Rapport n° 207 (2012-2013) de M. Bernard PIRAS , fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, déposé le 12 décembre 2012

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N° 207

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2012-2013

Enregistré à la Présidence du Sénat le 12 décembre 2012

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE , autorisant l'approbation du protocole n° 3 à la convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités ou autorités territoriales relatif aux groupements eurorégionaux de coopération ( GEC ),

Par M. Bernard PIRAS,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Louis Carrère , président ; MM. Christian Cambon, Jean-Pierre Chevènement, Robert del Picchia, Mme Josette Durrieu, MM. Jacques Gautier, Robert Hue, Jean-Claude Peyronnet, Xavier Pintat, Yves Pozzo di Borgo, Daniel Reiner , vice-présidents ; Mmes Leila Aïchi, Joëlle Garriaud-Maylam, MM. Gilbert Roger, André Trillard , secrétaires ; M. Pierre André, Mme Kalliopi Ango Ela, MM. Bertrand Auban, Jean-Michel Baylet, René Beaumont, Pierre Bernard-Reymond, Jacques Berthou, Jean Besson, Michel Billout, Jean-Marie Bockel, Michel Boutant, Jean-Pierre Cantegrit, Luc Carvounas, Pierre Charon, Marcel-Pierre Cléach, Raymond Couderc, Jean-Pierre Demerliat, Mme Michelle Demessine, MM. André Dulait, Hubert Falco, Jean-Paul Fournier, Pierre Frogier, Jacques Gillot, Mme Nathalie Goulet, MM. Alain Gournac, Jean-Noël Guérini, Joël Guerriau, Gérard Larcher, Robert Laufoaulu, Jeanny Lorgeoux, Rachel Mazuir, Christian Namy, Alain Néri, Jean-Marc Pastor, Philippe Paul, Bernard Piras, Christian Poncelet, Roland Povinelli, Jean-Pierre Raffarin, Jean-Claude Requier, Richard Tuheiava, André Vallini .

Voir le(s) numéro(s) :

Assemblée nationale ( 13 ème législ.) :

3317 , 3996 et T.A. 769

Sénat :

132 (2011-2012) et 208 (2012-2013)

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

La France a ratifié en 1984 la convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités ou autorités territoriales, conclue à Madrid en 1980 sous l'égide du Conseil de l'Europe.

Depuis cette date, un protocole additionnel, en 1995, et un protocole n° 2, en 1998, ont renforcé les dispositions du texte initial. La France a ratifié ces deux textes.

Le présent protocole, troisième ajout à la convention de Madrid, conclu à Utrecht en 2009, est relatif aux groupements eurorégionaux de coopération (GEC).

Il prend acte de l'adoption du règlement européen du 5 juillet 2006 relatif aux groupements européens de coopération territoriale (GECT), et permet d'étendre aux pays non membres de l'Union européenne un dispositif de coopération analogue à celui des GEC.

I. L'ESSOR DE LA COOPÉRATION DÉCENTRALISÉE A CONDUIT À ÉTABLIR UN CADRE JURIDIQUE ADAPTÉ À UNE COOPÉRATION ENTRE COLLECTIVITÉS TRANS-FRONTALIÈRES

La coopération décentralisée regroupe l'ensemble des actions de coopération internationale menées par des collectivités territoriales françaises et des autorités territoriales étrangères.

Son champ d'application est potentiellement très large tant du point de vue géographique, car elle ne se limite pas à des coopérations entre espaces contigus, que dans son contenu, car elle peut viser à de simples relations d'amitié, ou à des actions d'aide technique au développement, comme la réalisation en commun d'actions et d'opérations nécessaires au développement économique, culturel ou social des partenaires locaux.

La coopération décentralisée « transfrontalière » constitue l'une des modalités de la coopération décentralisée. Elle tend à la mise en commun de services et d'équipements pour la réalisation de projets de développement et d'aménagement de l'espace . Dans ce cadre, les collectivités françaises ou leurs groupements s'engagent, dans la limite de leurs compétences, avec des collectivités étrangères voisines, au sein d'organismes dotés de la personnalité juridique et de l'autonomie budgétaire. Cette forme de coopération, particulièrement intégrée, s'inscrit dans une dynamique proche de l'intercommunalité.

