiers de police judiciaire agissant conformément aux dispositions du code de procédure pénale, mais aussi les agents des ministères de l'environnement, des transports et de la mer habilités, les agents des douanes, de même que les autorités portuaires pourront constater les infractions nouvellement créées.

L'article 6 prévoit que lorsque les infractions aux dispositions de l'article 2 seront commises hors du territoire de la République par un Français, la loi pénale française sera applicable.

L'article 7 de la proposition de loi crée la commission nationale, mentionnée à l'article 2, qui serait notamment chargée de la vérification des certificats, ainsi que du suivi des conventions internationales relevant de ce domaine. Il en précise la composition.

L'article 8 de la proposition de loi précise les missions de la commission qui assurerait le suivi de l'application de la présente loi et de l'action internationale de la France en matière de prévention, de contrôle, de police et d'assistance aux victimes de pollution par les hydrocarbures.

Elle participerait aux actions du programme Fipol.

Elle aurait, aussi, pour mission de tenir à jour un site Internet regroupant toutes les informations en liaison avec les problèmes relevant de sa compétence ; ce site, établi dans les langues des pays de la communauté européenne sera destiné à recueillir les informations techniques ou autres ainsi que celles en provenance de personnes du monde entier concernant outre des informations, des incidents liés à la pollution et l'identité des responsables.

L'article 9 dispose que les visites et la procédure de contrôle, y compris à bord des navires, s'effectueront conformément aux règles de procédure applicables en France et conformément aux principes édictés par les conventions internationales.

L'article 10 de la proposition de loi précise que la présente loi sera rétroactive et s'appliquera à tous les transports en cours, même si les contrats que les ont fait naître sont antérieurs à sa promulgation.

L'article 11 de la proposition de loi prévoit enfin l'application du texte aux territoires d'outre-mer et à la collectivité territoriale de Mayotte.

Votre rapporteur a procédé à l'audition du directeur des affaires maritimes au ministère de l'équipement, des transports et du logement, ainsi qu'à celle des représentants des opérateurs français concernés par le dispositif de la présente proposition de loi : armateurs et sociétés pétrolières.

De ces entretiens, elle a tiré un certain nombre d'enseignements.

Quelques chiffres tout d'abord pour bien « situer » le problème.

Les importations de pétrole brut dans les ports français se sont élevées, en 2000, à 98 millions de tonnes. Le trafic import-export de produits pétroliers raffinés, dans ces mêmes ports, s'est établi à 53 millions de tonnes cette même année.

En 2001, la flotte pétrolière française a représenté 4,8 millions de tonnes en « port lourd ».

La flotte pétrolière mondiale représentait, quant à elle, environ 275 millions de tonnes en « port lourd ».

Les dix premières flottes pétrolières constituaient 75,3 % de la flotte pétrolière mondiale.

Sur ces dix flottes, on ne trouve que deux flottes « communautaires » celle du Royaume-Uni (2,3 % de l'ensemble) et celle de la Grèce (8,9 % de l'ensemble).

A titre de comparaison, la flotte du Panama représentait 17,8 % de l'ensemble, celle du Libéria 12,9 %.

Sur un effectif mondial de 7.225 « tankers », tous les pays de l'OCDE (c'est-à-dire l'Union européenne mais aussi les USA, le Japon, le Canada, etc...) n'immatriculaient que 2.150 navires, soit 27,5 % de l'ensemble.

Ces quelques éléments donnent une idée des « limites physiques » auxquelles le repliement de nos échanges dans un cadre strictement communautaire se heurterait.

De fait, la flotte pétrolière de l'Union européenne (13,5 % de la flotte mondiale de « tankers » en incluant les registres bis) ne couvrirait pas les besoins du raffinage français.

Au simple point de vue de la prévention des pollutions, le texte proposé n'aurait qu'une efficacité limitée dès lors que 80 % des pétroliers, qui traversent la Manche, ne touchent pas un port français et échapperaient à des mesures purement nationales ; ce dispositif ne concernerait, par ailleurs, que les sociétés pétrolières et pas les autres transporteurs, chargeurs ou « traders » susceptibles de détenir des produits polluants ou dangereux.

Les professionnels font, de plus, valoir que les sociétés pétrolières françaises seraient pénalisées par rapport aux autres entreprises européennes qui conserveraient la possibilité de sélectionner leurs navires dans la flotte mondiale tandis que, dans le même temps, les transporteurs extra-communautaires ne pourraient que réagir contre des mesures discriminatoires contraires au droit du commerce international.

