III. LES PRINCIPALES DISPOSITIONS DU PROJET DE LOI

A. LA MODERNISATION DES AUTORITÉS DE CONTRÔLE

1. L'Autorité des marchés financiers

L'organisation actuelle de la régulation financière dans notre pays est peu lisible , notamment pour nos partenaires étrangers. Or la régulation est un élément essentiel de la compétitivité d'une place et les « batailles de bourses » auxquelles nous assistons périodiquement plaident pour donner un système de régulation efficace à la Place de Paris.

En 1996, il a été choisi de mettre, au même niveau , deux autorités :

- l'une, « autorité administrative indépendante » (entité publique sans personnalité morale), la Commission des opérations de bourse (COB) ;

- et l'autre, « autorité dite professionnelle » (personne morale de droit privé), le Conseil des marchés financiers (CMF).

La mesure emblématique de ce projet de loi réside dans la suppression de ce dualisme par la création de l'Autorité des marchés financiers (AMF), autorité boursière unique qui fusionne les trois autorités existantes : la Commission des opérations de bourse (COB), le Conseil des marchés financiers (CMF) et le Conseil de discipline de la gestion financière (CDGF).

Cette fusion est de nature à rendre notre dispositif de surveillance des marchés financiers plus efficace et plus lisible. La nouvelle autorité bénéficiera d'un statut inédit d'« autorité publique indépendante dotée de la personnalité morale » qui lui confèrera une grande autonomie fonctionnelle mais aussi financière, lui permettant de recruter du personnel de très haut niveau ( articles 1 er à 20 ).

2. La validation de positions anciennes de votre commission des finances

La juxtaposition depuis 1996 de la COB et du CMF a été source de chevauchements de compétences et l'absence de coordination institutionnelle entre elles n'en a pas permis la résolution en termes suffisamment simples, clairs et lisibles. En effet, les « cultures » des deux institutions sont réellement dissemblables, ce qui peut les conduire à appuyer leurs décisions sur des concepts hétérogènes.

Dès 1994 18 ( * ) , c'est-à-dire avant même la fusion du Conseil des bourses de valeurs (CBV) avec le Conseil des marchés à terme (CMT) pour donner naissance au CMF, votre rapporteur faisait la réflexion suivante sur l'organisation des autorités de contrôle françaises : « Comme on le voit, il s'agit d'une organisation très complexe, avec un nombre important d'autorités, ce qui est susceptible d'engendrer des problèmes de frontières , notamment sur le marché boursier pour ce qui est des compétences respectives de la COB et du CBV ».

Il ajoutait plus loin : « Actuellement, la COB, autorité publique, est placée sur le même plan que les autorités professionnelles : CBV et CMT. Quoique les compétences ratione materiae de ces trois autorités ne soient pas les mêmes, elles portent partiellement sur les mêmes entreprises et les mêmes opérations, ce qui est, comme on l'a vu, une source potentielle de conflits, de compétitions ou de surenchères ».

C'est pourquoi votre commission des finances avait proposé à plusieurs reprises de ne pas positionner la COB « à côté » de l'autorité professionnelle mais d'en faire au contraire la « clef de voûte » du dispositif de contrôle des marchés financiers.

Les analyses de votre commission des finances, constantes depuis 1994, se trouvent donc parfaitement confirmées aujourd'hui par l'ensemble des acteurs de la place de Paris, avec, il est vrai, un certain retard ...

L'évolution aujourd'hui proposée aurait pu être réalisée plus rapidement sans les atermoiements du gouvernement précédent . Le 10 juillet 2000, devant les représentants de la place de Paris et les investisseurs internationaux qui avaient répondu à l'invitation de l'association Paris Europlace, M. Laurent Fabius, alors ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, avait annoncé sa volonté de réformer l'architecture actuelle des autorités de régulation en matière financière et notamment de proposer la fusion de la Commission des opérations de bourse (COB) et du Conseil des marchés financiers (CMF).