A. LE RÔLE MOTEUR DU CONSEIL DE L'EUROPE

Les travaux du Conseil de l'Europe, fondé en 1949 par le traité de Londres et regroupant aujourd'hui 47 Etats 1 ( * ) , dont les 27 membres de l'Union européenne, ont appuyé cette coopération transfrontalière par l'élaboration des trois textes déjà en vigueur :

- convention de Madrid du 21 mai 1980 . C'est le texte fondateur de la coopération décentralisée transfrontalière en Europe, comportant des dispositions peu contraignantes pour les Etats signataires, qui s'engagent à faciliter et à promouvoir la coopération décentralisée transfrontalière, sans prévoir la possibilité de créer des structures juridiques spécifiquement dévolues à ces relations transfrontalières.

- protocole additionnel (n° 1) à cette convention-cadre européenne, signé à Strasbourg le 9 novembre 1995 qui reconnaît aux collectivités territoriales le droit de créer, sous certaines conditions, des organismes de coopération transfrontalière ayant ou non la personnalité juridique.

- protocole n° 2 à la convention-cadre européenne signé à Strasbourg le 5 mai 1998 visant à inscrire les relations, non plus frontalières, mais interterritoriales, dans un cadre juridique adapté, et dérivé des textes précédents.

B. DES ACCORDS BI OU MULTILATÉRAUX ONT CONDUIT À LA CRÉATION DE STRUCTURES JURIDIQUES FACILITANT LA COOPÉRATION TRANSFRONTALIÈRE

C'est le cas de l'accord de Rome, conclu en 1993 entre la France et l'Italie, du traité de Bayonne, conclu en 1995 entre la France et l'Espagne, et de l'accord de Karlsruhe de janvier 1996, qui associe la France, l'Allemagne, le Luxembourg et la Suisse.

Ces accords ont permis la constitution de groupements locaux de coopération transfrontalière (GLCT) :

- groupements franco-allemands : 7 en activité, 4 en projet,

- groupements franco-belges : 1 en activité,

- groupements franco-suisses : 3 en activité, 1 en projet, et de groupements européens de coopération territoriale (GECT) :

- GECT frontière franco-belge : deux groupements en activité (« Eurométropole Lille-Kortrijk-Tournai » et « Plateforme transfrontalière Flandre occidentale Dunkerque-Côte d'Opale »),

- GECT frontière franco-belgo-luxembourgeoise : un groupement en activité (Autorité de gestion du programme INTERREG IV A Grande Région 2007-2013),

- GECT frontière franco-allemande : deux groupements en activité (« Eurodistrict Strasbourg-Ortenau » et « Eurodistrict Saar-Moselle »),

- GECT frontière franco-espagnole : deux groupements en activité (« Pyrénées-Méditerranée » et « Hôpital transfrontalier de Cerdagne ») ; cinq groupements en projet,

- GECT frontière franco-italienne : deux groupements en projet.

II. LE PRÉSENT PROTOCOLE ÉTEND LE CHAMP DES POSSIBILITÉS DE COOPÉRATION AU REGARD DES TEXTES EN VIGUEUR

A. UN TEXTE OFFRANT UN CADRE JURIDIQUE ADAPTÉ À DE NOUVELLES POSSIBLITÉS DE COOPÉRATION

Le protocole n° 3 vise à faciliter le développement de dispositifs de coopération décentralisée en offrant des possibilités supplémentaires aux parties intéressées.

Il modifie le champ géographique potentiel des coopérations en l'étendant à des personnes morales relevant d'Etats membres du Conseil de l'Europe, mais non inclues dans le règlement européen sur les GECT, et en offrant à ceux-ci des possibilités que leur droit interne n'offrait pas encore.