Cela étant dit, il était nécessaire de réagir mais dans l'espace qui a semblé le plus pertinent, c'est-à-dire pas au niveau national mais à un échelon au moins communautaire, ainsi que dut en convenir le ministre chargé des transports, après le naufrage de l'Erika, et ainsi que cela fut souligné par notre collègue Henri de Richemont dans son rapport pour la mission commune d'information du Sénat chargée d'examiner l'ensemble des questions liées à la « marée noire » (rapport déposé le 27 juin 2000).

Ainsi que l'a souligné avec force, devant votre rapporteur, le directeur des affaires maritimes, la question de la nationalité de l'armateur, de l'affréteur ou de la société qui délivre les certificats n'est pas la plus importante. Ce qui compte, c'est la responsabilité de l'Etat qui immatricule, c'est-à-dire l'Etat dit du « pavillon ».

Ce qui compte surtout, c'est l'état de dangerosité des navires dû notamment à leur âge. A cet égard, il convient de noter qu'à hauteur des deux-tiers environ, la flotte pétrolière de l'Union européenne a plus de vingt ans.

Tous nos interlocuteurs ont plaidé pour des contrôles renforcés au sein de l'Union européenne visant tous les opérateurs qui fréquentent des ports européens et non les opérateurs de telle ou telle nationalité. (Il a été rappelé que l'armateur et l'équipage de « l'Ievoli Sun » étaient de nationalité « communautaire » ; le navire lui-même étant, d'ailleurs, « à double coque »).

L'objectif doit être le respect, par tous, des règlements internationaux qui constituent la contre-partie de la liberté du commerce et de la navigation. Selon les représentants des armateurs français, la violation de ces règles, par certains de ces opérateurs, peut aboutir à une économie frauduleuse de près de 25 %. C'est au nom du respect de la concurrence que ces professionnels se font aussi les avocats du strict respect des conventions internationales par l'ensemble des opérateurs.

Depuis le naufrage de l'Erika, la Commission européenne a adopté deux séries de mesures qui ont constitué les « paquets » Erika 1 et Erika 2.

Les interlocuteurs de votre rapporteur ont tous souhaité une application rapide et efficace de ces propositions.

Elle vous en rappellera brièvement l'économie :

A. PAQUET ERIKA I (MISE AU POINT MARS 2000 - ADOPTION DÉFINITIVE : DÉCEMBRE 2000 - ENTRÉE EN VIGUEUR : JUIN 2002)

- le renforcement des contrôles dans les ports

Les navires immobilisés à plusieurs reprises pour leur mauvaise condition et qui battent pavillon de complaisance seront bannis et se verront désormais refuser l'entrée des ports de l'Union sur base d'une liste noire publiée par la Commission.

Tous les navires à risque seront soumis à une inspection annuelle renforcée obligatoire. Ces inspections seront décidées en fonction de l'âge et de la catégorie du navire (par exemple pétroliers âgés de plus de 15 ans tel que l'Erika), mais également en fonction de son « coefficient de ciblage », outil de mesure du risque potentiel posé par un navire.

Ces nouvelles règles devraient également permettre un renforcement notable des corps d'inspection des navires dans les ports et faciliter le respect par les Etats membres du seuil d'inspection obligatoire fixé par le « Mémorandum de Paris » signé en 1982.

- le renforcement du contrôle des activités des sociétés de classification

Les nouvelles règles adoptées permettront de mieux garantir la qualité des sociétés reconnues au plan européen. Elles introduisent notamment :

- une nouvelle sanction : la suspension d'agrément communautaire pour un an, qui peut conduire à un retrait définitif d'agrément si les défaillances qui ont provoqué la suspension subsistent ;

- l'exigence préalable de bonne performance de sécurité et de prévention des pollutions avant de se voir octroyer l'agrément communautaire ;

- des critères de qualité plus stricts, notamment le respect de certaines procédures en cas de changement de classe et plus de transparence dans la communication des informations sur les navires en classe.

- l'élimination des pétroliers à simple coque

Le règlement nouvellement adopté généralise l'interdiction des pétroliers à simple coque au plus tard en 2015, selon un calendrier d'élimination progressive.

B. PAQUET ERIKA (MISE AU POINT DÉCEMBRE 2000 - ADOPTION DÉFINITIVE MARS 2002 - ENTRÉE EN VIGUEUR : 2003)

- la mise en place d'une agence européenne

Cette agence soutiendra l'action de la Commission, des Etats membres et des Etats candidats à l'adhésion. Elle évaluera l'efficacité des mesures de sécurité maritime mises en place. L'Agence aura aussi pour tâche la collecte d'informations, l'exploitation de bases de données sur la sécurité maritime, l'évaluation et l'audit des sociétés de classification maritime, et l'organisation de missions d'inspection dans les Etats membres pour vérifier les conditions de contrôle de l'état des ports.

