N° 295

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2009-2010

Enregistré à la Présidence du Sénat le 17 février 2010

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi autorisant l'approbation de l' accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République bolivarienne du Venezuela sur l' emploi des personnes à charge des membres des missions officielles ,

Par M. Jean-Louis CARRÈRE,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Josselin de Rohan , président ; MM. Jacques Blanc, Didier Boulaud, Jean-Louis Carrère, Jean-Pierre Chevènement, Robert del Picchia, Jean François-Poncet, Robert Hue, Joseph Kergueris , vice-présidents ; Mmes Monique Cerisier-ben Guiga, Joëlle Garriaud-Maylam, MM. André Trillard, André Vantomme, Mme Dominique Voynet , secrétaires ; MM. Jean-Etienne Antoinette, Robert Badinter, Jean-Michel Baylet, René Beaumont, Jean-Pierre Bel, Jacques Berthou, Jean Besson, Michel Billout, Didier Borotra, Michel Boutant, Christian Cambon, Marcel-Pierre Cléach, Raymond Couderc, Mme Michelle Demessine, M. André Dulait, Mmes Bernadette Dupont, Josette Durrieu, MM. Jean Faure, Jean-Paul Fournier, Mme Gisèle Gautier, M. Jacques Gautier, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Noël Guérini, Michel Guerry, Hubert Haenel, Robert Laufoaulu, Simon Loueckhote, Philippe Madrelle, Pierre Mauroy, Rachel Mazuir, Louis Mermaz, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Jean Milhau, Charles Pasqua, Xavier Pintat, Bernard Piras, Christian Poncelet, Yves Pozzo di Borgo, Jean-Pierre Raffarin, Daniel Reiner, Roger Romani, Mme Catherine Tasca.

Voir le(s) numéro(s) :

Sénat :

429 (2008-2009) et 296 (2009-2010)

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Les deux conventions de Vienne, conclues en 1961 et 1963, instaurent un régime protecteur spécifique aux personnels diplomatiques et consulaires, qui s'étend, sur certains points, aux personnes qui sont à leur charge, comme leurs conjoints et leurs enfants. Ces dernières ne peuvent, de ce fait, occuper un emploi salarié dans le pays d'affectation du diplomate, à moins qu'un accord bilatéral n'aménage leur statut pour le leur permettre.

Tel est l'objet du présent texte, qui fournit l'occasion à votre rapporteur de décrire les privilèges et immunités des agents diplomatiques et consulaires, puis de faire une brève synthèse de la situation du Venezuela, et des relations bilatérales entre ce pays et la France.

I. L'ACCEPTATION D'UN TRAVAIL SALARIÉ PAR LES MEMBRES DE LA FAMILLE D'UN DIPLOMATE EN POSTE À L'ÉTRANGER REQUIERT UNE ADAPTATION DE LEUR STATUT

Le statut des membres des missions diplomatiques est régi par la convention de Vienne sur les relations diplomatiques du 18 avril 1961, et celui des membres des postes consulaires par la convention de Vienne du 24 avril 1963.

A. LE RÉGIME DES PRIVILÈGES ET IMMUNITÉS DES AGENTS DIPLOMATIQUES

La convention internationale de 1961 définit les privilèges et immunités diplomatiques accordés, dont le but est « non pas d'avantager des individus mais d'assurer l'accomplissement efficace des fonctions des missions diplomatiques en tant que représentant des Etats ».

Cette convention interdit aux agents diplomatiques d'exercer, dans l'Etat d'accréditation, une activité professionnelle ou commerciale en vue d'un gain personnel . En revanche, rien n'est prévu pour les membres de sa famille . Il n'y a donc pas d'interdiction à occuper un emploi salarié pour les membres à charge d'un agent diplomatique, mais une difficulté liée aux immunités dont ils bénéficient , et qui peuvent être contraires aux intérêts de leur employeur ou de tiers.

Ces immunités et privilèges sont définis par les articles 29 à 41 de la convention de 1961.

1. Immunités de l'agent diplomatique

L'article 31 octroie aux agents diplomatiques, c'est-à-dire aux chefs de la mission et aux membres du personnel diplomatique :

- l'immunité de la juridiction pénale, qui permet de soustraire l'agent à la compétence des tribunaux de l'Etat accréditaire ;

- l'immunité de la juridiction civile et administrative, à l'exception de trois cas, et notamment lorsque l'action porte sur une activité professionnelle ou commerciale, quelle qu'elle soit, exercée par l'agent diplomatique dans l'Etat accréditaire en dehors de ses fonctions officielles.