Par ailleurs, le groupement euro-régional de coopération permet d'associer, dans une relation bilatérale, une entité relevant d'un pays tiers à l'Union européenne, membre du Conseil de l'Europe, avec un seul pays membre de l'Union. Le GECT, lui, requiert la participation d'au moins deux entités d'un Etat membre de l'Union européenne pour pouvoir associer une entité d'un Etat non membre. Cette nouvelle possibilité est donc un facteur de souplesse dans l'élaboration des partenariats.

B. UN PROTOCOLE DONT LES DISPOSITIONS ÉTENDENT LE CHAMP DES TEXTES DÉJÀ EN VIGUEUR EN MATIÈRE DE COOPÉRATION DÉCENTRALISÉE

Ces articles sont ainsi présentés et commentés par le « rapport explicatif » rédigé par le Conseil de l'Europe :

L'article premier est rédigé en termes généraux de manière à permettre une souplesse maximale dans la coopération, tout en la limitant sur deux points importants. Tout d'abord, il précise d'emblée que le présent protocole ne crée pas de nouveaux domaines de compétence. Les collectivités locales et régionales conservent leurs domaines de compétences propres, tels que définis par les dispositions constitutionnelles et législatives des Etats membres ; par conséquent, la coopération se limite à ces seuls domaines de compétence. En deuxième lieu, la coopération nécessitant, sur le plan juridique, aussi la capacité de conclure des accords, cette restriction garantit également que le présent protocole ne confère aux collectivités ou autorités locales ou régionales aucune capacité contractuelle supplémentaire.

Le GEC est obligatoirement établi sur le territoire d'un Etat membre du Conseil de l'Europe, qui est en même temps Partie au présent Protocole.

L'expression « législation nationale » utilisée dans le texte de l'instrument et dans les commentaires qui s'y réfèrent correspond à la terminologie utilisée dans le Protocole additionnel et dans le Protocole n° 2. La législation nationale est constituée de l'intégralité des dispositions constitutionnelles et législatives de l'Etat intéressé, c'est-à-dire des textes législatifs adoptés par les autorités nationales, régionales ou locales, ainsi que de leurs dispositions exécutives comme les règlements et les arrêtés, mais aussi du droit communautaire européen si l'Etat impliqué est membre de l'Union européenne. De plus, il est indiqué qu'aucun GEC ne peut être constitué en dehors d'un Etat membre du Conseil de l'Europe, Partie au présent Protocole.

L'appellation « Groupements eurorégionaux de coopération » (GEC) reflète le fait que la participation à la coopération transfrontalière et interrégionale par les collectivités et autorités locales et régionales établies sur une base territoriale et d'autres établissements de droit public ou privé, se fait dans le but de créer des réseaux eurorégionaux durables, mais non de nouvelles entités territoriales.

L'article 2 dispose, dans un souci de sécurité juridique et de simplicité, que le GEC est obligatoirement doté de la personnalité juridique , ce qui n'est pas le cas de la disposition correspondante du Protocole additionnel. Le droit applicable à l'accord instituant le GEC et à ses activités est le droit interne de l'Etat dans lequel il a son siège. Dans un certain nombre de situations, le droit d'autres Etats est également applicable.

Le paragraphe 2 prévoit que le GEC dispose de la capacité juridique la plus large accordée aux personnes morales dans les Etats membres où il est établi . Cette capacité juridique est choisie par les membres lors de l'établissement du GEC.

Le paragraphe 3 indique qu'il appartient aux membres du GEC de choisir la catégorie de personne morale qui répond à leurs besoins, en fonction des possibilités offertes par le droit de l'Etat dans lequel le GEC a son siège.

Le paragraphe 4 établit le principe de l'autonomie budgétaire, et le paragraphe 5 énumère de manière non exhaustive les autres capacités juridiques qui sont nécessaires au fonctionnement de tout organe doté de la personnalité juridique.

L'article 3 énumère les catégories de membres potentiels d'un GEC, créé en premier lieu par et pour les collectivités ou autorités territoriales des Etats . Cette disposition inclut aussi les Etats membres proprement dits, si l'une au moins de leurs collectivités ou autorités territoriales est aussi membre.

