Rapport n° 439 (2010-2011) de M. Alain DUFAUT , fait au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, déposé le 13 avril 2011

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N° 439

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2010-2011

Enregistré à la Présidence du Sénat le 13 avril 2011

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication (1) sur la proposition de loi , ADOPTÉE PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE , relative à l' organisation du championnat d' Europe de football de l' UEFA en 2016 ,

Par M. Alain DUFAUT,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Jacques Legendre , président ; MM. Ambroise Dupont, Serge Lagauche, David Assouline, Mme Catherine Morin-Desailly, M. Ivan Renar, Mme Colette Mélot, MM. Jean-Pierre Plancade, Jean-Claude Carle , vice-présidents ; M. Pierre Martin, Mme Marie-Christine Blandin, MM. Christian Demuynck, Yannick Bodin, Mme Catherine Dumas , secrétaires ; M. Claude Bérit-Débat, Mme Maryvonne Blondin, M. Pierre Bordier, Mmes Bernadette Bourzai, Marie-Thérèse Bruguière, Françoise Cartron, MM. Jean-Pierre Chauveau, Yves Dauge, Claude Domeizel, Alain Dufaut, Jean-Léonce Dupont, Louis Duvernois, Mme Françoise Férat, MM. Jean-Luc Fichet, Bernard Fournier, Mmes Brigitte Gonthier-Maurin, Sylvie Goy-Chavent, MM. Jean-François Humbert, Soibahadine Ibrahim Ramadani, Mme Marie-Agnès Labarre, M. Philippe Labeyrie, Mmes Françoise Laborde, Françoise Laurent-Perrigot, MM. Jean-Pierre Leleux, Claude Léonard, Mme Claudine Lepage, M. Alain Le Vern, Mme Christiane Longère, M. Jean-Jacques Lozach, Mme Lucienne Malovry, MM. Jean Louis Masson, Philippe Nachbar, Mmes Mireille Oudit, Monique Papon, MM. Daniel Percheron, Jean-Jacques Pignard, Roland Povinelli, Jack Ralite, René-Pierre Signé, Jean-François Voguet.

Voir le(s) numéro(s) :

Assemblée nationale ( 13 ème législ.) :

3149 , 3203 et T.A. 625

Sénat :

363 et 440 (2010-2011)

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Avec sept voix contre six pour la Turquie, la France a obtenu, le 28 mai 2010, l'organisation de la coupe d'Europe de football de 2016. Cette compétition, organisée tous les quatre ans depuis 1960, est le troisième évènement sportif mondial en termes d'impact médiatique.

Avoir la chance de l'accueillir en France est pour votre rapporteur une joie et un honneur. Il croit en outre savoir que ce sentiment est partagé par bon nombre de ses collègues.

Faut-il pour autant un dispositif législatif exceptionnel - circonstanciel diront certains ? Telle est la question qui se pose au Sénat, saisi de la présente proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, qui tend à prévoir un régime juridique spécifique pour les enceintes sportives destinées à accueillir l'Euro 2016.

Votre rapporteur a une position très claire sur ce sujet : loin de constituer un régime d'exception, qui dérogerait pour la circonstance au droit commun, la présente proposition de loi répond, au contraire, à un besoin majeur du sport français , que la coupe d'Europe des Nations soit ou ne soit pas organisée en France. Elle constitue donc en fait une opportunité à saisir afin d'expérimenter de nouveaux modes de partenariat public/privé au service d'équipements sportifs que l'on doit absolument moderniser.

Approuvant sans réserve la proposition de loi, votre rapporteur n'a pas souhaité proposer de modifications et a été suivi par la commission qui a rejeté les différents amendements présentés lors de l'examen du texte.

I. LA RÉNOVATION DES ENCEINTES SPORTIVES : UN ENJEU MAJEUR DU SPORT FRANÇAIS

A. UN CONSTAT D'OBSOLESCENCE DES STADES

Les grandes enceintes sportives françaises sont à la fois archaïques et de faible capacité.

Les chiffres sont à cet égard imparables :

- alors que le taux de remplissage est plutôt bon (plus de 75 % en 2008 contre moins de 60 % en Italie), la capacité moyenne d'accueil du public s'établit à moins de 30 000 places dans le championnat de France de football contre plus de 45 000 en Allemagne ;

- l'âge moyen des stades était en 2008 de 7 ans en Allemagne, de 11 ans en Angleterre et de 17 ans en France 1 ( * ) ;

- la qualité de l'accueil est insuffisante en termes de confort et d'espaces réceptifs, avec notamment seulement 4 % de la surface totale des stades dédiés aux sièges à prestations, contre 8 à 12 % pour les standards européens. L'étude précitée de Sportfive évoque sur ce sujet une capacité moyenne « hospitalité » de 1 162 places « VIP » par stade de Ligue 1, qui pourrait passer à 3 180 places si les différents projets de rénovation aboutissaient ;

- la multifonctionnalité , élément crucial de rentabilité des stades, n'est absolument pas assurée . Votre rapporteur souligne ainsi que la plupart de nos stades ne sont occupés que deux jours par mois pendant neuf mois, soit un peu plus d'une vingtaine de jours par an avec les coupes : c'est trop peu pour un équipement aussi onéreux et clairement contraire à la bonne utilisation de l'argent public. Comme le note le rapport « grands stades », « l'AFG Aréna de Saint-Gall (Suisse) qui comporte à la fois un stade, un centre commercial et de loisirs de 31 000 m² ainsi qu'une grande surface de vente de mobilier de plus de 10 000 m² est un exemple concret et raisonnable de ce nouveau modèle de stade qui voit le jour, partout en Europe, et dont la France est encore cruellement dépourvue » ;

- enfin, comme l'avaient noté nos collègues Bernard Murat et Pierre Martin, dans leur rapport sur les supporters 2 ( * ) , les normes ne sont pas toujours respectées et un travail spécifique sur cette question mérite d'être effectué.

Les conséquences économiques de cette vétusté des stades est la « télé-dépendance » des clubs professionnels de football, dont les droits télévisuels constituent environ 60 % des ressources, ce qui les fragiliserait très fortement en cas de retournement du marché.

La billetterie ne constitue ainsi qu'une part très faible des revenus des clubs de Ligue 1 (moins de 10 %), contre 25 % en Allemagne (30 % pour le « sponsoring » et 18 % pour les produits dérivés). En outre, l'attractivité des stades n'a pas seulement des conséquences sur les revenus issus de la billetterie mais aussi sur les recettes de « sponsoring » et de produits dérivés 3 ( * ) .

Votre rapporteur estime que la rentabilité des infrastructures est un impératif qui impose de mettre en oeuvre les moyens d'améliorer cette situation. Encore faut-il en connaitre les causes...

B. DES CAUSES STRUCTURELLES ?

1. Un contexte spécifique : la propriété publique des stades

Force est tout d'abord de remarquer la principale spécificité des stades français : pour leur écrasante majorité, ils appartiennent à la collectivité sur le territoire de laquelle ils sont implantés (les communes ou leurs groupements).

90 % des enceintes de Ligue 1 sont ainsi la propriété d'une collectivité territoriale contre 59 % dans l'Europe élargie.

Plus largement, selon les informations fournies par l'Association nationale des élus en charge du sport (ANDES), 80 % du parc sportif français appartiennent aux collectivités territoriales , soit 200 000 équipements (ce sont ainsi 1,5 milliard d'euros par an de projets d'investissements qui sont présentés au CNDS). La Cour des comptes signale quant à elle que 73,1 % d'entre eux sont gérés par lesdites collectivités 4 ( * ) .

La coexistence entre l'obsolescence des stades et leur propriété publique n'est pas une coïncidence.

Plusieurs facteurs peuvent expliquer cette corrélation.

S'agissant des collectivités, d'une part :

- elles ne poursuivent pas un objectif économique et n'ont donc pas forcément entrepris de rénovation de stades adaptée aux spécificités économiques du sport professionnel ;

- s'agissant d'un équipement qui est le plus souvent occupé par un club professionnel, il n'est pas forcément évident pour elles d'investir fortement, au risque d'être accusées d'utiliser l'argent public à des fins de bénéfices privés ;

- l'état des finances publiques locales ne leur permet pas souvent d'investir massivement dans ces équipements sportifs ;

S'agissant des clubs, d'autre part :

- à partir du moment où le club résident est un simple locataire sans droits réels ni marges de manoeuvre de gestion du stade, il n'a que peu d'intérêt à l'exploiter économiquement et à moderniser l'infrastructure ;

- les risques d'évolution politique de la collectivité et de changement de stratégie vis-à-vis des clubs résidents les rendent peu enclins à investir sur le long terme.

Il semble ainsi que la propriété publique des stades ne soit pas un élément susceptible d'encourager les investissements dans les infrastructures sportives. Elle aurait plutôt pour effet de mettre en place un mécanisme perdant/perdant au détriment de la qualité des installations sportives.

L'idéal serait pourtant de définir des modalités de coopération permettant de renverser la tendance au profit d'une modernisation des équipements.

La question des formules juridiques disponibles est au coeur de la problématique.

2. Des raisons juridiques

Il n'existe aucun cadre juridique adapté à l'ensemble des projets, le choix dépendant de chaque situation : rénovation ou construction, maîtrise d'ouvrage publique ou privée, mode de financement...

Le choix de telle ou telle formule, maîtrise d'ouvrage publique, concession, partenariat public privé ou bail emphytéotique administratif emporte en effet des conséquences différentes sur la capacité de la collectivité à moderniser ses installations.

(1) Les cas où la collectivité souhaite agir seule : la maitrise d'ouvrage publique

Traditionnellement, et notamment s'agissant des équipements municipaux utilisés par les clubs amateurs, l'outil juridique utilisé en cas de constructions ou rénovations est celui de la maîtrise d'ouvrage publique .

La loi dite « MOP » - loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 modifiée relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée - encadre :

- « la réalisation de tous ouvrages de bâtiment ou d'infrastructure ainsi qu'aux équipements industriels destinés à leur exploitation dont les maîtres d'ouvrage sont :

1° L'État et ses établissements publics ;

2° Les collectivités territoriales, leurs établissements publics , les établissements publics d'aménagement de ville nouvelle créés en application de l'article L. 321-1 du code de l'urbanisme, leurs groupements ainsi que les syndicats mixtes visés à l'article L. 166-1 du code des communes (...) ».

Ces cas correspondent bien à ceux où une collectivité souhaite faire rénover ou construire un équipement par un maître d'oeuvre qui conçoit et organise le projet.

