Rapport n° 186 (2008-2009) de Mme Joëlle GARRIAUD-MAYLAM , fait au nom de la commission des affaires étrangères, déposé le 28 janvier 2009

Disponible au format Acrobat (162 Koctets)

N° 186

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2008-2009

Annexe au procès-verbal de la séance du 28 janvier 2009

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi autorisant l'approbation de l' accord entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse relatif à la coopération transfrontalière en matière judiciaire , policière et douanière ,

Par Mme Joëlle GARRIAUD-MAYLAM,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Josselin de Rohan , président ; MM. Jacques Blanc, Didier Boulaud, Jean-Louis Carrère, Jean-Pierre Chevènement, Robert del Picchia, Jean François-Poncet, Robert Hue, Joseph Kergueris , vice-présidents ; Mmes Monique Cerisier-ben Guiga, Joëlle Garriaud-Maylam, MM. André Trillard, André Vantomme, Mme Dominique Voynet , secrétaires ; MM. Jean-Paul Alduy, Jean-Etienne Antoinette, Robert Badinter, Jean-Michel Baylet, René Beaumont, Jacques Berthou, Jean Besson, Michel Billout, Didier Borotra, Michel Boutant, Christian Cambon, Marcel-Pierre Cléach, Raymond Couderc, Mme Michelle Demessine, M. André Dulait, Mme Josette Durrieu, MM. Jean Faure, Jean-Paul Fournier, Mme Gisèle Gautier, M. Jacques Gautier, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Noël Guérini, Michel Guerry, Hubert Haenel, Robert Laufoaulu, Simon Loueckhote, Philippe Madrelle, Pierre Mauroy, Rachel Mazuir, Jean-Luc Mélenchon, Louis Mermaz, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Jean Milhau, Charles Pasqua, Xavier Pintat, Bernard Piras, Christian Poncelet, Yves Pozzo di Borgo, Jean-Pierre Raffarin, Daniel Reiner, Roger Romani, Mme Catherine Tasca.

Voir le(s) numéro(s) :

Sénat :

142 (2008-2009)

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Dès 1998, la France et la Suisse ont conclu un accord relatif à la coopération transfrontalière en matière judiciaire, policière et douanière. Sur le plan pratique, ce texte a conduit à la création d' un Centre de coopération policière et douanière (CCPD) , puis de patrouilles mixtes en zone frontalière, en avril 2004.

Le présent accord, signé à Paris le 9 octobre 2007, s'inscrit donc dans le contexte d'une coopération déjà active entre les deux pays. Il découle de la nécessité d'adapter les bases juridiques de cette coopération à la situation nouvelle induite par l'association de la Suisse à l'acquis de Schengen . Un accord, signé le 26 octobre 2004 entre l'Union européenne et la Suisse, a, en effet, concrétisé cette association.

I. L'ADAPTATION D'UNE COOPÉRATION BILATÉRALE DÉJÀ EXISTANTE À L'INTÉGRATION DE LA SUISSE À L'ESPACE SCHENGEN

L'espace Schengen regroupe aujourd'hui 22 des 27 Etats membres de l'Union européenne, et trois Etats associés : l'Islande, la Norvège et la Suisse 1 ( * ) . L'« acquis de Schengen », a été intégré, en 1999, dans le cadre de l'Union européenne par un protocole annexé au traité d'Amsterdam. Cet acquis est basé sur deux axes de coopération : l'harmonisation des contrôles aux frontières extérieures et le renforcement de la coopération policière et judiciaire.

Le présent texte élargit le domaine géographique et fonctionnel de cette coopération : auparavant limitée à la zone frontalière, celle-ci pourra s'étendre à l'ensemble du territoire de chacun des deux Etats signataires, pour l'exercice du droit de poursuite, ou pour l'assistance en cas d'évènements importants, comme les manifestations sportives. Les administrations compétentes de chacun des deux pays pourront également échanger des agents de liaison, qui constituent les meilleurs relais de communication entre des ministères aux traditions différentes.