Les autres personnes morales qui peuvent être membres comprennent les entités créées spécifiquement pour satisfaire un but d'intérêt général, autre qu'industriel et commercial, à condition que leur activité soit financée en majorité par l'Etat, une collectivité ou autorité territoriale, ou un tel établissement, ou que la gestion soit contrôlée par ces derniers.

Le paragraphe 2 constitue une « clause d'ouverture » permettant aux collectivités ou autorités territoriales d'un Etat non Partie au présent protocole de participer à l'établissement d'un GEC ou devenir membres de celui-ci.

Ceci n'est possible que si les collectivités ou autorités territoriales relèvent d'un Etat non partie qui a une frontière commune avec un Etat partie qui est ou sera l'Etat de siège du GEC, et que ces deux Etats signent un accord à cet effet.

Cet accord vise à rendre possible l'adhésion de ces nouveaux membres.

Le paragraphe 3 s'explique par le fait que les instruments juridiques du Conseil de l'Europe voient la coopération territoriale et fonctionnelle comme l'objectif principal des collectivités ou autorités territoriales puisque les missions qu'elles remplissent ont pour but de répondre à l'intérêt général de leurs populations. Cependant, d'autres personnes morales poursuivant un but d'intérêt général peuvent être membres. Pour éviter que ces organisations mues par des intérêts particuliers prennent le pas sur les collectivités ou autorités territoriales dans les processus d'élaboration de politiques et de prise de décisions au sein des GEC, ce paragraphe indique clairement que les collectivités ou autorités territoriales des Parties détiennent la majorité des voix du GEC et en conservent donc le contrôle.

L'article 4 précise qu'en vertu du paragraphe 1, un GEC doit résulter d'un accord unanime et écrit de ses membres fondateurs.

Le paragraphe 2 a pour but de garantir que les membres potentiels respectent toutes les procédures et obligations que leur impose leur droit national, assurant ainsi qu'ils sont pleinement autorisés à participer au GEC.

Selon le paragraphe 3, l'accord doit préciser les caractéristiques essentielles, et donc obligatoires, du GEC, à savoir la liste des membres, le nom, le siège, la durée, l'objectif et les missions, ainsi que le champ d'application géographique. En outre, les membres d'un GEC peuvent être responsables conjointement et, si la responsabilité d'au moins un membre est limitée à cause du droit interne selon lequel il est établi, le nom du GEC comprendra le mot « limité ». La responsabilité des autres membres du GEC sera également déterminée selon leur droit interne.

Conformément au paragraphe 4, les collectivités ou autorités territoriales sont tenues d'informer leurs autorités nationales ou de les aviser dans les formes prescrites de leur souhait de fonder un GEC ou de devenir membres d'un GEC existant ou, le cas échéant, d'obtenir leur autorisation pour ce faire. Les autorités centrales, dûment informées, peuvent avoir recours à leurs instruments de contrôle nationaux pour contrôler la légalité ou la constitutionnalité d'un projet d'accord. Chaque Etat dispose du droit de désigner, dès le stade de la ratification, toutes les catégories de collectivités ou d'autorités territoriales et d'établissements de droit public ou privé qu'il entend exclure du champ d'application du présent Protocole. D'ailleurs, dans la plupart des pays, l'ordre constitutionnel impose aux collectivités régionales ou locales d'obtenir un accord préalable pour ce type d'activités.

Dans certains Etats, cependant, il se peut que ces obligations (information, notification, autorisation préalable) ne soient pas applicables. Selon le paragraphe 6, ces Etats peuvent déposer une déclaration au moment de la ratification ou plus tard, précisant leur intention de ne pas se prévaloir de ces dispositions, soit de manière générale, soit pour certaines catégories de collectivités ou autorités territoriales ou pour certains types de coopération.

Le paragraphe 5 est une clause de protection de l'ordre public et des intérêts politiques de l'Etat.

