2. Les traitements d'eau à domicile

Il s'agit des adoucisseurs d'eau, destinés à réduire le calcaire dans l'eau distribuée (74 ( * )) et des filtres aux points de distribution, destinés à améliorer le goût et enlever les métaux notamment le plomb (75 ( * )) .

Ces dispositifs sont des équipements de confort qui n'interviennent pas ou que très peu sur la qualité de l'eau, au sens réglementaire et sanitaire. Le goût et le calcaire sont deux paramètres qui ne sont pas suivis dans la réglementation sanitaire et la qualité de l'eau.

Ces dispositifs sont souvent inutiles (un adoucisseur d'eau n'est utile que lorsque l'eau est calcaire, mais pas dans les autres cas, ce qui est le cas dans plusieurs régions de France), partiellement efficaces car ils s'attaquent au calcaire et au goût, éventuellement au plomb et aux pesticides, qu'ils arrêtent, mais n'ont aucun effet sur les nitrates, et les contaminations bactériennes virales par exemple) et même potentiellement dangereuses. Les filtres notamment doivent être changés régulièrement, faute de quoi ils deviennent des réservoirs à bactéries et loin d'améliorer la qualité de l'eau deviennent des sources de contamination !

Les publics les plus fragiles, isolés, sont aussi les plus vulnérables aux démarches à domicile, fréquentes sur ce produit. Sans compter que l'impact de la publicité et du marketing face à la très faible connaissance technique des caractéristiques de l'eau conduit parfois à des aberrations : acheter un adoucisseur d'eau dans une région où l'eau est naturellement douce (en Bretagne par exemple) pour enlever le calcaire (alors qu'il n'y en a pas) et les nitrates (alors que l'adoucisseur ou le filtre n'a aucun effet sur ce paramètre), puis acheter de l'eau minérale pour boire une eau « riche en calcium » (alors que le calcaire n'est pas autre chose qu'un dérivé du calcium).

3. La consommation d'eau en bouteille

Pour des raisons diverses tenant au goût de l'eau du robinet (76 ( * )) , à la défiance vis-à-vis de sa qualité, mais aussi à la mode, aux effets d'un marketing subtil mettant en avant le côté naturel du produit et d'une publicité performante, les Français plébiscitent l'eau en bouteille. Il est tout à fait clair que, pour leur boisson, de plus en plus de Français se détournent de l'eau du robinet et deviennent des consommateurs mixtes. La consommation d'eau en bouteille par habitant a été multipliée par deux en vingt ans. Elle est aujourd'hui de 130 litres par an et par habitant, derrière l'Italie.

On distingue sur ce marché florissant deux produits distincts : les eaux de source et les eaux minérales.

- Une eau de source est, en France, une eau souterraine naturellement propre à la consommation, qui ne nécessite, avant conditionnement, que des traitements physiques élémentaires (aération, décantation, filtration...).

- Une eau minérale est une eau de source qui a en outre trois caractéristiques supplémentaires : ses composants doivent être permanents, ses qualités thérapeutiques sont reconnues par l'Académie de médecine ; enfin, elle est exploitée après arrêté ministériel (un arrêté préfectoral suffit pour les eaux de source) sous forme d'une déclaration d'intérêt public -DIP-, associée à un périmètre de protection. Les teneurs en sels minéraux, très fréquentes dans les eaux minérales, ne sont pas une condition obligatoire. Il existe certaines eaux très peu minéralisées. Toutes les eaux minérales contiennent trois éléments de base : les bicarbonates, les sulfates et les chlorures, mais les éléments mineurs (brome, silicium) ou sous forme de trace (oligoéléments, tels que manganèse, sélénium...) font la particularité de chaque eau.

Il existe environ 700 eaux de source ou minérales commercialisées sous une centaine de marques. Le marché de l'eau en bouteille est de 9 milliards de litres dont 25 % sont exportés et répartis comme suit :

Répartition du marché des eaux en bouteille

Production
(millions de litres)

Consommation par habitant (litres)

1992

2001

1992

2001

Eaux de source

1.450

2.500

27

38

Eaux minérales

5.200

6.500

70

94

Total

6.650

9.000

97

132

Il ne saurait être question de revenir sur un courant aussi puissant, sur une pratique culturelle établie, qui présente à certains égards de nombreux côtés positifs.

Le premier effet bénéfique pour la santé est moins celui lié à leur teneur en minéraux ou en oligoéléments qui peuvent être des compléments nutritionnels intéressants (apport en magnésium, calcium et fer), qu'à leur facilité d'usage qui permet de favoriser la consommation d'eau et de combler une part du déficit constaté (un Parisien consomme 1,15 litre d'eau par jour au lieu de 2,5 litres jugés nécessaires). Outre cet effet pour la santé, on rappellera aussi que l'eau représente un marché considérable de l'ordre de 2,2 milliards d'euros.

Sans revenir sur cette pratique, on rappellera toutefois quelques données qui justifieraient une utilisation plus raisonnée. Car la consommation d'eau minérale au lieu et place de l'eau du robinet repose sur quelques ambiguïtés.


L'eau minérale est-elle potable ?

La question est -volontairement- choquante et paradoxale, mais certaines caractéristiques de l'eau minérale doivent être rappelées :

- la réglementation de l'eau de consommation (décret n° 2001-1220 du 20 décembre 2001) ne s'applique pas aux eaux minérales. La plupart des critères contribuant à l'effet bénéfique de l'eau minérale ne figurent pas parmi les critères de potabilité de l'eau destinée à l'alimentation humaine.

- si on appliquait la réglementation de l'eau potable aux eaux minérales, de nombreuses eaux ne seraient pas conformes et seraient donc qualifiées « non potables ». Ainsi, plusieurs des critères communs à l'eau du robinet et l'eau minérale ne sont pas respectés par plusieurs eaux minérales comme indiqué ci-après.

Ainsi, si quelques Français se détournent de l'eau du robinet -potable, parce qu'ils craignent une dégradation, ils se tournent parfois vers des eaux ... non potables !

Par ailleurs, on pourra s'étonner des miracles du marketing, qui arrive à faire passer de l'arsenic pour un oligoélément et à vendre des bouteilles riches en calcium et des adoucisseurs d'eau pour enlever le calcaire...alors qu'il s'agit de la même chose !

Enfin, on rappellera qu'il est important de changer régulièrement d'eau minérale et que certains éléments mineurs ne sont bénéfiques pour la santé qu'à faibles doses. C'est notamment le cas des sulfates et du fluor. Le fluor, à faible dose, est bénéfique pour la santé en prévention des caries ou comme traitement de l'ostéoporose (diminution de tissus osseux). En revanche, le produit devient toxique quand il est absorbé à fortes doses (à partir de 1 mg de fluor par kilo) générant nausées, diarrhées... La présence de fluor dans l'eau (jusqu'à 9 mg/l) s'ajoute au fluor déjà présent dans le sol, le dentifrice, parfois les médicaments, au risque d'être alors en excédent.

* (74) Annexe 74 - Le calcaire dans l'eau distribuée.

* (75) Annexe 75 - Les procédés de traitement de l'eau à domicile.

* (76) Annexe 76 - Le goût de l'eau.

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