Votre rapporteur s'était réjoui d'une telle initiative largement justifiée sur le fond et qui confirmait ses propres analyses de l'architecture de notre système de régulation.

Le gouvernement a tout d'abord envisagé d'introduire cette réforme par voie d'amendement dans le projet de loi relatif aux nouvelles régulations économiques, en discussion au cours de l'année 2000 devant le Parlement.

Puis, se ravisant, il a décidé de rédiger un projet de loi spécifique intitulé « Réforme des autorités financières » déposé le 7 février 2001 sur le bureau de l'Assemblée nationale 19 ( * ) . Ce projet de loi, dont l'examen était prévu au printemps 2001, a subitement été retiré de l'ordre du jour de l'Assemblée nationale et son examen repoussé sine die . La fin de la précédente législature l'a rendu caduc.

Au cours de la précédente législature, votre rapporteur a déploré les tergiversations techniques et politiques du précédent gouvernement qui ont nui à la crédibilité de la place de Paris et, plus largement, à la réputation de la France. Il lui avait alors semblé indispensable de proposer sa conception de l'organisation de notre régulation financière, lors de l'examen en première lecture du projet de loi relatif aux nouvelles régulations économiques 20 ( * ) , puis à nouveau dans le projet de loi portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier 21 ( * ) .

En d'autres termes, depuis deux ans, le Sénat a adopté à trois reprises, à l'initiative de votre commission des finances, le principe de la fusion entre la COB et le CMF.

3. Les autorités prudentielles

La création de l'AMF ne doit pas éclipser une autre réforme de notre paysage institutionnel financier qui est tout aussi fondamentale : la création d'une Commission de contrôle commune aux entreprises d'assurance, aux mutuelles et aux institutions de prévoyance (CCAMIP), par fusion des actuelles Commission de contrôle des assurances (CCA) et Commission de contrôle des mutuelles et des institutions de prévoyance (CCMIP). Depuis 2001, entreprises d'assurance, mutuelles et institutions de prévoyance sont soumises aux mêmes règles prudentielles : il est normal qu'elles soient désormais contrôlées par une même commission. Cette réforme devrait rendre notre dispositif de contrôle du secteur de l'assurance plus efficace et plus lisible ( article 26 ).

En outre, dans un secteur financier où les lignes de partage entre métiers s'estompent petit à petit, les mondes des banques et de l'assurance ne peuvent plus s'ignorer. C'est pourquoi le gouvernement propose de rapprocher leurs commissions de contrôle , la Commission bancaire et la nouvelle CCAMIP ( article 30 ) et de créer deux nouvelles instances consultatives qui se substituent aux multiples instances qui interviennent aujourd'hui, à des titres divers et avec des pouvoirs et des compositions hétérogènes, dans le secteur de la banque et de l'assurance : le Comité consultatif du secteur financier (CCSF) sera chargé d'étudier les relations entre les entreprises du secteur financier et leurs clientèles, et le Comité consultatif de la législation et de la réglementation financières (CCLRF) chargé de donner un avis sur tous les textes normatifs en matière financière avant qu'ils ne soient définitivement adoptés ( articles 21 et 22 ).

* 18 « La mise en place du marché unique des services financiers - La transposition en droit français de la directive sur les services d'investissement », rapport de la commission des finances du Sénat, n° 578 (1993-1994), pages 82 et suivantes puis pages 160 et suivantes.

* 19 Projet de loi n° 219, Assemblée nationale, XI e législature.

* 20 Voir rapport de la Commission des finances du Sénat n° 5 (2000-2001). Au cours de l'examen de ce projet de loi en nouvelle lecture, le Sénat, suivant sa commission des finances, avait pris acte du dépôt par le gouvernement d'un projet de loi ad hoc et n'avait pas estimé utile de réintroduire le dispositif voté en première lecture.

* 21 Voir rapport de la Commission des finances du Sénat n° 336 (2000-2001). Dans ce projet de loi, le Sénat avait adopté les propositions de sa commission des finances en première et en nouvelle lectures.

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