L'obligation d'enregistrement ou de publication qui figure au paragraphe 7 est gage de sécurité juridique, et de transparence du fonctionnement des établissements publics tels que les collectivités ou autorités territoriales. L'enregistrement ou la publication doit respecter la pratique juridique des Etats intéressés. Pour les accords portant création d'établissements de droit public, il peut s'agir de la publication au Journal officiel du pays intéressé, tandis que les accords de création d'établissements de droit privé sont généralement enregistrés auprès des autorités administratives ou judiciaires.

Le paragraphe 8 renforce la sécurité juridique en introduisant l'obligation, pour les membres du GEC, d'informer les Etats dont ils relèvent de l'entrée en vigueur de ce dernier.

Ces accords doivent être rédigés dans la langue du pays du siège et dans celles des membres, toutes les versions faisant également foi, de manière à éviter les problèmes de référence à la langue « originale » aux fins d'interprétation et en cas de litiges. Cela n'exclut pas que l'accord soit rédigé dans un nombre plus limité de langues, si les membres en décident ainsi, sous réserve qu'il s'agisse des langues des membres.

L'article 5 indique que les dispositions précisant la structure opérationnelle détaillée du GEC doivent être exposées dans les statuts annexés à l'accord conclu à l'unanimité par les membres fondateurs ; ces statuts font partie intégrante de l'accord.

L'énumération des points qui doivent être réglés par les statuts n'est pas exhaustive: elle fixe seulement les exigences minimales. Le droit applicable aux points devant figurer dans les statuts n'est pas nécessairement celui de l'Etat du siège.

Le paragraphe 2 détermine la langue du texte aux fins de sécurité juridique, conformément aux dispositions de l'article 4, paragraphe 5. La langue de travail n'est pas nécessairement l'une des langues dans lesquelles sont rédigés les statuts ou l'accord.

Le paragraphe 3 indique que les statuts doivent obligatoirement énoncer les règles relatives à la participation au GEC, y compris le retrait de membres et les conséquences qui en découlent. Les cas dans lesquels les membres peuvent se retirer du GEC et les conditions de ce retrait doivent être précisés dans les statuts. Il peut s'agir d'un retrait avec effet immédiat, par exemple lorsque les membres désapprouvent radicalement l'action du GEC et estiment qu'ils ne sont pas en mesure de s'y opposer. Les statuts doivent aussi régir la dissolution du GEC et ses conséquences juridiques.

L'article 6 prévoit, à des fins de sécurité juridique, que tout amendement à l'accord et tout amendement important aux statuts suive la même procédure que celle adoptée pour l'établissement de l'accord et des statuts. Ceci est valable à la fois pour l'obligation d'information, de notification, d'autorisation préalable et de publication.

L'article 7 autorise une flexibilité maximale dans les motifs de création d'un GEC : il peut s'agir de résoudre des problèmes particuliers tels que la prévention des catastrophes, ou de mettre en place une coopération territoriale globale dans tous les domaines de compétence de ses membres potentiels. Les missions d'un GEC peuvent comprendre la mise en oeuvre de programmes de coopération territoriale cofinancés par l'Union européenne, notamment au titre des fonds structurels, ainsi que la gestion de toutes les ressources financières allouées au groupement et l'octroi d'aides financières à des tiers. Cet objectif peut être poursuivi sans que le GEC soit obligé d'adopter les statuts d'un Groupement européen de coopération territoriale (GECT).

Le paragraphe 2 offre également une telle flexibilité quant à la nature des actes juridiques relevant du droit interne de l'Etat où un GEC a son siège, qui peuvent être utilisés par le GEC pour remplir ses missions. En outre, les membres - en application du principe de subsidiarité - doivent faciliter la mise en oeuvre des décisions du GEC là où ce dernier ne dispose pas du pouvoir exécutif nécessaire ou de mécanismes juridiques effectifs pour les faire appliquer.

Le paragraphe 3 fixe les limites en interdisant que les GEC exercent les pouvoirs réglementaires, des compétences législatives, ou adoptent des actes susceptibles d'affecter les droits et libertés des personnes ou qu'ils lèvent des impôts.

