ARTICLE 2

Ajustement de la fraction de tarif de TIPP affectée aux départements

Commentaire : le présent article ajuste les fractions de tarif de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers (TIPP) affectées aux départements, en application de l'article 59 de la loi de finances initiale pour 2004, afin de tenir compte des niveaux définitifs de la dépense de l'Etat au titre du revenu minimum d'insertion et des consommations de carburants en 2003.

I. LA MISE EN oeUVRE DE LA COMPENSATION PRÉVUE PAR L'ARTICLE 59 DE LA LOI DE FINANCES INITIALE POUR 2004

A. RAPPEL DES PRINCIPES

L'article 59 de la loi de finances initiale pour 2004 a prévu trois étapes pour le calcul de la compensation versée aux départements au titre du RMI :

- dans un premier temps , le troisième alinéa du I de l'article 59 de la loi de finances initiale pour 2004 a fixé provisoirement une fraction de tarif « calculée de sorte qu'appliquée aux quantités de carburants vendues sur l'ensemble du territoire en 2003, elle conduise à un produit égal au montant des dépenses exécutées par l'Etat en 2003 au titre de l'allocation de revenu minimum d'insertion et de l'allocation de revenu de solidarité » ;

- dans un second temps , le septième alinéa du même article prévoit que « le niveau de cette fraction est modifié par une prochaine loi de finances afférente à l'année 2004. Cette modification tient compte du coût supplémentaire résultant, pour les départements, d'une part, de la création d'un revenu minimum d'activité, et, d'autre part, de l'augmentation du nombre d'allocataires du revenu minimum d'insertion résultant de la limitation de la durée de versement de l'allocation de solidarité spécifique ». Tel est l'objet du présent article ;

- dans un troisième et dernier temps , le huitième alinéa du même article prévoit que « le niveau définitif de cette fraction est arrêté par la plus prochaine loi de finances après la connaissance des montants définitifs de dépenses exécutées par les départements en 2004 au titre de l'allocation de revenu minimum d'insertion et du revenu minimum d'activité (...) ».

Par ailleurs, le dernier alinéa de l'article 59 de la loi de finances initiale pour 2004 prévoit la remise d'un rapport au Parlement tous les trois ans, à compter de l'année 2006 , au plus tard le jour du dépôt du projet de loi de finances de l'année. Ce rapport comporte notamment un bilan de la gestion administrative et financière de la compétence RMI, ainsi qu'une « analyse des variations annuelles selon les départements du nombre des allocataires du revenu minimum d'insertion, des allocataires du revenu de solidarité et des bénéficiaires du revenu minimum d'activité ».

Dans une réponse au questionnaire budgétaire afférent au projet de loi de finances pour 2005 sur les crédits de la décentralisation, le gouvernement rappelle, s'agissant des modalités de financement du RMI-RMA :

« La part destinée à l'ensemble des départements est constituée par prélèvement sur le montant de la TIPP perçu pendant la période de référence sur la base du tarif affecté aux départements. Cette part est ensuite répartie entre les départements selon les pourcentages fixés par l'arrêté du 14 janvier 2004. Le pourcentage affecté à chaque département a été calculé sur la base d'une prévision de la dépense effectuée par l'État en 2003 au titre du versement des allocations du RMI dans le département .

« Chaque département reçoit au plus tard les 15 et 30 de chaque mois une part de la TIPP réellement perçue sur le territoire national, sur la base de la consommation effective. Le montant mensuel versé varie donc en fonction des recettes de TIPP effectivement perçues au niveau national.

« Le gouvernement rappelle que le dispositif doit faire l'objet en 2004 et 2005 de modifications pour tenir compte des dépenses réelles de l'État en 2003 et des départements en 2004. La prise en compte du coût supplémentaire résultant de la création du revenu minimum d'activité et de l'augmentation du nombre d'allocataires du revenu minimum d'insertion, résultant de la limitation de durée de versement de l'allocation de solidarité spécifique et de la dépense de l'État définitivement constatée pour 2003, doivent intervenir dans le cadre de la loi de finances rectificative .

