Rapport n° 1 (2006-2007) de Mme Sylvie DESMARESCAUX , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 3 octobre 2006

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N° 1

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2006-2007

Annexe au procès-verbal de la séance du 3 octobre 2006

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur la proposition de loi, ADOPTÉE PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, portant création d'un ordre national des infirmiers,

Par Mme Sylvie DESMARESCAUX,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Nicolas About, président ; MM. Alain Gournac, Louis Souvet, Gérard Dériot, Jean-Pierre Godefroy, Mmes Claire-Lise Campion, Valérie Létard, MM. Roland Muzeau, Bernard Seillier, vice-présidents ; MM. François Autain, Paul Blanc, Jean-Marc Juilhard, Mmes Anne-Marie Payet, Gisèle Printz, secrétaires ; Mme Jacqueline Alquier, MM. Jean-Paul Amoudry, Gilbert Barbier, Daniel Bernardet, Mme Brigitte Bout, MM. Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Mmes Isabelle Debré, Christiane Demontès, Sylvie Desmarescaux, M. Claude Domeizel, Mme Bernadette Dupont, MM. Michel Esneu, Jean-Claude Etienne, Guy Fischer, Jacques Gillot, Francis Giraud, Mmes Françoise Henneron, Marie-Thérèse Hermange, Gélita Hoarau, Annie Jarraud-Vergnolle, Christiane Kammermann, MM. Serge Larcher, André Lardeux, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Mme Raymonde Le Texier, MM. Roger Madec, Jean-Pierre Michel, Alain Milon, Georges Mouly, Mmes Catherine Procaccia, Janine Rozier, Michèle San Vicente, Patricia Schillinger, Esther Sittler, MM. Jean-Marie Vanlerenberghe, Alain Vasselle, François Vendasi, André Vézinhet.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 12 ème législ.) : 2996, 3009 et T.A . 586

Sénat : 390 (2005-2006)

Ordres professionnels.

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

La France compte aujourd'hui 450.000 infirmiers - et sans doute plus de 550.000 en 2020 selon les projections de l'observatoire national de la démographie des professions de santé -, soit un effectif nettement supérieur à celui des médecins (205.800), des pharmaciens (67.500), des sages-femmes (16.500), des masseurs-kinésithérapeutes (60.400) et des pédicures-podologues (10.500), autant de professions qui disposent déjà d'une structure ordinale pour leur représentation, la fixation des règles déontologiques et le règlement des contentieux disciplinaires.

Cette anomalie apparaît plus étonnante encore au regard du rôle essentiel des infirmiers dans le système de santé, notamment auprès des malades âgés ou en soins palliatifs et dans les domaines de la prise en charge de la douleur et de la prévention. De surcroît, cette profession ne cesse d'évoluer : la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique a ainsi renforcé la faculté des infirmiers d'intervenir auprès du patient en dehors de toute prescription médicale et a favorisé le développement des délégations de soins entre professionnels de santé.

Plus que jamais, la profession d'infirmier a donc aujourd'hui besoin d'une meilleure reconnaissance, en cohérence avec les fonctions qu'elle assume désormais, et d'un cadre déontologique adapté aux nouveaux enjeux de qualité et de permanence des soins infirmiers.

De fait, le respect des règles éthiques et des bonnes pratiques professionnelles est loin d'être assuré : les principes déontologiques fixés par les décrets n° 93-221 du 16 février 1993 relatif aux règles professionnelles des infirmiers et des infirmières et n° 93-345 du 15 mars 1993 relatif aux actes professionnels et à l'exercice de la profession d'infirmier n'ont pas été accompagnés par la création d'une instance de contrôle et de sanction.

*

Face à ce constat, la mise en place d'un ordre professionnel constitue, depuis plusieurs dizaines d'années, une revendication forte des infirmiers libéraux qui sont, plus que leurs confrères exerçant en établissement de santé, confrontés aux carences de la profession en matière de discipline interne et de représentativité.

Depuis 1996, cette attente s'est traduite, par plusieurs initiatives parlementaires. Dernièrement, au mois de janvier 2006, l'Assemblée nationale a ainsi examiné une proposition de loi déposée par Jean-Luc Préel sur ce sujet. Aucune de ces tentatives de création d'un ordre national des infirmiers n'a toutefois abouti à ce jour.

La raison de cette impasse tient aux réticences d'une partie de la profession. En effet, celle-ci se caractérise par une proportion largement majoritaire d'agents publics travaillant dans les hôpitaux (74,5 % des infirmiers) et de salariés des établissements de santé privés (12,5 %). Les infirmiers libéraux, fervents défenseurs d'une structure ordinale, ne représentent donc que 13 % de la profession. Or, les fonctionnaires et les salariés, soutenus par les syndicats, ont longtemps considéré comme inutile et coûteuse la création d'une telle instance, dans la mesure où ils disposent déjà d'un cadre disciplinaire défini par leurs statuts.

Ces positions de principe ont depuis lors évolué : un consensus s'est progressivement dégagé, après une concertation fructueuse et approfondie entre les différents acteurs, sur le caractère insuffisant du système institutionnel actuel, les carences présentées par la procédure disciplinaire et la nécessité de mieux reconnaître l'identité et la compétence professionnelle des infirmiers. Telles sont notamment les conclusions de la mission de médiation confiée par le ministre de la santé et des solidarités à Edouard Couty au début de l'année 1 ( * ) .

*

La proposition de loi déposée par Maryvonne Briot, Richard Mallié et plusieurs de leurs collègues députés, votée par l'Assemblée nationale le 13 juin dernier, constitue la traduction législative de ce nouveau consensus.

Elle créé un ordre national des infirmiers, qui sera chargé des traditionnelles missions ordinales de contrôle de la déontologie et de défense des intérêts de la profession, mais aussi du suivi de la démographie et de l'évaluation des pratiques professionnelles. Les infirmiers français disposeront ainsi désormais, comme la plupart de leurs homologues européens, d'une instance capable de les représenter au niveau national et international.

L'ordre des infirmiers, qui rassemblera de manière obligatoire l'ensemble des infirmiers, assurera ses missions par le biais de trois échelons territoriaux au niveau départemental, régional (interrégional en Outre-mer) et national et disposera des moyens financiers qui lui seront fournis par ses membres au moyen du paiement d'une cotisation.

*

Votre commission des Affaires sociales est à son tour amenée à examiner la proposition de loi portant création d'un ordre national des infirmiers.

Les auditions qu'elle a organisées lui ont permis d'entendre les attentes d'associations et syndicats représentatifs de la profession, l'appréciation de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes récemment créé et l'opinion d'une association de patients afin de prendre la mesure des besoins des infirmiers.

Convaincue, à l'issue de ce travail préparatoire, de l'utilité de créer une instance ordinale, elle souhaite toutefois apporter plusieurs modifications au dispositif proposé pour en améliorer la cohérence et l'efficacité. Elle a notamment considéré qu'il sera désormais inutile de conserver, dans les codes de la santé publique et de la sécurité sociale, la mention du conseil des professions paramédicales, qui n'a d'ailleurs jamais été mis en place et a été vidé de son contenu par les créations successives des ordres paramédicaux.

Sous réserve de l'adoption de ces amendements, elle s'est déclarée favorable à la proposition de loi présentée.

EXAMEN DES ARTICLES

Article premier - (art. L. 4312-1 et L. 4312-2 à L. 4312-9 nouveaux du code de la santé publique) - Création et définition des modalités de fonctionnement de l'ordre national des infirmiers

Objet : Cet article crée l'ordre national des infirmiers, en précise les missions et en organise le fonctionnement.

I - Le dispositif proposé

Cet article constitue, à lui seul, l'essentiel de la présente proposition de loi. Il propose une nouvelle rédaction, organisée autour de cinq sections, du chapitre II du titre I er du livre III de la quatrième partie du code de la santé publique, qui comprend actuellement un article unique relatif aux règles professionnelles applicables à la profession d'infirmier. Ces règles sont calquées sur celles qui existent pour les autres ordres des professions médicales et paramédicales.

Section 1 - Ordre national des infirmiers

La nouvelle rédaction proposée pour l'article L. 4312-1 dispose que l'ordre des infirmiers regroupe l'ensemble de la profession, à l'exclusion des infirmiers militaires qui conservent, comme les médecins militaires, leur statut spécifique. L'inscription y est obligatoire.

L'ordre a pour mission générale de veiller au maintien des principes d'éthique, de moralité, de probité et de compétences de la profession et à l'observation, par ses membres, des règles de déontologie. A cet effet, le conseil national de l'ordre préparera un code de déontologie, édicté sous la forme d'un décret en Conseil d'Etat, qui concernera les droits et devoirs des infirmiers dans leurs rapports avec les patients et les autres professionnels. En conséquence, ils ne seront plus soumis aux règles du conseil des professions paramédicales, précision d'intérêt purement théorique puisque ces règles n'ont jamais été fixées à ce jour.

L'article L. 4312-2 nouveau précise plus avant le rôle de l'ordre :

- il assurera l'indépendance et la promotion de la profession et organisera toute oeuvre d'entraide et de retraite au bénéfice de ses membres ;

- il sera par ailleurs consulté par le ministre de la santé sur les projets et questions qui concernent l'exercice de la profession. Dans ce cadre, il pourra prendre l'attache des associations professionnelles, des syndicats, des associations d'étudiants en soins infirmiers et de toute association agréée d'usagers du système de santé ;

- il diffusera, en coordination avec la Haute Autorité de santé, les règles de bonnes pratiques en soins infirmiers et organisera leur évaluation auprès des professionnels ;

- il participera au suivi de la démographie de la profession, par le biais de la production de données statistiques homogènes et de l'étude prospective des effectifs au regard des besoins de santé. Il s'agit, à cet égard, de collaborer ou de compléter les travaux menés par l'Observatoire national de la démographie des professions de santé.

Enfin, l'ordre national des infirmiers, comme celui des médecins, des chirurgiens-dentistes et des sages-femmes, accomplira les missions qui lui sont dévolues par le législateur par l'intermédiaire des ses conseils départementaux, régionaux et national.

Section 2 - Conseils départementaux

L'article L. 4312-3 nouveau dispose, dans son I , que le conseil départemental, qui constitue le premier échelon de l'ordre, sera chargé à ce titre de représenter et de défendre la profession dans le département, d'inscrire les professionnels au tableau de l'ordre, de diffuser et d'évaluer les bonnes pratiques, d'organiser des oeuvres d'entraide, de participer au suivi démographique de la profession et d'exercer une mission de conciliation entre les patients et les infirmiers, ainsi qu'entre professionnels.

Le II de l'article s'attache à décrire la composition du conseil. Celui-ci comprendra un nombre égal de membres titulaires et de suppléants élus pour quatre ans, avec un renouvellement par moitié tous les deux ans, au suffrage direct par scrutin uninominal, le président étant élu après chaque renouvellement.

Le nombre d'élus de chaque conseil départemental sera fixé par voie réglementaire en fonction du nombre de professionnels établis dans le département. Ils représenteront chacun leur catégorie professionnelle - fonctionnaires, salariés du secteur privé ou infirmiers libéraux - et seront élus par leurs pairs inscrits au tableau.

Avant chaque élection, une assemblée générale sera réunie (chaque infirmier étant convoqué individuellement par courrier deux mois avant la date fixée) par le président du conseil départemental ou, à défaut, par le conseil national de l'ordre, les frais restant alors à la charge du conseil départemental intéressé.

Le III rend applicables aux conseils départementaux de l'ordre des infirmiers les dispositions des articles L. 4123-1 (possibilité, pour le président du conseil départemental, d'ester en justice, d'accepter des dons et legs au profit de l'ordre, de contracter des hypothèques et des emprunts et de créer des organes de coordination avec d'autres conseils départementaux de l'ordre), L. 4123-2 (institution d'une commission de conciliation constituée de trois membres qui statue en amont de la chambre disciplinaire de première instance), L. 4123-5 (condition d'éligibilité au conseil fixée à trois ans d'ancienneté dans la profession), L. 4123-7 (représentation de l'ordre par son président dans tous les actes de la vie civile), L. 4123-10 (nomination d'une délégation par le préfet lorsque le conseil départemental est dans l'impossibilité de fonctionner, dans l'attente de nouvelles élections), L. 4123-11 (après chaque élection, transmission du procès-verbal au conseil régional et au conseil national, au préfet et au ministre de la santé), L. 4123-12 (caractère non public des délibérations, voix prépondérante du président en cas d'égalité, voix consultative du médecin inspecteur départemental de santé publique), L. 4123-15 (constitution d'un conseil territorial à Saint-Pierre et Miquelon si le nombre d'infirmiers éligibles y est au moins égal à la moitié de celui requis pour les conseils départementaux), L. 4123-16 (représentation des infirmiers de Saint-Pierre et Miquelon au sein du conseil national par le conseiller de la région Basse-Normandie) et L. 4123-17 (règles de fonctionnement du conseil territorial de Saint-Pierre et Miquelon).