Dans les Etats membres, les collectivités ou autorités locales et régionales peuvent être fondées à exercer non seulement leurs compétences « propres », c'est-à-dire leurs compétences exclusives ou partagées en vertu de la répartition constitutionnelle des compétences, mais aussi celles de l'Etat si ces dernières leur ont été déléguées. De manière à éviter la « sous-délégation » sans le consentement de l'autorité première, le paragraphe 4 interdit que les membres autres que les Etats proprement dits délèguent aux GEC l'exercice de compétences appartenant aux autorités centrales.

L'article 8 contient des dispositions prévues à des fins de sécurité juridique. Elles ne comportent aucune règle relative au retrait ou à l'exclusion de membres, ces aspects devant être régis par les statuts conformément au droit interne.

L'article 9 institue un régime détaillé de responsabilités pour toutes les infractions possibles à des actes juridiques par les organes statutaires des GEC ou par les GEC eux-mêmes. Le paragraphe 1 précise que la responsabilité du GEC couvre les dettes de toute nature, et que la responsabilité conjointe de ses membres est engagée lorsque les avoirs du GEC ne suffisent pas à honorer ses engagements.

D'autres membres peuvent aussi limiter leurs responsabilités ; dans le cas où la législation nationale ne le permet pas, l'Etat pressenti pour l'établissement du siège peut s'opposer à cet établissement. La responsabilité limitée couvre le cas de membres qui, en vertu du droit national régissant leur constitution, sont exempts de toute responsabilité.

L'article 10 contient les dispositions concernant le règlement des litiges, éléments nécessaires pour garantir la sécurité juridique à tous les membres et tierces parties participant à des activités de coopération territoriales. Etant donné qu'il n'y a pas de juridiction transnationale susceptible d'être saisie en cas de litige, tout règlement institutionnalisé des litiges doit prévoir des règles pour le choix des juridictions de l'un des Etats membres, ou prévoir des mécanismes d'arbitrage.

Le règlement des litiges doit être effectif et équitable. Les paragraphes 1 et 2 fixent les règles permettant de déterminer les organes et les tribunaux compétents et, par là même, le droit applicable pour statuer sur les litiges entre des membres d'un GEC ou entre un GEC et des tiers, pour autant que les parties impliquées relèvent de la compétence des Etats membres du Conseil de l'Europe, tenus de respecter la démocratie et l'Etat de droit. Le paragraphe 3 définit des mécanismes d'arbitrage, notamment pour les situations où ni le demandeur ni le défendeur ne relève de la compétence d'un Etat membre du Conseil de l'Europe. Les paragraphes 2 et 3 prévoient par conséquent une formule distincte pour les tierces parties qui en sont généralement les bénéficiaires: les organes ou les tribunaux compétents en cas de litige avec une tierce partie sont, en principe, ceux de l'Etat dans lequel la tierce partie réside ou a son siège, sous réserve qu'ils relèvent de la compétence d'un Etat membre du Conseil de l'Europe. Toutefois, la première phrase du paragraphe 3 permet également, par exception à ce principe, la conclusion d'un accord d'arbitrage lorsque les parties en conviennent à l'avance. La conclusion préalable d'un accord d'arbitrage est une obligation imposée aux GEC dans leurs rapports avec les tierces parties, lorsque celles-ci ne résident pas, ou n'ont pas leur siège dans un Etat membre du Conseil de l'Europe.

L'article 11 énumère à des fins de sécurité juridique tous les types de contrôle auxquels un GEC peut être soumis en vertu de la législation des Etats Parties au présent protocole. Par conséquent, les actes d'un GEC sont soumis au même type de surveillance et contrôle administratif et juridictionnel que celui applicable aux personnes juridiques dans l'Etat où il a son siège. De plus, cette surveillance et ce contrôle administratif et juridictionnel implique que le GEC est tenu de fournir aux autorités compétentes toutes les informations nécessaires à l'exercice de leurs fonctions de contrôle.

De même, les actes des collectivités ou autorités territoriales membres d'un GEC restent soumis à la surveillance et au contrôle administratif et juridictionnel prévu par le droit interne qui leur est applicable. Ces dispositions ont pour but de réaffirmer les dispositions de la Convention-cadre de Madrid et de l'article 6 de son protocole additionnel.