« Le niveau définitif des fractions sera ensuite fixé par une loi de finances après la connaissance définitive des dépenses exécutées par les départements en 2004. Les dépenses des départements seront ainsi intégralement compensées ».

B. LA RÉALITÉ DE LA COMPENSATION VERSÉE AUX DÉPARTEMENTS

La compensation versée par l'Etat aux départements au cours de l'année 2004 s'est avérée sensiblement insuffisante pour couvrir les charges des départements liées à la compétence « revenu minimum d'insertion ». En effet, à la fin du mois d'octobre, le décalage entre les ressources attribuées aux départements sous la forme de fractions de tarif de la TIPP et leurs dépenses au titre de l'allocation de RMI s'élevait à 300 millions d'euros . Cette somme était très inégalement répartie entre les départements. Le tableau ci-après indique les départements pour lesquels les soldes négatifs étaient supérieurs à 10 millions d'euros au 31 octobre 2004.

Comparaison des dépenses et des recettes des départements au titre de la compétence « RMI » au 31 octobre 2004

(en millions d'euros)

Départements

Dépenses estimées de l'Etat en 2003

Montant de TIPP versé

Solde

Dépenses de RMI et RMA 18 ( * ) estimées

Solde

Bouches-du-Rhône

258,201

264,113

5,912

274,498

- 10,385

Nord

219,590

224,619

5,029

253,096

- 28,478

Pas-de-Calais

117,273

119,958

2,686

131,897

- 11,939

Rhône

86,025

87,995

1,970

100,768

- 12,774

Paris

193,144

197,567

4,423

220,503

- 22,936

Seine-Saint-Denis

161,483

165,180

3,698

186,321

- 21,141

Val-de-Marne

80,442

82,284

1,842

93,723

- 11,439

Guyane

41,230

42,174

0,944

53,608

- 11,434

Source : ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales

On constate ainsi que huit départements connaissaient un solde négatif supérieur à 10 millions d'euros à la date du 31 octobre 2004 . Ce solde , qui équivaut à la part des dépenses de RMI à la charge de ces départements qui n'est pas couverte par l'attribution d'un pourcentage des fractions de tarif de la TIPP correspondant à leur droit à compensation, est supérieur à 10 % de la dépense au titre du RMI, au 31 octobre 2004, pour les départements du Nord (11,3 %), du Rhône (12,7 %), de Paris (10,4 %), de Saine-Saint-Denis (11,3 %), du Val-de-Marne (10,7 %) et de la Guyane (21,3 %).

La part de la charge liée au RMI non couverte par le transfert d'une part de TIPP résulte en grande partie de l'augmentation du nombre de bénéficiaires du RMI au cours de l'année 2004. En effet, d'après une étude de la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES) du ministère de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale, parue au mois de septembre, « fin juin 2004, le nombre d'allocataires effectivement payés au titre du revenu minimum d'insertion (RMI) ou bénéficiant d'un revenu minimum d'activité (RMA) , en métropole et dans les départements d'outre-mer (DOM), s'élève en données brutes à 1,194 million, soit une augmentation de 9,8 % par rapport au 30 juin 2003 19 ( * ) ». A cette date, un peu moins de cent allocataires bénéficiaient d'un RMA, dont l'entrée en application est intervenue à la fin du premier trimestre 2004.

II. LE RÉAJUSTEMENT DES FRACTIONS DE TARIF DE LA TIPP PROPOSÉ PAR LE PRÉSENT ARTICLE

Le présent article propose, en application de l'article 59 de la loi de finances initiale pour 2004, d'ajuster les fractions de tarif de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers attribuées aux départements afin de compenser le transfert de la compétence « RMI », en tenant compte, ainsi que le rappelle l'exposé des motifs, « d'une part, des montants définitifs de la dépense de l'Etat en 2003 au titre du RMI, et, d'autre part, des quantités de carburants soumis à la TIPP en 2003 ». Il est également précisé que « cet ajustement conduit à rectifier à la hausse la fraction de tarif attribuée aux départements à compter de 2004 et se traduit par une recette supplémentaire de 59 millions d'euros pour les départements ».