Il est très largement utilisé. Notons ainsi que dans la liste des projets de stades déjà livrés énumérés par le rapport précité de la commission « grands Stades », sur les 10 équipements cités, rénovés ou construits, 8 l'étaient sous le régime de la loi MOP : un seul était privé (agrandissement du stade Marcel-Michelin de Clermont-Ferrand, dans un contexte très spécifique), et un n'était pas renseigné (agrandissement du stade Aimé-Giral de Perpignan).

Les projets de rénovation des stades de Toulouse et de Saint-Etienne seront menés sous cette forme avec un investissement important de la collectivité :

Selon les informations fournies à votre rapporteur, la rénovation du stade Geoffroy-Guichard (Saint-Etienne) représente environ 75 millions d'euros. Le marché a été attribué au groupement Léon Grosse (constructeur) et Chaix&Morel (architectes) en octobre 2010. L'instruction du permis de construire est en cours et les travaux devraient commencer à la prochaine intersaison.

A terme, le stade devrait être géré directement par les services de Saint-Etienne Métropole comme c'est déjà le cas aujourd'hui. Le club devra donc s'acquitter d'un loyer en contrepartie de l'utilisation du stade pour ses matches.

Concernant la rénovation du Stadium de Toulouse, le marché n'a pas encore été attribué : il devrait l'être entre juin et juillet 2011. Il représentera vraisemblablement un montant de l'ordre de 60 millions d'euros.

A terme, le stade sera géré directement par les services de la commune comme c'est déjà le cas aujourd'hui pour l'ensemble des équipements sportifs municipaux toulousains. Le club paiera un loyer pour l'utilisation du stade pour ses matches.

Dans les deux cas le coût du loyer de la mise à disposition des stades sera réajusté.

Le fait de choisir la maîtrise d'ouvrage publique afin de rénover ou de construire le stade n'impose pas un unique mode de gestion. Ainsi, la collectivité peut-elle aussi mettre l'équipement à la disposition du club professionnel à travers plusieurs formes juridiques :

- la convention d'occupation du domaine public moyennant le paiement d'une redevance par le club (c'est le cas de l'Olympique lyonnais aujourd'hui). Mais la collectivité supporte les coûts relatifs à l'entretien et au fonctionnement courant de du stade ;

- et la délégation de service public , par laquelle on désigne l'ensemble « des contrats par lesquels une personne morale de droit public confie la gestion d'un service public dont elle a la responsabilité à un délégataire public ou privé dont la rémunération est substantiellement liée au résultat d'exploitation du service » (affermage, régie intéressée, concession).

Ces procédures reposent cependant sur une procédure de mise en concurrence et le club de la ville n'est ainsi, théoriquement, pas certain d'obtenir l'exploitation de l'enceinte sportive. S'appliquent en effet à ces formules les dispositions des articles 38 à 46 de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques dite « loi Sapin », ainsi que celles des articles L. 1411-1 et suivants du code général des collectivités territoriales (dispositions correspondantes pour les communes).

Cette solution de la maîtrise d'ouvrage publique présente donc des inconvénients tant sur le plan de la construction ou la rénovation que sur le plan de la gestion. Comme le note la commission « grands stades », « la maîtrise d'ouvrage publique offre un modèle simple mais de plus en plus écarté sous l'effet conjugué de la lourdeur de la gestion de projets d'une telle ampleur, du contexte financier difficile pour les collectivités territoriales et du rôle secondaire qu'il laisse aux clubs (ils ne conduisent pas les projets et n'accèdent pas à la propriété des infrastructures) ».

Elle est donc, semble-t-il, réservée au cas de rénovation d'importance moyenne et où les collectivités expriment le souhait très vif de s'impliquer dans la vie du stade.

(2) Les cas où la collectivité souhaite s'associer à une personne privée

La concession de service public est un « contrat qui charge un particulier ou une société d'exécuter un ouvrage public ou d'assurer un service public à ses frais, avec ou sans subvention et que l'on rémunère en lui confiant l'exploitation de l'ouvrage public ou l'exécution du service public avec le droit de percevoir des redevances sur les usagers de l'ouvrage ou sur ceux qui bénéficient du service public ».

Le point fort de la concession est que le club assure l'exploitation et l'entretien du stade, ce qui évite à la collectivité des dépenses régulières et lourdes, qu'elle n'est pas forcément prête à engager. En revanche, si le club se rémunère sur les revenus de l'exploitation et peut développer des activités annexes, il ne maîtrise pas le projet et ne dispose pas de droits réels sur l'infrastructure.

Cette solution a été adoptée pour le Stade de France et le stade du Mans (MMArena) mais n'est pas probablement pas particulièrement adaptée aux grands stades recevant des clubs professionnels résidents.

Le bail emphytéotique administratif (BEA) a, quant à lui, pour vocation de permettre à une personne publique de conclure avec un partenaire privé un contrat portant sur la construction (ou la rénovation), sur une dépendance domaniale, d'un équipement affecté au service public ou à l'intérêt général.

Aux termes de l'article L. 1311-2 du code général des collectivités territoriales, « un bien immobilier appartenant à une collectivité territoriale peut faire l'objet d'un bail emphytéotique prévu à l'article L. 451-1 du code rural et de la pêche maritime, en vue de l'accomplissement, pour le compte de la collectivité territoriale, d'une mission de service public ou en vue de la réalisation d'une opération d'intérêt général relevant de sa compétence ou en vue de l'affectation à une association cultuelle d'un édifice du culte ouvert au public ou en vue de la réalisation d'enceintes sportives et des équipements connexes nécessaires à leur implantation ou, (...). Ce bail emphytéotique est dénommé bail emphytéotique administratif ».

L'article L. 451-1 du code rural précise que le bail emphytéotique de biens immeubles « confère au preneur un droit réel susceptible d'hypothèque ; ce droit peut être cédé et saisi dans les formes prescrites pour la saisie immobilière. Ce bail doit être consenti pour plus de dix-huit années et ne peut dépasser quatre-vingt-dix-neuf ans ; il ne peut se prolonger par tacite reconduction ».

La commission « grands stades » considérait que le choix du BEA pouvait séduire par sa souplesse et par la possibilité offerte au club de prendre en main les destinées de « son » stade, mais que des incertitudes juridiques importantes pesaient sur sa généralisation.

A cet égard le fait de prévoir explicitement la possibilité d'un BEA « équipements sportifs » 5 ( * ) a largement renforcé la sécurité juridique de cet outil.

Comme le note le rapport de M. Éric Besson sur la compétitivité du football français, le BEA a pour avantages de conférer au club un droit réel sur les biens donnés à bail et de permettre la réalisation d'un ouvrage dans des délais plus courts que la maîtrise d'ouvrage publique.

En revanche, le dispositif peut être requalifié en convention de délégation de service public sous certaines conditions (ce qui impose une mise en concurrence). Afin d'éviter les renouvellements trop nombreux, les collectivités choisissent en général des baux de très longue durée.

Les travaux de rénovation du Parc des Princes, du stade Bollaert de Lens et du stade Marcel-Picot de Nancy devraient être exécutés sous cette formule.

Aux termes de l'article L. 1414-1 du code général des collectivités territoriales, le contrat de partenariat « est un contrat administratif par lequel une collectivité territoriale ou un établissement public local confie à un tiers, pour une période déterminée en fonction de la durée d'amortissement des investissements ou des modalités de financement retenues, une mission globale ayant pour objet la construction ou la transformation, l'entretien, la maintenance, l'exploitation ou la gestion d'ouvrages, d'équipements ou de biens immatériels nécessaires au service public , ainsi que tout ou partie de leur financement à l'exception de toute participation au capital. Toutefois, le financement définitif d'un projet doit être majoritairement assuré par le titulaire du contrat, sauf pour les projets d'un montant supérieur à un seuil fixé par décret ».

Il peut également avoir pour objet tout ou partie de la conception de ces ouvrages, équipements ou biens immatériels ainsi que des prestations de services concourant à l'exercice, par la personne publique, de la mission de service public dont elle est chargée.

Cet outil juridique permet à l'opérateur d'assurer le financement du projet et à la collectivité d'être fortement associée à la gestion. En revanche la place occupée par le club professionnel doit être soigneusement définie et la procédure de passation est très complexe.

C'est la raison pour laquelle ce dispositif est davantage utilisé pour les constructions de nouveaux stades : le grand stade de Lille, le nouveau stade bordelais et celui de Nice. Seule la modernisation du stade Vélodrome, parmi les rénovations prévues pour l'Euro 2016, devrait être assurée via cet outil juridique.

Votre rapporteur considère que ces solutions privilégiant la mixité des financements publics et privés sont la voie d'avenir pour les grands stades . En effet :

- elles permettent souvent de partager le risque de la construction du stade entre plusieurs acteurs ;

- les aléas de la maintenance et de l'entretien, qui sont souvent très coûteux, n'incombent plus à la collectivité, ce qui simplifie nettement ses relations avec les clubs résidents ;

- les clubs disposent d'une stabilité plus importante encourageant leurs investissements et favorisant la modernisation du stade ;

- enfin, dans un contexte difficile pour les finances locales, et dans la mesure où les stades restent de propriété publique, ces solutions apparaissent comme le seul moyen de mener des projets de grande ampleur.

(3) Des projets entièrement privés ?

Le modèle juridique des projets de constructions entièrement privées ne pose pas de difficulté particulière. Il reste qu'il est très surprenant de constater l'extrême difficulté de monter ce type de projets : ceux de Strasbourg et de Nice ont ainsi été abandonnés et celui de l'Olympique lyonnais se heurte à des obstacles importants.

Votre rapporteur considère, à cet égard, qu'il faudra s'interroger à moyen terme sur l'éventuelle existence de causes culturelles au faible nombre de projets privés d'intérêt général dans notre pays, que ce soit dans le domaine du sport ou même de la culture 6 ( * ) , et sur les moyens d'y remédier.

3. L'enceinte sportive : un enjeu de compétitivité et plus encore

Votre rapporteur souhaite insister sur le fait que la rénovation des enceintes sportives n'est pas une question marginale mais se situe au contraire au centre du modèle économique du sport professionnel en France.

L'ancienneté des installations sportives est la principale cause de l'incapacité des clubs professionnels français à être compétitifs, comme le montre l'étude précitée de Sportfive .