Enfin, l'article L. 4312-4 nouveau précise que les conseils départementaux de l'ordre national des infirmiers pourront se réunir avec leurs homologues des autres ordres pour l'examen de questions communes.

Conseils régionaux ou interrégionaux

La rédaction proposée pour le I de l'article L. 4312-5 nouveau prévoit que le conseil régional sera placé sous le contrôle du conseil national et exercera sur son territoire les missions générales dévolues à l'ordre.

A celles-ci s'ajouteront plusieurs tâches spécifiques :

- la coordination des différents conseils départementaux situés dans la région ou l'interrégion ;

- l'étude des projets et des demandes d'avis soumis par les instances régionales compétentes en matière de santé (ARH essentiellement), en particulier le plan régional de développement des formations professionnelles avant son adoption par le conseil régional ;

- la suspension temporaire du droit d'exercer en cas d'infirmité.

Ses délibérations ne seront pas publiques.

Le II dispose que les décisions prises par le conseil régional en matière d'inscription au tableau et de suspension temporaire du droit d'exercer peuvent faire l'objet d'un recours devant le conseil national de l'ordre.

Les règles relatives à l'élection des membres du conseil régional, précisées au III , sont en grande partie identiques à celles fixées à la section précédente pour le conseil départemental : élection au suffrage direct par scrutin uninominal par les représentants départementaux des trois catégories professionnelles (agents publics, salariés et libéraux), mandat de quatre ans, renouvellement par moitié tous les deux ans, élection du président après chaque renouvellement, nombre de membres du conseil fixé en fonction du nombre d'infirmiers inscrits au tableau.

Par ailleurs, le préfet de région pourra, sur proposition du conseil national de l'ordre, dissoudre le conseil régional lorsque ses membres le mettent dans l'impossibilité de fonctionner. Il nommera dans ce cas une délégation de trois à cinq membres, chargée d'assurer la gestion des affaires courantes jusqu'à ce qu'il soit procédé à de nouvelles élections. Cette disposition sera également applicable en cas de démission de l'ensemble du conseil. Si la majorité des membres de cette délégation restreinte démissionne à son tour, ses fonctions seront exercées jusqu'aux élections par le conseil national de l'ordre.

Le IV est relatif au fonctionnement, au sein du conseil régional, de la chambre disciplinaire de première instance pour les infirmiers libéraux. Celle-ci sera présidée par un membre du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel désigné par le vice-président du conseil d'Etat. Elle sera composée de membres titulaires et suppléants élus en son sein par le conseil régional, dont le nombre varie en fonction de la population infirmière de la région.

Cette instance ne sera pas compétente pour les salariés du privé. Dans leur cas, l'employeur sera seulement tenu de prévenir le président du conseil national de toute sanction disciplinaire prononcée en raison d'une faute professionnelle.

Seront également applicables à la chambre disciplinaire de première instance les articles L. 4124-1 (elle doit statuer dans les six mois suivant le dépôt de la plainte), L. 4124-2 (les agents publics peuvent être traduits devant cette chambre par le ministre de la santé, le préfet, le procureur de la République et le directeur de l'ARH), L. 4124-3 (elle peut ordonner une enquête sur les faits sur lesquels elle doit statuer), L. 4124-4 (un procès-verbal est établi après chaque séance), L. 4124-5 (règles de suppléance des membres titulaires), L. 4124-6 (peines pouvant être prononcées : avertissement, blâme, suspension temporaire ou définitive d'exercer), L. 4124-7 (règles de fonctionnement), L. 4124-8 (réexamen d'une décision définitive de radiation tous les trois ans), le premier alinéa des articles L. 4124-9 et L. 4124-12 (les infirmiers de la Réunion dépendent de la chambre disciplinaire de première instance et du conseil interrégional de la Réunion-Mayotte), le premier alinéa de l'article L. 4124-10 et l'article L. 4124-13 (ceux de la Guadeloupe, de la Guyane et de la Martinique dépendent du conseil interrégional et de la chambre disciplinaire des Antilles-Guyane) et le premier alinéa de l'article L. 4124-14 (ceux de Saint-Pierre et Miquelon ressortent de la compétence du conseil régional et de la chambre disciplinaire de Basse-Normandie).

Comme leurs homologues départementaux, les conseils régionaux peuvent organiser des réunions communes avec les instances régionales ou interrégionales des autres ordres professionnels sur des sujets communs ( article L. 4312-6 nouveau).

C onseil national

Selon l'article L. 4312-7 nouveau ( I ), outre les missions générales dévolues à l'ordre, le conseil national est plus particulièrement chargé d'élaborer le code de déontologie, de veiller à son respect, d'étudier les projets et questions qui lui sont soumis par le ministre de la santé. Il exercera en outre les droits réservés à la partie civile pour les faits portant préjudice à la profession.

Il sera assisté, pour l'exercice de ses missions, par un conseiller d'Etat nommé par le ministre de la justice. Ses délibérations ne seront pas publiques.

Le II indique que le conseil national fixe également le montant unique de la cotisation obligatoirement versée par l'ensemble des infirmiers et en répartit le produit entre les conseils en fonction de leurs besoins.

Il sera enfin chargé de gérer les biens de l'ordre et de contrôler la gestion des conseils départementaux et régionaux.

Il est proposé que sa composition soit identique à celle des conseils départementaux et régionaux, de même que les modalités d'élection de ses membres (les représentants de chaque catégorie sont élus par leurs pairs au niveau des conseils régionaux ou interrégionaux) et de son président.

En cas de dissolution par le ministre de la santé ou de démission de l'ensemble de ses membres, une délégation de cinq membres sera nommée par le ministre de la santé jusqu'aux élections ordinales qui devront intervenir sans délai ( III ).

Le IV précise que le conseil national de l'ordre comprend une chambre disciplinaire nationale d'appel, présidée par un conseiller d'Etat, pour les infirmiers exerçant à titre libéral et les agents publics déférés devant les instances ordinales.

Outre l'auteur de la plainte et le professionnel intéressé, la chambre pourra être saisie par le ministre de la santé, le préfet du département ou de la région, le procureur de la République, le conseil départemental et le conseil national de l'ordre concerné. Ses décisions devront être motivées et seront susceptibles de recours devant le Conseil d'Etat.

Enfin, les dispositions relatives à la commission de contrôle des comptes et placements financiers seront applicables au conseil national de l'ordre des infirmiers dans les mêmes termes que pour les autres ordres : elle sera destinataire des comptes et du budget prévisionnels et consultée sur le montant de la cotisation ( V ).

Le conseil national de l'ordre des infirmiers pourra tenir séance sur des questions communes avec les conseils nationaux des autres ordres professionnels (article L. 4312-8 nouveau).

Section 5 - Dispositions communes

Cette dernière section comprend un unique article L. 4312-9 , qui rend applicables à l'ordre des infirmiers plusieurs dispositions prévues par le code de la santé publique pour les ordres existant en matière d'élection aux conseils et de procédure disciplinaire :

- les conseils de l'ordre sont dotés de la personnalité civile (article L. 4125-1) ;

- il y a incompatibilité entre les fonctions de président ou de trésorier d'un conseil de l'ordre et l'une des fonctions correspondantes d'un syndicat professionnel. Les fonctions de président et de secrétaire national d'un conseil départemental, régional ou national sont également incompatibles (article L. 4125-2) ;

- tout conseiller qui, sans motif valable, n'a pas siégé durant trois séances consécutives peut être considéré démissionnaire par le conseil national, sur proposition du conseil concerné. Les employeurs sont tenus de laisser leurs salariés membres d'un conseil participer à ses activités, qui sont assimilées à du temps de travail effectif (article L. 4125-3) ;

- les élections aux conseils peuvent être déférées au tribunal administratif par les professionnels ayant droit de vote et par le préfet (article L. 4125-5) ;

- aucune peine disciplinaire ne peut être prononcée sans que le professionnel ait été entendu ou appelé à comparaître (article L. 4126-1) ;

- les parties peuvent se faire assister ou représenter (article L. 4126-2) ;

- les dépens sont, sauf circonstances particulières, mis à la charge de la partie perdante (article L. 4126-3) ;

- quand un infirmier mis en cause devant la chambre disciplinaire nationale n'a pas produit de défense écrite, il est admis à former opposition à la décision rendue par défaut. L'opposition a alors un effet suspensif (article L. 4126-4) ;

- l'exercice de l'action disciplinaire ne constitue pas un obstacle aux poursuites que le ministère public ou les particuliers peuvent intenter devant les tribunaux, aux actions civiles en réparation d'un délit, aux actions disciplinaire devant l'administration dont dépend l'intéressé ni au contentieux technique de la sécurité sociale (article L. 4126-5) ;

- enfin, lorsqu'un professionnel est condamné par une juridiction pénale, la chambre disciplinaire de première instance de l'ordre peut prononcer une peine ordinale à son encontre. A cet effet, le conseil national de l'ordre est informé sans délai par l'autorité judiciaire de toute sanction définitive prononcée contre un praticien (article L. 4126-6).

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a apporté trois modifications majeures au dispositif proposé par le texte :

- elle a supprimé la mention des conseils interrégionaux, estimant que la région constitue le seul échelon pertinent pour la mise en oeuvre des politiques de santé ;

- elle a précisé que le président de chaque conseil doit être choisi en son sein ; il s'agit donc obligatoirement d'un infirmier ;

- elle a enfin souhaité qu'aucune catégorie professionnelle - agents publics, salariés du secteur privé et libéraux - ne puisse détenir la majorité des sièges, et ce quelle que soit son importance numérique. Il s'agit ici d'éviter une surreprésentation des fonctionnaires dans les instances ordinales alors même qu'elles n'interviennent pas pour cette catégorie en matière disciplinaire.

Il convient de rappeler que cet article avait déjà été profondément remanié par la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale lors de l'examen de la proposition de loi initiale. A cette occasion, il avait été décidé de confier à l'ordre la mission d'élaborer le code de déontologie de la profession, et non pas seulement celle de participer à son écriture ; le montant de la cotisation avait, en outre, été rendu unique quel que soit le secteur d'activité ; la surreprésentation des infirmiers libéraux au sein de chaque conseil avait été supprimée et les modalités d'élection précisées ; enfin, il avait été décidé que l'ordre ne serait pas compétent en matière disciplinaire à l'encontre des infirmiers salariés et fonctionnaires.

III - La position de votre commission

Votre commission approuve la création d'un ordre national des infirmiers, qui constitue l'aboutissement d'un long processus parlementaire et d'une concertation approfondie entre les associations professionnelles, les syndicats, le Gouvernement et le Parlement.

Le présent article en détermine les missions, l'organisation et les modalités de fonctionnement, sur le modèle des ordres existants et en prenant en compte les particularités du métier d'infirmier, notamment l'existence de trois catégories professionnelles très différentes.

Pour en améliorer le dispositif, votre commission vous propose d'adopter, outre onze amendements rédactionnels et de précision, quatre amendements tendant à :

- supprimer les dispositions redondantes relatives aux conditions d'éligibilité aux conseils départementaux de l'ordre par les différentes catégories professionnelles, qui prêtent à confusion dans la rédaction actuelle de l'article dans la mesure où elles semblent définir les électeurs et non les candidats ;

- rendre également applicables à l'ordre des infirmiers les dispositions des troisième et quatrième alinéas de l'article L. 4123-8, relatifs au remplacement des membres titulaires du conseil départemental par leur suppléant, et de l'article L. 4123-9, qui prévoit des élections complémentaires lorsque les suppléants ne sont plus en nombre suffisant pour permettre le remplacement des titulaires en cas de besoin ;

- harmoniser la procédure disciplinaire de l'ordre avec celle qui existe pour les autres professions médicales et paramédicales : les infirmiers salariés du secteur privé seront donc soumis, comme les libéraux, à la compétence disciplinaire de l'ordre ;

- prévoir que l'ordre sera informé des sanctions disciplinaires prises à l'encontre des infirmiers du secteur public pour une faute lourde commise dans l'exercice de leurs fonctions, y compris lorsque l'intéressé n'a pas été déféré devant les structures disciplinaires ordinales.