Le Centre de coopération policière et douanière (CCPD) voit ses compétences fortement élargies, puisqu'il associera l'ensemble des services chargés des missions de police et de douane de chacun des deux pays, alors qu'il était jusqu'à présent dévolu à de simples échanges d'informations.

La France a déjà conclu plusieurs accords de coopération policière et douanière avec ses partenaires frontaliers, visant à la mise en place de tels CCPD, pour remédier à l'absence de contrôles fixes aux frontières internes dans l'espace Schengen.

Une coopération de cet ordre a été instaurée, dès 1997, avec l'Allemagne et l'Italie et, en 2001, avec la Belgique. De même, un CCPD quadripartite est évoqué entre la France, la Belgique, l'Allemagne et le Luxembourg, pour mieux juguler, autant que faire se peut, les trafics qui touchent les zones frontalières, et qui impliquent des réseaux criminels bien organisés et très déterminés. Ces réseaux, initialement spécialisés dans les trafics de produits stupéfiants, ont étendu leurs activités délictueuses aux trafics d'êtres humains, qui sont encore plus rémunérateurs, alors qu'ils restent moins lourdement sanctionnés.

La situation particulière de la Suisse, située au coeur de l'Europe géographique, rend ce pays vulnérable à ces activités criminelles, en dépit de l'efficacité de ses services policiers et douaniers.

C'est pourquoi la Confédération helvétique développe les coopérations avec ses voisins. L'exposé des motifs du présent accord précise ainsi que « les deux pays (ont conclu) le présent accord dans le but de lutter efficacement contre les dangers transfrontaliers ainsi que contre la criminalité internationale au moyen d'un système de sécurité fondé sur la coopération ».

II. LES BÉNÉFICES ATTENDUS DE L'APPROFONDISSEMENT DE LA COOPÉRATION BILATÉRALE

L'accord définit les services chargés de la mise en oeuvre d'une telle coopération ; pour la France, il s'agit de la police, de la gendarmerie, des douanes, ainsi que des autorités judiciaires, la compétence de ces dernières étant limitée aux seules infractions aux prescriptions sur la sécurité routière, évoquées au titre VIII de l'accord. Pour la Suisse, les services impliqués sont les autorités fédérales de police, d'immigration, de douane, ainsi que le corps des gardes frontières, les polices cantonales, les autorités judiciaires de la confédération et des cantons, ainsi que l'office fédéral des routes, limité également à la mise en oeuvre du titre VIII.

Les dispositions du présent accord permettront, lorsqu'elles seront appliquées, de mieux garantir la qualité d'espace de liberté et de sécurité que la zone Schengen s'efforce d'être.

Dans cette perspective, l'accord détermine ses principaux objectifs, qui tiennent à la satisfaction des intérêts communs en matière de sécurité, à l'effort en vue d'une analyse commune de celle-ci, à la prévention des menaces et à la lutte contre la criminalité (articles 3 à 7).

Pour parvenir à ces résultats, les deux Etats s'engagent à se prêter mutuellement assistance aux fins de prévenir les menaces et de lutter contre les faits punissables, dans le respect des dispositions adéquates de chacun des droits nationaux. Les services compétent formulent les demandes d'assistance, en assurent, en cas d'urgence, l'effectivité, sous réserve de l'information des autorités judiciaires compétentes de chacun des Etats. Une communication spontanée d'informations susceptibles d'aider l'autre Etat à prévenir des menaces concrètes contre la sécurité et l'ordre public peut être effectuée (articles 8 à 11).

Les modalités de l'observation transfrontalière et d'une éventuelle poursuite d'un Etat à l'autre sont juridiquement encadrées (article 12 et 13), et la réalisation de missions communes, le détachement d'agents de liaison, comme l'assistance octroyée lors d'évènements de grande envergure, de catastrophes ou d'accidents graves est soumise à des dispositions précises (articles 14 à 19). Les éléments concrets du fonctionnement des CCPD, de la coopération interfrontalière, de la réalisation de patrouilles mixtes, et des objectifs des réunions périodiques entre responsables des unités impliquées sont également précisés (articles 20 à 29).