Selon son analyse, « à taux de remplissage constant (75 % en Ligue 1 et 42 % en Ligue 2) et en considérant une augmentation limitée du prix moyen des places (+ 7,80 euros en Ligue 1; + 3,60 euros en Ligue 2), une augmentation de la capacité des stades permettrait de générer 181,1 millions d'euros au lieu des 95,4 millions d'euros actuels, soit un surplus de 85,7 millions, représentant 89,85 % d'accroissement des recettes billetterie ».

Mais plus important, en passant à une offre moyenne de 3 180 places « VIP » par stade contre 1 162 à ce jour 7 ( * ) , pourraient être générés 156,6 millions d'euros au lieu des 59,7 millions d'euros actuels , soit un surplus de 96,9 millions représentant 162 % d'accroissement des recettes.

Ce bilan global d'augmentation de 118 % des recettes de billetterie ne comprend pas l'augmentation des recettes liées aux dépenses sur place (restauration), ni l'impact majeur de la construction d'un stade moderne sur la vente de produits dérivés et le « sponsoring ».

Votre rapporteur considère enfin que les enjeux du stade vont bien au-delà de ces enjeux économiques .

S'il entend les réticences des élus qui ne souhaitent pas que leur collectivité « socialise les dépenses et privatise les bénéfices » en subventionnant des projets destinés à des sociétés sportives, il souhaite aussi rappeler que les clubs professionnels, en dépit des salaires parfois indécents versés aux sportifs, ne sont pas des groupes « ultracapitalistiques » aux bénéfices vertigineux.

Certes, qu'on le veuille ou non, le sport professionnel est devenu un spectacle, dont l'objet est la rentabilité. Mais il continue de jouer un rôle essentiel pour les collectivités territoriales , parfaitement présenté par notre ancien collègue, M. Bernard Murat, dans son rapport sur les clubs sportifs et les clubs professionnels 8 ( * ) : outre l'effet d'entraînement global de leur activité économique 9 ( * ) , les clubs assurent une notoriété très importante aux communes où ils sont implantés, ils créent un ciment d'identification locale et du lien social.

Les stades sont précisément ce lieu de mixité sociale où l'ambiance est, la plupart du temps, festive. Plus que des enceintes sportives, ils sont des lieux de vie et de rassemblement . Il suffit de s'être déplacé au stade Bollaert ou au stade Vélodrome pour le constater.

Enfin, l'existence de ces clubs tend à renforcer la pratique sportive amateur de la population.

Comme le note le rapport « grands stades », l'enceinte sportive est ainsi un « outil de développement des villes et des territoires, un facteur de contribution à la croissance économique, voire une opportunité de donner un essor à des quartiers urbains situés alentour du stade ».

Votre rapporteur tient ainsi à rappeler que ce n'est pas parce qu'il y a des partenaires privés et parce que des sommes importantes y sont parfois en jeu, que le sport professionnel ne participe au service public et au bien-être d'une large partie de la population locale.

II. L'ORGANISATION DE L'EURO 2016 : UNE OPPORTUNITÉ À SAISIR

A. DES EXIGENCES À REMPLIR

1. Le cahier des charges de l'UEFA

Votre rapporteur considère que le cahier des charges de l'UEFA est certes exigeant, mais correspond à des besoins réels des stades français.

Neuf stades au moins doivent être proposés dont 2 comptant au moins 50 000 stades (la France les compte déjà : ce sont les stades de France et Vélodrome), trois comptant 40 000 places (Lens, Paris, Lille, Bordeaux, Lyon), et quatre comptant 30 000 places (Nice, Saint-Etienne, Toulouse, Nancy). Votre rapporteur considère qu'avec les 11 stades (9 principaux et 2 de réserve) de la candidature française, ces obligations pourront être remplies assez aisément.

A travers les dix séries de critères posées par le cahier des charges, trois types d'exigences sont en outre définis : spatiales, techniques et fonctionnelles.

Au-delà de la capacité totale, des prescriptions sont fixées relatives aux emplacements spécifiques : tribune officielle, programme « hospitalité » (VIP), tribunes de presse et installations médias, bureaux et salles de réunion.

Les critères techniques récapitulent le nombre et la superficie des espaces nécessaires au bon déroulement des rencontres.

Les dispositions fonctionnelles évoquent les questions de circulation des personnes, le respect du droit ou encore la sécurité.

Du fait de l'ancienneté de nos stades, les points noirs du dossier français sont les espaces dits « hospitalité » et le bloc « tribunes de presse et installations médias » , sur lesquels se concentreront donc les travaux de rénovation.

Or, il s'agit d'éléments majeurs de la rentabilité des stades .

Le confort des stades n'est pas non plus adapté au cahier des charges de l'Euro. Son amélioration ne pourra qu'être un facteur d'attraction des familles dans les enceintes sportives, qui est l'une des voies d'amélioration de leur performance économique.

L'ensemble des stades doit être livré à la fin de l'année 2014.

2. Les investissements à réaliser : 4 nouveaux stades, 6 rénovations

Dans le dossier de candidature de la France déposé à l'UEFA le 15 février 2010, 12 stades étaient nommément cités pour l'organisation de la manifestation : Stade de France à Saint-Denis, Grand Stade OL à Lyon, Grand Stade de Lille Métropole, Nouveau Stade de Bordeaux, , Grand Stade de Nice, Stade Vélodrome de Marseille, Grand Félix-Bollaert de Lens, Parc des Princes à Paris, Stade Geoffroy-Guichard à Saint-Etienne, Stadium Municipal de Toulouse, Stade de la Meinau à Strasbourg et Stade Marcel-Picot à Nancy.

Ces stades sont également mentionnés dans le compte-rendu du Conseil des ministres du 2 juin 2010, ainsi que dans une réponse de la secrétaire d'État chargée des sports à une question n° 81332 de M. Pierre Morel-A-L'Huissier (JO du 3 août 2010).

9 d'entre d'eux sont considérés comme étant les stades principaux, 3 autres venant en appoint (la distinction sera rendue publique par une décision de la fédération française de football rendue en mai prochain). Ils sont tous concernés par la proposition de loi précitée.

Cependant, en raison de la défection de la candidature strasbourgeoise, seuls 11 stades seront de facto concernés par l'Euro 2016.

Le Stade de France, qui compte près de 80 000 spectateurs, est censé au moins accueillir le match d'ouverture, ainsi qu'une demi-finale et la finale. Aucun investissement spécifique n'est prévu.

Le Grand Stade de l'Olympique Lyonnais devrait compter plus de 55 000 spectateurs, et les investissements s'élever à plus de 300 millions d'euros financés à 100 % par le privé. La date de livraison était prévue fin 2013 mais le projet a déjà pris un retard important.

Le Grand Stade Lille Métropole devrait comprendre plus de 45 000 places pour un investissement de 325 millions d'euros financés par un partenariat public-privé. La livraison est prévue courant 2012.

Le nouveau stade de Bordeaux devrait pouvoir accueillir plus de 40 000 spectateurs, pour un investissement de 200 millions d'euros financés par un partenariat public-privé. La livraison est prévue courant 2014.

Le Grand Stade de Nice devrait pouvoir accueillir plus de 33 000 spectateurs pour un coût de 184 millions d'euros, financés par un partenariat public-privé. La livraison est prévue courant 2013.

Le stade Vélodrome de Marseille devrait passer à une capacité nette de 65 000 spectateurs, avec une rénovation majeure (toit rétractable notamment), dont le montant s'élèverait à 151 millions d'euros investis dans le cadre d'un PPP.

La rénovation du stade Félix-Bollaert de Lens devrait porter sa capacité d'accueil à plus de 40 000 spectateurs pour un montant de 111 millions d'euros financés dans le cadre d'un BEA. La livraison est prévue pour 2014.

Pour le Parc des Princes à Paris, ce sont entre 70 et 90 millions d'euros qui devraient être investis par le club dans le cadre d'un BEA, pour une rénovation majeure du stade qui améliorera ses conditions d'accueil en conservant une capacité supérieure à 40 000 spectateurs. La livraison est prévue courant 2014.

Le stade Geoffroy-Guichard de Saint-Etienne devrait être rénové pour un montant de 75 millions issus de partenaires publics (collectivités territoriales et État). La livraison de ce stade modernisé dont la capacité serait portée à 40 000 spectateurs est prévue courant 2014.

La rénovation du Stadium Municipal de Toulouse, dont la capacité serait portée à 37 000 spectateurs, pour un coût de 56 millions d'euros investis par les pouvoirs publics, devrait être terminée à la mi-2014.

Enfin le stade Marcel-Picot de Nancy devrait pouvoir accueillir plus de 30 000 spectateurs, pour 60 millions d'euros investis conjointement par le public et le privé dans le cadre d'un BEA. Il s'agit d'un projet de rénovation majeure du stade qui augmentera la capacité d'accueil et le rendra multifonctionnel. La livraison est prévue courant 2014.

Votre rapporteur note que ces rénovations ne sont pas toutes liées à l'organisation de l'Euro, de nombreux projets étant déjà prévus avant la victoire de la candidature française, mais constate que la dynamique créée par l'évènement est extrêmement positive .

Force est cependant de constater que l'investissement global sera très élevé. Il est estimé à 1,8 milliard d'euros partagés entre l'ensemble des acteurs publics et privés. L'État participera à cet effort via une augmentation de la dotation du Centre national de développement du sport (CNDS) : un amendement de M. François Trucy, sénateur, adopté en première partie de la loi de finances pour 2011, a prévu un prélèvement complémentaire de 0,3 % de 2011 à 2015 sur les sommes misées sur les jeux (hors paris sportifs) de la Française des Jeux dont le produit, plafonné à 24 millions d'euros par an, est affecté au CNDS, en vue de financer les projets de stades construits ou rénovés dans la perspective de l'Euro 2016.

Votre rapporteur considère que la mixité des financements est le seul moyen de parvenir à moderniser l'ensemble des stades concernés par l'Euro. A cet égard, l'investissement des collectivités territoriales aura un effet de levier très intéressant. Les 150 millions d'euros apportés par le CNDS joueront également un rôle majeur pour débloquer certaines situations. Si les contraintes budgétaires venaient à se débloquer, il pourrait cependant être utile que l'État parvienne à augmenter son effort.