- l'amélioration du signalement et du suivi des navires

Une proposition de directive prévoit la mise en place d'un système de notification couvrant également les navires qui ne font pas escale dans les ports de la communauté. Elle rend obligatoire, dans les eaux de la communauté, la présence sur les navires de « transpondeurs » (systèmes d'identification automatique), ainsi que de « boîtes noires », similaires à celles utilisées dans l'aviation afin de faciliter les enquêtes en cas d'accident. Cette directive vise à améliorer les procédures concernant la transmission et l'exploitation des données relatives aux cargaisons dangereuses.

- l'amélioration des régimes de responsabilité et de compensation des dommages de pollution en vigueur

La commission propose la création d'un fonds de compensation des dommages de pollution, qui complèterait, à concurrence d'un plafond global de 1 milliard d'euros, l'indemnisation des victimes en cas de dépassement des plafonds fixés par les règles existantes qui s'élèvent actuellement à 200 millions d'euros. La proposition de la commission européenne prévoit également l'imposition par les Etats membres d'amendes financières en cas de comportement négligent de la part de toute personne impliquée dans le transport des hydrocarbures par mer.

*

* *

Votre rapporteur ne cachera pas, toutefois, que ses interlocuteurs ont unanimement lancé une sorte de « cri du coeur » : « Ne nous faites plus de textes », mais « donnez-nous des moyens ! » De fait, cette question des moyens demeure centrale et conditionne toute vraie politique de prévention des risques.

On connaît les dotations quasi minuscules que le budget de l'Etat consacre chaque année à la mer. En 2002, l'ensemble de dotations affectées aux services maritimes, aux ports et au littoral n'atteindra (hors sécurité sociale des marins) que 150 millions d'euros, c'est-à-dire un peu plus de 1 % du budget du ministère de l'équipement et environ 0,1 % du budget national !

Le corps des contrôleurs maritimes n'est composé que d'une cinquantaine de fonctionnaires (environ 200 en Espagne ; 250 en Grande-Bretagne).

Selon les termes de la convention internationale de 1982 dite « mémorandum de Paris », nous nous étions engagés à contrôler 25 % des navires de commerce étrangers entrés dans les ports français. En 2001, faute de moyens, ce pourcentage a atteint 12 %. En fait, le taux d'inspection n'a fait que régresser : 24 % en 1997, 20 % en 1998, 14 % en 1999, 12 % en 2000 ! Les succès technologiques français -tels que la conception et la mise en oeuvre en mai 2000, avec le soutien de l'organisation maritime internationale, du projet de système d'informations « Equasis » sur l'état des navires « en temps réel »- ne peuvent dissimuler ces graves carences qui rappellent que la mer et les services maritimes ne constituent pas -et de loin- une priorité gouvernementale et ne disposent pas, en conséquence, des moyens adaptés.

La proposition de loi de notre collègue M. Daniel Goulet vient nous rappeler que la pérennisation de cette politique maritime parcimonieuse peut être grosse de conséquences désastreuses. Sa discussion, devant notre commission, intervient, par ailleurs, dans un contexte délicat puisque le 15 mars prochain, la Commission européenne va décider de la ville européenne qui accueillera le siège de cette nouvelle agence européenne de sécurité maritime , prévue par le paquet « Erika II », et sur laquelle nous devons, légitimement, fonder de grands espoirs. A cet égard, une grande cité maritime française est candidate : il s'agit de la métropole de Nantes-Saint-Nazaire .

L'agence européenne aura besoin d'un environnement scientifique, juridique et technologique apte à lui apporter des services de haut niveau. La métropole nantaise concentre un ensemble unique de compétences académiques dans le domaine maritime, qui fonctionnent en réseau avec leurs partenaires nationaux et européens. Citons l'institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (Ifremer) et les 300 collaborateurs qui lui sont rattachés et qui pilotent les réseaux de surveillance du littoral et dont les équipes de recherche sont tournées vers l'environnement littoral (connaissance du milieu, protection des espèces et des consommateurs, lutte contre les polluants chimiques...).

En second lieu, l'université de Nantes développe un véritable pôle pluridisciplinaire « mer et littoral » autour de deux axes complémentaires : les sciences naturelles liées au milieu marin (biologie, écotoxicologie, génie de l'environnement...) ; les applications juridique et humaines (droit maritime, économie, sociologie et géographie maritimes...). Ce pôle fédère aujourd'hui 150 enseignants-chercheurs, techniciens et étudiants en thèse. Son travail bénéficie d'une bonne audience internationale, à l'image du centre de droit maritime et océanique (CDMO) qui publie depuis 1974 l'annuaire de droit maritime et océanique et a créé le premier serveur Internet au monde en la matière.