Votre commission constate, par ailleurs, que l'article premier applique aux infirmiers les références à certaines interrégions existantes et que cette disposition n'a pas été modifiée en dépit de la suppression de la mention des conseils interrégionaux de l'ordre par l'Assemblée nationale. Il en résulte que la possibilité de créer de telles instances pour l'ordre des infirmiers demeure. Votre commission s'en félicite, dans la mesure où la plupart des ordres professionnels sont aujourd'hui dotés de ce type de structures lorsque le nombre de praticiens est trop faible sur un territoire donné. C'est notamment le cas en Outre-mer, où des conseils interrégionaux existent par exemple pour les médecins et les chirurgiens-dentistes de la Réunion-Mayotte et des Antilles-Guyane.

Vote commission vous demande d'adopter le présent article ainsi modifié.

Article 2 - (art. L. 4311-15 et L. 4311-16 du code de la santé publique) - Conditions d'exercice de la profession d'infirmier

Objet : Cet article a pour objet d'adapter le contrôle des conditions requises pour exercer la profession d'infirmier à la création du nouvel ordre.

I - Le dispositif proposé

Aux termes de l'article L. 4311-15 actuel du code de la santé publique, les infirmiers sont tenus, avant d'exercer leur activité, de faire enregistrer leurs diplômes et titres auprès du service ou de l'organisme compétent, en l'espèce la direction départementale des affaires sanitaires et sociales (Ddass), qu'ils informent également de tout changement de leur situation professionnelle.

Ce service est par ailleurs chargé d'établir une liste des membres de la profession dans chaque département, portée à la connaissance du public. Chaque infirmier ne peut être inscrit que sur une seule liste départementale, sans que cela limite pour autant le champ géographique de ses activités professionnelles. Outre cette liste, les infirmiers doivent aussi, en principe, être inscrits au tableau du conseil des professions paramédicales.

Ces obligations relatives à l'inscription ne s'appliquent pas, en revanche, aux infirmiers militaires, aux professionnels enregistrés dans un Etat étranger, ni aux ressortissants de l'Union européenne ou de l'Espace économique européen (EEE), qui ont effectué une déclaration préalable et attesté de leurs diplômes.

Par ailleurs, un infirmier qui ne dispose pas d'une résidence professionnelle lui permettant d'être inscrit sur une liste départementale peut être autorisé par le préfet du département de son domicile, pour une période limitée mais renouvelable, à remplacer un confrère.

Le du présent article confie au conseil départemental de l'ordre les missions actuellement dévolues au préfet en matière d'inscription au tableau de l'ordre des infirmiers et d'autorisation des remplacements professionnels. Par cohérence avec l'exclusion des infirmiers du conseil des professions paramédicales, effectuée par l'article 4 de la proposition de loi, l'inscription au tableau de ce conseil ne sera plus requise pour exercer la profession.

Le préfet et le parquet du tribunal de grande instance conserveront cependant un droit d'accès permanent au tableau, qui pourra, comme la liste tenue par la Ddass, être porté à la connaissance du public dans des conditions définies par décret. Il convient de rappeler, à cet égard, qu'aux termes de l'article L. 4112-1, les tableaux départementaux de l'ordre des médecins, des chirurgiens-dentistes et des sages-femmes sont également publics.

L'article L. 4311-16 dispose, pour sa part, que le préfet refuse d'inscrire sur la liste départementale des infirmiers tout professionnel qui ne remplit pas les conditions exigées, notamment en termes de diplômes, ou qui est frappé soit d'une interdiction temporaire ou définitive d'exercer en France ou à l'étranger, soit d'une suspension prononcée par l'employeur ou le conseil des professions paramédicales en cas de danger grave pour les patients.

Cependant, lorsque cette interdiction a été prise par les autorités d'un Etat non membre de l'Union européenne ou de l'EEE, le préfet peut y déroger et autoriser l'infirmier à exercer son activité professionnelle.

Le de cet article supprime cette possibilité : il ne sera désormais plus possible pour un infirmier d'exercer en France lorsque qu'il a été frappé d'une interdiction dans un pays étranger.

En outre, il reviendra logiquement au conseil départemental de l'ordre auquel est confiée la gestion du tableau, et non plus au préfet, de refuser l'inscription d'un infirmier qui ne satisfait pas aux conditions légales d'exercice de la profession ou qui est sous le coup d'une décision d'interdiction ou de suspension de son activité.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a légèrement modifié cet article pour préciser que le refus d'inscription par le conseil départemental concerne l'inscription au tableau de l'ordre.

III - La position de votre commission

Votre commission approuve le transfert, à l'ordre des infirmiers, de la mission d'inscription au tableau de l'ordre actuellement effectuée par le préfet.

A terme, ce tableau devrait constituer le seul répertoire officiel de la profession, la liste départementale tenue par les Ddass étant progressivement amenée à disparaître. Cette réforme débutera dès 2007 pour les médecins, les chirurgiens-dentistes et les pharmaciens, avec la mise en place d'un numéro unique d'enregistrement au tableau pour chaque professionnel, qu'il conservera au long de sa carrière.

Votre commission est largement favorable à cette proposition, constatant que les Ddass sont actuellement débordées et incapables de connaître le nombre d'infirmiers exerçant sur leur territoire.

Par souci de coordination rédactionnelle, elle vous propose d'adopter un amendement visant à supprimer la référence aux articles L. 4393-1 et L. 4398-3 du code de la santé publique relatifs au conseil des professions paramédicales dont sont exclus les infirmiers par l'article 4 de la proposition de loi et qu'elle souhaite par ailleurs supprimer.

Votre commission vous demande d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 3 - (art. L. 4311-17 et L. 4311-18 du code de la santé publique) Dispositions de coordination concernant les conditions d'inscription au tableau de l'ordre des infirmiers

Objet : Cet article vise à préciser le rôle des conseils départementaux de l'ordre des infirmiers en matière d'inscription au tableau.

I - Le dispositif proposé

L'article L. 4311-17 indique que le professionnel qui demande son inscription sur la liste départementale des infirmiers doit faire la preuve, dans son dossier de candidature, d'une connaissance satisfaisante de la langue française et du système de poids et mesures utilisé en France. A défaut, une vérification est effectuée par le médecin inspecteur départemental de santé publique ou, à la demande de l'intéressé, par le médecin inspecteur régional de santé publique.

Le paragraphe I du présent article apporte deux modifications mineures à ce dispositif :

- par cohérence avec l'article 2 de la proposition de loi, il précise que les conditions d'inscription précitées s'appliquent au tableau de l'ordre et non plus à la liste départementale ( ) ;

- il indique que le conseil départemental de l'ordre pourra, de sa propre initiative ou à la demande de l'intéressé, exiger une vérification des compétences de ce dernier au médecin inspecteur départemental de santé publique ( ).

Aux termes de l'article L. 4311-18 , le préfet est également tenu de refuser l'inscription sur la liste départementale lorsque l'infirmier est atteint d'une infirmité ou se trouve dans un état pathologique qui rend dangereux l'exercice de sa profession.

En application du paragraphe II de cet article, il reviendra désormais au conseil départemental de l'ordre de refuser l'inscription d'un professionnel pour des raisons de santé. En cas de doute, une vérification pourra cependant être effectuée à la demande de l'une des parties par le médecin inspecteur départemental de santé publique.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

Dans le texte initial de la proposition de loi, cet article supprimait la disposition selon laquelle l'autorisation d'exercer la profession d'infirmier est subordonnée à une connaissance suffisante de la langue française et du système des poids et mesures. La commission des Affaires culturelles, familiales et sociales a souhaité rétablir cette précision.

L'Assemblée nationale a ensuite adopté cet article sans modification.

III - La position de votre commission

Votre commission est favorable aux conditions fixées par le présent article pour l'inscription au tableau de l'ordre par le conseil départemental.

Elle considère, à cet égard, comme essentiel le rôle du médecin inspecteur départemental de santé publique en matière de vérification, en cas de besoin, des compétences et de l'état de santé d'un candidat, afin d'éviter les abus et de limiter les erreurs de jugement à l'encontre des demandeurs.

Elle vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article 4 - (art. L. 4391-1, L. 4393-6 et L. 4393-8 du code de la santé publique) - Exclusion des infirmiers du champ de compétences du conseil réunissant certains professionnels paramédicaux libéraux

Objet : Cet article vise à exclure les infirmiers du conseil des professions paramédicales.

I - Le dispositif proposé

Le conseil des professions paramédicales a été créé par l'article 71 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé. Il rassemble, de manière obligatoire, les infirmiers, les masseurs-kinésithérapeutes, les pédicures-podologues, les orthophonistes et les orthoptistes qui exercent à titre libéral. Ses missions et ses modalités de fonctionnement sont décrites par les articles L. 4391-1 à L. 4398-5 du code de la santé publique.

Ce conseil participe à l'évaluation des pratiques professionnelles de ses membres et au contrôle de leur déontologie, ainsi qu'à l'élaboration et à la diffusion des bonnes pratiques paramédicales. Il assure également l'information de ses membres et des usagers du système de santé sur l'exercice des professions paramédicales.

Il comprend deux niveaux d'instances : régional , avec des collèges professionnels, une assemblée interprofessionnelle et une chambre disciplinaire de première instance, et national , avec des collèges professionnels, une assemblée interprofessionnelle et une chambre disciplinaire d'appel.

Le niveau régional est chargé de l'inscription au tableau du conseil, de la suspension de l'autorisation d'exercer pour les professionnels dont l'état de santé est jugé dangereux, ainsi que de l'élaboration et de l'évaluation des règles de bonnes pratiques. Une mission de conciliation en cas de litige entre professionnels lui est également confiée.

L'assemblée interprofessionnelle nationale est, pour sa part, consultée par le ministre de la santé sur les questions qui intéressent les professions paramédicales. Elle coordonne l'élaboration des règles de bonnes pratiques, qu'elle soumet à la Haute Autorité de santé, et est saisie des recours contre les décisions des collèges professionnels régionaux en matière d'inscription au tableau du conseil. Enfin, elle définit le montant de la cotisation payée par les membres et en répartit le produit entre les instances régionales. La chambre disciplinaire nationale assure l'appel des dossiers traités par les chambres de première instance.

Les membres titulaires et suppléants des instances régionales et nationales sont élus pour cinq ans par les collèges électoraux professionnels, qui rassemblent par métier les personnes inscrite au tableau du conseil. Les assemblées interprofessionnelles régionales et nationale ne peuvent comporter une majorité absolue de membres d'une même profession.

Ce conseil, qui dispose d'une organisation et de compétences proches de celles dévolues à une structure ordinale, a donc été conçu comme un palliatif à l'absence d'ordre pour les professions paramédicales, notamment pour leur permettre d'être représentées, défendues et de disposer d'une instance de règlement des conflits.

Il n'a toutefois jamais vu le jour et a été pour partie vidé de son contenu par la création de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes et de celui des pédicures-podologues par la loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique. De fait, la participation de ces professions au conseil des professions paramédicales a été limitée aux assemblées interprofessionnelles régionales et nationale.

Le présent article participe au démembrement progressif de cette structure en en excluant totalement les infirmiers, compte tenu de la création d'un ordre professionnel par l'article premier de la proposition de loi. Ainsi, son intitulé est désormais dénommé « Conseil des professions de masseur kinésithérapeute, pédicure-podologue, orthophoniste et orthoptiste » ( ) . Une nouvelle rédaction est également prévue pour les articles L. 4391-1, L. 4393-6 et L. 4393-8, afin que les infirmiers n'y figurent plus ( à ).

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

II - La position de votre commission

Créé par la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, le conseil de professions paramédicales devait réunir les métiers pour lesquels aucun ordre n'existait à l'époque : les infirmiers, les masseurs-kinésithérapeutes, les pédicures-podologues, les orthophonistes et les orthoptistes. Or l'absence de décrets, la création de deux ordres spécifiques pour les masseurs-kinésithérapeutes et les pédicures-podologues par la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique et celle, à venir, de l'ordre des infirmiers, le rendent désormais dénué d'utilité.

Plutôt que d'en exclure les infirmiers, ce qui accroît la singularité de sa situation, votre commission vous propose, par voie d' amendement , de supprimer le conseil des professions paramédicales et d'abroger les références correspondantes dans le code de la santé publique.

Il conviendra toutefois de réfléchir à la structure la mieux adaptée à la fixation des règles déontologiques et au traitement des contentieux des orthophonistes et des orthoptistes, trop peu nombreux - respectivement 14.500 et 2.000 - pour relever d'une instance ordinale classique.