LES STADES DE L'EURO 2016

Commune d'implantation

Stade concerné

Capacité nette

Catégorie

Régime juridique

Saint-Denis

Stade de France

76 474

1

Concession

Lyon

Grand stade OL

57 628

3

Privé

Lille

Grand Stade

47 882

3

PPP

Bordeaux

Nouveau Stade

42 566

3

PPP

Nice

Grand stade

33 740

3

PPP

Marseille

Stade Vélodrome

65 000

2

PPP

Lens

Stade Bollaert

40 113

2

BEA

Paris

Parc des Princes

40 058

2

BEA

Saint-Etienne

Stade Geoffroy-Guichard

39 327

2

MOP

Toulouse

Stadium municipal

37 050

2

MOP

Nancy

Stade Marcel-Picot

31 973

2

BEA

3. L'intérêt pour la France

Notons d'emblée que le fait que le nombre d'équipes présentes en phase finale de l'Euro ait été porté de 16 à 24 n'a pas d'incidence sur le nombre de stades concernés et permettra même leur meilleure utilisation (impact de 20 matchs supplémentaires).

Le financement des grandes infrastructures sportives étant aujourd'hui principalement (voire exclusivement) à la charge des communes ou de leurs groupements, propriétaires des équipements, l'effort réalisé permettra en outre aux enceintes concernées d'entrer dans un nouveau modèle économique où la place des collectivités et des clubs sera beaucoup plus équilibrée, en faveur des premières.

Par ailleurs, au-delà de l'impact majeur qu'aura l'amélioration générale de la qualité des grandes enceintes sportives sur l'économie du sport, largement soulignée par votre rapporteur, l'organisation de l'Euro 2016 est un moteur de développement à la fois pour le sport concerné et pour l'économie française.

S'agissant du football, une augmentation importante du nombre de licenciés peut être attendue (+ 10 % après la coupe du monde de football de 1998).

Par ailleurs, une étude menée par le centre du droit et d'économie du sport de Limoges 10 ( * ) sur les retombées directes de la Coupe du monde de rugby les avait ainsi chiffrées à 538 millions d'euros et le bénéfice net à 113 millions d'euros, résultant pour les trois quarts des dépenses des spectateurs étrangers venus assister à l'évènement.

B. UNE PROPOSITION DE LOI PERTINENTE

La caractéristique majeure de la présente proposition de loi est qu'elle est circonscrite dans le temps (jusqu'à l'Euro 2016) et dans son champ d'application : elle s'appliquera seulement aux stades concernés par l'Euro 2016.

Elle consiste à assouplir la législation sur trois points :

- le régime juridique du bail emphytéotique administratif, en alignant les règles relatives aux subventions pouvant être versées dans ce cadre à celles applicables aux contrats de partenariat ;

- les modalités d'attribution des aides destinées aux sociétés sportives en permettant à tous les niveaux de collectivités de subventionner la rénovation ou la construction d'équipements sportifs par les clubs professionnels ;

- et enfin le recours à l'arbitrage, en permettant aux contrats passés par les personnes publiques dans le cadre de l'Euro 2016 d'inclure des clauses le prévoyant.

Votre rapporteur considère que les deux premiers articles constituent un tout cohérent qui permettra aux interventions des collectivités territoriales d'avoir un effet de levier important et finalement de lever une partie de la pression qui repose sur leurs épaules, dès lors que les stades destinés à accueillir l'Euro 2016 sont aujourd'hui leur propriété (à part le projet d'OL Land).

L'article 3 est utile dans la mesure où il favorisera la livraison des stades dans les délais prévus.

C. ALLER PLUS LOIN ?

Votre rapporteur considère que la limitation du champ de la proposition de loi favorisera son adoption et la définition d'un consensus le plus large possible.

Pour autant, il considère qu'une réflexion devra encore être menée afin de favoriser les modes de partenariat entre personnes publiques et privées en matière d'équipements sportifs , qui constituent une voie d'avenir pour la modernisation du parc français, notamment s'agissant des grandes salles.

L'assouplissement du BEA apparaît notamment comme une piste très intéressante dont le bilan méritera d'être établi.

A cet égard, il demandera à la ministre qu'une étude soit réalisée sur l'impact de cette proposition de loi sur les stades de l'Euro 2016 afin que puisse être enfin défini un arsenal juridique pertinent pour favoriser la compétitivité du sport français, que ce soit au niveau des « grands stades », des « grandes salles », mais aussi des équipements de modeste envergure qui constituent une charge très élevée pour les collectivités territoriales.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er - Éligibilité aux subventions publiques, redevances et participations financières des projets d'enceintes sportives réalisés en vue de l'Euro 2016 sous le régime du bail emphytéotique administratif

Le présent article tend à assouplir le régime des baux emphytéotiques concernant les stades destinés à accueillir l'Euro 2016, en les rendant éligibles à différentes formes de subventions publiques.

I - Le droit existant

A. Le bail emphytéotique administratif (BEA)

Le BEA, institué par la loi n° 88-13 du 5 janvier 1988 d'amélioration de la décentralisation, codifiée aux articles L. 1311-2 et suivants du code général des collectivités territoriales, constitue pour les collectivités territoriales un instrument leur permettant de louer à un tiers un bien immobilier qui leur appartient et de l'autoriser à construire un ouvrage sur le domaine public.

Un BEA ne peut être consenti qu'en vue :

- de l'accomplissement, pour le compte d'une collectivité territoriale, d'une mission de service public ;

- de la réalisation d'une opération d'intérêt général entrant dans les compétences de la collectivité intéressée ;

- en vue de l'affectation à une association cultuelle d'un édifice du culte ouvert au public ;

- en vue de la réalisation d'enceintes sportives et des équipements connexes nécessaires à leur implantation ;

Il est conclu pour une longue période, comprise entre 18 et 99 ans. Ce bail confère un droit réel au preneur sur le bien immobilier appartenant à la collectivité, qui est cependant soumis à des conditions particulières :

- il n'est cessible, avec l'autorisation de la collectivité publique, qu'à une personne subrogée au preneur initial dans les droits et obligations découlant du bail ;

- et il ne peut être hypothéqué, après autorisation de la collectivité concernée, que pour garantir des emprunts contractés en vue de financer la réalisation des ouvrages situés sur le bien loué. Le contrat constituant l'hypothèque doit, sous peine de nullité, être approuvé par la collectivité.

A l'expiration du BEA, l'ouvrage réalisé devient la propriété de la collectivité bailleresse, sans qu'elle ait à verser une indemnité au preneur.

En revanche, aucune disposition législative ne prévoit que des subventions puissent être versées dans le cadre d'un bail emphytéotique administratif .

Dans une réponse ministérielle n° 53490 (JO AN 19 janvier 2010) à une question de M. Daniel Fasquelle, le ministre de l'économie et de l'emploi a ainsi souligné que l'article 25-1 de l'ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariat aligne le régime d'éligibilité à « des subventions, redevances et autres participations financières » des projets réalisés sur le fondement de cette ordonnance sur celui applicable aux projets réalisés sous le régime de la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée, mais qu'en l'absence de dispositions en ce sens aux articles L. 1311-2 et suivants du code général des collectivités territoriales relatifs au bail emphytéotique administratif, les projets réalisés sous cette forme ne peuvent bénéficier d'un régime analogue .

B. Les subventions dans le cadre des délégations de service public et des contrats de partenariat

Dans le cadre d'une délégation de service public, l'article L. 2224-2 du code général des collectivités territoriales permet à une commune, après délibération du conseil municipal en ce sens, de prendre en charge au titre de son budget des dépenses liées à l'exploitation du service public :

« 1° Lorsque les exigences du service public conduisent la collectivité à imposer des contraintes particulières de fonctionnement ;

2° Lorsque le fonctionnement du service public exige la réalisation d'investissements qui, en raison de leur importance et eu égard au nombre d'usagers, ne peuvent être financés sans augmentation excessive des tarifs ;

3° Lorsque, après la période de réglementation des prix, la suppression de toute prise en charge par le budget de la commune aurait pour conséquence une hausse excessive des tarifs ».

Ces critères (notamment le 2°) peuvent tout à fait conduire une collectivité à soutenir un projet dans le cadre de la construction d'un équipement.

L'article 17 de la loi n° 2008-735 du 28 juillet 2008 relative aux contrats de partenariat a en outre inséré un article 25-1 dans l'ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariat prévoyant que les projets éligibles à des subventions, lorsqu'ils sont réalisés sous le régime de la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée, sont éligibles aux mêmes subventions lorsqu'ils sont réalisés sous le régime du contrat de partenariat.

Selon le rapporteur du projet de loi au Sénat, M. Laurent Béteille, il s'agissait « d'une opportune mesure de clarification » 11 ( * ) . Cette mesure n'a au demeurant fait l'objet que de très peu de débats parlementaires.

L'article 17 de la loi 2009-179 du 17 février 2009 pour l'accélération des programmes de construction et d'investissement publics et privés a modi?é l'article 25-1 précité de l'ordonnance du 17 juin 2004 relative aux contrats de partenariat afin de préciser que les projets réalisés sous cette forme étaient, au même titre que les projets réalisés sous le régime de la loi du 12 juillet 1985, dite loi MOP (maîtrise d'ouvrage publique), éligibles à des subventions, mais aussi à des redevances et d'autres participations ?nancières .

Une fiche proposée par la mission d'appui à la réalisation des contrats de partenariat rappelle les principes comptables et budgétaires applicables au versement de subventions à une personne publique (établissement public de l'État, collectivité territoriale ou établissement public en dépendant) qui s'engage dans un contrat de partenariat.

(...) 2. Modalités de versement des subventions.

Si le montant et les délais de versement de la subvention sont connus lors de la procédure de passation du contrat, les futures parties au contrat sont libres d'organiser contractuellement les modalités de son versement. Cette ressource financière peut alors être intégrée dans le plan de financement du partenaire privé, et optimiser ainsi le coût de financement global du projet qui pèse sur la personne publique.

Cependant, le versement d'une subvention directement de la personne publique qui accorde la subvention à la personne privée titulaire du contrat de partenariat est à proscrire. Il induirait en effet des complications juridiques (éventuelle requalification de la somme en complément de rémunération du co-contractant privé), comptables et pratiques (c'est la personne publique cocontractante, et non la personne publique versante, qui est la plus à même de vérifier que les prestations requises ont bien été effectuées). Il incombe à la personne publique cocontractante attributaire de la subvention de la reverser au contractant privé.

Le second alinéa de l'article 25-1 de l'ordonnance cité ci-dessus autorise le versement échelonné sur plusieurs années d'une subvention d'investissement. Une délibération peut tout à fait engager la collectivité versante sur plusieurs exercices budgétaires, suivant en cela le régime classique des AP et des AE (...).

3 - Traitement des subventions d'investissement au regard de la TVA.