Citons encore l'institut supérieur de recherche en économie maritime (Isemar), qui fait de la recherche appliquée dans les domaines du transport maritime, de la logistique, de la réglementation (politique maritime, de la construction navale et de l'activité portuaire). En son sein, collaborent des professionnels de l'économie maritime, des développeurs locaux et une importante communauté scientifique.

N'oublions pas non plus l'école nationale de la marine marchande, basée à Nantes, qui a mis en place, à la rentrée 2001, la première formation à vocation européenne consacrée à la sécurité maritime.

Les conditions d'accueil et l'excellente situation de Nantes-Saint-Nazaire, en termes de connexion aux réseaux de transport et de télécommunication, devraient aussi influencer les décideurs européens.

Il reste que d'autres villes européennes sont aussi candidates (Gènes, Lisbonne, ...) et que des considérations politiques pourraient détourner la Commission européenne d'un choix qui paraît présenter, objectivement, un maximum d'avantages.

Votre rapporteur souhaiterait que le procès-verbal de la réunion de notre commission puisse faire état de son appui sans réserve à la solution française.

Ce choix contribuerait à relancer une politique maritime française aujourd'hui somnolente.

Sur la base des constats et recommandations de notre collègue Henri de Richemont pour la mission commune d'information du Sénat, il est apparu à votre rapporteur que toute amélioration de notre dispositif préventif passait, en tout premier lieu, par un renforcement des contrôles exercés à tout le moins par ce « noyau dur » que représentent les pays de l'Union européenne.

Comme on le sait, le niveau et le champ des indemnisations sont régis par des conventions internationales (principalement les conventions « FIPOL » et CLC sur la responsabilité de 1992). Tout au plus, pouvons-nous, à l'échelon communautaire, mettre sur pied un fonds d'indemnisation complémentaire ainsi que l'envisage, d'ailleurs, le paquet « Erika II ».

En revanche, les décisions sur le contenu, l'étendue et la fréquence des contrôles à opérer pour assurer le respect des normes internationales ou européennes doivent être, à l'évidence, du ressort de l'autorité communautaire afin de promouvoir une véritable politique européenne de sécurité maritime.

Nous est-il pour autant interdit de mettre en place, dans un souci d'efficacité accrue, des mesures nationales dans le domaine de la sécurité maritime et de la prévention des risques de pollutions, en particulier hydrocarbures ?

Notre collègue M. Daniel Goulet s'y est essayé courageusement, il y a un peu plus de deux ans, en suggérant des solutions instaurant une forme de préférence communautaire.

Depuis, plusieurs événements importants se sont produits, qu'il s'agisse de propositions nouvelles de la Commission européenne (« paquets » Erika I et II) ou d'un nouveau naufrage lourd de risques potentiels (celui de « L'Ievoli Sun ») qui a démontré que la nationalité « communautaire » (de même que la « double coque ») ne suffisaient pas, hélas, à présenter toutes les garanties.

Dans ce contexte, votre rapporteur juge souhaitable de demander au Gouvernement qu'il nous communique avant le premier juillet 2003 un rapport présentant le bilan des mesures adoptées à la suite du naufrage de l'Erika et précisant les « espaces pertinents » d'intervention dans le domaine de la sécurité maritime.

Au niveau tant institutionnel que fiscal ou social, ou s'agissant encore de dispositions normatives ou de mesures d'interdiction ou de répression, il sera, en effet, intéressant de connaître les champs respectifs de la convention internationale, du niveau communautaire ou de l'autorité nationale.

Au vu des conclusions de ce rapport, il sera alors possible d'envisager, le cas échéant, des mesures législatives nouvelles qui prendront en compte « l'acquis communautaire » dans le cadre -souhaitons-le- d'une nouvelle politique maritime qui saura doter la Mer des moyens financiers et humains dont elle a besoin.

*

* *

Réunie le 20 février 2002 pour examiner le présent rapport, la commission en a retenu les orientations et, sur proposition du rapporteur, a adopté un article unique au terme duquel : « Avant le 1er juillet 2003, le Gouvernement devra communiquer au Parlement un rapport présentant le bilan des décisions et mesures adoptées aux plans international, communautaire et national à la suite du naufrage de l'Erika intervenu le 12 décembre 1999. Ce rapport précisera les champs respectifs de ressort de la convention internationale, de l'acte communautaire et de la loi nationale dans le domaine de la prévention des pollutions maritimes notamment par les hydrocarbures ».

Elle a apporté, à l'unanimité, son soutien à la candidature de Nantes-Saint-Nazaire comme ville siège de la future agence européenne de sécurité maritime.

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