Le I du présent article propose une nouvelle rédaction pour les troisième, quatrième, cinquième et sixième alinéas du I de l'article 59 de la loi de finances initiale pour 2004, afin de fixer les nouvelles fractions de tarif de la TIPP résultant de l'ajustement susmentionné. Il précise que « la fraction de tarif mentionnée à l'alinéa précédent, calculée de sorte qu'appliquée aux quantités de carburants vendues sur l'ensemble du territoire en 2003, elle conduise à un produit égal au montant des dépenses exécutées par l'Etat en 2003 au titre de l'allocation de revenu minimum d'insertion et de l'allocation de revenu de solidarité, s'élève à :

- 12,50 euros par hectolitre s'agissant des supercarburants sans plomb ;

- 13,56 euros par hectolitre s'agissant du supercarburant sans plomb contenant un additif améliorant les caractéristiques antirécession de soupape ou tout autre additif reconnu de qualité équivalente dans un autre Etat membre de la Communauté européenne ou partie à l'accord sur l'Espace économique européen ;

- 8,31 euros par hectolitre s'agissant du gazole présentant un point d'éclair inférieur à 120° C ».

La rédaction retenue, s'agissant de la définition des fractions de tarif, reprend mot à mot celle figurant à l'article 59 de la loi de finances pour 2004. Elle diffère de la rédaction de l'article 33 du projet de loi de finances pour 2005, qui prévoit l'attribution de fractions de tarifs de TIPP aux régions en compensation des transferts de compétences prévus par la loi relative aux libertés et responsabilités locales pour l'année 2005, sur deux points :

- le premier point, d'ordre rédactionnel, concerne la mention, s'agissant du gazole, d'un « point d'éclair inférieur à 120° C », cette précision ayant disparu de la législation communautaire ;

- le second point est plus substantiel, puisque le présent article vise trois types de carburants, contre deux pour les fractions de tarifs de TIPP attribuées aux régions par l'article 33 du projet de loi de finances pour 2005 . S'agissant de cet article, le gouvernement avait indiqué à votre rapporteur général que l'absence de mention du supercarburant sans plomb contenant un additif, ou « ARS » était liée à la diminution de la consommation de ce type de carburant, devenue marginale, et amenée à disparaître très rapidement 20 ( * ) , les consommateurs étant alors amenés à remplacer ce carburant par du supercarburant, auquel ils ajouteront un additif.

S'agissant du calcul des nouvelles fractions de tarif, celles-ci sont effectuées en tenant compte à la fois de la consommation définitive des carburants susmentionnés au cours de l'année 2003 et des montants des dépenses définitives de l'Etat au titre du RMI en 2003.

Le tableau ci-après rappelle les critères retenus pour la fixation des fractions de tarif de TIPP attribuées aux départements dans la loi de finances initiale pour 2004.

Calcul de la compensation du RMI prévu par l'article 59 de la loi de finances initiale pour 2004

(en millions d'euros)

Types de carburants

Quantités consommées en 2003 (estimations, en millions d'hectolitres)

Fraction de tarif

Produit attendu

Super sans plomb

150,62

12,36

1.861,7

Super ARS

14,93

13,34

199,2

Gazole

351,60

8,21

2.886,6

Dépense estimée par l'Etat au titre du RMI pour l'année 2003

4.947

Les dépenses réelles de l'Etat au titre du revenu minimum d'insertion pour l'année 2003 se seraient élevées à 4.941 millions d'euros, contre 4.947 millions d'euros prévus initialement . Par ailleurs, la consommation de carburants serait inférieure, au titre de l'année 2003, à celles prévues par la loi de finances initiale pour 2004 . Il convenait donc d'ajuster les fractions de tarif de la TIPP en fonction de ces deux éléments, le premier jouant à la baisse, le second à la hausse.

S'agissant du premier élément, il correspond à une diminution de 0,1213 % du produit attendu. En fonction de ce seul élément, les fractions de tarif de la TIPP auraient du être modifiées à la baisse. Il convient toutefois de tenir également compte des consommations de carburants sur le territoire national en 2003, qui ont été inférieures aux prévisions de la loi de finances initiale pour 2004. En effet, la consommation de super sans plomb a été de 147,35 millions d'hectolitres, soit une diminution de 2,17 % par rapport aux prévisions initiales ; celle de super « ARS » a été de 14,83 millions d'hectolitres, soit une diminution de 0,67 % par rapport aux prévisions initiales ; enfin, la consommation de gazole a été de 348,74 millions d'hectolitres, soit une diminution de 0,813 % par rapport aux prévisions initiales.