Le paragraphe 4 réaffirme une clause générale de sauvegarde protégeant les Etats contre les activités du GEC contraires à l'ordre public ou aux intérêts fondamentaux des Etats dans lesquels il opère. En cas de décision négative des autorités ou organes compétents de l'Etat intéressé, un recours judiciaire est possible.

Le paragraphe 5 prévoit la possibilité de dissolution lorsque le GEC agit en dehors de ces missions.

L'article 12 régit les conditions requises pour l'audit financier de la gestion d'un GEC. La référence à la « législation nationale » du paragraphe 1 s'applique nécessairement aux règlements administratifs et techniques, dont le statut n'est pas forcément législatif, mais dont le respect est obligatoire. Le paragraphe 1 fait obligation à l'Etat qui procède à des audits d'en informer tous les Etats intéressés, à des fins de sécurité juridique.

En particulier, le paragraphe 2 indique que les audits financiers peuvent être effectués, non seulement par les organes d'audit créés en vertu du droit interne de l'Etat où le GEC a son siège, mais aussi par d'autres Etats dans lesquels le GEC intervient.

Pour ce qui est des règles d'audit, les Etats membres d'un GEC appliqueront les règles prévues par leur législation nationale, qui peuvent reconnaître les règles d'audit acceptées sur le plan international ou les règles du Conseil de l'Europe.

L'article 13 a pour but de préciser que les Parties doivent prendre les mesures nécessaires à l'application du présent protocole, même si aucun délai n'est fixé pour l'adoption de ces mesures. Pour faciliter l'élaboration des législations nationales applicables aux GEC, un modèle de législation, que les Parties pourront utiliser si elles le souhaitent est annexé au protocole. Il est expressément indiqué que cette annexe est facultative, et qu'elle pourra être utilisée en l'état ou adaptée en tout ou en partie. L'annexe ne constitue pas une interprétation authentique du présent protocole. En cas de litige, les tribunaux restent libres de statuer sur la conformité de la législation interne au présent Protocole, même lorsque l'annexe a été copiée ou intégrée.

L'article 14 a pour but d'informer les collectivités ou autorités territoriales des mesures d'application prises pour leur permettre de décider si elles souhaitent ou non créer un GEC, ou en devenir membres. La notification faite au Secrétaire général et, l'information transmise aux autres Parties leur fournira les renseignements nécessaires sur la législation en vigueur dans d'autres Etats, et permettra à des partenaires potentiels de se décider à créer un GEC ou à en devenir membres. Enfin, les informations relatives à l'étendue, à la composition, aux statuts des GEC qui auront été institués pourront s'avérer très utiles pour d'autres parties et pour le grand public.

L'article 15 vise à protéger la liberté d'action des Parties.

L'article 16 permet aux Etats d'indiquer quels types de collectivités ou autorités territoriales ou d'autres personnes morales poursuivant un but d'intérêt général n'ont pas la possibilité, en vertu de leur législation nationale, de faire partie d'un GEC.

L'article 17 dispose qu'étant donné que l'une des difficultés pour la coopération territoriale identifiées dans les dispositions préalables est la diversité des législations nationales, l'ensemble des dispositions du présent protocole doit être considéré comme la réglementation minimale requise pour surmonter cet obstacle. De plus, les règles détaillées figurant dans l'annexe sont facultatives ; en conséquence, il n'est pas nécessaire de prévoir des réserves.

L'article 18 vise à une interprétation harmonisée entre les différents instruments juridiques du Conseil de l'Europe en matière de coopération transfrontalière.

L'article 19 précise que seules les Parties à la Convention-cadre de Madrid peuvent être Parties au présent Protocole.

Enfin, les articles 20 à 22 , énonçant les conditions d'adhésion, de dénonciation et de modification du présent texte, sont des dispositions standards qui se conforment à la pratique juridique du Conseil de l'Europe.