A cet égard, la création d'un Haut conseil des professions paramédicales, proposée par Edouard Couty 2 ( * ) en remplacement de l'actuel conseil supérieur des professions paramédicales, organisme consultatif placé auprès du ministre de la santé et dont les insuffisances ne sont plus à prouver, pourrait constituer une piste constructive. Une telle structure permettrait également de traiter les nombreuses questions interprofessionnelles, dans un objectif d'une meilleure coordination des soins paramédicaux.

Sous réserve de cette observation, votre commission vous demande d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 5 - (art. L. 4311-24, L. 4311-25 et L. 431-28 du code de la santé publique) - Dispositions de coordination concernant la suspension du droit d'exercer et les conventions passées entre les entreprises et les infirmiers

Objet : Cet article a pour objet d'apporter des modifications de cohérence aux dispositions relatives à la suspension du droit d'exercer et aux conventions passées entre les entreprises et les professionnels, compte tenu de la création de l'ordre des infirmiers.

I - Le dispositif proposé

Le paragraphe I de cet article abroge les articles du code de la santé publique relatifs à la suspension de l'autorisation d'exercer la profession d'infirmier du fait de l'infirmité ou de l'état pathologique de l'intéressé. Aux termes des articles L. 4311-24 et L. 4311-25, cette suspension est aujourd'hui prononcée par le tribunal de grande instance, qui prescrit à cet égard les mesures de publicité qu'il juge utiles. Il est saisi au préalable par le ministre de la santé, le procureur de la République, le préfet ou le médecin inspecteur régional de santé publique.

Ce rôle sera désormais celui des conseils régionaux de l'ordre, conformément aux termes de l'article premier, les conseils départementaux étant pour leur part tenus, comme le prévoit l'article 3 de la proposition de loi, de refuser l'inscription au tableau lorsque l'état de santé du demandeur ne lui permet pas d'exercer la profession d'infirmier.

Le paragraphe II propose une nouvelle rédaction de l'article L. 4311-28. Cet article prévoit actuellement que les articles L. 4113-5 (interdiction, pour un membre d'une profession médicale, de partager ses honoraires avec une personne qui n'appartient pas à cette profession), L. 4113-6 (interdiction de recevoir des avantages offerts par un laboratoire pharmaceutique) et L. 4113-8 (interdiction de bénéficier d'intérêts ou de ristournes en fonction du nombre d'appareils ou de médicaments prescrits) sont applicables à la profession d'infirmier. Toutefois, il peut être dérogé aux dispositions de l'article L. 4113-6 par une convention passée avec le laboratoire, dès lors que les avantages offerts ont pour objet explicite des activités de recherche ou d'évaluation scientifique et que la convention a été soumise au collège professionnel régional du conseil des professions paramédicales concerné.

La rédaction proposée pour l'article L. 4311-28 élargit les dispositions relatives aux relations avec les entreprises qui s'appliqueront désormais aux infirmiers dans des conditions précisées par voie réglementaire. Ceux-ci ne pourront ainsi pas exercer leur profession sous un pseudonyme (article L. 4313-3) et devront transmettre au conseil départemental de l'ordre, dans un délai d'un mois après leur conclusion, tous les contrats et avenants relatif à l'exercice de leur profession (article L. 4313-9). En revanche, l'article L. 4113-8 ne les concernera plus, dans la mesure où ils ne sont en réalité pas autorisés à prescrire d'appareils ni de médicaments.

En outre, leur seront applicables certaines règles relatives à l'inscription au tableau de l'ordre existant actuellement pour les médecins, les sages-femmes et les chirurgiens-dentistes :

- le conseil départemental dispose de trois mois pour statuer sur la demande d'inscription d'un candidat et doit motiver ses décisions de refus (article L. 4112-3) ;

- les décisions du conseil départemental peuvent être frappées d'appel devant le conseil régional ou le conseil national (article L. 4112-4) ;

- l'inscription à un tableau départemental permet d'exercer la profession sur l'ensemble du territoire national mais un changement de résidence doit être suivi d'une inscription sur le tableau du département du nouveau domicile (article L. 4112-5) ;

- enfin, en cas d'urgence et de danger grave pour les patients, le préfet peut prononcer la suspension immédiate du droit d'exercer la profession d'infirmier pour une durée maximale de cinq mois, en en informant le président du conseil départemental de l'ordre et les organismes de sécurité sociale concernés et en respectant les conditions de recours définies à l'article L. 4113-14.

Ces dispositions ne concerneront toutefois pas les infirmiers militaires (article L. 4112-6).

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

II - La position de votre commission

Votre commission est favorable à ces dispositions de coordination, qui permettent aux infirmiers de se voir appliquer les mêmes règles que les autres professions de santé.

Elle vous propose en conséquence d'adopter cet article sans modification.

Article 6 - (art. L. 145-5-1 à L. 145-5-5, L. 145-7-1 à L. 145-7-3, L. 145-9-1 et L. 145-9-2 du code de la sécurité sociale) - Dispositions de coordination concernant le contentieux du contrôle technique de la sécurité sociale

Objet : Cet article a pour objet de prendre en compte la création de l'ordre infirmier dans les dispositions du code de la sécurité sociale relatives au contentieux technique.

I - Le dispositif proposé

Les principes du contentieux technique de la sécurité sociale

Le contentieux technique de la sécurité sociale vise à assurer le respect des règles médicales, administratives et techniques par les professionnels de santé lors des soins dispensés aux assurés sociaux.

Il se distingue du contentieux général de la sécurité sociale, qui recouvre l'ensemble des litiges à caractère individuel ayant pour objet l'assujettissement, le paiement des cotisations et les droits aux prestations.

Le contentieux technique relève de juridictions administratives spécialisées présidées par des magistrats administratifs, soit un membre du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel en première instance et un conseiller d'Etat pour l'instance d'appel. Les procédures y sont contradictoires.

Pour les professions qui disposent déjà d'un ordre - médecins, chirurgiens-dentistes, masseurs-kinésithérapeutes et sages-femmes -, les fautes, abus et fraudes, qui concernent l'exercice professionnel, relèvent des sections des assurances sociales des chambres disciplinaires de première instance et d'appel de leur ordre, aux termes des articles L. 145-1 et suivants.

Les sanctions susceptibles d'être prononcées dans ce cadre sont diverses et ont des conséquences plus ou moins graves sur la carrière de l'intéressé : l'avertissement et le blâme entraînent la privation de la participation aux instances ordinales pendant une durée de trois ans ; l'interdiction temporaire ou permanente d'exercer rend cette privation définitive. Ces sanctions ne sont toutefois pas cumulables avec celles prévues à l'article L. 4124-6 du code de la santé publique prononcées par les chambres disciplinaires de l'ordre en première instance et en appel (avertissement, blâme, interdiction temporaire d'exercer, radiation du tableau). Lorsqu'elles sont prises par le conseil national de l'ordre, elles sont susceptibles de recours en cassation devant le Conseil d'Etat.

Pour les professions paramédicales relevant du conseil créé par la loi du 4 mars 2002, dont les infirmiers font en principe partie actuellement, il est prévu de confier ce contentieux aux sections des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance et d'appel de ce conseil (article L. 145-6 et suivants). Les sanctions qui peuvent y être prononcées sont identiques à celles autorisées aux instances disciplinaires ordinales et sont également susceptibles de recours devant le Conseil d'Etat.

Les modifications apportées au contentieux de la profession d'infirmier

Par cohérence avec la création d'un ordre national des infirmiers et leur exclusion du conseil des professions paramédicales, il convient d'adapter les règles applicables au contentieux technique de la profession. Tel est l'objet du présent article.

Le paragraphe I modifie l'article L. 145-5-1 pour exclure les infirmiers du champ de compétence de la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance et d'appel du conseil des professions paramédicales, pour ce qui concerne les fautes, abus et fraudes constatés dans l'exercice de la profession ( ).

Il complète par ailleurs ce même article pour indiquer que ces faits relèveront désormais de la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance au sein du conseil régional de l'ordre des infirmiers et, en appel, de la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire du conseil national ( ).

Le paragraphe II précise, dans l'article L. 145-5-2, que les instances disciplinaires ordinales de l'ordre infirmier pourront prononcer un avertissement, un blâme ou une interdiction temporaire ou définitive d'exercer.

Aux termes de la rédaction proposée par le paragraphe III pour l'article L. 145-5-3, ces sanctions entraîneront, pour les infirmiers concernés, la privation du droit de faire partie des instances de l'ordre pendant une durée de trois ans en cas d'avertissement ou de blâme. Cette mesure sera définitive à la suite d'une interdiction d'exercer.

Le paragraphe IV indique que le professionnel qui contreviendra à une décision de l'ordre des infirmiers en donnant des soins à un assuré social alors qu'il a été privé de ce droit, devra rembourser à l'organisme de sécurité sociale le montant des prestations payées à l'assuré, comme le prévoit déjà l'article L. 145-5-4 pour les autres professions paramédicales.

Les sanctions prises par l'ordre des infirmiers au titre du contentieux technique de la sécurité sociale seront susceptibles de recours en cassation devant le Conseil d'Etat, selon les modifications apportées par le paragraphe V à l'article L. 145-5-5.

Le paragraphe VI modifie l'article L. 145-7-1 pour préciser que, comme c'est actuellement le cas pour les masseurs-kinésithérapeutes, la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance de l'ordre des infirmiers sera présidée par un membre du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel nommé par le vice-président du Conseil d'Etat, sur proposition du président de la cour administrative d'appel dans le ressort duquel se trouve le conseil régional ( ). Elle comprendra un nombre égal d'assesseurs membres de l'ordre et d'assesseurs représentant les organismes de sécurité sociale ( ).

Le paragraphe VII prévoit des dispositions du même ordre pour la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire d'appel : elle sera présidée par un conseiller d'Etat ( ) et comprendra un nombre égal d'assesseurs praticiens conseils des organismes de sécurité sociale et d'assesseurs membre de l'ordre des infirmiers ( ), ces derniers étant nommés par le conseil national en son sein ( ).

Les infirmiers membres des sections des assurances sociales des chambres disciplinaires de première instance et d'appel ne pourront par ailleurs siéger, pour les faits dont ils auraient eu à connaître dans le cadre des chambres disciplinaires (article L. 145-7-3 modifié par le paragraphe VIII ).

Enfin, selon l'article L. 145-9-1 dans sa rédaction proposée par le paragraphe IX , la procédure applicable au contentieux technique des infirmiers sera contradictoire. A cet égard, les présidents des sections des assurances sociales pourront, par ordonnance, donner acte des désistements et rejeter une requête ou des conclusions entachées d'irrégularité ( paragraphe X modifiant l'article L. 145-9-2).

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

II - La position de votre commission

Dans un souci de cohérence législative, votre commission approuve les modifications apportées aux dispositions du code de la sécurité sociale relatives au contentieux technique des professions paramédicales rendues nécessaires par la création d'une instance ordinale disciplinaire destinée aux infirmiers.

Elle vous propose toutefois, par voie d' amendement , une nouvelle rédaction du présent article afin de tenir en compte, dans ces dispositions, de la suppression du conseil national des professions paramédicales qu'elle a souhaité voir adopter à l'article 4 de la proposition de loi. Il serait illogique que cette instance demeure la juridiction chargée du traitement du contentieux de la sécurité sociale pour les orthophonistes et les orthoptistes.

Cet amendement prévoit également qu'un magistrat de l'ordre administratif qui ne serait plus en activité puisse présider la section des assurances sociales de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes et des infirmiers, afin d'élargir les possibilités de recrutement pour la présidence de ces instances.

Votre commission vous demande d'adopter cet article ainsi modifié.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I - AUDITIONS

Réunie le mercredi 20 septembre 2006 , sous la présidence de M. Nicolas About , la commission a procédé aux auditions préparatoires à l'examen de la proposition de loi n° 390 (2005 2006), adoptée par l'Assemblée nationale, portant création d'un ordre national des infirmiers , dont Mme Sylvie Desmarescaux est le rapporteur .