Les différentes composantes de la redevance (« loyers ») versée au partenaire privé sont grevées de la TVA. Cependant, les « subvention d'équipement » (c'est à dire affectées à la réalisation d'une immobilisation) sont non imposables à la TVA (Instruction du 27 janvier 2006, 3D-1-06). Dès lors que les subventions reversées au partenaire privé par le contractant public ont bien le caractère d'une subvention d'équipement du fait de leur affectation finale, elles bénéficient de cette exemption.

Le fait que la subvention puisse avoir une influence sur le prix des biens livrés ne suffit pas à rendre cette subvention imposable (BOI 3 A-7-06).

(...) 4 -Traitement budgétaire et comptable des subventions d'investissement versées à une collectivité territoriale.

Le schéma budgétaire suivant est envisageable : la collectivité qui souhaite subventionner un projet délibère sur l'adhésion au dit projet, puis inscrit la dépense correspondante à son budget. Une délibération spécifique vient éventuellement confirmer le moment venu le versement au regard des pièces justificatives évoquées ci-dessus.

Pour la collectivité bénéficiaire, il convient d'inclure le montant de la subvention à recevoir dans celui des autorisations d'engagement (AE) inscrites au titre du projet, étant rappelé que la totalité de celles-ci, pour ce qui concerne l'investissement - hors frais financiers mais indemnité de dédit éventuelle comprise - doivent être inscrites l'année de la signature du contrat.

Certains projets se caractérisent par un fort investissement les premières années du contrat, le versement au partenaire privé se faisant alors soit après constatation de la mise à disposition de l'ouvrage (équivalente à la réception en maîtrise d'ouvrage publique) soit, le cas échéant, au fur et à mesure de la réalisation des travaux (en application du principe du service fait). D'autres projets au contraire imposeront un versement au moment du paiement du loyer annuel. Il ne peut être imposé un mode opératoire général, chaque projet ayant un équilibre propre.

II - Le texte de la proposition de loi

A. Un dispositif au champ restreint

L'assouplissement du régime des baux emphytéotiques administratifs ne concernera que les « enceintes sportives destinées à accueillir l'UEFA Euro 2016 ainsi que des équipements connexes permettant le fonctionnement de celles-ci ».

La formule renvoie aux 12 stades nommément cités dans le dossier de candidature de la France à l'organisation de la manifestation, déposé devant l'UEFA le 15 février 2010.

En raison de la défection de la candidature strasbourgeoise, seuls 11 stades seront en fait concernés.

B. Une extension d'un régime applicable par ailleurs

Le premier alinéa du présent article vise à prévoir que les projets de construction ou de rénovation des 11 stades précités réalisés sous le régime du BEA seraient éligibles aux mêmes subventions, redevances et autres participations financières que s'ils étaient réalisés sous le régime de la loi dite « MOP ».

Les stades concernés seraient ceux de Lens et de Nancy, ainsi que le Parc des Princes. Dans les deux premiers cas, le fait d'aligner le régime des BEA sur celui de la loi « MOP » et du contrat de partenariat, permettrait de réellement débloquer une situation , où le projet de peut pas se faire en raison de l'incapacité des deux acteurs (privé ou public) à agir seuls.

Par ailleurs, sur le fond, votre rapporteur n'est pas défavorable à cette neutralisation du droit de la commande publique. Il considère que cet article est une expérimentation pertinente dont il sera intéressant de faire le bilan. En outre, ce dispositif permettra que le soutien de l'État via le CNDS puisse concerner également ces trois stades ainsi que leurs équipements connexes .

Le second alinéa du présent article prévoit que les versements de la personne publique puissent être adaptés à la durée du BEA. Il s'agit là encore d'un alignement sur le régime du contrat de partenariat.

Sur la proposition de votre rapporteur, votre commission a adopté cet article sans le modifier.

Article 2 - Aides des collectivités territoriales aux projets de construction ou de rénovation des stades

Corollaire indispensable de l'article 1 er , le présent article vise à assouplir les modes de soutien des collectivités territoriales aux projets de construction et de rénovation des enceintes sportives concernées par l'Euro 2016.

I - Le droit existant

A. Les aides en faveur des clubs sportifs

L'article 122-11 du code du sport prévoit un principe de la prohibition des aides aux sociétés sportives, complètement dérogatoire au droit commun des aides économiques 12 ( * ) .

Un régime spécifique est donc prévu par le code du sport.

L'article L. 113-1 du code du sport pose un principe d'interdiction de garanties d'emprunt ou de cautionnement aux associations sportives et aux sociétés anonymes mentionnées aux articles L. 121-1 et L. 122-2 du code du sport. Après avoir posé ce principe, la loi prévoit toutefois que les collectivités territoriales ou leurs groupements peuvent accorder leur garantie aux emprunts contractés en vue de l'acquisition de matériels ou de la réalisation d'équipements sportifs par des associations sportives dont le montant annuel des recettes n'excède pas 76 224,51 euros. De telles garanties d'emprunt doivent respecter les conditions relatives au montant annuel maximum des recettes et d'affectation de l'emprunt, celui-ci ne pouvant avoir pour objet de financer la rémunération des sportifs ou des salariés de l'association.

L'article L. 113-2 du code du sport dispose, quant à lui, que, pour des missions d'intérêt général, les associations sportives ou les sociétés qu'elles constituent peuvent recevoir des subventions des collectivités territoriales et de leurs groupements .

L'article R. 113-1 du même code prévoit, d'une part, que les montants maximum des subventions versées par l'ensemble des collectivités territoriales et leurs groupements, ne peuvent excéder 2,3 millions d'euros par saison sportive et précise, d'autre part, qu'il ne peut s'agir que d'assurer des missions d'intérêt général.

Ces missions sont les suivantes :

- la formation, le perfectionnement et l'insertion scolaire ou professionnelle des jeunes sportifs accueillis dans les centres de formations agréés ;

- la participation de l'association ou de la société à des actions d'éducation, d'intégration ou de cohésion sociale ;

- et la mise en oeuvre d'actions visant à l'amélioration de la sécurité du public et à la prévention de la violence dans les enceintes sportives.

Ces actions ne concernent donc pas le financement d'équipements sportifs, et les subventions peuvent être accordées aux associations ou aux sociétés sportives mais non pas aux holdings.

L'article L. 113-3 du code du sport dispose enfin que les sommes versées par les collectivités territoriales ou leurs groupements aux sociétés sportives en exécution de contrats de prestation de services , ou de toute convention dont l'objet n'entre pas dans le cadre des missions d'intérêt général visées à l'article L. 113-2, ne peuvent excéder un montant fixé par décret.

Associations sportives (association seule et association support)

Sociétés à objet sportif (EUSRL, SAOS, SASP, SEMSL)

Subventions versées au titre des missions d'intérêt général

OUI
Pour l'association support et la société qu'elle a créée
dans la limite de 2,3 millions d'euros
(ce plafond s'applique au montant cumulé des subventions
versées à l'association et à la société)

Subventions versées en faveur des organismes à but non lucratif

OUI
Pour l'ensemble des associations sportives

NON

Contrats de prestations de services

OUI

OUI
Dans la double limite de 30 % des recettes de la société
et de 1,6 million d'euros

Garanties d'emprunts

OUI
Pour les emprunts qui financent des acquisitions de matériels et d'équipements en faveur des associations sportives dont les recettes sont inférieures à 76 224,51 euros (500 000 francs)

NON

Autres garanties financières

NON

NON

Prêts

OUI
De manière exceptionnelle

NON

B. Les aides économiques de droit commun

S'agissant des aides économiques traditionnelles, l'article L. 1511-2 du code général des collectivités territoriales prévoit que « le conseil régional définit le régime et décide de l'octroi des aides aux entreprises dans la région qui revêtent la forme de prestations de services, de subventions, de bonifications d'intérêt, de prêts et avances remboursables, à taux nul ou à des conditions plus favorables que celles du taux moyen des obligations. Il peut déléguer la gestion de ces avances à des établissements publics » .

Si les départements, les communes et leurs groupements peuvent participer au financement de ces aides, c'est bien dans le cadre d'une convention passée avec la région, et avec leur accord. Celle-ci joue donc, dans ce domaine, un rôle de « chef de file ».

Dans ce cadre, les aides peuvent prendre, dans le respect du droit communautaire, différentes formes (prestations de service, subventions, bonification de taux d'intérêts, prêts et avances remboursables à taux nul ou à des conditions plus favorables que celles du taux moyen des obligations).

II - Le texte de la proposition de loi

Le présent article prévoit :

- d'une part, une dérogation aux principes fixés par les articles L. 113-1 à L. 113-3 et L. 122-11 susmentionnés du code du sport . En effet, l'impossibilité d'accorder des aides importantes aux sociétés sportives, et notamment des garanties d'emprunts, empêchera toute rénovation d'envergure dans le cadre d'un partenariat public-privé.

Si votre rapporteur peut comprendre les réticences de certains à ouvrir aux collectivités territoriales la possibilité d'aider les clubs professionnels, via un financement de l'équipement, il souhaite néanmoins souligner que les seuls cas où le problème ne se pose pas actuellement sont ceux où la collectivité prend en charge l'intégralité des travaux !

Si l'on souhaite que des partenariats publics-privés efficaces soient mis en oeuvre, et que les stades de l'Euro 2016 sortent de terre ou soient rénovés, cette possibilité doit être laissée ouverte aux collectivités territoriales.

Votre rapporteur tient à cet égard à souligner que les collectivités ont tout intérêt à soutenir le club dans la construction d'un équipement ambitieux (via une garantie d'emprunt par exemple) et à augmenter parallèlement la redevance que le club paie (cas des concessions ou des BEA) ;

- et, d'autre part, une dérogation à l'article L. 1511-2 du code général des collectivités territoriales qui prévoit que les régions sont des chefs de file en matière d'aide économique .

Votre rapporteur insiste sur le rôle majeur des villes candidates à l'accueil des compétitions de l'Euro 2016 , qui doivent pouvoir, dans ce cadre très spécifique, engager leur responsabilité sur les aides accordées en faveur des stades implantés sur leur territoire.

Il note enfin que les aides publiques aux infrastructures ne posent pas de problèmes de concurrence à la Commission européenne lorsqu'elles ont un caractère local et que l'aide n'a aucun impact économique sur le commerce intracommunautaire, ce qui devrait être le cas des subventions destinées aux enceintes sportives.

Votre commission a donc adopté cet article sans modification.

Article 3 - Dérogation à l'interdiction pour les personnes publiques de recourir à l'arbitrage

Le présent article tend à ouvrir la possibilité aux personnes publiques de recourir à l'arbitrage dans le cadre des contrats conclus pour l'organisation de l'Euro 2016.