Le tableau suivant retrace ce que devraient être, en toute logique, les modalités de calcul des nouvelles fractions de tarif de TIPP :

Calcul des fractions de tarif résultant de la prise en compte de la réévaluation des dépenses de l'Etat et des consommations de carburants pour l'année 2003

(en millions d'euros)

Types de carburants

Fractions de tarif prévues par la loi de finances initiale pour 2004

Ajustement pour obtenir un produit égal à 4.941 millions d'euros, à consommations inchangées

Fractions de tarif résultant de la modification du produit attendu

Ajustement correspondant aux consommations de carburants définitives en 2003

Fractions de tarif résultant de la prise en compte des consommations de carburants définitives en 2003

Super sans plomb

12,36

x 99,88 %

12,345

x 102,217 %

12,619

Super ARS

13,56

x 99,88 %

13,324

x 100,670 %

13,413

Gazole

8,31

x 99,88 %

8,2

x 100,813 %

8,267

En conservant une stricte proportionnalité des fractions de tarif par rapport à celles fixées par l'article 59 de la loi de finances initiale pour 2004, précité, on aurait donc obtenu les fractions de tarif susmentionnées . Ces fractions ne correspondent toutefois pas à celles proposées par le présent article. En effet, d'après les informations recueillies par votre rapporteur général, il n'est pas possible de fixer des fractions de tarif comportant plus de deux décimales. Par conséquent, les fractions ont été ajustées afin d'obtenir le produit attendu, soit 4.941 millions d'euros, tout en ne conservant que deux décimales, ce qui entraîne une légère déformation des proportions des fractions de tarif fixées par l'article 59 de la loi de finances initiale pour 2004. Ainsi, par rapport aux résultats du calcul présenté dans le tableau ci-avant, la fraction de tarif du super sans plomb est diminuée, tandis que les fractions de tarif correspondant aux deux autres carburants sont augmentées, comme l'indique le tableau ci-après :

Les fractions de tarif proposées par le présent article

(en millions d'euros)

Types de carburants

Fractions de tarif proposées par le présent article

Quantités de carburant consommées en 2003

Produit attendu

Super sans plomb

12,50

147,35

1.841,875

Super ARS

13,56

14,83

201,0948

Gazole

8,31

348,74

2.898,0294

Dépense réelle de l'Etat au titre du RMI pour l'année 2003

4.941,00

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre commission des finances estime que le réajustement des fractions de tarif de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers (TIPP) est conforme aux dispositions de la loi de finances initiale pour 2004 . Il ne tient pas compte d'un éventuel coût au titre de la création de la compétence « revenu minimum d'activité » (RMA), en raison de l'utilisation très marginale de ce dispositif, et du fait que ce coût n'est pas systématique, mais dépend de la situation de l'allocataire du RMI qui souscrit un RMA. En revanche, le présent article tient compte à la fois des dépenses réelles de l'Etat au titre du RMI en 2003 et des volumes de carburants effectivement consommés au cours de la même année.

1. La question des fractions de tarif attribuées aux départements

Votre commission des finances relève que les fractions de tarif dont le présent article propose l'affectation aux départements portent sur trois types de carburants, contre deux seulement pour les fractions de tarifs attribuées aux régions par l'article 33 du projet de loi de finances pour 2005, en compensation des transferts de compétences prévus par la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales pour l'année 2005. En effet, comme il a été indiqué ci-avant, le gouvernement n'a pas souhaité fixer de fraction de tarif pour la consommation du supercarburant sans plomb contenant un additif (ou super « ARS »), dès lors que celle-ci est devenue marginale et devrait disparaître prochainement.