Le titre VI est consacré à la protection des données à caractère personnel (articles 30 à 363), l'article 37 est spécifiquement consacré à l'association de la Suisse à l'acquis de Schengen.

Le titre VII détermine le droit applicable lors d'opérations officielles de l'un des Etats sur le territoire de l'autre (articles 38 à 43).

Le titre VIII est spécifiquement consacré aux infractions aux prescriptions sur la circulation routière (articles 44 à 50). Enfin, le titre IX détermine les modalités d'application et les dispositions finales de l'accord (articles 51 à 58).

CONCLUSION

La ratification rapide de ce texte par le Parlement français constituera un signe positif important pour notre partenaire helvétique, dont la vie politique intérieure est marquée par une initiative de l'Union démocratique du Centre (UDC), formation politique animée par le dirigeant populiste Christophe Blocher, qui a d'ailleurs signé le présent accord en tant que ministre de l'intérieur. L'UDC appelle, en effet, à récuser, par votation populaire, organisée le 8 février 2009, l'accord de libre circulation des personnes conclu en 2004 entre la Suisse et l'Union européenne, au motif que la Bulgarie et la Roumanie n'appartenaient pas à l'Union européenne en 2004, et que ces deux pays feraient peser des risques migratoires inacceptables sur la population helvétique.

EXAMEN EN COMMISSION

Lors de sa réunion du mercredi 28 janvier 2009, la commission a examiné le présent rapport. A l'issue de l'exposé du rapporteur, un débat s'est engagé au sein de la commission.

M. Bernard Piras s'est interrogé sur l'impact de l'accord en matière de réduction de la fraude fiscale qui trouve refuge en Suisse.

M. Jacques Berthou a évoqué la porosité de la frontière entre les deux pays, permettant à des trafiquants de se déplacer facilement entre Lyon et Genève.

M. Rachel Mazuir a fait état de l'action très efficace des patrouilles de sécurité routière composées de personnels suisses et français dans la région de Haute-Savoie, et a rappelé que l'application du présent accord était très attendue par la France, qui en espérait une répression accrue des trafics en provenance des pays d'Europe centrale.

En réponse, Mme Joëlle Garriaud-Maylam, rapporteur, a précisé que l'accord instaurait des possibilités accrues de surveillance de tous les trafics, quelle que soit leur nature. Le droit de poursuite de délinquants passant d'un État à l'autre est ainsi instauré, dans le respect du cadre juridique déterminé par l'accord.

En conclusion, suivant l'avis du rapporteur, la commission a adopté le projet de loi, et proposé qu'il fasse l'objet d'une procédure d'approbation simplifiée en séance publique.

PROJET DE LOI

Texte proposé par le Gouvernement

Est autorisée l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse relatif à la coopération transfrontalière en matière judiciaire, policière et douanière, signé à Paris le 9 octobre 2007, et dont le texte est annexé à la présente loi 2 ( * ) .

ANNEXE I - ÉTUDE D'IMPACT3 ( * )

FICHE D'ÉVALUATION JURIDIQUE

1. Remarques

Les dispositions relatives à la responsabilité pénale et civile des agents sont celles de la Convention de Schengen et du Traité de Prüm.

Des arrangements techniques administratifs peuvent en tant que de besoin venir compléter le dispositif de coopération défini par le présent accord.

2. Modification de la législation

Cet accord n'entraîne pas de modification du droit interne français.

ANNEXE II - SCHENGEN

* 1 Cf. annexe II

* 2 Voir le texte annexé au document Sénat n°142 (2008-2009)

* 3 Texte transmis par le Gouvernement pour l'information des parlementaires

Page mise à jour le

Partager cette page