II. LA CONVENTION FRANCO-ITALIENNE DU 24 NOVEMBRE 2006

La convention relative au tunnel routier sous le Mont-Blanc signée à Lucques le 24 novembre 2006 entre le ministre français des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer Dominique Perben et son homologue italien constitue en quelque sorte l'aboutissement des mesures de réorganisation mises en oeuvre pour tirer les conséquences de la catastrophe de 1999.

Cette convention constitue désormais la base juridique pour l'exploitation du tunnel. Elle se substitue à la convention franco-italienne d'origine du 14 mars 1953, mais également à deux accords ultérieurs : l'avenant du 25 mars 1965 qui pérennisait l'exploitation du tunnel par deux sociétés distinctes, et l'échange de lettres du 1 er mars 1966 instaurant une commission franco-italienne de contrôle du tunnel.

Par rapport à la convention de 1953 la nouvelle convention se caractérise par trois modifications majeures. Elle consacre le principe de l'exploitation par une structure unique. Elle définit de manière précise le rôle de la commission intergouvernementale et celui du comité de sécurité placé auprès d'elle. Elle précise également les conditions d'exercice de la police de la circulation dans le tunnel.

A. L'UNICITÉ D'EXPLOITATION

Comme on l'a déjà indiqué, l' article 7 de la convention de 1953 stipulait que les sociétés concessionnaires française et italienne confieraient l'exploitation du tunnel « à une société anonyme dont elles souscriront chacune la moitié du capital et dont le conseil d'administration comprendra un nombre égal de représentants de chacune d'elles ».

Cette disposition n'a jamais été mise en oeuvre, du fait des difficultés qu'elle soulevait en matière de droit international privé. Selon les indications fournies à votre rapporteur par le Gouvernement, il n'aurait pas été possible de mettre d'accord les deux sociétés sur la forme juridique de la future société unique et sur sa gouvernance, une société ne pouvant pas dépendre de deux actionnaires détenant chacun 50 % de son capital.

Aussi un avenant signé le 25 mars 1965 avait-il pris acte de ce que cette société unique n'avait pas encore été constituée, et avait prévu que l'exploitation du tunnel, mis en service en juillet 1965, serait assurée « provisoirement » en commun par les deux sociétés. L'avenant prévoyait simplement la conclusion entre les deux sociétés d'un « accord de collaboration » devant notamment prévoir la constitution d'un comité commun d'administration.

Cet accord de collaboration a été conclu le 27 avril 1966. Le comité commun d'administration était chargé de la coordination entre les deux sociétés. Toutefois, comme l'a précisé le rapport d'expertise franco-italien de juillet 1999, « ce compromis institutionnel, proche dans les faits d'un bicéphalisme, a été à l'origine, depuis 1965, de difficultés dans la coordination des travaux de modernisation dans le tunnel », les investissements ayant souvent été réalisés par chaque société à des dates différentes et avec un contenu technique différent. Aussi le rapport d'expertise avait-il préconisé de réaliser l'unicité d'exploitation prévue dès l'origine, quitte utiliser une autre formule que celle de la société pour contourner les obstacles juridiques qu'elle impliquait.

C'est donc sous la forme d'un groupement européen d'intérêt économique (GEIE), constitué le 18 mai 2000, qu'a été réalisée cette unicité d'exploitation. Le GEIE Tunnel du Mont-Blanc est une structure juridique du droit communautaire associant les deux concessionnaires. Il est inscrit au registre du commerce d'Aoste, son siège principal est à Courmayeur sur la plate-forme italienne du Tunnel, et il dispose d'un établissement sur le territoire français. Depuis le 9 mars 2002, il est responsable de toutes les activités liées à la gestion opérationnelle du tunnel et des deux aires de régulation du trafic poids lourds d'Aoste versant italien, et de Passy-Le Fayet versant français. Il perçoit les péages, il intervient sur les projets qui concernent la sécurité et il assure la maîtrise d'ouvrage de tous les travaux d'entretien, des grosses réparations et des améliorations, des infrastructures et des installations techniques spécifiques du tunnel. Il est dirigé par un conseil de surveillance constitué de 10 membres nommés paritairement par les deux sociétés concessionnaires

L'article 3 de la convention du 24 novembre 2006 consacre ce principe de l'unicité fonctionnelle . Il stipule que « l'exploitation, l'entretien, le renouvellement et la modernisation de l'ouvrage sont confiés en commun aux sociétés concessionnaires » et qu'en vue « d'atteindre l'unicité fonctionnelle de l'ensemble de ces activités, elles sont exercées par l'exploitant » pour le compte de ces sociétés. L'exploitant est défini comme « la structure dotée de la capacité juridique, telle que le groupement européen d'intérêt économique du tunnel du Mont-Blanc, mise en place par les sociétés concessionnaires pendant la durée de leurs concessions aux fins exclusives d'exploiter, d'entretenir, de renouveler et de moderniser le tunnel et ses annexes ».

L'article 5 précise que les sociétés concessionnaires sont les deux seuls membres statutaires et sociaux de l'exploitant et assurent solidairement et paritairement les droits, obligations, risques et périls découlant de ses missions.

L'article 10 consacre la prorogation de 15 ans des concessions qui prendront fin le 31 décembre 2050. L'article 13 prévoit que lorsque les deux concessions prendront fin, le tunnel, propriété des Etats français et italien, sera exploité en commun à égalité de droits et de charges. Les modalités de la gestion commune feront l'objet d'un accord préalable entre les deux gouvernements.

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