La commission a tout d'abord organisé une table ronde réunissant les représentants de plusieurs associations et de syndicats infirmiers : Mme Elisabeth Biais Canhoyea , présidente de la Fédération nationale des infirmières (FNI), Mme Régine Clément , présidente de l'Association pour l'ordre des infirmières et infirmiers de France (APOIIF), M. Michel Le Diréach , secrétaire fédéral de la CFDT Santé, Mme Dominique Feuille , chargée des cadres soignants au Syndicat national des cadres hospitaliers (SNCH), Mme Régina Godart , présidente de l'Organisation nationale des syndicats d'infirmiers libéraux (ONSIL), M. Jérôme Malfaisan , président de la Fédération nationale des étudiants en soins infirmiers (FNESI), M. Dominique Mureau , vice-président de la Coordination nationale infirmière (CNI), Mme Annick Picard , membre du bureau de l'Union fédérale des médecins, ingénieurs, cadres et techniciens-Confédération générale du travail (UFMICT-CGT), Mme Edith Plantefève , vice-présidente de l'Association nationale des puéricultrices diplômées et des étudiants (ANDPE), M. Jean-Jacques Scharff , président de l'Union nationale des associations en soins infirmiers et des infirmiers français (Unasiif), porte parole du Groupe Sainte-Anne, Mme Annick Touba , présidente du Syndicat national des infirmières et infirmiers libéraux (SNIIL), M. René Valentin , secrétaire syndical permanent au syndicat Force ouvrière de l'assistance publique des hôpitaux de Paris (FO-APHP), et Mme Kine Veyer , déléguée de région de l'Association française des directeurs de soins (AFDS).

M. Nicolas About, président , a souhaité que cette réunion soit l'occasion pour chacun de formuler ses souhaits et ses attentes, ceux-ci pouvant varier suivant les statuts des infirmiers libéraux, fonctionnaires ou salariés. Il a demandé si les représentants des associations et des syndicats sont satisfaits de la concertation engagée sur ce texte.

Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur , a rappelé que la création d'un ordre national des infirmiers a fait l'objet de plusieurs propositions parlementaires, la première datant du 1 er février 1996 et plusieurs textes ayant été ensuite présentés à l'Assemblée nationale depuis 2003. La présente proposition de loi est la première à être effectivement engagée dans le processus de navette et devrait être examinée par le Sénat en première lecture au début du mois d'octobre. Espérant que cette audition apporte des éléments susceptibles d'enrichir le texte transmis par l'Assemblée nationale, elle a souhaité savoir dans quelle mesure la concertation entre les professionnels, le Gouvernement et les députés a déjà permis d'en améliorer la rédaction et d'aboutir à un compromis.

M. Jean-Jacques Scharff a indiqué que cette proposition de loi, attendue par la profession depuis une trentaine d'années, a fait l'objet d'une réelle concertation qui a permis d'informer les professionnels et de recueillir leurs attentes, ce qui a conduit à l'élaboration d'un texte de compromis en cohérence avec l'organisation des ordres médicaux et paramédicaux existants, avec les missions de santé publique des infirmiers, ainsi qu'avec les législations française et européenne.

Mme Régine Clément s'est félicitée qu'un texte fédérateur ait enfin pu aboutir après plusieurs années de travail soutenu, en collaboration avec l'ensemble des professionnels et le ministère de la santé.

Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur , a souhaité savoir si la création d'un ordre national des infirmiers est une demande exclusive des infirmiers libéraux ou de l'ensemble des professionnels.

M. Dominique Mureau s'est également félicité de la qualité de la concertation menée avec le Gouvernement et les députés. Toutefois, celle-ci a été plus difficile entre professionnels, les salariés ayant, dans un premier temps, émis des réserves sur la création d'un ordre infirmier. Aujourd'hui, grâce à la concertation, les infirmiers salariés et hospitaliers perçoivent mieux l'utilité de la création d'une structure ordinale et espèrent que celle-ci permettra d'améliorer la reconnaissance de leur profession et le dialogue avec les autorités politiques.

M. René Valentin a rappelé que son syndicat, Force ouvrière, s'est opposé dès le départ à la création d'un ordre national des infirmiers, car 80 % des professionnels sont salariés et disposent déjà d'instances représentatives satisfaisantes (commissions paritaires, commissions paramédicales, ...). De plus, la concertation auprès des services hospitaliers a révélé une méconnaissance du projet de création d'un ordre infirmier, les infirmiers salariés ayant par ailleurs d'autres sujets de préoccupation tels que leurs conditions de travail, la définition de leurs horaires et la diminution du nombre d'étudiants dans les écoles infirmières. Se pose également le problème de la cotisation obligatoire d'adhésion à l'ordre, qui suscite de fortes réticences de la part des infirmiers hospitaliers et salariés.

Mme Annick Picard , rappelant que la Confédération générale du travail (CGT) a obtenu 32 % des suffrages aux dernières élections professionnelles de 2003 et qu'elle est, à ce titre, la première organisation représentative au sein de la commission administrative paritaire des infirmiers et des professions sociales, a déploré qu'aucune concertation n'ait été conduite avec son organisation. La création d'un ordre infirmier lui paraît surprenante, dès lors que la profession est composée à plus de 80 % de salariés ou de fonctionnaires. Enfin, ce projet ne répond pas à une demande des salariés, qui ont d'autres sujets de préoccupation, et notamment leurs conditions de travail.

M. Michel Le Diréach a confirmé que la proposition de loi a fait l'objet d'une large concertation, un dialogue s'étant instauré depuis 2002. En revanche, le texte ne suscite pas l'adhésion unanime des professionnels.

Mme Dominique Feuille a indiqué que les pourparlers avec le Gouvernement ont contribué à faire évoluer le positionnement du syndicat national des cadres hospitaliers vers un avis favorable à la création d'un ordre national des infirmiers. Toutefois, quelques points d'ombre subsistent, que le syndicat souhaiterait voir clarifiés, notamment sur l'étendue des missions de cette nouvelle structure ordinale.

Mme Annick Touba a précisé que, sur les quatre syndicats représentant les infirmiers libéraux, trois font partie du Groupe Sainte-Anne au sein duquel a été organisée la consultation des organisations représentatives des infirmiers salariés. Elle a rappelé que tous les syndicats infirmiers libéraux sont favorables à la création d'un ordre national des infirmiers.

A l'adresse des syndicats craignant que l'ordre ne se substitue aux organisations représentatives, Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur , a indiqué que de nombreuses professions ont à la fois un ordre national et des syndicats, les deux entités n'ayant pas le même rôle.

M. Jérôme Malfaisan a souligné l'implication des étudiants infirmiers dans ce débat, à l'occasion duquel ils ont été effectivement consultés.

Mme Kine Veyer , membre du Groupe Sainte-Anne, a rappelé que la création d'une structure ordinale est attendue par de nombreuses associations professionnelles depuis près de trente ans. Elle a souhaité que le futur ordre des infirmiers contribue à l'évolution de la profession en réponse aux nouveaux enjeux et besoins de santé publique et dans le sens d'une meilleure garantie de la qualité et de la sécurité des soins. La rédaction d'un code de déontologie, la représentation de la profession infirmière, ainsi que la promotion de son identité devraient, à son sens, faire également partie des missions du futur ordre national des infirmiers.

M. Jean Jacques Scharff s'est dit favorable à cette proposition de loi qui reprend les missions définies par l'Association pour l'ordre des infirmières et infirmiers de France (APOIIF), et qui a permis, pour la première fois, d'opérer une réelle convergence entre infirmiers libéraux et salariés. Toutefois, des interrogations subsistent quant à la régulation des autorisations d'exercice des infirmiers étrangers et de ceux qui sont victimes d'une infirmité ou de troubles psychologiques susceptibles de nuire à la qualité des soins.

M. Dominique Mureau a confirmé que de nombreux professionnels ont des difficultés à distinguer le rôle respectif d'un syndicat et d'un ordre professionnel, ce qui nécessite en amont un effort de pédagogie. A cet égard, l'ordre ne sera pas chargé de traiter les problèmes relatifs aux conditions de travail, qui relèvent par nature de la compétence des syndicats. L'ordre doit, à son sens, représenter les professionnels infirmiers dans tous les dossiers transversaux liés à la santé publique.

Mme Régine Clément a ajouté que l'ordre serait également chargé de réguler la démographie de la profession, mission actuellement remplie par les directions départementales de l'action sanitaire et sociale (Ddass).

M. Michel Le Diréach a estimé nécessaire que le futur ordre contribue à la rédaction d'un nouveau code de déontologie.

Mme Dominique Feuille a rappelé que la garantie des qualifications et des compétences constitue une mission d'intérêt public qu'un ordre professionnel a vocation naturelle à remplir. Des améliorations pourraient être apportées à l'organisation de la structure ordinale, deux niveaux, national et régional, plutôt que trois, devant permettre de simplifier le système et d'en diminuer le coût.

M. Michel Le Diréach a contesté la représentativité du Groupe Sainte-Anne au sein duquel se sont regroupées de nombreuses associations. Il a fait part des points qui restent à éclaircir, pour lesquels des observations ont été transmises par les syndicats au président du Sénat : l'intégration des infirmiers du service national de santé des armées au futur ordre professionnel ; la prise en compte de la spécificité de la profession infirmière, qui est composée à plus de 80 % de salariés et de fonctionnaires hospitaliers ; la clarification de la répartition des pouvoirs de sanction disciplinaire entre la nouvelle structure ordinale et la direction des infirmiers salariés ou hospitaliers ; la légitimité de l'ordre national des infirmiers à traiter des questions de déontologie, sachant que des dispositions législatives et réglementaires existent déjà dans ce domaine.

Il s'est enfin inquiété de la surcharge de travail des infirmiers qui découle souvent d'une organisation insatisfaisante des équipes.

Mme Régine Clément s'est dite favorable à la création d'un ordre national des infirmiers chargé d'assurer la représentation nationale de la profession et de défendre ses intérêts. Contrairement aux positions défendues par le Groupe Sainte-Anne, l'APOIIF est favorable à une structuration à deux niveaux du futur ordre. Cet ordre permettrait, par ailleurs, de défendre la position des infirmiers français dans les instances internationales. A cet égard, elle a mentionné la réunion à Rome des fédérations européennes des professions infirmières, qui oeuvrent à la défense et à la reconnaissance des particularités de ce métier dans la chaîne de soins. Elle a souligné l'intérêt du maintien de l'échelon régional, qui permet une meilleure appréhension des intérêts collectifs lors des réunions de concertation.

Au-delà des réticences que suscite le paiement d'une cotisation, Mme Annick Picard s'est inquiétée du fait que la création d'un ordre national des infirmiers contribue à la construction d'une « pensée unique » à laquelle les professionnels seraient tenus d'adhérer.

M. Nicolas About, président , a rappelé que l'existence de l'ordre national des médecins n'a jamais empêché l'expression, en parallèle, de la diversité syndicale.

Mme Kine Veyer a souhaité qu'associations et syndicats travaillent de concert à l'élaboration d'un texte, faisant observer que le Groupe Sainte-Anne n'a jamais tenté d'exclure les syndicats. Elle a en outre fait part de ses attentes en matière de radiation de personnel : actuellement, une infirmière radiée de la fonction publique hospitalière peut continuer à exercer en secteur libéral, car la radiation n'entraîne pas le retrait de son diplôme d'Etat. L'autorité légitime d'un ordre professionnel permettrait, dans ce cas de figure, de retirer son diplôme et la capacité d'exercice à un professionnel lorsqu'il n'est manifestement plus en mesure de garantir la qualité des soins et la protection des patients.

Mme Dominique Feuille a observé que 80 % des infirmiers sont fonctionnaires ou salariés d'institutions. La création d'un ordre national risque donc de poser des problèmes en matière d'autorité hiérarchique sur ces personnels. Il convient, par conséquent, de bien délimiter le rôle respectif des syndicats, des associations et de l'ordre. Si les syndicats font actuellement un travail remarquable, ils ne sont peut-être pas en mesure de rassembler l'ensemble de la profession en matière de définition des bonnes pratiques et de déontologie. Il faut souhaiter que le débat sur la création d'un ordre national des infirmiers ne conduise pas les différentes catégories de professionnels à s'opposer les unes aux autres. En tout état de cause, il sera nécessaire de conduire une réflexion sur l'évolution du conseil des professions d'infirmier, masseur-kinésithérapeute, pédicure-podologue, orthophoniste et orthoptiste et l'articulation de ses missions avec celles du nouveau conseil de l'ordre.

M. René Valentin a récusé l'utilité d'un ordre des infirmiers en matière disciplinaire. Lorsqu'une infirmière commet une faute lourde, elle est radiée de la fonction publique et la Direction départementale de l'action sanitaire et sociale (Ddass) en est informée. Il lui appartient donc de s'assurer que cette infirmière ne peut plus exercer. Il a également fait valoir le risque qu'un ordre réservé aux infirmiers ne conduise à opposer ces derniers aux aides-soignants et aux agents hospitaliers avec lesquels ils sont pourtant amenés à travailler en équipe au sein des établissements de santé.