L'immunité de juridiction est territoriale, c'est-à-dire qu'elle n'exempte pas l'agent diplomatique de la juridiction de son Etat d'origine . Ces immunités sont réservées aux agents qui n'ont pas la nationalité de l'Etat d'accueil.

L'immunité porte également sur les mesures d'exécution ; ainsi, aucune mesure de contrainte ne peut donc être prise à son encontre, sauf lorsqu'il s'agit d'exécuter des décisions civiles ou administratives relatives à l'un des trois cas précédemment évoqués, et à condition de respecter l'inviolabilité de sa personne, c'est-à-dire l'interdiction de toute forme d'arrestation ou de détention, ainsi que l'inviolabilité de sa demeure privée .

L'Etat accréditant peut renoncer à l'immunité de juridiction des agents diplomatiques et des membres de leur famille ; la renonciation doit toujours être expresse, de manière à être certaine et non équivoque. De plus, la renonciation à l'immunité de juridiction civile ou administrative n'entraîne pas renonciation à l'immunité quant aux mesures d'exécution du jugement, pour lesquelles une renonciation distincte est requise.

2. Privilèges de l'agent diplomatique

Les privilèges dont bénéficient les agents diplomatiques dans l'Etat accréditaire sont de trois ordres :

a) exemption des dispositions de sécurité sociale ;

b) exemption de tous impôts et taxes , personnels ou réels, nationaux, régionaux ou communaux, sauf dans des cas limitativement énumérés comme les impôts indirects, les taxes sur les biens immeubles privés qui ne sont pas détenus aux fins de la mission, les impôts et taxes sur les revenus privés et les impôts sur le capital prélevés sur les investissements effectués dans des sociétés commerciales ;

c) exemption des droits de douane, taxes et autres redevances sur les objets destinés à l'usage officiel de la mission et les objets destinés à l'usage personnel de l'agent diplomatique et des membres de sa famille .

3. Immunité de juridiction

L'immunité de juridiction des fonctionnaires et employés consulaires est restreinte . En effet, ils ne sont pas justiciables des autorités judiciaires et administratives de l'Etat de résidence pour les seuls actes accomplis dans l'exercice de leurs fonctions , à condition qu'il ne s'agisse pas d'un dommage résultant d'un accident causé par un moyen de transport. Une procédure pénale peut être engagée contre un fonctionnaire consulaire, à condition qu'« elle soit conduite avec les égards qui lui sont dus, et de manière à gêner le moins possible l'exercice de ses fonctions ». Enfin, les membres d'un poste consulaire peuvent être appelés à répondre comme témoins, mais ils ne sont pas tenus de déposer sur des faits ayant trait à l'exercice de leurs fonctions, et peuvent refuser de témoigner en tant qu'experts sur le droit national de leur État d'envoi. Les membres de la famille des fonctionnaires et employés consulaires ne sont pas visés par ces immunités, sauf dans la mesure où l'État de résidence les leur reconnaît .

4. Renonciation aux privilèges et immunités

L'Etat d'envoi peut renoncer aux immunités et privilèges d'un membre du poste consulaire à condition qu'elle soit expresse et formulée par écrit. La renonciation à l'immunité d'exécution d'un jugement en matière civile ou administrative doit être exprimée de manière distincte de la renonciation à l'immunité de juridiction.

5. Exemptions

Les fonctionnaires consulaires, les employés consulaires et les membres de leur famille sont exempts d'un certain nombre de dispositions parmi lesquelles l'exemption d'immatriculation des étrangers et de permis de séjour, l'exemption du régime de sécurité sociale, ainsi que l'exemption fiscale et l'exemption des droits de douane sous certaines conditions.

6. Extension des privilèges et immunités de l'agent diplomatique

L'article 37 de la convention octroie ces mêmes privilèges et immunités aux membres de la famille de l'agent diplomatique, sous réserve qu'ils ne soient pas ressortissants de l'État accréditaire.

Il les étend également aux membres du personnel administratif et technique de la mission et aux membres de leur famille, sauf pour l'exemption du droit de douane qui n'est accordée que pour les objets importés lors de leur première installation. De plus, l'immunité de juridiction civile et administrative est limitée aux actes accomplis dans l'exercice de leurs fonctions.

Enfin, pour les membres du personnel de service de la mission, ils bénéficient de l'immunité pour les actes accomplis dans l'exercice de leurs fonctions, de l'exemption des impôts et taxes sur les salaires reçus pour leurs services et de l'exemption des dispositions de sécurité sociale.

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