I - Le droit existant

En l'état du droit, les personnes morales de droit public se voient, en principe, interdire d'avoir recours à l'arbitrage.

Comme le note le rapport dit « Lateboulle » de 2007, cette interdiction constitue un principe général du droit public français, qui prend appui sur des dispositions législatives figurant aujourd'hui à l'article 2060 du code civil.

Néanmoins, ce principe à valeur législative mais non constitutionnelle (CC 2 décembre 2004, n° 2005-506 DC, considérant n° 32) peut être remis en cause par la voie de dispositions législatives expresses .

De fait, des dispositions dérogatoires ont autorisé expressément la SNCF, la Poste et Réseau Ferré de France à recourir à l'arbitrage, le Gouvernement peut autoriser par décret certaines catégories d'établissements publics industriels et commerciaux à compromettre et les litiges relatifs à la liquidation des dépenses de travaux et de fournitures de l'État, des collectivités territoriales et des établissements publics locaux, ceux relatifs à l'exécution de contrats conclus entre des collectivités publiques et des sociétés étrangères « pour la réalisation d'opérations d'intérêt national », ceux relatifs aux fouilles en matière d'archéologie préventive et ceux relatifs aux contrats de partenariat peuvent aussi être réglés par la voie de l'arbitrage. Un certain nombre de ces dérogations sont mentionnées à l'article L. 311-16 du code de justice administrative.

Au vu du développement des relations économiques entres personnes morales de droit public et de droit privé, le rapport Lateboulle précité a noté que cette prohibition paraissait de fait difficile à maintenir.

L'arbitrage peut, en effet, constituer un mode alternatif de règlement juridictionnel des litiges adapté aux besoins des personnes publiques et de leurs partenaires privés. Il présente les avantages de la rapidité, dès lors que des délais stricts sont prévus pour le prononcé de la sentence arbitrale, et de la souplesse, puisque les parties peuvent déterminer ensemble certains aspects de la procédure.

Votre rapporteur rappelle, par ailleurs, que le recours à l'arbitrage doit être expressément prévu dans le contrat et qu'à son issue, la sentence constitue une décision juridictionnelle avec autorité de chose jugée.

II - Le texte de la proposition de loi

Le présent article prévoit que les contrats passés par les personnes morales de droit public, en lien avec la construction ou la rénovation des enceintes sportives destinées à accueillir l'Euro 2016 et des équipements connexes permettant le fonctionnement de celles-ci, ainsi qu'avec l'organisation et le déroulement de l'Euro 2016, puisse prévoir le recours à l'arbitrage.

Une limite importante est fixée : l'arbitre devra appliquée la loi française. Les actes unilatéraux (les procédures d'autorisation en matière d'urbanisme par exemple) ne pourront bien évidemment pas faire l'objet d'un arbitrage.

Cet article peut s'appliquer à l'ensemble des 11 stades précités.

Votre rapporteur tient à souligner que ce dispositif existe déjà à titre définitif pour les contrats de partenariat et que l'urgence spécifique liée à l'engagement de la France de livrer les stades à la fin de l'année 2014 justifie pleinement cette disposition.

Votre commission a adopté cet article sans modification.

Article 4 - Gage financier

Le présent article constituait un « gage de charges », admis dans la procédure parlementaire, qui permet le dépôt d'une proposition de loi de prévoyant des charges nouvelles au sens de l'article 40 de la Constitution.

Le Gouvernement ayant « levé le gage », l'article 4 a été supprimé au stade de l'examen en commission du texte à l'Assemblée nationale.

Votre commission a maintenu cette suppression.

* *

*

Sur proposition de son rapporteur, la commission adopte l'ensemble de la proposition de loi sans modification, les groupes socialiste et RDSE s'abstenant et le groupe communiste républicain, citoyen et du parti de gauche votant contre.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le 3 avril 2011, sous la présidence de M. Jacques Legendre, président, la commission procède à l'examen du rapport et à l'élaboration du texte proposé par la commission pour la proposition de loi n° 363 (2010-2011), adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relative à l'organisation du championnat d'Europe de football de l'UEFA en 2016.

M. Alain Dufaut , rapporteur . - Par sept voix contre six à la Turquie, la France a obtenu le 28 mai 2010 l'organisation du championnat d'Europe de football de 2016. Cette compétition, organisée tous les quatre ans depuis 1960, est le troisième évènement sportif mondial en termes d'impact médiatique. C'est une chance, une joie et un honneur de l'accueillir en France.

La proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale n'est en rien un dispositif d'exception, dérogeant fondamentalement au droit commun pour répondre à un engagement ponctuel de la France. Elle répond au contraire à un besoin majeur du sport français, l'organisation d'une coupe d'Europe offrant l'opportunité d'expérimenter de nouveaux modes de partenariat public/privé (P.P.P.) au service d'équipements sportifs à rénover ou à moderniser.

Nos stades sont à la fois de faible capacité et archaïques. Alors que le taux de remplissage est plutôt bon - plus de 75 % en 2008 contre moins de 60 % en Italie -, la capacité moyenne d'accueil du public s'établit à moins de 30 000 places dans le championnat de France de football contre plus de 45 000 en Allemagne. L'âge moyen des stades était en 2008 de 7 ans en Allemagne, de 11 en Angleterre, et de 17 en France. La qualité de l'accueil est donc insuffisante en termes de confort et d'espaces réceptifs, avec notamment seulement 4 % de la surface totale des stades consacrés aux sièges à prestations, contre 8 à 12 % pour les standards européens. La multifonctionnalité, élément crucial de rentabilité des stades est très insuffisante. La plupart de nos grands stades ne sont occupés que deux jours par mois pendant neuf mois, soit une vingtaine de jours par an avec les coupes. C'est contraire à une bonne utilisation de l'argent public. Enfin, comme l'avait noté notre collègue Pierre Martin dans son rapport sur les supporters, les normes de sécurité ne sont pas toujours respectées.

En conséquence le championnat de France qui profite peu de la billetterie - autour de 15 % du chiffre d'affaires - est « télé-dépendant » : avec 57 % de leurs ressources provenant des droits télévisuels, les clubs sont donc à la merci d'un retournement du marché. En un mot, il n'y pas de modèle économique du sport professionnel en France. On peut se féliciter du contrôle de gestion rigoureux exercé sur les clubs, mais il faut s'inquiéter du manque de compétitivité des clubs professionnels Car, en dépit des salaires parfois indécents versés aux sportifs professionnels, notamment aux footballeurs, ce ne sont pas des groupes « ultracapitalistisques » aux taux de rentabilité vertigineux et beaucoup de clubs de football terminent la saison en déficit.

Le sport professionnel est devenu un spectacle, dont l'objet est la rentabilité. Mais il continue à jouer un rôle essentiel pour les collectivités territoriales. Je vous renvoie à cet égard au rapport présenté devant notre commission par notre ancien collègue Bernard Murat sur les clubs sportifs et les collectivités territoriales : les clubs assurent une notoriété très importante aux communes où ils sont implantés, ils créent un ciment d'identification locale et du lien social, du fait de la mixité sociale dans les stades et de l'atmosphère qui y règne la plupart du temps - il suffit de voir ce qui se passe dans les virages lors d'un match de l'OM pour s'en convaincre. Le sport professionnel renforce aussi la pratique sportive de la population. Le stade lui-même est, comme le note le rapport de la commission « Grands stades », « un outil de développement de l'attractivité des villes et des territoires, un facteur de contribution à la croissance économique, voire une opportunité de donner un nouvel essor à des quartiers urbains situés alentour du stade », comme l'illustre le Stade de France à Saint-Denis. D'où l'intérêt des projets de rénovation et de construction de stades pour 2016, qui rencontrent des obstacles depuis de longues années.

Les causes en sont d'abord historiques. De nombreux rapports sont parus dans la dernière décennie sur la question des équipements sportifs : celui de Maître Guillot pour le ministère des sports, celui d'Éric Besson sur la compétitivité du football français, celui de la commission « Grands stades » présidée par Philippe Seguin, le rapport « Arena » de Daniel Constantini et enfin celui de David Douillet. Tous font le même constat de la spécificité française de la gestion publique des stades qui sont historiquement la propriété de la collectivité territoriale d'implantation - dans 90 % des cas, contre 59 % dans l'Europe élargie. La coexistence entre obsolescence des stades et propriété publique n'est pas une coïncidence. Le rapport Seguin explique que le stade est, dans notre pays, davantage perçu comme un enjeu politique que comme un centre de ressources et de profits. A partir du moment où le club résident est un simple locataire sans droits réels ni marges de manoeuvre de gestion du stade, il a peu d'intérêt à exploiter économiquement l'équipement, à y attirer des supporters et à moderniser l'infrastructure. Et même si les clubs le souhaitent, ils sont souvent confrontés à l'incapacité financière de la collectivité à rénover, voire simplement à entretenir l'installation sportive. Je suis bien placé pour le savoir avec l'accession à la première division de l'équipe d'Arles-Avignon qui a coûté 8 millions pour porter le stade à 17 000 places.

Ensuite, il y a des causes juridiques. Il n'existe pas de cadre juridique unique adapté à l'ensemble des projets, le choix dépendant de chaque situation : rénovation ou construction, maîtrise d'ouvrage publique ou privée, mode de financement.

La maitrise d'ouvrage publique est un outil simple mais de moins en moins utilisé en raison de la lourdeur de la gestion des projets, de la charge financière pour les collectivités, qui payent l'intégralité des travaux, et du rôle secondaire laissé aux clubs. Parmi les stades concernés par l'organisation de l'Euro, le Stadium de Toulouse et Geoffroy-Guichard de Saint-Etienne seront rénovés sous cette formule, avec un investissement très important de la collectivité.

Les concessions et les contrats de partenariat permettent de confier à un prestataire la gestion du projet dans son ensemble et d'étaler les investissements publics dans le temps, mais les clubs n'ont toujours pas la maîtrise du projet ni de droits sur l'infrastructure.

Les deux régimes juridiques les plus à la mode sont donc les partenariats public-privé (PPP) et les baux emphytéotiques administratifs (BEA). Le PPP permet d'associer la collectivité, l'opérateur et le club à la vie quotidienne du stade, aux conditions de son exploitation, et de partager coûts et recettes. Il semble que cette formule soit notamment adaptée en cas de construction d'un nouveau stade. Quatre des stades concernés par l'Euro sont ou seront rénovés ou construits dans ce cadre : le grand stade de Lille, le nouveau stade bordelais, celui de Nice et le stade Vélodrome de Marseille.