Mme Elisabeth Biais-Canhoyea a estimé que la création d'un ordre national conduirait à une meilleure reconnaissance de l'identité professionnelle des infirmiers. L'affiliation obligatoire à cet ordre permettra, en outre, d'améliorer le recensement des professionnels exerçant sur un territoire. C'est la raison pour laquelle elle s'est déclarée favorable à l'existence d'un échelon départemental : à ce niveau, il sera possible de résoudre les problèmes de déontologie et d'évaluer les pratiques professionnelles.

Rappelant ses fonctions en tant que président du conseil d'administration de l'hôpital de Belfort-Montbéliard, M. Louis Souvet a dit avoir souvent regretté l'éparpillement de la représentation des infirmiers. Observant qu'en l'absence d'un ordre professionnel pour les infirmiers, les syndicats ont dû jusqu'à présent en assurer les missions, il en a conclu que la création de cette nouvelle instance va nécessairement réduire les domaines d'intervention de ces syndicats.

M. Guy Fischer a fait part de son plein accord avec les organisations syndicales qui refusent la création d'un ordre national des infirmiers. Il a estimé que cette demande émanait surtout des infirmiers libéraux, ce qui lui a semblé logique dans la mesure où les premiers ordres ont été créés pour des professions libérales. Il a souhaité savoir si la Confédération française démocratique du travail (CFDT) s'oppose, comme les autres grandes centrales syndicales, à la création de cet ordre. Il a enfin voulu savoir en quoi consiste le « Groupe Sainte-Anne »

M. Michel Le Diréach a répondu que tel est effectivement le cas. Il a toutefois précisé qu'il travaillerait avec ce conseil si celui-ci est malgré tout institué.

Mme Marie-Thérèse Hermange s'est interrogée sur l'organisation de l'ordre national des infirmiers au niveau local. Un échelon régional ne lui est pas apparu indispensable à la différence d'un échelon départemental.

M. Francis Giraud a rappelé que si les conditions de travail des infirmiers sont différentes selon qu'ils exercent en milieu hospitalier ou en libéral, il s'agit malgré tout du même métier. C'est le rôle des syndicats que de s'attacher à la défense des conditions de travail. L'ordre doit, quant à lui, s'attacher à unifier la profession, notamment en matière de déontologie. Il a considéré que la création de cet ordre trouve son utilité, y compris pour les infirmiers exerçant à l'hôpital, car il permettrait d'unifier les pratiques professionnelles dans un contexte de grande imbrication, voire de confusion, entre les différentes professions médicales et paramédicales. S'agissant de l'organisation de l'ordre, il s'est déclaré favorable à l'existence d'un échelon départemental.

Mme Elisabeth Biais-Canhoyea a considéré que l'existence d'un échelon régional de l'ordre est indispensable car la région est devenue, avec la création des agences régionales d'hospitalisation (ARH), l'échelon d'organisation de la politique sanitaire.

Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur , a souhaité connaître la position des différents intervenants sur la création de conseils interrégionaux, notamment pour les départements d'outre-mer.

Mme Régine Clément a récusé l'idée selon laquelle la création d'un ordre des infirmiers n'est revendiquée que par les cadres de santé, c'est-à-dire des professionnels n'ayant plus de contact avec le terrain.

M. Jean-Jacques Scharff a expliqué que le « Groupe Sainte-Anne » est un collectif d'associations qui tient son nom du groupe hospitalier Sainte-Anne à Paris, lieu où se sont tenues ses premières réunions.

M. Dominique Mureau a reconnu qu'un échelon départemental et un échelon régional de l'ordre ont tous deux leur légitimité. Mais il a insisté pour que la mise en place d'une telle organisation n'ait pas un coût disproportionné. Il a évalué à 40 euros par an la cotisation maximale que les infirmiers seraient prêts à payer pour assurer le fonctionnement de cette instance. Il a précisé que les questions disciplinaires devraient être, à son sens, réglées au niveau régional.

M. Jérôme Malfaisan a souligné la difficulté, pour les jeunes diplômés, de s'orienter face à la profusion des syndicats et associations d'infirmiers. Cet émiettement explique, à son sens, la faible représentativité de ces derniers : seuls 4 % des infirmiers sont syndiqués et 6 % membres d'une association professionnelle. Il a regretté que le conseil des professions d'infirmier, masseur-kinésithérapeute, pédicure-podologue, orthophoniste et orthoptiste soit devenu une coquille vide depuis la création d'ordres professionnels spécifiques pour les kinésithérapeutes et les orthophonistes.

Mme Annick Picard a précisé que la fédération nationale des étudiants en soins infirmiers n'a pas le monopole de la représentation des élèves infirmiers. La CGT compte également dans ses rangs des étudiants, notamment ceux issus de la promotion professionnelle. Elle s'est également prononcée en faveur d'un recentrage du conseil des professions d'infirmier, masseur-kinésithérapeute, pédicure-podologue, orthophoniste et orthoptiste sur les professions paramédicales. Elle a estimé que la volonté de créer un ordre national des infirmiers n'est globalement portée que par les cadres de soins pour répondre à leur mal-être et à leurs difficultés de positionnement par rapport aux médecins. Elle s'est inquiétée de l'avenir des délégations de soins entre infirmiers et aides-soignants dans le cadre d'un ordre réservé aux infirmiers.

M. Jean-Jacques Scharff a déclaré n'être pas défavorable par principe à la création de conseils interrégionaux, dès lors que ceux-ci restent facultatifs. Il a toutefois reconnu que cette solution revêt un intérêt particulier pour les départements d'outre-mer. L'échelon départemental est celui qui permettrait d'assurer la meilleure circulation de l'information en matière de bonnes pratiques et de déontologie, alors que l'échelon régional est le plus approprié en matière disciplinaire. Il a estimé que les craintes exprimées par certains professionnels par rapport à la création de l'ordre sont liées à une mauvaise information sur ces missions. Les associations oeuvrant pour sa mise en place ont rencontré de nombreuses difficultés pour diffuser ces informations par les canaux institutionnels traditionnels. S'agissant enfin du niveau de la cotisation, il convient d'apprécier le montant des frais restant réellement à la charge des professionnels : compte tenu des diverses déductions fiscales, une cotisation de 300 euros par an ne coûterait en réalité aux professionnels que 100 euros.

Mme Kine Veyer a expliqué qu'une organisation de l'ordre selon trois niveaux, national, régional et départemental, est souhaitable dans l'intérêt des patients.

Mme Annick Touba a insisté sur le fait que les infirmiers libéraux exercent le même métier que les infirmiers hospitaliers. Ils travaillent d'ailleurs en réseau avec les établissements de soins, notamment dans le cadre de l'hospitalisation à domicile (HAD). Elle s'est déclarée favorable à la création d'un ordre pour unifier le métier d'infirmier et permettre aux professionnels exerçant en libéral de garder le contact avec l'hôpital.

Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur , a souhaité connaître la position des différents intervenants sur le mode d'élection des membres du conseil de l'ordre et sur leur représentativité.

M. Michel Le Diréach a plaidé pour l'organisation d'élections nationales et il a insisté sur la nécessité d'y associer les infirmiers du travail et les infirmiers scolaires. S'agissant des infirmiers salariés d'une personne privée, leur inscription sur les listes électorales pourrait s'effectuer sur le modèle des élections prud'homales, à la demande des employeurs. Cette méthode comporte néanmoins des risques d'oublis et de contestations. Une solution alternative pourrait consister à inscrire les professionnels, sur leur demande, auprès de la Ddass. Il a insisté sur le fait que l'organisation d'élections aurait un coût, mais qui pourrait être réduit en développant le vote électronique. Il s'est enfin déclaré favorable à une élection organisée sur la base de trois collèges électoraux, regroupant respectivement les infirmiers relevant de la fonction publique, les salariés et les libéraux.

Mme Régine Clément s'est elle aussi déclarée favorable à l'organisation de trois collèges électoraux mais selon elle, les élections devraient être organisées au niveau régional, les élus régionaux élisant par la suite le bureau national. Dans tous les cas de figure, les élections doivent être organisées sur la base du principe « une infirmière, une voix ».

M. Dominique Mureau a estimé qu'un consensus pourrait être trouvé sur cette question du mode d'élection. Il s'est d'ores et déjà déclaré favorable à l'organisation de trois collèges électoraux.

Mme Kine Veyer a souligné que l'organisation de trois collèges électoraux n'exclut pas la possibilité de mettre en place des groupes de travail ad hoc sur des questions particulières.

Mme Dominique Feuille a regretté que la proposition de loi exclue d'office les infirmiers militaires de l'affiliation au nouveau conseil de l'ordre.

M. René Valentin a exprimé les mêmes regrets, soulignant en outre que les hôpitaux militaires accueillent désormais une grande majorité de civils, ce qui plaiderait plutôt pour un alignement des infirmiers militaires sur le droit commun.

M. Nicolas About, président , a observé que la question se pose également au niveau des médecins militaires, qui ne participent pas au conseil national de l'ordre des médecins. S'agissant du service de santé des armées, il serait donc nécessaire de traiter la question de manière globale.

La commission a ensuite procédé à l'audition de M. Didier Evenou, secrétaire général en charge des salariés au conseil national de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes.

M. Nicolas About, président , a souligné l'intérêt de nourrir la réflexion de la commission sur la création d'un ordre des infirmiers par l'examen des conditions de la mise en oeuvre récente de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes.

Après avoir indiqué qu'il exerce ce métier depuis vingt-sept ans et qu'il est salarié de l'Assistance publique des hôpitaux de Paris, M. Didier Evenou a considéré que la problématique de la création d'un ordre des infirmiers semble assez proche de celle des masseurs-kinésithérapeutes.

Rappelant que l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes a été créé par la loi de santé publique du 9 août 2004, Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur , a souhaité savoir quelles difficultés se sont posées et si certaines dispositions législatives ne sont pas apparues inadaptées, insuffisantes ou délicates à mettre en oeuvre en pratique.

M. Didier Evenou a souligné que les élections des délégués départementaux et nationaux, qui se sont tenues respectivement en mars et en juillet 2006, ont constitué la dernière étape préalable à la mise en place de l'institution ordinale. Il s'agit aussi de l'aboutissement d'un long processus qui avait commencé par une première tentative infructueuse en 1997, suivi des dispositions de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades, pour finalement aboutir à la consécration législative apportée par la loi du 2 août 2004.

L'ensemble du cadre juridique actuel applicable à l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes, y compris les textes de nature réglementaire, ne pose pas de difficulté particulière, à l'exception toutefois de l'insuffisante fiabilité des informations disponibles pour l'élaboration des listes électorales. Les fichiers n'étaient manifestement pas tous à jour. Mais les directions départementales de l'action sanitaire et sociale (Ddass) veillent désormais à la constitution des tableaux de l'ordre, afin que tous les masseurs-kinésithérapeutes y soient répertoriés.

M. Didier Evenou a estimé que les réactions de ses confrères ont été dans l'ensemble très positives : la grande majorité des professionnels libéraux a accueilli favorablement la naissance de la nouvelle institution. Il semble qu'il en aille de même pour les masseurs-kinésithérapeutes salariés, bien que certains syndicats et associations soient apparus divisés sur le bien-fondé de cette réforme.

Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur , s'est demandé quelles modifications la création de l'ordre a apportées à l'exercice de la profession.

Après avoir souligné le caractère très récent de la mise en place du conseil national de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes et indiqué que l'élection de son président ne date que du 18 juillet 2006, M. Didier Evenou a précisé que l'institution ordinale n'a pas encore eu le temps de lancer d'initiatives significatives. Pour autant, plusieurs débats importants, sur la notion d'exercice illégal de la médecine, sur l'ostéopathie, ou sur le dossier médical personnel, appellent des prises de position au nom de la profession. Il apparaît donc très probable que l'ordre se penche rapidement sur ces questions.

Il a considéré, par ailleurs, que la distinction traditionnellement opérée entre les masseurs-kinésithérapeutes libéraux d'une part, et les masseurs-kinésithérapeutes salariés d'autre part, apparaît largement secondaire au regard des grands enjeux de la profession, sur lesquels il est indispensable qu'une réflexion soit élaborée, comme par exemple sur la notion de bonnes pratiques professionnelles. L'institution ordinale répond donc à de réels besoins et pas seulement à une revendication d'ordre existentiel.

Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur , s'est interrogée sur le coût que représente la création d'un ordre professionnel comme celui des masseurs-kinésithérapeutes. Ce point constitue une source de préoccupation majeure pour les infirmiers, dans la mesure où des chiffres très divers, allant de 30 à 300 euros de cotisations par an, sont couramment avancés. L'expérience des masseurs-kinésithérapeutes est donc de nature à fournir une référence utile pour l'information de la commission.

M. Didier Evenou a précisé que l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes ne dispose pas encore de ressources propres, ce qui d'ailleurs ne manque pas de poser des difficultés, tant à l'égard des banques qu'en ce qui concerne sa capacité à agir sur le plan juridique. Pour le moment, l'institution ordinale fonctionne donc exclusivement sur la base du bénévolat. Il a indiqué que le principe d'une cotisation unique de 300 euros par an pour tous les masseurs-kinésithérapeutes a néanmoins été déjà adopté, ce qui correspond à environ 0,83 % du traitement moyen d'un professionnel en milieu de carrière. Dans un premier temps, les masseurs-kinésithérapeutes salariés bénéficieront toutefois d'un tarif dérogatoire fixé à 200 euros par an, qui a vocation à être ensuite progressivement harmonisé au même niveau que celui des personnes exerçant dans le secteur libéral.

Après s'être interrogé sur la compatibilité de cet effort contributif, avec le principe de droit communautaire tendant à proscrire toute obligation de payer pour travailler, M. Didier Evenou a appelé les pouvoirs publics à rendre ces cotisations fiscalement déductibles. D'une façon générale, il a considéré que le coût de la mise en place de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes est justifié par les missions qui lui sont confiées, ainsi que par les besoins auxquels il répond.

Après avoir rappelé que la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé a créé un conseil professionnel des professions paramédicales, Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur , a observé que cette structure, qui n'a jamais été mise en place, a été progressivement vidée de son contenu par l'institution des ordres professionnels paramédicaux. Elle s'est demandé s'il semble encore utile de la conserver et quelle pourrait être alors l'instance compétente pour traiter des questions interprofessionnelles.

M. Didier Evenou a jugé que cette structure n'a effectivement plus lieu d'être.

Après avoir observé que les institutions ordinales sont généralement organisées selon une structure à la fois départementale, régionale et nationale, Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur , a souhaité savoir si l'ordre des masseurs kinésithérapeutes comporte aussi un niveau interrégional.

M. Didier Evenou a indiqué qu'il existe outre-mer des exceptions à la règle de droit commun, et que l'Ile de la Réunion se trouve ainsi rattachée à la région Ile-de-France.

Mme Marie-Thérèse Hermange a souhaité connaître le sentiment général des masseurs-kinésithérapeutes à l'égard de la reconnaissance institutionnelle qu'apporte à leur profession la création de l'institution ordinale.

Après avoir noté les réactions défavorables d'une partie des partenaires sociaux, M. Nicolas About, président , s'est interrogé sur les relations que l'ordre des masseurs kinésithérapeutes a établies avec les organisations syndicales.

M. Didier Evenou a précisé que l'institution ordinale n'a pas encore eu l'occasion de développer des contacts approfondis avec elles. En revanche, elle a déjà noué des relations très satisfaisantes avec le conseil de l'ordre des médecins et plusieurs autres acteurs institutionnels du secteur de la santé.

Après avoir souligné le caractère encourageant de ce premier bilan, il a invité les infirmiers à considérer la création de leur ordre professionnel comme une chance à saisir : les professions paramédicales ont tout intérêt à disposer d'un mode d'organisation légitimant leur rôle et leurs prises de position.

M. Nicolas About, président , a demandé à avoir plus de précisions sur la composition de la profession.

M. Didier Evenou a indiqué que 80 % des professionnels exercent leur activité sous statut libéral, les masseurs-kinésithérapeutes salariés ne représentant qu'environ 20 % des masseurs-kinésithérapeutes. On observe également le développement d'une tendance très nette au cours des dernières années à la féminisation de la profession.

M. Francis Giraud s'est interrogé sur le taux de syndicalisation des masseurs-kinésithérapeutes.

M. Didier Evenou a estimé que la proportion des personnes syndiquées serait de l'ordre de 15 % parmi les professionnels libéraux, mais semble être très faible parmi les salariés, sans toutefois pouvoir être évaluée avec précision, faute de données fiables.

Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur , a indiqué que les infirmiers exercent très majoritairement (73,47 %) leur activité dans les établissements hospitaliers. Les professionnels libéraux et ceux des « autres secteurs » ne représentent respectivement que 13,86 % et 12,68 % de l'ensemble de la profession.

M. Nicolas About, président , a jugé riche d'enseignements l'expérience de la création de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes, tout en observant que ce précédent n'apparaît pas totalement transposable aux infirmiers.

Enfin, la commission a procédé à l'audition de Mme Claude Rambaud , présidente de Lutte information études des infections nosocomiales (LIEN).

Mme Claude Rambaud a d'abord indiqué que l'association qu'elle préside entretient peu de relations avec les ordres professionnels existants. Le LIEN a, en revanche, des relations plus suivies avec les institutions de santé et siège dans le conseil d'administration de certaines d'entre elles. Mme Claude Rambaud a précisé qu'elle avait siégé, il y a sept ou huit ans, au sein du conseil de déontologie qui a participé à l'élaboration de la carte Vitale, ce qui lui avait permis de rencontrer des membres des différents ordres professionnels de santé.

Abordant le dispositif de la proposition de loi, elle a craint que la création d'un ordre professionnel ne revête une dimension corporatiste et fait observer que des instances disciplinaires existent déjà, tant pour les infirmiers salariés que pour les libéraux. Il n'est pas certain, en outre, que la création d'un ordre des infirmiers améliore beaucoup la qualité des relations entre professionnels et usagers : à l'expérience, il apparaît que les instances ordinales se consacrent surtout au règlement de problèmes survenant entre professionnels.

Les usagers disposent d'ailleurs de multiples voies de recours. Le Gouvernement a créé, cette année, la mission nationale d'information et de développement de la médiation sur les infections nosocomiales (IDMIN), qui a pour vocation de recueillir les plaintes des patients victimes de maladies nosocomiales. Les patients peuvent également saisir les commissions régionales de conciliation et d'indemnisation (CRCI) ou, bien sûr, porter leur affaire devant les tribunaux. L'association LIEN joue parfois un rôle d'intermédiaire entre les professionnels de santé et les usagers.

Mme Claude Rambaud a toutefois espéré que la création de l'ordre des infirmiers favorise la diffusion des bonnes pratiques. Le conseil de l'ordre devrait notamment effectuer un véritable recensement des professionnels, qui fait aujourd'hui défaut.

Elle s'est enfin interrogée sur les conditions de saisine de la chambre disciplinaire du conseil de l'ordre, demandant notamment si les usagers pourront y avoir directement accès, et a suggéré d'en faire mention dans la loi. Elle a souligné que les infirmiers salariés ne seront pas soumis à sa juridiction et que le juge pénal demeurera, en conséquence, la seule autorité habilitée à prononcer une interdiction d'exercice professionnel pour ces personnels. Or, a-t-elle estimé, les recours en justice demeurent peu fréquents, de sorte qu'un professionnel qui ne donne pas satisfaction peut être sanctionné par son employeur, mais retrouver ensuite un poste dans un autre établissement ou exercer en libéral. Il convient donc de renforcer les garanties des usagers, bien que les syndicats soient hostiles à un contrôle de l'activité des infirmiers salariés par la chambre disciplinaire.

M. Nicolas About, président , a noté que Mme Claude Rambaud avait d'abord semblé plaider contre la création de l'ordre, avant d'en souligner l'intérêt potentiel en matière disciplinaire.

Mme Claude Rambaud a insisté sur le fait que les infirmiers salariés sont exclus de sa juridiction, ce qui en limite considérablement la portée. Par comparaison, on peut observer que l'ensemble des sages-femmes sont soumises au conseil disciplinaire de leur ordre, même si elles sont employées à l'hôpital.

M. Nicolas About, président , a souhaité que la situation évolue et a estimé que les réticences des syndicats pourront être surmontées, une fois qu'ils seront accoutumés au fonctionnement de l'ordre. Il a demandé à Mme Claude Rambaud si elle était globalement favorable ou hostile à la proposition de loi.

Mme Claude Rambaud a estimé que le principal bénéfice que l'on peut escompter de la création de l'ordre des infirmiers est une meilleure diffusion des bonnes pratiques, bien que l'exemple de l'ordre des médecins montre que le système n'est pas sans défauts.

II - EXAMEN DU RAPPORT

Réunie le mardi 3 octobre 2006 , sous la présidence de M. Nicolas About , la commission a procédé à l' examen du rapport sur la proposition de loi n° 390 (2005 2006), adoptée par l'Assemblée nationale, portant création d'un ordre national des infirmiers , dont Mme Sylvie Desmarescaux est le rapporteur .

Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur , a indiqué, à titre liminaire, que l'objet de la proposition de loi est de créer un ordre professionnel pour les 450.000 infirmiers exerçant en France, soit un effectif infiniment supérieur à celui des médecins, pharmaciens, sages-femmes, masseurs-kinésithérapeutes et pédicures-podologues en exercice qui disposent déjà d'une structure ordinale pour leur représentation, la fixation des règles déontologiques et le règlement des contentieux disciplinaires. Cette anomalie est d'autant plus étonnante que le rôle des infirmiers dans le système de santé ne cesse de se renforcer.

Elle a insisté sur le besoin de reconnaissance de la profession d'infirmier et sur la nécessité d'un cadre déontologique mieux adapté aux nouveaux enjeux de qualité et de permanence des soins. De fait, le respect des règles éthiques et des bonnes pratiques professionnelles est loin d'être assuré, les principes déontologiques fixés par les décrets de 1993 n'ayant pas été accompagnés par la création d'une instance de contrôle et de sanction.

La mise en place d'un ordre professionnel constitue une revendication forte des infirmiers libéraux confrontés, plus que leurs confrères exerçant en établissements de santé, aux carences de la profession en matière de discipline interne et de représentativité. Cette revendication s'est traduite, dans le passé, par plusieurs initiatives parlementaires dont aucune n'a abouti à ce jour en raison des réticences d'une partie de la profession : celle-ci comprend une proportion largement majoritaire d'agents publics travaillant dans les hôpitaux et de salariés des établissements de santé privés qui, soutenue par les syndicats, a longtemps considéré comme inutile et coûteuse la création d'une telle instance, dans la mesure où ils disposent déjà d'un cadre disciplinaire défini par leurs statuts. Ces positions de principe ont toutefois évolué, un consensus s'étant progressivement dégagé sur le caractère insuffisant du système institutionnel actuel, les carences présentées par la procédure disciplinaire et la nécessité de mieux reconnaître l'identité et la compétence professionnelle des infirmiers. La proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale le 13 juin 2006 constitue la traduction législative de ce nouveau consensus.

Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur, a indiqué que le texte crée un ordre national des infirmiers, chargé des traditionnelles missions ordinales de contrôle de la déontologie et de défense des intérêts de la profession, mais aussi du suivi de la démographie et de l'évaluation des pratiques professionnelles, en coordination avec la Haute Autorité de santé. Il rassemblera, de manière obligatoire, l'ensemble des infirmiers à l'exclusion des infirmiers militaires. Il assurera ses missions par le biais de trois échelons territoriaux - départemental, régional et national - et sera financé par la cotisation de ses membres, dont le montant sera unique quelle que soit leur catégorie professionnelle :

- le conseil départemental sera plus particulièrement chargé de représenter et de défendre la profession dans le département, d'inscrire les professionnels au tableau de l'ordre, de diffuser et d'évaluer les bonnes pratiques, d'organiser des oeuvres d'entraide, de participer au suivi démographique de la profession et d'exercer une mission de conciliation entre les patients et les infirmiers, ainsi qu'entre professionnels ;

- le conseil régional sera placé sous le contrôle du conseil national et exercera sur son territoire les missions générales dévolues à l'ordre. A celles-ci s'ajouteront plusieurs tâches spécifiques, notamment la coordination des différents conseils départementaux situés dans la région, l'étude des projets et des demandes d'avis soumis par l'agence régionale de l'hospitalisation (ARH) et la suspension temporaire du droit d'exercer en cas d'infirmité. Ses décisions pourront faire l'objet d'un recours devant le conseil national de l'ordre. Il comprendra en son sein une chambre disciplinaire de première instance compétente pour les infirmiers libéraux et les fonctionnaires qui y seront déférés par le ministre de la santé, le préfet, le procureur de la République ou le directeur de l'ARH. Pour les salariés du privé, l'employeur sera seulement tenu de prévenir le président du conseil national de toute sanction disciplinaire prononcée en raison d'une faute professionnelle ;

- le conseil national, composé sur un mode identique, sera plus particulièrement chargé d'élaborer le code de déontologie, de veiller à son respect et d'étudier les projets et questions qui lui sont soumis par le ministre de la santé. Il exercera en outre les droits réservés à la partie civile pour les faits portant préjudice à la profession, fixera le montant de la cotisation et en répartira le produit entre les conseils en fonction de leurs besoins. Il sera enfin chargé de gérer les biens de l'ordre et de contrôler la gestion des conseils départementaux et régionaux. Il disposera également d'une chambre disciplinaire nationale d'appel pour les infirmiers exerçant à titre libéral et les agents publics déférés devant les instances ordinales.