Votre commission des finances considère qu' il serait cohérent d'aligner les fractions de tarif de TIPP attribuées aux départements sur celles attribuées aux régions, et regrette que soit maintenue une fraction de tarif sur un carburant dont la consommation est vouée à disparaître prochainement . Elle considère que la suppression de la fraction de tarif attribuée aux départements sur le supercarburant sans plomb contenant un additif serait souhaitable, en la compensant par une réévaluation, à due concurrence du produit, des fractions de tarifs correspondant aux deux autres types de carburants.

2. La mise en oeuvre stricte de la loi organique relative à l'autonomie financière des collectivités territoriales

Votre commission des finances souhaitait que soit mise en oeuvre « à la lettre » la loi organique du 29 juillet 2004 relative à l'autonomie financière des collectivités territoriales . Elle se félicite donc que le gouvernement ait accédé à sa demande en déposant deux amendements, lors de la discussion des articles 33 et 34 du projet de loi de finances pour 2005 au Sénat, visant à inscrire dans la loi de finances les pourcentages des fractions de tarif de TIPP et de la fraction de taux de la taxe sur les conventions d'assurances contre les risques de toutes natures relatifs aux véhicules terrestres à moteur revenant à chaque collectivité.

Par cohérence, votre commission des finances aurait souhaité qu'une telle précision figurât également dans le présent article.

3. Des inquiétudes quant à l'évolution future de la ressource attribuée aux départements en compensation du RMI

A la différence des régions , qui devraient, si le Conseil européen adopte à l'unanimité la proposition de décision de la Commission européenne permettant à la France de déroger aux directives relatives aux droits d'accises, bénéficier d'une capacité de modulation encadrée des taux de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers (TIPP) à compter de 2007, les départements ne disposeront pas d'une telle capacité de modulation .

La ressource attribuée aux départements évoluera donc uniquement en fonction de l'assiette nationale de la TIPP, qui dépend, d'une part, de la croissance économique et de l'évolution des technologies automobiles, et, d'autre part, des politiques gouvernementales qui influent sur l'évolution de la consommation d'énergie. Votre rapporteur général soulignait ainsi, dans son commentaire de l'article 33 du projet de loi de finances pour 2005, précité, que la base d'imposition de la TIPP n'est pas très dynamique. Il précisait que « si les régions avaient bénéficié en 1993 [d'une part de TIPP] , leurs ressources auraient augmenté, en dix ans, d'environ 10 %.

« Or, cette progression est largement inférieure à celle des prix, ainsi qu'à l'évolution des principaux concours de l'Etat aux collectivités territoriales, la dotation globale de fonctionnement ayant, au cours de cette même période, augmenté (à périmètre constant) de plus de 25 % ».

S'agissant de l'avenir, il rappelait que « (...) s'il est difficile de prévoir les évolutions à venir en la matière, on constate un certain ralentissement de la consommation de carburants à compter de l'année 2002 . Ce constat peut s'expliquer par plusieurs facteurs conjugués :

- les progrès en matière de consommation d'énergie effectués par les fabricants d'automobiles, s'agissant notamment des véhicules diesel 21 ( * ) ;

- le renforcement de la politique de sécurité routière engagé par le gouvernement en 2002, et en particulier, l'installation de radars automatiques pour contrôler la vitesse des véhicules et le durcissement des sanctions encourues, qui tendent à limiter la vitesse des automobilistes, et donc, à réduire la consommation de carburants (pour mémoire, on rappellera que les constructeurs automobiles estiment qu'au-delà de 100 km/h, une diminution de la vitesse moyenne de circulation de 10 km/h entraîne une diminution de la consommation de carburant de l'ordre de 10 %) ;

- même si ce facteur reste marginal, le développement des véhicules à énergie alternative (véhicules fonctionnant au GPL voire aux biocarburants, véhicules électriques ou « hybrides »...) pourrait, à l'avenir, contribuer à la réduction de la consommation des carburants (...) ;

- enfin, on notera que la volonté affichée par le gouvernement d'encourager les économies de consommation de pétrole afin de limiter la facture énergétique de la France, dans un contexte où les prix du pétrole sont particulièrement élevés, n'est pas de nature à favoriser le dynamisme de la recette (...) ».