CONCLUSION

Depuis la signature du présent accord en 2009 par neuf Etats membres du Conseil de l'Europe, seuls quatre de ces Etats l'ont ratifié 2 ( * ) . Il convient donc que la France le ratifie à son tour, d'autant qu'elle a déjà conclu, depuis 1993, plusieurs accords bilatéraux ou multilatéraux visant un but similaire.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie sous la présidence de M. Jean-Claude Peyronnet, vice-président, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a procédé à l'examen du présent projet de loi le 12 décembre 2012.

Suivant l'avis du rapporteur, la commission a adopté le projet de loi.

Elle a également proposé qu'il fasse l'objet d'une procédure d'examen simplifié en séance publique.

ANNEXE I : PRÉSENTATION DU CONSEIL DE L'EUROPE

Le Conseil de l'Europe est la plus ancienne organisation intergouvernementale européenne et celle qui regroupe le plus de pays d'Europe: 47 États membres, représentant plus de 800 millions d'Européens . Il est totalement indépendant de l'Union européenne, mais collabore avec elle dans certains domaines. Les 27 États membres de l'Union européenne sont membres du Conseil de l'Europe. Il oeuvre principalement pour la sauvegarde des Droits de l'Homme et pour les valeurs démocratiques. Le Conseil de l'Europe est composé de deux organes : le Comité des Ministres et l'Assemblée parlementaire, ainsi que de trois institutions : la Cour Européenne des Droits de l'Homme, le Commissaire aux Droits de l'Homme et le Congrès des Pouvoirs Locaux et Régionaux. Le Secrétaire Général dirige et coordonne les activités de l'Organisation.

ANNEXE II : LES ETATS MEMBRES DU CONSEIL DE L'EUROPE

ANNEXE III : SIGNATURES ET RATIFICATIONS DU PRÉSENT TEXTE

Protocole n° 3 à la Convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière

des collectivités ou autorités territoriales relatif aux Groupements eurorégionaux de coopération (GEC)
STCE no. : 206

Traité ouvert à la signature des Etats signataires

du Traité STE 106 et à l'adhésion des Etats membres adhérents au Traité STE 106

Ouverture à la signature

Entrée en vigueur

Lieu : Utrecht
Date : 16/11/2009

Conditions : 4 Ratifications.
Date : 1/3/2013

Situation au 4/12/2012

Etats membres du Conseil de l'Europe

Etats

Signature

Ratification

Entrée en vigueur

Renv.

R.

D.

Albanie

Allemagne

16/11/2009

8/11/2012

1/3/2013

Andorre

Arménie

18/3/2010

Autriche

Azerbaïdjan

Belgique

16/11/2009

Bosnie-Herzégovine

Bulgarie

Chypre

8/9/2011

X

Croatie

Danemark

Espagne

Estonie

Finlande

France

16/11/2009

Géorgie

Grèce

Hongrie

Irlande

Islande

Italie

Lettonie

Etats

Signature

Ratification

Entrée en vigueur

Renv.

R.

D.

L'ex-République yougoslave de Macédoine

Liechtenstein

Lituanie

16/11/2009

Luxembourg

21/4/2010

Malte

Moldova

Monaco

Monténégro

16/11/2009

Norvège

Pays-Bas

16/11/2009

Pologne

Portugal

République tchèque

Roumanie

Royaume-Uni

Russie

8/6/2012

Saint-Marin

Serbie

Slovaquie

Slovénie

16/11/2009

6/9/2011

1/3/2013

X

Suède

Suisse

6/12/2010

25/10/2011

1/3/2013

Turquie

Ukraine

7/11/2011

20/8/2012

1/3/2013

Etats non membres du Conseil de l'Europe

Nombre total de signatures non suivies de ratifications :

9

Nombre total de ratifications/adhésions :

4

Renvois :
a.: Adhésion - s.: Signature sans réserve de ratification - su.: Succession - r.: signature "ad referendum".
R.: Réserves - D.: Déclarations

Source : Bureau des Traités sur http://conventions.coe.int/


* 1 Voir Annexe n° I

* 2 Voir Annexe III

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