En première lecture, l'Assemblée nationale a supprimé la mention explicite de conseils interrégionaux, tout en maintenant la référence à de telles instances pour les infirmiers, ce qui constituera une possibilité utile pour les départements d'outre-mer ; elle a précisé que le président de chaque conseil doit obligatoirement être infirmier ; elle a souhaité qu'aucune catégorie professionnelle ne puisse détenir la majorité des sièges, pour éviter une surreprésentation des fonctionnaires dans les instances ordinales.

Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur, s'est déclarée favorable à ces modifications. Revenant sur la disposition de la proposition de loi qui exclut les infirmiers du conseil des professions paramédicales, elle a par ailleurs rappelé que ce conseil n'a jamais vu le jour, même s'il a été créé par la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades, faute de décrets. Dans la mesure où la quasi-totalité des professions qui devaient y être représentées disposent désormais d'une instance ordinale, elle a proposé la suppression de ce conseil qui n'a plus d'objet.

En conclusion et à la lumière des auditions organisées par la commission, elle s'est déclarée convaincue de l'utilité de créer une instance ordinale, même si des améliorations peuvent être apportées au dispositif, notamment en matière disciplinaire. Ainsi, l'exclusion des salariés du secteur privé du champ de compétence disciplinaire de l'ordre contredit l'objectif de disposer d'une instance compétente pour l'ensemble de la profession. C'est pourquoi, elle a proposé qu'ils y soient au contraire intégrés. Elle a, en outre, souhaité que l'ordre soit informé des sanctions les plus lourdes prises à l'encontre des agents publics.

M. Louis Souvet a indiqué avoir reçu de nombreux courriers d'infirmiers, s'inquiétant ou, au contraire, se félicitant de la création d'un ordre. Il a estimé que cette mesure ne doit pas se justifier en fonction du seul nombre élevé d'infirmiers en exercice. Il s'est interrogé sur la possibilité de rassembler, dans une structure unique, les infirmiers libéraux et les hospitaliers qui n'ont pas les mêmes responsabilités et évoluent dans un environnement médical sensiblement différent. Il a demandé pourquoi la proposition de loi érige le préfet de région, et non le directeur de l'ARH, en arbitre des différends du conseil régional.

M. Jean-Pierre Godefroy s'est déclaré défavorable à la création d'un ordre national des infirmiers, lui préférant la solution retenue par la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, qui a créé un conseil des professions paramédicales. Il a rappelé que le Sénat avait, à l'époque, suggéré la création d'un ordre interprofessionnel et a regretté que le conseil n'ait jamais été mis en place depuis lors. Il s'est interrogé sur la nécessité de créer une instance disciplinaire pour une profession dont 85 % de l'effectif sont constitués de fonctionnaires et de salariés déjà soumis à une organisation hiérarchique. Il a estimé anormal d'obliger les professionnels à payer une cotisation pour pouvoir travailler. Il a également considéré que l'échelon départemental de l'ordre est inutile dans la mesure où les dernières lois de décentralisation ont désigné la région comme le niveau territorial compétent en matière de santé. Il a enfin regretté que la proposition de loi favorise la représentation des infirmiers libéraux au sein des instances ordinales.

Mme Bernadette Dupont s'est également interrogée sur la pertinence d'un échelon départemental de l'ordre. Faisant part de son expérience d'administrateur d'un hôpital public, elle a reconnu que la représentation des infirmiers est actuellement trop fragmentée pour être efficace.

M. Alain Gournac a considéré que la proposition de loi répond à une attente forte et légitime des infirmiers d'une meilleure reconnaissance de leur profession. Il a estimé essentiel que les trois groupes professionnels soient représentés équitablement à chaque échelon de l'ordre afin de défendre l'ensemble de la profession au-delà des clivages catégoriels. Il a enfin rappelé l'importance du contrôle des règles déontologiques pour ce type de métier.

M. Guy Fischer a constaté que la proposition de loi traduit la volonté de création d'un ordre portée par la minorité d'infirmiers libéraux depuis plusieurs décennies. Il a reconnu que la profession d'infirmier évolue rapidement et doit faire face à de nouveaux défis : l'explosion de la précarité, l'allongement de la durée de vie et la dépendance croissante qui en résulte, la mise à mal du système de protection sociale et la diminution des effectifs médicaux et paramédicaux. Il a considéré que ces difficultés expliquent que la durée moyenne de la carrière des infirmiers ne soit actuellement que de quinze ans.

Il a estimé que, plus qu'un ordre, le conseil des professions paramédicales et le renforcement du rôle des directions départementales de l'action sanitaire et sociale (Ddass) et des directions régionales de l'action sanitaire et sociale (Drass) auraient pu constituer une réponse au malaise des infirmiers. Il s'est inquiété enfin de l'accélération des transferts de tâches entre médecins et infirmiers, mais également entre infirmiers et aides soignants, en particulier dans les établissements pour personnes âgées dépendantes (Epad).

Mme Raymonde Le Texier a émis des réserves sur le dispositif proposé en matière disciplinaire, notamment sur l'interdiction, pour un professionnel, d'exercer en France si une décision identique a été prise à son encontre à l'étranger pour des motifs qui ne seraient pas répréhensibles dans notre pays et sur la suspension du droit de travailler en cas d'infirmité.

Mme Marie-Thérèse Hermange a demandé à connaître le taux de syndicalisation des infirmiers.

M. Paul Blanc a estimé que les infirmiers ont droit, tout autant que les autres professions médicales et paramédicales, à une structure ordinale, au côté des associations et des syndicats existants. Il a considéré, qu'en matière disciplinaire, il est mieux d'être jugé par ses pairs que par les instances judiciaires classiques.

Mme Isabelle Debré a fait valoir que la création d'un ordre rassurera de nombreux patients, qui pourront saisir l'ordre plus facilement qu'un tribunal de grande instance en cas de difficulté.

En réponse aux intervenants, Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur, a indiqué qu'un consensus s'est progressivement dégagé chez l'ensemble des infirmiers pour qu'un ordre professionnel voie le jour. Cette instance permettra aux infirmiers français d'être mieux représentés au niveau international : elle a rappelé, à cet égard, que la France n'occupe que la 37 e place sur 112 pays à la conférence internationale des infirmiers alors qu'elle compte le plus grand nombre de professionnels.

Elle a indiqué que le préfet de région n'intervient qu'en cas d'impossibilité de fonctionnement du conseil régional et après avis du conseil national de l'ordre.

Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur, a fait valoir que le conseil des professions paramédicales n'a jamais été mis en place et que même les orthophonistes et les orthoptistes, qui n'ont pas d'ordre professionnel, ne souhaitent pas appartenir à ce conseil. Elle a considéré, concernant le paiement de la cotisation, que cette obligation, qui pèse également sur les sages-femmes, profession majoritairement salariée, constitue le seul moyen de financer l'ordre.

Elle a indiqué que les trois échelons territoriaux ont chacun leur justification : le conseil départemental gère l'inscription au tableau et les relations interprofessionnelles et avec les patients au plus près du terrain, le conseil régional constitue l'interlocuteur de l'ARH et des instances chargées de la formation professionnelle et le conseil national se positionne comme le lien entre les professionnels et le ministère de la santé.

Elle a rappelé que le taux de syndiqués atteint 4 % chez les infirmiers tandis que 8 % d'entre eux appartiennent à une association professionnelle. Elle a enfin précisé que le préfet peut vérifier le dossier d'un professionnel interdit d'exercice à l'étranger et que la suspension du droit d'exercer s'applique en cas de danger pour les patients.

La commission a ensuite procédé à l'examen des amendements présentés par le rapporteur.

A l'article premier (création et définition des modalités de fonctionnement de l'ordre national des infirmiers), outre onze amendements rédactionnels, la commission a adopté un amendement visant à supprimer les références au conseil national des professions paramédicales et un amendement ayant pour objet de rendre applicables à l'ordre des infirmiers les dispositions du code de la santé publique relatives aux membres suppléants des conseils départementaux. Elle a également adopté un amendement rattachant les salariés du privé à la compétence disciplinaire de l'ordre et un amendement visant à ce que l'ordre soit informé des sanctions lourdes prises à l'encontre des fonctionnaires.

A l'article 2 (conditions d'exercice de la profession d'infirmier), elle a adopté un amendement visant à supprimer les références relatives au conseil national des professions paramédicales.

Elle a adopté l'article 3 (dispositions de coordination concernant les conditions d'inscription au tableau de l'ordre des infirmiers) sans modification.

A l'article 4 (exclusion des infirmiers du champ de compétences du conseil réunissant certains professionnels paramédicaux libéraux), elle a adopté un amendement ayant pour objet de supprimer le conseil national des professions paramédicales.

La commission a adopté l'article 5 (dispositions de coordination concernant la suspension du droit d'exercer et les conventions passées entre les entreprises et les infirmiers) sans modification.

A l'article 6 (dispositions de coordination concernant le contentieux du contrôle technique de la sécurité sociale), elle a adopté un amendement visant d'une part, à prendre en compte, dans les dispositions du code de la sécurité sociale relatives au contentieux technique des professions paramédicales, la création d'un ordre national des infirmiers et la suppression du conseil national des professions paramédicales, d'autre part, à permettre à un magistrat de l'ordre administratif qui ne serait plus en activité de présider la section des assurances sociales de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes et des infirmiers.

La commission a ensuite adopté la proposition de loi ainsi amendée .

ANNEXE - LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LA COMMISSION ET LE RAPPORTEUR

Table ronde réunissant des représentants d'associations et de syndicats infirmiers :

- Mme Elisabeth Biais-Canhoyea , présidente de la Fédération nationale des infirmières (FNI)

- Mme Régine Clément , présidente de l'Association pour l'ordre des infirmières et infirmiers de France (APOIIF)

- M. Michel Le Diréach , secrétaire fédéral de la CFDT-Santé

- Mme Dominique Feuille , chargée des cadres soignants au Syndicat national des cadres hospitaliers (SNCH)

- Mme Régina Godart , présidente de l'Organisation nationale des syndicats d'infirmiers libéraux (ONSIL)

- M. Jérôme Malfaisan , président de la Fédération nationale des étudiants en soins infirmiers (FNESI)

- M. Dominique Mureau , vice-président de la Coordination nationale infirmière (CNI)

- Mme Annick Picard , membre du bureau de l'Union fédérale des médecins, ingénieurs, cadres et techniciens - Confédération générale du travail (UFMICT-CGT)

- Mme Edith Plantefève , vice-présidente de l'Association nationale des puéricultrices diplômées et des étudiants (ANDPE)

- M. Jean-Jacques Scharff , président de l'Union nationale des associations en soins infirmiers et des infirmiers français (UNASIIF), porte-parole du Groupe Sainte Anne

- Mme Annick Touba , présidente du Syndicat national des infirmières et infirmiers libéraux (SNIIL)

- Mme Kine Veyer , déléguée de région de l'Association française des directeurs de soins (AFDS)

- M. René Valentin , secrétaire syndical permanent au syndicat Force ouvrière de l'assistance publique des hôpitaux de Paris (FO-APHP)

M. Didier Evenou , secrétaire général en charge des salariés au Conseil national de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes

Mme Claude Rambaud , présidente de Lutte Informations Etudes des infections Nosocomiales (LIEN)

M. Patrick Pérignon , vice-président de la Fédération nationale des orthophonistes

* 1 Rapport de la mission de concertation et de médiation concernant le projet de création d'un ordre infirmier. Mars 2006.

* 2 Rapport précité de la mission de concertation et de médiation concernant le projet de création d'un ordre infirmier.

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