Au total, la consommation de carburants pourrait évoluer d'une manière peu favorable aux finances des départements . Par ailleurs, elle est liée pour partie à la croissance économique, et finance une dépense elle aussi liée à la croissance économique, mais dans un sens contraire, ce qui est de nature à favoriser un « effet de ciseaux » susceptible de peser fortement sur les finances des départements en période de faible croissance.

Par conséquent, votre rapporteur général s'interroge sur les bénéfices, pour les départements, de l'attribution d'une fraction de tarif de TIPP en lieu et place d'une dotation de l'Etat au regard de leur autonomie financière, dès lors que la ressource est moins dynamique et qu'ils ne disposent d'aucune capacité de modulation.

4. La mise en oeuvre de la garantie de ressources pour les départements

La loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales précitée a introduit, au II de l'article 119, un dispositif permettant de protéger les départements contre une éventuelle diminution du produit de la TIPP. Ce dispositif, qui reprend la jurisprudence introduite par le Conseil constitutionnel dans sa décision portant sur l'article 59 de la loi de finances pour 2004, précité, dispose que : « Si les recettes provenant des impositions attribuées [au titre de la compensation des compétences transférées par la loi relative aux libertés et aux responsabilités locales] diminuent pour des raisons étrangères au pouvoir de modulation reconnu aux collectivités bénéficiaires, l'Etat compense cette perte dans des conditions fixées en loi de finances afin de garantir à ces dernières un niveau de ressources équivalent à celui qu'il consacrait à l'exercice de la compétence avant son transfert. Ces diminutions de recettes et les mesures de compensation prises au titre du présent alinéa font l'objet d'un rapport du Comité des finances locales ».

Votre rapporteur général note que, compte tenu des consommations de carburants en 2004, qui ont été sensiblement inférieures aux prévisions, cette garantie devrait trouver à s'appliquer dès cette année . Le rapport de la commission indépendante sur les effets de la hausse des prix du pétrole sur les recettes fiscales du mois de novembre 2004 indiquait que la moins value de TIPP pour l'année 2004, évaluée entre 840 millions d'euros et 869 millions d'euros, « se partage entre le budget de l'Etat et les départements. Le mécanisme de départementalisation de la TIPP prévoit un minimum constitutionnel, fixé à 4.942 millions d'euros : la moins-value s'imputant sur la dotation aux départements est donc plafonnée à - 85 millions d'euros (5.027 millions d'euros 22 ( * ) - 4.942 millions d'euros). (...)

« Au total, la commission retient une moins-value de recettes de TIPP pour l'Etat en 2004 de - 770 millions d'euros » 23 ( * ) .

Il convient de souligner que M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, a indiqué en réponse à notre collègue député Augustin Bonrepaux, lors de la discussion du présent article à l'Assemblée nationale, le 9 décembre 2004, que « l'article 2 apporte près de 60 millions aux départements. Vous nous dites avec raison que le produit de la TIPP régresse. Nous en avons conscience. Le gouvernement se conformera aux garanties constitutionnelles et vous proposera de majorer la fraction tarifaire accordée aux départements de 80 millions, ce qui fera, au total, 140 millions ».

Un amendement devrait donc être déposé par le gouvernement, tendant à majorer les fractions de tarif de TIPP attribuées aux départements, afin de respecter la garantie de ressources introduite par la jurisprudence du Conseil constitutionnel .

5. L'importance de la fixation définitive des fractions de tarifs en 2005

Le présent article ne fixe pas de manière définitive les fractions de tarifs de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers attribuées aux départements, puisque le niveau définitif des fractions sera fixé par une loi de finances après la connaissance définitive des dépenses exécutées par les départements en 2004, soit après le 30 juin 2005, dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2006 ou d'une loi de finances rectificative pour 2005 .

Il sera alors nécessaire d'étudier avec attention l'adéquation entre la compensation accordée par l'Etat et la dépense à la charge des départements . En particulier, votre rapporteur général souligne que la charge importante qui pèse, en 2004, sur certains départements, pourrait être de nature à annihiler totalement l'effet du renforcement des dotations de péréquation départementales prévu par l'article 31 du projet de loi de finances pour 2005.