Le bail emphytéotique administratif séduit par sa souplesse et par la possibilité qu'il offre au club de mener une exploitation ambitieuse du stade. La collectivité reste propriétaire et peut imposer le respect d'un certain nombre de règles. Le rapport Seguin notait cependant les incertitudes juridiques entourant ce bail et c'est la raison pour laquelle le BEA spécifique « équipements sportifs » a depuis été introduit par la loi de février 2009 pour l'accélération des programmes de construction et d'investissement publics et privés. La présente proposition de loi a pour objet principal d'assouplir encore le régime du BEA, conformément aux propositions du rapport Seguin, notamment en raison des spécificités entourant son mode de financement. Les travaux de rénovation du Parc des Princes, du stade Bollaert de Lens et du stade Marcel-Picot de Nancy devraient être exécutés sous cette formule.

Bien que la construction entièrement privée - comme pour le stade de Lyon - ne pose pas de problème particulier, il est extrêmement difficile de monter ce type de projets. Ceux de Strasbourg et de Nice ont été abandonnés et celui de l'Olympique Lyonnais se heurte à des obstacles importants : vous avez tous lu dans la presse les échanges entre Jean-Michel Aulas et la ministre des sports. Il faudra nous interroger sur l'éventuelle existence de causes culturelles au faible nombre de projets privés d'intérêt général, dans le domaine du sport ou même de la culture - comme l'illustre l'échec du projet de la fondation Pinault sur l'île Seguin.

Bref, il y a encore des difficultés à construire des stades en dépit de leur rôle en matière de compétitivité du sport professionnel et d'aménagement du territoire. Par conséquent, l'organisation de l'Euro 2016 est une occasion historique pour rénover et moderniser nos stades. Le député Bernard Depierre, auteur de la proposition de loi, a choisi de mettre en place une forme « d'expérimentation significative d'un nouveau mode de financement des grandes infrastructures nationales », dont j'approuve pleinement la forme et le fond.

Le cahier des charges de l'UEFA est exigeant mais il répond à des besoins réels. Neuf stades doivent être proposés dont deux d'au moins 50 000 places - ils existent déjà ; ce sont le Stade de France et le Stade Vélodrome à Marseille - trois de 40 000 places - Lens, Paris, Lille, Bordeaux ou Lyon - et quatre de 30 000 places - Nice, Saint-Etienne, Toulouse, Nancy.

Trois types d'exigences sont ensuite définies : spatiales, techniques et fonctionnelles. Les points noirs des équipements français sont les espaces dits « hospitalité » et le bloc « tribunes de presse et installations médias », à cause de l'ancienneté de nos stades. Les travaux de rénovation se concentreront donc sur ces objectifs, qui sont en outre des éléments majeurs de la rentabilité des stades. Le confort des stades n'est pas non plus adapté au cahier des charges de l'Euro. Son amélioration ne pourra qu'être facteur d'attraction des familles dans les enceintes sportives et, donc, d'amélioration de leur performance économique. Il faut aussi y améliorer la sécurité.

Outre que ces rénovations auront un impact positif sur la compétitivité du sport professionnel français, l'Euro 2016 aura des conséquences économiques positives, chiffrables à plusieurs centaines de millions d'euros.

La présente proposition de loi devrait permettre de débloquer certains dossiers. Comme je l'ai indiqué, la voie la plus prometteuse en matière de rénovation des stades, pour des raisons historiques et culturelles, est le financement mixte entre le public et le privé. L'article premier permet ainsi aux baux emphytéotiques administratifs, conclus dans le cadre de projets de construction ou de rénovation de stades destinés à accueillir l'Euro 2016, de devenir éligibles aux mêmes aides versées par les collectivités territoriales que les projets réalisés sous le régime de la loi sur la maîtrise d'ouvrage publique ou dans le cadre des contrats de partenariat. Les stades de Nancy et Lens dont la rénovation est actuellement bloquée en raison de l'incapacité des collectivités à intervenir financièrement dans le cadre des BEA pourraient ainsi être modernisés. La rénovation du Parc des Princes pourrait aussi être concernée. Cet article permettra qu'une partie des 150 millions du CNDS dégagés par la dernière loi de finances pour les stades serve aux trois stades mentionnés et à leurs équipements annexes. Il est en outre prévu que le versement des subventions, redevances et autres participations financières puisse être échelonné en fonction de la durée du bail.

L'article 2 prévoit que les collectivités territoriales et leurs groupements puissent, de façon dérogatoire, apporter des aides aux projets de construction ou de rénovation des onze stades mentionnés dans la candidature française. Il déroge d'une part, à l'article L. 1511-2 du code général des collectivités territoriales qui confie au conseil régional la définition du régime ainsi que la décision d'octroyer des aides aux entreprises ; dans le cas des stades, projets importants et structurants pour les communes, il peut être opportun d'élargir le régime d'aides et de permettre leur autonomisation ; pour l'organisation de l'Euro, il est impératif de croiser les financements. D'autre part, cet article 2 prévoit une dérogation aux articles L. 113-1 à L. 113-3 et L. 122-11 du code du sport qui instituent des plafonds d'aide et interdisent les garanties des collectivités territoriales aux associations et sociétés sportives. Tous les projets faisant intervenir un opérateur privé - c'est-à-dire tous sauf Toulouse - sont potentiellement concernés par cet article.

L'article 3 permet enfin aux contrats en lien avec les stades destinés à accueillir l'Euro, avec leurs équipements connexes et avec l'organisation et le déroulement de l'Euro, passés par des personnes morales de droit public, de prévoir le recours à l'arbitrage avec application de la loi française. Cet article, qui peut potentiellement s'appliquer à tous les stades, est une dérogation au principe de droit public d'interdiction de clauses compromissoires dans les contrats de droit public. Outre qu'on peut s'interroger sur la pertinence d'une telle règle, il ne pourra y avoir arbitrage que sur des contrats et non sur des actes unilatéraux, comme les permis de construire. L'objectif est d'éviter les retards dans la construction des nouveaux stades, qui doivent être livrés impérativement à la fin de l'année 2014.

Je suis convaincu que ces dispositifs dérogatoires, notamment ceux prévus aux articles 1 er et 3 ont un réel avenir, et que leur utilisation dans le cadre de l'Euro 2016, justifiée par l'urgence de la situation, sera un test grandeur nature parfait pour savoir s'ils devront ultérieurement être étendus à l'ensemble des stades et enceintes sportives. Notre réflexion sur les stades, et plus largement sur les équipements sportifs, est loin d'être terminée. D'autres facilitations de procédure et améliorations du cadre juridique devront être examinées à l'avenir. J'ai auditionné le 30 mars dernier, le Président de l'Association nationale des ligues de sport professionnelles, qui m'a fait part, en accord avec les 5 fédérations de sports collectifs qu'il représente, de son souhait de voir cette loi adaptée à l'ensemble des enceintes sportives, stades et gymnases,

Dans un premier temps, je vous propose donc d'adopter cette proposition de loi sans la modifier. Elle est nécessaire pour la réussite de l'Euro 2016 en France. Elle est surtout un impératif pour enfin moderniser nos équipements sportifs et en faire plus que des lieux de sport : des lieux de spectacle, de vie, de rassemblement, de mixité.

M. Daniel Percheron. - Je félicite le rapporteur pour la clarté et la conviction de son exposé. En tant que lensois je connais bien ce dont je vais parler - chose assez rare dans la vie politique... Le stade Bollaert a été le stade d'une immense entreprise publique, les Houillères. Il a failli disparaître au tournant des années 70 avec la débâcle de l'entreprise. Mais il a été maintenu par une ville parmi les plus pauvres de France ; l'arrondissement de Lens est celui dont la base productive est la plus faible dans notre pays : 1 000 euros par habitant et par an contre 5 600 en moyenne pour l'Île-de-France. Bollaert est donc davantage qu'un stade, c'est un lieu historique et magique de cohésion sociale, notamment avec ses 10 000 places à 7 euros. Nous avons été candidats à l'Euro 1984, sur fonds municipaux : réussite complète ! Nous avons été candidats à la Coupe du monde 1998, sur financement des collectivités locales et de l'État : réussite complète ! Et aujourd'hui nous sommes candidats à l'Euro 2016 : avec la formule BEA, ce texte permettra aux collectivités locales d'être à la hauteur de l'évènement. Je soutiens cette loi passionnante. Nous nous sommes engagés à hauteur de 50 millions sur les 100 millions que coûtera la rénovation du stade, nécessaire pour présenter notre candidature. La grève des footballeurs français s'efface devant l'obtention de l'Euro 2016 par la fédération de Jean-Pierre Escalettes. C'est un formidable évènement pour notre bassin minier comme pour toute la France.

M. Jean-Jacques Lozach. - Tout le monde se réjouit que la France organise l'euro 2016, notamment parce qu'elle nous donne l'occasion de rattraper notre retard en équipements sportifs. Cela dit, ce texte ne suscite pas en nous un enthousiasme délirant. C'est un texte de circonstance et dérogatoire au regard des codes du sport et des collectivités territoriales. Un seul exemple : il remet en question un axe fort de la décentralisation, le rôle de chef de filat de la région en matière d'activité économique. Si ce texte est adopté, tout le monde pourra intervenir comme il le souhaite. Un des piliers de la décentralisation est ainsi insidieusement remis en cause. L'objectif est en réalité de solliciter encore davantage les collectivités locales. Car que pèsent les 150 millions de l'État au regard du 1,8 milliard total ? D'autant que ces 150 millions sont ponctionnés sur le CNDS dont la vocation première n'est pas de financer le sport professionnel. Un récent rapport de la Cour des comptes invite les collectivités à la plus grande prudence dans l'exploitation future de ces équipements, donnant l'exemple de Nancy qui, pour ses 12 000 spectateurs disposera d'un stade de 30 000 places. On invoque certains rapports - notamment celui de Philippe Seguin - qui sont des appels à entreprendre une véritable politique nationale alors que, avec ce texte, on en reste au coup par coup et au cas par cas. Les exigences de l'UEFA sont si draconiennes que, dorénavant, à part quelques nations très puissantes, les autres pays sont obligés de s'associer pour organiser l'Euro. Pour toutes ces raisons, nous sommes très réservés vis-à-vis de ce texte.

