EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. UNE DESSERTE D'INTÉRÊT NATIONAL

A. UN PROJET LANCÉ DÈS LES ANNÉES 1980

La nécessité de réaliser une liaison autoroutière transversale entre Bordeaux et Lyon est apparue dès la fin des années 1970. En effet, celle-ci devait permettre à la fois le désenclavement du Massif central et la connexion de la façade atlantique à l'axe nord-sud traversant la vallée du Rhône, mais aussi à l'est de l'Europe et en particulier à l'Italie et à la Suisse.

L'achèvement de l'A 89 constituerait une avancée très importante pour Clermont-Ferrand, pour le nord du département de la Loire et pour Saint-Etienne qui ne serait plus traversée par le flux de véhicules parcourant cet axe 2 ( * ) .

Dès 1988, l'Etat avait indiqué à la société des autoroutes du sud de la France (ASF) que celle-ci était retenue pour réaliser et exploiter la dernière section de cette liaison entre Balbigny, dans le département de la Loire, et le nord de Lyon.

La carte ci-dessous indique la localisation de cette section autoroutière.

Balbigny

Source : ministère de l'équipement et des transports

Cette section s'étend sur une cinquantaine de kilomètres et le coût de sa réalisation était estimé à 1,2 milliard d'euros en janvier 2005.

B. UN PARCOURS JURIDIQUE SINUEUX

1. Un dossier ralenti par la Commission européenne

Après le choix de l'Etat de confier cette section à ASF, cette entreprise a entamé des études et des travaux et en particulier les premiers kilomètres de la liaison 3 ( * ) . En 1992, ce projet a été formalisé par la signature d'un avenant à la concession d'ASF. Celui-ci semblait donc suivre un cours normal.

Toutefois, à partir de 1995, la Commission européenne s'est interrogée sur la validité de cette attribution, dans la mesure où celle-ci ne s'était pas inscrite dans le nouveau cadre juridique défini par la directive européenne 89/440/CEE du Conseil du 18 juillet 1989 4 ( * ) , entrée en vigueur en juillet 1990.

Entre 1995 et 1997, la France a fait valoir à la Commission européenne que ce dossier, comme un certain nombre d'autres, ne respectait pas ce nouveau cadre juridique car il avait été entamé avant l'entrée en vigueur de cette directive. La Commission européenne a fini par se rendre à cette argumentation au printemps 1997, mais, pour limiter les dérogations aux nouvelles règles, elle a imposé que tous les dossiers ouverts sous l'ancien régime des marchés publics de travaux soient conclus avant la fin de l'année 1997.

En raison de sa complexité technique 5 ( * ) , le dossier Lyon-Balbigny n'a pu être conclu dans ce délai et le Gouvernement a donc choisi, à la fin de 1997, de le suspendre en modifiant à nouveau la convention entre l'Etat et ASF.

2. L'avancée permise par la prise de position de la Cour de justice des communautés européennes

Par un arrêt du 5 octobre 2000 6 ( * ) , la CJCE a estimé, dans un dossier comparable, que la Commission européenne avait à tort contesté la position française conduisant à considérer que les marchés pour lesquels un concessionnaire avait déjà été pressenti n'avaient pas à se voir appliquer des modifications ultérieures des règles communautaires de passation des marchés publics.

Suite à cette précision jurisprudentielle, la France a souhaité poursuivre le projet d'achèvement de l'A 89. Après une procédure classique d'enquête publique, le projet a été déclaré d'utilité publique par décret du 17 avril 2003 7 ( * ) .

Le Gouvernement a souligné l'importance du projet à l'occasion des comités interministériels pour l'aménagement et le développement du territoire (CIADT) des 26 mai 2003 et 18 décembre 2003.

3. La validation de la position française par la Commission européenne

Au mois de juillet 2005, la Commission européenne a classé sans suite une plainte visant le projet. Elle a en effet estimé que la procédure suivie par la France n'avait pas méconnu les stipulations du droit communautaire.

Dans ces conditions, le Gouvernement a logiquement entrepris la rédaction d'un avenant à la convention de concession liant l'Etat et ASF pour rétablir les stipulations relatives au tronçon de Balbigny à La Tour de Salvagny.

Toutefois, s'écartant de l'analyse de la Commission européenne, le Conseil d'Etat a émis un avis défavorable sur le projet de décret approuvant cet avenant.

Votre rapporteur aurait souhaité connaître le détail du raisonnement suivi par la Haute juridiction. Ce n'est en effet pas sans étonnement qu'il observe que celle-ci ne partage pas la position de la Commission européenne, alors même que cette dernière est la garante de l'exécution des traités communautaires.

* 2 Les débats lors de la réunion de commission ont également fait ressortir l'intérêt du projet pour les régions Rhône-Alpes et Franche-Comté dans leur ensemble.

* 3 Il s'agit de « l'antenne » de Balbigny.

* 4 Directive 89/440/CEE du Conseil du 18 juillet 1989 modifiant la directive 71/305/CEE portant coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, communément désignée comme étant la « directive Travaux ».

* 5 Le tracé traverse en effet une zone vallonnée, ce qui impose d'importants ouvrages d'art.

* 6 Affaire C-337/98, Commission c./ France. Cette affaire était relative aux conditions d'attribution à la société Matra transports du projet de métro léger du district de l'agglomération rennaise, dossier communément appelé « Val de Rennes ».

* 7 Décret du 17 avril 2003 déclarant d'utilité publique les travaux de construction de la section Balbigny-La-Tour-de-Salvagny de l'autoroute A 89 et de l'antenne autoroutière de l'Arbresle et portant mise en compatibilité des plans locaux d'urbanisme des communes de Balbigny et Violay dans le département de la Loire et de Joux, Saint-Marcel-l'Eclairé, Tarare, Saint-Forgeux, Pontcharra-sur-Turdine, Les Olmes, Saint-Romain-de-Popey, Sarcey, Bully, Saint-Germain-sur-l'Arbresle, Châtillon-d'Azergues, Fleurieux-sur-l'Arbresle, Lentilly, Lozanne et La Tour-de-Salvagny dans le département du Rhône.

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