Votre commission des finances avait souhaité, à l'occasion de la discussion de cet article 31, qu'un rapport soit remis sur les effets de la réforme proposée par le gouvernement et sur ceux qu'auraient des réformes alternatives, afin qu'un débat puisse être organisé sur cette question. Elle estime qu'il sera indispensable de tenir compte, à cette occasion, de l'impact de la charge liée à la gestion du RMI par les départements, s'agissant, notamment, de ceux pour lesquels cette charge est la plus lourde.

6. La question du versement de la prime de Noël

Votre rapporteur général rappelle, car cette question intéresse particulièrement les élus départementaux, que la « prime de Noël » versée depuis plusieurs années aux titulaires de minima sociaux, n'a pas été confiée aux départements en même temps que la compétence « revenu minimum d'insertion » . Dans une question orale en date du 19 octobre 2004, notre collègue député Bernard Derosier a interrogé le ministre délégué aux libertés locales, alors M. Jean-François Copé, sur le versement de la « prime de Noël » aux allocataires du RMI. En réponse, M. Jean-François Copé avait indiqué que « quant à la prime de Noël, elle n'a pas, vous le savez, le caractère d'une allocation de RMI et, au surplus, elle n'est pas automatiquement reconductible, le choix appartenant au gouvernement. Elle n'a d'ailleurs pas été transférée aux conseils généraux et n'ouvre donc pas droit à compensation. En application du principe de libre administration, si tel ou tel département ou telle ou telle collectivité veut la mettre en oeuvre, c'est son droit, mais cela relève de sa seule initiative. Si l'Etat décidait, d'ici à la fin de l'année, de verser cette prime à l'ensemble des allocataires du RMI, il va de soi qu'il en supporterait les conséquences financières. (...) Si tel n'était pas le cas, il appartiendrait aux collectivités territoriales de faire leur choix ».

Cette réponse est conforme, pour l'essentiel, à ce qu'avait indiqué M. François Fillon, alors ministre des affaires sociales, lors de l'examen du projet de loi portant décentralisation du RMI :

« Premièrement, le gouvernement ne souhaite pas rendre cette dépense obligatoire, c'est-à-dire qu'il ne souhaite pas la transférer aux départements.

« Deuxièmement, la pratique ne concerne pas seulement les allocataires du RMI mais vise aussi les bénéficiaires de divers minima sociaux.

« La question restera donc une question nationale, qui se posera chaque année dans les conditions où elle se posait jusqu'à présent » 24 ( * ) .

On rappellera que le Premier ministre a annoncé, sur la chaîne de télévision France 2 , le 10 novembre 2004, que la prime de Noël serait reconduite cette année, avec un montant égal à la prime allouée en 2003 25 ( * ) .

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

* 18 Mutualité sociale agricole.

* 19 En données corrigées des variations saisonnières, l'augmentation du nombre de RMIstes entre juin 2003 et juin 2004 se monte à 10,5 %.

* 20 Pour l'année 2005, d'après les informations recueillies par votre rapporteur général, moins de 6 millions d'hectolitres de supercarburant « ARS » devraient ainsi être consommés.

* 21 On notera d'ailleurs que la diésélisation croissante du parc automobile français (les moteurs diesel équipent désormais environ 40 % des voitures particulières) entraîne une diminution de la part relative de la consommation des essences les plus taxées.

* 22 On rappellera que l'exposé général des motifs du projet de loi de finances pour 2004 indiquait que « le transfert aux départements du RMI et du revenu de solidarité dans les DOM s'accompagne de l'affectation d'une part de TIPP (taxe intérieure sur les produits pétroliers) représentant 5.027 millions d'euros au titre de la compensation de cette nouvelle charge pour les collectivités locales ».

* 23 Rapport de la commission indépendante sur les effets de la hausse des prix du pétrole sur les recettes fiscales, novembre 2004, page 4 et 5.

* 24 Compte rendu des débats du 26 mai 2003.

* 25 Pour mémoire, la prime de Noël est versée par l'Etat aux titulaires du RMI, de l'allocation spécifique de solidarité et de l'allocation d'insertion. La prime s'est élevée ces trois dernières années à 152,45 euros pour une personne seule et 274,41 euros pour un couple avec un enfant ou une personne seule avec deux enfants.

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