M. Jean Louis Masson. - Cette proposition de loi ne me convient pas. D'abord comment est-elle compatible avec l'article 40 de la Constitution ? Si elle est acceptable au regard de cet article, alors qu'on nous permette de déposer des amendements sans leur opposer cet article ! Pourrons-nous le faire ? Cette application à deux vitesses de l'article 40 est scandaleuse.

Ensuite, les clubs de football sont des entreprises commerciales soumises à la concurrence. Compte tenu des règles européennes en la matière, je m'étonne qu'on accepte que certains clubs bénéficient de telles distorsions de concurrence par rapport aux autres clubs. En définitive, il y a quatre catégories de clubs : ceux qui n'ont pas postulé, les 15 ou 16 qui, ayant postulé, n'ont pas été parmi les 12 retenus, ceux qui, parmi ces douze, n'auront pas été retenus par l'UEFA, enfin les neuf heureux élus. Pourquoi douze et non pas 9, ou tous ceux qui ont postulé?

J'approuve le rapport Seguin mais il n'y a pas de raison de faire une loi d'exception pour 9 clubs. Si on légifère, il faut le faire pour tout le monde, pour tous les clubs et pour tous les sports, d'autant que le football n'est pas un sport exemplaire quand on pense au salaire exorbitant des joueurs et à certains de leurs comportements. Et qu'on n'invoque pas l'urgence : il serait très facile de faire une loi générale en supprimant dans cette proposition de loi toutes les références aux clubs retenus par l'UEFA.

M. Jacques Legendre , président . - Il ne vous a pas échappé que ce texte nous vient de l'Assemblée nationale : l'article 40 n'a pas été invoqué parce que le gouvernement y a levé le gage.

M. Claude Bérit-Débat. - Je me réjouis moi aussi que cette manifestation soit organisée par la France. Mais, en dérogeant aux codes des collectivités territoriales et du sport ainsi qu'aux règles des BEA, on nous propose une loi de circonstance. Monsieur le rapporteur, vous balayez bien rapidement le problème du chef de filat. Toutes les collectivités vont pouvoir intervenir ! A l'occasion de la réforme des collectivités, nous avons longuement débattu de leurs compétences. Les collectivités ici sollicitées, y compris les EPCI, auront-elles encore la compétence sportive en 2015 ? Et on les sollicite ! Les financements croisés posent problème : nous sommes en pleine réforme de la taxe professionnelle et l'autonomie fiscale des collectivités se réduit de plus en plus. Quant à l'État, il ponctionne le CNDS pour construire des stades de football alors que, lorsqu'un EPCI lui demande de l'aider à construire une piscine, ce CNDS refuse au motif qu'il doit financer l'Euro 2016. Je demeure dubitatif devant un texte qui sollicite encore les collectivités et qui est foncièrement dérogatoire : trois articles, trois dérogations ! Je suis enthousiaste à l'idée d'accueillir l'Euro, mais je le suis beaucoup moins pour voter cette proposition de loi.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - Cet évènement populaire est maintenant considéré comme l'occasion d'organiser un vrai régime d'exception pour la construction des enceintes sportives. Désormais, un opérateur privé pourra obtenir des subventions - même s'il n'agit pas dans l'intérêt général et même s'il ne connaît pas de difficultés économiques. Les deux partenaires du contrat pourront aussi contourner le juge administratif pour gagner du temps en cas de litige. Tout cela s'inscrit dans le mouvement général de casse des règles présidant aux modalités d'utilisation des deniers publics. La création des PPP en a été une étape importante, surtout après la parution de l'ordonnance de 2007 permettant aux cocontractants privés d'obtenir des subventions et de recourir à l'arbitrage. Nous n'approuvons pas le présent texte qui aligne le régime des BEA sur celui des PPP en matière de subvention comme d'arbitrage.

M. Alain Dufaut , rapporteur . - Je suis tout à fait en phase avec vous, monsieur Percheron : le stade Bollaert ne sera pas rénové si cette proposition de loi n'est pas votée. Certes, monsieur Lozach, c'est un texte de circonstance et de dérogation mais il permettra une expérience qui, de la construction des grands stades de football, pourra être étendue à tous les stades et gymnases. Il est vrai que la compétence du développement économique appartient à la région ; la compétence des équipements culturels et sportifs a été maintenue au département et à la région. Madame Gonthier-Maurin, la construction ou la rénovation de ces grands stades est tout à fait d'intérêt général. Les 150 millions fournis par l'État sont ponctionnés sur les fonds du CNDS ? Ce n'est qu'en partie vrai car il est prévu une contribution supplémentaire de 0,3 % sur les paris sportifs. Cette proposition de loi permettra une véritable expérimentation grâce à laquelle on pourra aller plus loin. Car il faudra continuer à légiférer en ce domaine, sauf à maintenir l'actuel retard de nos équipements sportifs. Enfin, sur l'article 40, monsieur Masson, le président Legendre a répondu.

M. Serge Lagauche. - Notre groupe n'a pas pris position. Nous nous abstiendrons donc sur l'ensemble des amendements de Gérard Collomb et sur le texte du rapporteur.

Examen des articles

M. Alain Dufaut , rapporteur . - Les amendements de Gérard Collomb ciblent particulièrement la construction du grand stade de Lyon. Ce projet, entièrement privé, bute sur des problèmes administratifs et financiers et ces amendements visent à lever ces obstacles.

Article additionnel avant l'article premier

M. Alain Dufaut , rapporteur . - L'amendement n° 2 de M. Collomb prévoit que les stades destinés à accueillir l'Euro2016 seront présumés comme étant d'intérêt général. En jurisprudence, il ne fait aucun doute qu'un stade est d'intérêt général. Amendement inutile ; donc avis défavorable.

L'amendement n° 2 est rejeté.

Les articles 1 er et 2 sont adoptés sans modification.

Articles additionnels après l'article 2

M. Alain Dufaut , rapporteur . - L'amendement n° 3 anticipe l'entrée en vigueur des dispositions de la loi Grenelle 2 sur le droit des enquêtes publiques. Avis défavorable à cet amendement de portée extrêmement réduite, compte tenu de mon souhait de voir cette loi adoptée sans modification.

L'amendement n° 4, fixant notamment un délai de jugement au Conseil d'État paraît totalement exorbitant du droit commun, alors que de nombreux actes administratifs sont aussi importants que la construction des stades. Par ailleurs, cet amendement, ainsi que les deux suivants, relèvent du domaine règlementaire. Avis défavorable.

L'amendement de repli n° 5 appelle les mêmes objections que le précédent.

L'amendement n° 6 permettrait d'encadrer les délais de jugement en ne donnant pas d'effet suspensif aux recours formés contre les actes administratifs en lien avec la construction des enceintes sportives destinées à accueillir l'Euro 2016. Ce serait totalement dérogatoire au droit commun que de rendre le Conseil d'État compétent en premier et dernier ressort pour l'ensemble des actes administratifs. Avis défavorable.

Les amendements n° 3, 4, 5 et 6 sont rejetés.

L'article 3 est adopté sans modification.

Articles additionnels après l'article 3

M. Alain Dufaut , rapporteur . - Avis défavorable à l'amendement n° 7 : un rapport d'application rendu dans six ans serait trop tardif et un simple engagement de la ministre en séance sera suffisant. Avis également défavorable au n° 8 qui n'a pas de valeur normative.

Les amendements n° 7 et 8 sont rejetés.

L'article 4 demeure supprimé.

Mme Françoise Laborde. - Sur l'ensemble de la proposition de loi le groupe du RDSE s'abstiendra.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - Nous voterons contre cette proposition de loi.

La proposition de loi est adoptée sans modification.

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Association nationale des ligues de sport professionnel (ANLSP) :

M. Patrick WOLFF, président

M. Frédéric BESNIER, directeur

Ministère des sports (cabinet de la ministre) et Direction des sports :

M. Bertrand JARRIGE, directeur des sports

M. Laurent HANOTEAUX, chef de la mission des affaires juridiques et contentieuses à la direction des sports

M. Jérome PARDIGON, conseiller parlementaire

M. Bertrand PIREL, conseiller technique


* 1 Ce chiffre est tiré du rapport de la commission « grands stades », présidée par M. Philippe Seguin. L'étude de la société Sportfive, Investissement stades , de décembre 2009, avance même le chiffre de 66 ans de moyenne d'âge.

* 2 Faut-il avoir peur des supporters ? Rapport d'information n° 467 (2006-2007) de MM. Bernard Murat et Pierre Martin, fait au nom de la commission des affaires culturelles.

* 3 Voir à cet égard l'analyse de Fréderic Bolotny et Dominique Debreyer sur la dimension économique des stades : http://www.lnr.fr/IMG/pdf/5_dimension_economique_des_stades_F-Bolotny_D-Debreyer.pdf.

* 4 Cour des comptes, Rapport public thématique, Les collectivités territoriales et les clubs sportifs professionnels, décembre 2009.

* 5 Introduit par l'article 28 de la loi n° 2009-179 du 17 février 2009 pour l'accélération des programmes de construction et d'investissement publics et privés.

* 6 Il est possible à titre d'exemple de rappeler l'échec sévère du projet de la fondation Pinault sur l'île Seguin.

* 7 Tout en minorant de 19 % environ les taux de remplissage actuels pour prévenir les aléas conjoncturels pouvant ralentir ce type d'investissements d'une part et d'autre part pour intégrer le fait qu'un volume plus élevé de places induira un taux de remplissage plus faible, puis en indexant le prix des places uniquement sur l'inflation (+2 % par an).

* 8 Avis n° 92 (2007-2008) de MM. Bernard MURAT et Pierre MARTIN, sur le projet de loi de finances pour 2008, fait au nom de la commission des affaires culturelles. Voir notamment la partie intitulée : une communauté d'intérêt légitimant le soutien local ?

* 9 Voir, à cet égard, l'étude très complète d'Ernst&Young, commandée par l'Union des clubs professionnels de football (UCPF), Des clubs et des Hommes, réalités économiques et sociales du football professionnel , 1 er Baromètre « Foot Pro », Impacts économiques et sociaux », 2010.

* 10 Impact économique et utilité sociale de la Coupe du monde de rugby 2007 en France, étude réalisée par le centre de droit et d'économie du sport de Limoges, juin 2008.

* 11 La personne publique n'étant pas maître d'ouvrage dans le cadre d'un contrat de partenariat, des incertitudes demeuraient quant à la possibilité de verser des subventions au partenaire public.

* 12 Aides prévues par les dispositions du titre I er du livre V de la première partie du code général des collectivités territoriales ainsi que par les articles L. 2251-3 et L. 3231-3 du même code.

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